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LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU QATAR

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique présenté par le Qatar sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant ce rapport, M. Ahmad Hassan Al-Henzab, Secrétaire général du Ministère des affaires étrangères du Qatar, a réaffirmé l’engagement du Qatar à coopérer étroitement avec le Comité afin de promouvoir et protéger les droits des enfants. Il a souligné qu’une commission nationale avait été créée par le Gouvernement en mai 2012, dans le but, notamment, d’examiner et de mettre en œuvre les observations formulées par le Comité à l’issue de l’examen du précédent rapport du pays. Ces observations finales ont permis d’accélérer les réformes législatives relatives aux droits de l’enfant et des progrès ont également été accomplis au niveau institutionnel, a-t-il précisé. Il a également rendu compte de la Vision nationale à l’horizon 2030.

M. Al-Henzab a ensuite rappelé que la Constitution qatarienne garantit l’accès des enfants à la santé, ainsi que leur droit à être protégé contre toute forme de violence. Le Gouvernement a par ailleurs élargi les opportunités d’enseignement pour tous les enfants du pays, a-t-il en outre souligné. Le taux de mortalité infantile a baissé, tandis que le taux de scolarisation, à tous les niveaux d’éducation et pour les enfants des deux sexes, a augmenté, a-t-il fait valoir. Les délinquants mineurs bénéficient de plus en plus de programmes de réhabilitation, a poursuivi M. Al-Henzab. Il a par ailleurs indiqué que l’État avait pris des mesures destinées à protéger les enfants de parents inconnus et les enfants en situation de handicap.

La délégation qatarienne était également composée, entre autres, de M. Ali Khalfan Al-Mansouri, Représentant permanent du Qatar auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l’éducation et du Ministère de l’Intérieur.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s’agissant, notamment, des réserves que le Qatar maintient à l’égard de certaines dispositions de la Convention ; de l’intérêt supérieur de l’enfant ; de la définition de l’enfant ; de l’âge minimum du mariage ; de la justice pour mineurs ; de la question de la peine capitale ; des questions d’héritage ; de la transmission de la nationalité ; de l’interdiction des châtiments corporels ; ou encore des questions de santé et d’éducation.

M. Jorge Cardona, corapporteur du Comité chargé de l’examen du rapport du Qatar, s’est félicité des progrès réalisés par le Qatar dans le but de mettre en application la Convention. Il s’est toutefois inquiété des réserves que maintient le Qatar à l’égard des articles 2 et 14 de la Convention et a souligné que de nombreux pays qui intègrent la loi islamique dans leur système juridique n’ont pas formulé de telles réserves ou les ont retirées. M. Cardona s’est par ailleurs inquiété de l’absence de dispositions concernant la responsabilité sociale des entreprises en matière de droits de l’enfant. Il a souligné que la différence entre l’âge minimum légal du mariage pour les filles (16 ans) et celui fixé pour les garçons (18 ans) constituait en soi une discrimination. D’autres dispositions législatives au Qatar entretiennent ce type de discriminations entre les sexes, notamment en matière d’héritage, a-t-il fait observer, s’inquiétant de la perpétuation des stéréotypes de genre. M. Cardona s’est également inquiété que certaines infractions, comme l’espionnage et l’apostasie, soient passibles de la peine de mort lorsqu’elles sont commises par une personne dès l’âge de 16 ans. Le corapporteur a par la suite relevé que le nombre d’enfants handicapés inscrits dans des institutions spécialisées avait doublé entre 2015 et 2016. Il s’est en outre inquiété de la subsistance des mariages précoces.

M. Luis Ernesto Pedernera Reyna, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Qatar, a salué la création d’une Commission nationale des droits de l’homme, mais s’est notamment inquiété des entraves rencontrées par cette Commission lors de visites effectuées dans des centres pénitentiaires.

Un autre membre du Comité s’est dit préoccupé par la forte augmentation des problèmes de santé mentale, dont la dépression, la sous-alimentation et la consommation excessive d’alcool et de drogues chez les jeunes qatariens ces dernières années. Un expert s’est pour sa part inquiété des emprisonnements de plus en plus fréquents de femmes et d’enfants migrants qui, en principe, devraient être envoyés dans des centres d’accueil.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Qatar et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 2 juin prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la Roumanie sur la mise en œuvre de la Convention, qu’il achèvera demain matin.


Présentation du rapport du Qatar

Le Comité est saisi du rapport périodique du Qatar ainsi que des réponses (en anglais) du pays à la liste des points à traiter que lui a adressée le Comité.

Présentant ce rapport, M. AHMAD HASSAN AL-HENZAB, Secrétaire général du Ministère des affaires étrangères du Qatar, a salué le rôle du Comité en matière de soutien aux États parties pour la mise en œuvre de la Convention. Il a réaffirmé l’engagement du Qatar à coopérer étroitement avec le Comité afin de promouvoir et protéger les droits des enfants.

M. Al-Henzab a indiqué qu’une commission nationale avait été créée par le Gouvernement en mai 2012, sous la houlette du Conseil supérieur des affaires de la famille et des Ministères des affaires étrangères et de l’intérieur, entre autres, dans le but d’examiner et de mettre en œuvre les observations formulées par le Comité à l’issue de l’examen du précédent rapport du pays. Ces observations ont été particulièrement utiles pour la mise en place de formations dispensées aux représentants de l’État et aux personnels des différentes instances administratives désormais sensibilisés aux droits relevant de la Convention. Par ailleurs, les observations finales ont permis d’accélérer les réformes législatives relatives aux droits de l’enfant et des progrès ont également été accomplis au niveau institutionnel, a fait valoir M. Al-Henzab.

La vision nationale à l’horizon 2030 comprend d’importants volets traitant de l’enseignement, de la santé, de l’environnement et des droits de l’enfant, a par ailleurs indiqué le Secrétaire général du Ministère des affaires étrangères. La stratégie de développement national 2011-2016 et le deuxième plan stratégique de développement 2016-2022 ont également posé les jalons des politiques de développement économique et social du Qatar pour l’avenir, a-t-il ajouté.

Aucun effort n’est épargné pour mettre en place des programmes en charge de l’enfance afin de protéger les enfants contre la violence et garantir leur participation dans les activités conformes à leur âge, a poursuivi M. Al-Henzab. Il a rappelé que la Constitution qatarienne garantit l’accès des enfants à la santé, ainsi que leur droit à être protégé contre toute forme de violence. Afin d’appliquer ces droits, plusieurs centres de protection de la mère et de l’enfant ont été créés ces dernières années à travers le pays. Le Gouvernement a par ailleurs élargi les opportunités d’enseignement pour tous les enfants du pays, a souligné M. Al-Henzab. Le taux de mortalité infantile a baissé, tandis que le taux de scolarisation, à tous les niveaux d’éducation et pour les enfants des deux sexes, a augmenté, a-t-il fait valoir. Les prestations sociales ont également été augmentées ces dernières années, a-t-il ajouté. Quelque 95% des nourrissons de moins d’un an ont pu bénéficier de campagnes de vaccination, a-t-il en outre souligné. Le taux de mortalité pour les enfants âgés de 1 à 4 ans est passé de 2,3% en 2000 à 1,6% en 2005, a-t-il indiqué. Quant au taux de placement en crèche, il atteignait près de 95% en 2016.

Les délinquants mineurs bénéficient de plus en plus de programmes de réhabilitation, a poursuivi M. Al-Henzab, précisant qu’en 2015, 571 mineurs avaient eu accès à ce type de programmes, contre 247 en 2011.

M. Al-Henzab a ensuite rappelé qu’en son article 21, la Constitution qatarienne consacre la famille comme la pierre angulaire de la société et prévoit que tous les moyens doivent être mis en œuvre pour assurer sa protection. L’article 22 prévoit quant à lui que l’État a le devoir d’assurer la protection des générations futures en le préservant contre tout type de violence.

Le Qatar a mis en place une politique stratégique destinée à examiner les réserves émises par le pays à l’égard des dispositions de certaines conventions, dans le but, notamment, de les revoir. D’anciennes réserves ont, par exemple, été retirées s’agissant du Protocole facultatif sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. S’agissant de la Convention proprement dite, M. Al-Henzab a rappelé que le Qatar avait émis des réserves à l’égard des articles 2 et 14 considérés comme contraires à l’islam.

M. Al-Henzab a d’autre part souligné qu’entre 2009 et aujourd’hui, le Qatar avait entrepris d’importantes réformes législatives afin de promouvoir les droits des enfants. Une loi adoptée en 2016 a notamment permis d’augmenter le temps auquel ont droit les femmes pour allaiter dans le cadre professionnel. Un programme national a par ailleurs permis la création d’un centre national de lutte contre la traite des êtres humains.

M. Al-Henzab a ensuite assuré que l’État avait également pris des mesures destinées à protéger les enfants de parents inconnus et les enfants en situation de handicap. En 2013, a-t-il poursuivi, l’institution nationale de l’action sociale a été créée afin de dynamiser et d’encourager la société civile dans ses activités; cette institution supervise plusieurs organes consacrés aux questions familiales et sociales, a précisé M. Al-Henzab, avant d’assurer que le Qatar poursuivait ses efforts avec détermination pour améliorer la situation des droits de l’homme sur l’ensemble du territoire qatarien.


Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. JORGE CARDONA, corapporteur du Comité chargé de l’examen du rapport du Qatar, s’est félicité des progrès réalisés par le Qatar dans le but de mettre en application la Convention. Il a toutefois souhaité savoir si le Qatar envisageait de ratifier le troisième Protocole facultatif à la Convention qui établit une procédure de plaintes individuelles. Il s’est par ailleurs inquiété des réserves que maintient le Qatar à l’égard des articles 2 et 14 de la Convention et a souligné que de nombreux pays qui intègrent la loi islamique dans leur système juridique n’ont pas formulé de telles réserves ou les ont retirées.

M. Cardona a ensuite félicité la délégation pour les informations fournies au sujet de la stratégie intitulée « Vision nationale du Qatar pour 2030 », qui prévoit des dispositions relatives aux droits de l’homme s’appliquant à l’ensemble du pays. Il a toutefois regretté l’absence de stratégie intégrale sur l’enfance ciblant spécifiquement les droits de l’enfant couverts par la Convention. S’agissant des ressources économiques allouées à la protection de l’enfance, le corapporteur a félicité le Qatar pour l’important budget consacré à cette thématique; il a néanmoins souhaité obtenir davantage de détails concernant l’adoption et le versement de ces allocations et l’évaluation de leur efficacité.

M. Cardona s’est par ailleurs inquiété de l’absence de dispositions concernant la responsabilité sociale des entreprises en matière de droits de l’enfant. Il a en outre souhaité savoir si des réformes du Code de la famille étaient envisagées afin d’élever l’âge légal du mariage des jeunes filles pour le porter de 16 à 18 ans. Il a par ailleurs demandé si une réforme du Code pénal était envisagée afin que le système de justice pour mineurs s’applique à toutes les personnes de moins de 18 ans et non pas seulement à celles de moins de 16 ans. Le corapporteur a souligné que la différence entre l’âge minimum légal du mariage pour les filles (16 ans) et celui fixé pour les garçons (18 ans) constituait en soi une discrimination. D’autres dispositions législatives au Qatar entretiennent ce type de discriminations entre les sexes, notamment en matière d’héritage, a-t-il fait observer, s’inquiétant de la perpétuation des stéréotypes de genre. Il a souhaité savoir si le Qatar envisageait d’adopter une politique générale de sensibilisation et de formation à destination des différents secteurs de la société pour faire progressivement disparaître ces stéréotypes. Comment les programmes scolaires abordent-ils et aident-ils à promouvoir cette sensibilisation nécessaire à l’égalité entre hommes et femmes? Le Qatar envisage-t-il de mettre un terme à l’éducation non mixte ?

Au-delà des discriminations entre les sexes, M. Cardona a demandé à la délégation de fournir des informations quant aux mesures destinées à sensibiliser la population aux stéréotypes à l’encontre des enfants handicapés, des enfants nés hors mariage ou encore des jeunes LGBTI.

Le corapporteur a en outre souhaité savoir si l’enfant au Qatar avait le droit à faire entendre sa voix dans toutes les décisions qui le concernent.

M. Cardona s’est inquiété que certaines infractions, comme l’espionnage et l’apostasie, commises par les enfants de 16 ans et plus soient passibles de la peine de mort. Soulignant qu’il n’y avait pas eu d’exécution depuis 2003, il a demandé si le Qatar envisageait d’abolir la peine capitale.

M. Cardona a par la suite relevé que le nombre d’enfants handicapés inscrits dans des institutions spécialisées avait doublé entre 2015 et 2016. Il a demandé si le Qatar prévoyait d’encourager des solutions alternatives à cette institutionnalisation des enfants handicapés, en apportant notamment un soutien aux familles. Il a par ailleurs demandé si des mesures avaient été adoptées pour que les enfants handicapés puissent s’exprimer lors de prises de décision les concernant.

Le corapporteur s’est par ailleurs inquiété de la subsistance des mariages précoces et a souhaité obtenir des informations précises sur cette pratique et sur la définition qu’en donne la loi qatarienne.

M. Cardona a en outre souhaité obtenir des informations sur les formations et les mesures de sensibilisation développées afin de sensibiliser le public et les différentes institutions du pays aux droits des enfants en matière d’accès à la santé. Il s’est demandé si des campagnes concernant les dommages causés sur les enfants par la polygamie existaient au Qatar et s’est enquis des mesures de prévention et de formation concernant le VIH/sida.

Le corapporteur a ensuite demandé si des mesures d’inspection avaient été mises en place pour faire face au travail domestique auquel participent parfois des enfants, notamment des enfants migrants. Il a d’autre part demandé si une étude avait été menée concernant la traite et la mise en scène d’enfants dans des contenus pornographiques.

Enfin, le corapporteur a souhaité savoir si des mesures avaient été prises pour prévenir toute forme d’abus contre les enfants à l’occasion de la coupe du monde de football en 2022.

M. LUIS ERNESTO PEDERNERA REYNA, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Qatar, a voulu savoir si la Convention pouvait être invoquée directement devant les tribunaux nationaux du Qatar. Il a salué la création d’une Commission nationale des droits de l’homme et s’est enquis du nombre de plaintes qu’elle a reçues depuis sa mise en place et de la suite qui leur a été donnée. Il s’est inquiété des entraves rencontrées par cette Commission lors de visites effectuées dans des centres pénitentiaires.

Le corapporteur s’est ensuite enquis de la manière dont était envisagé la participation des enfants dans les associations de droits de l’homme et les conseils d’étudiants qui existent dans les écoles. Il s’est également enquis des voies de recours juridiques auxquelles ont accès les enfants en matière de protection de la vie privée.

Concernant la torture, M. Pedernera Reyna a souhaité savoir combien de plaintes avaient été traitées par le système judiciaire jusqu’à aujourd’hui et a demandé si le personnel de prison ainsi que les agents de police avaient été formés et sensibilisés au thème de la torture. Il a ensuite souhaité obtenir des renseignements concernant les réparations prévues pour les enfants victimes de maltraitance. Il a demandé si une loi prévoyait l’interdiction des châtiments corporels dans tous les environnements, que ce soit en milieu scolaire ou au sein de la famille. M. Pedernera Reyna a également souhaité obtenir des données chiffrées et précises sur les enfants victimes d’abus sexuels et sur les mesures de réhabilitation qui leur sont accordées.

Un autre expert a également demandé si le Qatar envisageait de lever les réserves émises par le pays à l’égard de dispositions d’autres conventions telles que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Il a en outre été demandé si le Qatar avait pris des mesures pour garantir le droit des enfants à pratiquer leur religion dans les lieux de culte qui leur sont réservés et empêcher tout type de discrimination à leur égard.

Une experte a fait observer que selon la loi en vigueur au Qatar, la transmission de la nationalité qatarienne s’effectue uniquement par le père. Aussi, a-t-elle souhaité savoir si le Qatar envisageait de permettre que la transmission de la nationalité se fasse également par la mère.

Un expert a souhaité savoir si la loi sur les congés maternité était applicable à toutes les femmes, y compris celles de nationalité étrangère. Ce même expert s’est enquis de la situation des femmes et des enfants détenus. Il a demandé si les enfants avaient droit à l’assistance juridique et dans quelles conditions et a souhaité savoir si le Qatar envisageait de relever l’âge de la responsabilité pénale de 7 à 10 ans. L’expert a par ailleurs demandé si des sanctions non privatives de liberté étaient prévues pour les délinquants mineurs. Il s’est en outre inquiété des emprisonnements de plus en plus fréquents de femmes et d’enfants migrants qui, en principe, devraient être envoyés dans des centres d’accueil. Se référant au Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, il a souhaité savoir si des mécanismes permettant d’identifier des enfants migrants qui pourraient avoir pris part à des conflits armés avaient été mis en place au Qatar; il a également demandé si des services sociaux avaient été mis sur pied afin de permettre le rétablissement psychologique et physique de tels enfants et a souhaité obtenir des informations ventilées par âge, sexe et nationalité concernant les enfants demandeurs d’asile ayant participé à des conflits à l’étranger.

Une experte a souhaité obtenir des détails sur le processus par lequel une personne devient, en vertu du système de tutelle de la kafala, le parrain d’un enfant. L’avis de l’enfant est-il pris en compte avant son placement au titre de ce régime? Est-il possible de mettre fin à une kafala pour rétablir le lien avec les parents biologiques? Qu’arrive-t-il si une famille exerçant sa tutelle sur un enfant au titre de ce régime change de religion et que prévoit ce statut pour ce qui est de l’héritage de l’enfant?

Faisant référence à une campagne lancée par le Qatar pour promouvoir l’allaitement en prison, un autre expert souhaité connaître le pourcentage de mères détenues allaitant leurs enfants. Relevant que l’avortement était dépénalisé, cet expert a demandé si les adolescents se voyaient dispenser des cours d’éducation sexuelle. Il s’est dit préoccupé par la forte augmentation des problèmes de santé mentale, dont la dépression, la sous-alimentation et la consommation excessive d’alcool et de drogues chez les jeunes qatariens ces dernières années.

Un expert a demandé des précisions sur les taux de mortalité infantile dans le pays, en particulier dans les cliniques privées. Des précisions ont en outre été demandée sur les moyens d’enregistrement des naissances des enfants de migrants et sur les moyens mis en place par le Qatar pour que les campagnes de vaccinations atteignent les régions les plus reculées.

Un expert a souhaité savoir si les langues minoritaires, notamment l’hindi, le pachtoune ou encore le farsi, étaient enseignées dans les écoles du Qatar. Il s’est en outre enquis de la situation des enfants des rues.

Un expert s’est dit préoccupé que le Code pénal ne prévoie pas de définition des crimes tels que la traite ou encore la mise en scène d’enfants dans des contenus pornographiques.

Un expert a souhaité obtenir des précisions sur la gratuité de l’accès au soin et à l’éducation ainsi qu’à l’ensemble du système des prestations sociales pour tous les enfants présents sur le territoire qatarien. Il a également souhaité savoir si les peines de flagellation, de travaux forcés et de prison à vie étaient applicables aux mineurs.


Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que le Qatar envisageait de lever les réserves qu’il a émises à l’égard des articles 2 et 14 de la Convention. Cette possibilité est actuellement examinée par une équipe chargée d’étudier ces deux articles afin de vérifier qu’ils ne sont pas contraires à la Constitution du pays. La délégation a par ailleurs indiqué que d’autres réserves concernant des instruments internationaux avaient déjà été levées, dont certaines de celles qui avaient été émises à l’égard de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et du Protocole facultatif sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.

La Vision nationale de développement du Qatar à l'horizon 2030 consacre les principes énoncés dans la Constitution, qui protège les libertés fondamentales et assure la protection des droits des enfants. Elle vise à réaliser la justice sociale à travers la mise en place de stratégies nationales dont les objectifs consistent à assurer une vie digne pour chaque enfant et garantir la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans tous les domaines. Ce dernier est couvert par toutes les initiatives impulsées dans les secteurs économiques, sociaux et de développement durable, a assuré la délégation.

Tous les textes de loi liés à l’enfant, dont le Code de la famille, doivent prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant jusqu’à l’âge du premier emploi pour les jeunes garçons et du mariage pour les jeunes filles, a ajouté la délégation. La loi fixe les conditions pour le versement de la pension accordée à la femme et à l’enfant en cas de séparation, conformément au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Dans le cas où les parents ne sont pas mariés, la garde de l’enfant revient automatiquement à la mère, a précisé la délégation. La loi fixe également les conditions de visite de l’enfant en fonction de son intérêt supérieur.

La délégation a par la suite précisé qu’en cas de séparation d’un couple, la mère exerce l’autorité parentale sur les fillettes jusqu’à l’âge de 7 ans, les fillettes pouvant également rester avec leur mère jusqu’à l’âge de 12 ans. Dans tous les cas, la garde s’applique jusqu’à leur mariage. Les garçons, eux, peuvent choisir entre l’autorité parentale de la mère ou du père à partir de l’âge de 7 ans. La délégation a justifié cette différence en soulignant qu’il est dans l’intérêt supérieur des filles de rester avec leur mère jusqu’à l’âge de 12 ans.

S’agissant des mécanismes judiciaires spécifiquement dédiés aux enfants, la délégation a indiqué qu’il existait, au Qatar, un parquet, un tribunal et une instance judiciaire chargée des enfants et de la famille. Il n’existe pas de prison réservée aux mineurs, a par ailleurs souligné la délégation.

Pour ce qui est de la définition de l’enfant, la délégation a indiqué que la loi qatarienne considère toute personne de moins de 18 ans comme un enfant. Un autre projet de loi devrait être prochainement adopté pour étoffer cette définition.

En ce qui concerne l’âge du mariage, le législateur a mis en place des règles autorisant le mariage des filles dès l’âge de 16 ans, mais uniquement après autorisation du juge et approbation du tuteur de la jeune fille ainsi que des deux parties au contrat. Selon les statistiques, peu de mariages de filles mineures ont lieu au Qatar et ce, notamment, en raison des garde-fous instaurés par une loi de 2006 qui met en place une série de conditions strictes auxquelles doivent répondre les deux parties habilitées à conclure le contrat de mariage, afin que celui-ci soit valide. Le tuteur doit également remplir certaines conditions, tout comme les témoins. L’approbation verbale ou écrite de la femme mariée est par ailleurs requise.

Les biens d’un enfant peuvent être utilisés par ses tuteurs uniquement sur autorisation d’un juge, a par ailleurs souligné la délégation. Le législateur autorise également un mineur de 16 ans à disposer de ses biens après décision du juge, a-t-elle ajouté.

D’autre part, le Code de la famille régit les droits en matière d’héritage selon les règles de la charia. Selon ces dispositions, les garçons héritent de deux parts de l’héritage, contre une pour les filles, a précisé la délégation. En 2004, une loi a créé une instance chargée de gérer les biens des mineurs, afin de les préserver et de leur permettre d’en bénéficier plus tard.

Concernant la transmission de la nationalité, la délégation a relevé que celle-ci était basée sur le principe du droit du sang et repose (en la matière) sur l’héritage paternel. La loi du Qatar interdit par ailleurs la double nationalité, a ajouté la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Commission nationale des droits de l’homme et la Direction des droits de l’homme du Ministère de l’intérieur peuvent effectuer des visites dans les centres de détention sans autorisation préalable.

Concernant la peine capitale, la délégation a souligné que la loi sur les mineurs de 1994 interdit son application ainsi que les peines d’emprisonnement à perpétuité pour les mineurs de moins de 18 ans. Le juge applique des sanctions particulières pour les personnes âgées entre 14 et 16 ans, dont les peines ne peuvent dépasser les dix ans d’emprisonnement. En outre, le Code pénal fixe à 18 ans l’âge minimum pour l’application de la peine capitale. Lors du procès d’un enfant, la loi impose la présence obligatoire des parents, a ajouté la délégation.

La Commission nationale des droits de l’homme est compétente pour recevoir des plaintes, a d’autre part indiqué la délégation. Parmi ses nombreuses attributions, figurent la réalisation d’enquête et la production de brochures et d’affiches; elle dispose d’un mécanisme habilité 24h/24 à recevoir des plaintes qui lui sont adressées directement ou indirectement par les enfants. Des campagnes ont également été lancées dans les médias.

Les associations des droits de l’homme et les conseils d’étudiants existant dans les écoles et universités sont régis par une politique spéciale; ils existent dans toutes les écoles du pays et ont pour mission d’encourager le dialogue, la tolérance et les échanges entre les élèves ou entre les étudiants, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que le Qatar avait d’ores et déjà lancé une série d’initiatives dans le but de réaliser les Objectifs de développement durable (ODD). Ces Objectifs ont notamment été présentés aux élèves des écoles qatariennes sur la base d’un plan d’action adopté par le Ministère de l’éducation en 2015. Un plan d’action sur l’objectif 4, relatif à l’éducation de qualité, a par ailleurs été créé et des campagnes de promotion ont été lancées. Une brochure sur les ODD a été diffusée.

La loi du Qatar interdit tout châtiment corporel contre les enfants dans le cadre de l’école, a ensuite fait valoir la délégation. Si un enfant commet une faute, des mesures disciplinaires peuvent être prises à son encontre, mais en aucun cas celles-ci ne peuvent s’apparenter à des châtiments corporels, a-t-elle souligné, précisant qu’un manuel traitant de cette question avait été mis à disposition des travailleurs sociaux et des enseignants. Des ateliers sont organisés pour aborder la question du comportement des enfants et des enseignants à l’école. Des sanctions, allant jusqu’au licenciement, peuvent être imposées à toute personne ayant infligé des châtiments corporels à un enfant. Ces dispositions font écho aux principes de la Constitution du pays qui prévoit la responsabilité de l’État dans la protection des enfants et des jeunes contre toute forme d’abus physique et psychologique dans tous les cadres de vie, a insisté la délégation.

Les enfants de plus de 18 ans seulement peuvent être condamnés pénalement, a indiqué la délégation. Les condamnations au fouet et aux travaux forcés sont légalement possibles pour les mineurs au Qatar, mais aucune peine de ce type n’a été appliquée depuis plus de dix ans. Les enfants de 16 à 18 ans sont détenus dans des prisons de haute sécurité de leur région ou dans des pavillons pour mineurs, séparément des adultes.

Le Code de procédure pénale du Qatar prévoit la mise à disposition d’avocat commis d’office pour toutes les personnes, dont les enfants, en difficulté. Les sanctions sont renforcées lorsqu’un délit a été commis à l’encontre d’un mineur et cela peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie, dans le cas par exemple de relations sexuelles forcées avec un mineur de moins de 16 ans. Des peines allant de 1 à 5 ans d’emprisonnement sont par ailleurs prévues contre toute personne forçant à la prostitution et dans un tel cas, la sanction est aggravée si la victime a moins de 15 ans.

La délégation a indiqué qu’une loi de 2015 donne droit à un congé maternité payé pendant deux mois. En cas de naissance de jumeaux, le congé est prolongé à 3 mois. Le congé maternité peut être prolongé jusqu’à une année sur présentation d’un certificat médical et après approbation de l’employeur.

S’agissant des questions qui relèvent du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, la délégation a indiqué que la loi sur le service militaire prévoit que seuls les hommes de plus de 18 ans peuvent être recrutés dans l’armée. Le Qatar ne participe à aucune hostilité en ce moment, a ajouté la délégation.

Concernant les femmes détenues au Qatar, la délégation a souligné qu’elles étaient au nombre de 92. Neuf d’entre elles ayant eu un enfant en prison allaitent leurs nourrissons, a-t-elle précisé. Les femmes qui accouchent en prison sont prises en charge par l’État et peuvent recevoir des visites trois fois par semaines. Les femmes détenues peuvent par ailleurs recevoir la visite de leurs enfants vivant à l’extérieur pendant deux heures, trois fois par semaine. Les femmes étrangères incarcérées en vue d’une prochaine expulsion du pays peuvent être détenues par les services de renseignement; elles ont le droit à un examen médical gratuit, peuvent passer des appels téléphoniques et recevoir des visites. Les représentants de leurs ambassades sont autorisés à leur rendre également visite hebdomadairement. Leurs affaires personnelles sont conservées et leur sont rendues à la sortie. Le Gouvernement peut prendre en charge les billets d’avion de retour. En 2016, plus de 7000 billets d’avion ont été financés par le Gouvernement qatarien, a précisé la délégation.

Concernant les migrants, la délégation a relevé que plus de 50 000 citoyens syriens étaient aujourd’hui présents sur le territoire du Qatar. Des services d’éducation et de santé ont été ouverts à l’intention de ces personnes. Une école spécialement dédiée aux enfants syriens a été mise sur pied en 2014. Les frais de scolarisation des enfants migrants sont pris en charge par le Qatar, tout comme leur logement et leur accès aux soins de santé.

S’agissant des personnes handicapées, la délégation a rappelé qu’une stratégie nationale avait été adoptée pour la période 2011-2016. Des experts et des enseignants ont été formés à une série de bonnes pratiques concernant l’éducation de ces personnes. Un centre de conseil pour les personnes en situation de handicap a été ouvert et un autre centre disposant de compétences similaires devrait être inauguré prochainement, a ajouté la délégation. Les parents ont également accès à des ateliers et à des formations sur les questions de handicap.

La protection des nourrissons est une nécessité absolue couverte par des programmes mis en place par le Gouvernement afin de garantir l’accès des enfants et des femmes aux soins de santé de base et aux mécanismes de prévention des maladies, a poursuivi la délégation. Les budgets de la santé et de l’éducation en 2016 représentaient 11% des dépenses totales du Gouvernement, contre 7,6% en 2014, a indiqué la délégation.

Les entreprises travaillant au Qatar et employant des travailleurs migrants ont l’obligation légale de garantir l’accès à une assurance santé pour ces employés.

Concernant le mariage précoce et le VIH/sida, des campagnes de sensibilisation ont été menées dans tout le pays, a poursuivi la délégation. Elle a fait valoir que dix écoles primaires et huit établissements secondaires ont bénéficié de formations dispensées sur le thème des mariages précoces. Elle a par ailleurs indiqué que l’État du Qatar présentait de faibles taux de prévalence du VIH/sida. Dix-huit nouveaux cas seulement ont été enregistrés en 2016. Au total, depuis 1999, 338 cas de personnes atteintes par le VIH/sida ont été recensés au Qatar et aucun cas d’incidence n’a été décelé parmi les enfants depuis 2016. Une stratégie préventive comprenant un accès au dépistage volontaire et des campagnes de sensibilisation à cette maladie a été mise en place. Le Qatar coopère également étroitement avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour évaluer la stratégie nationale du pays en matière de lutte contre le VIH/sida pour la période 2016-2020.

S’agissant des enfants orphelins, la délégation a indiqué qu’un centre spécialisé créé au Qatar fournit une protection spécifique aux personnes marginalisées. Ce centre comprend notamment une commission en charge de faire bénéficier les enfants orphelins d’une éducation adéquate et de soins médicaux.

Des centres administratifs sont répartis sur l’ensemble du territoire, y compris dans les régions reculées, et permettent l’enregistrement des naissances, a d’autre part souligné la délégation.

La délégation a indiqué que la compétence extraterritoriale s’applique pour un certain nombre de délits comme le terrorisme, la piraterie ou la traite des êtres humains. Si une personne a déjà été sanctionnée à l’étranger, elle ne peut l’être une deuxième fois au Qatar, a précisé la délégation.

La loi prévoit des sanctions pouvant aller jusqu’à 7 ans de prison pour les délits de traite, a poursuivi la délégation. Un comité sur la traite a été mis en place afin de prévenir toute activité de traite, notamment dans le cadre de la coupe du monde de football à venir, a-t-elle précisé.

La délégation a par ailleurs assuré qu’il n’y avait pas d’enfants domestiques au Qatar.

Concernant enfin le système de la kafala dans le contexte de l’emploi, la délégation a souligné que celui-ci avait été annulé pour être remplacé par des contrats protégeant davantage les employés. Les salaires sont versés à travers les banques sous la supervision de la Banque nationale du Qatar. Des inspections sont menées régulièrement sur les lieux de travail et des centres sont habilités à recevoir les plaintes déposées par les travailleurs en neuf langues. Par ailleurs, les employeurs ont l’obligation de contracter une assurance sociale pour les travailleurs et aussi de leur ouvrir des comptes bancaires afin d’éviter les retards de paiement.

Du fait du niveau de vie élevé qui prévaut au Qatar, il n’y a pas d’enfants des rues dans le pays, a ensuite fait valoir la délégation. Des programmes de prévention existent cependant pour parer à ce phénomène s’il devait apparaître à l’avenir, a-t-elle ajouté.




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