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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES AUDITIONNE LA SOCIÉTÉ CIVILE

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a auditionné, cet après-midi, des représentants de plusieurs organisations non gouvernementales au sujet de la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dans les quatre pays dont les rapports seront examinés cette semaine, à savoir le Burkina Faso, Singapour, le Paraguay et Nauru.

S'agissant du Burkina Faso, ont particulièrement été évoqués la nécessité d’améliorer la représentation des femmes dans la vie publique et politique, les droits des femmes en zone rurale, les violences contre les femmes, ainsi que les grossesses et mariages précoces, entre autres.

Pour ce qui est de Singapour, ont notamment été évoquées la violence contre les travailleuses de la part de supérieurs hiérarchiques, les discriminations envers les femmes migrantes ayant épousé des Singapouriens, ainsi que la situation des femmes âgées.

En ce qui concerne le Paraguay, a notamment été dénoncée la censure opérée par le Ministère de l’éducation et de la science afin de s’opposer à la théorie et à l’idéologie du genre. Ont aussi été évoquées la question de l’avortement et la discrimination à l’égard des travailleuses domestiques.

S’agissant enfin de Nauru, a notamment été évoquée la situation régnant dans cette île du Pacifique après un siècle d’exploitation minière, parallèlement aux questions des changements climatiques et de l’accès des femmes à la terre.

Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l’examen du rapport du Burkina Faso (CEDAW/C/BFA/7).

Audition de la société civile

S’agissant du Burkina Faso

La Coalition CEDEF Burkina Faso a évoqué les trois questions prioritaires pour ce pays que sont, selon elle, une meilleure représentation des femmes dans la vie publique et politique, les droits des femmes en zone rurale et les violences contre les femmes. Elle a notamment demandé au Comité de recommander à l’État burkinabé d’introduire dans la loi portant fixation de quotas le positionnement alterné des femmes sur les listes électorales. Elle a également recommandé de promouvoir l’autonomisation financière des femmes rurales.

Plan international a soulevé la question des grossesses précoces, attirant l’attention sur le fait que les statistiques à cet égard étaient largement sous-estimées. La majorité des établissements privés ne donnent pas de chiffres, par crainte de porter atteinte à leur réputation et les plaintes sont rares, alors que certains enseignants abusent de leur position.

Le Centre d’information et de formation en matière de droits humains en Afrique (CIFDA) et Single Mothers Alliance fo BC ont dénoncé la poursuite des mutilations génitales féminines, des viols, ainsi que des mariages forcés et précoces au Burkina Faso. Ils ont recommandé que l’État garantisse l’accès à une information de qualité et acceptable ainsi qu’à une éducation sexuelle au sein des communautés et à l’école.

Food First Information Action Network (FIAN) a centré son intervention sur la situation des femmes des communautés locales d’Essakane affectées par l’exploitation minière. L’ONG a aussi dénoncé l’expulsion de la communauté de Kounkoufouanou de ses terres agricoles sous prétexte qu’elle occupait une zone pastorale. L’État doit prendre des mesures de dédommagement, a insisté l’ONG.

IPAS a évoqué le problème des décès des femmes en couche ou à la suite d’avortements. La législation étant restrictive, l’avortement est largement inaccessible et l’on estime que les interruptions de grossesse pratiquées dans la clandestinité sont à l’origine de plus de 28% des décès de femmes enceintes.

À l’issue de ces exposés, des membres du Comité ont demandé des précisions aux représentants des ONG. Une experte a souhaité avoir le point de vue des ONG sur les moyens de faire évoluer les mentalités, en particulier pour ce qui est du problème des grossesses précoces. Une autre experte a demandé si les femmes travaillant dans le secteur informel pouvaient bénéficier d’une protection sociale minimale. Elle a souhaité que soit analysé l’échec des tentatives de réforme législative dans le domaine des droits des femmes.

Répondant aux questions des expertes au sujet des grossesses précoces, une ONG a mentionné le manque de moyens des pouvoirs publics qui se révèlent incapables de promouvoir une éducation sexuelle véritable, alors que le sujet est tabou dans les familles. Cette ONG a aussi mentionné le poids de la pauvreté et de la faim, qui incitent certaines très jeunes filles à offrir leur corps contre la promesse d’un repas. L’ONG a cité le cas d’un enseignant ayant mis enceintes cinq écolières, le chef du village proposant comme sanction de faire fouetter les cinq fautives. L’illettrisme explique aussi le fait que de trop nombreuses femmes ignorent tout de leurs droits, ce qui affecte leur accès à la justice. Une autre ONG a attiré l’attention sur le fait que le Code pénal et le Code des personnes et de la famille étaient en cours de relecture, avec pour objectif d’harmoniser l’âge minimal légal du mariage des filles et des garçons.

S’agissant de Singapour

Women’s NGO Coalition, HOME, TWC2 et Centre for Domestic Employees, ont dénoncé la violence contre les femmes, notamment de la part de supérieurs hiérarchiques. Ces ONG ont en outre évoqué les discriminations envers les femmes migrantes ayant épousé des Singapouriens. Elle ont par ailleurs souligné que, face au droit musulman de la famille, l’État singapourien devait faire respecter le droit civil. Enfin, ces ONG ont dénoncé l’exploitation et les abus commis à l’encontre des travailleurs immigrés, estimant que l’État devrait renforcer la réglementation et les poursuites contre les pratiques abusives des employeurs.

Sayoni a estimé que l’Etat singapourien devrait remédier à un certain nombre de questions pressantes concernant les femmes lesbiennes, bisexuelles et transsexuelles. Elle a souligné l’importance que l’État promeuve des programmes éducatifs afin d’en finir avec les préjugés et la discrimination.

Project X a estimé que le travail sexuel devait être reconnu par la loi et que cette dernière devait aussi s’appliquer aux migrants se livrant à cette activité. L’ONG a en outre mis en cause l’attitude de la police envers, plus particulièrement, les femmes transsexuelles.

ILC Tsao Foundation/WINGS/NTUC ont attiré l’attention sur les femmes âgées, qui constituent la majorité des personnes du troisième âge. Leurs besoins sont différents de ceux des hommes, ce qui doit être pris en compte par l’État, notamment eu égard à la plus grande vulnérabilité financière des femmes. Des mesures devraient également être prises pour améliorer leur niveau de vie, notamment en favorisant leur maintien sur le marché du travail.

Suite à ces exposés, une experte du Comité s’est interrogée sur la participation des ONG au processus d’élaboration du rapport. Une autre experte s’est interrogée sur l’impact réel des allocations en faveur des personnes âgées. Une autre membre du Comité a insisté sur l’importance d’évaluer les progrès accomplis par Singapour depuis l’examen du précédent rapport, soulignant le rôle essentiel des ONG à cet égard.

Une ONG a affirmé que l’élaboration du rapport n’avait pas donné lieu à une concertation véritable de la société civile. La législation locale est déficiente ou d’application trop complexe pour réprimer le harcèlement sur le lieu de travail, alors même que les victimes sont souvent réticentes à porter plainte, a ajouté l’ONG. Quant aux travailleuses migrantes domestiques, elles sont marginalisées ; elles sont en effet tenues de demeurer chez l’employeur par lequel elles ont obtenu leur permis de travail et risquent l’expulsion si elles le quittent, a souligné l’ONG.

S’agissant du Paraguay

Promoting team for the shadow report of Paraguay to CEDAW Committee (Équipe de promotion du rapport parallèle du Paraguay) a dénoncé la censure opérée par le Ministère de l’éducation et de la science pour s’opposer à la théorie et à l’idéologie du genre. Il s’appuie sur des milieux fondamentalistes qui cherchent à éliminer les perspectives de genre dans les discours, les lois et les politiques publiques. Il convient également de dénoncer la discrimination à l’égard des travailleuses domestiques, ainsi que la faiblesse des institutions démocratiques et de l’accès à la justice. Sont également à déplorer les problèmes de la mortalité maternelle, des grossesses précoces et des avortements pratiqués dans des conditions déplorables.

Suite à cet exposé, une experte a évoqué la traite des femmes et des jeunes filles, souhaitant savoir comment les ONG analysaient les échecs rencontrés par le pays dans la lutte contre ce fléau. Une autre experte a demandé des précisions sur la situation des femmes défenseuses des droits humains. Une experte a estimé que l’opposition à la théorie du genre était en quelque sorte un « faux nez » afin de remettre en cause les droits des femmes.

En réponse à ces questions, la société civile a mentionné plusieurs cas de violences physiques et verbales, voire sur les réseaux sociaux, envers les militantes des droits des femmes et ont dénoncé la passivité totale de l’État à cet égard. La répression contre les porte-parole des femmes autochtones a aussi été mentionné, tout comme le manque de moyens accordés à la lutte contre la traite. Quant à l’interdiction de l’idéologie du genre, loin de passer inaperçue, cette mesure a soulevé une vive émotion dans le pays, a-t-il été souligné. Enfin, l’obligation pour les partis politiques de respecter un quota de 20% de femmes est devenue en quelque sorte un « plafond » (de verre) dont on se satisfait sans guère progresser plus avant dans la parité entre les sexes.

S’agissant de Nauru

Nauru Island Association of Non-Governmental Organisations a décrit la situation régnant dans cette île du Pacifique après un siècle d’exploitation minière, évoquant parallèlement les effets du changement climatique. L’ONG a en outre évoqué la question de l’accès des femmes à la terre et déploré qu’elles aient été privées de leurs droits traditionnels à faire valoir leur opinion. Le Gouvernement doit favoriser la consultation des femmes, a insisté l’ONG. Elle a par ailleurs attiré l’attention sur les déficiences du système de santé et estimé que l’État devait rechercher une assistance internationale dans ce domaine. Elle a particulièrement cité le cas des cancers qui sont diagnostiqués trop tard, les prélèvements étant envoyés en Australie aux fins d’analyse, ce qui implique des délais longs.

Suite à cet exposé, une experte est revenue sur le passif laissé par les sociétés minières qui, a-t-elle affirmé, devraient être contraintes à réhabiliter les terres qu’elles ont rendu stériles de par leurs activités. Évoquant la question de l’accès des femmes à la terre, elle a en outre souhaité en savoir davantage sur le régime foncier en vigueur à Nauru.

La représentante des ONG a indiqué qu’elle transmettrait ses réponses par écrit.



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CEDAW/17/29F