Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DÉBAT DE L'INTÉGRATION DES DROITS DE L'HOMME DANS LA CONSOLIDATION DE LA PAIX
Le Conseil des droits de l'homme a tenu cet après-midi sa réunion annuelle de haut niveau sur l'intégration des droits de l'homme, axée cette année sur la contribution des droits de l'homme à la consolidation de la paix par le renforcement du dialogue et de la coopération internationale pour la promotion des droits de l'homme.
Animée par Mme Kate Gilmore, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, cette réunion a bénéficié de la participation du Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein et du Président de la 71ème session de l'Assemblée générale, M. Peter Thomson, ainsi que des panélistes suivants: Mme Helen Clark, Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD); M. Oscar Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général des Nations Unies à l'appui à la consolidation de la paix; Mme Yvette Stevens, Représentante permanente de la Sierra Leone auprès des Nations Unies à Genève; et M. Jean Ziegler, membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme.
Le Haut-Commissaire aux droits de l'homme a jugé crucial que les opérations de consolidation de la paix des Nations Unies intègrent une forte composante de droits de l'homme, la privation des droits de l'homme étant une des causes premières de presque tous les conflits.
Le Président de la 71ème session de l'Assemblée générale a pour sa part rappelé que l'article premier de la Charte des Nations Unies consacrait l'ambition de la prévention des conflits. Le fait que 95% des réfugiés et des personnes déplacées internes aient été affectés par les dix mêmes conflits depuis 1990 marque l'échec de l'approche traditionnelle des Nations Unies quant à la paix, la sécurité et la gestion de la transition post-conflit, a-t-il souligné, avant d'insister, comme l'a souligné le Secrétaire général dans son plan de réforme des Nations Unies, sur la nécessité d'attirer l'attention sur les risques imminents à la paix engendrés par les violations des droits de l'homme; de renforcer le respect des droits de l'homme au sein des États; de garantir la fin de l'impunité pour les violations des droits de l'homme; de vérifier la mise en œuvre des recommandations, notamment celles issues de l'Examen périodique universel; et de veiller à l'avènement d'une culture des droits de l'homme au sein des Nations Unies.
Mme Clark a rappelé l'adoption par le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale de deux résolutions demandant aux Nations Unies de réexaminer leur manière d'anticiper et de réagir aux conflits et d'œuvrer à la «paix durable» dans les trois piliers des Nations Unies. Elle a souligné que ce n'était pas un hasard si les pays qui font face à des conflits internes meurtriers affichaient un taux élevé de pauvreté et d'inégalité. Le PNUD, qui se concentre sur la réduction de la pauvreté, le développement durable et l'état de droit, est bien placé pour contribuer aux efforts à long terme pour construire et soutenir la paix.
M. Fernandez-Taranco a lui aussi souligné que les résolutions sur la paix durable adoptées en avril 2016 par le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale, constituent un cadre révolutionnaire global pour le rôle des Nations Unies dans la prévention des conflits. Il a en outre plaidé pour que le système des Nations Unies utilise davantage les recherches analytiques du Conseil des droits de l'homme et de ses mécanismes en matière de consolidation de la paix et pour que la Commission de consolidation de la paix serve de plateforme de dialogue pour relier les droits de l'homme à la consolidation de la paix.
Mme Stevens a quant à elle souligné qu'une section «droits de l'homme» avait été intégrée au Bureau intégré de consolidation de la paix des Nations Unies en Sierra Leone, ce qui constituait une première à l'époque. Cette approche globalisante, qui prend en compte les questions politiques, la défense des droits de l'homme, l'humanitaire et le développement a fait de ce Bureau un mandat unique.
M. Ziegler a pour sa part déclaré que la misère est une «agression permanente et effroyable contre une fraction importante de l'humanité», dans un ordre économique absurde et meurtrier, rappelant que plus de 850 millions de personnes sont victimes de la faim et de la malnutrition avec, toutes les cinq secondes, un enfant de moins de dix ans qui en meurt, alors que la planète pourrait nourrir normalement 12 milliards d'êtres humains.
Au cours du dialogue qui s'est noué entre les États et les panélistes, l'interdépendance entre le respect des droits de l'homme et la consolidation d'une paix durable a été reconnue par tous. A cet égard, plusieurs intervenants ont souligné l'importance du Programme de développement durable à l'horizon 2030 et des Objectifs y associés dans la prévention des conflits. L'accent a en outre été mis sur le rôle des femmes dans le développement durable et la consolidation d'une paix durable.
Les représentants* de plusieurs pays, institutions nationales des droits de l'homme et organisations non gouvernementales ont pris part au débat.
Le Conseil des droits de l'homme poursuivra son débat de haut niveau demain matin, à 9 heures.
Réunion-débat sur l'intégration des droits de l'homme
Déclarations liminaires
M. ZEID RA'AD AL-HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a jugé crucial que les opérations de consolidation de la paix des Nations Unies intègrent une forte composante de droits de l'homme, la privation des droits de l'homme étant une des causes premières de presque tous les conflits. La notion de droits de l'homme ne permet pas seulement de formuler des griefs: elle sous-tend simultanément la réponse apportée à ces griefs, ce qui favorise la pérennité des mesures de rétablissement de la paix et de la sécurité.
Dans les situations d'après-conflit, les institutions nationales doivent être rebâties, notamment la justice, la police, la sécurité et les services sociaux de base. Des structures efficaces doivent être mises en place pour résoudre les différends et répondre aux besoins des communautés traditionnellement ignorées – les femmes en particulier doivent être pleinement intégrées aux processus post-conflit, a souligné le Haut-Commissaire. Le Haut-Commissariat, qui a une longue expérience de terrain dans les pays sortant de conflit, connaît l'importance de la réconciliation et de la reddition des comptes dès lors que des crimes ont été commis – l'impunité des responsables des violations des droits de l'homme perpétuant le cycle de la violence.
Malheureusement, les institutions chargées respectivement des droits de l'homme et de la consolidation de la paix ne partagent pas suffisamment leurs compétences, leurs informations ni leurs points de vue, a regretté le Haut-Commissaire. Il reste par ailleurs une grande méfiance vis-à-vis de l'agenda des droits de l'homme, parfois accusé d'empiéter sur la recherche de solutions pragmatiques. Quant aux plans de justice transitionnelle, ils sont trop souvent axés sur un seul aspect: la réforme du secteur de la sécurité, ou la démobilisation, ou la réintégration des anciens combattants.
M. Zeid a recommandé aux responsables des missions des Nations Unies de coordonner leurs actions avec les recommandations des titulaires de mandat, des commissions d'enquête et missions d'établissement des faits, et des organes de traités.
Le Haut-Commissaire a plaidé enfin pour une meilleure coordination entre le Conseil des droits de l'homme, le Conseil de sécurité et la Commission de la consolidation de la paix, en tant que condition d'une prévention efficace des violations des droits de l'homme.
M. PETER THOMSON, Président de la soixante-et-onzième session de l'Assemblée générale, a rappelé que l'Article premier de la Charte des Nations Unies consacrait l'ambition de «prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la paix». Malgré certains succès des Nations Unies, la situation globale n'est pas satisfaisante. Les conflits à travers le monde touchent près d'un milliard de personnes, a regretté le Président de l'Assemblée générale. Ces conflits entraînent des mouvements de populations inconnus depuis la Seconde guerre mondiale. Le fait que 95% des réfugiés et des déplacés internes aient été affectés par les dix mêmes conflits depuis 1990 marque l'échec de l'approche traditionnelle des Nations Unies quant à la paix, la sécurité et la gestion de la transition au sortir des conflits. Face à cette situation, l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité ont adopté en avril dernier une résolution identique consacrant, pour la première fois, le concept de «paix durable». Ces résolutions mettent en lumière les liens entre la paix, le développement durable et les droits de l'homme, et insistent sur la prévention et la résolution des conflits, de même que sur la nécessité de changements institutionnels au sein du système des Nations Unies.
Cette nouvelle philosophie de la paix durable impose des liens plus importants entre les gouvernements, les Nations Unies, la société civile et le secteur privé. Trois ateliers de travail concernant la paix durable ont eu lieu en janvier. Le premier se concentrait sur les corrélations entre développement durable et paix durable ainsi que sur le rôle des femmes et de la jeunesse; le deuxième se penchait sur la gestion des ressources naturelles; et le troisième traitait des moyens de renforcer la transparence, l'état de droit et l'inclusion des institutions. À cette occasion, le Secrétaire général a dévoilé son plan de réforme des Nations Unies aux fins d'assurer la cohérence et l'impact sur la prévention des conflits et la promotion d'une paix durable. Le rôle du Conseil et des organes des droits de l'homme sera multiple. Premièrement, attirer l'attention sur les risques imminents à la paix engendrés par les violations des droits de l'homme. Deuxièmement, renforcer le respect des droits de l'homme au sein des États. Troisièmement, garantir la fin de l'impunité pour les violations des droits de l'homme. Quatrièmement, vérifier la mise en œuvre des recommandations, notamment celles issues de l'Examen périodique universel. Enfin, veiller à l'avènement d'une culture des droits de l'homme au sein des Nations Unies.
Exposés des panélistes
MME HELEN CLARK, Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a elle aussi insisté sur l'adoption par le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale de deux résolutions demandant aux Nations Unies de réexaminer leur manière d'anticiper et de réagir aux conflits et d'œuvrer à la «paix durable» dans les trois piliers des Nations Unies. Helen Clark a souligné que ce n'était pas un hasard si les pays qui font face à des conflits internes meurtriers affichaient un taux élevé de pauvreté et d'inégalité. Le PNUD, qui se concentre sur la réduction de la pauvreté, le développement durable et l'état de droit, est bien placé pour contribuer aux efforts à long terme pour construire et soutenir la paix.
Le PNUD est responsable du point focal mondial des Nations Unies pour les activités policières, judiciaires et pénitentiaires. Ce réseau est surtout présent là où les missions de maintien de la paix sont engagées. C'est une pratique exemplaire qui montre que les trois piliers peuvent travailler ensemble, a souligné Mme Clark. Avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, le PNUD contribue à l'appui des Coordonnateurs-résidents et de leurs collaborateurs. Le PNUD coopère aussi avec l'Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l'homme en vue de leur renforcement sur le terrain. Acteur et catalyseur du développement, le PNUD aide les États membres à se préparer à l'Examen périodique universel et à donner suite aux recommandations.
L'Administratrice du PNUD a également invité à ne pas oublier les Objectifs du développement durable, qui sont tout à fait pertinents en termes de développement et de promotion des droits de l'homme. Il s'agit de solutions de longue haleine qui intègrent les droits de l'homme, a-t-elle conclu.
M. OSCAR FERNANDEZ-TARANCO, Sous-Secrétaire général des Nations Unies à l'appui à la consolidation de la paix, a déclaré que les résolutions sur la paix durable adoptées en avril 2016 par le Conseil de sécurité et l'Assemblée générale constituent un cadre révolutionnaire pour le rôle des Nations Unies dans la prévention des conflits. Avec la priorisation par le Secrétaire général de la prévention, ces deux résolutions forment une charte fondatrice, qui souligne par ailleurs le rôle essentiel du Programme de développement durable à l'horizon 2030, a encore estimé le Sous-Secrétaire général.
Ces deux résolutions constituent également une approche qui doit être reproduite dans les politiques et dans les institutions. Le système des Nations Unies – y compris le Conseil économique et social (ECOSOC), l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité – doit faire davantage usage des recherches analytiques du Conseil des droits de l'homme et de ses mécanismes en matière de consolidation de la paix. La Commission de consolidation de la paix peut aussi servir de plateforme de dialogue pour relier les droits de l'homme à la consolidation de la paix, avec la participation des acteurs nationaux, y compris les experts et praticiens des droits de l'homme, a recommandé M. Fernandez-Taranco.
MME YVETTE STEVENS, Représentante permanente de la Sierra Leone auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué qu'une section de droits de l'homme avait été ajoutée au Bureau intégré des Nations Unies en Sierra Leone (BINUSIL), ce qui avait constitué une première, en son temps. Ce Bureau avait pour mandat d'identifier les risques de conflit, de mettre en œuvre et de promouvoir les droits de l'homme et l'état de droit, de lutter contre la criminalité organisée et la corruption, et d'appuyer les efforts du cadre d'action pour la consolidation de la paix. Dans ce cadre, la Commission nationale des droits de l'homme de la Sierra Leone a été créée avec succès entre 2007 et 2008.
Son approche exhaustive, qui prend en compte les questions politiques, humanitaires et de développement, ainsi que la défense des droits de l'homme, a fait du BINUSIL un mandat unique. L'intégration de la dimension des droits de l'homme au tout début du processus a eu un effet significatif, a ajouté la diplomate sierra-léonaise. Avec l'aide de la communauté internationale, la Sierra Leone a mis fin aux violations massives des droits de l'homme qui avaient marqué le pays.
La Sierra Leone a été l'un des premiers pays à figurer, en 2006, à l'ordre du jour de la Commission de consolidation de la paix. Le cadre d'action pour la consolidation de la paix a défini de nombreuses priorités, parmi lesquelles: l'emploi et l'émancipation des jeunes; la consolidation de l'état de droit; la réforme de la justice; le secteur de l'énergie; et la prise en compte de la dimension régionale de la paix.
Alors que la Commission s'était particulièrement focalisée sur les droits civils et politiques, aujourd'hui, la Sierra Leone se concentre sur des problématiques d'ordre économique et social.
En conclusion, Mme Stevens a affirmé que l'Examen périodique universel devait prendre largement en compte la question de la consolidation de la paix. Elle a enfin indiqué que la consolidation de la paix ne concernait pas que les pays qui sortent d'un conflit. La Commission de consolidation de la paix peut permettre de se pencher sur les risques de conflits afin de prévenir les conflits dans les pays actuellement en paix.
M. JEAN ZIEGLER, membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme, a observé que les droits de l'homme sont mentionnés à plusieurs reprises dans la Charte des Nations Unies, mais pas dans son Chapitre VII. Cela signifie que les droits de l'homme ne peuvent pas être imposés par la force, mais uniquement par le biais de la coopération et du dialogue. Or les violations des droits de l'homme auxquelles on assiste sont énormes, a-t-il dit, précisant vouloir consacrer son intervention à la question de la misère, qu'il a qualifiée d' «agression permanente et effroyable contre une fraction importante de l'humanité»
Pour M. Ziegler, l'ordre économique du monde est à la fois absurde et meurtrier. Selon les chiffres de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), chaque année, plus de 850 millions de personnes sont victimes de la faim et de la malnutrition. Toutes les cinq secondes, un enfant de moins de dix ans meurt de faim ou de ses conséquences immédiates. Ces morts interviennent alors que, selon la même organisation, la planète pourrait nourrir 12 milliards d'êtres humains, soit pratiquement le double de sa population actuelle. «Il n'existe donc aucune fatalité. Un enfant qui meurt de faim à l'heure où nous parlons est assassiné», a déclaré M. Ziegler.
M. Ziegler a également observé que les acteurs de l'économie mondialisée ne sont plus aujourd'hui les États, mais les entreprises du secteur privé. Selon la Banque mondiale, en 2015, les 500 plus grandes entreprises du monde contrôlaient, d'une façon ou d'une autre, 52,8% du produit mondial brut, c'est-à-dire toutes les richesses produite en une année sur la planète. Ces entreprises échappent par ailleurs, totalement ou presque, à tout contrôle étatique, parlementaire ou syndical, ce qui les rend ainsi détentrices d'un pouvoir que jamais un empereur, un pape ou un roi n'a détenu. Elles sont le véritable pouvoir planétaire, a-t-il conclu.
MME JULIENNE LUSENGE, Présidente du Fonds pour les femmes congolaises, a constaté que, dans la plupart des conflits, les violations des droits humains sont à l'origine du déclenchement des conflits. Elle a regretté que les droits de l'homme soient considérés comme un «ajout intéressant», devant être «considéré dans la consolidation d'un processus de paix le cas échéant», selon les termes de l'ONU. Les droits humains sont considérés comme une belle chose abstraite à avoir une fois les armes rangées… de la même façon que les droits des femmes sont considérés comme un luxe, une monnaie de négociation et la première chose à retirer de la table de négociation.
Il faut donc mettre en œuvre des synergies positives entre les droits de l'homme, la consolidation de la paix et le développement durable, a souligné Mme Lusenge, et inclure les femmes à tous les niveaux de négociation. Les femmes de la République démocratique du Congo savent qu'elles sont tout à fait aptes à participer aux processus de paix. Au Sud-Kivu, les femmes ont exigé de reprendre leur place comme conseillères du chef dans les villages. Elles font aujourd'hui de la médiation et prononcent des jugements dans les tribunaux traditionnels: elles sont appréciées dans ces rôles, a affirmé Mme Lusenge.
Les femmes sont des vecteurs du respect des droits humains et de paix durable, a poursuivi Mme Lusenge. Financées par le Fonds pour les femmes congolaises, des femmes sont allées rencontrer les groupes armés dans l'Est de la République démocratique du Congo. Elles leur ont dit d'arrêter les violences et de retourner dans leurs villages. Ils ont accepté car ils ont compris qu'ils étaient exploités et instrumentalisés par de mauvais politiciens. L'exemple peut surprendre car la perception au Nord est que les femmes sont les victimes des conflits. Mais dès lors les droits des femmes sont acquis, elles peuvent intervenir dans la résolution des conflits, a expliqué Mme Lusenge. La paix devient ainsi durable.
Affectées par les conflits, les femmes n'en sont pas moins la solution pour construire la paix. Il faut soutenir les femmes qui prennent des risques pour la paix. Il n'y aura pas de paix sans la participation des femmes aux négociations. Les droits humains doivent être le vecteur de construction de la paix. S'il y a violation des droits humains, il n'y aura pas de paix et le développement sera impossible, a prévenu Mme Lusenge.
Débat interactif
Tous les États (Liechtenstein, s'exprimant au nom de l'Autriche, de la Suisse de la Slovénie; le Brésil, au nom de la Communauté des États lusophones; l'Angola; le Guatemala; l'Afrique du Sud; le Vietnam; l'Uruguay, la Grèce; le Salvador, s'exprimant au nom des États d'Amérique latine et des Caraïbes; la Tunisie, s'exprimant au nom du Groupe africain; la République bolivarienne du Venezuela; la Chine, s'exprimant au nom du Groupe africain (des 77)), ont rappelé l'interdépendance entre les conflits et les violations des droits de l'homme. Alors que les violations de ces droits sont toujours la cause des conflits, leur respect permet, à l'inverse, de prévenir les hostilités et de consolider la paix. La pérennité de la paix ne peut être assurée qu'en respectant les droits de l'homme, ont-ils tous affirmé.
Le Guatemala, après avoir rappelé l'importance des deux résolutions identiques votées par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité relatives à la paix durable, a mis l'accent, de concert avec l'Uruguay, El Salvador et la Tunisie, sur l'importance des Objectifs de développement durable et du Programme de développement durable à l'horizon 2030, dans la consolidation de la paix.
La Tunisie et la Grèce ont également insisté sur l'importance de la justice et de la redevabilité des auteurs de crimes, pour que les sociétés puissent se redresser.
La République bolivarienne du Venezuela, la Chine et l'Afrique du Sud ont insisté pour leur part sur le respect de la souveraineté et de l'indépendance des États dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix.
Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique a déclaré que la meilleure manière de résoudre les différends et de parvenir à une paix durable est le dialogue et la coopération internationale et non l'ingérence dans les affaires intérieures des pays. L'Égypte, au nom de 19 pays partageant la même opinion , a également mis l'accent sur l'importance cruciale de la coopération pour résoudre les défis en matière de droits de l'homme. Au lieu de cela, la réponse de la communauté internationale vis-à-vis des défis des droits de l'homme reste insuffisante et politiquement orientée. Le droit au développement n'est toujours pas reconnu, a-t-il déploré. Cela est en effet regrettable car sans développement, il ne peut y avoir de paix durable, a ajouté la délégation du Qatar.
L'Australie est aussi du même avis, quant à la relation entre paix, développement et droits de l'homme. Elle reste engagée au sein de ce Conseil à cet effet et estime que l'Examen périodique universel est un outil majeur pour identifier les défis et les résoudre par la coopération et l'échange des bonnes pratiques et des leçons apprises. D'autres délégations comme celles du Nigeria et de la Thaïlande ont souscrit à cette importance fondamentale de la coopération internationale pour atteindre les objectifs des droits de l'homme.
La Norvège, au nom d'un groupe de pays rassemblé sous le nom de ONU-70, a reconnu qu'un grand nombre de pays est demandeur de coopération internationale pour la réalisation de leurs obligations au regard des droits de l'homme. Mais cette assistance technique de la part du Haut-Commissariat est entravée soit par le manque de ressources, soit par le blocage dû aux priorités programmatiques, a-t-elle déploré. L'Union européenne a réitéré son engagement en faveur de la promotion des droits de l'homme, notamment pour la promotion des droits des femmes, de la justice transitionnelle et de la reddition des comptes. Pays membre de l'Union européenne, le Portugal a plaidé pour une amélioration de la participation des femmes dans toutes les étapes des processus, y compris au sein du système des Nations Unies.
La République de Corée, qui préside la Commission de consolidation de la paix, s'est déclarée disposée à entendre toutes les délégations, de même que les panélistes sur les moyens de renforcer la coopération entre cet organe et les autres organes du système onusien. Pour la Suisse, l'objectif 16 sur la justice et la paix du Programme de développement durable à l'horizon 2030 est un bon moyen de départ pour renforcer cette coopération, a dit le représentant, rejoint sur ce point par la Bolivie pour qui l'incorporation de ces normes des droits de l'homme dans la consolidation de la paix peut en améliorer l'efficacité.
Le Pakistan s'est dit convaincu que les normes des droits de l'homme sont le cadre normatif dans la lutte contre les conflits. La paix doit s'inscrire sur les principes inclusifs nationaux. Il faut renforcer les institutions qui promeuvent les droits de l'homme. La coopération internationale peut permettre la pacification des relations internationales.
La Fédération de Russie a souligné que les Nations Unies doivent veiller à mettre en place une coopération constructive qui tient compte des particularités culturelles des pays. Il ne faut pas remettre en cause le fait que les droits de l'homme contribuent à la paix et à la sécurité. Il faut davantage faire preuve de prudence et respecter les tâches dévolues à chacun au sein des Nations Unies.
Pour les institutions nationales de droits de l'homme, l'Alliance globale des institutions nationales des droits de l'homme a souligné que la consolidation de la paix nécessite des institutions fortes pour assurer l'appropriation nationale des solutions après un conflit et que ces institutions nationales jouent également un rôle déterminant dans la transparence et la recherche de la vérité après les conflits. Au nombre des organisations non gouvernementales qui ont pris la parole, United Nations Watch a déploré qu'en dépit de son rôle et de sa responsabilité, le Conseil des droits de l'homme ait entretenu des liens jugés trop étroits avec le régime de Mouammar Kadhafi dont la violence et l'oppression sont responsables de la situation actuelle du pays. Le Comité consultatif mondial de la Société des amis - Quakers a regretté la fragmentation du système des Nations Unies alors que les questions des droits de l'homme et la paix durable sont inextricablement liés.
L'organisation non gouvernementale Verein Südwind Entwicklungspolitik a estimé que certains pays sont peu enclins à remplir leurs obligations relatives aux droits de l'homme, au-delà des statistiques disponibles, citant nommément la Turquie, l'Arabie saoudite et la République islamique d'Iran. Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture a pour sa part accusé Bahreïn de fournir de fausses statistiques sur la mise en œuvre de ses recommandations acceptées dans le cadre de l'Examen périodique universel. Les membres de cette organisation, de même que des journalistes sont encore victimes d'arrestations, de torture et de discrimination, a dénoncé le représentant. Le Conseil indien d'Amérique du Sud a estimé, pour sa part, que le fait de refuser d'inscrire la question de l'autodétermination des peuples à l'ordre du jour du Conseil est une preuve du manque de volonté de pleinement mettre en œuvre les droits de l'homme. Or le droit à l'autodétermination est inscrit dans la Charte des Nations Unies, a déploré le représentant, ajoutant que par le passé, la violation de ce droit fut à l'origine de violations massives des droits de l'homme.
Réponses des panélistes
M. FERNANDEZ-TARANCO a souligné que les signaux d'avertissements comme la violation des droits de l'homme sont un aspect très important auxquels la Commission de consolidation de la paix doit réfléchir et diversifier ses activités. Il y a différents points focaux notamment sur le rôle des femmes ou sur l'implication de la jeunesse. M. Fernandez-Taranco a souligné qu'un nouveau point focal pourrait avoir comme thème l'intégration des droits de l'homme. Les droits de l'homme et le renforcement des capacités jouent un rôle important dans les stratégies de construction de la paix a expliqué M. Fernandez-Taranco.
MME STEVENS a souligné que le Conseil pouvait faire beaucoup en matière de consolidation de la paix. Le Conseil pourrait faire office d'un détecteur de fumée. Il fait ce qu'il peut pour exposer au grand jour les violations des droits de l'homme. Néanmoins, ces informations ne servent pas aujourd'hui à la prévention. Les Objectifs du développement durable offrent la possibilité de réfléchir à la manière dont les différents éléments peuvent pérenniser la paix.
M. ZIEGLER a établi un lien évident entre le droit au développement et la paix durable. Cette année va être décisive, a-t-il prévenu s'agissant de l'universalisation du droit au développement. Il est évident que ce qu'on appelle les «acteurs non étatiques», notamment l'oligarchie du monde financier qui décide réellement du destin des peuples, doit être soumise aux mécanismes des droits de l'homme et aux contrôles du Conseil a souligné M. Ziegler. Il a conseillé aux États de voter pour le traité sur l'extension des mécanismes des droits de l'homme aux sociétés multinationales.
MME LUSENGE a souligné que la communauté internationale devait prendre en compte la force des femmes afin qu'elles participent au processus de prise des décisions du niveau des villages jusqu'au Conseil de sécurité. Il faut arrêter l'hypocrisie, a demandé Mme Lusenge. Lors de négociations, il y a trop souvent sous la table d'autres agendas. La question de la souveraineté de l'état est très importante, notamment sur le fait de ne pas pouvoir intervenir dans des États qui violent les droits de l'homme de leur population. Il faut, au contraire, pouvoir leur venir en aide. L'ONU a beaucoup de rapports et de recommandations qu'il faut utiliser pour pacifier le monde.
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*Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre de la réunion-débat: Afrique du Sud; Angola; Australie; Bolivie; Brésil (au nom de la Communauté des États lusophones); Chine (au nom du Groupe africain des 77 et en son nom propre); Égypte (au nom de 19 pays partageant la même opinion); El Salvador; Grèce; Guatemala; Liechtenstein (au nom de l'Autriche, de la Suisse de la Slovénie); Nigeria; Norvège (au nom d’un groupe de pays rassemblé sous le nom de ONU-70); Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique); Portugal; Qatar; République de Corée; Salvador (au nom des États d'Amérique latine et des Caraïbes); Suisse; Thaïlande; Tunisie (au nom du Groupe africain et en son nom propre); Union européenne; Uruguay; Venezuela; Vietnam.
**Les institutions nationales et les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre de la réunion-débat : Alliance globale des institutions nationales des droits de l'homme; United Nations Watch; Comité consultatif mondial de la Société des amis – Quakers; Verein Südwind Entwicklungspolitik; Conseil indien d'Amérique du Sud et Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture.
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HRC17/004F