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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT SON DÉBAT ANNUEL SUR LES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES

Compte rendu de séance
La question des aménagements raisonnables est particulièrement débattue

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, son débat annuel sur les droits des personnes handicapées, dont le thème cette année porte sur l'article 5 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, qui traite de l'égalité et de la non-discrimination et stipule notamment qu'«afin de promouvoir l'égalité et d'éliminer la discrimination, les États Parties prennent toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que des aménagements raisonnables soient apportés».

Dans une déclaration liminaire, M. Adam Abdelmoula, Directeur de la Division des mécanismes des traités et du Conseil des droits de l'homme au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a souligné que l'égalité va de pair avec le principe de non-discrimination qui sous-tend tous les mécanismes des droits de l'homme. Alors que les normes sont très claires, dans les faits les personnes handicapées font l'objet de nombreuses discriminations, s'agissant notamment des placements forcés en institution ou encore de l'accès à l'emploi et aux prestations sociales. Les femmes et les jeunes filles handicapées sont particulièrement discriminées, a-t-il insisté. Le Programme de développement durable à l'horizon 2030 donne une nouvelle impulsion à la protection des personnes handicapées, a-t-il affirmé.

Retransmis en langue des signes, le débat était animé par le Vice-Président et Rapporteur du Conseil des droits de l'homme, M. Mouayed Saleh. Les experts invités comme panélistes étaient Mme Ana Sofia Antunes, Secrétaire d'État pour l'inclusion des personnes handicapées du Portugal; Mme Catalina Devandas Aguilar, Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées; M. Danlami Umaru Basharu, membre du Comité des droits des personnes handicapées; Mme Géronime Tokpo, experte-formatrice à l'«African Disability Forum»; et Mme Judith Heumann, experte sur les droits des personnes handicapées.

Mme Antunes a notamment fait valoir que le cadre juridique en place au Portugal, en vertu tant de la Constitution que de la législation, est orienté vers la protection des personnes handicapées. La loi garantit l'accès des personnes handicapées aux bâtiments publics, à l'administration, à l'éducation, et régit les relations entre les employeurs et les employés handicapés: les sanctions sont lourdes en cas de non-respect de ces principes, a-t-elle souligné.

Mme Devandas Aguilar a pour sa part rappelé que la Convention relative aux droits des personnes handicapées n'entend pas seulement combattre les inégalités, mais aussi adopter une démarche de diversité, tout en tenant compte de la sexospécifité. Elle demande aux États de prendre toutes les mesures positives pour assurer la jouissance de tous leurs droits aux personnes handicapées, y compris en appuyant la participation pleine et effective des personnes handicapées à la vie sociale et politique, a souligné la Rapporteuse spéciale.
M. Umaru Basharu, a souligné que, parmi les sujets de préoccupation du Comité des droits des personnes handicapées dont il est membre, figure l'application de la disposition relative aux aménagements raisonnable pour permettre à toute personne handicapée de participer à la vie publique ou politique.
Mme Tokpo a fait observer que l'égalité formelle ne suffit pas pour garantir aux personnes handicapées la jouissance de tous leurs droits; toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour compenser le handicap, a-t-elle souligné. Elle a ensuite souligné que l'Afrique avançait timidement sur la question des droits des personnes handicapées car beaucoup de choses doivent être corrigées pour garantir la jouissance de tous les droits de l'homme par toutes les personnes handicapées.

Mme Heumann a cité en exemple de bonne pratique en matière de non-discrimination à l'encontre des personnes handicapées, l'approche des États-Unis concernant les aménagements raisonnables et l'assistance technique.

Au cours du débat, les intervenants (*) qui se sont exprimés ont rappelé leur attachement au principe de non-discrimination à l'encontre des personnes handicapées. Plusieurs pays ont fait part des mesures spécifiques, en particulier des lois, qu'ils ont adoptées en faveur de ces personnes, en particulier en matière d'accessibilité et pour assurer leur autonomisation. Plusieurs pays ont expliqué que leurs tribunaux étaient habilités à sanctionner tout acte de discrimination à l'encontre des personnes handicapées. L'importance pour les personnes handicapées de disposer de voies de recours effectives a également été soulignées. Nombre de délégations ont salué la prise en compte des personnes handicapées dans les Objectifs de développement durable.


À la mi-journée, à compter de midi, le Conseil doit achever son débat interactif croisé, entamé hier après-midi, avec les Rapporteurs spéciaux sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et sur la torture. Il entamera ensuite son débat interactif croisé avec le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste et avec la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels.


Débat annuel sur les droits des personnes handicapées: application de l'article 5 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées
Déclarations liminaires

M. ADAM ADBDELMOULA, Directeur de la Division des mécanismes des traités et du Conseil des droits de l'homme au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a souligné que l'égalité allait de pair avec le principe de non-discrimination qui sous-tend les mécanismes des droits de l'homme. Alors que les normes sont très claires, dans les faits les personnes handicapées font l'objet de nombreuses discriminations: placements forcés en institution, obstacles à l'emploi et déni de prestations sociales, notamment. Les femmes et les jeunes filles handicapées sont particulièrement discriminées. Les lois sur la non-discrimination ne sont pas suffisantes pour assurer l'égalité dans les faits, a ajouté M. Abdelmoula. C'est pourquoi des mesures spécifiques temporaires ou permanentes, comme par exemple les quotas pour l'accès à l'emploi et les exemptions fiscales, sont nécessaires pour éliminer la discrimination structurelle et systémique. Il est également essentiel que toutes les parties prenantes aient conscience des obligations juridiques précises qui leur incombent quant au logement convenable pour les personnes handicapées, pierre angulaire du respect de leurs droits.

Plusieurs obligations en découlent pour les États. D'abord assurer la participation des personnes handicapées, y compris les enfants, dans les politiques dont ils bénéficient. La législation devrait comprendre des dispositions sur la discrimination à l'égard des personnes en situation de handicap, au premier rang desquelles le droit à un logement convenable. Des recours et des indemnisations doivent être ouverts aux personnes qui ont été discriminées. Des campagnes de sensibilisation devraient être menées pour lutter contre les stéréotypes de toutes formes, y compris ceux qui pèsent sur les personnes handicapées. Il faut de surcroît mettre en place des organes indépendants d'évaluation des droits des personnes handicapées. M. Abdelmoula s'est félicité de la large ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, mais a rappelé que l'objectif était sa ratification universelle.

Exposés des panélistes

MME ANA SOFIA ANTUNES, Secrétaire d'État à l'inclusion des personnes handicapées du Portugal, a affirmé que le cadre juridique en place au Portugal, en vertu tant de la Constitution que de la législation, est orienté vers la protection des personnes handicapées. La loi garantit l'accès des personnes handicapées aux bâtiments publics, à l'administration, à l'éducation, et régit les relations entre les employeurs et les employés handicapés: les sanctions sont lourdes en cas de non-respect de ces principes, a fait valoir Mme Antunes. Les organisations de personnes handicapées ont droit de défendre leurs intérêts devant les tribunaux. L'accès gratuit à l'éducation, des quotas dans les établissements d'enseignement supérieur, des programmes de soutien dans l'accès à l'emploi et des services de santé sont nécessaires. Mais d'autres mesures sont prévues, notamment l'octroi d'allocations pour les personnes handicapées cumulables avec un emploi rémunéré. Le Portugal s'est attelé à créer un système qui encourage l'autonomie et le libre-arbitre des personnes handicapées. Chaque personne handicapée devra avoir accès à un service d'aide à la personne, indépendamment de son handicap. Le service d'aide à la personne ne se limitera pas à l'aide à domicile, a précisé Mme Antunes.

MME CATALINA DEVANDAS AGUILAR, Rapporteuse spéciale sur les droits de l'homme des personnes handicapées, a rappelé que l'un des débats essentiels intervenus lors des négociations sur l'élaboration d'un instrument consacré aux personnes handicapées avait trait à la nature même de cet instrument et à la question de savoir s'il fallait une convention brève qui contiendrait seulement quelques clauses visant à protéger les droits des personnes handicapées ou au contraire un texte intégral qui développerait des droits substantiels. Il a été décidé de mettre au point un document exhaustif avec un objectif transformateur et une recherche d'égalité de fond, a-t-elle expliqué, ajoutant que telle était la posture majoritaire.

Ainsi, la Convention qui a été adoptée n'entend pas seulement combattre les inégalités, mais aussi adopter une démarche de diversité, tout en tenant compte de la sexospécifité. Elle demande aux États de prendre toutes les mesures positives pour assurer la jouissance de tous leurs droits aux personnes handicapées, y compris en appuyant la participation pleine et effective des personnes handicapées à la vie sociale et politique, a souligné la Rapporteuse spéciale. Il revient donc aux États de mettre en œuvre ces exigences, d'autant que cela est l'une des cibles du Programme de développement durable à l'horizon 2030 relativement à la réduction des inégalités. Les personnes handicapées représentent 15% de la population mondiale, a rappelé Mme Devandas Aguilar.

M. DANLAMI UMARU BASHARU, membre du Comité des droits des personnes handicapées, a rappelé que les principes d'égalité et de non-discrimination sont contenus dans tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, notamment dans les deux Pactes relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels. Les organes de traités ont également adopté des observations (générales) sur ces questions. La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en ce qui la concerne, définit et interdit dans ses articles 2, 3 et 5 la discrimination à l'égard des personnes handicapées et le Comité des droits des personnes handicapées veille scrupuleusement à la mise en œuvre de ces dispositions, a rappelé l'expert.

Parmi les sujets de préoccupation du Comité, a –t-il poursuivi, figure l'application de la disposition conventionnelle portant sur les aménagements raisonnables pour permettre à toute personne handicapée de participer à la vie publique ou politique. Le Comité des droits des personnes handicapées observe que nombre de pays ne définissent pas clairement, voire pas du tout, cette notion dans leurs législations, a souligné M. Basharu. D'autres pays n'interdisent pas non plus de manière explicite les discriminations à l'égard des personnes handicapées. Dans ce contexte, a indiqué l'expert, le Comité a émis un certain nombre de recommandations à ces pays les invitant à combler tous les vides juridiques subsistants. Le Comité a également émis, dans le cadre de l'élaboration d'observations générales, un certain nombre de commentaires généraux pour aider et guider les États dans la mise en œuvre de la Convention. Mais plus important encore, le Comité estime que la lutte contre les discriminations visant les personnes handicapées ou la mise en œuvre des aménagements raisonnables ne peut pas se faire sans la pleine participation des personnes handicapées elles-mêmes.

MME GERONIME TOKPO, experte-formatrice à African Disablity Forum, a fait observer que l'égalité formelle ne suffit pas pour garantir aux personnes handicapées la jouissance de tous leurs droits. Toutes les mesures nécessaires doivent être prises pour compenser le handicap, a-t-elle souligné. Elle a rappelé qu'en Afrique, l'Organisation de l'unité africaine avait adopté en 1981 la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, laquelle consacre l'égalité de tous devant la loi et la non-discrimination dans la jouissance des droits qu'elle proclame. Toutefois, a ajouté Mme Tokpo, il existe des textes de loi comportant des dispositions discriminatoires à l'égard des personnes handicapées et certaines constitutions, par exemple, interdisent explicitement à une personne handicapée d'être candidate à la présidence de la République. Mme Tokpo a fait observer que l'une des caractéristiques des pays africains reste qu'ils forment les personnes handicapées dans des institutions spécialisées. Ce système n'intègre pas tous les types de handicap, a-t-elle souligné. Mme Tokpo s'est ensuite réjouie que plusieurs pays africains aient défini des politiques spécifiques favorables au recrutement des personnes handicapées. Dans d'autres, en revanche, aucune politique spécifique de recrutement des personnes handicapées n'a été mise en place, a-t-elle déploré; les cas de discrimination sont alors légion. De plus en plus, la question de l'accessibilité aux infrastructures commence à retenir l'attention des dirigeants africains, a toutefois relevé Mme Tokpo. Malheureusement, l'accessibilité des technologies de l'information et des communications (TIC) et l'accessibilité des transports ne constituent pas une priorité en Afrique, a-t-elle regretté.

Des pays africains travaillent à adapter leur système électoral aux besoins spécifiques des personnes handicapées dans les domaines physiques ou communicationnel, a poursuivi Mme Tokpo. Cependant, il reste encore beaucoup de barrières à la participation politique des personnes handicapées, a-t-elle affirmé. La situation des femmes handicapées est loin d'être reluisante, a en outre souligné l'experte: elles subissent en effet une double discrimination, liée au sexe et au handicap. Elles sont moins scolarisées et n'ont pas un accès facile aux métiers dits de subsistance comme les autres femmes. Pour conclure, Mme Tokpo a souligné que l'Afrique avance timidement sur la question des droits des personnes handicapées car beaucoup de choses doivent être corrigées pour garantir la jouissance de tous les droits de l'homme par toutes les personnes handicapées.

MME JUDITH HEUMANN, experte sur les droits des personnes handicapées, a présenté en exemple de bonne pratique ce qui se fait aux États-Unis en matière de non-discrimination. La loi américaine sur les droits civils se fonde sur une théorie juridique très claire, à savoir que la non-discrimination, pour ce qui est des personnes handicapées, c'est non seulement le traitement égal, mais aussi des aménagements raisonnables, a expliqué Mme Heumann. D'après cette loi, les employeurs sont censés prévoir des aménagements raisonnables pour que leurs employés handicapés puissent travailler sur le lieu de travail, a-t-elle précisé. La loi prévoit des procédures de mise en œuvre précise. L'assistance technique est importante car les détenteurs de droits doivent connaître leurs droits, a d'autre part souligné l'experte. Aux États-Unis, l'assistance technique, précisément, est fournie par différents acteurs et est accessible par différents moyens (réseau pour l'emploi, centres d'assistance et lignes téléphoniques gratuites, entre autres).

L'aménagement raisonnable est un concept assez neuf dans de nombreux pays, a poursuivi Mme Heumann. D'après la loi des États-Unis, si une entité estime que le coût des aménagements raisonnables constitue une charge trop lourde, ce coût sera comparé au coût de fonctionnement de l'ensemble de l'entité; ainsi, des grandes entités ne peuvent pas prétendre que le coût de certains aménagements est prohibitif pour elles et inversement, les petites entités ne doivent pas être mises à mal par le système des aménagements raisonnables en étant soumises à des coûts trop élevés. Lever les barrières n'est pas facile; il faut la volonté des États et de la société civile, a expliqué Mme Heumann. Il faut aussi responsabiliser les personnes handicapées, a-t-elle ajouté. Il faut savoir comment mettre en place et développer des lois fortes et tout le monde doit jouer le rôle qui lui incombe, a conclu Mme Heumann.

Débat

El Salvador a indiqué que les pays membres de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), au nom de laquelle il s'exprimait, se sont engagés à appliquer le Programme de développement durable à l'horizon 2030 par le biais de politiques publiques garantissant notamment la protection des enfants contre toute forme de discrimination, y compris au motif du handicap. L'Iraq, intervenant au nom du Groupe arabe, a déclaré que la loi basée sur les valeurs culturelles et morales garantissait aux personnes handicapées une vie digne. Les pays membres du groupe arabe appliqueront le Programme de développement durable à l'horizon 2030, y compris ses dispositions relatives aux personnes handicapées. L'Éthiopie a, à l'instar du Mexique, indiqué que le Programme 2030 était une bonne occasion de promouvoir les droits des personnes handicapées et la non-discrimination.

La Colombie, s'exprimant au nom d'un groupe de pays, a fait valoir ses efforts pour accorder des indemnisations aux personnes handicapées victimes de mines terrestres. Elle a mis en avant l'interdépendance entre la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel (Convention d'Ottawa) et la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

La Tunisie, au nom du Groupe africain, a souligné que les problèmes rencontrés par les personnes handicapées sont exacerbés par la pauvreté, le sous-développement et la discrimination. L'émancipation économique est la seule solution viable pour assurer le respect des droits des personnes handicapées. Le groupe africain ainsi que le Pakistan, qui s'exprimait au nom de l'Organisation de la coopération islamique, ont estimé que l'aide internationale financière et technique était nécessaire pour faire respecter les droit des personnes handicapées dans les pays en développement.

La Nouvelle-Zélande, s'exprimant au nom d'un groupe de pays, a recommandé de réviser la notion d'aménagement raisonnable, dont elle a jugé l'interprétation trop étroite: il est important de tenir compte de ce que les personnes handicapées sont effectivement capables ou incapables de faire.

L'Union européenne garantit les personnes handicapées contre la discrimination sur le marché de l'emploi et exige des États membres qu'ils interdisent la discrimination et le harcèlement. Le Mexique a fait valoir que sa loi et sa Constitution prohibaient et réprimaient la discrimination à l'égard des personnes handicapées. Le Portugal, intervenant au nom des pays lusophones, a voulu connaître les bonnes pratiques dans le domaine de la lutte contre la discrimination des personnes handicapées dans l'éducation et dans la santé.

Les Philippines, au nom de l'Association des nations de l'Asie du Sud-est (ASEAN), a indiqué que la Convention avait été ratifiée par tous les membres de l'ASEAN. La période 2011-2020 a été décrétée «décennie des personnes handicapées» au sein de l'ASEAN. L'Équateur a mis en avant ses succès en matière d'inclusion des personnes handicapées grâce à des mesures telles qu'assurances médicales spécialisées, allocations et aides économiques pour accompagnants. L'Équateur a encouragé tous les États à ratifier la Convention.

La Géorgie, la Bolivie, et le Pakistan se sont réjouis que la communauté internationale puisse lutter dans son ensemble contre les discriminations à l'encontre des personnes handicapées par le biais des Objectifs de développement durable.

Plusieurs délégations – notamment celles du Qatar, d'El Salvador, de la Grèce, du Chili, du Pakistan, des Émirats arabes unis et de la Mongolie – ont indiqué avoir adopté des lois spécifiques pour lutter contre les discriminations à l'encontre des personnes handicapées. En ce qui la concerne, l'Arabie saoudite a souligné qu'un décret royal prévoyait d'accorder des soins spécifiques aux personnes handicapées et l'accessibilité des bâtiments publics.

La Géorgie a fait observer que sa Cour pénale criminalisait toutes formes de discrimination à l'égard des personnes handicapées. Le Pakistan a, lui, expliqué que la Cour suprême de Lahore avait condamné la disposition discriminatoire à l'encontre des personnes handicapées figurant dans les règles applicables à la fonction publique et avait autorisé toutes les personnes handicapées à travailler dans tous les services.

Les Émirats arabes unis ont affirmé que sur la question de la non-discrimination, il ne fallait pas se contenter d'une approche de charité et de soins mais aussi œuvrer à une responsabilisation des personnes handicapées.

Le Portugal, tout comme la Grèce, ont affirmé qu'ils avaient pris différentes mesures pour proposer un service très vaste de soutien aux personnes handicapées et permettre leur autonomisation, notamment en offrant des logements adaptés.

L'Estonie a déclaré avoir comme objectif prioritaire de proposer des écoles totalement inclusives.

La Mongolie a regretté que 80% des personnes handicapées du pays soient économiquement inactives. Elle a précisé que c'est pour cette raison que les autorités avaient prévu des mesures de discriminations positives afin de favoriser l'embauche des personnes handicapées, avec notamment des mesures d'allègement fiscal pour les personnes qui emploient des personnes handicapées.

En tant qu'institution nationale des droits de l'homme, la Commission australienne des droits de l'homme a déclaré que l'Australie ne faisait pas beaucoup pour protéger les droits des personnes handicapées, en particulier en milieu carcéral. La Commission a observé que la moitié des détenus dans le pays sont atteints de déficiences mentales. Elle a par ailleurs attiré l'attention sur la surreprésentation des personnes handicapées d'origine aborigène dans les prisons. L'Equality Human Rights Commission du Royaume-Uni a rappelé que c'est aux autorités publiques qu'il incombe de corriger les inégalités socioéconomiques résultant de la discrimination, avant de souligner que la représentation politique des personnes handicapées est faible.

Le Centre indépendant de recherches et d'initiative pour le dialogue (CIRID) a attiré l'attention sur la problématique des zones de conflit, alertant notamment le Conseil sur le bilan des victimes de mines enfouies, qui s'est élevé à plus de 400 morts et blessés entre mars 2015 et mars 2016. Association Miraisme International a observé que sur les 17 objectifs du Programme de développement durable à l'horizon 2030, quatre sont directement liés aux personnes handicapées.

Verein Südwind Entwicklungspolitik a fait observer que la loi électorale du Parlement iranien prévoit expressément que les candidats aux élections doivent voir, entendre et parler. La loi iranienne prévoit en outre des limites voire des interdictions en matière d'accès à l'éducation et à l'enseignement supérieur, notamment pour les personnes atteintes de malformation.

China NGO Network for International Exchanges a affirmé que la Chine devait déployer davantage d'efforts pour les personnes handicapées, qui représentent plus de 80 millions de personnes dans ce pays. L'ONG a salué le travail de nombreuses ONG dans la promotion des droits des personnes handicapées.

Réponses et conclusions des panélistes

MME ANTUNES a assuré que l'expérience portugaise pouvait servir de modèle à d'autres pays. De son point de vue, il n'est en réalité pas difficile de scolariser des enfants handicapés dans les écoles ordinaires; la véritable difficulté est de leur assurer un environnement propice à l'éducation, a-t-elle souligné.

Mme Antunes a assuré que le Portugal était engagé à lutter contre la discrimination à l'encontre des personnes handicapées et à promouvoir l'autonomie de ces personnes. Les Objectifs de développement durable constituent également une priorité pour le pays, a-t-elle souligné.

MME DEVANDAS AGUILAR a estimé essentiel de comprendre la notion d'aménagement raisonnable afin de parvenir à l'objectif d'égalité complète. Si on dit vouloir que les personnes handicapées aient accès à l' éducation, mais que les systèmes éducatifs restent discriminatoires, on ne parviendra pas à cet objectif, a-t-elle expliqué. Il en va de même pour la participation politique des personnes handicapées, notamment pour ce qui est de l'exercice de leur droit de vote. La Convention relative aux droits des personnes handicapées doit être pleinement mise en œuvre, a souligné la Rapporteuse spéciale.

Mme Devandas Aguilar a indiqué travailler à un rapport sur la capacité juridique des personnes handicapées, afin de passer d'un modèle de substitution à la personne handicapée à un modèle d'aide à la prise de décision de la personne handicapée.

M. BASHURU a pour sa part estimé qu'en réalité, les États croient en la nécessité de défendre les droits des personnes handicapées; la limite de leur engagement reste le passage aux actes concrets. Le Comité sur les droits des personnes handicapées est d'avis qu'il faut passer de la théorie à la pratique, par le biais des aménagements raisonnables, a expliqué l'expert membre du Comité.

M. Basharu a rappelé l'importance des Objectifs de développement durable, ainsi que celle de la coopération internationale pour ce qui est de fournir une assistance technique et financière aux pays qui en ont besoin.

MME TOKPO a estimé que ce sont les barrières qui créent le handicap et qu'en fait, il faut briser ces barrières pour parvenir à l'égalité recherchée.

Mme Tokpo a souligné l'interdépendance entre la Convention relative aux droits des personnes handicapées et les Objectifs de développement durable. Les États doivent prévoir des sanctions pour s'assurer que le secteur privé applique les recommandations prévues en faveur des personnes handicapées. En outre, les personnes handicapées doivent disposer de voies recours pour faire valoir leurs droits.

MME HEUMANN a fait observer que les investissements en faveur des personnes handicapées sont très importants aux États-Unis. Une loi spécifique, connue sous l'acronyme ADA, leur est consacrée et les agences gouvernementales ont le devoir de veiller à son application, y compris en s'attaquant aux entités privées qui ne la respecteraient pas. Le Ministère du travail a également mis en place un réseau d'aménagements raisonnables, a ajouté Mme Heumann, précisant que durant le mandat du Président Obama, plus de 100 000 personnes handicapées ont été recrutées dans des emplois publics.

Mme Heumann a elle aussi insisté sur la nécessité de s'assurer que les personnes handicapées disposent de voies de recours juridictionnelles.

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*Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat: El Salvador (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes - CELAC), Iraq (au nom du Groupe arabe), Éthiopie, Mexique, Colombie (au nom d'un groupe de pays), Tunisie (au nom du Groupe africain), Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique), Nouvelle-Zélande, Union européenne, Mexique, Portugal (au nom des pays lusophones), Philippines (au nom de l'Association des nations de l'Asie du Sud-est - ASEAN), Équateur, Géorgie, Bolivie, Pakistan, Qatar, El Salvador, Grèce, Chili, Pakistan, Émirats arabes unis, Mongolie, Arabie saoudite, Portugal, Estonie, Mongolie.

**Les organisations non gouvernementales ont pris la parole dans le cadre du débat : Commission australienne des droits de l'homme; Equality Human Rights Commission; Centre indépendant de recherches et d'initiative pour le dialogue (CIRID); Association Miraisme International; Verein Südwind Entwicklungspolitik; China NGO Network for International Exchanges.


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HRC17/015F