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LE COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DU TADJIKISTAN

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd’hui, le rapport présenté par le Tadjikistan sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant ce rapport, M. Yusuf Rahmon, Procureur général du Tadjikistan, a indiqué que pour donner effet aux dispositions de la Convention et aux recommandations du Comité, le pays avait notamment adopté une stratégie nationale de promotion des femmes, une loi sur la lutte contre la traite des êtres humains et l’assistance aux victimes, ainsi qu’un plan intitulé « Formation et sélection de femmes compétentes en vue de leur affectation à des postes de direction de l’administration tadjike pour la période 2017-2022 ».

Le Tadjikistan a adopté une définition de la discrimination conforme à celle contenue dans la Convention, a poursuivi M. Rahmon, avant d’ajouter que le Code pénal incriminait la discrimination directe et indirecte et que le pays envisageait d’adopter une loi distincte contre la discrimination. Il a aussi indiqué que le Tadjikistan avait ratifié le Protocole facultatif à la Convention instaurant une procédure de plainte devant le Comité.

Le Tadjikistan s’est efforcé de mettre en place des conditions propices à la participation des femmes, a ajouté le Procureur général. Ainsi, un quota de femmes est-il imposé dans les concours administratifs et les femmes représentent 23% des fonctionnaires et 17% des cadres de l’administration, a-t-il fait valoir. En outre, l’accès égalitaire des femmes et des filles à l’éducation est garanti par la Constitution, a souligné le Procureur général.

La délégation tadjike était également composée, entre autres, de M. Jamshed Khamidov, Représentant permanent du Tadjikistan auprès des Nations Unies à Genève; du Médiateur pour les droits de l’homme; du chef du Département des garanties de droits de l’homme auprès du Mécanisme exécutif du Président de la République; de la directrice de l’Agence des statistiques; et de la présidente du Commission de la femme et de la famille.

La délégation a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s’agissant notamment de la lutte contre les violences sexistes et les stéréotypes; des apatrides; de la traite de personnes; de la réduction de la pauvreté; de la représentation des femmes; des questions de santé, d’éducation et d’emploi; des femmes rurales; des mariages; ou encore de la situation des femmes détenues.

Au cours du dialogue, une experte a félicité le Tadjikistan d’avoir ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, mais a regretté les restrictions légales qui, au Tadjikistan, entravent les activités de la société civile. Une autre experte a espéré que le Tadjikistan accélérerait les travaux visant l’adoption d’une loi globale contre la discrimination et a insisté sur l’importance d’organiser le système judiciaire pour faire en sorte que les lois soient bien comprises et donc appliquées.

Une autre experte a regretté qu’aucune mesure temporaire spéciale ne vienne, au Tadjikistan, appuyer les droits des femmes rurales ou encore la participation des femmes à la vie politique. A par ailleurs été déplorée la ségrégation dont sont victimes les femmes sur le marché de l’emploi.

Une experte a fait observer que la traite des êtres humains demeurait problématique au Tadjikistan, s’inquiétant que des fonctionnaires eux-mêmes semblent s’y livrer.

Des préoccupations ont en outre été exprimées face à la forte progression du VIH/sida au Tadjikistan et face aux violences et à l’ostracisme dont semblent être victimes les femmes infectées. Une experte a dénoncé l’homophobie qui semble régner au sein de la police du Tadjikistan. Ont par ailleurs été dénoncées les conditions déplorables dans lesquelles les femmes sont détenues dans les prisons tadjikes.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Tadjikistan et les rendra publiques à l’issue de la session, le 9 novembre prochain.


Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport de l’ex-République yougoslave de Macédoine (CEDAW/C/MKD/6).


Présentation du rapport

Le Comité est saisi du sixième rapport périodique du Tadjikistan (CEDAW/C/TJK/6), ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter soumise par le Comité.

Présentant le rapport de son pays, M. YUSUF RAHMON, Procureur général du Tadjikistan, a assuré de la volonté de son pays de collaborer avec les membres du Comité, dont le Tadjikistan apprécie hautement les recommandations.

M. Rahmon a ensuite précisé que le Tadjikistan, pour donner effet aux dispositions de la Convention et aux recommandations du Comité, avait notamment adopté une stratégie nationale de promotion des femmes, une loi sur la lutte contre la traite des êtres humains et l’assistance aux victimes et un plan intitulé « Formation et sélection de femmes compétentes en vue de leur affectation à des postes de direction de l’administration tadjike pour la période 2017-2022 ».

Le Procureur général a aussi indiqué que le Tadjikistan avait ratifié le Protocole facultatif à la Convention instaurant une procédure de plainte devant le Comité. Le pays a également apporté des modifications à son Code foncier pour assurer l’accès égal des femmes à la terre. Le Gouvernement a aussi organisé plus de trois cents activités de sensibilisation des fonctionnaires au contenu de la Convention.

Le Tadjikistan a adopté une définition de la discrimination conforme à celle contenue dans la Convention, a poursuivi M. Rahmon, avant d’ajouter que le Code pénal incriminait la discrimination directe et indirecte et que le pays envisageait d’adopter une loi distincte contre la discrimination.

En 2014, le Gouvernement tadjike a créé 112 postes supplémentaires au profit de la Commission de la femme et de la famille, laquelle a présenté une douzaine de projets dont ceux relatifs à la lutte contre la violence familiale et à l’application de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. Le Gouvernement a par aiulleurs décidé en 2014 d’approuver par ordonnance la Stratégie nationale de promotion de la femme au Tadjikistan pour la période 2015-2020.

S’agissant des mesures temporaires spéciales, a été mis en place un quota réservant chaque année à des jeunes filles des places dans l’un des établissements d’enseignement supérieur du pays: 400 en ont déjà profité. En outre, plus d’une centaine de jeunes femmes nouvellement entrées dans la fonction publique ont bénéficié d’une revalorisation de leur rémunération.

Plusieurs stratégies nationales contiennent des mesures visant à éliminer les stéréotypes et la violence sexistes, a d’autre part fait valoir M. Rahmon. Les médias diffusent des informations sur l’importance de l’enregistrement des mariages; le Code pénal incrimine toute mesure visant à empêcher les filles de recevoir une éducation générale; les représentants du clergé qui célèbrent des mariages de mineurs sont sanctionnés; et la bigamie et la polygamie sont interdites, a indiqué le Procureur général du Tadjikistan. La loi de 2013 sur la prévention de la violence familiale et le Code pénal incriminent toutes les formes de violence contre toutes les femmes, y compris celles qui sont mariées dans des unions polygames, a-t-il souligné. Il a assuré que les autorités tadjikes récoltaient des données statistiques sur la répression de la violence à l’égard des femmes.

Le harcèlement sexuel sans contrainte est considéré comme du « hooliganisme »; avec contrainte, il est passible des peines prévues par le Code pénal, a précisé M. Rahmon. L’incitation à la prostitution et le proxénétisme sont également sanctionnés par le Code pénal; quant aux personnes qui sollicitent des services sexuels de la part de personnes prostituées, elles sont sanctionnées au plan administratif. L’an dernier, les autorités ont engagé des procédures contre 201 personnes soupçonnées de traite des êtres humains.

Le Tadjikistan s’est efforcé de mettre en place des conditions propices à la participation des femmes, a ajouté le Procureur général. Ainsi, un quota de femmes est-il imposé dans les concours administratifs et les femmes représentent 23% des fonctionnaires et 17% des cadres de l’administration, a-t-il fait valoir.

L’accès égalitaire des femmes et des filles à l’éducation est garanti par la Constitution, a en outre rappelé le Procureur général, avant de préciser que les filles au Tadjikistan représentent 49,7% de l’effectif scolaire et que de nombreuses filles poursuivent des études supérieures dans les établissements de formation technique intermédiaire.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Une experte a demandé si le Tadjikistan allait introduire une définition de la discrimination directe et indirecte dans le droit national. Elle a en outre voulu savoir s’il existait un mécanisme pour évaluer l’efficacité des mesures prises par le Tadjikistan contre la discrimination envers les femmes.

Une experte a félicité le Tadjikistan d’avoir ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention et a insisté sur le fait que la défense des droits des femmes était une démarche essentielle de la réalisation des Objectifs de développement durable. L’experte s’est interrogée sur la visibilité qui sera donnée, auprès de la société civile, aux conclusions du Comité au terme de l’examen du présent rapport. L’experte a regretté les restrictions légales qui, au Tadjikistan, entravent les activités de la société civile, en particulier pour ce qui est des organisations qui défendent les droits des femmes. Elle a aussi mis en garde contre la révision de la loi sur les avocats, qui pourrait donner le sentiment que l’on cherche à réduire les droits de la défense.

Une autre experte a relevé que le Tadjikistan avait adopté en 2014 un plan d’action pour appliquer les recommandations adressées au pays à l’issue de l’examen de son précédent rapport; mais il est dit que des obstacles se sont opposés à la réalisation de ce plan, a-t-elle observé.

Une experte a espéré que le Tadjikistan accélérerait les travaux visant l’adoption d’une loi globale contre la discrimination. Elle a insisté sur l’importance d’organiser le système judiciaire pour faire en sorte que les lois soient bien comprises et donc appliquées.

Une experte a relevé que la Commission de la femme et de la famille avait vu ses moyens renforcés de manière spectaculaire, mais s’est interrogée sur les compétences des membres de cette instance et sur les effets de son action. Elle a prié la délégation de dire si le Médiateur pour les droits de l’homme pouvait se saisir de plaintes de femmes s’estimant victimes de discrimination.

Une autre experte a regretté qu’aucune mesure temporaire spéciale ne vienne, au Tadjikistan, appuyer les droits des femmes rurales ou encore la participation des femmes à la vie politique. Elle a rappelé que les mesures temporaires spéciales visent à assurer l’égalité des chances dans tous les domaines de la vie, en remédiant à des situations injustes.

Une experte s’est enquise des mesures prises contre la violence faite aux femmes d’une manière générale, au-delà de celle commise dans le seul cadre familial. L’experte a insisté sur l’importance de former les juges qui seront chargés de faire appliquer les lois interdisant la discrimination et la violence sexistes.

Une experte a fait observer que la traite des êtres humains demeurait problématique au Tadjikistan. Elle a pointé des difficultés d’application de la loi de 2014 en la matière, la loi complémentaire qui devait traiter du soutien aux victimes n’ayant pas été adoptée. D’autre part, il semble que des fonctionnaires eux-mêmes s’adonnent à la traite des êtres humains, un problème symptomatique de la corruption endémique dont certaines sources estiment que le Tadjikistan est affligé, a ajouté l’experte. Elle a par ailleurs souhaité savoir si le Tadjikistan envisageait de dépénaliser la prostitution.

Une experte a regretté que la représentation des femmes dans la vie publique et politique tadjike soit faible et qu’il n’existe pas, dans ce domaine, de mesures d’incitation en direction des partis politiques. L’experte a recommandé que les propos stéréotypés et méprisants envers les femmes dans les discours politiques fassent l’objet d’une surveillance.

Une experte s’est inquiétée du taux élevé d’abandon scolaire au niveau du secondaire et a voulu savoir ce qui était fait pour réintégrer les filles dans le circuit scolaire. Elle a relevé qu’une seule femme au Tadjikistan est titulaire d’un doctorat dans une matière technique. L’experte s’est interrogée sur l’existence de quotas de femmes à l’entrée à l’université.

Une autre experte a déploré la ségrégation dont sont victimes les femmes sur le marché de l’emploi, d’une part en raison des stéréotypes qui conditionnent leurs choix professionnels et, d’autre part, en raison du refus des autorités de supprimer l’interdiction qui leur est faite d’occuper certains postes jugés inadaptés ou dangereux pour elles. L’experte a aussi regretté les écarts salariaux qui existent entre les sexes au détriment des femmes.

Une experte a pris note des mesures – décrites aux paragraphes 83 et suivants du rapport – destinées à améliorer l’accès des femmes et des filles à la santé, mesures qui auraient permis de réduire fortement la mortalité maternelle. Cependant, a poursuivi l’experte, le Comité est préoccupé par la forte progression du VIH/sida au Tadjikistan. En particulier, les femmes et les filles infectées par le VIH seraient, selon des informations, victimes non seulement de violences domestiques, mais aussi d’un ostracisme médical qui les empêche d’accéder aux soins et même à la maternité, a déploré l’experte.

La même experte a prié la délégation de dire si le Gouvernement avait adopté un plan de santé mentale visant, en particulier, la désinstitutionalisation des personnes atteintes de troubles mentaux.

Une experte a dénoncé l’homophobie qui semble régner au sein de la police du Tadjikistan et qui entraîne, selon elle, des comportements inacceptables à l’encontre des femmes LBTI. Elle a en outre dénoncé les conditions déplorables dans lesquelles les femmes sont détenues dans les prisons tadjikes. Les femmes détenues ne bénéficient d’aucune mesure de réinsertion, a-t-elle également regretté.

Les filles handicapées doivent pouvoir vivre à l’abri de la violence sexuelle et bénéficier de mesures de soutien en matière d’accès à l’emploi, a ajouté cette même experte.

Réponses de la délégation

Le Tadjikistan a pour objectif de se doter d’un mécanisme efficace de prévention de la violence sexiste et en particulier de la violence au sein de la famille, a fait savoir la délégation.

La délégation a indiqué que les tribunaux avaient condamné 23 personnes en 2014, dont six femmes, pour des faits de violences contre des femmes; en 2016, 62 personnes; et, en 2017, 69 personnes. La justice se prononce, en la matière, sur la base de lois conformes au droit international, a assuré la délégation.

Le Tadjikistan a ouvert 33 centres d’accueil d’urgence pour femmes et enfants victimes de violence, et créé quatorze postes d’inspecteurs chargés de prévenir la violence familiale, a ajouté la délégation.

Les policiers sont formés à la prévention de la violence familiale, non seulement à l’Académie de police mais aussi dans le cadre de la formation continue des fonctionnaires, a ensuite précisé la délégation. Les policiers sont aussi informés des services médico-sociaux disponibles pour les victimes.

Plus de 2000 plaintes pour violence familiale ont été enregistrées par les commissariats de quartiers, entraînant 172 actions pénales, a indiqué la délégation.

La stratégie contre les stéréotypes sexistes et la violence contre les femmes est appliquée par l’ensemble des ministères, a souligné la délégation.

La délégation a par ailleurs fait état des travaux réalisés par plusieurs commissions chargées de passer en revue la loi et les règlements en vue d’éliminer les stéréotypes et les dispositions discriminatoires contre les femmes. La Commission de la femme et de la famille collabore avec trente-trois organisations non gouvernementales actives dans ce domaine, a poursuivi la délégation. Cette Commission donne notamment des avis au Gouvernement dans le cadre de l’élaboration des projets de loi.

La délégation a ensuite souligné que la loi interdisait et prévenait toute forme de discrimination basée sur le sexe. La politique nationale dans ce domaine engage notamment les organisations de la société civile et le Gouvernement à inciter les femmes à travailler dans la fonction publique, a-t-elle indiqué.

Les autorités ont également pour objectif d’éliminer la discrimination contre les femmes rurales, tout en assurant leur participation à la vie économique, y compris dans le secteur agricole, a ajouté la délégation. Plusieurs mesures ont été prises à cette fin, dont la mise en œuvre est contrôlée par le biais d’indicateurs sexospécifiques. En 2017, 19,2% des 31 600 exploitations agricoles que compte le pays étaient dirigées par des femmes, ce qui constitue une hausse considérable par rapport à 2012: la délégation tadjike a vu là un effet des mesures prises par son Gouvernement.

En 2015, a d’autre part indiqué la délégation, le Tadjikistan a adopté un plan d’action pour renforcer le rôle de la femme au sein de la société. Des mesures ont notamment été prises pour favoriser l’entrepreneuriat féminin, en particulier par l’octroi de subventions (à la création d’entreprises par les femmes). Le Tadjikistan a aussi lancé un programme de réduction des inégalités sociales aligné sur les Objectifs de développement durable, a dit la délégation.

Pour assurer le suivi des mesures destinées à garantir l’égalité des sexes, le Tadjikistan récolte – avec l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement – des statistiques précises et ventilées, publiées en principe chaque semestre. Le Tadjikistan publie également des recueils d’indicateurs clés en matière de santé et de travail, qui permettent d’établir des comparaisons par tranches d’âges et par sexe. Les autorités sont en train d’améliorer la collecte de données sexospécifiques avec l’aide d’ONU Femmes, a précisé la délégation.

S’agissant de la place des minorités, la délégation a notamment expliqué que le dernier recensement (2010) montrait que cent nationalités sont présentes au Tadjikistan, dont 84% de Tadjiks. En 2017, le nombre total de fonctionnaires était de 18 900, dont 92% de Tadjiks.

S’agissant du Médiateur, la délégation a indiqué que cette institution comptait parmi ses priorités l’égalité entre les sexes et la lutte contre la discrimination envers les femmes; l’institution est également active dans la prévention de la violence sexiste, a-t-elle ajouté. Les citoyens qui contactent le Médiateur sont à 52% des femmes, a-t-elle précisé. Cette année, trois plaintes ont été reçues concernant des problèmes de violence familiale: le Médiateur collabore avec le Ministère de l’intérieur pour traiter ces plaintes, le travail du Médiateur lui-même étant davantage orienté vers la prévention du problème. La délégation a insisté sur le rôle actif de la société civile s’agissant de ces questions.

D’après le Ministère de l’intérieur, 105 affaires de traite de personnes ont été portées devant la justice entre 2016 et 2018, la majorité des victimes étant des femmes, a poursuivi la délégation. La loi contre la traite prévoit des réparations pour les victimes, a-t-elle souligné, avant d’ajouter que le Tadjikistan est en train d’amender un certain nombre de textes afin de les harmoniser avec cette loi. Une centaine de victimes ont été prises en charge dans les centres d’accueil financés par les deniers publics, a précisé la délégation.

Le plan national contre la traite des êtres humains contient un ensemble de mesures relatives à la prostitution, laquelle est considérée comme un moteur de la traite, a par ailleurs souligné la délégation. Des mesures de soutien sont prévues pour les travailleurs du sexe, la prostitution elle-même entraînant seulement des sanctions administratives, a-t-elle ajouté.

La délégation a fait valoir que le taux de pauvreté au Tadjikistan a considérablement chuté, passant de 83% en 2000 à 29,5% aujourd’hui. Plus de cent mille familles pauvres reçoivent une aide financière ciblée, dont 54% de familles dirigées par des femmes, a-t-elle précisé.

Conscientes du déficit de représentation des femmes dans les postes à responsabilité, les autorités tadjikes organisent à leur intention des programmes de renforcement des compétences d’encadrement, a poursuivi la délégation. La politique menée par l’État vise la création d’emplois attrayants pour les jeunes femmes, en particulier aux niveaux décisionnels.

La délégation a insisté à plusieurs reprises sur l’importante participation des femmes tadjikes aux activités et compétitions sportives.

Plusieurs questions des experts ayant porté sur la protection accordée aux apatrides qui vivent au Tadjikistan, la délégation a précisé que certains citoyens de l’ancienne URSS restés au Tadjikistan – soit environ 1364 personnes (selon le recensement de 2010), en grande majorité ouzbèkes et kirghizes – n’avaient, en effet, pas reçu de passeport tadjike. Certaines de ces personnes sont parties puis revenues au Tadjikistan. La régularisation de ces apatrides fait actuellement l’objet de négociations politiques, une démarche qui devrait aboutir à la fin de l’année et permettre de leur octroyer des passeports tadjikes, a indiqué la délégation.

La délégation a ensuite indiqué que le Ministère de l’éducation avait mis en place des cours à distance pour permettre aux jeunes de recevoir une instruction secondaire ou professionnelle tout en travaillant: 292 jeunes femmes suivent ces cours. Le programme scolaire contient désormais des matières facultatives telles que l’éthique de la vie familiale, a ajouté la délégation. Il a été précisé que plus de 2500 jeunes femmes ont reçu ces dernières années des bourses d’études secondaires. Vingt-cinq filles et dix garçons ne sont pas scolarisés au Tadjikistan, une situation dont les autorités sont informées et qu’elles s’efforcent de résoudre, a d’autre part fait savoir la délégation.

La délégation a fourni un certain nombre d’informations statistiques sur la parité des sexes à l’école, faisant notamment observer que les filles sont majoritaires dans les salles de classe en zone rurale. Elle a en outre souligné que des places sont réservées aux élèves handicapés dans les établissements de formation générale et technique.

Pour ce qui est des questions de santé, la stabilité (à 3,8 enfants par femme) du taux de fécondité au Tadjikistan explique en partie que de nombreuses femmes restent encore à la maison, a déclaré la délégation. Le Gouvernement s’efforce cependant de favoriser l’emploi des femmes dans les secteurs traditionnels, comme la confection et le secteur agricole.

L’écart de salaires entre les sexes, au détriment des femmes, est réel, a reconnu la délégation. Cela s’explique notamment par les positions hiérarchiquement supérieures qu’occupent les hommes et par le fait que les secteurs d’emploi plutôt féminins renvoient à des postes qui sont traditionnellement moins bien rémunérés. Mais le Tadjikistan espère développer suffisamment le secteur des hautes technologies d’ici à 2030 pour être en mesure d’y employer davantage de femmes, a affirmé la délégation, avant qu’une experte du Comité invite à ce propos le Gouvernement à prendre des mesures pour accompagner les femmes dans cette transition technologique.

Le Gouvernement tadjike mène des programmes et campagnes de prévention du VIH/sida qui intègrent aussi des volets consacrés à l’élimination de la stigmatisation des personnes vivant avec la maladie, a poursuivi la délégation. Elle a en outre assuré que le Tadjikistan n’interdisait pas à une femme séropositive d’adopter un enfant ou d’en être tutrice. Les personnes séropositives ont pleinement accès aux services de santé, sans aucune discrimination, a ensuite insisté la délégation. Le Tadjikistan compte 10 842 cas déclarés de personnes infectées par le VIH, dont 3692 femmes; la majorité des infections résultent de relations sexuelles non protégées, a précisé la délégation.

Les femmes ont accès aux services de planification familiale, ce qui contribue à diminuer le nombre des grossesses non désirées et d’avortements, a par ailleurs indiqué la délégation. En outre, un travail d’information sur les droits des femmes en matière de santé sexuelle et procréative est mené auprès de la population, a-t-elle souligné.

Une experte s’étant enquise des mesures prises pour éradiquer les mariages précoces ou forcés ainsi que les tests de virginité, la délégation a indiqué que l’âge du mariage avait été porté de 17 à 18 ans. Neuf jeunes filles de moins de 18 ans ont été mariées en 2018, a-t-elle ajouté, avant d’indiquer que les autorités ont organisé plus de 8000 rencontres pour sensibiliser la population à la nécessité de respecter l’âge minimal du mariage. La délégation a en outre assuré qu’il n’existait pas au Tadjikistan de test de virginité obligatoire avant le mariage.

Si le mariage entre personnes du même sexe n’est pas légalisé au Tadjikistan, il n’empêche que toute violence contre une personne LGBTI est poursuivie par les autorités au même titre que tout autre acte de même nature, a par ailleurs affirmé la délégation.

La délégation a assuré que les autorités tadjikes consacraient des sommes conséquentes à la réinsertion professionnelle de femmes libérées de prison. La Commission de la femme visite régulièrement le seul centre de détention du pays réservé aux femmes, a-t-elle indiqué, avant de préciser que les femmes condamnées à une peine de prison et qui ont des charges familiales peuvent bénéficier d’aménagements de peine.

La délégation du Tadjikistan s’est par ailleurs dite blessée par le jugement d’une experte selon lequel, d’une part, une mentalité patriarcale entraînerait dans ce pays des rapports inégaux entre les sexes et, d’autre part, la police de ce « pays autoritaire » ne considèrerait pas les droits des femmes comme des droits humains fondamentaux. La délégation a assuré que le Tadjikistan était bel et bien régi par l’état de droit.

Remarques de conclusion

M. RAHMON a remercié les membres du Comité pour le caractère constructif et amical de ce dialogue et a insisté sur le fait que le Tadjikistan avait pour objectif la construction d’un état fondé sur le droit et garantissant les libertés et droits fondamentaux des hommes comme des femmes. Le pays entend dans ce cadre renforcer sa collaboration avec le Comité, dont il examinera attentivement les recommandations, a conclu le Procureur général.

MME DALIA LEINARTE, Présidente du Comité, a félicité l’État partie pour ses efforts en vue de donner effet à la Convention et l’a encouragé à prendre toutes les mesures nécessaires pour appliquer les recommandations que formulera le Comité au profit des femmes et des filles du Tadjikistan. La Présidente a attiré l’attention de la délégation sur le fait que le Comité mettrait en avant un certain nombre de points qui demanderont un suivi immédiat de la part du Tadjikistan.


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CEDAW/18/033F