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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA HONGRIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de la Hongrie sur les mesures qu'elle a prises pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le rapport a été présenté par le Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, M. Péter Szijjártó, qui a souligné que l'État devait garantir un certain nombre de droits à ses citoyens, parmi lesquels le droit à la sécurité ou celui au travail. Il a rappelé que le pays avait vécu, en 2015, une triste expérience avec l'afflux de 400 000 immigrants et que la Hongrie a refusé les quotas que voulait lui imposer l'Union européenne. Le Gouvernement hongrois n'admet pas d'immigrants illégaux et n'en admettra pas. La migration illégale doit être jugulée car elle représente un péril vital pour la nation, M. Szijjártó soulignant la nécessité de s'attaquer aux racines du problème. Pour la Hongrie, la menace terroriste est directement liée à l'immigration illégale. Une société homogène n'a pas moins de valeur qu'une société multiculturelle, a affirmé le ministre, qui a dénoncé une idéologie de promotion du multiculturalisme considéré comme une sorte de valeur suprême. Les Hongrois vivent dans une société homogène et intégrée, de culture chrétienne, des valeurs qu'ils entendent préserver. M. Szijjártó a par ailleurs déploré l'influence sur le Comité exercée par certaines organisations non gouvernementales internationales, financées notamment par le milliardaire américain d'origine hongroise George Soros.

La délégation hongroise était également composée du Secrétaire d'État adjoint à la coopération internationale et de celui pour les affaires européennes et internationales; de hauts fonctionnaires des ministères de l'économie nationale, de l'intérieur, de la justice et des ressources humaines; ainsi que du Président de l'Autorité nationale pour la protection des données et la liberté de l'information. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, d'accusations d'atteintes à la démocratie par le Gouvernement; de la situation des migrants et de la rétention des demandeurs d'asile; d'allégations de pratiques de profilage ethnique par la police; de la lutte contre la discrimination à l'égard des Rom; de l'assistance aux victimes de violence domestique; de l'abaissement de l'âge de la responsabilité pénale; des mesures prises pour réduire la surpopulation carcérale; de la politique hongroise du handicap. La délégation a notamment assuré que la Hongrie ne dérogeait en rien aux règles de droit, du droit européen en particulier, mais aussi des instruments internationaux qu'elle a ratifiés. Le Gouvernement agit conformément au mandat qui lui a été confié de façon largement majoritaire par la population, ajoutant qu'il ne considérait pas que la migration des populations constituait un progrès et encore moins un droit fondamental.

Les membres du Comité se sont notamment inquiétés de cas d'atteintes à l'indépendance du judiciaire relevées par des institutions européennes, ainsi que d'allégations de crimes haineux commis par racisme ou homophobie. Des experts se sont inquiétés de la marginalisation persistante de la communauté rom qui serait toujours victime de discriminations graves et systématiques. Le placement systématique des personnes handicapées en institution demeure une source de préoccupation pour le Comité dont certains membres se sont inquiétés de cas de stérilisation forcée. Les experts se sont aussi dits préoccupés que l'âge de la responsabilité pénale ait été abaissée de 14 à 12 ans. Des questions ont aussi été posées sur la liberté d'expression et d'association et sur le droit à la participation aux affaires publiques sur fond de campagne de diffamation et de discours de haine aux accents antisémites.

Les observations finales sur le rapport de la Hongrie seront rendues publiques à l'issue de la session, qui se termine le 6 avril prochain.

Le Comité, qui devait examiner le rapport initial du Liberia cet après-midi, a décidé, en l'absence de délégation, de reporter cet examen à sa 123ème session, qui se tiendra du 2 au 27 juillet 2018.


Lors de sa prochaine séance publique, jeudi après-midi à partir de 15 heures, le Comité doit conclure l'examen du rapport du Liban (CCPR/C/LBN/3), entamé la semaine dernière.


Présentation du rapport de la Hongrie (CCPR/C/HUN/6)

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères de la Hongrie, a déclaré que la diversité étant l'une des grandes valeurs onusiennes, il souhaitait avoir le privilège de s'exprimer en hongrois. Il s'agit de l'une des langues les plus difficiles – pour les étrangers - et des plus belles du monde, a-t-il dit avant de reconnaître une certaine partialité de sa part à ce sujet. Ce n'est pas encore une langue officielle de l'ONU mais cela viendra peut-être, a-t-il ajouté.

Le Ministre a souligné que durant les 1 100 ans de son histoire, la Hongrie avait dû lutter pour sa liberté, comme cela a été le cas sous le communisme dans la période contemporaine. Les Hongrois ont combattu pour leurs droits fondamentaux tout au long de leur histoire. Le Gouvernement doit garantir un certain nombre de droits à ses citoyens, parmi lesquels le droit à la sécurité ou celui au travail, a-t-il expliqué. Le Gouvernement hongrois est convaincu que sa population a le droit de vivre dans la sécurité, sans crainte du terrorisme, notamment.

En 2015, le pays a vécu une triste expérience avec l'afflux de 400 000 immigrants qui ont mis à mal les règles internationales en matière d'immigration, a déclaré le ministre, qui a rappelé que la Hongrie avait refusé les quotas que voulait lui imposer l'Union européenne. Le Gouvernement hongrois n'admet pas d'immigrants illégaux et il n'en admettra pas. La migration illégale doit être jugulée car elle représente un péril vital pour la nation.

M. Szijjártó a souligné la nécessité de s'attaquer aux racines du problème de l'immigration, ajoutant que la menace terroriste était directement liée à l'immigration illégale. La Hongrie refuse le point de vue occidental selon lequel le terrorisme ferait « partie du risque inhérent à la vie dans les grandes cités modernes ». Le Gouvernement a organisé un référendum qui a permis aux Hongrois d'exprimer leur point de vue par lequel ils ont dit non à l'immigration illégale. Le peuple hongrois, personne d'autre, a le droit de déterminer avec qui il entend vivre dans sa patrie.

Le ministre hongrois a dénoncé les efforts au plan international en faveur du multiculturalisme considéré comme une sorte de valeur suprême. Une société homogène n'a pas moins de valeur qu'une société multiculturelle, a-t-il dit. Les Hongrois vivent dans une société homogène et intégrée, de culture chrétienne, une situation, des valeurs qu'ils entendent préserver, a-t-il affirmé.

De l'avis du chef de la délégation hongroise, le Comité est influencé par un grand nombre d'organisations non gouvernementales internationales. Le plus important pour le Gouvernement est de préserver le peuple hongrois et cela ne s'inscrit pas dans les objectifs de ces organisations. Ni les ONG ni leurs programmes n'ont été élus par personne, a-t-il tenu à rappeler; on n'a jamais vu de scrutin où les gens voteraient pour des ONG, a relevé le Ministre. Il est aisé, au demeurant, de mesurer l'influence des ONG en Hongrie. Ainsi, le contribuable hongrois peut consacrer 1% de ses revenus à subventionner des organisations non gouvernementales. Les ONG brossent un tableau de la Hongrie sous un jour très sombre auprès du Comité, a insisté le ministre, qui a affirmé que la plupart d'entre elles étaient sous la coupe de George Soros.

Le droit au travail est un autre droit fondamental, a poursuivi M. Szijjártó. À l'heure actuelle, avec un taux de chômage d'un peu plus de 3%, la Hongrie est en situation de plein emploi, tandis que le salaire minimum a fortement augmenté ces dernières années. Le droit de fonder une famille est un autre droit de la personne, a rappelé le chef de la délégation, qui a ajouté que le Gouvernement était, là aussi, en conflit avec des organisations non gouvernementales car il estime que le pays connaît un taux insuffisant de renouvellement des générations. Des aides sont versées aux familles, celles-ci étant dispensées de l'impôt à partir de trois enfants. Parmi d'autres mesures prises par le Gouvernement, M. Szijjártó a mentionné le versement des allocations familiales a été simplifié, ou encore des aides en nature telles que la fourniture gratuite des manuels scolaires.

Le Gouvernement hongrois fera tout ce qui est en son pouvoir pour promouvoir le droit de sa population à vivre dans la sécurité, a conclu le chef de la délégation hongroise.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité s'est intéressé aux mesures prises pour renforcer les services de sécurité nationale et du Centre de lutte antiterroriste. Les mesures de surveillance sont-elles toujours exemptées d'autorisation judiciaire, a-t-il demandé.

Soulignant par ailleurs le rôle important que jouent les organisations non gouvernementales en faveur de la protection des droits des minorités, l'expert a relevé que plusieurs plaintes ont été déposées auprès de la Cour européenne des droits de l'homme en matière de discrimination. Tout en se félicitant de l'adoption de la loi de 2011 sur les nationalités et du progrès qu'elle représente, il a toutefois souligné sa complexité et un certain manque de clarté. Elle semble imposer, selon lui, un fardeau trop lourd en matière de réglementation des structures autonomes des minorités.

Après s'être interrogé sur la composition de la Cour constitutionnelle, l'expert a demandé si la délégation disposait d'exemples de cas où le Pacte international relatif aux droits civils et politiques aurait été invoqué dans des procédures judiciaires, aussi bien par la Cour constitutionnelle que par des tribunaux de rang inférieur. Il s'est inquiété des critiques faites à l'endroit du Gouvernement qui, systématiquement, réintroduit les textes annulés par la Cour constitutionnelle en les « constitutionnalisant » afin de contourner la difficulté. La Commission européenne pour la démocratie par le droit, dite « commission de Venise », a estimé que dans certains cas il était porté atteinte à l'indépendance du judiciaire, a-t-il observé. Quelle considération le Gouvernement porte-t-il aux avis de la commission de Venise, a-t-il demandé.

Une experte a abordé la question des crimes haineux, s'inquiétant du fait que l'orientation sexuelle ne semblait pas prise en compte comme circonstance aggravante, si l'on en juge par les statistiques officielles. Y a-t-il des cas de poursuites intentées non seulement pour des attaques racistes mais aussi pour des agressions envers la communauté des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués? D'après des enquêtes très fiables, 45% des personnes appartenant à cette communauté s'estiment victimes de discrimination. Non seulement les programmes scolaires n'abordent-ils pas la question de l'orientation sexuelle, mais les manuels qui le font traitent la question dans le chapitre des désordres mentaux, a-t-elle constaté.

Selon une experte, les Rom sont victimes de discriminations graves et systématiques. Si des mesures législatives louables ont été prises, il apparaît qu'il y ait un hiatus entre ce que dit la loi et la réalité sur le terrain. Constate-t-on une amélioration dans le domaine de l'emploi des adultes et de la scolarisation des enfants rom, a-t-elle demandé. Selon le Conseil de l'Europe, la ségrégation s'est aggravée. Les enfants rom sont censés combler leur retard avant d'intégrer le système scolaire général, ce qui n'arrive pratiquement jamais. L'experte a estimé que l'on était confronté à une situation de ségrégation de fait. Elle a demandé quel était le taux d'abandon des élèves rom, en particulier au niveau secondaire. Combien de jeunes rom bénéficient de bourses de l'État ? Par ailleurs, selon des allégations formulées par des organisations non gouvernementales, la police se livrerait à du profilage ethnique.

Un membre du Comité a posé une série de questions sur les mesures prises en matière de lutte contre la discrimination et les mauvais traitements envers les personnes handicapées. La question du placement en institution demeure une source de préoccupation pour le Comité, a-t-il dit, des chiffres faisant état de 33 000 adultes concernés, dont un nombre considérable internés sans leur accord, quand ils ne sont pas aussi privés de leurs droits civiques. La question de la désinstitutionnalisation est posée, le même expert souhaitant entendre de la délégation la stratégie adoptée par la Hongrie en la matière.

L'expert a aussi mentionné des cas de stérilisations forcées à grande échelle de personnes handicapées en dépit du fait que la loi hongroise l'interdise. Quelles sont les garanties offertes par la loi en matière de consentement des personnes concernées, a-t-il demandé.

Un autre expert s'est dit impressionné par la franchise du discours de présentation du chef de la délégation, même si l'on peut ne pas être d'accord avec sa teneur. S'il est normal qu'un Gouvernement privilégie la sécurité de sa population, cela justifie-t-il pour autant une politique anticommunautariste et antimigratoire, a-t-il demandé. Il a rappelé que le christianisme, dont se revendique l'État hongrois, accorde asile et nourriture à l'étranger dans le besoin.

L'expert a aussi abordé la question de l'égalité des sexes, relevant les nombreux stéréotypes véhiculés en Hongrie assignant notamment la femme à l'unique fonction procréative ou rendant les jeunes femmes responsables des agressions qu'elles peuvent subir en raison de leur « coquetterie » ou de leur attitude provocante. L'État doit-il encourager les stéréotypes ou les combattre, a-t-il demandé, s'interrogeant sur la passivité des autorités gouvernementales qui s'abstiennent de combattre la dévalorisation des femmes.

L'expert s'est étonné par ailleurs que l'âge de la responsabilité pénale ait été abaissée de 14 à 12 ans. Il a enfin demandé si la délégation disposait de statistiques sur les poursuites en justice pour faits de traite.

Une experte a relevé que la Hongrie connaissait un problème d'insuffisance de moyens consacrés à l'aide juridictionnelle. Elle a aussi noté que certains avocats commis d'office sont saisis à trop brève échéance, n'ayant parfois par le temps matériel de se rendre auprès de personnes gardées à vue afin de les assister lors de leur interrogatoire.

Un autre membre du Comité a posé des questions sur la liberté d'expression, d'association et sur le droit à la participation aux affaires publiques sur fond de campagne de diffamation et de discours de haine aux accents antisémites. Une campagne aux relents antisémites dignes des années trente, reposant sur une théorie du complot, vise particulièrement George Soros, citoyen américain d'origine hongroise et fondateur de l'Open Society Institute. Il a demandé si le Gouvernement avait l'intention de retirer les projets de loi dits «stop Soros» ou de les amender de manière à ce que les mesures envisagées soient conformes au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ces projets de loi semblent avoir pour objet de stigmatiser et punir les organisations de défense des droits de l'homme et en particulier les organisations portant assistance et défendant les droits des migrants.

Un autre expert a noté qu'il y avait seulement 200 personnes de race noire en Hongrie, s'interrogeant sur les causes de ce nombre insignifiant. Il s'est alarmé de déclarations comparant les Rom à des animaux incapables de vivre parmi les humains. Ce type de xénophobie n'est pas sans rappeler la Seconde guerre mondiale et les justifications de génocide qu'elles ont suscité.

Un expert a mentionné un incident au cours duquel un train transportant des migrants a été bloqué et des gaz lacrymogènes ont été employés, estimant qu'il pouvait s'agir d'un usage excessif de la force. Il a rappelé le principe de non-refoulement des demandeurs d'asile stipulé par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il ne s'agit pas pour le Comité de contester le droit souverain de la Hongrie à se doter d'une politique migratoire, mais de s'interroger sur des pratiques policières apparemment peu respectueuses des engagements internationaux de la Hongrie.

Une experte s'est étonnée qu'un agent de la force publique puisse assister à un examen médical pratiqué sur une personne en garde à vue ayant demandé à avoir accès à un médecin, éventuellement à la suite d'allégations de mauvais traitements lors de son interrogatoire. Un membre du Comité a relevé la rareté des inspections des lieux de détention recommandées par le Protocole facultatif à la Convention contre la torture.

Le mariage étant défini comme l'union d'un homme et d'une femme, une experte a relevé un éventuel manque de compatibilité avec le régime d'union civile qui a légalisé le concubinage homosexuel.

Un autre expert a soulevé la question du droit de grâce du chef de l'État qui peut en faire usage au bénéfice d'un condamné à perpétuité après quarante de détention, une durée qui apparaît excessivement longue aussi bien de l'avis du Comité que de celui de la Cour européenne des droits de l'homme.

Un expert s'est interrogé sur la légalité au regard des conventions internationales de la détention systématique des mineurs non accompagnés. Un membre du Comité a fait état, par ailleurs, de l'intention prêtée au Gouvernement de faire fermer l'Université d'Europe centrale, fondée à l'initiative de Georges Soros, en dépit de l'excellente réputation dont elle jouit.

Réponses de la délégation

En réponse aux accusations d'atteintes à la démocratie visant le Gouvernement hongrois, le chef de la délégation a estimé que faire un parallèle avec les dictatures du siècle dernier était inacceptable. La majorité actuelle n'a pas gagné sa place à la loterie mais à l'issue d'un scrutin démocratique, a-t-il rappelé. Elle a été élue alors que le pays était au bord du gouffre sur le plan économique.

Une nouvelle constitution a été adoptée car la Hongrie était le seul pays de la région, Kosovo compris, à ne pas l'avoir fait depuis la chute du communisme. Tous les citoyens hongrois de plus de 16 ans ont reçu un questionnaire sur les grands points à réformer. Ce sondage grandeur nature a fait l'objet de plusieurs centaines de milliers de réponses. Puis, le Parlement a entrepris de rédiger une nouvelle loi fondamentale, ce qui a permis d'y associer toutes les sensibilités, opposition comprise. Par ailleurs, la population a aussi été consultée sur la politique migratoire du Gouvernement.

Le Gouvernement hongrois est l'un de ceux qui a fait le plus en Europe contre l'antisémitisme. Il a criminalisé le négationnisme, prêtant ainsi ironiquement le flanc à des critiques aux États-Unis où l'on a reproché à Budapest de porter atteinte à la liberté de parole. La Hongrie a la plus importante communauté juive d'Europe orientale et elle consacre des budgets substantiels à la restauration de synagogues. Elle est fière d'avoir une communauté juive florissante qui n'est pas contrainte de fuir sa patrie, ce qui n'est pas nécessairement le cas partout en Europe, a ajouté la délégation.

Répondant à d'autres questions, la délégation a déclaré que les désaccords du Gouvernement avec les propositions de George Soros en faveur de l'ouverture des frontières n'avaient rien à voir avec un quelconque antisémitisme à son endroit. Lorsque l'on met en cause l'attitude envers les femmes de MM. Harvey Weinstein ou Dominique Strauss-Kahn, ce n'est pas par antisémitisme, a observé la délégation, en faisant référence au producteur de cinéma américain et à l'ancien patron du Fonds monétaire international, deux personnalités de premier plan ayant eu affaire à la justice à la suite d'agressions sexuelles.

Le nombre de citoyens hongrois d'origine rom a doublé à l'université. Certes, le fait qu'il y ait une forte proposition de pauvres dans cette communauté est une réalité et c'est la raison pour laquelle le Gouvernement prend des mesures en sa faveur, particulièrement dans le domaine de l'éducation.

Le Gouvernement hongrois apporte une assistance aux chrétiens d'Orient dans les pays où ils vivent car il estime que la solution n'est pas dans leur déracinement et leur transplantation en Europe ou ailleurs.

La Hongrie a signé la Convention du Conseil de l'Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d'Istanbul. Toutefois, les consultations qui ont été menées par la suite dans le pays ont été négatives et il n'est pas envisagé de la ratifier. Dans le même temps, une stratégie a été mise en place pour porter assistance aux victimes de violence domestique. Des centres de crise et des maisons d'accueil ont été mis en place. Ils sont surveillés et protégés pour éviter tout contact entre victimes et auteurs de violences. Certains foyers se trouvent dans des lieux tenus secrets. La délégation a reconnu un nombre insuffisant de places, voire une sécurité insuffisante à laquelle les autorités ont entrepris de remédier.

Si l'âge de la responsabilité pénale a effectivement été abaissé à 12 ans en raison de l'aggravation d'une délinquance de plus en plus juvénile, le juge se doit néanmoins de vérifier que le mineur poursuivi comprend effectivement les motifs qui justifient sa traduction en justice et la gravité des faits qui lui sont reprochés.

Le Médiateur des droits fondamentaux et ses adjoints, qui sont des avocats hautement qualifiés, sont élus pour une durée de six ans, à la majorité des deux tiers du Parlement. Le Médiateur et ses adjoints ne peuvent être affiliés à un parti politique. L'indépendance budgétaire et financière du bureau du médiateur est garantie. Tout citoyen peut engager une procédure, si celui-ci est d'avis que l'acte ou l'omission d'une autorité porte atteinte à un droit fondamental de la personne qui introduit une requête, ou qu'il existe un risque imminent que ce soit le cas, à condition que la personne s'estimant lésée ait épuisé les voies de recours administratives et judiciaires. Les procédures engagées devant le Médiateur sont gratuites et l'identité de la personne s'estimant lésée peut demeurer confidentielle. Le Médiateur ne peut recevoir d'instructions concernant ses activités.

Le Médiateur joue aussi un rôle plus important du fait qu'il engage des procédures postérieures de contrôle des normes devant la Cour constitutionnelle depuis la suppression du dispositif permettant d'intenter des « actions populaires », au titre desquelles tout citoyen peut demander à la Cour constitutionnelle de procéder au contrôle judiciaire de la législation. En outre, conformément au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le bureau du Médiateur est chargé d'assurer les fonctions d'un mécanisme national de prévention de la torture.

La police est priée de travailler de manière non discriminatoire et il lui est interdit de se livrer à un profilage ethnique quelconque. Conformément à la loi sur la police, celle-ci doit agir avec impartialité et il ne saurait y avoir de collecte, de stockage et de traitement de données sur l'origine ethnique ou raciale. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour éviter les bavures et éventuels mauvais traitements de la part de la police, la délégation assurant que les cas avérés étaient extrêmement sporadiques.

Une table-ronde de lutte contre les ségrégations a été mise en place depuis 2013. Elle est composée d'une vingtaine de membres qui coopèrent avec une douzaine d'organisations non gouvernementales.

La Hongrie promeut des actions contre les préjugés envers les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués. Les manuels scolaires véhiculant des stéréotypes, qui ont été mentionnés par un membre du Comité, ne sont plus utilisés, a assuré la délégation.

Le Gouvernement a adopté une politique visant à placer les enfants handicapés dans des familles d'accueil. Le Programme national sur le handicap pour la période 2015-2025 cherche à améliorer la situation des enfants handicapés. Ces dernières années, le nombre d'enfants handicapés ayant reçu des soins et des services de protection spécialisés et ayant été confiés à des familles d'accueil n'a cessé d'augmenter. La Hongrie a mis un terme aux stérilisations forcées des femmes handicapées, la délégation assurant que l'on n'avait enregistré aucun cas depuis le début des années 2000. Elle a déploré que certains continuent de véhiculer une image négative du pays en diffusant des informations caduques.

S'agissant des zones de transit et des centres de rétention à la frontière, la délégation a assuré que personne n'y était détenu ou arrêté de quelque manière que ce soit. Il y a un malentendu à ce sujet. Ainsi, il est possible à tout moment de quitter une zone de transit pour retourner en Serbie par exemple. Les règles en vigueur en Hongrie sont parfaitement conformes au droit européen. Ce droit permet aux États d'examiner les demandes d'asile à la frontière et il n'implique pas d'autoriser l'entrée sur le territoire dans l'attente d'une décision. La loi sur l'asile stipule qu'un demandeur d'asile ne peut être placé en rétention pendant plus de six mois ou, s'il s'agit d'une famille avec des enfants mineurs, pendant plus de trente jours. Les conditions d'hébergement dans les centres sont parfaitement conformes aux normes recommandées, a assuré la délégation.

En réponse à des questions sur la procédure de grâce, la délégation a indiqué qu'il était exact qu'elle n'a pas complètement l'aval de la Cour européenne des droits de l'homme s'agissant du délai permettant d'introduire un recours pour un condamné à perpétuité. Le Gouvernement réfléchit aux possibilités juridiques de revoir la question.

Le Code de procédure pénale a apporté de nombreuses modifications et garanties sur la détention provisoire. La Hongrie n'est pas le seul pays à ne pas fixer de durée maximale, a rappelé la délégation.

S'agissant des conditions d'incarcération en prison, la délégation a indiqué que le taux de surpopulation carcérale atteint 127%, un chiffre en diminution grâce aux mesures prises depuis cinq ans – notamment en matière d'alternatives à la détention - qui devraient permettre de ramener le taux à 100% l'an prochain. Des toilettes séparées sont en cours d'installation pour toutes les cellules, un programme qui en est à sa phase finale de réalisation.

Déclarations de conclusion

M. PÉTER SZIJJÁRTÓ, Ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, a recommandé aux membres du Comité de prendre connaissance des faits nouveaux concernant l'Europe centrale. Il s'agit, selon lui, de la région la plus sûre du continent européen. La politique hongroise vise à améliorer la compétitivité du pays et sa sécurité et à consolider les valeurs familiales. Le Gouvernement agit conformément au mandat qui lui a été confié de façon largement majoritaire par la population. Il ne peut accéder à des demandes qui seraient contraires à la volonté du peuple, ce qui serait par définition antidémocratique. La Hongrie a pris des mesures énergiques contre la crise économique et, désormais, elle ne fait plus partie du problème mais de la solution, a-t-il ajouté.

Le ministre a relevé que de nombreuses questions avaient été posées sur les migrants. Pour bien comprendre la politique migratoire du pays, il convient de prendre en compte le fait que le Gouvernement de Budapest considère que l'immigration est dangereuse. Certains pensent, à l'inverse, qu'elle est bénéfique et il est clair que ce point de vue n'est pas conciliable avec celui du Gouvernement hongrois. Certains se préoccupent en effet plus de la sécurité des migrants que de celle des populations de souche, a-t-il déploré. Le peuple hongrois est la première préoccupation du Gouvernement et il est évident, selon M. Szijjártó, qu'on ne parviendra pas à un consensus à ce sujet.

La Hongrie ne reconnaît pas la migration comme un droit fondamental. Personne n'a le droit de se lever un beau matin, de choisir un pays sur la carte et de décider d'aller s'y installer. Pourquoi a-t-on refusé le passage par la Hongrie de milliers et de milliers de migrants, a-t-il demandé avant de répondre que le droit à la sécurité devait être garanti pour les populations sur leur territoire et tout devait être fait pour permettre aux migrants de rentrer chez eux. Ces derniers se mettent en danger eux-mêmes, comme on le voit en Méditerranée. Car si l'on doit accueillir des foules de gens venus d'ailleurs, des fractures se créeront au sein des sociétés.

La capacité à protéger ses frontières est l'une des premières prérogatives de tout État souverain, a poursuivi le ministre. Au demeurant, certains pays auxquels appartiennent des membres du Comité ont mis en place des mesures encore plus draconiennes que la Hongrie. Cette dernière appartient à l'espace Schengen, ce qui exige la surveillance des frontières externes de l'Union européenne. Or, la Hongrie se situe sur un tronçon de cette frontière externe dans son voisinage avec la Serbie. Quant au renvoi de migrants, M. Szijjártó l'a justifié en soulignant qu'ils arrivaient de pays sûrs, la Serbie et la Croatie par lesquels ils avaient d'abord transité.

Les quelque 400 000 migrants à avoir traversé le pays ont refusé de s'installer dans les centres prévus à leur intention, a déploré M. Szijjártó. Certains ont occupé une gare, piétiné des champs, circulé à pied sur la principale autoroute du pays et l'on ne voit pas en quoi cela constituerait un droit de l'homme. L'usage de gaz lacrymogènes a été provoqué par l'attitude agressive de migrants envers les forces de l'ordre en leur jetant notamment des pierres. Il y a eu des blessés parmi les policiers. Quel droit fondamental justifie cela, a demandé le ministre. Les forces de l'ordre ont fait preuve de retenue avant de finalement réagir à ces actes.

Le pays compte, par ailleurs, plus de 16 000 organisations non gouvernementales et il est légitime d'exiger de la transparence quant à leurs sources de financement, a-t-il encore expliqué. Il a dit son désaccord sur le fait que cela constituerait une tentative de faire pression sur les ONG. Cette transparence n'est en rien une entrave à leur action, selon lui.

Le chef de la délégation s'est interrogé sur la focalisation des membres du Comité sur l'Université d'Europe centrale, celle-ci n'étant pas fondée à jouir d'un quelconque privilège par rapport à la vingtaine d'universités existantes en Hongrie. Elle délivre un diplôme des États-Unis sans avoir dispensé d'enseignement dans ce pays. Le Gouvernement hongrois garantira toujours les meilleures conditions aux étudiants, tout comme aux investisseurs dans le pays, a-t-il assuré.

Si certaines questions n'ont pu avoir de réponses, de par leur nombre et de par un manque de temps, il y sera répondu par écrit, a promis le Ministre hongrois des affaires étrangères et du commerce.

Un membre du Comité a indiqué que, si le Comité et le Pacte ne régissent pas la politique migratoire des États, il leur est par contre demandé qu'un traitement humain soit garanti aux migrants ainsi que le respect du principe de non-refoulement. Le Comité ne dénie pas non plus à la police le droit de se défendre; en revanche, l'État concerné doit ouvrir une enquête lorsqu'il apparaît qu'un usage excessif de la force a peut-être eu lieu. Le même expert s'est étonné que le refoulement vers la Serbie ne soit pas considéré comme une violation du principe de non-refoulement. S'agissant de travail des organisations non gouvernementales, le Comité est évidemment d'accord sur la nécessité de transparence, mais le fait de désigner telle ou telle organisation comme ennemie du pays pose problème, a estimé l'expert. Un autre a dit avoir le sentiment que l'on semble penser à Budapest que dès lors que la majorité s'est exprimée, tout est permis au gouvernement élu.


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