Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DÉBAT DE LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU BURUNDI ET AU MYANMAR
Ce matin et en début d'après-midi, le Conseil des droits de l'homme a entendu des mises à jour orales du Président de la Commission d'enquête sur le Burundi, M. Fatsah Ouguergouz, et de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, Mme Yanghee Lee, avant de tenir des débats interactifs avec ces deux titulaires de mandats.
La Commission d'enquête sur le Burundi n'est opérationnelle que depuis quatre mois, a rappelé M. Ouguergouz – une période courte qui a néanmoins permis d'appréhender la situation des droits de l'homme dans le pays depuis avril 2015. Le Président de la Commission a toutefois regretté l'absence de coopération des autorités burundaises, ce qui n'a pas permis aux enquêteurs de se rendre dans le pays; ils ont néanmoins visité plusieurs pays où se trouvent de nombreux réfugiés burundais. Les commissaires ont été frappés par le sentiment de peur profonde et généralisée qui se dégage des témoignages des personnes exilées, qui ont évoqué des persécutions, des tortures, des exécutions sommaires, des violences sexuelles et des disparitions forcées.
Les sévères restrictions des libertés publiques constatées en 2015 perdurent, a poursuivi M. Ouguergouz. Les principaux dirigeants de partis d'opposition et de nombreux journalistes et autres membres de la société civile sont toujours en exil. Les violations des droits de l'homme sont entretenues par des discours de haine prononcés par certaines autorités de l'État, des membres du parti au pouvoir et de la ligue des jeunes de ce parti, les Imbonerakure. Plusieurs victimes de torture par la police ou le service national de renseignement ont rapporté à la Commission que les sévices endurés étaient accompagnés d'insultes à caractère ethnique.
En tant que pays concerné, le Burundi a dénoncé certains États membres des Nations Unies qui se sont octroyé le droit d'être des gendarmes du Burundi et de s'ingérer dans ses affaires intérieures. La délégation burundaise a déclaré que le Burundi n'était pas un État voyou et que tous les événements depuis 2015 n'étaient rien de plus que l'application d'un plan de déstabilisation soigneusement préparé par des éléments exogènes.
De nombreux intervenants* qui ont participé au débat ont regretté le refus de coopération du Burundi et exprimé leur inquiétude quant à la poursuite des violations des droits de l'homme. Ils ont condamné les appels à la haine et appelé le Gouvernement à désarmer les groupes armés, à mettre fin à toutes les exactions et à l'impunité. Plusieurs délégations ont souligné l'importance des pourparlers de paix sous l'égide de la Communauté d'Afrique de l'Est et de la mise en œuvre de l'Accord d'Arusha pour la paix et la réconciliation du 28 août 2000. Quelques autres se sont inquiétées d'une ingérence du Conseil dans les affaires intérieures du Burundi et ont demandé la suppression du mandat de la Commission d'enquête, qu'elles ont jugé politisé et inapproprié.
Dans son exposé de la situation au Myanmar, Mme Yanghee Lee a affirmé que de graves violations des droits de l'homme continuent d'être commises par différentes parties dans les États de Shan et Kachine. Dans l'État de Rakhine, viols, enlèvements et torture se poursuivent. De plus, les conditions de vie des personnes déplacées, notamment des Rohingyas musulmans, sont difficiles en raison du nombre de maisons brûlées et des conséquences du cyclone Mora. Par ailleurs, le Gouvernement a recours à une loi très vague sur la diffamation et sur les télécommunications pour réprimer toute opposition, a dit la Rapporteuse spéciale, se félicitant toutefois qu'il s'engage à ouvrir des enquêtes.
En tant que pays concerné, le Myanmar a assuré que l'assistance humanitaire était régulière et garantie dans les camps de déplacés situés dans les zones de l'État de Kachine accessibles au Gouvernement. Conscient des incitations à la tension intercommunautaire et à la violence religieuse, le Gouvernement s'efforce d'être très prudent dans ses efforts de réconciliation et d'harmonie sociale et religieuse. Tout est fait pour faciliter le retour des personnes déplacées appartenant aux deux communautés et pour répondre à leurs besoins, a affirmé la délégation du Myanmar.
Les délégations** qui sont intervenues au cours du débat ont félicité le Myanmar pour les efforts entrepris en faveur de la démocratie et de la réconciliation nationale, tout en faisant part de leur forte préoccupation concernant les violations des droits de l'homme, notamment ceux des musulmans Rohingyas dans l'État de Rakhine.
En milieu d'après-midi, le Conseil doit poursuivre ses travaux en entendant une mise à jour orale du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Érythrée, suivie d'un débat général sur les situations qui requièrent son attention.
Débat interactif avec la Commission d'enquête sur le Burundi
Mise à jour orale
M. FATSAH OUGUERGOUZ, Président de la Commission d'enquête sur le Burundi, a rappelé que cette Commission est opérationnelle depuis quatre mois, une période courte, mais qui a néanmoins permis d'appréhender la situation des droits de l'homme au Burundi depuis avril 2015. Il a regretté l'absence de coopération des autorités burundaises, la Commission n'ayant pu se rendre dans le pays. Elle a néanmoins visité plusieurs pays où se trouvent des réfugiés burundais, dont le nombre s'élève à plus de 400 000 selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.
La crise relative aux droits de l'homme que traverse le Burundi dure depuis plus de deux ans, depuis les premières manifestations contre la candidature du Président Nkurunziza à l'élection présidentielle en avril 2015 et la tentative de coup d'État de mai 2015. Les commissaires ont été frappés dans leurs enquêtes par le sentiment de peur profonde et généralisée qui se dégage des témoignages des personnes exilées, qui ont évoqué des persécutions, des tortures, des exécutions sommaires, des violences sexuelles, des disparitions forcées.
Les sévères restrictions des libertés publiques constatées en 2015 perdurent, a dit M. Ouguergouz. Les principaux dirigeants des partis d'opposition et de nombreux journalistes et autres membres de la société civile sont toujours en exil. En janvier 2017, le Gouvernement a définitivement radié la Ligue Iteka, la plus ancienne organisation de défense des droits de l'homme du pays, et les principaux médias privés restent suspendus.
Les témoignages recueillis par la Commission d'enquête montrent que, depuis la fin 2016, les violations des droits de l'homme sont commises de manière plus clandestine mais tout aussi brutale. Ces violations sont entretenues par des discours de haine prononcés par certaines autorités de l'État, des membres du parti au pouvoir et de la ligue des jeunes de ce parti, les Imbonerakure. Plusieurs victimes de torture par la police ou le service national de renseignement ont rapporté à la Commission que les sévices endurés étaient accompagnés d'insultes à caractère ethnique.
Ce travail de la Commission a par ailleurs permis de confirmer les principales violations documentées par le Haut-Commissaire aux droits de l'homme et l'Enquête indépendante des Nations Unies sur le Burundi (EINUB). M. Ouguergouz a souligné que les commissaires ont été frappés par le caractère particulièrement cruel et brutal des violations rapportées. En outre, la grande majorité de ces violations auraient été commises dans un climat d'impunité totale. La Commission va poursuivre ses enquêtes et présentera ses conclusions finales lors de la prochaine session du Conseil, en septembre, a conclu son président.
Pays concerné
Le Burundi a jugé regrettable que le droit souverain du peuple burundais de se choisir des dirigeants et de décider de son propre système politique, économique, social et culturel ait été violé de manière flagrante par certains États membres des Nations Unies, qui se sont octroyés le droit d'être des gendarmes du Burundi et de s'ingérer dans les affaires intérieures de l'État burundais. Il a ajouté que ce second rapport oral était «un pur copier-coller et un prolongement» du rapport de l'Enquête indépendante des Nations Unies sur le Burundi (EINUB), contesté par le pays en raison de son caractère partial et tendancieux.
La délégation a déclaré que l'État du Burundi n'était pas un État voyou, sanctuaire de toute sorte de violations des droits de l'homme: tous les événements depuis 2015 ne sont rien de plus qu'une mise en exécution d'un plan de déstabilisation des institutions burundaises soigneusement préparé par des éléments exogènes auquel s'ajoute une guerre humanitaire qui plane sur le Burundi.
Le Burundi a aussi trouvé regrettable que le rapport ignore les efforts fournis par le Gouvernement burundais et les Forces de défense et de sécurité pour rétablir la paix et la sécurité et protéger les citoyens.
Le Burundi a expliqué que les «derniers documents qui ont fuité faisant état du soutien financier et logistique de l'Union européenne à ceux qu'elle considère des défenseurs des droits de l'homme ont révélé qu'il s'agissait en fait d'individus engagés dans la déstabilisation du pays». D'autre part, l'organisation non gouvernementale War Child Holland vient de reconnaître par le truchement de son porte-parole que les contrats signés avec l'Union européenne étaient en «contradiction avec son mandat au Burundi». L'Union européenne a financièrement asphyxié le peuple burundais et tenté de clouer le Burundi au pilori, a-t-il encore affirmé.
À ces faits vient aussi s'ajouter le recrutement, l'entraînement et l'armement de réfugiés burundais au Rwanda. Ainsi, des jeunes Burundais, dont des mineurs, ont commis des exactions et crimes graves. Les jeunes Imbonerakure, injustement et délibérément qualifiés de milice, sont en danger et continuent de perdre leur vie car livrés à la vindicte de ceux qui se prétendent des défenseurs des droits de l'homme.
Ceux qui ont commis des atrocités au Burundi sont connus et l'ont revendiqué à travers les médias traditionnels ou sociaux. Certains, sûrs du soutien de l'Union européenne, n'ont plus peur de «clamer haut et fort» que la fin du Gouvernement burundais est fixée à septembre 2017.
S'agissant du processus de négociation d'un nouvel accord de siège en vue de la reprise de la coopération entre le Gouvernement et le Haut-Commissariat, le Burundi a déclaré qu'il suivait son cours malgré «la volonté de précipitation de la part d'une des parties».
La Commission nationale indépendante des droits de l'homme (CNIDH) a fait état d'améliorations significatives au plan de la sécurité au Burundi. Des attaques, meurtres et enlèvements à des fins de rançonnage ont certes été relevés au cours des derniers mois, surtout au niveau de la frontière ouest et dans certaines localités. Mais l'observation quotidienne de la CNIDH indique que le niveau et les tendances des violations des droits de l'homme observés depuis deux ans sont en train de s'inverser, avec une réduction à un quart des arrestations arbitraires ou de détentions illégales, et une réduction très sensible des cas de torture ou d'atteintes à la vie. La CNIDH continue toutefois de recevoir des plaintes liées aux lenteurs dans le traitement des dossiers judiciaires, l'exécution des jugements rendus, la surpopulation carcérale et le manque de prise en charge adéquate de certaines catégories de détenus.
La CNIDH a réitéré son appel au Gouvernement et aux partenaires afin d'apporter un soutien adéquat au secteur de la justice; et au législateur, afin qu'il assure que le Code de procédure pénal révisé soit conforme aux engagements constitutionnels et internationaux du Burundi. Elle a finalement manifesté sa préoccupation face à la persistance des malentendus ayant conduit à la radiation, la fermeture ou la suspension de certaines organisations de la société civile et de médias privés, ainsi que la suspension de la coopération entre le Gouvernement et certains mécanismes des droits de l'homme des Nations Unies. La CNIDH a encouragé toutes les parties prenantes à avancer dans la recherche de solutions concertées, avant d'exhorter l'Union européenne de faire écho à l'appel du Dix-huitième Sommet des chefs d'État de la Communauté est-africaine en faveur de la levée des sanctions prises contre le Burundi.
Débat interactif
L'Union européenne a regretté le refus de coopération du Burundi et exprimé sa profonde inquiétude quant aux informations alléguant de la poursuite de violations des droits de l'homme commises par des membres des forces de sécurité, de renseignement, l'Imbonerakure et des forces de l'opposition armées. Elle a par ailleurs condamné les appels à l'incitation à la haine et pris note à cet égard du communiqué de presse du parti au pouvoir, le Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD) condamnant le langage de l'Imbonerakure (ligue des jeunes du parti au pouvoir). L'Union européenne appelle donc le gouvernement du Burundi à désarmer les groupes armés illégitimes, à mettre fin à l'impunité, à rouvrir les médias privés et à respecter l'Accord d'Arusha d'août 2000, en particulier toute proposition visant à réviser la Constitution. Cela est d'autant plus urgent que ces accords ont fait la preuve de leur valeur auprès de tous les Burundais, a souligné l'Allemagne, exprimant par ailleurs son appui aux efforts de la Communauté d'Afrique de l'Est et de l'Union africaine visant la mise en œuvre de cet Accord.
Le Canada a condamné l'appel «consternant au viol» lancé par la «milice Imbonerakure». La délégation canadienne a elle aussi appuyé la mise en œuvre de l'Accord d'Arusha et estimé que seul un dialogue ouvrirait la voie à un processus de vérité et de réconciliation durable, fondé sur cet Accord. La culture d'impunité qui s'installe au Burundi inquiète l'Estonie, qui se préoccupe aussi des cas croissants de disparitions forcées, dans un contexte où le Gouvernement du Burundi a décidé de se retirer la Cour pénale internationale. Le Danemark déplore lui aussi le climat d'impunité et le refus de coopération des autorités burundaises. Dans ce contexte, le pays s'est dit intéressé de savoir comment la communauté internationale pouvait aider à protéger la population.
Les États-Unis ont appelé les autorités burundaises à mettre fin à toutes les exactions répertoriées par la Commission, y compris celles commises par les Imbonerakure. Les États-Unis estiment que les tentatives de modifier la Constitution contrairement à l'Accord d'Arusha ne font qu'exacerber les tensions. Dans ce contexte, les États-Unis appellent les dirigeants du Burundi à organiser une transition politique responsable, compte tenu de l'histoire politique du pays. La Belgique, qui partage toutes ces inquiétudes, milite pour que tous les auteurs des actes allégués soient traduits en justice. Pour cela, elle appuie l'installation d'un bureau du Haut-Commissariat et appelle donc à la conclusion rapide de l'accord de siège avec le Gouvernement. En tant que membre du Conseil des droits de l'homme, le Burundi devrait montrer l'exemple, a en outre estimé la Belgique.
La Suisse a demandé au Burundi de coopérer avec la Commission d'enquête et avec le Haut-Commissariat. Elle a également demandé au Gouvernement burundais d'ouvrir des enquêtes sur les faits allégués. La Suisse a en outre souhaité connaître les recommandations de la Commission d'enquête visant à accroître l'espace d'expression de la société civile.
La Grèce a demandé le désarmement des groupes armés illégitimes et s'est inquiétée du ciblage, des intimidations et du harcèlement continus dont font l'objet les membres de la société civile, les journalistes, les représentants de l'opposition et les défenseurs des droits de l'homme au Burundi. Dans une situation aussi complexe, il serait souhaitable que ce soit les autorités burundaises qui ouvrent la voie au calme, à la pacification et au dialogue, compte tenu du potentiel de déstabilisation pour la région, a affirmé l''Espagne. Le Soudan a pour sa part estimé que le «véritable danger» réside dans les appels à une seule partie et à l'ingérence étrangère dans les affaires intérieures du Burundi. Si le Soudan appelle le Gouvernement burundais à coopérer, il souhaite également qu'une assistance technique soit fournie à ce pays, dans le strict respect de ses priorités nationales.
Le Venezuela a salué la volonté politique du Gouvernement burundais d'améliorer la situation des droits de l'homme et a rappelé qu'il continuerait pour sa part à solliciter la suppression des mandats politisés tels que la Commission d'enquête.
La France s'est dite fortement préoccupée par les détentions arbitraires, les disparitions forcées ou encore le recours à la torture impliquant les forces de sécurité, ainsi que par les appels à la violence de certains membres de la ligue de jeunesse des Imbonerakure. Elle a aussi condamné le maintien des restrictions imposées aux libertés fondamentales, en particulier la liberté de la presse.
La Chine a soutenu les efforts visant à la médiation et à un rapprochement des points de vue. Toute solution concernant la situation des droits de l'homme doit passer par le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du pays concerné, a rappelé la délégation chinoise.
Le Luxembourg a condamné les très graves violations des droits de l'homme au Burundi et a encouragé ce pays à donner l'accès à la Commission pour qu'elle puisse faire son travail. L'Accord d'Arusha pour la paix et la réconciliation du 28 août 2000 est la pierre angulaire de la stabilité du Burundi et il faut préserver cet équilibre, a insisté le Luxembourg. Le Grand-Duché a également exhorté à faire cesser l'impunité au Burundi et à ouvrir l'espace pour la société civile, les médias et un débat politique paisible dans ce pays.
Les Pays-Bas ont rappelé que le Gouvernement burundais avait la responsabilité juridique et morale de protéger ses citoyens contre les violations de droits de l'homme et ont demandé à la Commission d'enquête de préciser de quelle manière son travail pourrait d'une manière ou d'une autre favoriser le dialogue inter-burundais. Les Pays-Bas ont en outre soutenu les efforts de médiation des États de la Communauté d'Afrique de l'Est.
Le Portugal a invité le Burundi à garantir l'obligation redditionnelle pour toutes les atrocités commises et à revenir sur sa décision concernant la Commission d'enquête et la coopération avec les mécanismes des droits de l'homme.
La République islamique d'Iran a incité au respect des particularités du pays concerné et défendu les principes de non-sélectivité, d'objectivité et d'impartialité.
Le Liechtenstein a indiqué que si la décision du Burundi de se retirer du Statut de Rome est un signe alarmant, il n'en demeure pas moins que la Cour pénale internationale continuera à avoir juridiction sur les crimes atroces commis au Burundi jusqu'en octobre 2017, date du retrait effectif de ce pays. Le travail de collecte de preuves sur le terrain est crucial pour l'obligation redditionnelle, a souligné l'Albanie, avant de dénoncer l'impunité totale qui prévaut pour les crimes commis, dont certains pourraient constituer des crimes contre l'humanité. L'Albanie a critiqué les activités criminelles des membres Imbonerakure (du parti au pouvoir), notamment la pratique visant à l'identification des membres de l'opposition, qui terrorise la population et la fait vivre dans une peur constante. Le Gouvernement burundais doit remédier d'urgence à l'incitation à la haine ethnique et à la violence sexuelle, a ajouté la délégation albanaise.
L'Irlande a appelé le Gouvernement burundais à garantir la protection de tous ses citoyens et à en finir avec la culture de l'impunité, de même qu'à remplir ses obligations internationales en coopérant avec le Conseil, dont le Burundi est membre. L'Irlande a par ailleurs demandé au Président de la Commission s'il a pu vérifier une restriction aux mouvements de personnes traversant la frontière burundaise pour se réfugier dans les pays voisins.
Lui aussi préoccupé par la situation au Burundi, le Royaume-Uni a regretté le manque de coopération de ce pays avec le Haut-Commissariat et a appelé le Gouvernement burundais à montrer à la communauté internationale sa réelle volonté de trouver une issue à la crise. La délégation britannique a demandé à M. Ouguergouz de fournir une mise à jour de son travail avec le Conseil de paix et de sécurité (de l'Union africaine), en particulier sur le déploiement d'observateurs des droits de l'homme.
Pour sa part, la Tanzanie a indiqué recevoir bon nombre de réfugiés du Burundi et soutenir les pourparlers de paix menés sous l'égide de la Communauté d'Afrique de l'Est. La Tanzanie appelle toutes les parties à trouver une issue à la crise en cours et note avec préoccupation le manque de collaboration de certaines d'entre elles. L'Ouganda a dit croire en un processus de paix régional et a lui aussi appelé toutes les parties à se réunir pour trouver une issue politique à la crise.
La Fédération de Russie a constaté que l'examen de la question burundaise au Conseil se déroule dans un contexte politisé, ce qui a peu de chances d'améliorer la situation des droits de l'homme au Burundi. La Fédération de Russie a estimé que la meilleure instance (pour examiner ce type de question) est l'Examen périodique universel (EPU), avec la pleine collaboration du pays concerné et dans un esprit constructif.
Plusieurs organisations non gouvernementales ont participé au débat.
CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens a affirmé que la ligue des jeunes du parti au pouvoir était responsable de la grande majorité des crimes commis au Burundi, dans un environnement où la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique est étouffée. Et l'on est sans nouvelles de centaines de personnes, dont Mme Marie Claudette Kwizera, disparue depuis le 10 décembre 2015. Human Rights Watch a estimé qu'en effet le climat d'impunité et la mainmise du Gouvernement sur le système judiciaire encourageaient cette ligue de jeunes, les Imbonerakure. En tant que membre du Conseil le Burundi et tenu de coopérer avec la Commission d'enquête. La coopération avec les mécanismes des Nations Unies n'étant pas une option, mais une obligation, le refus de s'y soumettre doit avoir des conséquences, a insisté l'organisation, ajoutant que la situation ne s'améliorera pas tant que l'impunité règnera au Burundi.
Alors que le dialogue politique est au point mort, les enquêtes menées par des organisations membres de la Fédération International des droits de l'homme (FIDH) montrent au contraire une nouvelle phase de radicalisation du gouvernement et de ses partisans. Cette radicalisation, qui vise à organiser la confiscation et la conservation du pouvoir en vue des élections de 2020 et au-delà, consiste à modifier la Constitution pour supprimer la limitation des mandats, à purger les éléments tutsis au sein de l'armée et à militariser et conditionner idéologiquement les Imbonerakure. Ces paramètres laissent craindre l'éclatement de l'Accord d'Arusha, a prévenu la Fédération, appelant le Conseil à agir avant que les autorités burundais ne concrétisent leur projet.
Amnesty International a observé que la réforme des codes de procédure pénale et civile n'allait pas dans le bon sens. L'ONG a aussi dénoncé les restrictions de l'espace dévolu à la société civile du Burundi et a voulu savoir ce qui pourrait être fait pour y remédier. La Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (RADDHO) a condamné à son tour les violations des droits de l'homme, la répression et les abus à grande échelle qui font que beaucoup de Burundais vivent dans la peur des représailles. La RADDHO a lancé un appel pressant au Burundi pour qu'il coopère avec la Commission d'enquête; respecte l'Accord d'Arusha; garantisse la sécurité et la protection de la population; et rétablisse l'état de droit.
Le représentant de East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project, qui s'est présenté comme un Burundais exilé, a condamné un comportement inacceptable de la part d'un membre du Conseil. Accusant le gouvernement burundais de terroriser la population, le représentant a demandé au Conseil de le rappeler à l'ordre pour qu'il coopère avec la Commission d'enquête.
Pour Espace Afrique International, seule une justice efficace et la fin de l'impunité seraient de nature à apaiser les tensions, à rendre confiance à la population burundaise et à calmer les velléités de violence et de vengeance personnelle. Aucun des acteurs du conflit ne devrait camper sur ses positions de refus s'il a réellement pour priorité la paix et la stabilité de son pays. Le Centre indépendant de recherches et d'initiatives pour le dialogue (CIRID) a demandé à la Commission d'enquête comment soutenir l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Burundi, dernier rempart contre la crise dans ce pays.
Réponses et conclusion du Président de la Commission d'enquête
M. Ouguergouz a répondu au Représentant permanent du Burundi qu'il était certes dans son rôle en contestant ses propos, mais que la Commission d'enquête l'est aussi en menant une enquête impartiale et rigoureuse. La Commission a, à de nombreuses reprises, demandé au Gouvernement burundais de lui communiquer des informations concernant les allégations de violations et d'atteintes aux droits de l'homme; or, elle n'a pas reçu de réponse, a répété M. Ouguergouz, qui a de nouveau invité le Gouvernement burundais à coopérer pleinement avec la Commission. Quant à la question de la souveraineté nationale, le Président de la Commission d'enquête a rappelé que ce principe implique des droits mais aussi des devoirs: le Gouvernement du Burundi doit respecter les accords internationaux qu'il a «souverainement acceptés».
En outre, pour mener son enquête, la Commission a pris attache avec l'Union Africaine dès mars 2017 pour lui demander de partager toute information et observation jugées utiles pour le règlement de la crise qui prévaut depuis 2015 au Burundi. Elle a fait de même avec la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, qui a communiqué des documents sur la situation. Elle a en outre écrit au Représentant spécial de la région des Grands lacs dépêché par l'Union africaine et attend une réponse, a ajouté M. Ouguergouz.
S'agissant des mesures que le Gouvernement burundais pourrait prendre, le Président de la Commission d'enquête a notamment cité la nécessité de rouvrir le champ politique, celui des libertés publiques et le dialogue. Les autorités burundaises devraient également poursuivre et juger tous les auteurs présumés de violations et permettre au bureau du Haut-Commissariat de reprendre ses activités de contrôle de la mise en œuvre des droits de l'homme. Quant à la communauté internationale, elle doit exercer toutes les pressions qu'elle peut sur le Gouvernement pour qu'il ouvre un dialogue inclusif, a ajouté M. Ouguergouz.
MME REINE ALAPINI GANSOU, également membre de la Commission d'enquête, a donné d'autres exemples de mesures qui pourraient être prises par le Gouvernement burundais, comme refuser l'enterrement sans autopsie ou sans identification de la personne. S'agissant des mouvements de réfugiés, elle a confirmé qu'il y a toujours plus de difficultés à quitter le pays, en raison de la présence des Imbonerakure à une frontière. Par ailleurs, des témoignages montrent que les personnes sont ciblées avant tout pour leur opposition au Gouvernement, indépendamment de leur appartenance ethnique.
Débat interactif avec la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar
Mise à jour orale
MME YANGHEE LEE, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, a tout d'abord présenté ses condoléances aux personnes affectées par le cyclone Mora et par l'accident d'avion militaire qui a fait 122 morts, dont une douzaine d'enfants. Elle s'est ensuite réjouie que depuis sa dernière présentation de rapport au Conseil, ce dernier ait mis sur pied – lors de sa 34e session en mars dernier – une mission d'établissement des faits chargée de faire la lumière sur les violations des droits de l'homme commises par les militaires et les forces de sécurité.
Revenant à son rapport, Mme Lee a affirmé que de sérieuses violations des droits de l'homme continuent d'être commises par différentes parties, y compris les Tatmadaw et les groupes armés ethniques dans les États Shan et Kachin. La Rapporteuse spéciale s'est dite particulièrement alarmée par une vidéo de 17 minutes postée sur les réseaux sociaux et montrant apparemment des soldats de l'armée du Myanmar battre un groupe d'hommes non armés. L'incident se serait produit en 2015 et le sort de ces personnes est inconnu à ce jour, a-t-elle indiqué. Un autre incident a eu lieu, avec trois personnes découvertes mortes, visiblement victimes de torture, apparemment quelques jours après que les Tatmadaw les eurent détenus. Mme Lee a ajouté qu'elle vient en outre d'apprendre qu'en novembre 2016, les corps calcinés de 18 personnes originaires du village Nam Hkye Ho, dans l'État Shan, ont été retrouvées après qu'elles eurent, semble-t-il, été détenues par l'armée. Le Gouvernement s'est engagé à ouvrir des enquêtes sue ces allégations, a souligné la Rapporteuse spéciale.
Alors que la paix et le développement sont nécessaires dans tout le pays, la Rapporteuse spéciale s'est réjouie qu'une conférence de paix se soit tenue du 24 au 29 mai dernier avec la présence de huit groupes armés. Elle s'est également réjouie de la libération d'un certain nombre de prisonniers. Mme Lee s'est en revanche dite inquiète du recours à la loi, vague, sur la diffamation et à la loi sur les télécommunications. Elle a en outre indiqué qu'elle se rendrait dans le pays en juillet prochain pour examiner la question des entreprises et des droits de l'homme. Dans cette optique, la Rapporteuse spéciale s'est dite préoccupée par les développements concernant la mine de cuivre de Letpadaung, où la police a utilisé des balles en caoutchouc pour réprimer des manifestants en mars dernier.
Mme Lee a également fait part de ses préoccupations face aux violences intercommunautaires qui menacent le pays, en particulier lorsqu'en avril dernier des extrémistes bouddhistes ont fait pression sur les autorités locales afin d'obtenir la fermeture de deux écoles islamiques à Yangon, qui servaient traditionnellement de lieux de prières et sont restées fermées durant le ramadan. Trois personnes ayant manifesté contre cette mesure se trouvent aujourd'hui traduites en justice, a déploré la Rapporteuse spéciale, se félicitant néanmoins que le Gouvernement se soit, là aussi, engagé à ouvrir des enquêtes.
La situation dans l'État de Rakhine reste tendue, avec des allégations de viols, torture et enlèvements qui continuent d'être rapportées, a poursuivi Mme Lee. La situation de nombre de ceux qui ont fui après l'attaque du poste de la police des frontières le 9 octobre dernier et les opérations de nettoyage qui ont suivi reste difficile, a-t-elle ajouté. Alors que les quelques 20 000 Rohingyas déplacés dans le pays ont commencé à rentrer chez eux, leurs conditions de vie restent difficiles, compte tenu du nombre de maisons brulées et des conséquences du cyclone Mora, a d'autre part souligné la Rapporteuse spéciale. Elle s'est également dite préoccupée par le nombre important de grossesses et de mariages précoces et par le cycle de violences à l'égard des femmes qui se perpétue, avant de rappeler au Gouvernement ses obligations internationales en matière de protection des femmes et des filles.
Pays concerné
Le Myanmar a assuré que l'assistance humanitaire était régulière et garantie dans les camps de déplacés situés dans les zones de l'État de Kachine accessibles au Gouvernement. Le Myanmar a remercié le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, le Programme alimentaire mondial, le Bureau de coordination de l'aide humanitaire, le Fonds des Nations Unies pour la population et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, ainsi que le Comité international de la Croix-Rouge, de même que les autres organisations impliquées dans les États de Kachine et de Rakhine.
La liberté d'expression ne cesse de s'étendre au Myanmar, qui est passé cette année de la 143e place à la 131e place dans le World Press Freedom Index, le classement de la liberté de la presse dans le monde, a dit la délégation.
Conscient des incidents d'incitation à la tension intercommunautaire et de violence religieuse, le Gouvernement s'efforce d'être très prudent dans ses efforts de réconciliation et d'harmonie sociale et religieuse. Tout est fait pour faciliter le retour des déplacés des deux communautés concernées et pour répondre à leurs besoins, y compris en termes d'abris. Des lotissements sont assignés et quelques 400 logements sont déjà construits; d'autres le seront dans un proche avenir.
S'agissant de l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant, plus particulièrement l'article 7 sur l'enregistrement à la naissance, des milliers de certificats de naissance ont été livrés dans l'État de Rakhine depuis mai dernier. Plus de 1800 étudiants musulmans dans l'État de Rakhine ont participé à des examens cette année. En outre, des travaux de rénovation et de réaménagement de 300 écoles primaires des deux communautés ont été réalisés cette année.
Le Myanmar n'a nullement l'intention de maintenir les camps de déplacés et de risquer ainsi de perpétuer la ségrégation. Mais il convient cependant d'organiser la réinstallation avec prudence. Accélérer le processus de citoyenneté, prévenir la récurrence des frictions intercommunautaires, maintenir l'ordre public, assurer les besoins de base et créer des emplois durables sont des conditions préalables à la réinstallation, a souligné le Myanmar, qui a sollicité davantage d'assistance de la communauté internationale dans le domaine du développement.
Le Myanmar s'est dissocié de la résolution créant la mission d'établissement des faits car elle ne reflète pas la situation sur place et n'aidera guère à résoudre les problèmes auxquels se heurte le Myanmar dans l'État de Rakhine. Les préoccupations des deux communautés doivent être prises en considération dans toute solution envisagée, a demandé le Myanmar.
Le Myanmar a assuré, enfin, qu'une enquête allait être diligentée au sujet de la vidéo montrant des militaires en train de brutaliser des prisonniers et que des mesures seraient prises à l'encontre des coupables.
Débat interactif
L'Organisation de la coopération islamique (OCI) a estimé que la situation des Rohingya musulmans est un exemple manifeste de la persécution des minorités au Myanmar. Elle a formé l'espoir que le Haut-Commissariat puisse jouer un rôle positif sur le terrain.
Le Myanmar traverse une transition cruciale et le périple vers la réconciliation et la démocratie est jonché d'écueils, a constaté l'Inde, qui a salué les preuves de coopération et de bonne volonté du Gouvernement du Myanmar qui s'est engagé à coopérer avec les mécanismes des droits de l'homme. L'Inde s'est prononcée contre la résolution. Le République démocratique populaire lao a réaffirmé que le mécanisme de l'Examen périodique universel restait le forum approprié pour traiter des questions liées aux droits de l'homme dans tous les pays. Elle a appelé la communauté internationale à poursuivre, en toute sincérité, la coopération et son assistance au Myanmar. C'est en effet par le dialogue que tous les États pourront améliorer leur performance, a dit Cuba, selon laquelle la coopération technique et le renforcement des capacités doivent être accordés à la demande des pays.
La Fédération de Russie et le Bélarus ont chacun déclaré que les mandats de pays n'apportaient pas de résultats concrets. Ils ont conseillé de privilégier l'échange et le dialogue. Malgré toutes les expressions concrètes de bonne volonté du Myanmar et les changements très positifs opérés, le mandat a été maintenu et le Myanmar est encore assujetti à des mécanismes contraignants, a regretté le Bélarus.
La République populaire démocratique de Corée a affirmé que le Myanmar s'efforce de parvenir à la réconciliation nationale et veille à garantir les libertés d'expression et de réunion pacifique. Il faut s'abstenir de toute approche partiale avec ce pays et cesser toute approche biaisée et sans fondement, a ajouté la République populaire démocratique de Corée. Le Venezuela a estimé que la Rapporteuse spéciale offrait une vision partiale de la situation des droits de l'homme au Myanmar. Des réformes ont été engagées par le Gouvernement du Myanmar, a souligné la délégation vénézuélienne.
Appuyant le mandat de la mission d'enquête (créée par le Conseil lors de sa session de mars dernier avec pour objectif d'établir les faits concernant les allégations de récentes violations des droits de l'homme par des membres de l'armée et des forces de sécurité, en particulier dans l'État de Rakhine), la Croatie a salué l'accès sans entraves fournis aux observateurs et a encouragé à redoubler d'efforts pour mettre fin aux discours de haine et à la violence des groupes nationalistes.
L'Union européenne a demandé à la Rapporteuse spéciale si elle pouvait fournir davantage d'indications sur le processus d'élaboration, avec le Gouvernement, d'un plan de travail et d'un calendrier de mise en œuvre de certaines mesures. Se félicitant des efforts déjà accomplis en faveur de la démocratie, de la paix et de la réconciliation nationale, l'Union européenne encourage le Gouvernement du Myanmar à agir rapidement pour améliorer la situation des droits de l'homme dans l'État de Rakhine. La République tchèque a estimé qu'un contrôle international est plus important que jamais vu l'escalade de la violence dans l'État de Rakhine depuis octobre 2016. L'Estonie a dit avoir pris note des efforts du Gouvernement en faveur de la réconciliation nationale et de la démocratie, se disant néanmoins préoccupée par la situation des Rohingyas.
Également préoccupés par les graves violations des droits de l'homme des Rohingyas dans l'État de Rakhine et d'autres groupes minoritaires, les États-Unis ont demandé au Gouvernement d'en sanctionner les responsables et de garantir la sécurité. Le Danemark s'est félicité de la réponse positive du Gouvernement au rapport intérimaire de la commission consultative sur l'État de Rakhine. Il a demandé à la Rapporteuse spéciale comment la communauté internationale peut soutenir au mieux les efforts du Gouvernement du Myanmar pour appliquer les recommandations de ce rapport intérimaire.
La Norvège s'est félicitée de l'évolution du Myanmar vers des réformes politiques et vers la bonne gouvernance et a apprécié la désignation d'une enquête internationale indépendante sur les violations des droits de l'homme dans l'État de Rakhine. L'Arabie Saoudite s'est également félicitée de la constitution d'une commission d'enquête indépendante et a encouragé le Gouvernement à coopérer. Soulignant que les crimes contre les Rohingyas musulmans se poursuivent depuis 1992, elle a appelé le Myanmar à la tolérance et à la coexistence pacifique. L'Australie a rappelé qu'elle travaille déjà avec le Myanmar pour le renforcement de ses capacités. Elle a réitéré sa préoccupation face aux allégations d'exactions dans le nord de l'État de Rakhine.
La Pologne a encouragé le Gouvernement du Myanmar à continuer de renforcer les institutions démocratiques et à faciliter le processus de réconciliation nationale. Mais la Pologne s'est aussi dite préoccupée par les violations des droits de l'homme dans l'État de Rakhine. Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale comment elle évalue l'efficacité des actions entreprises par le Gouvernement. L'Espagne a demandé à Mme Lee si elle avait constaté une amélioration de la situation des droits de l'homme dans les régions de Kachine, Rakhine et Shan par rapport aux périodes précédentes. Consciente de la discrimination et des abus pour raisons religieuses, elle a aussi demandé comment le Gouvernement pourrait avancer pour garantir l'égalité entre tous ses citoyens.
Le Japon a jugé essentiel de promouvoir le développement économique au Myanmar. Le Japon s'est félicité de la mise en œuvre des recommandations de la Rapporteuse spéciale concernant le Myanmar, avec l'appui de la communauté internationale.
La France a souhaité que les exactions attribuées à l'armée cessent durablement et que les responsables répondent de leurs actes devant la justice, condition indispensable à une réconciliation durable et apaisée. Elle a salué l'accueil positif réservé aux premières recommandations de la Commission consultative pour l'Arakan, présidée par M. Kofi Annan, et a encouragé le Myanmar à les mettre en œuvre au plus vite. La France s'est dite très préoccupée par les déplacements de populations à la frontière chinoise (États Shan et Kachin) dus aux combats entre les guérillas ethniques et l'armée, avant de soutenir le processus engagé par les autorités du Myanmar en vue d'un règlement politique de ces conflits.
La situation dans certains États est un héritage de facteurs complexes et historiques, a commenté la Chine, qui a recommandé d'appuyer le Myanmar dans ses efforts actuels. La Thaïlande a encouragé la Rapporteuse spéciale et la communauté internationale à fournir au Myanmar l'assistance technique nécessaire aux fins de la mise en œuvre des recommandations adressées au pays. La Thaïlande a indiqué être prête à partager son expérience et sa philosophie pour une économie durable.
De nombreuses personnes ont souffert des interventions armées du Gouvernement du Myanmar, a fait remarquer l'Afghanistan, qui a rappelé la ségrégation, la restriction des libertés d'expression et de réunion et d'autres abus à l'encontre de la communauté Rohingya et d'autres groupes minoritaires.
Les Pays-Bas ont encouragé à assurer la transition au Myanmar d'une façon équilibrée et à ouvrir l'accès aux observateurs. Les Pays-Bas ont en outre attiré l'attention sur les problèmes de l'apatridie et de la liberté d'expression au Myanmar. Quelle est la meilleure manière de combattre l'impunité et de poursuivre les auteurs de violations des droits de l'homme, a demandé la délégation néerlandaise?
La Turquie s'est prononcée dans le même sens, tout en restant préoccupé par la recrudescence des conflits dans l'État Kachine et au nord de l'État Shan. Elle a encouragé le Gouvernement du Myanmar à œuvrer avec la communauté internationale pour améliorer la situation dans les camps de déplacés ouverts il y a cinq ans. L'Iraq a souligné que la situation des musulmans Rohingyas est constitutive de génocide et a lancé un appel pour que l'on vienne à leur rescousse.
La République de Corée a salué la tenue de la deuxième conférence de paix, qui a jeté les bases d'une nouvelle étape du processus de réconciliation nationale. Elle a exprimé l'espoir que le Gouvernement du Myanmar coopère pleinement avec la Rapporteuse spéciale lors de sa visite du mois prochain. L'Irlande s'est elle aussi félicitée des progrès obtenus à la deuxième conférence de paix et a salué l'intention du Gouvernement du Myanmar de mettre en œuvre rapidement les recommandations du rapport. L'Irlande a en outre noté une amélioration dans l'accès humanitaire au Myanmar.
Le Royaume-Uni a déclaré que le climat restait difficile pour la liberté d'expression des différentes composantes de la société civile. Il s'est inquiété de la progression des discours de haine au Myanmar et a demandé aux autorités de ce pays, de même qu'à son armée, de coopérer avec la mission d'enquête. Le Royaume-Uni a demandé à la Rapporteuse spéciale, Mme Yanghee Lee, de dire quelles étaient les incidences des activités d'extraction minière sur la jouissance des droits de l'homme au Myanmar. Les Maldives ont préconisé des mesures pour prévenir la violence – viols, mariages et travail forcés – à l'égard des minorités, notamment les Rohingya musulmans.
L'Albanie a déploré les violences généralisées et systématiques infligées à la minorité rohingya, ainsi que les réinstallations forcées de Rohingya. Cependant, en dépit de très grandes difficultés, a déclaré le Viet Nam, le Myanmar consent des efforts significatifs dans la bonne direction. La communauté internationale devrait le soutenir dans cet effort, a dit le Viet Nam, qui s'est dit prêt à contribuer à cette dynamique.
La Nouvelle-Zélande a estimé que la deuxième session de la Conférence pour la paix était un autre bon pas dans la bonne voie. Elle a salué les efforts déployés par le Myanmar pour mener des enquêtes sur les violations des droits de l'homme et espéré qu'ils mèneront à une paix et un développement durables. Sri Lanka a aussi salué la tenue de cette Conférences ainsi que les démarches pour fournir une assistance humanitaire et poursuivre les pourparlers en vue de la réconciliation.
Plusieurs organisations non gouvernementales ont pris part au débat. La Fédération internationale des Ligues des droits de l'homme (FIDH) a déploré le manque de volonté du Myanmar pour mettre un terme aux graves violations des droits de l'homme, en particulier dans l'État de Rakhine, contre la population rohingya. Elle a prié le Gouvernement de coopérer avec la mission d'établissement des faits. Elle a également fait part de sa préoccupation à propos des dangers pesant sur les défenseurs des droits de l'homme et a demandé la libération immédiate de tous les prisonniers politiques au Myanmar. Christian Solidarity Worldwide a jugé préoccupante la situation dans les États de Rakhine, de Kachine et de Shan et a exhorté le Gouvernement à coopérer avec la mission d'établissement des faits. L'ONG a, elle aussi, demandé la libération de tous les prisonniers politiques, de même que la création d'un mécanisme pour empêcher la détention arbitraire.
Le Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement a fait part de sa préoccupation au sujet de la situation dans les États de Shan, Kachine et Rakhine. L'ONG a critiqué le manque de liberté d'expression et d'association ainsi que la législation restrictive sur les télécommunications. Elle a demandé à la Rapporteuse spéciale son avis sur un éventuel lien entre les intérêts du secteur privé et les violations des droits de l'homme. Human Rights Watch a dit sa préoccupation à propos des 120 000 Rohingya musulmans isolés dans des camps, au mépris de leurs droits, et a critiqué l'incapacité du Gouvernement à protéger les minorités religieuses. Elle s'est aussi inquiétée de son manque de volonté de coopérer avec la mission d'établissement des faits, et donc de faire face aux défis systémiques qui l'empêchent de s'acheminer vers une société démocratique.
International Bar Association (IBA) s'est félicitée de la création de la mission d'établissement des faits et a demandé au Gouvernement de pleinement coopérer et de garantir l'accès à tout son territoire. L'IBA a rappelé que la mission répondait aux intérêts du pays. Lawyers' Rights Watch Canada, au nom également de Lawyers for Lawyers,a insisté sur l'importance de l'indépendance de la justice pour faire respecter l'état de droit. Le système judiciaire doit également garantir l'indépendance des avocats. L'organisation a condamné le meurtre récent de l'avocat U Ko Ni, très impliqué contre la discrimination religieuse et pour la paix intercommunautaire, et les menaces de mort contre son confrère Robert Sann Aung.
Maarij Foundation for Peace and Development a dénoncé les déportations et les violations des droits des Rohingya musulmans de l'État de Rakhine. Elle a demandé au Gouvernement de faire cesser toute pratique discriminatoire et a jugé nécessaire qu'une enquête soit menée sous l'égide du Conseil des droits de l'homme. L'ONG a demandé aux organisations régionales et internationales d'aider le Myanmar à réviser sa Constitution et à traduire les auteurs de violations des droits de l'homme devant la Cour pénale internationale.
Amnesty International enfin a souligné que le rapport montre combien un suivi international des droits de l'homme est nécessaire au Myanmar. Les propres recherches d'Amnesty ont documenté des violations des droits de l'homme et du droit humanitaire par l'armée et par les groupes armés dans les États de Shan et de Kachine. L'ONG a critiqué le gouvernement pour son manque de coopération avec les Nations Unies sur les droits de l'homme.
Réponses et conclusion de la Rapporteuse spéciale
MME YANGHEE LEE, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, a fait part de son intention de continuer à encourager le Myanmar. Elle a dit attendre avec grand intérêt de pouvoir discuter avec le Gouvernement, indiquant à ce propos que deux ministères avaient d'ores et déjà fait part de leurs commentaires s'agissant des prochaines étapes de sa mission. Mme Lee a rappelé que son mandat consistait à examiner la situation des droits de l'homme au Myanmar dans son ensemble. Elle a expliqué au Danemark que les progrès ont été très limités par rapport aux recommandations de la Commission Kofi Annan. Ainsi, les travailleurs humanitaires sont encore accompagnés de militaires dans l'État de Rakhine.
Le Myanmar devrait autoriser la mission d'établissement des faits qui sera bientôt constituée à se rendre sur le terrain sans obstacle. Au sujet de la question posée par l'Espagne, elle a recommandé une plus grande marge de manœuvre pour les organisations de la société civile. La communauté internationale devrait encourager le Myanmar à prolonger l'action entamée par la société civile pour mieux comprendre et répondre aux griefs des communautés. Mme Lee a observé que la société civile, encore très discrète dans ses démarches, gagnerait à se rendre plus visible.
La Rapporteuse spéciale a recommandé une nouvelle fois l'ouverture au Myanmar d'un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Pour combattre l'incitation à la discrimination et à la violence, il conviendrait d'encourager le Myanmar à mettre en œuvre le Plan d'action de Rabat, a-t-elle ajouté. S'agissant de l'industrie extractive, elle a confirmé que les populations locales sont averties de l'expulsion de leurs terres par des tracts jetés des airs. Elle a enfin proposé de remplacer le principe de non-ingérence par celui de «non-indifférence» au Myanmar.
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*Les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat interactif avec la Commission d'enquête sur le Burundi: CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens; Human Rights Watch; Espace Afrique International; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project; CIRID (Centre Indépendant de Recherches et d'Initiatives pour le Dialogue); Amnesty International; Rencontre Africaine pour la défense des droits de l'homme.
**Les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat interactif sur la situation des droits de l'homme au Myanmar: Organisation de la coopération islamique, Inde, République démocratique populaire lao, Cuba, Fédération de Russie, Bélarus, Union européenne, République tchèque, Estonie, États-Unis, Danemark, Norvège, Arabie Saoudite, Australie, Pologne, Espagne, Japon, Organisation de la coopération islamique, Venezuela, Croatie, France, Chine, Thaïlande, Afghanistan, Pays-Bas, République populaire démocratique de Corée, Turquie, Iraq, République de Corée, Irlande, Royaume-Uni, Maldives, Albanie, Viet Nam, Nouvelle-Zélande, Sri Lanka.
**Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat interactif sur la situation des droits de l'homme au Myanmar: Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); Christian Solidarity Worldwide; Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement; Human Rights Watch; International Bar Association; Maarij Foundation for Peace and Development; Lawyers' Rights Watch Canada (au nom également de Lawyers for Lawyers); Amnesty International.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
HRC17/096F