Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES EXAMINE LE RAPPORT DE L'URUGUAY
Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de l'Uruguay sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
Présentant ce rapport, Mme Alejandra Costa, Directrice des droits humains et du droit humanitaire au Ministère des relations extérieures de l'Uruguay, a reconnu que jusqu'à une période récente, les personnes handicapées était invisibles aussi bien pour la société que pour l'État. «L'invisibilité de près de 16% de la population uruguayenne était absolue. Aujourd'hui, en dépit des nombreuses carences subsistant encore, et qui sont admises dans le rapport, on peut néanmoins affirmer que les personnes handicapées ne sont plus invisibles» , a-t-elle déclaaré. Mme Costa a cité comme avancées concrètes l'adoption du Plan national d'accès à la justice et à la protection juridique des personnes en situation de handicap. Parmi les lacunes, elle a reconnu l'absence de critères uniques d'évaluation et de certification du handicap. À l'inverse, on peut reconnaître le progrès représenté par l'inclusion de la variable handicap dans le recensement national de 2011.
La délégation uruguayenne était également composée de Mme Begoña Grau, Directrice du Programme national du handicap au Ministère du développement social, ainsi que de représentants du Ministère de l'intérieur; du Ministère des affaires étrangères; et de la municipalité de Montevideo.
Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des personnes handicapées d'ascendance autochtone ou vivant en zone rurale; de l'accès aux technologies de l'information et de la communication; de la concertation avec les associations de personnes handicapées; de la problématique de l'accessibilité physique; du faible nombre de plaintes enregistrées pour discrimination (fondée sur le handicap); de l'incrimination de la torture et des mauvais traitements; du projet de loi sur la santé mentale; de la reconnaissance du droit de propriété pour les personnes handicapées; de l'existence de quotas pour les travailleurs handicapés; ou encore de l'absence d'un système d'éducation inclusif.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport, M. Carlos Alberto Parra Dussan, a notamment relevé que la Constitution contient un certain nombre de pierres d'achoppement, notamment en limitant les droits civiques des personnes handicapées, ou leur entrée sur le territoire.
Une experte a quant à elle fait part de sa préoccupation du fait qu'un certain nombre de textes de loi ne soient pas conformes aux dispositions de la Convention. Elle a noté que le refus d'un aménagement raisonnable n'était pas considéré comme un cas de discrimination. Elle a constaté que si le pays avait adopté un excellent arsenal de lois, la concrétisation dans les faits pouvait laisser à désirer. Une autre experte a souligné que la loi de 2010 visant à harmoniser le droit interne avec les dispositions de la Convention n'avait donné lieu qu'à des adaptations partielles. Elle a noté que l'an dernier le pays n'avait enregistré que cinq plaintes pour discrimination, doutant que ce chiffre reflète la réalité. Une experte s'est étonnée que le Plan national pour l'égalité des droits ne prenne pas en compte l'avis des femmes handicapées dans les questions les concernant. Un expert a noté la coexistence de deux modèles, l'un axé sur l'approche médicale et, l'autre, sur l'approche sociale, qui ont pour défaut de ne pas être basés sur les droits de l'homme. A été salué le fait que l'Uruguay reconnaisse ses carences.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l'Uruguay et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 2 septembre.
Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport initial de l'Éthiopie qu'il achèvera mercredi matin.
Présentation du rapport de l'Uruguay
Le Comité est saisi du rapport périodique de l'Uruguay, ainsi que de ses réponses à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.
MME ALEJANDRA COSTA, Directrice des droits humains et du droit humanitaire au Ministère des relations extérieures de l'Uruguay, a affirmé que son pays maintenait son engagement avec le système multilatéral de protection des droits de l'homme, comme l'illustre la ratification de tous les traités fondamentaux et leurs protocoles facultatifs, ainsi que l'invitation ouverte qu'il a lancée à tous les titulaires de mandats au titre des procédures spéciales du Conseil afin qu'ils se rendent dans le pays. L'Uruguay a déjà passé deux cycles de l'Examen périodique universel et a présenté volontairement deux rapports d'étape sur le suivi de la mise en œuvre des recommandations qui lui ont été formulées dans ce contexte, a précisé Mme Costa. Il a accepté la totalité de ces recommandations – à l'exception d'une seule, formulée lors du second cycle, du fait qu'elle était contraire aux politiques en vigueur au niveau national. L'Uruguay, qui a ratifié la Convention en 2008, a présenté son rapport initial au Comité en 2013, a en outre rappelé Mme Costa.
La cheffe de la délégation uruguayenne a reconnu que jusqu'à il y a peu, les personnes handicapées était invisibles pour la société et pour l'État. «L'invisibilité de près de 16% de la population uruguayenne était absolue. Aujourd'hui, en dépit des nombreuses carences subsistant encore, et qui sont admises dans le rapport, on peut néanmoins affirmer que les personnes handicapées ne sont plus invisibles» , a-t-elle souligné. Elle a jugé qu'il était fondamental de reconnaître à cet égard le travail inlassable mené par la société civile depuis plusieurs décennies.
Mme Costa a ensuite insisté sur les progrès réalisés par l'État uruguayen pour ce qui est d'incorporer dans les politiques nationales et locales, de façon transversale, la thématique complexe du handicap. Certes, a-t-elle reconnu, le Comité n'en conclura pas, pour autant, que tous les buts ont été atteints; au contraire, il relèvera que la mise en œuvre de la Convention est partielle et qu'elle manque d'homogénéité. Il est important, toutefois, de reconnaître les progrès atteints car ceux-ci incitent à aller de l'avant, a souligné la cheffe de délégation. Les progrès législatifs et institutionnels en matière de droits humains en général, et particulièrement de respect des personnes handicapées, ont été très importants, a-t-elle insisté; il existe des mécanismes forts et effectifs pour régir ces droits en Uruguay.
Mme Costa a cité comme avancées concrètes l'adoption du Plan national d'accès à la justice et la protection juridique des personnes en situation de handicap. Parmi les lacunes, elle a reconnu l'absence de critères uniques d'évaluation et de certification du handicap. À l'inverse, on peut reconnaître le progrès que constitue l'inclusion de la variable handicap dans le recensement national de 2011. S'il est exact que pour élaborer et appliquer quelque politique publique que ce soit, il convient de disposer d'un système intégral de relevé de données, il s'agit d'un engagement que l'État doit encore concrétiser, a conclu Mme Costa.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. CARLOS ALBERTO PARRA DUSSAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Uruguay, a rappelé que le nom du pays, qui signifie «Rivière aux oiseaux» en guarani, illustrait bien sa grande beauté. Il a souligné que l'Uruguay avait dû amender sa législation sur le handicap après la ratification de la Convention, afin de prendre pleinement en compte les dispositions de cet instrument. La Constitution présente néanmoins un certain nombre de pierre d'achoppement, notamment du fait qu'elle limite les droits civiques des personnes handicapées ou leur entrée sur le territoire national. Il faudra que l'Uruguay suscite la pleine coopération avec les organisations de la société civile et les associe aux politiques publiques, afin que le pays reprenne à son compte les normes maximales instituées par la Convention, a ajouté le rapporteur.
Un autre membre du Comité a souhaité savoir ce qu'il était advenu des plaintes déposées par des personnes handicapées; ces personnes ont-elles bénéficié de réparations? Cet expert a en outre souhaité savoir concrètement de quels moyens de déplacement, de quelles facilités il pourrait bénéficier en tant que personne handicapée s'il se rendait dans la magnifique capitale, Montevideo. Un autre membre du Comité s'est enquis des mécanismes de concertation avec les organisations de personnes handicapées mis en place par l'État. Si des efforts ont été faits en matière d'accessibilité physique, qu'en est-il dans le domaine des technologies de l'information et de la communication et de la mise à disposition d'interprètes, a-t-il en outre été demandé?
Une experte s'est inquiétée qu'un certain nombre de textes de loi ne soient pas conformes aux dispositions de la Convention. Elle a noté que le refus d'un aménagement raisonnable n'était pas considéré comme un cas de discrimination. Est-il envisagé d'y remédier, a-t-elle demandé? Elle a aussi demandé combien d'enfants handicapés étaient placés en institution, s'inquiétant du fait qu'un certain nombre d'entre eux soient exclus du système éducatif. Comment les lois s'attaquent-elles aux discriminations multiples et intersectionnelles, s'agissant particulièrement des femmes, des autochtones et des Afro-uruguayens handicapés, a en outre demandé cette experte? Elle a constaté que si le pays avait adopté un excellent arsenal de lois, la concrétisation dans les faits pouvait laisser à désirer.
Une autre experte a souligné que la loi de 2010 visant à harmoniser la législation interne avec les dispositions de la Convention n'avait donné lieu qu'à des adaptations partielles. Elle a en outre noté que l'an dernier, l'Uruguay n'avait enregistré que cinq plaintes pour discrimination et a douté que ce chiffre reflète la réalité du pays. Elle a demandé quelles mesures avaient été prises afin d'informer les personnes handicapées de leurs droits et de consulter leurs organisations représentatives.
Une autre membre du Comité, qui a remercié la délégation pour avoir fourni en braille les réponses aux questions et thèmes à aborder dans le cadre du présent examen, a souhaité connaître comment avait été élaborée la réglementation relative aux outils de mobilité, s'étonnant que l'usage de canes d'aveugle n'y figure pas. Elle s'est aussi étonnée que le Plan national pour l'égalité des droits ne semble pas prendre en compte l'avis des femmes handicapées dans les questions qui les concernent. Elle a aussi noté que l'an dernier, plus de 4,5 millions de dollars avaient été réunis lors du dernier Téléthon; elle s'est demandée dans quelle mesure la Convention était prise en compte dans la conception de ces campagnes télévisuelles.
Un expert a noté la coexistence de deux modèles – l'un médical et, l'autre, social – qui ont pour défaut de ne pas être axés sur les droits de l'homme. Le Gouvernement uruguayen envisage-t-il d'adopter une approche basée sur les droits de l'homme dans la définition du handicap, a-t-il demandé?
Un autre expert a souhaité avoir des précisions sur la politique du pays en matière de réduction de la pauvreté chez les personnes handicapées.
Combien de femmes handicapées siègent-elles au Parlement, a-t-il également été demandé?
Un autre membre du Comité s'est félicité que l'Uruguay reconnaisse ses carences, notant que cela était rare parmi les États parties; il a demandé s'il existait des mesures législatives ou politiques spécifiques visant à donner voix au chapitre aux organisations de personnes handicapées. Il a enfin souhaité savoir si une autorité officielle était chargée des normes en matière d'accessibilité. Un autre expert a affirmé que la loi, aussi bonne soit-elle, était de peu de secours en matière de recours utiles, ce qui, de fait, la vide d'une grande partie de son utilité.
Une experte a relevé qu'aucune mention des autochtones ne figurait dans le rapport.
Une experte s'est inquiétée que la loi permette d'interner d'office les personnes considérées comme démentes, ou en fonction d'un handicap mental ou intellectuel, et a souhaité savoir si l'Uruguay prévoyait d'amender la législation afin d'adopter un texte qui soit conforme au respect des droits de la personne. Une de ses collègues a demandé qui protégeait les enfants et adolescents placés en institution, notamment contre la violence, la maltraitance et l'exploitation.
La Présidente du Comité a attiré l'attention de la délégation sur le fait qu'il n'était pas correct de parler de «personnes souffrant de handicap» et qu'il convenait plutôt de parler de «personnes handicapées».
Un expert a souhaité en savoir davantage sur l'utilisation du braille dans les différents domaines de la vie.
Un membre du Comité a attiré l'attention sur le fait que le droit au mariage des personnes handicapées sur les plans intellectuel ou psychosocial connaissait des restrictions: l'Uruguay a-t-il l'intention d'en finir avec cette approche afin de privilégier le respect des droits fondamentaux?
Une experte a demandé dans quelle mesure les programmes en faveur des personnes handicapées étaient véritablement appliqués dans les campagnes. L'Uruguay a joué rôle moteur dans la ratification du Traité de Marrakech visant à faciliter l'accès aux œuvres publiée des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés.
Quelles mesures concrètes ont-elles été mises en place pour que les personnes ayant vu leur capacité juridique limitée puissent exercer leurs droits parentaux, a demandé un membre du Comité? Quelles mesures concrètes sont-elles prises pour interdire les stérilisations forcées, a-t-il également demandé, souhaitant savoir si une éducation sexuelle et génésique était prodiguée aux jeunes filles handicapées? Dans quelle mesure les enseignants sont-ils formés à une éducation inclusive, a-t-il encore demandé?
Un autre expert a demandé comment l'Uruguay s'assurait de l'incorporation des questions relatives au handicap dans ses statistiques nationales en faisant en sorte qu'elles n'y soient pas enfouies et introuvables.
Enfin, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Uruguay a rappelé que ce pays était l'un des plus alphabétisés et offrait l'un des enseignements les plus inclusifs de la région. Néanmoins, la question se pose de la qualité de cet enseignement, d'autant qu'il existe une asymétrie de développement entre la capitale, où vit plus de la moitié de la population, et l'arrière-pays.
Le rapporteur a en outre souhaité savoir quels types de postes étaient réservés aux travailleurs handicapés, rappelant que bien souvent, les quotas fixés ne touchaient que le bas de l'échelle hiérarchique. La délégation dispose-t-elle de chiffres quant au nombre de personnes bénéficiant de programmes de réhabilitation dans des centres spécialisés ou communautaires, a-t-il également demandé? L'Uruguay ayant ratifié pratiquement tous les instruments internationaux et protocoles facultatifs relatifs aux droits de l'homme, donnant ainsi au pays une fondation juridique solide, il est important qu'il prenne des mesures concrètes pour les appliquer, a-t-il été conclu.
Réponses de la délégation
Le plan national d'accès à la justice a été élaboré en concertation avec la société civile, a indiqué la délégation. La création d'un système de relevé de statistiques s'inscrit dans ce plan, ainsi que la prise en compte de la thématique du handicap dans les formations universitaires.
Le Programme national du handicap devrait devenir à terme un institut du handicap, a d'autre part indiqué la délégation. L'objectif des autorités est de faire en sorte que la politique nationale du handicap soit «transversale», en d'autres termes qu'elle touche tous les ministères et pas seulement celui du développement social – qui reste le premier concerné.
Par ailleurs, le pays ne compte plus d'autochtones en tant que tels mais tout au plus, peut-être, des personnes d'ascendance autochtone, a indiqué la délégation. Par conséquent, la question du handicap s'agissant des sujets non pris en compte par les services sanitaires concerne plutôt les personnes vivant en zone rurale, plutôt que les autochtones au sens strict, a-t-elle expliqué. Un programme a été élaboré afin d'identifier les personnes handicapées vivant à la campagne, a précisé la délégation.
En matière de technologies de l'information et de la communication et d'accessibilité technologique en général, un système d'interprétation en langue des signes par téléphone est en cours de mise en place. On met des ordinateurs à disposition de tous les enfants, les enfants handicapés recevant des machines adaptées à leur handicap. Un programme de soutien intitulé «L'Uruguay grandit avec toi» vise les enfants des milieux défavorisés, y compris les enfants handicapés.
La délégation a ensuite expliqué que les politiques publiques visaient les individus, les familles et leurs enfants qui se trouvent à la marge du système économique. Il s'agit d'améliorer la qualité de vie de la société dans son ensemble, ce qui explique que les enfants ou les femmes handicapés, par exemple, ne soient pas ciblés en tant que tels.
La concertation avec les associations de personnes handicapées a lieu avec les instances fédérant ces organisations, de par leur grand nombre dans la capitale - où réside environ la moitié de la population.
En matière d'accessibilité physique, la délégation a reconnu que la ville de Montevideo n'offrait pas encore une configuration sans obstacles pour les déplacements des personnes à mobilité réduite. Toutefois, depuis 2010, tout nouvel édifice doit offrir des accès praticables. Les transports en commun sont en train d'être adaptés progressivement et sont désormais accessibles pour 30% d'entre eux, a en outre précisé la délégation.
La délégation a par ailleurs reconnu le faible nombre de plaintes enregistrées pour discrimination, estimant nécessaire de promouvoir la sensibilisation à cet égard et d'encourager les victimes à porter plainte. Il s'agit là de l'un des symptômes de l'invisibilité du phénomène, a-t-elle ajouté; nous savons tous que l'absence de plaintes ne reflète pas nécessairement l'état des choses, bien au contraire, bien souvent.
En réponse à une question relative au nombre de membres du parlement qui seraient handicapés, la délégation a précisé qu'une député suppléante était sourde.
La Convention et les instruments internationaux en général ne sont pas systématiquement invoqués par les tribunaux lorsque cela s'avérerait pertinent, a reconnu la délégation. Des cours sont prodigués dans le cadre de la formation permanente des juges et des fonctionnaires. La législation nationale sera harmonisée sous peu, notamment en reprenant la terminologie du droit international, a ajouté la délégation. Un projet d'harmonisation terminologique devrait être prêt pour la fin de l'année ou pour le début de l'année prochaine au plus tard.
La loi reconnaît l'égalité des étrangers et des citoyens uruguayens, le droit international en la matière étant applicable sans restriction. L'article 37 de la Constitution, qui dispose «qu'en aucun cas, l'immigrant ne doit être atteint de troubles physiques, mentaux ou moraux susceptible de porte atteint à la société», n'est de fait pas applicable et il n'est pas appliqué, a assuré la délégation.
La torture est clairement définie dans la législation interne et toute forme de torture est passible de peines allant de vingt mois à huit ans de réclusion, a poursuivi la délégation. En matière de prévention des mauvais traitements, dans le secteur psychiatrique en particulier, deux visites ont été effectuées dans les deux principaux établissements psychiatriques du pays en 2015. Des plaintes ont été déposées en 2014 et 2015, deux d'entre elles donnant lieu à des poursuites pour torture, ce qui a constitué une première dans ce domaine.
S'agissant de l'accompagnement des personnes handicapées, un assistant personnel perçoit pour 80 heures par semaine un salaire de quelque 3000 dollars, le salaire minimum étant de 300 dollars pour huit heures de travail par jour. Cette profession fait l'objet d'une habilitation de l'administration, celle-ci tenant une liste des professionnels disponibles compétents dans l'accompagnement de vie.
En ce qui concerne le projet de loi sur la santé mentale, la délégation a assuré qu'il avait été conçu en concertation avec la société civile. Ce texte prévoit la fermeture progressive des centres d'accueil fermés hébergeant des handicapés mentaux. Ces centres n'accueilleront plus de nouveaux pensionnaires. Les alternatives proposées seront notamment constituées de centres de jour, a précisé la délégation, reconnaissant la complexité de la question pour ce qui est des alternatives à proposer. L'Uruguay entend passer du modèle de curatelle à un modèle de soutien à la capacité juridique, avec l'aide notamment des assistants personnels, a-t-elle ajouté.
Les personnes handicapées jouissent comme tout un chacun du droit de propriété; elles peuvent héritier, tout comme elles peuvent bénéficier de prêts et de crédits bancaires, dans la mesure où elles n'ont pas été privées de leur capacité à gérer leurs propres affaires.
S'agissant de la concrétisation et de l'application des réformes législatives, si celles-ci sont rapides à adopter, il n'en va pas de même avec les mutations culturelles ou politiques qu'elles induisent, a reconnu la délégation. Chacun sait que lorsque l'on ratifie une convention, il faut un certain temps pour que l'ensemble du Gouvernement suive le mouvement. Cela donne d'autant plus d'importance aux recommandations du Comité.
Les mineurs handicapés délinquants ne sont généralement pas jugés, a indiqué la délégation.
Le Code pénal contient un article permettant aux juges de déterminer l'irresponsabilité pénale, a ensuite précisé la délégation, tout en reconnaissant que ledit article n'était pas conforme à la Convention.
Quant à la stérilisation forcée, cette pratique est inexistante en Uruguay, a déclaré la délégation.
Un processus de sensibilisation en matière d'éducation sexuelle et de santé génésique a été engagé avec la publication de guides destinés aux éducateurs et professionnels spécialisés, a en outre indiqué la délégation.
La Commission des droits de l'homme de la Chambre des députés ne dispose pas des moyens matériels et humains suffisants pour surveiller tous les aspects de l'application de la Convention, a ensuite reconnu la délégation.
Il n'existe pas de quotas pour des postes d'élus en faveur des personnes handicapées, a ensuite indiqué la délégation.
L'administration, en revanche, doit compter un quota de 4% de fonctionnaires handicapés, pourcentage qui est dépassé au niveau municipal, a ajouté la délégation.
L'Uruguay ne dispose pas d'un système d'éducation inclusive proprement dit, a indiqué la délégation. Même si quelque 10 000 enfants handicapés sont scolarisés dans le système classique, lorsqu'un enfant est incapable de suivre le programme général, il est alors placé dans un établissement spécialisé, a-t-elle expliqué. Elle a rappelé que la spécialisation de maîtres avait été abolie sous la dictature, ce qui explique que l'éducation nationale ne dispose pas d'enseignants compétents pour le handicap. L'Uruguay doit donc repartir de zéro à cet égard, une formation spécifique devant être réintroduite cette année; mais le processus n'en est qu'à ses prémices.
La délégation a par ailleurs indiqué que l'Uruguay avait établi des programmes de coopération, notamment avec son voisin argentin ainsi qu'avec Cuba, dans les domaines où il ne disposait pas de spécialistes. Ainsi, Cuba l'a aidé à former de professionnels de l'orthopédie.
L'inexistence d'une variable handicap rend très difficile à l'heure actuelle la tenue de statistiques spécifiques se rapportant au handicap.
Six sportifs uruguayens doivent participer aux Jeux paralympiques de Rio de Janeiro, a d'autre part indiqué la délégation. Ces dernières années, des améliorations importantes ont été enregistrées en matière de pratique de nouvelles disciplines sportives. Des coopérations ont été établies avec d'autres pays à ce sujet. Au sein du Mercosur, a ainsi été créée une commission chargée de mettre en lumière les pratiques optimales des villes du continent dans la mise en œuvre de la Convention.
Un projet de loi sur la violence de genre a été déposé en avril dernier devant le Parlement et est actuellement examiné par une commission du Sénat, a poursuivi la délégation. On peut s'attendre à une adoption rapide de ce texte, d'ici la fin de l'année, étant donné le grand intérêt que lui accorde les parties intéressées.
Remarques de conclusion
MME COSTA, Directrice des droits humains et du droit humanitaire au Ministère des relations extérieures de l'Uruguay, s'est félicitée de la possibilité offerte par le Comité de dresser le bilan de la politique de son pays en matière de handicap. Elle a souligné que sa délégation s'était efforcée de faire preuve de transparence et de se montrer constructive et sincère dans ses réponses. L'entrée en vigueur de la Convention a signifié le début d'un processus de mise en œuvre des droits consacrés par cet instrument, a-t-elle rappelé. L'Uruguay, qui s'inspirera des recommandations que lui fera le Comité, est déterminé à cultiver la concertation avec la société civile, confirmant ainsi son engagement en faveur du système universel de protection des droits de l'homme, a conclu Mme Costa.
M. PARRA DUSSAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Uruguay, a jugé franc et transparent le dialogue qui s'est noué avec la délégation et s'est félicité que celle-ci ait aussi bien reconnu les carences existantes que les progrès atteints, sans chercher à cacher les difficultés rencontrées.
MME CISTERNAS REYES, Présidente du Comité, s'est félicitée de l'attitude d'une délégation disposée à reconnaître les points forts du pays mais aussi ceux qui le sont moins. Elle s'est dite satisfaite que la délégation ait clairement indiqué que les observations finales du Comité permettrait de définir la politique de l'Uruguay en matière de handicap, car cela donne tout son sens au travail de cet organe.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRPD16/016F