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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT DE L'ALBANIE

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport de l'Albanie sur les mesures prises par ce pays en application des dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant ce rapport, Mme Merita Xhafaj, Directrice générale du Département des politiques sociales au Ministère du bien-être social et de la jeunesse d'Albanie, a informé le Comité de quelques améliorations apportées au cadre juridique sur l'égalité des sexes et la lutte contre la violence à l'encontre des femmes. Le Code pénal a été modifié dans le but d'incriminer la violence domestique: les sanctions contre les auteurs ont été durcies et le viol conjugal a été défini comme délit pénal. Des amendements ont visé à mieux répondre aux problèmes de violence domestique et à assister les victimes. Enfin, la définition du harcèlement sexuel sur le lieu de travail a été améliorée et des garanties supplémentaires ont été ajoutées dans le Code du travail pour le retour à l'emploi des femmes après un congé maternité. Mme Xhafaj a indiqué qu'une nouvelle stratégie pour l'égalité des sexes pour la période 2016-2020 était en cours d'élaboration. En outre, un plan d'action pour l'intégration des Rom et des Égyptiens, ainsi qu'un plan national pour les personnes handicapées, ont été récemment adoptés.

La représentante albanaise a également mentionné certaines mesures spéciales temporaires - dont l'adoption de contingents - prises pour accroître la participation des femmes à la vie publique et politique, au sein de la police et de la défense. Un fonds spécial pour les femmes entrepreneurs a en outre été créé. Mme Xhafaj a insisté sur le fait que le Gouvernement albanais appliquait une politique de tolérance zéro face à la violence à l'encontre des femmes. Des efforts ont été faits pour mieux faire connaître les structures d'aide et mieux coordonner les réponses aux violences domestiques. Cette sensibilisation a mené à une augmentation du nombre de poursuites pénales et des ordonnances de protection. Pour conclure, elle a attiré l'attention sur une réforme majeure apportée au système d'aide financière. Aujourd'hui, les femmes peuvent obtenir cette aide; c'était jusqu'ici la prérogative des chefs de famille, donc des hommes.

Outre d'autres membres du Ministère du bien-être social et de la jeunesse, la délégation albanaise était également composée de représentants du Ministère des finances; du Ministère de la santé; du Ministère de l'intérieur; du Ministère du développement urbain; du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de l'éducation et des sports; du Ministère du développement économique, du tourisme, du commerce et de l'entrepreneuriat; du Département général de la police d'État; du Département des projets et de l'intégration européenne; et de l'Institut des statistiques.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, des ressources consacrées à la mise en œuvre et la promotion de l'égalité des sexes; de la parité dans les candidatures aux élections locales; de l'amélioration de la situation économique des femmes; des pratiques de mariages précoces; des mesures prises pour lutter contre la violence à l'égard des femmes et sensibiliser la population à cet égard; de la lutte contre les stéréotypes; de l'écart salarial entre hommes et femmes; des mesures prises pour lutter contre l'abandon scolaire des filles en milieu rural; de la promotion de l'entrepreneuriat auprès des femmes des zones rurales; et de la persistance de pratiques privant des enfants de scolarité en raison de «dettes de sang».

Une experte s'inquiétant des pratiques d'avortements forcés effectués en fonction du sexe du fœtus, la délégation a répondu que l'avortement sélectif n'est pas un problème en Albanie. Les rares cas qui existent relèvent d'une pratique culturelle, circonscrite aux zones rurales, et qui n'est due à aucune lacune législative ou lacune dans les soins de santé. Il est exact, toutefois, qu'il naît plus de garçons que de filles.

La violence sexiste reste largement sous-estimée en Albanie, a estimé une experte, ajoutant que la honte, la crainte de représailles et le manque de confiance dans le système de protection de l'État venaient ralentir les progrès dans ce domaine. S'agissant de la représentation politique féminine, une experte a fait observer qu'assurer une transition démocratique consistait d'abord et avant tout à donner aux femmes la place qui leur revient. Elle a estimé que la démocratie albanaise devait s'élargir.

Plusieurs membres du Comité ont également exprimé leurs préoccupations s'agissant des droits patrimoniaux des femmes, une experte constatant que les entraves à l'accès à la propriété empêchaient les femmes de progresser. La délégation a indiqué que la législation était en train d'être passée en revue afin de mieux défendre les droits des femmes en la matière. Toutes les modifications nécessaires seront apportées pour permettre aux femmes d'avoir des droits égaux à ceux des hommes, a-t-elle assuré.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l'Albanie qu'il rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 22 juillet prochain.

Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la Turquie (CEDAW/C/TUR/7) en salle XVIII du Palais des Nations.


Présentation du rapport de l'Albanie

Le Comité est saisi du rapport périodique de l'Albanie (CEDAW/C/ALB/4), ainsi que de ses réponses (CEDAW/C/ALB/Q/4/Add.1) à une liste de sujets à traiter que lui a adressée le Comité (CEDAW/C/ALB/Q/4).

MME MERITA XHAFAJ, Directrice générale du Département des politiques sociales au Ministère du bien-être social et de la jeunesse d'Albanie, a expliqué que les instruments internationaux de droits de l'homme, et en particulier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ses observations générales, ainsi que la Convention d'Istanbul ratifiée en 2012, constituaient la feuille de route de Tirana. Ces textes inspirent l'élaboration de programmes et de politiques portant sur l'égalité des sexes et la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Elle a indiqué que plusieurs mesures avaient été prises pour améliorer le cadre législatif. Ainsi des amendements ont-ils été apportés au Code pénal en 2012 et 2013, notamment dans le but d'incriminer la violence domestique: les sanctions contre les auteurs ont été durcies et le viol conjugal a été défini comme délit pénal.

Des amendements ont également été apportés à la loi sur les mesures de lutte contre la violence dans les relations familiales et à la loi sur l'assurance sociale et les services sociaux afin de mieux répondre aux problèmes de violence domestique et afin d'assister les victimes. Par ailleurs, Mme Xhafaj a expliqué que le Code électoral avait été amendé de sorte à prescrire un quota de 30% de femmes sur les listes de candidats. Le pourcentage de femmes dans les conseils municipaux atteint aujourd'hui à 34,6% - il était de 12% après les élections de 2011.

Des améliorations ont également été apportées au code du travail en décembre 2015: la définition du harcèlement sexuel sur le lieu de travail a été améliorée, des garanties supplémentaires ont été ajoutées pour le retour au travail des femmes après un congé maternité. Un amendement à la loi sur l'assurance sociale et les services sociaux a permis la reconnaissance du droit à un congé de paternité. Enfin, la loi relative aux Programmes sociaux de logement dans les zones urbaines a été modifiée de manière à donner la priorité aux femmes divorcées avec enfants, aux femmes handicapées, et aux orphelines dans l'attribution des logements sociaux.

La représentante albanaise a expliqué qu'une étude avait été menée en 2014, avec le concours du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), dans le but d'évaluer la conformité des législations nationales avec la Convention. Le Ministère du bien-être social et de la jeunesse est actuellement en train d'élaborer une nouvelle stratégie pour l'égalité des sexes pour la période 2016-2020. Un plan national en faveur des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées a été adopté pour la période 2016-2020 afin de remédier aux discriminations et aux inégalités qui les affectent. Par ailleurs, un plan d'action pour l'intégration des Rom et des Égyptiens, ainsi qu'un plan national pour les personnes handicapées, ont été récemment adoptés.

Des mesures temporaires, dont l'adoption de contingents, ont été prises pour accroître la participation des femmes à la vie publique et politique, au sein de la police et de la défense également. Un fonds spécial pour les femmes entrepreneurs a été créé. Des programmes de formation pour les personnes au chômage ont été mis en place, à l'attention en particulier des femmes et des jeunes filles. Quant aux femmes rurales, elles reçoivent un traitement plus favorable que les hommes lorsqu'elles demandent une aide financière.

Mme Xhafaj a insisté sur le fait que le Gouvernement albanais appliquait une politique de tolérance zéro face à la violence à l'encontre des femmes. Des efforts ont été faits pour mieux faire connaître les structures d'aide et mieux coordonner les réponses aux violences domestiques. Cette sensibilisation a mené à une augmentation du nombre de poursuites pénales et des ordonnances de protection. Enfin, une campagne de 16 jours d'activisme contre la violence à l'encontre des femmes a été mise en œuvre sous l'intitulé «Les garçons et les hommes sont parties prenantes à la solution: montrez que vous êtes contre la violence».

Une stratégie de lutte contre la traite, assortie d'un plan d'action sur la période 2014-2017, a été mise en œuvre, a poursuivi la cheffe de la délégation albanaise. Cette stratégie tient compte des recommandations du Comité relatives aux mesures législatives, à la prévention, à l'intensification de la lutte contre la traitre, à la réhabilitation et à l'amélioration du système de surveillance. En 2015, l'Assemblée nationale a ratifié la Convention du Conseil de l'Europe contre le trafic d'organes humains. Le Gouvernement albanais accorde également une grande priorité à l'éducation: les jeunes filles comptaient pour 37% du nombre total d'étudiants au cours de l'année universitaire 2014-2015. Le nombre de femmes diplômées a également augmenté: il se monte aujourd'hui à 64%. Au niveau de la scolarité secondaire, le pourcentage de filles est de 51,4%.

Pour conclure, Mme Xhafaj a attiré l'attention sur une réforme majeure apportée au système d'aide financière. Aujourd'hui, les femmes peuvent obtenir cette aide; jusqu'ici c'était la prérogative des chefs de famille, donc des hommes. De plus, lorsqu'aucun accord n'est trouvé au cours des procédures de divorce, les femmes peuvent requérir une aide financière. En matière de santé, la situation s'est également améliorée: le Gouvernement a fait de la couverture universelle de santé un objectif majeur à atteindre d'ici l'an prochain. En 2014, des examens médicaux gratuits ont été offerts à près de 15 000 femmes et jeunes filles. Un service de mammographie mobile a été mis sur pied; il offre des services gratuits à plus de 5 000 femmes par an.


Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité


Une experte a attiré l'attention sur les formes multiples de discriminations, frappant notamment les demandeurs d'asile, les personnes appartenant à des minorités, dont les Rom, et les personnes handicapées. Elle a souhaité savoir si l'Albanie entendait appliquer les recommandations faites par le Défenseur du peuple à cet égard.

Les lois actuelles prévoient-elles des mécanismes de suivi et d'évaluation, a demandé une experte. Elle a par ailleurs constaté qu'en dépit d'un «arsenal législatif impressionnant», les femmes albanaises continuaient de se heurter à des obstacles juridiques et pratiques en matière d'accès à la justice. Elle a souhaité savoir ce qui était fait pour assurer l'application de la loi sur l'assistance juridique.

Une membre du Comité a constaté avec préoccupation que les programmes pour l'intégration de l'égalité entre les sexes étaient surtout financés par les instances internationales et les Nations Unies. Alors qu'un soutien de l'État s'avère indispensable, existe-t-il des plans pour renforcer la responsabilité du Gouvernement dans l'application de politiques en faveur du genre ?

Tout en reconnaissant des progrès dans la mise en œuvre de l'égalité des sexes en Albanie, une experte a toutefois constaté que les mécanismes en place semblaient s'être affaiblis au cours des dernières années. Le délégation albanaise estime-t-elle que l'État a fait suffisamment pour l'égalité des sexes, notamment en matière de prestation de services à l'attention des femmes, ou pense-t-elle que davantage pourrait être fait ?

La violence sexiste reste largement sous-estimée en Albanie, a estimé une experte: la honte, la crainte de représailles et le manque de confiance dans le système de protection de l'État viennent compliquer les progrès dans ce domaine. Une de ses collègues a souhaité avoir davantage d'informations sur la prévalence des mariages forcés ou arrangés, sur les obligations en matière de dot et sur les crimes d'honneur en Albanie.

Le Gouvernement albanais envisage-t-il de mettre en place des programmes de micro-crédit pour encourager l'autonomisation des femmes, a demandé une autre experte. Une membre du Comité a soulevé le problème de l'exploitation sexuelle et du travail forcé des femmes victimes de la traite. Sur les 109 victimes de la traite recensées en 2015, 87 étaient des femmes et des fillettes. L'experte a aussi constaté que ce phénomène augmentait en été. Elle s'est enquise des résultats observés jusqu'ici de la stratégie de lutte contre la traite, ainsi que des raisons expliquant l'accroissement de ce phénomène pendant la saison estivale. L'État envisage-t-il d'améliorer les lois contre la traite et les services apportés aux victimes ?

Une experte s'est inquiétée des pratiques d'avortements forcés effectués en fonction du sexe du fœtus, souhaitant entendre la délégation sur ce point.

S'agissant de la représentation politique des femmes, une experte a fait observer qu'assurer une transition démocratique consistait avant tout à donner aux femmes la place qui leur revenait. Elle a estimé que la démocratie albanaise devait s'élargir. Tout en saluant le fait que les postes de Ministre de la défense et de Président du Parlement soient actuellement occupés par des femmes, elle a estimé qu'il fallait aller au-delà. Elle a souligné que cela supposait une démarche «systémique», pleinement inclusive, ainsi que des campagnes de sensibilisation, notamment au niveau des partis politique. Il faut impérativement que l'ensemble de la classe politique soit consciente que la représentation des femmes constitue une avancée. Évoquant la question des nominations au sein de la fonction publique, l'experte a souhaité savoir si l'État avait une politique de gestion des ressources humaines laissant un espace à des procédures de nomination exemptes de corruption, pleinement transparentes, et qui permettraient aux femmes de prendre toute leur place.

Une membre du Comité a constaté que l'Albanie était un pays jeune - 34% de la population ayant moins de 18 ans. Elle a salué les efforts déployés pour lutter contre l'illettrisme. Néanmoins, elle a fait observer que les infrastructures scolaires restaient très inégales, souvent au détriment des petites filles. Constatant que les frais de scolarité pouvaient être un obstacle à l'accès à l'école, elle a demandé à la délégation si elle était en mesure aujourd'hui d'assurer qu'aucun enfant en Albanie n'était empêché de suivre sa scolarité pour raison financière.

Une experte s'est intéressée à la «tradition extrêmement néfaste» des enfants privés d'écoles car faisant l'objet d'une «dette de sang». Elle a souhaité savoir s'il existait encore des pratiques de cette nature en Albanie.

Le système albanais de santé a enregistré de nombreux progrès, a constaté une experte. Elle s'est en particulier félicitée de la mise en œuvre de stratégies nationales pour lutter contre certaines pathologies, comme le VIH/sida et le cancer. Elle a toutefois regretté qu'en dépit de ces efforts, des inégalités d'accès aux soins de santé perduraient, notamment entre les zones urbaines et rurales, en particulier en matière de santé reproductive. Quelles mesures l'État envisage-t-il de prendre pour éliminer ces disparités, a-t-elle demandé. Constatant enfin que le budget dévolu à la santé atteignait, selon certaines estimations, 2,6% du PIB, elle a souhaité savoir si le Gouvernement comptait l'augmenter.

Une experte s'est étonnée qu'en dépit du programme de contraception mis en œuvre pour la période 2012-2016 et qui offre des contraceptifs gratuits, le nombre d'avortements restait élevé.

Les entraves à l'accès à la propriété empêchent les femmes de progresser, a constaté une experte. Elle a souhaité savoir si les autorités avaient l'intention d'y remédier.

Les autorités envisagent-elles d'introduire dans le code pénal le crime de haine contre les femmes et les personnes LGBTI, a demandé une experte.

Un membre du Comité a souhaité avoir davantage d'information sur l'âge minimum pour se marier en Albanie, la législation fixant l'âge minimum à 18 ans, alors que les tribunaux locaux peuvent autoriser des mariages à un âge plus précoce.

Les autres questions posées par le Comité ont porté, notamment sur le rôle des organisations non gouvernementales et de la société civile dans la mise en œuvre des stratégies nationales de lutte contre les discriminations à l'encontre des femmes; les mesures juridiques prises pour lutter contre les pratiques préjudiciables aux femmes; les discriminations à l'encontre des femmes en matière d'héritage; les services de soins de santé offerts aux femmes victimes de la traite souffrant de pathologies mentales; et la prépondérance des femmes dans le secteur de travail informel.


Réponses de la délégation

Un travail d'évaluation de la législation albanaise a été effectué en décembre dernier, a expliqué la délégation en réponse à une question. Elle a précisé que des amendements avaient été préparés pour être introduits dans la législation en vue d'une meilleure protection des femmes. La délégation a par ailleurs confirmé que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes primait sur les lois nationales. Tous les juges sont en outre habilités à se référer à la Convention.

Le Ministère de la justice dispose d'un bureau des statistiques qui enregistre toutes les décisions des tribunaux et les articles, notamment du Code civil, auxquels il est fait référence. La délégation a proposé de transmettre ces informations par écrit au Comité.

L'Institut des statistiques veille, pour sa part, à disposer de données ventilées par sexe. Il envisage de créer un module spécial concernant le troisième âge, afin de prendre en compte l'évolution démographique du pays.

Face à des préoccupations exprimées par une experte s'agissant des ressources consacrées à la mise en œuvre et la promotion de l'égalité des sexes, la délégation a reconnu qu'après les élections de 2013, le Gouvernement avait décidé de s'appuyer sur une administration resserrée mais efficace. Le Ministère du bien-être social et de la jeunesse a créé un réseau de fonctionnaires chargés de l'égalité des sexes dans 18 ministères. Les performances de ces fonctionnaires en matière de promotion et de mise en œuvre de l'égalité sont régulièrement évaluées. Le Gouvernement s'attelle également à développer les compétences de ces fonctionnaires. Le nombre de personnes dans l'administration a, certes, été réduit, mais le travail pour l'égalité des sexes se poursuit.

Plus généralement, la délégation a estimé que beaucoup de choses avaient été faites en Albanie en matière de mise en œuvre et de promotion de l'égalité. Cet aspect a été intégré dans les sphères politiques et décisionnelles, ce qui constitue un progrès. La délégation a toutefois reconnu qu'il était toujours possible de faire davantage.

Le nombre de femmes au sein de la police a augmenté de 14%. Une politique a été mise en place pour soutenir la promotion féminine dans la gendarmerie nationale. Cinq femmes ont suivi ces cours et occupent maintenant des postes de direction.

S'agissant des «mesures spéciales temporaires», un amendement a été apporté à la loi électorale: la parité des sexes des candidats s'impose maintenant pour les élections locales. La loi électorale prévoit en outre des sanctions en cas de non-respect de ces dispositions par les partis politiques.

La situation économique des femmes s'est également améliorée, les femmes pouvant maintenant se voir octroyer une aide financière pour la famille, ce qui était jusqu'à présent réservé aux hommes. Leur rôle au sein de la famille en sort renforcé.

La délégation a affirmé que plusieurs campagnes de sensibilisation étaient menées en faveur des droits des femmes qui incluent notamment la lutte contre les stéréotypes et qui révèlent les pratiques préjudiciables. Elle a fait référence en particulier à la campagne générale de 16 jours menée depuis plusieurs années contre la violence à l'égard des femmes et dont le mot d'ordre est de faire participer les hommes et les garçons. Une autre campagne intitulée «Il pour elle» est menée depuis deux ans. Par ailleurs, un réexamen des programmes scolaires a entrepris d'en éliminer les stéréotypes.

Des campagnes de sensibilisation sont menées pour lutter contre les mariages précoces. Le Gouvernement met aussi l'accent sur l'éducation des jeunes filles, en particulier celles issues des communautés rom et égyptiennes, sujettes à ces mariages. La délégation a par ailleurs expliqué que les organisations de la société civile œuvraient au sein de ces communautés pour assurer une formation en matière de planification familiale. Elle a précisé que ces activités contribuaient aussi à éviter les mariages précoces.

La délégation a expliqué que des discussions étaient en cours pour envisager l'éventualité de modifier la loi sur les droits patrimoniaux, au cours desquelles la nécessité de modifier certains articles du Code civil et du Code de la famille a été soulevée. Le Gouvernement souhaite aussi une modification du droit. Les lois sont en train d'être passées en revue afin de mieux défendre les droits des femmes en la matière. Toutes les modifications nécessaires seront apportées pour permettre aux femmes d'avoir des droits égaux à ceux des hommes.

En ce qui concerne la violence domestique, la délégation a expliqué que la structure de coordination établie en vertu de la Convention d'Istanbul est le Conseil national pour l'égalité des sexes. C'est l'organe chargé de traiter des cas de violence domestique et sexiste. Plusieurs refuges ont été ouverts ces dernières années offrant assistance aux femmes victimes de la violence. En outre, il existe une base de données en ligne pour les cas de violences domestiques.

Le Gouvernement tient compte des recommandations du Défenseur du peuple albanais. Si des recommandations n'ont pas été suivies d'effet, cela tient probablement à l'actuelle réforme en cours. En effet, l'Albanie est à un tournant important, puisqu'elle procède actuellement à une réforme juridique par la modification de la loi sur la justice qui prévoit de nombreux amendements.

Il n'y a aucune lacune en matière de services, de soins et de conseils à l'attention des victimes de la traite, a assuré la délégation.

S'agissant de la représentation des femmes, la délégation a indiqué que le Parlement comptait 22% de femmes, un taux qui dépasse les 30% dans les conseils municipaux. Dans le système judiciaire, les femmes sont représentées à hauteur de 37%. Au niveau diplomatique, environ 20% des ambassadeurs sont des femmes. Par ailleurs, l'année 2015 a vu la nomination de la première femme cheffe de la police; 51% des détenteurs de doctorats sont des femmes et 62% des professeurs d'université sont des femmes, même si les rectorats sont à majorité masculine. Enfin, 28,5% de femmes sont à la tête d'entreprises. La délégation a précisé que les autorités étaient conscientes des efforts qu'il restait à faire pour assurer pleinement la participation des femmes dans toutes les sphères de la vie publique et politique.

En matière d'éducation, la délégation a indiqué que 2,75% de la population albanaise de plus de 10 ans était illettrée, précisant que ce chiffre montrait les efforts consentis par l'État pour lutter contre ce phénomène. Le Ministère de l'éducation a décidé de lutter contre l'abandon scolaire des filles en milieu rural. Plusieurs mesures ont été prises pour réduire les frais de scolarité et pour faciliter l'accès des écoliers à des cours de soutien scolaire. Le Gouvernement a aussi prévu un budget spécifique consacré à l'éducation des filles qui vivent à plus de cinq kilomètres d'une école, pour les aider à s'acquitter des coûts de transport. Enfin, une nouvelle initiative lancée en 2013 et à laquelle plus de 200 établissements scolaires participent propose des cours supplémentaires pour les enfants ayant abandonné l'école mais désireux de reprendre leur scolarité, dont des jeunes rom.

Répondant aux questions portant sur les frais de scolarité, la délégation a rappelé que l'éducation de base était gratuite en Albanie. Seule l'éducation post-secondaire implique des frais. Les enfants issus des minorités rom et égyptienne bénéficient de tarifs préférentiels.

L'écart salarial entre hommes et femmes était de 35% en 2005, 14% en 2013, et 6,9% en 2015. Pour expliquer cette amélioration spectaculaire, la délégation a précisé que la majorité des personnes travaillant dans l'éducation et la santé, par exemple, étaient des femmes, des secteurs où les salaires ont fortement augmenté. De plus, les mesures prises pour améliorer les capacités de gestion et d'entrepreneuriat des femmes ont contribué aussi à réduire l'écart salarial.

L'État souhaite assurer une couverture universelle de santé, a expliqué la délégation. L'ensemble du système de soins de santé offre par ailleurs des contraceptifs gratuits. Il existe aussi un réseau d'organisations de la société civile qui offrent les mêmes services. «L'accès aux moyens de contraception est total», a assuré la délégation.

Le nombre d'avortements est en diminution en Albanie, de 5% voire 6% par an. L'avortement n'est permis que dans les maternités et hôpitaux publics. Les cliniques privées ne sont plus autorisées à pratiquer ces interventions. À l'experte qui s'inquiétait, par ailleurs, de l'éventualité d'avortements forcés sélectifs qui seraient pratiqués en fonction du sexe du fœtus, la délégation a répondu que, sans pouvoir affirmer qu'il n'existait aucun cas, il s'agirait cependant d'une pratique culturelle circonscrite aux zones rurales. En aucun cas, des lacunes dans la loi ou dans les soins de santé permettraient de telles interruptions sélectives de grossesse. Il est exact, toutefois, qu'il y a plus de naissances de garçons que de filles, puisqu'il naît en Albanie 111 garçons pour 100 filles, alors que les taux moyens habituels sont plutôt de 105 garçons pour 100 filles. La délégation a indiqué que le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) avait mené deux études pour comprendre les raisons de ce déséquilibre mais qu'il n'avait pu trouver d'explication. Pour conclure sur ce point, la délégation a précisé qu'en 1991, l'Albanie comptait 2 200 filles «en moins»; en 2012 ce chiffre est tombé à 600, ce qui témoigne d'une diminution du phénomène.

La délégation a indiqué que les pratiques visant à priver les enfants de scolarité en raison de dettes de sang existait encore en Albanie. Celles-ci concernaient dernièrement 16 enfants, dont cinq filles. Le Ministère de l'éducation essaie d'aider ces familles à sortir de l'isolement. Des programmes ont été mis en œuvre, impliquant les enseignants. En 2016, seulement trois enfants étaient isolés pour ces raisons, dont deux filles.

Grâce aux modifications apportées à certaines dispositions touchant à l'égalité entre hommes et femmes dans le Code du travail, il est désormais très facile de prouver les cas de discrimination dans le monde professionnel puisque le fardeau de la preuve a été transféré à l'accusé. Des modifications ont en outre été apportées concernant le congé maternité et le délai de retour au travail après une naissance. Les hommes se sont aussi vus octroyer la possibilité de prendre un congé paternité.

La délégation a précisé qu'à l'instar d'autres pays issus du communisme, l'Albanie avait un Code de la famille accordant plus de droits aux hommes, notamment concernant la propriété. Des consultations sont actuellement menées pour en modifier certaines dispositions.

La promotion de l'entrepreneuriat auprès des femmes des zones rurales a fait l'objet de plusieurs programmes. Une enveloppe budgétaire de 1,4 million de lek a été prévue par le Ministère de l'agriculture pour les services de conseils aux femmes. Il y a aujourd'hui une augmentation de 5% du nombre d'entrepreneurs femmes dans le domaine de l'agriculture, s'est félicitée la délégation.


En conclusion, MME MERITA XHAFAJ, Directrice générale du Département des politiques sociales au Ministère du bien-être social et de la jeunesse d'Albanie, a assuré que les autorités albanaises prendraient les mesures nécessaires pour améliorer l'égalité hommes-femmes. Les recommandations du Comité seront très utiles à cet égard.


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CEDAW16.023F