Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE CHYPRE
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par la République de Chypre sur les mesures que le pays a prises pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Présentant ce rapport, Mme Leda Koursoumba, Commissaire juridique de la République de Chypre, a souligné que depuis 2012, Chypre avait effectué de grands progrès dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale, à travers la mise en place de plusieurs plans d'action nationaux. Elle a indiqué que malgré les difficultés économiques auxquelles le pays se trouve confronté, Chypre est déterminée à poursuivre ses efforts en matière de non-discrimination et à aligner sa législation nationale avec les différents instruments internationaux. Mme Koursoumba a ensuite souligné qu'en raison de l'occupation illégale de 36,2% du pays par l'armée turque, le Gouvernement de la République de Chypre n'était pas en mesure de contrôler l'application des mesures de non-discrimination et des principes de la Convention sur l'ensemble de son territoire.
Mme Koursoumba a ensuite indiqué que le Code pénal avait été amendé en 2015 afin d'ériger en infraction pénale l'incitation publique à la discrimination et à la violence contre toute personne en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre. Cette année, le Code pénal a de nouveau été amendé dans le but de renforcer davantage le cadre juridique national relativement à la discrimination raciale. Cet amendement prévoit que tous motifs racistes, xénophobes et homophobes de discrimination constituent des circonstances aggravantes devant les juges. En 2016, la loi sur l'aide juridictionnelle a été révisée, ajoutant de nouveaux droits pour les personnes qui demandent à bénéficier de la protection internationale, a poursuivi la Commissaire juridique. Un nouveau plan d'action national pour l'intégration des ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire de Chypre est en cours d'élaboration, afin de promouvoir l'intégration sociale de ces populations, a ajouté Mme Koursoumba. Malgré les progrès réalisés pour mettre un terme au conflit en cours à Chypre, des efforts demeurent nécessaires, a-t-elle poursuivi. Tout accord de paix à venir, a-t-elle souligné, devra inclure des mesures de garanties des droits de tous les Chypriotes, quels que soient leur couleur de peau, leur sexe, leur origine ou leur religion. Mme Koursoumba a d'autre part indiqué que le Ministère de l'éducation et de la culture avait mis en place un plan stratégique pour la période 2017-2019 afin de permettre l'accès de tous à l'éducation, toutes les écoles ayant été encouragées à adopter un code de conduite contre le racisme.
La délégation chypriote était également composée de M. Andreas Ignatiou, Représentant permanent de Chypre auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que des représentants du Ministère du Travail, du Ministère de l'éducation et de la culture, ainsi que de la Police.
La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, en particulier, de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; des droits, notamment linguistiques, des groupes minoritaires; de la situation des Roms, des personnes d'ascendance africaine et des Chypriotes turcs; de la situation des migrants et des requérants d'asile; des travailleurs domestiques et de l'inspection du travail; du renversement de la charge de la preuve; de la lutte contre les discours et les crimes de haine; de l'abolition du «visa d'artiste»; de l'acquisition de la nationalité chypriote; ou encore de la formation de la police.
M. Alexei Avtonomov, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a souligné que malgré les améliorations apportées à la législation, de nombreux problèmes persistaient dans la mise en œuvre concrète des dispositions de la Convention. Il s'est inquiété que des partis politiques dits «néonazis» aient récemment prononcé des discours haineux. M. Avtonomov s'est par ailleurs inquiété des conditions d'accueil des requérants d'asile et que ces personnes n'aient accès à l'emploi que six mois après la présentation de leur dossier de demande d'asile.
Un autre expert s'est inquiété qu'aux termes de la loi chypriote, la détention de personnes en provenance d'États tiers ne soit pas décidée par le pouvoir judiciaire. Une experte s'est quant à elle inquiétée de l'adoption en 2014 d'un amendement limitant la liberté de mouvement des personnes bénéficiant de la protection internationale.
Plusieurs ONG rapportent qu'un nombre croissant de personnes - notamment des personnes d'ascendance africaine - se plaignent d'être la cible de discriminations, a-t-il également été souligné. Des rapports font état de la grande vulnérabilité des femmes dans les centres d'accueil des requérants d'asile, où elles sont victimes de violences sexistes accompagnées d'actes de discrimination liés à la couleur de leur peau, a indiqué une experte.
Un membre du Comité s'est inquiété de l'obligation faite aux employés domestiques de ne pas changer d'employeur pendant six ans, soulignant qu'une telle mesure pouvait avoir pour effet de rendre des personnes vulnérables dépendantes de leur employeur.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Chypre et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 12 mai prochain.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la Bulgarie.
Présentation du rapport de Chypre
Le présent dialogue s'établit sur la base du rapport de Chypre, ainsi que de la liste de points à traiter préalablement adressée au pays par le Comité. Le Comité est également saisi du document de base de Chypre contenant des renseignements généraux et factuels relatifs à l'application des instruments auxquels cet État est partie, à l'intention des organes conventionnels concernés.
MME LEDA KOURSOUMBA, Commissaire juridique de la République de Chypre, a souligné que depuis 2012, Chypre avait effectué de grands progrès dans le domaine de la lutte contre la discrimination raciale, à travers la mise en place de plusieurs plans d'action nationaux. L'une des priorités du pays – qui assure la présidence du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe jusqu'à mai 2017 – est de promouvoir les droits et les libertés pour tous, a-t-elle précisé. Elle a indiqué que malgré les difficultés économiques auxquelles le pays se trouve confronté, Chypre est déterminée à poursuivre ses efforts en matière de non-discrimination et à aligner sa législation nationale avec les différents instruments internationaux. Mme Koursoumba a ensuite souligné qu'en raison de l'occupation illégale de 36,2% du pays par l'armée turque, le Gouvernement de la République de Chypre n'était pas en mesure de contrôler l'application des mesures de non-discrimination et des principes de la Convention sur l'ensemble de son territoire. Cet écueil a été souligné par le Haut-Commissaire aux droits de l'homme dans son dernier rapport sur la situation des droits de l'homme à Chypre.
Mme Koursoumba a par ailleurs indiqué que le Code pénal avait été amendé en 2015 afin d'ériger en infraction pénale l'incitation publique à la discrimination et à la violence contre toute personne en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre. Cette année, le Code pénal a de nouveau été amendé dans le but de renforcer davantage le cadre juridique national relativement à la discrimination raciale. Cet amendement prévoit que tous motifs racistes, xénophobes et homophobes de discrimination constituent des circonstances aggravantes devant les juges.
En 2016, la loi sur l'aide juridictionnelle a été révisée, ajoutant de nouveaux droits pour les personnes qui demandent à bénéficier de la protection internationale, a poursuivi la Commissaire juridique. Pour ce qui est de la lutte contre la traite de personnes, le mécanisme de référence national a été renforcé en mai 2016 par l'adoption d'un guide pour la gestion des cas de victimes de la traite d'êtres humains qui met en place un cadre de coopération entre le Gouvernement et les ONG afin d'assurer le respect des droits de ces victimes. Un plan d'action contre la traite des êtres humains prévoit par ailleurs de réviser la législation existante afin d'améliorer l'aide accordée aux victimes et de mettre en place des formations à l'intention des forces de sécurité et des juges. Un nouveau plan d'action national pour l'intégration des ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire de Chypre est en cours d'élaboration, afin de promouvoir l'intégration sociale de ces populations, a ajouté Mme Koursoumba.
Malgré les progrès réalisés pour mettre un terme au conflit en cours à Chypre, des efforts demeurent nécessaires, a-t-elle poursuivi. Tout accord de paix à venir, a-t-elle souligné, devra inclure des mesures de garanties des droits de tous les Chypriotes, quels que soient leur couleur de peau, leur sexe, leur origine ou leur religion.
Des améliorations ont été apportées concernant l'accès au marché du travail pour les ressortissants des pays tiers, a d'autre part fait valoir Mme Koursoumba. Le permis de séjour pour les travailleurs domestiques a été porté de 4 à 6 ans et est renouvelable pour 2 ans sous certaines conditions. Mme Koursoumba a par ailleurs rappelé que Chypre avait ratifié en janvier 2017 le Protocole de 2014 relatif à la Convention sur le travail forcé de l'OIT, qui interdit toute forme de travail forcé ou d'esclavage moderne. Un plan d'action est actuellement en cours d'élaboration afin de mettre en œuvre les dispositions prévues par ce Protocole, a-t-elle indiqué.
Pour ce qui est des Roms, la Commissaire juridique de Chypre a précisé que les services sociaux de l'État ont été désignés par le Conseil des ministres comme étant les principaux points focaux en charge de coordonner les politiques à l'intention des Roms. Une nouvelle initiative a été lancée en 2016 en coopération avec la Commission européenne afin de mettre en place une plateforme nationale rom destinée à renforcer la reddition de comptes concernant les politiques d'intégration des Roms.
Par ailleurs, en collaboration aussi avec des organismes et institutions non policiers, des formations ont été dispensées aux forces de police – tout particulièrement dans les services de l'immigration – et au personnel judiciaire afin de sensibiliser ces autorités aux problématiques de la lutte contre les discriminations. En mars 2017, la police chypriote a signé un mémorandum de coopération pour la protection et la promotion des doits de l'homme avec douze ONG spécialisées dans le domaine des droits de l'homme. Un manuel de formation sur les droits humains incluant un chapitre sur les discriminations est actuellement en cours de rédaction. En 2015, le Bureau chargée de la lutte contre la traite d'êtres humains, basé au quartier général de la police, a été renforcé grâce au recrutement d'enquêteurs en charge d'identifier des cas de traite et d'éventuels réseaux de trafiquants.
Enfin, Mme Koursoumba a indiqué que le Ministère de l'éducation et de la culture a mis en place un plan stratégique pour la période 2017-2019 afin de permettre l'accès de tous à l'éducation. Toutes les écoles ont été encouragées à adopter un code de conduite contre le racisme et un guide pour l'enregistrement d'incidents à caractère raciste; il s'agit de promouvoir, au sein des établissements scolaires, les valeurs de tolérance et de paix. L'institut pédagogique national organise par ailleurs des conférences et des séminaires sur des sujets concernant la discrimination et apporte un soutien aux enseignants en leur dispensant des formations dans ce domaine.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. ALEXEI AVTONOMOV, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a souligné que malgré les améliorations apportées à la législation, de nombreux problèmes persistaient dans la mise en œuvre concrète des dispositions de la Convention. Il a demandé des détails concernant les dispositions légales veillant à encadrer le travail des employés domestiques dans le pays.
Le rapporteur a par ailleurs souhaité savoir quelles mesures Chypre souhaitait mettre en place afin d'assurer l'enseignement de la langue turque et préserver certaines langues minoritaires sur le territoire, telles que les langues pratiquées par les Roms ou encore les Maronites.
Le rapporteur s'est ensuite inquiété que des partis politiques dits «néonazis» aient récemment prononcé des discours haineux, notamment lors des dernières élections au Parlement et a souhaité obtenir des précisions à ce sujet ainsi que sur la diffusion de discours haineux dans les médias.
S'agissant des demandeurs d'asile, M. Avtonomov s'est inquiété de la distance séparant les centres d'accueil des principales villes du pays, sans que des moyens de transports adéquats existent entre les deux. Il a par ailleurs déploré du peu de programmes de formation professionnelle ou de possibilités de loisirs offerts dans ces centres d'accueil. Il s'est également inquiété que les demandeurs d'asile n'aient accès à l'emploi que six mois après la présentation de leur dossier de demande d'asile et a souligné que ces requérants travaillaient le plus souvent dans les domaines de l'agriculture et de la pêche.
En 2016, a poursuivi le rapporteur, 1214 nouvelles demandes d'asile ont été déposées par des migrants syriens et 224 par des Somaliens. Au total, quelque 5800 réfugiés et personnes bénéficiant d'une protection internationale étaient recensés à Chypre. M. Avtonomov a souhaité avoir des informations sur les soins de santé dispensés aux demandeurs d'asile et sur la possibilité qui leur est offerte d'accéder gratuitement aux centres hospitaliers. Par ailleurs, 19% de la population sont constitués de résidents légaux issus de pays tiers, a souligné le rapporteur, avant de s'enquérir de la situation de ces personnes dans le pays.
Un autre membre du Comité s'est inquiété de l'obligation faite aux employés domestiques de ne pas changer d'employeur pendant six ans. Il a indiqué qu'une telle mesure pouvait avoir pour effet de rendre des personnes vulnérables dépendantes de leur employeur.
Un expert a demandé des informations complémentaires concernant les populations migrantes; il s'est enquis de statistiques afférentes aux différents statuts juridiques de ces migrants.
Un autre expert a demandé si, en matière civile, le renversement de la charge de la preuve pour des cas de discrimination était envisageable.
Plusieurs ONG rapportent qu'un nombre croissant de personnes - notamment des personnes d'ascendance africaine - se plaignent d'être la cible de discriminations, s'est inquiétée une experte. Des rapports font état de la grande vulnérabilité des femmes dans les centres d'accueil des requérants d'asile, où elles sont victimes de violences sexistes accompagnées d'actes de discrimination liés à la couleur de leur peau, a-t-elle ajouté. Elle a souhaité savoir si des formations contre les discriminations étaient dispensées au personnel gérant ces centres. Elle a également demandé des statistiques sur la composition ethnique des personnes détenues dans les prisons du pays. Enfin, l'experte a demandé des informations sur les résultats des formations dispensées aux forces de sécurité et au personnel judiciaire.
Un expert s'est inquiété qu'aux termes de la loi chypriote, la détention de personnes en provenance d'États tiers ne soit pas décidée par le pouvoir judiciaire. Cet expert a par ailleurs souhaité en savoir davantage sur les mesures visant à mettre fin à la détention prolongée des demandeurs d'asile et des migrants en situation irrégulière ainsi que sur les conditions de vie dans les centres de détention. Il a en outre souhaité savoir pendant combien de temps une personne pouvait être placée en détention provisoire dans un commissariat de police avant d'être présentée à un juge.
Une autre experte a souhaité obtenir des données statistiques actualisées sur le nombre d'apatrides, de migrants, de réfugiés et de demandeurs d'asile dans l'État partie, ainsi que sur les demandes et décisions de naturalisation. Elle par ailleurs demandé si Chypre envisageait de ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et celle de 1961 sur la réduction des cas d'apatridie. Concernant les réfugiés, elle s'est inquiétée de l'adoption en 2014 d'un amendement limitant la liberté de mouvement des personnes bénéficiant de la protection internationale; cette disposition empêcherait la plupart de ces personnes se trouvant au sud de l'île de se rendre au nord. L'experte a enfin demandé de détails concernant la procédure d'acquisition de la nationalité à Chypre.
Un autre expert a demandé des renseignements détaillés sur des affaires dans lesquelles la législation donnant effet aux dispositions de la Convention aurait été appliquée par les tribunaux. Qu'en est-il du nombre de plaintes reçues pour discrimination raciale et des poursuites engagées contre les auteurs de tels faits? Le seul cas mentionné dans le rapport remonte à 1986, a relevé cet expert. Il a par ailleurs déploré qu'il n'existe pas d'institut national des droits de l'homme à Chypre.
Un expert a demandé si l'inspection du travail avait des compétences pour identifier des cas de discriminations sur les lieux de travail et si elle avait le droit d'effectuer des visites dans toutes les entreprises présentes sur le territoire ainsi que des contrôles sur l'emploi des travailleurs domestiques.
Un autre expert a demandé des renseignements actualisés sur la situation des Chypriotes turcs, notamment en matière d'emploi, d'éducation et de logement.
Réponses de la délégation
La délégation a fait valoir que la définition des discriminations retenue par le pays était en parfaite conformité avec celle donnée par la Convention. Pour ce qui est de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne, la Constitution chypriote prévoit que les dispositions des traités dûment ratifiés par Chypre soient intégrées à l'ordre juridique interne avec une force supérieure à tout autre texte de loi. La Convention peut donc être invoquée par les citoyens devant les tribunaux nationaux, a souligné la délégation.
La délégation a indiqué que les missions qui auraient dû être confiées à une institution nationale des droits de l'homme ont été déléguées à l'Ombudsman, faute de ressources financières et humaines suffisantes. Du fait de la crise économique actuelle, Chypre souffre d'une pénurie du personnel dans l'ensemble de la fonction publique, a précisé la délégation, soulignant qu'un gel d'ouverture de postes dans la fonction publique a été prononcé. L'Ombudsman dispose du statut B auprès du Conseil de coordination des institutions nationales de droits de l'homme et des efforts restent à fournir afin que cette institution obtienne le statut A de pleine conformité aux Principes de Paris, a indiqué la délégation.
Concernant les droits des groupes minoritaires à l'éducation et la promotion de leurs langues, la délégation a notamment indiqué qu'une politique axée sur les droits est actuellement mise en œuvre afin de promouvoir les valeurs de paix à l'école. L'arabe maronite chypriote bénéficie d'un plan d'action pour sa promotion, a-t-elle ajouté, précisant que des entretiens avec des personnes qui pratiquent cette langue ont été menés afin de produire du matériel didactique mis à disposition des personnes qui souhaitent apprendre cette langue dans des centres d'éducation proposant des cours facultatifs. Une école arménienne subventionnée par le Gouvernement propose quant à elle un enseignement de l'arménien, a poursuivi la délégation. De nombreuses écoles privées enseignant des langues minoritaires et supervisées par le Ministère de l'éducation existent sur l'île, a fait valoir la délégation. Il existe par ailleurs des écoles privées russes et une église russe a récemment été inaugurée afin de permettre à cette communauté d'exercer librement ses droits religieux, a-t-elle ajouté.
L'éducation à Chypre est obligatoire et gratuite pour tous pendant 10 ans, a par ailleurs rappelé la délégation, avant d'ajouter que les Chypriotes turcs peuvent suivre leur scolarité dans les écoles privées ou publiques, les frais de scolarité des écoles privées étant pleinement subventionnés par l'État. Les enfants peuvent en outre suivre des cours de turc durant les heures d'école au niveau du secondaire supérieur ou recevoir des leçons de langue turque au centre d'éducation pour adultes ou d'autres centres publics qui proposent des cours pour adultes et enfants, a-t-elle précisé.
Pour 2015-2016, le Ministère de l'éducation a fixé comme principaux objectifs stratégiques pour l'école la lutte contre le racisme et les discours de haine ainsi que la promotion de l'égalité et du respect, a ensuite indiqué la délégation. Un code de conduite ainsi qu'un guide ont été créés à cette fin et adoptés par 63 écoles pour la période 2015-2016; ce nombre devrait augmenter à l'avenir, a-t-elle souligné. Il est ainsi prévu que les écoles ayant adopté ce code et ce guide effectuent un recensement de tous les cas de discrimination constatés en milieu scolaire et qu'elles fournissent ensuite au Ministère un rapport à la fin de l'année.
Concernant la localisation des centres d'accueil pour les migrants et particulièrement celui de Kofinou, la délégation a indiqué que des billets mensuels sont mis à disposition des migrants afin de leur permette de se déplacer jusqu'aux villes. Après avoir demandé la protection internationale, les requérants d'asile reçoivent une assistance, des coupons, des vêtements et bénéficient d'un remboursement de l'électricité et de l'eau. Ils bénéficient en outre d'un accès gratuit aux soins de santé.
Deux cas de violences contre des femmes, qui ont porté plainte pour agression, ont été recensés dans des centres d'accueil, a poursuivi la délégation. Les auteurs de ces violences ont été exclus du centre concerné dans chacun de ces cas, a-t-elle fait valoir. Le personnel en charge de la gestion des centres d'accueil pour migrants a reçu en 2016 une formation sur la résolution des conflits entre résidents, a-t-elle souligné. La police de Kofinou est prévenue en cas de conflits ou de comportements menaçants, a-t-elle ajouté.
La délégation a par la suite indiqué que les capacités du centre de détention de Menogia pour les migrants en situation irrégulière ont été récemment réduites quasiment de moitié. Le nombre actuel de personnes ainsi détenues est de 284, a en outre indiqué la délégation, précisant que quatre nationalités représentent environ 60% de cette population carcérale. La bibliothèque du centre de Menogia a été complétée par de nouveaux ouvrages, a en outre fait valoir la délégation. La police installe actuellement des ordinateurs pour donner accès à Internet à ces personnes en attente d'expulsion. Des zones et des activités récréatives sont également en cours de création. Les ONG peuvent effectuer des visites dans le centre, a précisé la délégation.
La durée maximale de la détention est de 18 mois et elle peut être contestée devant le tribunal administratif, a ensuite précisé la délégation, assurant que cette durée maximale s'appliquait dans les faits extrêmement rarement. Concernant précisément le tribunal administratif, la délégation a fait valoir que de nouveaux magistrats et avocats avaient été recrutés en 2016. En 2016, ce tribunal a été saisi de 43 recours émanant de demandeurs d'asile et pour 2017, ce chiffre s'élève à ce stade à 50, a-t-elle précisé.
La question de la ratification de la Convention sur l'apatridie est en cours d'examen, a par ailleurs déclaré la délégation.
Les demandeurs d'asile bénéficient d'une aide d'urgence s'ils ne résident pas dans les centres d'accueil, a ensuite souligné la délégation; un dispositif de financement est en place pour assurer la couverture des dépenses de base.
Une unité spéciale créée au sein de l'inspection du travail est chargée de mener des inspections visant le travail illégal, a d'autre part indiqué la délégation. Les contrats des migrants en provenance d'États tiers respectent les termes des conventions collectives, a-t-elle indiqué. Les contrats pour les travailleurs hors Union européenne sont traduits dans les langues des pays d'origine des travailleurs, a-t-elle en outre fait valoir.
Concernant les travailleurs domestiques, la délégation a précisé qu'aux termes de la législation en vigueur, les employés de maison ont le droit de changer d'employeur à trois reprises sur une durée de six ans. Une unité a été créée par le Ministère du travail afin d'examiner, dans un délai de trois semaines, toute plainte déposée par ces personnes. Des réparations doivent être fournies par l'employeur en cas de condamnation. Les employés de maison peuvent également s'adresser au tribunal du travail, a précisé la délégation. Elle a ensuite souligné que la législation chypriote dans le domaine de la protection des droits des travailleurs domestiques était déjà très avancée. Néanmoins, un comité tripartite composé de représentants de divers organes examine les dispositions de la Convention n°189 de l'OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques afin d'acheminer le pays vers une éventuelle ratification de cet instrument.
Depuis 2013, un programme incluant des cours sur le patrimoine culturel des Roms est proposé gratuitement aux communautés roms, a d'autre part fait valoir la délégation. Une association des Roms chypriotes a par ailleurs été créée tout récemment, a-t-elle indiqué, avant d'ajouter qu'une plateforme pour les Roms a également été constituée, sous financement de la Commission européenne.
La population rom étant de petite taille à Chypre, une approche globale a été mise en place pour l'intégration des groupes vulnérables, afin d'augmenter le taux d'emploi et de favoriser l'intégration de ces groupes, a ensuite indiqué la délégation. Les Roms sont donc intégrés à cette stratégie, sans mécanisme de suivi qui leur soit spécifiquement dédié. Toutefois, la plateforme nationale pour les Roms financée par la Commission européenne a rassemblé, au cours de plusieurs réunions, de nombreuses parties, dont des représentants des communautés roms qui ont pu fournir des indications quant à leurs besoins et formuler des avis. Le Gouvernement de la République de Chypre a amélioré quelque 25 000 logements qu'ils peuvent occuper à Paphos s'ils en font la demande. Deux autres projets de construction sont en cours à Limassol et dans un autre district.
Les Chypriotes turcs bénéficient d'une aide à la recherche d'emploi et ont accès à tous les programmes de formation disponibles dans le pays; ils peuvent faire appel à un conseiller pour la recherche d'emploi et une ligne de téléphone d'urgence leur est destinée afin de leur fournir des informations sur le domaine du travail.
La délégation a ensuite souligné que le Gouvernement de la République de Chypre ne peut garantir la protection des droits des Chypriotes turcs et leur accès aux prestations sociales que s'ils se trouvent sur le territoire sous son contrôle, c'est-à-dire dans le sud de l'île.
Comme toute personne résidente à Chypre, les personnes d'ascendance africaine ont accès au marché du travail, a également assuré la délégation. Si ces personnes ne sont pas issues de l'Union européenne, elles peuvent obtenir des contrats à durée déterminée, comme tous les ressortissants d'États tiers présents à Chypre.
Les statistiques concernant les cas d'infractions racistes sont publiées annuellement sur le site de la police chypriote, a ensuite expliqué la délégation, avant de préciser que 14% des affaires de discrimination recensées entre 2005 et 2016 sont encore en cours d'examen, 6% ont abouti à des acquittements et 62% ont donné lieu à des condamnations. Les chefs d'accusation mentionnés dans ces affaires font référence aux dispositions de la Convention, a souligné la délégation, avant d'ajouter que ces chiffres devraient bientôt être ventilés par nationalité et par sexe.
Le renversement de la charge de la preuve s'applique dans les cas de discrimination raciale, sauf pour les affaires pénales, a par ailleurs précisé la délégation.
Des sanctions ont été prononcées contre des médias ayant diffusé des propos racistes ou haineux, a d'autre part fait valoir la délégation. En revanche, aucun cas de sanction pour discours haineux prononcé par une personnalité politique n'a été recensé, a-t-elle ajouté.
Revenant par la suite sur les discours et crimes de haine, la délégation a fait état de plusieurs cas de violence survenus dans le cadre d'actes d'hooliganisme lors de matches de football.
La délégation a en outre fait observer que des milliers de traversées de la ligne verte avaient lieu chaque année sans incidents.
En 2012, a-t-elle poursuivi, un incendie a été déclenché près d'un campement rom; il s'agit de la seule affaire concernant les Roms qui ait eu à faire l'objet d'une enquête officielle par la police.
Le «visa d'artiste», qui était émis jusqu'en 2000 pour les femmes dansant dans les cabarets de Chypre, a été aboli et remplacé par d'autres procédures afin d'éviter que ce visa ne donne lieu à de la traite d'êtres humains, a par ailleurs indiqué la délégation.
La délégation a ensuite insisté sur la nécessité de changer les attitudes et les mentalités vis-à-vis de la discrimination. À cette fin, la formation de la police, des juges, des travailleurs sociaux ainsi que l'éducation dans les écoles sont fondamentales. Les médias doivent également être mis à contribution. Les programmes de formation de la police permettent aux agents d'acquérir de nouvelles compétences et, le cas échéant, de changer leurs mentalités, a insisté la délégation. Ainsi, l'identification des actes racistes par la police s'est améliorée, donnant lieu à davantage de condamnations. La police et le Ministère de la justice, en partenariat avec des ONG, tentent également de mettre en œuvre un suivi rapproché des policiers afin qu'ils se conforment aux exigences en matière de lutte contre la discrimination. La Direction de la police et le Bureau d'audit de la police exercent également une activité de contrôle, en cas de mauvais traitements infligés par des agents de police. Les enquêtes menées sur les actes des agents de police sont effectuées par une autorité indépendante.
S'agissant de l'acquisition de la nationalité chypriote, la délégation a indiqué que toute personne ayant un parent chypriote pouvait faire une demande de naturalisation après cinq années de résidence à Chypre. Ce sont sept années de résidence qui sont requises si la personne qui demande à être naturalisée n'a pas de parent chypriote.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CERD17/010F