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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME OUVRE LES TRAVAUX DE SA TRENTE-QUATRIÈME SESSION EN PRÉSENCE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES NATIONS UNIES

Compte rendu de séance
Grâce à ses commissions d'enquête, le Conseil peut jouer un rôle crucial de prévention en détectant les signes avant-coureurs des crises, souligne M. Guterres

Le Conseil des droits de l'homme a ouvert ce matin les travaux de sa trente-quatrième session, qui se tient au Palais des Nations à Genève jusqu'au 24 mars prochain, en entendant des déclarations du nouveau Secrétaire général des Nations Unies, M. António Guterres; du Président de la 71e session de l'Assemblée générale, M. Peter Thomson; du Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein; et de M. Didier Burkhalter, Chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse. M. Joaquín Alexander Maza Martelli, Président du Conseil des droits de l'homme, est également intervenu, soulignant notamment que durant cette session, le Conseil aurait l'honneur d'accueillir et d'entendre pas moins de 107 hauts dignitaires: «cela témoigne de l'importance attribuée au mandat du Conseil et à l'agenda des droits de l'homme», a-t-il indiqué.

Dans son allocution, M. Guterres a souligné que le Conseil allait devoir contribuer à éradiquer «la maladie du mépris des droits de l'homme», estimant qu'il pouvait jouer à cet égard un rôle crucial de prévention en détectant les signes avant-coureurs de possibles crises et en faisant la lumière sur des allégations de violations graves des droits de l'homme grâce à ses commissions d'enquête et commissions d'établissement des faits. M. Guterres a dit compter sur le Conseil pour s'engager sans réserve pour remédier aux violations systématiques du droit international humanitaire constatées dans un nombre croissant de conflits. Le Secrétaire général a déploré en outre «le phénomène pervers du populisme et l'extrémisme, qui se nourrissent l'un l'autre sur fond de déferlante raciste, xénophobe, antisémite et islamophobe, entre autres formes d'intolérance.»

Le Président de la 71ème session de l'Assemblée générale a pour sa part souligné qu'en cette période de crise humanitaire et de réfugiés – la plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale – il fallait chercher des moyens de garantir la sécurité des millions de personnes victimes des conflits, de la violence, de l'intolérance et de la persécution. La solution, pour M. Thomson, est de créer un environnement propice à une paix durable, au développement durable et à la protection des droits de l'homme. Le Conseil doit jouer un rôle central à cet égard en instituant des normes et en veillant à leur application, en donnant l'alarme face aux crimes de masse et en aidant les pays à appliquer les recommandations de l'Examen public universel.

Les auteurs de la Charte des Nations Unies ont délibérément inscrit les droits de l'homme dans son Préambule, montrant clairement que les droits de l'homme seraient au cœur même de l'ordre international, a quant à lui rappelé M. Zeid. Face aux politiciens qui, comme au temps de la Société des Nations, menacent le système multilatéral, il faut rappeler les leçons de l'Histoire, a plaidé le Haut-Commissaire. Il est utile de rappeler ce que notre monde a accompli depuis sept décennies, notamment l'adoption de nombreux conventions et pactes internationaux pour protéger les droits politiques, civils, économiques, sociaux et culturels, et pour interdire la torture, la disparition forcée, la discrimination raciale et la discrimination contre les femmes, les migrants, les enfants ou les personnes handicapées.

M. Burkhalter a souligné que, dans un monde plus dur et imprévisible, «il faut davantage de libertés et de droits pour avoir plus de paix et de développement». La première priorité doit aller à la prévention des conflits, a recommandé M. Burkhalter, la deuxième au renforcement des capacités collectives en matière de dialogue et d'action en faveur des droits de l'homme. M. Burkhalter a proposé à ce propos que chacun se mobilise pour que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme dispose des moyens de mener à bien ses activités. La troisième priorité est de travailler ensemble à la mise en œuvre des droits de l'homme et aussi à la lutte contre l'impunité des auteurs des violations.


À l'issue de cette séance d'ouverture, le Conseil des droits de l'homme a entamé son débat de haut niveau, au cours duquel il doit entendre les hauts dignitaires de plus d'une centaine de pays, dont plusieurs ministres.


Déclarations d'ouverture

M. JOAQUÍN ALEXANDER MAZA MARTELLI, Président du Conseil des droits de l'homme, a remercié les pays qui l'ont désigné à cette fonction. «C'est un grand honneur et une fierté pour moi et pour mon pays, El Salvador», a déclaré le nouveau Président, assurant de sa détermination à promouvoir et défendre tous les droits de l'homme pour tous. Le Président a indiqué que le Conseil aurait l'honneur d'accueillir et d'entendre, pendant cette session, pas moins de 107 hauts dignitaires: «cela témoigne de l'importance attribuée au mandat du Conseil et à l'agenda des droits de l'homme», a estimé M. Maza Martelli.

M. Maza Martelli a également souhaité la bienvenue à onze délégations de pays les moins avancés présentes à cette session du Conseil. Quatre de ces délégations ne disposent pas de représentation à Genève: leur présence est rendue possible par le Fonds d'affectation spéciale pour l'assistance technique à l'appui de la participation des pays les moins avancés et des petits États insulaires en développement aux travaux du Conseil des droits de l'homme, a fait savoir M. Maza Martelli.

M. PETER THOMSON, Président de la 71e session de l'Assemblée générale, a observé que la plupart des conflits s'accompagnant de violations des droits de l'homme, la prévention des conflits ne pouvait avoir qu'une incidence forte sur l'exercice de ces droits. Le Président a souligné qu'en cette période de crise humanitaire et de réfugiés la plus grave depuis la deuxième guerre mondiale, il fallait chercher des moyens de garantir la sécurité des millions de personnes victimes des conflits, de la violence, de l'intolérance et de la persécution. La solution, pour M. Thomson, est de créer un environnement propice à une paix durable, à la mise en œuvre du développement durable et à la protection des droits de l'homme. Le Conseil doit jouer un rôle central à cet égard en instituant des normes et en veillant à leur application, en donnant l'alarme face aux crimes de masse et en aidant les pays à mettre en œuvre les recommandations issues de l'Examen public universel.

«Il faut réfléchir à la manière d'aboutir à un monde meilleur», a poursuivi M. Thomson. Tous les organes des Nations Unies doivent y veiller et il faut accompagner les efforts visant à coordonner leurs efforts. M. Thomson a rappelé que le thème central de la 71e session de l'Assemblée générale avait été l'application des Objectifs du développement durable, au sein desquels les droits de l'homme occupent une place incontournable.

«Le mépris des droits de l'homme est une maladie», a déclaré d'emblée le nouveau Secrétaire général des Nations Unies, M. ANTÓNIO GUTERRES, «une maladie que le Conseil des droits de l'homme doit contribuer à éradiquer.» Le Conseil peut «jouer un rôle crucial de prévention en détectant les signes avant-coureurs de possibles crises» et «faire la lumière sur des allégations de violations graves des droits de l'homme» grâce à ses commissions d'enquête, a souligné également le Secrétaire général.

M. Guterres s'est félicité de la coopération du Conseil avec la société civile, une coopération «particulièrement cruciale à l'heure où le champ d'action de la société civile se restreint un peu partout». Par ailleurs, l'examen périodique universel a permis de faire un bilan approfondi de la situation des droits de l'homme dans tous les pays du monde, s'est aussi félicité le Secrétaire général. Il a relevé que si ses membres ont leurs divergences, «ce Conseil est bâti sur une vision commune: défendre les droits de toutes les personnes et dans l'intérêt de tous les États. Ce principe fait partie intégrante de tous les aspects des travaux de l'Organisation des Nations Unies. Nos trois piliers, à savoir la paix, le développement et les droits de l'homme, sont indissociables et se renforcent mutuellement.» Les droits de l'homme – civils, politiques, économiques, sociaux et culturels – ne doivent jamais être considérés comme un privilège ou «remis à plus tard», a insisté le Secrétaire général, une fois que les objectifs de paix et de développement auront été atteints.

M. Guterres a indiqué n'avoir connu la démocratie qu'à l'âge de 24 ans, ayant grandi au Portugal sous la dictature. Il a constaté, pendant cette époque, comment ses compatriotes avaient été jetés dans la pauvreté et l'émigration de masse par la privation des droits.

«Notre monde est de plus en plus dangereux, de moins en moins prévisible et de plus en plus chaotique», a mis en garde le Secrétaire général, relevant que des conflits toujours plus nombreux sont étroitement liés à la menace que constituent le terrorisme mondial et l'extrémisme violent. Les nouvelles violations des droits de l'homme sont non seulement les signes avant-coureurs mais aussi l'un des principaux indicateurs des crises, a constaté M. Guterres, pour qui «les atteintes aux droits fondamentaux font le jeu des extrémistes».

Dans le même temps, les violations des droits économiques – telles que les gigantesques inégalités observées dans les pays comme entre les États – créent de plus en plus de troubles sociaux. «Si nous voulons vraiment nous attaquer à ces problèmes», a dit le Secrétaire général, «nous devons faire de la prévention notre priorité, éradiquer les causes profondes des conflits et de réagir plus rapidement et plus efficacement lorsque les droits de l'homme sont battus en brèche. Tel est l'enseignement de nombreux conflits et l'idée qui sous-tend l'initiative Les droits humains avant tout

M. Guterres a dit compter sur le Conseil des droits de l'homme pour s'engager sans réserve et contribuer à faire advenir le changement dans ses grands domaines d'action pour remédier aux maux qui agitent le monde, notamment les violations délibérées et systématiques du droit international humanitaire constatées dans un nombre croissant de conflits – violations sur lesquelles le Conseil a beaucoup contribué à faire la lumière. «On voit prospérer», a regretté le Secrétaire général, «le phénomène pervers du populisme et l'extrémisme, qui se nourrissent l'un l'autre sur fond de déferlante raciste, xénophobe, antisémite et islamophobe, entre autres formes d'intolérance.» M. Guterres a aussi demandé à la communauté internationale de faire tout son possible pour rétablir le régime international de protection des réfugiés dans son intégrité.

Le Secrétaire général a conclu son intervention en saluant le courage des défenseurs des droits de l'homme et en les assurant du soutien de l'Organisation des Nations Unies, et en rappelant que les journalistes – contrepouvoirs indispensables à toute société – doivent eux aussi être pleinement protégés «de manière à pouvoir faire leur travail en toute indépendance et sans ingérence».

M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a rappelé le contexte historique dans lequel était née l'Organisation des Nations Unies, notamment les échecs répétés de la Société des Nations, formellement dissoute le 8 avril 1946. En réaction, les auteurs de la Charte des Nations Unies ont décidé d'inscrire les droits de l'homme dans son Préambule – notamment le principe de non-discrimination, ignoré par la SDN dans son traitement de la colonisation –: il était devenu clair dès lors que les droits de l'homme seraient au cœur même de l'ordre international.

Les délégations avaient donc compris qu'en acceptant les droits fondamentaux de l'homme, tous les autres droits devenaient possibles. Ce fait doit être rappelé non seulement aux acteurs politiques contemporains qui ne voient dans les droits de l'homme que des contraintes, mais aussi à toutes celles et ceux qui jouissent depuis leur naissance de ces droits et ne savent pas ce qu'ils représentent, a insisté le Haut-Commissaire.

Aux dirigeants politiques qui mènent campagne contre les droits de l'homme universels, menacent de se retirer ou se retirent des traités internationaux ou régionaux et des institutions qui les promeuvent, il est utile de rappeler ce que notre monde a accompli depuis sept décennies, a déclaré le Haut-Commissaire, citant notamment l'adoption des conventions et pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ces instruments ont été adoptées pour protéger une large série de droits politiques, civils, économiques, sociaux et culturels, et pour interdire la torture, la disparition forcée, la discrimination raciale et la discrimination contre les femmes, les migrants, les enfants ou les personnes handicapées, a souligné le Haut-Commissaire.

Sans un engagement pour ces droits fondamentaux, pour la dignité de la personne et pour l'égalité des droits entre les hommes et les femmes, le monde risque de plonger «dans le chaos, la misère et la guerre», a prévenu le Haut-Commissaire. De son point de vue, les marches de femmes du 21 janvier dernier ne visaient aucune personnalité ou gouvernement en particulier, mais étaient en faveur des droits de tous et des femmes.

Aux politiciens qui, comme au temps de la Société des Nations, menacent le système multilatéral, il faut rappeler les leçons de l'Histoire. Les droits de tout un chacune et l'avenir de la planète ne doivent pas être compromis par de «téméraires profiteurs politiques», a conclu M. Zeid.

Dans son message de bienvenue, M. DIDIER BURKHALTER, Chef du Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, a souligné que le monde était devenu plus dur et plus imprévisible. Des zones de conflits se transforment en espace sans droit. En Syrie, au Yémen, au Soudan du Sud ou ailleurs, la population souffre énormément. Même les organisations humanitaires sont dans la ligne de mire. Des hommes, femmes et enfants ont dû fuir par millions et se jeter sur les dangereuses routes de la migration. Les droits s'effacent devant la violence, a souligné M. Burkhalter. Une violence relayée par les groupes terroristes qui foulent au pied les valeurs de l'humanité.

Face à cette menace, de nombreux États répondent par d'autres violences, a regretté M. Burkhalter. Exprimer son opinion devient un danger. S'engager pour les droits de l'homme se fait au risque de sa vie. On entend moins les cris de liberté que de repli sur soi. Pourtant, il faut davantage de libertés et de droits pour avoir plus de paix et de développement. Les droits de l'homme sont une réponse forte pour la paix et la sécurité de tous. Il faut se parler, s'écouter et agir ensemble, a plaidé le ministre.

La première priorité est la prévention des conflits, a poursuivi M. Burkhalter. Dans ce domaine, la Suisse veut mettre la médiation au cœur de son action. La deuxième priorité est de renforcer les capacités collectives en matière de dialogue et d'action en faveur des droits de l'homme. M. Burkhalter a proposé que chacun se mobilise pour que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme dispose des moyens de mener à bien ses activités. Il faut également garantir un Conseil des droits de l'homme efficace, où les discussions sont transparentes et permettent à tous d'interagir librement.

Renforcer les réponses collectives, c'est aussi s'engager ensemble pour affronter les défis de notre temps, a expliqué M. Burkhalter, à l'exemple de l'engagement d'adopter un «Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières» en 2018. L'élaboration du pacte est une chance de travailler ensemble sur les causes profondes de la migration, de tenir compte de la vulnérabilité des migrants et de faire en sorte que les droits de l'homme soient une solution aux problèmes. La Suisse est prête à s'engager fortement dans ce pacte mondial et à mettre l'expertise et la plateforme de Genève à disposition de tous, a expliqué le Chef du département fédéral des affaires étrangères.

La troisième priorité pour la Suisse est de travailler ensemble à la mise en œuvre des droits de l'homme et à la lutte contre l'impunité des auteurs des violations. La Suisse va ainsi soutenir le nouveau mécanisme international établi à Genève et chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Syrie depuis mars 2011, a conclu M. Burkhalter.


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