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CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT : LE ROYAUME-UNI INDIQUE QU'IL A NOTIFIÉ L'OIAC DE L'ATTAQUE CHIMIQUE PERPÉTRÉE SUR SON SOL LE 4 MARS

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, une déclaration du Royaume-Uni qui a souligné qu'il avait notifié le secrétariat technique de l'Organisation de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (OIAC) qu'une attaque chimique avait été perpétrée sur son sol. La séance de cet après-midi était la dernière séance plénière publique sous la présidence de l'Ambassadrice Veronika Bard, de la Suède.

S'agissant de l'empoisonnement, le 4 mars dernier à Salibsury, de deux personnes par une arme neurotoxique, le Royaume-Uni a informé la Conférence qu'une enquête réalisée par les experts du centre de recherche britannique de Porton Down montrait qu'un agent interdit par la Convention avait été utilisé: un agent toxique de qualité militaire «d'un type développé par la Russie». Le Royaume-Uni constate que la Fédération de Russie n'a fourni aucune explication crédible en réponse à ses demandes sur la manière dont cette substance s'est retrouvée à Salisbury.

La Fédération de Russie a regretté de ne pas être informée de l'avancement de l'enquête britannique et a indiqué avoir demandé, sans succès, un échantillon de cet agent pour pouvoir participer à l'enquête sur les faits. La Fédération de Russie est elle aussi intéressée à connaître le résultat de l'enquête, puisque les personnes visées sont de nationalité russe.

Plusieurs délégations sont intervenues pour exprimer leur solidarité avec le Royaume-Uni et ont appelé la Fédération de Russie à répondre aux questions légitimes du Gouvernement britannique. Les délégations ont estimé que les responsables de cet incident de la plus haute gravité devraient répondre de leurs actes et ont déploré que la Fédération de Russie refuse de collaborer avec l'enquête ouverte au Royaume-Uni. Une délégation a demandé aux parties concernées de se baser uniquement sur les faits et sur les normes internationalement reconnues. Ont pris la parole dans ce cadre les pays suivants: Bulgarie au nom de l'Union européenne, France, États-Unis, Australie, Allemagne, Ukraine, Belgique, Pologne, Canada,Pays-Bas, Japon, Nouvelle-Zélande, République de Corée, Chine, Espagne, Autriche, Lettonie, Estonie et Irlande.

La Présidente sortante a informé les membres de l'état d'avancement de la création des cinq organes subsidiaires dont la Conférence s'est dotée le 15 février dernier. Plusieurs intervenants ont pris la parole pour saluer les efforts qu'elle a menés à cet égard.


La prochaine séance publique de la Conférence aura lieu le mardi 20 mars à 10 heures, sous la présidence de l'Ambassadrice de Suisse, Mme Sabrina Dallafior.


Aperçu des déclarations

S'agissant des travaux de la Conférence du désarmement, MME VERONIKA BARD (Suède), qui termine cette semaine son mandat en tant que Présidente de la Conférence, a regretté de n'être parvenue, en dépit de ses efforts, à concilier les vues divergentes au sujet de la désignation des coordonnateurs des organes subsidiaires dont la Conférence s'était dotée le 16 février (voir notre communiqué) pour faire avancer ses travaux de fond. De nombreuses questions et positions ont été explicitées lors d'une réunion de consultation qui a eu lieu ce matin, mais certains des problèmes qui paralysent la Conférence depuis vingt ans n'ont pas pu être résolus.

Mme Bard a tenu à souligner que la situation présentait aussi un bon côté: la décision de créer les organes subsidiaires est toujours valide et pourra être reprise par les prochaines présidences; les noms des cinq coordonnateurs sont convenus et la Conférence a validé un calendrier préliminaire. Mme Bard a fait observer que l'adoption de la décision portant création des cinq organes subsidiaires reposait sur une certaine part d'ambiguïté, tout comme la proposition contenue dans le document de travail 606 (voir notre communiqué du 13 mars). Pour maintenir l'ambiguïté, la confiance doit prévaloir, a relevé Mme Bard : certaines délégations ont réclamé plus de clarté sur la composition des organes subsidiaires, ce qui a ouvert la boîte de Pandore.

Le Royaume-Uni a remercié la Présidente de ses efforts pour amener la Conférence à reprendre ses travaux de fond. Les États-Unis ont, de même, assuré la Présidente de leur reconnaissance pour ses efforts en vue de sortir la Conférence de l'impasse.

Le Brésil a dit son appréciation quant au travail de la présidence suédoise, qui est notamment parvenue à trouver les coordonnateurs des organes subsidiaires. Il a espéré que la Conférence ne tomberait pas dans l'inertie après le relatif enthousiasme qui avait entouré la création des organes subsidiaires en février. Le pays est disposé à envisager que la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles fasse partie du mandat de l'un des organes subsidiaires. Le Mexique a lui aussi salué la nomination de cinq coordonnateurs. La Chine a salué la patience infinie de la Présidente et son professionnalisme. Elle estime que les divergences entre les parties ne sont pas fondamentalement irréconciliables et le Canada a ajouté qu'un aboutissement positif était sans doute très proche. Le Canada et les Pays-Bas ont relevé que Mme Bard n'avait eu que trois semaines à sa disposition, et que la recherche du consensus se poursuivrait sous la prochaine présidence suisse. La Turquie a observé que le consensus n'est jamais facile à atteindre dans les enceintes multilatérales. L'Irlande, la Belgique, la Pologne, le Japon, la République de Corée, l'Espagne, la Lettonie, entre autres pays, ont eux aussi salué la présidence de Mme Bard.

Revenant sur la question de l'utilisation d'un agent neurotoxique de qualité militaire dans la ville anglaise de Salisbury, le Royaume-Uni a informé la Conférence des suites qu'il avait données à cette affaire depuis sa dernière mise à jour, mardi 13 mars. Une enquête réalisée par les experts du centre de recherche britannique de Porton Down, accrédité par l'Organisation de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (OIAC), montre qu'un agent interdit par la Convention avait été utilisé, le Novitchok, un agent toxique de qualité militaire «d'un type développé par la Russie». Les autorités ont dû procéder à la décontamination de plusieurs sites. Cette arme, de par le grand danger qu'elle pose, ne peut pas être fabriquée par des acteurs non étatiques, a souligné le Royaume-Uni. La Fédération de Russie a déjà attaqué d'anciens espions et il est très probable qu'elle soit responsable de cet incident, estime le Gouvernement du Royaume-Uni. La Fédération de Russie n'a d'ailleurs fourni aucune explication crédible en réponse aux demandes du Royaume-Uni sur la manière dont cette substance s'est retrouvée à Salisbury et n'a témoigné que de son mépris. Le fond du problème reste intact, malgré les manœuvres de diversion russes : l'utilisation d'un agent chimique de qualité militaire, en Europe.

Le Gouvernement du Royaume-Uni a pris des mesures immédiates pour démanteler le réseau d'espionnage russe au Royaume-Uni et empêcher de nouvelles menaces sur la vie de ses citoyens. Il a procédé à l'expulsion de 23 diplomates russes pour détruire le réseau d'espionnage russe au Royaume-Uni et va interdire l'entrée sur son territoire à de nouveaux éléments hostiles. Le Royaume-Uni engagera en outre des poursuites contre les auteurs de violations des droits de l'homme, comme les personnes responsables de la mort de Serge Magnitsky.

Le Royaume-Uni s'est dit fier d'avoir joué un rôle essentiel dans l'adoption de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. Il a rappelé que l'article 7 de la Convention oblige les États à appliquer la Convention par leur propre système légal. Le Royaume-Uni a notifié le secrétariat technique de l'OIAC suite à cette attaque chimique perpétrée sur son sol. Les autorités britanniques avaient convoqué l'ambassadeur de la Fédération de Russie pour lui demander des explications, comme les y autorise l'article 9 de la Convention invoqué par la Fédération de Russie. Le Royaume-Uni a constaté d'autre part que la Fédération de Russie n'avait pas respecté l'obligation qui lui était faite par la Convention de déclarer ses stocks et capacités de production d'agent Novitchok.

Le Royaume-Uni a souligné que l'arme utilisée à Salisbury contre des civils le 4 mars était tellement épouvantable qu'elle était interdite en temps de guerre. La Fédération de Russie n'a pas respecté la Convention sur l'interdiction des armes chimiques, a conclu le Royaume-Uni, et a refusé la possibilité qui lui a été donnée de s'expliquer.

La Bulgarie a fait part de la solidarité de l'Union européenne avec le peuple et le Gouvernement du Royaume-Uni après l'emploi d'un agent toxique de qualité militaire à Salisbury, le 4 mars. L'Union européenne demande à la Fédération de Russie de répondre rapidement aux questions légitimes du Gouvernement britannique et de coopérer avec l'OIAC pour faire toute la lumière.

La France a souligné que cette tentative d'assassinat dans un lieu public avait mis en danger la vie de nombre de citoyens britanniques. L'emploi d'un agent neurotoxique de qualité militaire, d'un type développé par la Russie, constitue le premier emploi offensif d'un agent neurotoxique en Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale, a relevé la France. Elle a demandé à la Fédération de Russie de répondre à toutes les questions liées à l'attaque de Salisbury et de déclarer de façon complète son programme Novitchok à l'OIAC. La France a déclaré que ces faits et enjeux sont d'une extrême gravité, l'interdiction de l'emploi des armes chimiques étant au cœur du régime de non-prolifération qui fonde le système de sécurité collective. L'emploi répété d'armes chimiques, en Syrie ou au Moyen orient, en Asie et désormais en Europe, met en cause la stabilité stratégique, a mis en garde la France.

Les États-Unis se sont dits totalement solidaires du Royaume-Uni dans cette épreuve, convaincus que la Fédération de Russie en était responsable. Ils ont demandé à la Fédération de Russie de cesser d'utiliser des armes chimiques pour assassiner ses ennemis et de collaborer avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques pour ce qui concerne le Novitchok. La Fédération de Russie devra répondre de ses actes, ont dit les États-Unis, faute de quoi Salisbury ne sera pas le dernier lieu d'une attaque aux agents neurotoxiques.

L'Australie a condamné le recours aux armes chimiques en toute circonstance. La Fédération de Russie doit répondre de ses actes envers la population du Royaume-Uni, a demandé l'Australie. Elle a soutenu les mesures prises par les Royaume-Uni comme la convocation d'une réunion extraordinaire du Conseil de sécurité et l'expulsion de 23 diplomates russes. La communauté internationale ne doit tolérer ces actes d'aucune façon.

L'Allemagne a condamné les actes odieux commis au Royaume-Uni par des armes interdites par la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. Les responsables de cet incident de la plus haute gravité devront répondre de leurs actes. L'Allemagne a déploré que la Fédération de Russie refuse de collaborer avec l'enquête ouverte au Royaume-Uni.

L'Ukraine a jugé que la réponse apportée par la Fédération de Russie n'était pas du tout crédible, ce qui semble confirmer qu'elle est bien à l'origine de cette agression contre les pays occidentaux. La Fédération de Russie ne respecte ni règles ni frontières internationales et ne voit que son intérêt, a mis en garde l'Ukraine. L'Ukraine a dénoncé le comportement de la Fédération de Russie en Crimée, qui est une violation de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.

La Belgique a exprimé sa solidarité avec le Royaume-Uni face à un crime odieux. Il importe de faire toute la lumière sur ces faits, a demandé la Belgique, soulignant que la Convention sur l'interdiction des armes chimiques interdisait la détention d'armes telles que le Novitchok. Cette attaque, comme l'utilisation des armes chimiques, montre que ce combat n'est pas encore terminé, hélas, a dit la Belgique.

La Pologne s'est dite gravement préoccupée par cette attaque sans précédent, qui contrevient à la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. La Pologne est prête à aider son allié dans la réalisation de l'enquête sur les faits. La Fédération de Russie doit répondre aux demandes légitimes du Royaume-Uni, a insisté la Pologne.

Le Canada a lui aussi indiqué qu'il se tenait fermement aux côtés du Royaume-Uni. Il appelle la Fédération de Russie à répondre aux demandes légitimes du Royaume-Uni.

Les Pays-Bas ont affirmé qu'aucun État ne pouvait ni ne devait accepter d'attaque chimique sur son territoire souverain. L'attaque au Royaume-Uni est une mise en garde au monde entier: il faut être encore plus vigilant contre les armes de destruction massive. Les auteurs de l'attaque devront être traduits en justice, ont insisté les Pays-Bas.

Le Japon a déclaré que l'attaque contre le Royaume-Uni était un affront à toute la communauté internationale.

La Nouvelle-Zélande a fait part de son inquiétude quant à l'utilisation odieuse d'armes interdites par la Convention sur l'interdiction des armes chimiques. La Fédération de Russie doit répondre aux questions sur la manière dont un agent toxique fabriqué en Fédération de Russie a été utilisé sur le sol du Royaume-Uni.

La République de Corée a déclaré que tout emploi d'armes chimiques était toujours inacceptable, et que les auteurs devraient rendre compte de tels actes.

La Chine a demandé aux parties concernées par cet incident de se baser uniquement sur les faits et sur les normes internationalement reconnues.

L'Espagne a dit son horreur devant l'utilisation de telles armes. Elle a plaidé pour que les auteurs de ces actes en répondent devant la justice et s'est dite totalement solidaire du Royaume-Uni.

L'Autriche a exprimé elle aussi sa solidarité avec le Royaume-Uni. Elle a recommandé que l'OIAC mène une enquête rapide et complète sur cet événement.

La Lettonie a déclaré que ceux qui commettent de tels actes sur le territoire d'un pays membre de l'OTAN devaient se voir opposer une réaction très ferme. Elle a condamné l'attaque commise au Royaume-Uni, qui est une contravention à la Convention sur l'interdiction des armes chimiques.

L'Estonie a demandé à la Fédération de Russie de confirmer l'exactitude de sa déclaration de stock d'armes chimiques datant d'octobre 2017.

L'Irlande a condamné l'utilisation d'armes chimiques contre un pays voisin et ami, un acte qui contrevient au droit international et qui justifie que la Fédération de Russie réponde aux questions légitimes du Royaume-Uni.

La Fédération de Russie a regretté que son pays ne soit pas du tout tenu informé de l'avancement de l'enquête britannique. La Fédération de Russie a appris uniquement par les médias que l'agent utilisé était le Novitchok. La délégation a émis des doutes sur l'identification du produit en question. Elle a indiqué que la Fédération de Russie avait demandé un échantillon de cet agent pour pouvoir participer à l'enquête sur les faits : cet échantillon n'a pas été livré et la Fédération de Russie n'a reçu qu'un ultimatum, a-t-elle regretté. La Fédération de Russie doit connaître les éléments de preuve qui autorisent le Royaume-Uni à l'accuser d'avoir un programme secret d'armes chimiques. La Fédération de Russie s'est dite prête à coopérer mais uniquement sur la base du respect. Le pays est lui aussi intéressé à connaître le fin mot de l'histoire, puisque les victimes sont de nationalité russe.

«Déni, distraction et menaces»: le Royaume-Uni a dit qu'il n'était pas surpris par la réaction de la Fédération de Russie, laquelle nie aussi avoir des troupes sur le terrain en Ukraine. Le Royaume-Uni coopère avec l'OIAC pour faire avancer l'enquête. Cette instance devra amener la Fédération de Russie à rendre compte de ses actes.

La Fédération de Russie a dit n'avoir proféré aucune menace et qu'elle était prête à coopérer sur la base du droit et du professionnalisme.

Le Royaume-Uni a répété que la Fédération de Russie avait omis de déclarer son programme Novitchok et qu'elle avait refusé de répondre aux questions qui permettraient à l'enquête d'avancer.


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