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LE CONSEIL EXAMINE LES QUESTIONS RELATIVES AUX MINORITÉS ET ENTAME SON DÉBAT SUR LES ORGANISMES ET MÉCANISMES DE PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

Compte rendu de séance

Cet après-midi, le Conseil des droits de l'homme a tenu un dialogue interactif avec le nouveau Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités, M. Fernand de Varennes, qui a présenté son premier rapport, avant d’entamer son débat sur les questions relatives aux organismes et mécanismes de protection des droits de l'homme en entendant notamment les présentations des rapports du Forum sur les questions relatives aux minorités, du Forum social et du Comité de coordination des procédures spéciales.

M. de Varennes a indiqué que son rapport porte sur quatre thèmes prioritaires: l’apatridie ; les conflits ethniques ; la lutte contre les incitations à la haine, les discours xénophobes et les propos haineux à l’égard des minorités ; et le droit fondamental à l’éducation. Selon lui, ces quatre priorités sont extrêmement importantes car elles renvoient aux grands problèmes qui compromettent le régime des droits humains, la paix et la stabilité dans le monde. Le Rapporteur spécial a souligné que les membres des minorités sont particulièrement vulnérables et marginalisés : ils figurent parmi les plus pauvres, les plus démunis d’un point de vue social et économique et les plus susceptibles d’être apatrides et moins bien scolarisés.

M. de Varennes a ajouté que son mandat continuerait de se concentrer en priorité sur les questions relatives aux minorités roms. Il poursuivra également le travail entamé par ses prédécesseurs sur l’importance de lutter contre la discrimination, l’exclusion et d’autres violations des droits fondées sur l’appartenance à une caste ou autres statuts analogues, en particulier concernant les dalits et les burakumin. Il s’intéressera aussi aux questions concernant les personnes sourdes et malentendantes en tant que membres de minorités linguistiques.

Parmi les intervenants* qui se sont exprimés au cours du débat interactif avec le Rapporteur spécial, bon nombre ont reconnu la nécessité de prendre des mesures urgentes pour améliorer la compréhension et lutter contre les discriminations à l’égard des minorités. Plusieurs orateurs se sont inquiétés de la montée des discours d’intolérance et de l’incitation à la haine, qui menacent les progrès réalisés dans le domaine de la protection des droits des minorités.

S’agissant des organismes et mécanismes de protection des droits de l'homme. M. Fernand de Varennes a rendu compte des travaux de la dixième session du Forum sur les questions relatives aux minorités, qui s’est tenue à Genève du 30 novembre au 2 décembre 2017 et qui avait pour thème « Jeunes issus de minorités : vers des sociétés diverses et sans exclusion ». Plus de 500 personnes ont participé à cette session et formulé une série de recommandations portant notamment sur l’accès égal à l’éducation et l’utilisation des langues minoritaires à tous les niveaux d’enseignement, a-t-il indiqué. Il a également été demandé aux États de chercher à contrer les discours de haine à l’encontre de jeunes issus des minorités et à promouvoir l’image positive des minorités dans les médias numériques.

Mme Maria Nazareth Farani Azêvedo, rapporteuse du Forum social 2017, a rendu compte des travaux de ce Forum en rappelant qu’il avait porté sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans le contexte de l’épidémie de VIH/sida et d’autres épidémies et maladies transmissibles. Plus de 200 participants ont pris part à ces discussions et ont fait aux États et autres parties prenantes des recommandations, parmi lesquelles celle plaidant pour un renforcement de la coopération internationale et nationale dans le domaine des politiques de santé et pour une meilleure protection des droits des personnes infectées.

La Présidente du Comité de coordination des procédures spéciales, Mme Catalina Devandas Aguilar, a, quant à elle, présenté son rapport annuel en insistant sur le fort potentiel que recèle le système des procédures spéciales en termes de prévention et d’alerte précoce. Les procédures spéciales ont en effet agi rapidement par rapport à plusieurs situations nationales et ont tiré la sonnette d’alarme sur l’évolution inquiétante de questions thématiques telles que le changement climatique ou les migrations, a-t-elle souligné.

Mme Devandas Aguilar a réitéré l’objectif de coopération des procédures avec les États et autres parties prenantes pour progresser sur les questions de droits de l'homme et s’est inquiétée de la non-coopération ou de la coopération sélective de certains États. Elle a en outre lancé un appel à préserver le système des procédures spéciales et l’espace accordé aux titulaires de mandat au sein du Conseil. Quant au fait que certains titulaires de mandats aient fait l’objet d’attaques publiques ou personnelles, elle a souligné qu’il s’agissait d’une situation très préoccupante et totalement inacceptable.


Entamant son débat général sur ces questions, le Conseil a entendu les déclarations de plusieurs pays**. Il poursuivra ce débat général demain matin, à partir de 9 heures.


Promotion et protection de tous les droits de l'homme : débat interactif avec le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités

Présentation du rapport

Le Conseil des droits de l'homme était saisi du rapport de M. Fernand de Varennes, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités (A/HRC/37/66).

M. FERNAND DE VARENNES, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités, a présenté son premier rapport au Conseil, portant sur ses activités depuis août 2017 ainsi que sur les activités, avant cette date, de son prédécesseur, Mme Rita Izsák-Ndiaye. Le rapport porte sur quatre thèmes prioritaires : l’apatridie ; les conflits ethniques ; la lutte contre les incitations à la haine, les discours xénophobes et les propos haineux à l’égard des minorités ; et le droit fondamental à l’éducation. Pour le Rapporteur spécial, ces quatre priorités sont extrêmement importantes et font partie des grands problèmes qui compromettent le régime mondial des droits humains, la paix et la stabilité. M. de Varennes a dit avoir adopté une approche visant à rehausser la visibilité des questions relatives aux minorités en tant que droits humains, étant donné la vulnérabilité et la marginalisation bien trop fréquentes des minorités. En clair, a-t-il dit, les membres des minorités sont parmi les plus pauvres, les plus démunis aux niveaux social et économique, et les plus susceptibles d’être apatrides et moins bien scolarisés.

Dans la lignée du travail de son prédécesseur, M. de Varennes a dit avoir participé, à Buenos Aires en septembre 2017, à un atelier régional sur la situation des Roms dans les Amériques. Cet atelier a constitué un forum pour ces communautés parfois invisibles dans les pays de la région. Les problèmes sont très nombreux et M. de Varennes a attiré l’attention sur les suggestions positives des participants, comme l’importance de visites régulières du Rapporteur spécial dans les pays où les Roms sont confrontés à des difficultés et la nécessité d’élaborer des stratégies pour renforcer leur participation dans tous les domaines qui les concernent.

M. de Varennes a fait savoir que son mandat continuerait à se concentrer en priorité sur les questions relatives aux minorités roms. Il poursuivra également le travail entamé par ses prédécesseurs sur l’importance de lutter contre la discrimination, l’exclusion et d’autres violations des droits fondées sur l’appartenance à une caste ou autres statuts analogues, en particulier concernant les dalits et les burakumin (au Japon). Il s’intéressera aussi aux questions concernant les personnes sourdes et malentendantes en tant que membres de minorités linguistiques.

Avant d’entamer son mandat de rapporteur spécial, M. de Varennes a participé à une manifestation en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, en octobre, pour commémorer le 25e anniversaire de la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques. Le Rapporteur spécial a souligné que cette Déclaration était essentielle dans le contexte actuel de conflits, de crises humanitaires, de montée du populisme, de haine et de discrimination. Comme l’a indiqué le Haut-Commissariat pour les réfugiés il y a quelques mois, plus des trois quarts de la dizaine de millions d’apatrides dans le monde appartiennent à des minorités. L’apatridie n’est pas un phénomène naturel ni un hasard, a fait observer le Rapporteur spécial.

Débat interactif

L’Union européenne a salué la présentation des priorités thématiques du Rapporteur spécial. Il est important de prendre des mesures urgentes pour améliorer la compréhension et lutter contre les discriminations à l’encontre des minorités, a dit l’Union européenne. Elle a souligné que les femmes et les enfants étaient davantage soumis aux discriminations croisées. La Fédération de Russie a dit appuyer les thèmes prioritaires choisis par le Rapporteur spécial, notamment la prévention et la lutte contre la rhétorique de haine et l’incitation à la haine à l’encontre des minorités. Il faut une participation pleine et entière des minorités à la vie de la société. Le thème de l’accès à l’éducation mérite toute l’attention et l’appui du Conseil. Le Forum est une enceinte qui favorise le dialogue concernant les questions des minorités.

Le Mexique a demandé au Rapporteur spécial quelles mesures spécifiques il préconisait pour améliorer le fonctionnement du Forum sur la question des minorités. L’Autriche a demandé au Rapporteur spécial comment renforcer le cadre de prévention des violences contre les minorités et quelles activités il entendait mener dans ce domaine. La Slovénie a souligné l’incertitude concernant le statut de certaines minorités. Il faut éclaircir le concept de « minorité », a expliqué la délégation slovène, qui s’est montrée satisfaite que le Rapporteur spécial ait choisi son pays pour sa première visite.

Le Brésil, au nom d’un groupe de pays, a félicité le Rapporteur spécial d’avoir pris comme thème prioritaire la question de l’apatridie, un problème qui constitue un obstacle à la jouissance de leurs droits par certains membres de minorités. Le Rapporteur spécial doit avoir une approche holistique sur cette question, a recommandé le Brésil. Le Togo, au nom du Groupe africain, a dit souscrire à l’idée du Rapporteur spécial de créer un cadre législatif propice à la cohésion sociale. Le rapport souligne que le monde assiste à une augmentation des discours de haine à l’encontre des personnes appartenant à des minorités. Le Groupe africain demande que les minorités déplacées bénéficient de conditions de vie adéquates, du droit à l’éducation et de l’accès aux services de base dans les pays hôtes. La République démocratique du Congo a elle aussi insisté sur l’importance de soutenir les minorités par le biais de l’éducation et d’aides ciblées.
La Croatie a dit accorder une attention particulière à la minorité roM. La Croatie a adopté une stratégie qui vise à promouvoir les droits des Roms, notamment des jeunes. Le Monténégro applique pour sa part des mesures pour créer un environnement d’enseignement plus ouvert aux étudiants issus des minorités, et notamment les Roms. Au Sénégal, la Constitution interdit tout acte de discrimination racial, ethnique ou religieuse. Toutes les formes de discrimination sont sévèrement réprimées. Le Sénégal a souligné le rôle crucial de l’éducation pour promouvoir la tolérance. Le Pakistan a insisté lui aussi sur le rôle de l’éducation en tant que meilleure façon d’autonomiser les minorités. Les droits des minorités au Pakistan sont garantis par la loi, a assuré la délégation. Le Soudan a dit considérer les minorités comme autant d’éléments constitutifs d’une société plurielle.

L’Iraq a dit œuvrer à la création d’un environnement propice au retour en toute sécurité des personnes déplacées et de toutes les minorités. L’Iraq a pour objectif de préserver la cohésion sociale. Il a demandé au Rapporteur spécial comment il pourrait aider le gouvernement iraquien à surmonter les conséquences négatives des crimes commis par Daech.

La Grèce a fait observer que la multiplication de discours de haine et xénophobes menaçait les progrès réalisés dans la protection des droits des minorités. Elle s’est félicitée que le Rapporteur spécial s’engage à examiner le lien entre conflits, droit des minorités et promotion de l’inclusivité et de la stabilité. Sur son territoire, la Grèce cherche à améliorer l’intégration sociale de la minorité musulmane de Thrace, notamment par le biais de l’éducation et des opportunités d’emploi. Le Venezuela s’est dit lui aussi préoccupé par l’intensification des messages de haine et par la progression des partis d’extrême droite. Le Venezuela a appelé à prendre des mesures pour protéger les progrès déjà réalisés dans la protection des droits des minorités. Il a estimé qu’il fallait aussi continuer à progresser pour les droits de ces groupes vulnérables sans discrimination.

L’Afghanistan a dit partager les préoccupations du Rapporteur spécial sur le fait que les conflits qui impliquent des minorités se multiplient dans le monde. L’Afghanistan reconnaît les langues minoritaires et protège la liberté de culte et de religion de tous les citoyens, a-t-il assuré. Le Népal s’est dit engagé à aider les communautés marginalisées et décidé à appliquer une politique de « tolérance zéro » concernant les actes de discrimination fondés sur l’appartenance à une caste.

La Géorgie a réaffirmé son ferme engagement à promouvoir l’intégration civique et à protéger l’identité de la population minoritaire. Elle a fait observer qu’elle avait lancé le processus d’enregistrement et accordé un statut juridique approprié à la population rom. Le ministère de l’éducation a mis en œuvre un programme spécial intitulé « Inclusion sociale » qui prévoit des activités pour les enfants roms en vue de leur intégration dans la société et dans le système éducatif. La Roumanie s’est dite préoccupée par les incitations à la haine contre les personnes issues des minorités et a mis l’accent sur le concept d’interculturalité pour assurer la stabilité des sociétés. La Roumanie a pris des mesures concrètes pour améliorer la tolérance et lutter contre la discrimination, y compris par un cadre juridique qui doit s’adapter à un contexte social en pleine évolution.

La Suisse a déclaré qu’en tant que pays diversifié au plan culturel et linguistique, elle considérait la diversité comme une richesse essentielle pour toute société soucieuse d'évoluer dans un esprit inclusif et non discriminatoire. La Suisse a demandé au Rapporteur spécial comment la communauté internationale pourrait mieux soutenir et protéger les acteurs qui défendent les droits des minorités.

Les États-Unis ont dit être préoccupés par les attaques contre les membres de minorités, comme les chrétiens et d’autres minorités religieuses en Iran, les Yézidis au Moyen Orient et les Tibétains en Chine. Les États-Unis ont voulu savoir s’il existe des mécanismes détecter dans quels domaines les minorités sont les plus exposées à la violence. La Chine a rejeté les allégations des États-Unis, un pays, a-t-elle dit, où la tradition raciste connaît une résurgence avec la progression de groupes racistes suprématistes et où les forces de sécurité se montrent violentes à l’égard des noirs. La Chine compte 56 groupes ethniques : elle dispose d’un cadre législatif pour protéger ces minorités et leur assurer la participation à la vie publique. Les minorités ont le droit de s’exprimer dans leurs langues et de vivre leurs cultures.

La Hongrie a estimé que la promotion des langues officielles ne devrait pas se faire en limitant les droits linguistiques des minorités nationales, comme le fait la loi de l’Ukraine sur l’enseignement. La Hongrie a demandé au Rapporteur spécial comment mettre en œuvre le droit des minorités à recevoir une éducation dans leurs langues d’origine. L’Ukraine a déclaré que le conflit actuel sur son territoire ne s’expliquait pas par des conflits entre minorités. Cependant, les minorités subissent les affres de l’annexion russe, a dit l’Ukraine. Elle a demandé au Rapporteur spécial son opinion sur le fait que, dans les régions « sous occupation », le nombre d’élèves recevant l’enseignement dans la langue ukrainienne est tombé de 13 000 à seulement 370 élèves, soit 35 fois moins qu’avant l’occupation. Les droits des Tatars de Crimée n’existent même plus, a ajouté l’Ukraine.

Le Myanmar s’est enorgueilli de la cohabitation pacifique depuis des millénaires, sur son territoire, de plus de cent groupes ethniques. Le Myanmar ne ménage aucun effort pour renforcer cette cohésion par le dialogue, a assuré son représentant. La Tunisie a déploré, pour sa part, les violations des droits fondamentaux de la minorité rohingya, notamment des meurtres ayant entraîné son déplacement forcé.

L’Organisation de la coopération islamique (OCI) s’est félicitée de l’accent mis sur l’apatridie et sur les discours de haine à l’encontre des minorités par le Rapporteur spécial. Les actes de discrimination à l’encontre des minorités se multiplient, a regretté l’OCI, déplorant à cet égard la propagande d’extrême droite et ses répercussions sur les droits de l’homme des minorités. Les minorités musulmanes sont victimes de discriminations extrêmes au Myanmar et en Afrique centrale, notamment, a regretté encore l’OCI. Elle a enfin dénoncé les discours de haine à l’encontre des musulmans en Europe.

Plusieurs organisations non gouvernementales ont pris part au débat. World Council of Arameans (Syriacs) a souligné que les Araméens craignent aujourd’hui pour leur survie. Des fosses communes ont été découvertes à Mossoul où étaient enterrés les corps de quarante Araméens. Il faut poursuivre les auteurs de ces crimes en justice, a demandé l’ONG, qui a dénoncé les menaces permanentes à l’encontre des membres de sa communauté.

Le Congrès juif mondial a attiré l’attention sur la priorité à donner à la lutte contre la multiplication des crimes de haine dans le monde, notamment à l’encontre des juifs, compte tenu de la progression des discours de haine et négationnistes contre les juifs. Cette question doit devenir une priorité pour le Conseil, a demandé l’ONG. La Fondation Alsalam s’est dite préoccupée par les discours de haine à l’encontre des minorités en Arabie saoudite. L’ONG a déploré que les autorités saoudiennes utilisent les médias pour propager leur discours de haine et que le clergé nommé par elles stigmatise les chiites et leurs pratiques.

Mouvement international contre toutes les formes de discrimination a regretté qu’un grand nombre de pays de la région Asie-Pacifique n’aient toujours pas ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. L’ONG a condamné les nombreuses discriminations dont les dalits sont toujours victimes.

Le représentant de la Comisión Mexicana de Defensa y Promoción de los Derechos Humanos, qui s’est présenté comme un dirigeant de peuple autochtone, a affirmé avoir été arrêté, emprisonné et torturé par les autorités mexicaines, en dépit de son innocence. Ce qui lui est arrivé et qui arrive à d’autres défenseurs des droits des minorités montre que les autorités ne sont pas capables d’assurer la sécurité des peuples autochtones, a-t-il dit. Asian Legal resource Centre a déclaré que les peuples autochtones et autres minorités religieuses de Thaïlande, de Chine et d’Indonésie étaient victimes de violations de leurs droits et de discriminations. Ces pratiques montrent que les institutions partiales contribuent à rendre les minorités encore plus vulnérables, a dit l’ONG.

Minority Rights Group a salué les priorités thématiques élaborés par le Rapporteur spécial, le rejoignant dans l’idée selon laquelle la langue des signes est doit être considérée comme une langue de minorités. L’Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement -OIDEL- (au nom également de Catholic International Education Office) a souligné l’importance de garantir les droits des minorités par le biais d’un système éducatif adapté à leurs besoins.

Réponses et conclusions du Rapporteur spécial

En conclusion, pour répondre aux questions des délégations, M. DE VARENNES a estimé qu’il y avait plusieurs manières d’avancer, la première étant de reconnaître que les minorités ne sont pas des catégories à part mais qu’elles sont profondément ancrées dans le système des droits de l'homme. Pour pouvoir renforcer le rôle de l’ONU, il est essentiel de souligner cette dimension des minorités dans son travail, ce qui n’est pas toujours automatique. En ce qui concerne l’approche régionale, le Rapporteur spécial a assuré y travailler déjà : soucieux d’être plus accessible, il envisage d’organiser une réunion sur l’apatridie Asie du Sud-Est. Sur la question des conflits ethniques et la manière de traiter leurs séquelles, M. de Varennes a jugé utile de s’attaquer à la haine et aux divisions qui pourraient subsister en s’efforçant de mieux intégrer les minorités victimes du conflit et en s’attaquant aux racines du problème.

M. de Varenne a fait observer d’autre part que les discours de haine ciblent particulièrement les minorités, et qu’il était donc primordial d’identifier ces discours et de les distinguer de la libre expression. Il n’y a pas de solutions faciles à ce problème, mais le Rapporteur spécial essaiera de proposer des outils pour identifier les communautés les plus fragiles et des moyens d’établir un équilibre en matière de liberté d'expression, a-t-il dit. M. de Varenne a enfin déclaré qu’il aurait pour autre priorité d’étudier la vulnérabilité des femmes appartenant à des minorités et les discriminations spécifiques dont elles sont victimes, par exemple en matière de transmission de leur nationalité à leurs enfants ou par rapport à l’apatridie.

Organismes et mécanismes de protection des droits de l’homme

Présentation de rapports

Le Conseil était saisi du rapport sur la dixième session du Forum sur les questions relatives aux minorités (A/HRC/37/73), du 30 novembre au 2 décembre 2017 ; ainsi que du rapport sur le Forum social qui s’est tenu du 2 au 4 octobre 2017 (A/HRC/37/74). Le Conseil est également saisi du rapport du Comité de coordination des procédures spéciales sur la 24e Réunion annuelle des procédures spéciales (A/HRC/37/37, version préliminaire en anglais), qui s’est tenue en juin 2017.

M. FERNAND DE VARENNES, Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités, a indiqué que la dernière session du Forum sur les questions relatives aux minorités avait eu pour sujet général « Jeunes issus de minorités : vers des sociétés diverses et sans exclusion », décliné en quatre thèmes : l’éducation ; la participation des jeunes issus des minorités à la vie publique ; les médias numériques ; et les jeunes en tant qu’acteurs du changement.

Les recommandations émises à l’issue de ce Forum portent sur de nombreux sujets importants pour les jeunes et les communautés minoritaires auxquelles ils appartiennent, a expliqué M. de Varennes. Une des principales recommandations consiste à demander aux États d’assurer l’accès à l’éducation dans les langues minoritaires à tous les niveaux d’enseignement. S’agissant de la promotion de la participation des jeunes à la vie publique, les participants ont attiré l’attention sur le lien entre le niveau d’engagement des jeunes et les discriminations auxquelles ils doivent faire face. Il a été observé que le déni discriminatoire de la citoyenneté a un impact disproportionné sur les droits des minorités.

Les participants au Forum se sont en outre exprimés en faveur de la création de médias numériques qui permettent d’amplifier la voix des minorités. Ils ont insisté pour que les réseaux sociaux soient utilisés pour renforcer la coexistence pacifique. Les États ont été priés de contrer les discours de haine à l’encontre de jeunes issus des minorités et de promouvoir l’image positive des minorités dans les médias numériques.

Enfin, s’agissant du rôle des minorités dans la construction de la paix, la compréhension et le respect mutuel, les participants ont souligné le rôle des femmes des minorités en tant qu’agents de changement, dont la contribution doit être considérée comme un élément essentiel dans la construction de la paix.

MME MARIA NAZARETH FARANI AZEVEDO, Représentante permanente du Brésil auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, et rapporteuse du Forum social de 2017, a indiqué que les discussions avaient porté sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans le contexte de l’épidémie de VIH/sida et autres épidémies et maladies transmissibles. Le Forum a recommandé que toutes les parties prenantes améliorent la coordination des efforts relatifs à la santé. Au niveau international, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, l’Organisation mondiale de la Santé, l’Organisation internationale du Travail et ONU-Sida devraient renforcer leur coopération ; au plan national, les organes gouvernementaux devraient adopter une position commune pour mieux défendre les droits des personnes vivant avec la maladie. Les participants ont encouragé les États à profiter de l’Examen périodique universel pour faire rapport sur le respect des droits de l'homme dans le contexte du VIH/sida.

La mise en œuvre de l’objectif 3.8 du Programme de développement durable à l’horizon 2030, relatif à la couverture de santé universelle, a été jugée cruciale pour la réalisation du droit à la santé. Les États ont été pressés d’adopter des politiques de lutte contre la stigmatisation et invités à collecter des données différenciées sur les effets des épidémies sur les populations. Les participants ont également plaidé pour que les États et autres partenaires protègent les droits des personnes marginalisées, coopèrent avec la société civile, renforcent les capacités des travailleurs de santé et protègent les droits des patients et des communautés, a aussi dit Mme Farani Azevedo.

MME CATALINA DEVANDAS AGUILAR, présidente du Comité de coordination des procédures spéciales, a souligné que le rapport allait au-delà d’une simple liste d’activités : il montre que les procédures spéciales travaillent comme un système, de façon coordonnée, afin de fournir des recommandations à tous les processus des Nations Unies. L’expertise est regroupée pour protéger les droits de l'homme. Une bonne coordination a permis d’éviter davantage de doublons, a-t-elle fait savoir. En outre, malgré la création de nouveaux mandats, leurs titulaires ont mieux collaboré pour aborder différents aspects des droits de l'homme d’une situation donnée. Par exemple, pour la première fois, les titulaires des mandats sur la traite des êtres humains et sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants ont présenté un rapport conjoint à l’Assemblée générale. Enfin, les procédures spéciales ont fait davantage entendre leur voix dans les processus de l’ONU, en s’intéressant par exemple à des questions liées aux Objectifs de développement durable.

Le Comité de coordination a souligné le fort potentiel du système des procédures spéciales dans le domaine de la prévention et de l’alerte précoce, notamment en participant à des événements consacrés au rôle des organismes des droits de l'homme. Les procédures spéciales ont agi rapidement face à plusieurs situations nationales et ont tiré la sonnette d’alarme sur l’évolution inquiétante de questions thématiques telles que le changement climatique ou les migrations.

Mme Devandas Aguilar a réitéré l’objectif de coopération des procédures spéciales avec les États et autres parties prenantes pour progresser sur la question des droits de l'homme. La question de la coopération est d’ailleurs une préoccupation de longue date : le rapport constitue un progrès en ce sens qu’il fournit nombre d’informations sur le statut de coopération des États, comme le nombre d’invitations reçues ou de visites réalisées par les procédures. Ceci étant, la non-coopération ou la coopération sélective restent un problème, a indiqué la présidente du Comité. Quant au fait que certains titulaires de mandat aient fait l’objet d’attaques publiques ou personnelles, il s’agit d’une situation très préoccupante et totalement inacceptable, n’a-t-elle pas manqué de souligner.

La Présidente du Comité de coordination a lancé un appel à préserver le système de procédures spéciales et l’espace donné aux titulaires de mandat au sein du Conseil. Étant responsable de leur création, celui-ci a aussi la responsabilité d’accorder suffisamment d’attention à son travail. Mme Devandas Aguilar a souhaité que, plutôt que de se concentrer sur les chiffres, le Conseil s’attache à améliorer la qualité de l’interaction et à garantir un suivi des informations qui lui sont transmises. Pour sa part, l’une de ses priorités est de maintenir les canaux de communication ouverts et de faciliter le dialogue avec le Comité, a conclu Mme Devandas Aguilar.

Débat général

L’Australie, au nom du MIKTA (partenariat regroupant le Mexique, l’Indonésie, la République de Corée, la Turquie et l’Australie) a souligné que le 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme devait permettre de renouveler l’engagement de chacun à travailler de bonne foi avec le Conseil et ses mécanismes. Le Conseil doit mener à bien son mandat et pour se faire, l’Australie soutient le processus mis en œuvre pour en améliorer le fonctionnement. L’Australie a rappelé que tous les États devaient assurer un environnement sûr pour la société civile. Le pays a en outre plaidé pour que soient appuyées les capacités des petits États à travailler avec le Conseil.

La Bulgarie, au nom de l’Union européenne, a réitéré son soutien à l’indépendance et au rôle du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et de ses mécanismes. La Bulgarie s’est réjouie de l’augmentation du nombre de documents (rapports) soumis aux organes de traités et a rappelé la nécessité de respecter un équilibre dans la répartition géographique des membres de ces organes. Tous les pays doivent adresser une invitation permanente aux procédures spéciales, a en outre souligné la Bulgarie, avant de se dire préoccupée par les attaques dont a été la cible la Rapporteuse spéciale sur les droits des peuples autochtones. La Bulgarie a rappelé l’importance du mécanisme de l’EPU et a dénoncé les pressions croissantes exercées sur les défenseurs des droits de l’homme et les représailles contre ceux qui ont coopéré avec l’ONU. Enfin, la Bulgarie a rappelé l’importance du rôle de la société civile.

Le Portugal, au nom d’un groupe de pays, a rappelé, en ce 70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, l’engagement qu’ont pris les États membres de mettre en œuvre les dispositions de cet instrument au niveau national. Le Portugal s’est prononcé en faveur des mécanismes internationaux pour guider les États dans la mise en œuvre des recommandations qui leur sont adressées, notamment à l’issue de l’EPU. Il faut insister sur l’engagement de transformer des normes internationales dans le domaine des droits de l’homme en normes locales, nationales et régionales ayant un impact concret sur le terrain, a souligné le Portugal. Il faut aussi améliorer la manière avec laquelle le système onusien appuie les États pour qu’ils s’acquittent de leurs engagements internationaux.

Les États-Unis se sont dits préoccupés par le nombre de réunions et par l’augmentation inacceptable des dépenses du Conseil des droits de l'homme, tout en se félicitant des décisions qui ont été prises pour améliorer l’efficacité de ce Conseil. Ils ont aussi demandé aux États membres du Conseil de montrer l’exemple et ne pas se rendre coupables de harcèlement ou de menace à l’égard de défenseurs des droits de l'homme qui coopèrent avec cet organe. Enfin, les États-Unis ont dit qu’ils étaient toujours préoccupés par la fixation du Conseil contre Israël, un pays qui fait à lui seul l’objet d’un point spécifique de l’ordre du jour. S’ils reconnaissent que la situation des droits de l'homme dans tous les pays doit être étudiée, les États-Unis jugent contre-productive cette attitude en particulier.

L’Afrique du Sud a indiqué travailler à étendre la distribution d’antirétroviraux à plus de deux millions de personnes supplémentaires d’ici à 2020.

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* Délégations ayant participé au débat interactif avec le Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités: Union européenne; Brésil (au nom d'un groupe de pays); Togo (au nom du Groupe africain); Monténégro; Fédération de Russie; Pakistan; Croatie; Sénégal; Tunisie; Suisse; États-Unis; Autriche; Hongrie; Chine; Ukraine; Myanmar; Grèce; Venezuela; Iraq; Mexique; Géorgie; Roumanie; Soudan; Afghanistan; Organisation de coopération islamique; Népal et République démocratique du Congo; World Council of Arameans (Syriacs); Congrès juif mondial; Fondation Alsalam; Mouvement international contre toutes les formes de discrimination; Minority Rights Group; Comisión Mexicana de Defensa y promocion de los Derechos Humanos, Asociacion Civil; Asian Legal Resource Centre et Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement -OIDEL- ( au nom également de Catholic International Education Office).

** Délégations ayant participé au débat général sur les Organismes et mécanismes de protection des droits de l’homme: Australie (au nom du MIKTA); Bulgarie (au nom de l’Union européenne); Portugal (au nom d’un groupe de pays); États-Unis et Afrique du Sud.


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