Fil d'Ariane
LE CONSEIL OUVRE LES TRAVAUX DE SA TRENTE-HUITIÈME SESSION EN ENTENDANT UNE MISE À JOUR ORALE DU HAUT-COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME
Le Conseil des droits de l’homme a entamé, ce matin, les travaux de sa trente-huitième session ordinaire en entendant une mise à jour orale du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Zeid Ra’ad Al Hussein, dont le mandat s’achève cet été et qui a été ovationné à la fin de son intervention. Le Conseil a en outre entendu les déclarations de deux hauts dignitaires : le Secrétaire d’État aux affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, M. Boris Johnson, et le Secrétaire général du Comité suprême pour la réalisation et l'héritage du Qatar, M. Hassan Al Thawadi.
Dans sa déclaration, M. Zeid a regretté la faiblesse de la mémoire humaine et le caractère détaché et superficiel de nombreuses discussions de la communauté internationale, à tel point que nombreux sont ceux qui semblent avoir perdu de vue les enjeux fondamentaux. Le nationalisme est « le contraire et l’ennemi des Nations Unies », a-t-il en outre affirmé. Il a ensuite déploré qu’un certain nombre de pays refusent toujours de laisser le Haut-Commissariat accéder à leur territoire.
Le Haut-Commissaire a ensuite évoqué les situations en Syrie, au Myanmar, au Venezuela, au Burundi, au Cachemire, au Nicaragua, au Mexique, en République populaire démocratique de Corée, dans les territoires palestiniens occupés, en Chine, en Turquie, à Bahreïn, dans le Caucase du Sud, au Soudan du Sud, au Cameroun et au Sahara occidental. Il a également évoqué les insuffisances de la coopération d’un certain nombre de pays avec le Haut-Commissariat et ses procédures. M. Zeid a en revanche fait état de progrès réalisés en Éthiopie, en Arménie, en Tunisie, en République de Moldova et en Ouzbékistan, et s’est d’autre part réjoui qu’après sa visite à Tripoli en octobre dernier, la Libye ait accepté la toute première mission d'un titulaire de mandat, à savoir celle du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des personnes déplacées dans leur propre pays. Le Haut-Commissaire a en outre prié le Conseil de prendre note du déploiement de conseillers en droits de l'homme au Bélarus et au Zimbabwe.
M. Zeid a ensuite souligné que « les gens ne perdent pas leurs droits de l'homme parce qu’ils traversent une frontière sans visa », avant de déplorer l'adoption par de nombreux pays de politiques destinées à se rendre aussi inhospitaliers que possible en augmentant les souffrances de nombreuses personnes déjà vulnérables. Dans ce contexte, il s’est dit profondément préoccupé par un projet de loi présenté au Parlement hongrois qui, s'il était adopté, criminaliserait effectivement les personnes qui veillent au respect des droits de l'homme aux frontières et qui fournissent des informations, une aide juridique et plus généralement une assistance aux migrants. Le Haut-Commissaire s’est également dit « profondément préoccupé par les politiques récemment adoptées aux États-Unis qui reviennent à punir les enfants pour les actes de leurs parents ».
Dans sa déclaration devant le Conseil, le Secrétaire d’État britannique, M. Johnson a jugé disproportionné et préjudiciable à la cause de la paix de consacrer un point de l’ordre du jour uniquement à Israël et aux territoires palestiniens occupés. Aussi, a-t-il annoncé que le Royaume-Uni avait l’intention, l’année prochaine, si rien ne change, de voter contre toutes les résolutions présentées au titre de ce point 7 de l’ordre du jour. M. Johnson a ensuite consacré son intervention à l’émancipation et à l’autonomisation des femmes, assurant que le monde serait infiniment plus sûr si toutes les filles pouvaient recevoir au moins douze années d’éducation.
Quant à M. Al Thawadi, il a rappelé que le Qatar allait accueillir la coupe du monde (de football) de la FIFA en 2022. Les interactions interculturelles n’ont jamais été plus aisées qu’aujourd’hui, mais le monde se rapproche néanmoins rapidement du point de non-retour; les amitiés qui caractérisaient le monde sont en péril et les différences idéologiques divisent les nations, a-t-il fait observer. Le sport – et en particulier le football – constituent une plate-forme essentielle d’unification hors de toute considération de croyance ou politique, a-t-il souligné. M. Al Thawadi a ensuite indiqué que le Comité suprême dont il est Secrétaire général avait mis en place des normes de travail rigoureuses, qui sont juridiquement contraignantes et couvrent l’ensemble du cycle des travailleurs étrangers – de leur engagement dans leur pays d’origine jusqu’à la fin de leur contrat de travail.
Ouvrant les travaux de cette session, le Président du Conseil des droits de l’homme, le Slovène Vojislav Šuc, a salué la présence de huit délégués de pays les moins avancés et de petits États insulaires, notamment ceux des Iles Marshall, de Samoa et de Tonga, qui ne disposent pas d’une représentation permanente à Genève. Il a rappelé que cette participation a été rendue possible grâce au Fonds d’affectation spéciale pour l’assistance technique à l’appui de la participation des pays les moins avancés (PMA) et des petits États insulaires en développement (PEID) aux travaux du Conseil et à ses vingt-deux pays donateurs. Le Président du Conseil a par ailleurs mis l’accent sur la politique de « tolérance zéro » qui est celle des Nations Unies, y compris du Conseil, face à toute forme de harcèlement, y compris d’ordre sexuel. M. Šuc a en outre insisté sur le maintien d’un espace libre en vue de la participation active des représentants de la société civile et des institutions nationales des droits de l’homme et a assuré qu’en tant que Président du Conseil, il donnerait suite à toutes les allégations qu’il recevra concernant des actes de représailles et d’intimidation intervenant en rapport avec les travaux du Conseil, de ses mécanismes et de ses procédures.
Le Conseil poursuivait ses travaux en fin de matinée en entamant ses débats interactifs avec l’Expert indépendant sur la protection contre la violence et la discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre et avec le Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association.
Déclarations liminaires
M. VOJISLAV ŠUC, Président du Conseil des droits de l’homme, a salué la présence de huit délégués de pays les moins avancés et de petits États insulaires, notamment ceux des Iles Marshall, de Samoa et de Tonga, qui ne disposent pas d’une représentation permanente à Genève. Il a rappelé que cette participation a été rendue possible grâce au Fonds d’affectation spéciale pour l’assistance technique à l’appui de la participation des pays les moins avancés (PMA) et des petits États insulaires en développement (PEID) aux travaux du Conseil et à ses vingt-deux pays donateurs. C’est donc la première fois que ces pays prennent part à une session ordinaire du Conseil et y feront entendre leur voix.
M. Šuc a ensuite présenté le programme de cette trente-huitième session ordinaire du Conseil, durant laquelle se tiendront quatre réunions-débats, des dialogues interactifs avec vingt-et-un titulaires de mandats au titre des procédures spéciales et avec deux commissions d’enquête, ainsi que treize autres dialogues interactifs et débats généraux.
Le Président du Conseil a par ailleurs mis l’accent sur la politique de « tolérance zéro » qui est celle des Nations Unies, y compris du Conseil, face à toute forme de harcèlement, y compris d’ordre sexuel, annonçant également que toute plainte serait traitée sans délai et encourageant en outre à dénoncer directement à des officiers de la sécurité des Nations Unies tout incident à cet égard. De la même façon, M. Šuc a insisté sur le maintien d’un espace libre en vue de la participation active des représentants de la société civile et des institutions nationales des droits de l’homme, qui s’inscrit du reste dans le mandat du Conseil et est de l’intérêt commun de tous ses membres. Il a assuré qu’en tant que Président de cet organe, il donnera suite à toutes les allégations qu’il recevra concernant des actes de représailles et d’intimidation intervenant en rapport avec les travaux du Conseil, de ses mécanismes et de ses procédures.
M. ZEID RA’AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a présenté ce matin sa dernière mise à jour devant le Conseil des droits de l’homme alors que son mandat s’achève à la fin du mois d’août prochain.
En préambule, M. Zeid a fait part de son étonnement d’entendre, récemment, un responsable des Nations Unies affirmer à un collègue que les droits de l’homme n’étaient « pas universels » et n’étaient qu’un « produit de l’imagination occidentale ». En réalité, a souligné le Haut-Commissaire, la Déclaration universelle des droits de l’homme a été négociée par les même chefs politiques qui ont créé les Nations Unies, et les pays ayant rejoint les Nations Unies à leurs débuts « ne s’estimaient pas, alors, astreints à des valeurs étrangères, occidentales ». La question se pose donc de savoir « pourquoi la Déclaration universelle, de même que l’ensemble du corpus juridique de droits de l’homme adopté après elle, sont victimes de telles attaques de nos jours – non seulement de la part d’extrémistes, comme les takfiris, mais aussi de la part de dirigeants autoritaires, de populistes, de démagogues, de relativistes culturels, de certains universitaires occidentaux et même de fonctionnaires des Nations Unies », a déclaré le Haut-Commissaire.
M. Zeid a fait observer à cet égard que les Nations Unies étaient symptomatiques de la situation internationale. Il a regretté la faiblesse de la mémoire humaine et le caractère détaché et superficiel de nombreuses discussions de la communauté internationale, à tel point que nombreux sont ceux qui semblent avoir perdu de vue les enjeux fondamentaux. « Par exemple, n’est-il pas vrai que, d’un point de vue historique, la force la plus destructrice pour le monde ait été le nationalisme, porté aux extrêmes par des chefs égoïstes et sans scrupules et amplifié par des idéologies de masse opposées aux libertés ? », a interrogé M. Zeid. Les Nations Unies ont été créées pour éviter le retour de ces idéologies et le nationalisme est « le contraire et l’ennemi des Nations Unies », a-t-il affirmé. « Pourquoi donc rester silencieux face à sa résurgence, pourquoi les Nations Unies ne disent-elles rien ? », a demandé le Haut-Commissaire. M. Zeid a rappelé que « la raison d’être des Nations Unies était de protéger la paix, les droits, la justice et le progrès social » et que leurs principes de fonctionnement étaient donc clairs : la paix n’est possible qu’en poursuivant le contraire du nationalisme, lorsque les États travaillent ensemble et pour le bien commun, a-t-il insisté.
Le Secrétariat des Nations Unies travaille de manière collaborative et de manière indépendante des États. Par contraste, « de trop nombreux gouvernements représentés aux Nations Unies tirent dans des directions opposées et feignent de s’engager dans l’effort commun, » ne défendant en réalité que leurs propres intérêts et tirant tout le parti possible des Nations Unies sur un plan politique, sans investir pour assurer le succès de l’Organisation. « L’intensification des attaques contre le système multilatéral et ses règles et en particulier contre le droit international des droits de l’homme augmente le risque de méfaits à une échelle encore plus grande », a mis en garde le Haut-Commissaire.
M. Zeid a ensuite déploré qu’un certain nombre de pays refusent toujours de laisser le Haut-Commissariat accéder à leur territoire. « Cette attitude est un véritable affront pour l’action du Haut-Commissariat », a-t-il souligné. S’il persiste, le refus d’accès peut amener à penser que des violations graves des droits de l’homme sont commises et le Haut-Commissariat envisage alors la possibilité de suivre la situation à distance, comme l’y autorise formellement son mandat, a ajouté le Haut-Commissaire.
Ainsi, en Syrie, le Haut-Commissariat et la Commission d’enquête du Conseil se sont-ils vu refuser l’accès au terrain dans toutes les régions, a regretté M. Zeid. L’autorisation sélective accordée récemment à un Rapporteur spécial, alors que de nombreuses autres demandes sont en suspens depuis longtemps, n’équivaut en rien au respect des résolutions pertinentes du Conseil des droits de l’homme, qui demandent à la Syrie de coopérer pleinement avec le Haut-Commissariat : c’est pourquoi le Haut-Commissariat continuera de surveiller à distance les violations des droits de l’homme commises en Syrie, a indiqué M. Zeid.
Au Myanmar, il existe des indices clairs que des attaques bien organisées, étendues et systématiques continuent de cibler les Rohingyas vivant dans l’État rakhine en tant que groupe ethnique, attaques qu’un tribunal qualifierait peut-être d’actes de génocide, a poursuivi M. Zeid. Le Haut-Commissaire a fait état de nombreuses allégations d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de torture et de traitements inhumains, de viols et d’autres formes de violence sexuelle, de travail forcé, de recrutement d’enfants dans les forces armées et d’attaques disproportionnées lors de conflits entre les forces de sécurité et des groupes armés au Myanmar. Si le Myanmar a déclaré qu’il enquêterait sur ces allégations et punirait les responsables présumés, ses actes à ce jour ne répondent pas aux critères minimaux de crédibilité et d’impartialité, a fait observer M. Zeid.
S’agissant des Rohingyas réfugiés au Bangladesh, M. Zeid a souligné qu’aucun rapatriement ne devrait se faire en l’absence de surveillance étroite des droits de l’homme sur le terrain, dans la région concernée. Vu le refus persistant d’accès, le Haut-Commissariat, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme au Myanmar et la mission d’établissement des faits continueront leur surveillance à distance, a indiqué le Haut-Commissaire.
De même, vu la gravité des violations des droits de l’homme commises au Venezuela, et le refus continu d’y laisser entrer le Haut-Commissariat, ce dernier continuera d’exercer une surveillance et de faire rapport s’agissant de ce pays. À ce sujet, le Haut-Commissariat est fermement convaincu que le Conseil des droits de l’homme devrait créer une commission d’enquête, a déclaré M. Zeid.
S’agissant du Burundi, malgré l’accord du Gouvernement de coopérer avec l’Équipe d’experts mandatée par le Conseil l’an dernier, l’Équipe a été expulsée du pays le mois dernier et n’a pas pu y retourner, a fait savoir M. Zeid. La situation des droits de l’homme ne cesse de se détériorer au Burundi, dans un contexte où le Gouvernement ne cesse de réduire l’espace dévolu à la société civile et a l’intention de réviser la Constitution par voie de référendum, a regretté le Haut-Commissaire.
M. Zeid a d’autre part informé le Conseil qu’il avait, depuis deux ans, entrepris des démarches auprès de l’Inde et du Pakistan s’agissant de la situation dans le Cachemire, des deux côtés de la Ligne de contrôle. Le refus des deux pays d’accorder au Haut-Commissariat un droit de visite sans condition oblige le Haut-Commissariat à procéder à une surveillance à distance, a-t-il indiqué, avant de demander au Conseil d’envisager de créer une commission d’enquête sur la situation des droits de l’homme au Cachemire.
De même, a dit le Haut-Commissaire, la gravité de la situation au Nicaragua – où les manifestations contre le Gouvernement ont fait au moins 178 morts et 1500 blessés depuis deux mois, quasiment tous aux mains des policiers ou de groupes favorables au Gouvernement – mérite elle aussi que soit créée une commission d’enquête internationale.
Au Mexique, malgré « un bilan positif d'ouverture que nous apprécions beaucoup », le Haut-Commissaire a regretté le refus de laisser le Comité des disparitions forcées se rendre sur le terrain. Depuis 2012, le Comité a enregistré plus de 310 actions urgentes concernant des cas de disparition forcée au Mexique, ce qui représente plus de 60 % de toutes les actions urgentes enregistrées à ce jour par le Comité, a fait remarquer M. Zeid.
M. Zeid a d’autre part fait savoir que la surveillance exercée par le Haut-Commissariat montrait que peu de choses avaient changé en République populaire démocratique de Corée, où des violations des droits de l’homme systématiques et graves sont commises depuis longtemps. Tout en regrettant le manque de coopération du pays avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée, M. Zeid a néanmoins jugé encourageant que ce pays ait noué un dialogue avec les mécanismes des Nations Unies par le biais de la visite d’un Rapporteur spécial et de la présentation de rapports aux organes de traités. « Le Haut-Commissariat garde sa porte ouverte pour une coopération plus étroite », a assuré M. Zeid.
Israël refuse toujours l'accès au territoire palestinien occupé au Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, a regretté M. Zeid. L'accès a également été refusé à toutes les précédentes commissions d'enquête du Conseil, y compris celle établie en 2014 concernant Gaza. « Je pense que le plaidoyer du Conseil en faveur d'une surveillance impartiale est entièrement justifié par la gravité de la situation », a indiqué le Haut-Commissaire, avant d’appeler Israël « à accorder l’accès à tous les mécanismes des droits de l'homme – y compris l'organe d'enquête mandaté le mois dernier – afin de permettre une surveillance impartiale et de faire progresser la responsabilité et la justice ».
En Chine, malgré les efforts du Haut-Commissariat pour créer les conditions propices à un dialogue efficace, « mes collaborateurs n'ont pas eu libre accès au pays », y compris à la Région autonome du Tibet et à la Région autonome du Xinjiang ouigour, « où la situation des droits de l'homme se détériorerait rapidement », a déploré M. Zeid. Il s’est dit consterné par les efforts incessants de la Chine visant à empêcher les membres de la société civile de collaborer avec les mécanismes des droits de l'homme, qu’il s’agisse des organes de traités, de l’Examen périodique universel ou des titulaires de mandats. Le Haut-Commissaire a encouragé les autorités chinoises à autoriser tous les acteurs à collaborer avec les mécanismes internationaux des droits de l'homme et à coopérer elles-mêmes avec eux dans un esprit de partenariat ouvert et mutuel.
En ce qui concerne la situation en Turquie, « l'invitation lancée au Haut-Commissaire à se rendre à Ankara ne remplace pas un accès du Haut-Commissariat pour évaluer directement et objectivement la situation dans le sud-est du pays », où les autorités n'ont toujours pas mené d'enquêtes crédibles sur les décès de civils qui se sont produits lors d'opérations de sécurité en 2015 et 2016, a déclaré M. Zeid.
L'accès inconditionnel à Bahreïn continue d'être refusé au Haut-Commissariat et aux procédures spéciales, dans un contexte de répression continue contre la société civile, a en outre regretté M. Zeid.
Le Haut-Commissaire a également regretté le manque de progrès en ce qui concerne l'accès du Haut-Commissariat à tous les conflits prolongés dans le Caucase du Sud – un accès qui lui permettrait d'évaluer les besoins de la population en matière de droits de l'homme et d'aider à combler les lacunes en matière de protection.
S’agissant du Soudan du Sud, le Haut-Commissaire s’est dit « profondément préoccupé par l'intensification des attaques aveugles contre les civils, en particulier les viols et les meurtres perpétrés par les forces gouvernementales et leurs mandataires dans l'État de l'Unité depuis avril 2018 », notamment le viol de petits enfants et « de nombreux cas de femmes, de personnes âgées et d'autres personnes qui ont été pendues ou brûlées vives dans ce qui semble être une politique délibérée de terre brûlée ».
Le Haut-Commissaire a ensuite espéré que les autorités du Cameroun valideraient rapidement la mission du Haut-Commissariat dans toutes les régions du pays. Jusqu'à présent, cet accès a été refusé, malgré la crise croissante dans les régions anglophones, avec des combats entre une douzaine de groupes armés et les forces de sécurité. Le Haut-Commissariat a reçu des rapports faisant état de violations des droits de l’homme par toutes les parties : incendies d'écoles et de biens privés; arrestations massives et détentions arbitraires; et usage de la torture et d'une force excessive par le personnel de sécurité, entraînant le déplacement de 150 000 personnes à l'intérieur du pays et de plus de 20 000 vers le Nigéria voisin, a précisé M. Zeid.
M. Zeid s’est par ailleurs félicité de la résolution 2414 (2018) du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental, qui encourage vivement le renforcement de la coopération avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Il a fait savoir que le Haut-Commissariat était prêt à entreprendre, dès que possible, une mission technique de suivi au Sahara occidental.
Le Haut-Commissaire s’est en revanche dit préoccupé par la suspension de la visite au Rwanda du Sous-Comité pour la prévention de la torture à la fin de l'année dernière, en raison d'une obstruction grave concernant l'accès à certains lieux de détention. Le Sous-Comité a décidé de reprendre la visite en 2018, mais il n'y a pas eu d'engagement positif avec les autorités (rwandaises), a regretté le Haut-Commissaire.
S’agissant de l’Indonésie, le Haut-Commissaire a regretté que, « malgré l'engagement positif des autorités à de nombreux égards », l'invitation du Gouvernement au Haut-Commissariat à se rendre en Papouasie (invitation lancée lors de sa visite en février dernier) n'ait toujours pas été honorée.
M. Zeid a par contre souligné que le Bangladesh avait accordé un accès étendu et louable au Haut-Commissariat et à tous les mécanismes pertinents en matière de droits de l'homme en ce qui concerne la crise des réfugiés rohingya. Cependant, plus de dix demandes de visites de titulaires de mandat pour évaluer la situation des droits de l'homme au Bangladesh même sont en suspens, a fait observer le Haut-Commissaire.
Le Haut-Commissaire a enfin fait savoir que le Haut-Commissariat avait demandé à plusieurs reprises à la Fédération de Russie de pouvoir se rendre en Crimée. « Les réponses de la Fédération de Russie, bien qu'incompatibles avec les résolutions pertinentes de l'Assemblée générale, reconnaissent néanmoins que les mécanismes internationaux des droits de l'homme doivent étendre leur portée à la Crimée», a fait observer M. Zeid. Il a espéré que ces « réponses encourageantes ouvriraient la voie à des mesures supplémentaires permettant l’accès » du Haut-Commissariat et des procédures spéciales, dans l'intérêt de la protection des droits de l'homme des populations de la région.
Le Haut-Commissaire a en revanche déploré que la Fédération de Russie ait formellement refusé de répondre à toute communication de l'Expert indépendant du Conseil sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre, « malgré de graves allégations de violence, de discrimination et d'exclusion de membres de la communauté lesbienne, gay, bisexuelle et transgenre, en particulier en Tchétchénie ».
Le Haut-Commissaire a ensuite fait état de progrès réalisés en Éthiopie, en Arménie, en Tunisie, en République de Moldova et en Ouzbékistan – lequel, après quinze ans de refus de toute visite des procédures spéciales, a reçu en octobre dernier le titulaire du mandat sur la liberté de religion ou de conviction. Le Haut-Commissaire s’est d’autre part réjoui qu’après sa visite à Tripoli en octobre dernier, la Libye avait accepté la toute première mission d'un titulaire de mandat, à savoir celle du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des personnes déplacées dans leur propre pays. M. Zeid a en outre prié le Conseil de prendre note du déploiement de conseillers en droits de l'homme au Bélarus et au Zimbabwe, « deux pays où il y avait eu des problèmes d'accès par le passé ».
Le Haut-Commissaire a ensuite souligné que « les gens ne perdent pas leurs droits de l'homme parce qu’ils traversent une frontière sans visa », avant de déplorer l'adoption par de nombreux pays de politiques destinées à se rendre aussi inhospitaliers que possible en augmentant les souffrances de nombreuses personnes déjà vulnérables. M. Zeid s’est dit profondément préoccupé par un projet de loi présenté au Parlement hongrois qui, s'il était adopté, criminaliserait effectivement les personnes qui veillent au respect des droits de l'homme aux frontières et qui fournissent des informations, une aide juridique et plus généralement une assistance aux migrants. M. Zeid s’est également dit « profondément préoccupé par les politiques récemment adoptées aux États-Unis qui reviennent à punir les enfants pour les actes de leurs parents ». Au cours des six dernières semaines, près de deux mille enfants ont ainsi été séparés de force de leurs parents, a relevé M. Zeid. Il a appelé les États-Unis « à mettre fin immédiatement à cette pratique et à ratifier enfin la Convention relative aux droits de l'enfant, afin que les droits fondamentaux de tous les enfants, quel que soit leur statut administratif, soient au centre de toutes les lois et politiques nationales.»
M. Zeid a enfin fait observer que « lorsque les dirigeants eux-mêmes sapent les droits de l'homme et le droit relatif aux droits de l'homme, il ne s'agit en aucun cas d'un acte de patriotisme ». Ce faisant, ces dirigeants « érodent les structures qui peuvent assurer la sécurité de leur population et replongent leurs sociétés dans la violence, la destruction, l'exploitation et les catastrophes ». Ces dirigeants valorisent « la force brute et l'exploitation, entre les États comme à l'intérieur des pays ». « Le vrai patriotisme », a conclu le Haut-Commissaire, « consiste à considérer chaque État, et l'humanité dans son ensemble, comme une communauté de responsabilité mutuelle, avec des besoins et des objectifs communs. Le vrai patriotisme consiste à créer des communautés tolérantes, qui peuvent vivre en paix », a conclu M. Zeid.
Déclarations de hauts dignitaires
M. BORIS JOHNSON, Secrétaire d’État aux affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, a jugé disproportionné et préjudiciable à la cause de la paix de consacrer un point de l’ordre du jour uniquement à Israël et aux territoires palestiniens occupés. Aussi, a-t-il annoncé que le Royaume-Uni avait l’intention, l’année prochaine, si rien ne change, de voter contre toutes les résolutions présentées au titre de ce point 7 de l’ordre du jour.
M. Johnson a ensuite consacré son intervention à l’émancipation et à l’autonomisation des femmes, assurant que le monde serait infiniment plus sûr si toutes les filles pouvaient recevoir au moins douze années d’éducation. Il a regretté que le taux d’illettrisme des femmes atteigne jusqu’à 60, 70 voire 80% dans certains pays et a déploré que des « fanatiques bigots » et des « terroristes obscurantistes » fassent tout pour empêcher les filles d’aller à l’école, citant notamment Boko Haram. Cette année, le Gouvernement britannique a consacré 500 millions de livres sterling supplémentaires à la cause de l’éducation des femmes et aide 1,4 million de filles à recevoir un minimum de douze années d’éducation et d’apprentissage de qualité dans 15 pays, a-t-il précisé. M. Johnson a souligné que le Royaume-Uni est l’un des rares pays à avoir une femme chef de gouvernement, une femme chef d’État et une femme chef de l’appareil judiciaire.
Les ressources financières et la volonté politique ne sont pas les seules contraintes qui pèsent sur l’éducation des femmes, a poursuivi M. Johnson. Même lorsque les écoles sont disponibles, les filles peuvent être empêchées d’y aller, en raison de la violence physique et sexuelle ou des mariages précoces, dont la prévalence reste très forte et inchangée. Si le monde veut atteindre l’objectif de l’éducation universelle pour les femmes, il faudra qu’il traite de ces problèmes, a lancé le Secrétaire d’État britannique. Il a appelé chaque pays membre à faire tout le nécessaire pour éliminer le mariage des enfants, que ce soit en promulguant de nouvelles lois ou en faisant respecter celles qui existent. Il a demandé à chaque pays de soutenir les résolutions de cette session du Conseil qui condamnent les mutilations génitales féminines ainsi que la violence et la discrimination contre les femmes.
« Nous devrions éduquer les filles parce que c’est un droit en soi », a insisté M. Johnson. « Ne pas réussir à émanciper la moitié de l’humanité est immoral et inconscient », a-t-il souligné. Après avoir exhorté encore une fois les « hommes en costume » qui l’écoutaient à faire ce qui est « manifestement juste », M. Johnson a conclu, sous les applaudissements : « Au nom de la justice et de l’équité, donnons à chaque fille de la planète douze années d’éducation de qualité.»
M. HASSAN AL THAWADI, Secrétaire général du Comité suprême pour la réalisation et l'héritage du Qatar (Supreme Committee for Delivery and Legacy) a rappelé que le pays allait accueillir la coupe du monde (de football) de la FIFA en 2022. Il a ensuite rendu hommage au Haut-Commissaire aux droits de l’homme, qui a permis au Qatar d’accomplir d’importants progrès dans le domaine des droits de l’homme.
Les progrès humains ont transformé le monde en un village global, a expliqué M. Al Thawadi. Les interactions interculturelles n’ont jamais été plus aisées qu’aujourd’hui. Le monde se rapproche néanmoins rapidement du point de non-retour; les amitiés qui caractérisaient le monde sont en péril et les différences idéologiques divisent les nations, a-t-il fait observer. Le sport – et en particulier le football – constituent une plate-forme essentielle d’unification hors de toute considération de croyance ou politique, a-t-il souligné. Le sport transcende la société, a insisté M. Al Thawadi; il enseigne l’honnêteté, l’intégrité, l’humilité et permet de surmonter l’adversité et – ce qui est peut-être le plus important en ce moment – il enseigne le respect de l’adversaire, a-t-il expliqué. La diplomatie du sport a montré son pouvoir en début d’année à l’occasion des Jeux olympiques d’hiver, lorsque la République populaire démocratique de Corée et la République de Corée ont marché ensemble sous le drapeau de la « Corée unifiée ». Les divisions ont été supprimées grâce au sport. La torche olympique est une source de lumière. Des citoyens du monde entier sont aujourd’hui en Fédération de Russie pour supporter leur pays mais aussi pour rencontrer les personnes originaires d’autres cultures; toutes ces personnes vont créer des liens et les préjugés vont s’effacer grâce à la langue commune qu’est le football, a affirmé M. Al Thawadi.
La responsabilité du Qatar est de relever des défis ambitieux dans ce domaine, a poursuivi M. Al Thawadi. Le pays n’épargne aucun effort pour honorer ses engagements dans la perspective de 2022; il crée des ponts dans une région qui a besoin d’un avenir meilleur. Aujourd’hui, le Qatar a l’occasion de faire en sorte que les rêves deviennent réalité et que la région devienne un lieu de ralliement. M. Al Thawadi a indiqué que le Comité suprême dont il est Secrétaire général a mis en place des normes de travail rigoureuses, qui sont juridiquement contraignantes et couvrent l’ensemble du cycle des travailleurs étrangers – de leur engagement dans leur pays d’origine jusqu’à la fin de leur contrat de travail. Le Qatar examine la question de la sécurité sur les sites de construction, a ajouté M. Al Thawadi. Les travailleurs ont voix au chapitre, a-t-il assuré. Le Qatar a équipé tous les travailleurs de casques de protection, a-t-il insisté. Chaque travailleur aujourd’hui reçoit son salaire en temps voulu et la kafala a été remplacée par un autre système, a-t-il indiqué.
Le Qatar reconnaît qu’il reste beaucoup de défis à relever, a déclaré M. Al Thawadi. Le sport a un pouvoir de transformation de la société et il faut que chacun puisse tirer profit de ce potentiel de transformation. La coupe du monde est ainsi une occasion de célébrer l’humanité, a conclu M. Al Thawadi.
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HRC18.075F