Aller au contenu principal

LE CONSEIL DÉBAT DES DISPARITIONS FORCÉES ET DE LA PROMOTION DE LA VERITÉ, DE LA JUSTICE, DE LA RÉPARATION ET DES GARANTIES DE NON-RÉPÉTITION

Compte rendu de séance
Il entend en outre des déclarations de ministres et vice-ministres du Qatar, du Venezuela, de la Finlande, du Royaume-Uni et de la Bolivie

Le Conseil des droits de l'homme a tenu ce matin et jusqu’en milieu d’après-midi un débat interactif avec la Présidente du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, Mme Houria Es-Slami et avec le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, M. Pablo de Greiff. Le Conseil a également entendu des déclarations des Ministres des affaires étrangères du Qatar, du Venezuela et de la Finlande, ainsi que du Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni et de la Vice-Ministre de la gestion institutionnelle et consulaire de Bolivie. La séance s’est en outre clôturée par une déclaration du Président du Comité des droits de l’homme du Cambodge.

Sheikh Mohammed Bin Abdulrahman bin Jassim Al-Thani, Ministre des affaires étrangères du Qatar, a dénoncé le siège dont est victime son pays de la part des pays voisins et a souligné qu’il rejette le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations.

M. Jorge Arreaza Montserrat, Ministre des affaires étrangères du Venezuela, a quant à lui dénoncé les accusations sans fondement sur la situation des droits de l’homme dans son pays, affirmant que la stratégie adoptée par certains centres de pouvoir contre le Venezuela est un exemple clair d’une utilisation des droits de l’homme comme arme politique. Il a ajouté que son pays avait décidé d’inviter trois procédures spéciales du Conseil dans les mois à venir et a demandé la coopération du Haut-Commissariat pour la mise en œuvre des 193 recommandations que le pays a acceptées dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU).

M. Timo Soini, Ministre des affaires étrangères de la Finlande, a estimé qu’une approche globale est nécessaire pour faire face à la crise des réfugiés et des migrations, soulignant que des solutions durables ne peuvent être trouvées que lorsque les droits de l’homme, la sécurité et le développement sont assurés dans les pays d’origine.

Lord Ahmad of Wimbledon, Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni, a regretté l’échec des autorités du Venezuela à faire respecter les droits de l’homme, comme en témoigne la répression très violente des manifestations dans ce pays. Il a ensuite condamné les violences commises par les forces de sécurité du Myanmar dans l’État de Rakhine et qui ont entraîné la fuite au Bangladesh voisin de dizaines de milliers de Rohingyas, ainsi que les violences commises sur des civils au Soudan du Sud. Il a également condamné les exactions perpétrées contre des civils en République démocratique du Congo, non seulement par des acteurs non étatiques mais aussi, selon des rapports, par des membres des forces gouvernementales.

Mme Carmen Almendras, Vice-Ministre de la gestion institutionnelle et consulaire de Bolivie, a notamment évoqué la crise migratoire sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale que traverse le monde et a notamment attiré l’attention sur la « Conférence mondiale des peuples pour un monde sans murs vers la citoyenneté universelle » qui s’est tenue les 20 et 21 juin dernier à Tiquipaya (Bolivie) en présence de représentants de plus de 45 pays. La Vice-Ministre en outre réitéré le soutien de la Bolivie au Venezuela, appelant la communauté internationale à s’opposer à tout type d’action extraterritoriale et unilatérale en violation du droit international.

Présentant son rapport, la Présidente du Groupe de travail sur les disparitions forcées a souligné qu’il existait un lien direct entre la disparition forcée et la migration, alors que les gouvernements et la communauté dans leur ensemble n’accordent pas suffisamment d’intérêt à ce sujet et ont tendance à fermer les yeux sur la question. Mme Es-Slami a ensuite rendu compte des visites effectuées par le Groupe de travail en Albanie et en Gambie et des rapports de suivi concernant l’Espagne et le Chili. L’Albanie a fait une déclaration en tant que pays concerné.

M. de Greiff a, pour sa part, présenté ses rapports, dont l’un contient les conclusions de l’étude mondiale sur la justice transitionnelle demandée par le Conseil. Si des progrès significatifs ont été faits en matière de justice transitionnelle, celle-ci continue aussi de se heurter à des difficultés dans sa mise en œuvre, a souligné le Rapporteur spécial. Ainsi, a-t-il précisé, l’étude globale a-t-elle identifié trois tendances qui constituent à ses yeux des défis majeurs, à savoir, la sélectivité, l’approche sécuritaire (« securitization » en anglais) de certaines questions de droits de l'homme et la fermeture de l’espace civil.

Dans le cadre du débat interactif qui a suivi la présentation de ces deux rapports, de nombreux intervenants* ont pris la parole. Beaucoup de délégations ont relevé et dénoncé le nombre très important de disparitions forcées dans le monde. Certaines ont appelé tous les États à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Concernant, le rapport de M. de Greiff, de nombreuses de délégations ont fait part de leur propre expérience en matière de justice transitionnelle. Il a été souligné qu’il ne saurait y avoir un modèle unique de justice transitionnelle, mais qu’il fallait tenir compte des réalités nationales de chacun.


Le Conseil poursuivait ses travaux cet après-midi en tenant un débat interactif groupé avec l’Experte indépendante chargée de promouvoir l’exercice par les personnes âgées de tous les droits de l’homme et le Rapporteur spécial sur le droit à l’eau potable et à l’assainissement.


Déclarations de hauts dignitaires

Sheikh Mohammed Bin Abdulrahman bin Jassim Al-Thani, Ministre des affaires étrangères du Qatar, a déclaré que le Qatar accordait la plus grande importance aux travaux du Conseil et que le respect et la protection des droits de l’homme étaient une priorité pour ce pays. Le Qatar s’est doté d’institutions qui ont pour objectif le développement de l’être humain, a-t-il indiqué. Le pays s’est également doté d’une Vision pour 2030 ayant trait aux droits de l’homme dans les domaines de l’éducation, du droit des femmes ou de l’environnement, a-t-il ajouté. Des mesures sont prises pour faire de cette Vision une réalité. Le Qatar occupe par ailleurs le haut du classement pour ce qui est de l’indice de développement humain, a-t-il fait valoir.

Le Ministre a ensuite expliqué que le Qatar rencontrait des difficultés exceptionnelles en raison du siège du pays par les pays voisins, qui bafoue les règles du droit international et des relations entre États. Cette crise a commencé par le piratage de sites Internet et la propagation de fausses nouvelles qui ont sali l’image du Qatar. Dès le premier jour, les pays responsables de ce siège ont rompu l’ensemble des relations commerciales et les Qataris n’ont pu se déplacer dans ces pays. Des étudiants notamment n’ont pu poursuivre leurs études et ont dû rentrer au Qatar. Il s’agit de violations qui se poursuivent aujourd’hui. La communauté internationale doit assumer ses responsabilités et éviter que les populations ne souffrent de ces différends entre pays, a affirmé le Ministre des affaires étrangères. Certaines mesures illégales prises dans le cadre de ce siège, notamment la publication d’une liste illégale d’individus et d’organisations qui soutiendraient le terrorisme, permettent la politisation de la notion de terrorisme avec des conséquences catastrophiques sur la stabilité et la sécurité mondiales. Depuis le début de la crise, les États responsables du siège cachent la vérité au monde et à leurs citoyens; ces pays sont responsables d’allégations non fondées comme celle laissant entendre que le Qatar soutiendrait le terrorisme. Certains de ces États ont été plus loin encore, en adoptant des lois interdisant à leurs citoyens de s’exprimer en faveur du Qatar. Il s’agit là d’une violation de la liberté d’expression. La motivation réelle de ce siège n’est certainement pas la lutte contre le terrorisme, puisque la politique menée par ces États n’est pas favorable à la lutte contre le terrorisme. Le Qatar ne saurait tolérer une telle situation. Ceux qui accusent leurs opposants d’être des terroristes ne peuvent lutter efficacement contre le terrorisme. Dans ce cadre, le Qatar appuie la médiation menée par le Koweït. Le dialogue est la seule solution face à ce conflit, a souligné le Ministre.

Le Ministre des affaires étrangères du Qatar a déclaré que le terrorisme est une violation patente des droits de l’homme et du droit international. Le Qatar rejette le terrorisme sous toutes ses formes et manifestations. D’ailleurs, le pays est un membre actif de la coalition mondiale contre Daesh et d’autres groupes terroristes, a fait valoir le Ministre. Pour conclure, il a souligné que le Conseil devait prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir le respect des principes et des normes relatifs aux droits de l’homme.

M. JORGE ARREAZA MONTSERRAT, Ministre des Affaires étrangères de la République bolivarienne du Venezuela, a évoqué le coup d’État militaire au Chili le 11 septembre 1973 et les attaques terroristes contre les États-Unis le 11 septembre 2001 pour rappeler que le terrorisme sous toutes ses formes représente une grave menace contre la paix et la stabilité mondiales. Malheureusement, a-t-il ensuite regretté en dénonçant les accusations sans fondement sur la situation des droits de l’homme dans son pays, la stratégie adoptée par certains centres de pouvoir contre le Venezuela est un exemple clair d’une utilisation des droits de l’homme comme arme politique. C’est pour cette raison que le Venezuela a toujours informé et dénoncé devant ce Conseil et d’autres instances du système des Nations Unies le comportement sélectif, partial et politisé du Haut-Commissariat aux droits de l’homme à l’égard de ce pays, alors que le Haut-Commissariat devrait réaliser ses activités dans le strict cadre du mandat confié par l’Assemblée générale.

Les récents rapports contre le Venezuela manquent de rigueur méthodologique, sont infondés et destinés à perturber la souveraineté et la stabilité du Venezuela, a insisté le Ministre, ajoutant qu’il se demandait parfois si le Haut-Commissariat ne répondait pas simplement à des directives des États-Unis – qui sont le « principal auteur de violations des droits de l’homme au monde et adversaire déclaré de la Révolution bolivarienne ». L’agression contre le Venezuela doit cesser, a-t-il exigé du Haut-Commissaire.

M. Arreaza Montserrat a évoqué l’escalade de violence politique au Venezuela entre avril et juillet 2017, en attribuant la responsabilité aux groupes antigouvernementaux et à leur recours systématique à des armes à feu. Ces dernières années, le Venezuela a subi divers types d’attaques contre son économie, dont la manipulation des cours du pétrole et l’attaque de sa monnaie, visant à déstabiliser le pays, a ajouté le Ministre. Il a dénoncé les menaces d’utilisation de la force militaire pour intervenir au Venezuela formulées par Donald Trump le 11 août dernier, ainsi que les mesures coercitives unilatérales décidées par le « Gouvernement impérial » le 25 août ; ces sanctions sont illégitimes et illégales, a rappelé M. Arreaza Montserrat à l’intention du Conseil des droits de l’homme.

Le Venezuela a beaucoup investi dans son modèle de protection des droits de l’homme et est l’un des pays les moins inégalitaires au monde, a poursuivi le Ministre. Grâce à son modèle de démocratie participative, c’est le peuple qui décide de la destinée de la nation, a-t-il insisté, évoquant également l’élection de l’Assemblée constituante le 30 juillet, qui a ramené la paix et a créé la Commission pour la vérité, la justice, la paix et la tranquillité publique, laquelle sera chargée d’enquêter sur les faits de violence pour motifs politiques enregistrés de 1999 à juillet 2017.

Assumant la présidence du Mouvement des non-alignés, le Venezuela s’attachera à la protection et à la promotion des droits de l’homme dans le monde, a indiqué M. Arreaza Montserrat. Il s’est félicité de la création par le Conseil du mandat de Rapporteur spécial sur le droit au développement. Par ailleurs, a-t-il rappelé, le Venezuela et le Mouvement des non-alignés soutiennent le droit inaliénable des Palestiniens à l’autodétermination et à un État libre et indépendant, sur la base des frontières de 1967. Enfin, le Venezuela a décidé d’inviter trois procédures spéciales du Conseil dans les mois à venir et a demandé la coopération du Haut-Commissariat pour la mise en œuvre des 193 recommandations que le pays a acceptées dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU).

M. TIMO SOINI, Ministre des Affaires étrangères de la Finlande, a rappelé que les droits de l’homme sont universels et doivent être respectés en toutes circonstances. Pour sa part, la Finlande a tenu compte des recommandations qui lui ont été adressées dans le cadre de l’Examen périodique universel et valorise ce type de commentaires. Le Ministre finlandais des affaires étrangères a ensuite affirmé qu’une approche globale est nécessaire pour faire face à la crise des réfugiés et des migrations, soulignant que des solutions durables ne peuvent être trouvées que lorsque les droits de l’homme, la sécurité et le développement sont assurés dans les pays d’origine.

La Finlande suit également avec préoccupation la situation des Rohingyas au Myanmar et celle de la Syrie, où les responsables de crimes de guerre et de violations des droits de l’homme doivent être traduits en justice, a poursuivi M. Soini. En ce qui concerne l’Ukraine, des violations des droits de l’homme en Crimée illégalement annexée sont à déplorer, a-t-il indiqué. La Finlande soutient la résolution sur la coopération avec la Géorgie, a-t-il ajouté, précisant attendre le rapport du Haut-Commissariat et demandant à toutes les parties de lui garantir l’accès à l’Abkhazie et à l’Ossétie du Sud. M. Soini a ensuite fait part de sa préoccupation au sujet du harcèlement et des restrictions en ce qui concerne la liberté d’expression, d’information et de réunion, notamment en Europe. Pour sa part, la Finlande place les droits des femmes et des filles au cœur de ses priorités, regrettant que nombre d’entre elles craignent pour leur sécurité dans son pays et estimant que la communauté internationale devait lutter contre toutes les formes de violence à leur encontre, en particulier dans les situations de conflit.

LORD AHMAD OF WIMBLEDON, Ministre d’État pour le Commonwealth et les Nations Unies du Royaume-Uni, a regretté l’échec des autorités du Venezuela à faire respecter les droits de l’homme, comme en témoigne la répression très violente des manifestations dans ce pays. Le Royaume-Uni continuera de coopérer avec ses partenaires internationaux pour éviter que le Venezuela ne s’éloigne toujours plus des droits de l’homme, a indiqué le Ministre d’État. Il a par ailleurs condamné les violences commises par les forces de sécurité du Myanmar dans l’État de Rakhine, violences qui ont entraîné la fuite au Bangladesh voisin de dizaines de milliers de Rohingyas. Responsables de la situation, les autorités du Myanmar devront en rendre compte, a souligné le Ministre; il les a appelées à laisser entrer la mission d’enquête des Nations Unies.

Le Ministre a ensuite dénoncé les violences commises sur des civils au Soudan du Sud, y compris des crimes sexuels perpétrés en tant que moyen de faire la guerre. Il a dénoncé de même les exactions perpétrées contre des civils en République démocratique du Congo, non seulement par des acteurs non étatiques mais aussi, selon des rapports, par des membres des forces gouvernementales. Le Ministre a en outre appelé à des progrès politiques urgents en Libye, afin de stabiliser la situation.

Le Ministre a d’autre part dénoncé et condamné les formes modernes de l’esclavage, un fléau qui n’épargne aucun pays, a-t-il relevé. Lord Ahmad of Wimbledon a indiqué que son Gouvernement défendait aussi les droits des femmes et des filles à vivre à l’abri de la violence et de la discrimination, et qu’il appuyait les travaux du Conseil des droits de l’homme dans le domaine de la protection des droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres. Enfin, le Royaume-Uni condamne les violences commises contre les défenseurs des droits de l’homme et de l’environnement. Le Royaume-Uni redynamisera bientôt l’institution du Commonwealth, pour permettre à ses membres de mieux défendre les droits de l’homme partout dans le monde, a annoncé le Ministre d’État. Il a insisté sur le rôle que peut jouer le Conseil des droits de l’homme pour obliger les auteurs de violations des droits de l’homme à rendre compte de leurs actes. Il a toutefois condamné la partialité des travaux réalisés dans le cadre du point de l’ordre du jour du Conseil consacré à la « Situation des droits de l’homme en Palestine et dans les autres territoires arabes occupés ».

MME CARMEN ALMENDRAS, Vice-Ministre de la gestion institutionnelle et consulaire de l’État plurinational de Bolivie, a réitéré l’engagement de son pays en faveur des droits de l’homme et la grande valeur qu’il attribue au Conseil. Ce Conseil a en effet montré qu’il est possible d’accorder une attention prioritaire aux populations exclues et discriminées, par exemple en matérialisant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ou grâce à l’insertion de résolutions sur l’harmonie avec la Terre – et surtout avec la Terre Mère. La Bolivie se félicite également de la résolution qui déclare l’année 2019 année internationale des langues autochtones.

La Vice-Ministre a ensuite informé le Conseil du Plan national d’action des droits de l’homme 2014-2018 et de la politique plurinationale des droits de l’homme 2015-2020 de son pays, qui sont des instruments visant à introduire la perspective des droits de l’homme dans la vie quotidienne. La Bolivie a ratifié les 18 instruments du système universel des droits de l’homme et présente de manière systématique les rapports demandés par les organes compétents, a-t-elle souligné.

Au sujet de la crise migratoire sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale, la Vice-Ministre a évoqué la « Conférence mondiale des peuples pour un monde sans murs vers la citoyenneté universelle » qui s’est tenue les 20 et 21 juin dernier à Tiquipaya (département de Cochabamba, Bolivie) en présence de représentants de plus de 45 pays. Les participants ont réfléchi collectivement sur les causes structurelles des migrations, telles que les guerres, les conséquences du changement climatique et du modèle économique qui génère de la violence, encourage les inégalités et détruit la Terre Mère. Cette Conférence s’est conclue par un certain nombre de propositions, comme le renforcement du système multilatéral par la ratification de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles. En conclusion, la Vice-Ministre bolivienne a réitéré le soutien de la Bolivie au Venezuela, appelant la communauté internationale à s’opposer à tout type d’action extraterritoriale, unilatérale et en violation du droit international.

M. KEO REMY, Président du Comité cambodgien des droits de l’homme, a fait une déclaration portant sur les progrès enregistrés au Cambodge, sur les développements récents et sur la promotion et le respect des libertés fondamentales par le Gouvernement cambodgien. Il a regretté que certaines entités étrangères alimentent une politique hostile au Gouvernement de son pays et a indiqué que le Ministre cambodgien des affaires étrangères et de la coopération avait révélé comment cela avait été orchestré sous couvert de défense des droits de l’homme. Sans la paix, la stabilité et le développement, la démocratie et les droits de l’homme sont vides de sens, a ensuite souligné M. Remy, rappelant que le Cambodge a accueilli depuis 1993 aussi bien des rapporteurs spéciaux que le Haut-Commissaire aux droits de l’homme et qu’il n’a jamais refusé de visite de la part des procédures spéciales. En outre, le Cambodge a accepté de nombreuses recommandations issues de son Examen périodique universel. M. Remy a réaffirmé que toute activité de coopération et de partenariat doit être fondée sur le respect mutuel, sans aucune ingérence étrangère.

Disparitions forcées et promotion de la vérité et de la justice

Présentation des rapports

Le Conseil est saisi du rapport du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires (A/HRC/36/39) qui rend compte des activités du Groupe de travail et des communications et des cas qu’il a examinés du 19 mai 2016 au 17 mai 2017. Le rapport contient aussi un chapitre présentant des observations préliminaires sur la question des disparitions forcées dans le contexte de la migration, sujet qui a fait l’objet d’une étude thématique soumise en tant qu’additif dans le document portant la cote A/HRC/36/39/Add.2. Le Groupe présente également son rapport de visite en Albanie (A/HRC/36/39/Add.1 et A/HRC/36/39/Add.4), ainsi qu'un rapport de suivi de ses recommandations suite à ses missions au Chili et en Espagne (A/HRC/36/39/Add.3 – en anglais).

Présentant ces rapports, MME HOURIA ES-SLAMI, Présidente du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires, a souligné que le Groupe de travail avait transmis 1094 nouveaux de disparition forcée à 36 États; 260 de ces cas ont été transmis dans le cadre de procédure d’urgence, à 23 États, ce qui continue d’être un nombre démesurément élevé, a-t-elle déclaré. Cependant, a-t-elle ajouté, le Groupe de travail a observé avec satisfaction une amélioration de la qualité de la coopération d’un nombre important d’États avec le Groupe de travail.

Présentant le rapport sur la question des disparitions forcées dans le contexte de la migration, Mme Es-Slami a souligné qu’il existait un lien direct entre la disparition forcée et la migration, alors que les gouvernements et la communauté dans leur ensemble n’accordent pas suffisamment d’intérêt à ce sujet et ont tendance à fermer les yeux sur la question. Certaines personnes migrent en raison d’une menace ou d’un risque d’être victimes de disparitions forcées dans leur pays, ou bien elles disparaissent au cours de leur itinéraire migratoire ou dans le pays de destination.

Le rapport aborde aussi la mobilité de migrants, de plus en plus précaire, comprenant des parcours longs et périlleux, entre autres, associés aux politiques migratoires des États de plus en plus rigides axées sur la dissuasion, a expliqué la Présidente du Groupe de travail.

Mme Es-Slami a ensuite fait part de la visite du Groupe de travail en Albanie, qui s’est déroulée en décembre 2016. Le Groupe de travail a souligné que 25 ans après l’effondrement de la dictature en 1991, l’Albanie doit encore remédier aux violations graves et systématiques des droits de l’homme commises par la dictature. Les recommandations contenues dans le rapport de visite mettent l’accent sur la nécessité d’engager le plus vite possible un processus d’enquête, d’exhumation, d’identification et de restitution des dépouilles des personnes disparues, pour garantir aux victimes le droit à la vérité, à la justice, à la réparation et à la mémoire, et instaurer des garanties de non-répétition.

Mme Es-Slami a par ailleurs présenté les observations et les recommandations préliminaires du Groupe suite à la visite qu’il a effectuée en Gambie ; elle a souligné que toutes les mesures tendant à la vérité, à la justice et aux réparations devraient être conçues et mises en œuvre en consultation avec les proches des disparus et la société civile et a préconisé notamment la mise en place d’une Commission de vérité et de réconciliation.

Mme Es-Slami a en outre présenté les rapports de suivi concernant l’Espagne et le Chili. S’agissant du Chili, le Groupe de travail a regretté que la mise en œuvre des recommandations du Groupe de travail ait été conçue et engagée sans la participation active des victimes. Concernant l’Espagne, le Groupe de travail a réitéré la majorité des recommandations formulées suite à la visite du Groupe de travail en 2013 concernant les droits à la vérité, à la justice et à la réparation pour les victimes des disparitions survenues pendant la guerre civile et la dictature.


Enfin, le Groupe de travail s’est joint à l’appel du Haut-Commissaire aux droits de l’homme pour doubler, dans les cinq prochaines années, le nombre de ratifications de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Le Conseil est également saisi du rapport du Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition (A/HRC/36/50, à paraître, et Add.1, en anglais, qui contient une étude mondiale sur la justice transitionnelle).

M. PABLO DE GREIFF, Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, a présenté deux rapports, un thématique et un autre contenant les conclusions de l’étude mondiale sur la justice transitionnelle demandée par le Conseil des droits de l'homme. Dans le cadre de cette étude, le Rapporteur spécial a précisé avoir tenu cinq réunions régionales pour recueillir des informations auprès des parties prenantes, États et société civile comprise. Il s’est ainsi rendu au Caire (Égypte, en novembre 2012), à Buenos Aires (Argentine, en décembre 2012), à Kampala (Ouganda, en novembre 2013), à Berlin (Allemagne, en mai 2014) et à Colombo (Sri Lanka, en novembre 2016).

L’étude constate que des progrès significatifs ont été faits en matière de justice transitionnelle, notamment l’adoption dans un court délai de cadres normatifs définissant les obligations des États, a indiqué le Rapporteur spécial. La justice transitionnelle est ainsi devenue en trente ans une des politiques que les États envisagent de mettre en œuvre. Les pays de toutes les régions ont en outre accumulé une bonne expérience dans la mise en œuvre des mesures de justice transitionnelle, même si quelques disparités demeurent, liées notamment au fait que certains États ont commencé avant d’autres. Les questions transversales sont également prises en compte, comme la reconnaissance des victimes en tant que sujets de droits, le genre, l’inclusion, les poursuites à l’encontre des auteurs de violation des droits de l'homme, s’est aussi félicité le Rapporteur spécial. Il a en outre observé que la question des amnisties et des immunités, en particulier leur incompatibilité avec le droit international, était aussi abordée, de même que le rôle de la justice transitionnelle dans les domaines de la vérité, de la préservation et de l’accès aux archives et des réparations et mécanismes de plaintes.

Cependant si ces progrès sont notables, il faut aussi dire que la justice transitionnelle continue aussi de se heurter à des difficultés dans sa mise en œuvre, a poursuivi M. de Greiff. Ainsi, l’étude globale a-t-elle identifié trois tendances qui constituent à ses yeux des défis majeurs, à savoir, la sélectivité, l’approche sécuritaire (NDLR : « securitization » en anglais, notion qui apparaît au paragraphe 74 du rapport) de certaines questions de droits de l'homme et la fermeture de l’espace civil. Il y a également une tendance, que les économistes appellent « mimétisme isomorphique » et qui consiste à répliquer des institutions, sans se soucier de la finalité. On peut ainsi se demander si dans certains cas, l’établissement de commissions vérité et réconciliation était la meilleure façon d’aborder la question de la justice transitionnelle, s’est interrogé le Rapporteur spécial.

S’agissant de la mise en œuvre de la justice transitionnelle dans le contexte d’une faiblesse institutionnelle, M. de Greiff a indiqué que son rapport constate les écarts factuels dans la mise en œuvre de la justice transitionnelle entre États. Sans surprise, les capacités et les caractéristiques des institutions étatiques sont en corrélation avec les violations des droits de l'homme commises, notamment lorsque l’État est le premier responsable de la grande majorité de ces violations, a-t-il dit. Dans ce contexte, le rapport se penche sur les moyens de renforcer la justice transitionnelle dans le contexte où les mécanismes dédiés ne sont pas à même de le faire ; il propose de se doter de mécanismes supplémentaires, notamment d’outils d’alerte. Du point de vue du Rapporteur spécial, reproduire les mécanismes existants, comme les commissions vérité et réconciliation, sans chercher à innover est insuffisant. Parmi les outils nouveaux, il a cité les programmes d’appui aux victimes ou le renforcement de la société civile.

Pays concerné

L’Albanie a rappelé qu’elle avait ratifié tous les instruments internationaux et régionaux en matière des droits de l’homme et qu’elle restait engagée en faveur de la vérité et de la justice. Elle a indiqué que les recommandations du Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires devraient être prises en compte par son Gouvernement, précisant que ces recommandations constituent une excellente base pour définir les problèmes et adapter les mesures nécessaires. Certaines recommandations nécessitent toutefois une réponse holistique et un cadre spécifique, notamment en ce qui concerne la responsabilité des auteurs de disparitions, et la réforme de la justice récemment adoptée par le Parlement albanais renforcera précisément la mise en œuvre de ces mesures, a fait valoir la délégation albanaise. L’Albanie a remercié le Groupe de travail et lui a garanti sa pleine coopération à l’avenir.

Débat interactif

S’agissant des disparitions forcées ou involontaires, l’Union européenne a salué le travail essentiel du Groupe de travail pour soutenir les familles de personnes disparues et indiqué partager la préoccupation du Groupe de travail sur les disparitions forcées face à l’ampleur de ce phénomène. L’Union européenne a réitéré son appel à tous les États afin qu’ils coopèrent avec le Groupe de travail en répondant favorablement à ses appels urgents et à ses demandes de visite sur le terrain. L’Union européenne s’est ensuite enquise des prochaines étapes des travaux concernant les disparitions forcées imputables à des acteurs non étatiques.

La France s’est dite inquiète du grand nombre de cas de disparitions forcées, notamment celles de courte durée qui ne sont pas connues. Elle a appelé tous les États à coopérer avec le Groupe de travail. La France a précisé qu’elle présenterait avec d’autres, à la fin de cette session du Conseil, une résolution visant le renouvellement pour trois ans du mandat du Groupe de travail.

Alors que le Groupe de travail sur les disparitions forcées doit visiter l’Ukraine en 2018, la Fédération de Russie espère qu’il pourra obtenir des informations sur les cas de disparitions forcées avérés et rapportés dans ce pays.

La Grèce a condamné les cas de traite de personnes dans le cadre des migrations et a exprimé l’espoir que cette question serait abordée dans le cadre du pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.

Le Pakistan a indiqué que, dans de nombreux cas transmis par le Groupe de travail sur les disparitions forcées, l’information relative aux allégations de disparition était incomplète et ne permettait pas d’enquêter. Le Pakistan a rappelé que les informations doivent être complètes et impartiales pour avoir de la valeur. Le pays a également demandé s’il a été envisagé d’enquêter sur les effets de l’occupation et du déni du droit à l’autodétermination dans les territoires palestiniens occupés.

Regrettant que plus de vingt États n’aient pas répondu à la demande de visite du Groupe de travail, la Belgique a souligné que la ratification de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées est essentielle. Elle a demandé à la Présidente du Groupe de travail d’en dire davantage sur le travail qu’elle souhaite voir le Groupe effectuer et sur les recommandations intéressant le Conseil de sécurité.

Le Soudan a assuré le Conseil de sa volonté de collaborer avec le Groupe de travail. Le Venezuela a souligné que sa Constitution interdisait formellement toute disparition forcée – un délit dont les auteurs sont sanctionnés en vertu du Code pénal.

Les Maldives ont déclaré que les autorités avaient fait une priorité de l’enquête sur la disparition de M. Ahmed Rilwan, blogueur et journaliste. Les équipes d’enquête ne négligent aucun moyen pour résoudre cette affaire et les autorités elles-mêmes prennent toutes les mesures pour accélérer l’enquête, a assuré la délégation.

L’Iraq, qui subit de plein fouet les agissements du groupe état islamique, coupable notamment de disparitions forcées, demande la coopération et l’assistance technique de toute entité pouvant l’aider dans ce contexte. Bahreïn a indiqué condamner et réprimer la disparition forcée, faisant valoir que dans ce pays, tous les lieux de détention peuvent être librement visités et qu’une loi existe contre la torture et autre traitement cruel, inhumain ou dégradant dans les hôpitaux et lieux de détention.

La Tunisie a réitéré son engagement à coopérer avec les mécanismes des Nations Unies chargés de la lutte contre la disparition forcée. La Tunisie a indiqué avoir adopté des lois pour protéger la dignité et l’intégrité physique des personnes, y compris pour ce qui est de l’interdiction de la torture; la disparition forcée est considérée comme un crime contre l’humanité, a précisé la délégation tunisienne.

Le Maroc a salué l’important travail réalisé par les membres du Groupe de travail et a soutenu le renouvellement du mandat de ce Groupe. Le Groupe de travail doit bénéficier des moyens de s’acquitter de sa mission, a souligné la délégation marocaine.

La Chine a demandé à tous les pays de sanctionner les auteurs de disparitions forcées. Elle a ensuite demandé au Groupe de travail de respecter, dans le cadre de son travail, les termes de son mandat et de rechercher la coopération avec les États membres.

L’Afrique du Sud a indiqué qu’environ 2000 personnes vivant en Afrique du Sud avaient disparu pendant la période de l’apartheid. Elle a en outre souligné le lien existant entre traite des êtres humains et disparitions forcées.

Le Portugal s’est dit préoccupé par le nombre de disparitions forcées dans le monde, dont témoigne le grand nombre de nouvelles dénonciations portées à la connaissance du Groupe de travail. Le Portugal a ajouté constater avec inquiétude que de nombreux pays concernés ne répondent pas aux demandes d’information du Groupe de travail. Aussi, le pays a-t-il appelé tous les États à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.

Dans les régions de Crimée et de Louhansk, les populations sont victimes de disparitions forcées de la part des « groupes armés terroristes soutenus par la Fédération de Russie », a dit la délégation de l’Ukraine, ajoutant que pour sa part, son Gouvernement était disposé à coopérer avec le Groupe de travail sur les disparitions forcées qui doit se rendre à Kiev en 2018.

La Lettonie déplore elle aussi le nombre élevé de personnes disparues tel que le constate le Groupe de travail. Il n’y aucune justification à la disparition forcée, a insisté la délégation lettone, appelant les États à coopérer avec le Groupe de travail.

La République islamique d’Iran a pour sa part fait un lien entre disparitions forcées et migrations, y compris la migration forcée. Pour cette raison, les États doivent prendre des mesures de lutte contre le terrorisme, par la biais d’une coopération internationale, a estimé la délégation iranienne.

Le Bénin a apporté son soutien aux recommandations du Groupe de travail et a estimé que les auteurs de disparitions forcées doivent être tenus responsables de leurs actes.

Le Japon a lui aussi encouragé les États à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. La question des enlèvements de citoyens japonais par la République populaire démocratique de Corée reste une préoccupation douloureuse pour le Japon. La délégation japonaise a prié la République populaire démocratique de Corée de faire des efforts sincères pour améliorer la situation des droits de l’homme, y compris s’agissant de ces enlèvements.

Le Monténégro a dit s’être associé à la campagne du Haut-Commissariat visant à doubler le nombre de ratifications de cet instrument important qu’est la Convention susmentionnée. Le Monténégro continue d’approfondir sa coopération avec les pays de sa région pour faciliter la recherche des personnes disparues pendant le conflit en ex-Yougoslavie : 57 cas ne sont toujours pas résolus en ce qui concerne le Monténégro.

Les Philippines ont indiqué ne tolérer aucune disparition forcée ou involontaire, une pratique sanctionnée par le Code pénal philippin depuis 2012. Tous les cas dénoncés font l’objet d’enquête judiciaire et leur répression est rendue plus efficace grâce aux mesures de coordination des organes concernés de l’État.

Chypre a observé que le mandat du Groupe de travail était, malheureusement, aussi pertinent de nos jours qu’au moment de sa création, dans les années 1980. Le Groupe de travail a-t-il envisagé de collaborer avec d’autres institutions pour faire face aux problèmes qu’il a constatés dans le contexte des migrations, a demandé Chypre?

La Libye a renouvelé son invitation au Groupe de travail, dont la visite prévue dans le pays avait été reportée. La Libye a regretté que le paragraphe 90 du rapport allègue que le Gouvernement semble complice de bandes criminelles. La délégation libyenne a réfuté les allégations de cette nature, qui ne tiennent pas compte des efforts des autorités pour mettre fin aux activités des criminels, notamment pour ce qui est de la traite des personnes et des disparitions forcées.

Plusieurs organisations non gouvernementales ont ensuite pris la parole. Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc a expliqué avoir apprécié les travaux du Groupe de travail concernant les cas de disparitions forcées à Bahreïn, ainsi que la demande envoyée par le Groupe du travail pour une visite dans le pays. Les autorités de Bahreïn ont interpelé deux personnes sans que leur famille sache où elles se trouvent et l’une de ces deux personnes sera le premier civil à être jugé par la justice militaire, encourant aujourd’hui un risque important d’être torturée, a expliqué l’ONG.

Franciscain international a souligné que les promesses faites au peuple sri-lankais par le passé n’ont pas été respectées. Les lois contre le terrorisme donnent en fait carte blanche aux autorités sri-lankaises, ce qui est préoccupant en matière de disparition forcée. L’ONG a ajouté que des rapports continuaient à lui parvenir concernant des cas d’enlèvements et de disparitions forcées de Tamouls.

La Commission internationale de juristes a souligné que les auteurs de disparitions de migrants devraient être poursuivis à hauteur de la gravité de ces actes. C’est en Asie du Sud qu’il y a le plus grand nombre de disparitions forcées dans le monde, sans que ce type d’actes ne soit reconnu dans de nombreux pays de cette région, a déploré l’ONG.

Évoquant la résolution sur la sécurité des journalistes, l'Article 19 - Centre international contre la censure a indiqué avoir ouvert un bureau au Mexique, qui a enregistré un grand nombre de disparitions ; déplorant que les autorités n’aient pas lancé d’enquêtes adéquates, l’ONG les a appelées à respecter leurs obligations.

Verein Südwind Entwicklungspolitik a évoqué les 547 cas de disparitions forcées en Iran mentionnés dans le rapport, la plupart datant de 1988 et 1989. L’ONG a souligné que les familles de personnes disparues ou exécutées ont droit à la vérité et à la justice.

Le Conseil international pour le soutien à des procès équitables et aux droits de l’homme s’est dit préoccupé par les disparitions forcées de personnes arrêtées par des autorités qui refusent d’indiquer où elles sont retenues, comme cela est le cas en Arabie saoudite et à Bahreïn. L’ONG a rappelé que chacun a droit à un procès juste et équitable, ce qui suppose l’indépendance de la justice et ce qui n’est pas le cas dans plusieurs pays du Golfe, a-t-elle déclaré.

Asian Legal Resource Centre a estimé que les efforts du Groupe de travail doivent être intensifiés, en particulier pour renforcer l’indépendance de la justice, de même que les droits des défenseurs des droits de l’homme et des avocats, l’ONG évoquant alors plus particulièrement les situations au Bangladesh et au Pakistan.

La Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, qui constitue un mouvement de familles syriennes dont certains membres ont disparu, a appelé le Conseil à être le chef de file pour trouver une solution afin de divulguer les noms de toutes les personnes détenues par les autorités, de manière à leur fournir une assistance ; d’assurer l’accès des associations de droits de l'homme aux lieux de détention ; et de faire abolir les tribunaux militaires pour garantir des procès justes et équitables.

Centro de Estudios Legales y Sociales Associacion Civil a attiré l’attention du Conseil sur le cas de Santiago Maldonado, disparu le 1er aout dernier alors qu’il était poursuivi par la gendarmerie argentine dans le cadre d’une répression visant la communauté Mapuche.

Deux civils kurdes ont par ailleurs été abattus par les gardes-frontière iraniens à Baneh, rejoignant ainsi les 149 autres victimes de cette répression basée sur l’origine, a pour sa part indiqué International Educational Development , appelant la communauté internationale à condamner la République islamique d’Iran pour ces faits et les autres actes de discriminations visant les minorités dans ce pays.

En ce qui concerne la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, l’Union européenne a fait part de son engagement en faveur de la justice de transition et a expliqué soutenir fermement le renouvellement du mandat du Rapporteur spécial chargé de la question. L’Union européenne s’est enquise auprès du Rapporteur spécial de ce qui constituait selon lui le principal défi pour son successeur.

La Tunisie, au nom du Groupe africain, a expliqué que l’Afrique avait continué à œuvrer en vue de remédier à une culture d’impunité aux niveaux national, régional et continental. La lutte contre l’impunité est un des fondements des principes de l’Union africaine concernant la démocratie, les droits de l’homme et l’état de droit. Les expériences africaines ont contribué à faire avancer de nombreuses initiatives de justice transitionnelle aux niveaux national et international. La Tunisie a expliqué qu’aucune approche de justice transitionnelle ne pouvait être facilement dupliquée.

L’Uruguay, au nom d’un Groupe de pays (Argentine, Brésil, Chili, Colombie et Uruguay) a défendu les mesures qui visent à assurer la pleine mise en œuvre des droits de l’homme. Cela implique le soutien à la mise en place d’institutions post-conflit telles que des commissions de vérité et de réconciliation. Le rapport du Rapporteur spécial témoigne des nombreuses mesures de transition prises en ce sens dans les pays de la région.

La Suisse a souligné que l’identification des grandes tendances figurant dans le rapport du Rapporteur spécial reflète la complexité de la thématique et pose les défis pour le prochain détenteur du mandat. La Suisse a repris à son compte les propos du Rapporteur spécial concernant le rôle crucial de la société civile dans ce contexte. La Suisse a souhaité savoir si les nouvelles réalités exigent que le cadre conceptuel existant soit mis à jour.

La Sierra Leone a indiqué que le système de justice à lui seul n’est pas suffisant pour satisfaire les plaintes en justice des victimes de violations systématiques des droits de l’homme. La justice transitionnelle est importante dans la reconnaissance des graves souffrances et dans l’octroi de réparations pour les victimes et les survivants. Au Sierra Leone, les mécanismes de justice transitionnelle ont joué un rôle important dans les programmes de réhabilitation d’après-guerre.

Alors que des recommandations du Rapporteur spécial s’adressent à différents organes, la Fédération de Russie a souhaité savoir comment la question de la justice transitionnelle pouvait être répartie entre les différents organes des Nations Unies, tout en évitant les doublons – en particulier avec les initiatives du Conseil de sécurité.

La France a quant à elle souhaité savoir comment les processus de justice transitionnelle et de réparation pouvaient contribuer à la consolidation institutionnelle des États. La France a indiqué avoir récemment répondu à une demande d’assistance technique de la Gambie et soutenir les initiatives tunisienne et colombienne en la matière. La Colombie a précisé que, dans le contexte de l’accord de paix récemment signé, les programmes de justice transitionnelle en œuvre excluent les délits et crimes les plus graves des mesures d’ amnistie.

La Belgique s’est inquiétée de la tendance, à travers le monde, à réduire l’espace laissé à la société civile.

Le Venezuela a indiqué avoir créé, en 2013, une commission pour établir la vérité sur les crimes d’État commis par les gouvernements qui se sont succédé dans ce pays entre 1958 et 1998.

L’Australie a souligné que la prévention des violations des droits de l’homme et l’obligation redditionnelle des responsables étaient essentielles à la prévention des conflits. L’Australie a insisté également sur l’importance de la participation des femmes aux processus de paix.

L’Égypte est d’avis que les mécanismes nationaux doivent être prioritaires en matière de justice, y compris transitionnelle. La délégation égyptienne a en outre souligné qu’il n’y a pas de modèle unique en matière de droits de l'homme et de justice transitionnelle.

L’Italie, qui applique actuellement son troisième plan national d’action sur les femmes, la paix et la sécurité couvrant la période 2016-2019, a souhaité savoir quelles mesures peuvent être prises pour renforcer la reconnaissance des droits des victimes et des femmes dans les processus de justice transitionnelle, ainsi qu’en matière de prévention.

Alors que plus de 70% des personnes portées disparues dans le cadre du conflit de 1992-1995 ont été comptabilisées, la Bosnie-Herzégovine estime que la recherche de ces personnes est une obligation morale et donc une question prioritaire dans le pays ; la délégation appelle donc les États n’ayant pas encore répondu aux demandes de la Bosnie-Herzégovine d’y apporter urgemment une suite favorable.

Les États-Unis prennent note des rapports de M. de Greiff et demandent urgemment au Gouvernement de Sri Lanka de continuer les efforts en vue d’un processus significatif et crédible de justice transitionnelle qui réponde aux exigences de la communauté internationale et du peuple de Sri Lanka.

La Tunisie a dit avoir traversé un long chemin en matière de justice transitionnelle, avec pour couronnement en 2015 l’adoption d’une loi sur la justice transitionnelle.

L’Autriche a pris note du rapport du Rapporteur spécial, s’agissant notamment des obstacles qu’il discerne dans l’application de la justice transitionnelle. Le rapport donne des pistes utiles pour faire face aux problèmes que suscitent l’ampleur des violations des droits de l’homme et les lacunes judiciaires dans les situations d’après-conflit, a souligné l’Autriche.

Le Maroc a salué la présentation de l’étude du Rapporteur spécial sur la justice transitionnelle dans le monde et a rappelé qu’il ne saurait y avoir un modèle de justice transitionnelle applicable dans tous les contextes. Le Népal a précisé qu’il fallait, dans ce contexte, tenir compte des réalités nationales, notamment les situations de faiblesse institutionnelle.

L’Afrique du Sud a rappelé avoir joué un rôle de pionnier dans la création d’une commission de vérité et de réconciliation. Elle a souligné avoir, dans ce contexte, fait un choix délibéré en faveur de la démocratie, dans un effort visant à garantir un meilleur avenir au peuple sud-africain.

Afin de garantir le succès de la justice transitionnelle, il est essentiel que les libertés individuelles soient garanties, y compris celles de la société civile, a souligné la Suède, se prononçant par ailleurs en faveur du renouvellement du mandat du Rapporteur spécial sur lequel le Conseil doit se prononcer à la fin de la session.

Selon la Lettonie, à l’instar de ce que propose le Rapporteur spécial, les victimes et une approche de genre doivent être au cœur de la justice transitionnelle. Dans ce contexte, la délégation lettone a souhaité avoir des exemples concrets de bonnes pratiques où la perspective de genre accordant la priorité à la voix des femmes et filles victimes a été mise en œuvre.

Le Bénin a indiqué soutenir pour sa part les recommandations du Rapporteur spécial visant à pallier les difficultés en matière de justice transitionnelle dans le cadre d’une faiblesse institutionnelle.

Le Paraguay a souligné l’importance de la participation des victimes et de leurs proches aux initiatives de rétablissement. Le Paraguay a, pour sa part, créé une commission chargée de faire la lumière sur les violations des droits de l’homme survenues entre 1954 et 1989 afin d’éviter qu’elles ne se reproduisent.

L’Arménie a déclaré que les valeurs défendues par le mandat du Rapporteur spécial sont également importantes pour la prévention du génocide. Les droits des victimes doivent être au cœur de la justice transitionnelle, a-t-elle souligné.

Le Burkina Faso a fait état de ses progrès dans le renforcement de ses institutions de promotion de la vérité, de la justice et de la réparation. La Commission de réconciliation nationale et des réformes, créée en 2015, a formulé des recommandations qui ont permis la mise en place, en 2016, d’un Haut Conseil qui œuvre à créer un cadre favorable à la réconciliation et de chercher les responsabilités sur les crimes et autres violations à caractère politique commis entre 1960 et 2015 et non encore élucidés. Cette institution a reçu plus de 5000 dossiers sur lesquels elle doit bientôt statuer, a précisé le Burkina Faso.

En tant qu’institution nationale des droits de l'homme, le Conseil national des droits de l’homme du Maroc a expliqué que le mécanisme de justice transitionnelle du Maroc avait été mis en place pour enquêter sur les violations graves des droits de l’homme commises par le passé au Maroc et donner réparation aux victimes. Le Conseil national s’apprête à publier un rapport sur l’expérience marocaine en matière de justice transitionnelle.

Plusieurs organisations non gouvernementales ont ensuite pris la parole. United Nations Watch a demandé au Rapporteur spécial de se rendre au Venezuela et de publier un rapport sur ce pays. L’ONG a attiré l’attention sur le taux de mortalité infantile très élevé dans ce pays.

La Commission colombienne de juristes a souligné rappelé que la Colombie avait mis en place une commission pour la vérité et a estimé que le Rapporteur spécial devrait accompagner ce processus compte tenu des victimes qui occupent une place centrale dans ce dispositif. Il faut que les autorités garantissent l’accès à tous les lieux pour permettre la recherche des personnes disparues.

Comisión Mexicana de Defensa y Promoción de los Derechos Humanos, Asociación Civil a souligné que l’étude du Rapporteur spécial était importante, en particulier pour le Mexique, en ce sens qu’elle peut fournir des pistes pour mettre fin à l’impunité dans ce pays suite aux graves violations des droits de l’homme. La Commission a invité le Rapporteur spécial à se rendre au Mexique.

L’Association for Defending Victims of Terrorism a plaidé pour la tenue d’une conférence sur la justice transitionnelle, afin de mieux traiter ce sujet de manière à garantir l’accès à la justice pour toutes les victimes.

La Fédération luthérienne mondiale a souhaité savoir comment les mécanismes de justice transitionnelle peuvent tenir compte des besoins spécifiques des femmes et filles et intégrer pleinement les droits économiques et sociaux.

Réponses et conclusions des titulaires de mandat

MME HOURIA ES-SLAMI, Présidente du Groupe de travail sur les disparitions forcées, s’est réjouie des informations apportées par l’Albanie dont la délégation a fait part des progrès réalisés en lien avec les préoccupations exprimées dans le rapport. Le Groupe de travail apprécie en outre l’invitation que lui a adressée le Soudan à se rendre dans ce pays et y répond favorablement, a indiqué la Présidente.

Mme Es-Slami a ensuite rejeté les allégations de partialité porté à l’encontre du Groupe de travail, assurant que ce dernier respecte pleinement son mandat et ses méthodes de travail ; il analyse en amont les informations qui lui sont fournies et ne les communique aux États que lorsqu’il estime que la disparition forcée est sérieuse, a expliqué la Présidente, ajoutant qu’il revient aux États de corroborer les informations ou de communiquer au Groupe de travail toutes les informations nécessaires.

S’agissant des questions relatives à la responsabilité et aux agissements des acteurs non étatiques, la Présidente a indiqué que pour l’instant, le Groupe de travail n’était pas à même de modifier ses méthodes de travail; mais il n’en reconnaît pas moins que toutes les victimes sont des victimes. Le Groupe de travail demande aux États de travailler en coopération pour aborder cet aspect de la disparition forcée. Il demande aussi aux organisations de la société civile qui ont alerté le Conseil de cas de disparitions forcées de bien vouloir saisir le Groupe de travail en tenant compte de ses méthodes de travail.

Prenant à son tour la parole, M. BERNARD DUHAIME, Vice-président du Groupe de travail sur les disparitions forcées, a expliqué que compte tenu du contexte sécuritaire dans certains pays, les migrants utilisent des voies de migrations moins traditionnelles, ce qui conduit à une implication de groupes non étatiques, mais aussi étatiques, qui se rendent coupables de disparitions forcées, soit en laissant faire, soit en étant partie prenante.

M. PABLO DE GREIFF, Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, s’est réjoui du soutien exprimé par nombre de délégations à son mandat et de la volonté de ces dernières de soutenir son renouvellement. Ce qui manque à la justice transitionnelle, ce n’est pas une structure conventionnelle ou normative, mais la mise en œuvre des cadres qui existent déjà, a-t-il ensuite souligné. Il faudrait en outre préciser le rôle que la société civile peut et doit jouer en matière de justice transitionnelle, a-t-il ajouté.

Concernant les propositions exprimées par certaines délégations, visant notamment la création d’un groupe informel qui pourrait conseiller le Conseil de sécurité sur les mesures de justice transitionnelle, il a soutenu cette initiative, ajoutant que cela pourrait conduire à des résultats satisfaisants. Le Rapporteur spécial a insisté sur l’attention qu’il convient d’accorder à la société civile, laquelle peut contribuer à la sensibilisation et accroître l’action publique en matière de justice transitionnelle.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC/17/119F