Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS SE PENCHE SUR LA MISE EN ŒUVRE DE LA CONVENTION AU NIGÉRIA
Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille s'est penché, cet après-midi, sur la mise en œuvre de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille au Nigéria, en l'absence de rapport et de délégation du pays.
M. José S. Brillantes, Président du Comité, a expliqué que le Nigéria avait adopté la Convention en 2009 et était tenu de rendre son rapport initial en 2010. En 2015, le Comité a établi une liste de points à traiter adressée à l'État partie qui n'y a apporté aucune réponse malgré plusieurs rappels du Comité. En conséquence, et conformément au Règlement intérieur du Comité, l'examen du Nigéria s'est fait en l'absence de tout rapport et de toute délégation du pays.
Mme Khedidja Ladjel, corapporteuse du Comité pour le Nigéria, a rappelé que le Nigéria comptait près de 190 millions d'habitants et était donc le pays le plus peuplé d'Afrique. Le Nigéria est une puissance économique importante en Afrique, a-t-elle souligné. Toutefois, ce pays souffre de son poids démographique. Le pétrole et le gaz constituent les principaux revenus du pays. Le mouvement Boko Haram a déstabilisé le pays et ses voisins, a-t-elle déploré, ajoutant qu'1,5 million de personnes ont été déplacées en raison de cette situation. Le Nigéria est un pays d'origine, de transit et de destination pour les travailleurs migrants; il accueille notamment de nombreux Chinois et occidentaux. Mme Ladjel a relevé que le pays avait ratifié un certain nombre de conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT), dont la Convention n°97 sur les travailleurs migrants. La Commission nationale des droits de l'homme du Nigéria a vu son statut évoluer à plusieurs reprises ces dernières années et se rapproche aujourd'hui des conditions pour obtenir le statut A conformément aux Principes de Paris. En outre, l'Agence nationale de lutte contre le trafic des personnes mériterait une meilleure organisation et un déploiement sur l'ensemble du territoire, a-t-elle constaté. Le Ministère fédéral de l'emploi et de la productivité est en charge de la régulation de la politique migratoire. Malheureusement, ce Ministère manque de moyens.
Le Nigéria a passé de très nombreux accords bilatéraux en matière de migration, a expliqué la corapporteuse. Aucun encadrement institutionnel n'est prévu pour les migrants travailleurs avant leur départ, a-t-elle toutefois déploré. En outre, les travailleurs migrants domestiques ne sont pas suffisamment protégés, a-t-elle regretté.
L'acquisition de la nationalité par les hommes étrangers qui épousent une Nigériane n'est pas possible, contrairement aux femmes étrangères qui épousent un Nigérian, a ensuite relevé la corapporteuse. Les prérogatives de l'Agence nationale de lutte contre la traite de personnes ne sont pas clairement définies, a-t-elle affirmé; en outre, seules des amendes peuvent être prononcées pour ces faits. De nombreux enfants sont enrôlés dans les pays limitrophes et sont sujets au travail forcé; nombre d'entre eux sont détenus avec leur famille pour migration irrégulière, a regretté Mme Ladjel.
Mme Fatoumata Abdourhamane Dicko, corapporteuse pour l'examen du Nigéria, a rappelé que le Nigéria faisait face à la fuite des cerveaux, constituant une diaspora bien éduquée à travers le monde. Les actes de violence de certains groupes poussent des centaines de milliers de Nigérians à des déplacements internes. La traite est un problème endémique au Nigéria, a-t-elle en outre dénoncé. De très nombreuses personnes sont victimes de traite à des fins d'exploitation sexuelle, a insisté la corapporteuse. La politique nationale de migration a été mise en place pour protéger les travailleurs migrants qui se rendent au Nigéria ou qui le quittent. Cette politique bénéficie du soutien de l'Union européenne, a-t-elle relevé. L'État partie n'a pas ratifié la Convention n°181 de l'OIT sur les agences d'emploi privées, a-t-elle déploré. De par son appartenance à la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), le Nigéria pratique la libre circulation des personnes avec ses voisins, ce qui rend plus difficile la lutte contre la traite, dont de nombreux enfants sont victimes, a-t-elle conclu.
Une experte, notant que le pays n'avait pas eu beaucoup de temps pour mettre en œuvre la Convention et qu'il faisait face à de grands défis, notamment sécuritaires, a souligné que le Comité devait être compréhensif face à l'absence de rapport. Dans ce contexte, le Comité devrait proposer ses services au Nigéria pour aider ce pays à se mettre en conformité avec la Convention.
Un expert a néanmoins affirmé que le Nigéria disposait des capacités et des ressources nécessaires pour présenter un rapport au Comité. À cet égard, certains pays qui font face à des conditions économiques, sociales et politiques encore plus difficiles ont bel et bien présenté un rapport au Comité. L'expert s'est également enquis de la situation des migrants en transit au le Nigéria, notamment ceux qui veulent rejoindre l'Union européenne.
Concluant la séance, Mme Ladjel a réaffirmé que le Comité et le Haut-Commissariat étaient disponibles pour apporter une aide technique aux pays qui n'ont pas les capacités adéquates pour rédiger un rapport. En conséquence de quoi la corapporteuse a affirmé que les raisons de l'absence du Nigéria étaient probablement à chercher ailleurs (que dans le manque de ressources).
Mme Dicko a, quant à elle, regretté l'absence de représentants de la société civile, et le manque criant d'informations dont disposaient les deux rapporteuses.
Le Comité se réunira à huis clos jusqu'à la clôture de sa session, prévue dans l'après-midi du jeudi 13 avril prochain.
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CMW17.005F