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À L'OCCASION DU TRENTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA DÉCLARATION SUR LE DROIT AU DÉVELOPPEMENT, LE CONSEIL TIENT UN DÉBAT SUR LA PROMOTION DE CE DROIT

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, une réunion-débat sur la promotion et la protection du droit au développement, dans le cadre de la célébration du trentième anniversaire de l'adoption par l'Assemblée générale de la Déclaration sur le droit au développement.

Les panélistes étaient: Mme Flavia Piovesan, Secrétaire en charge des droits de l'homme au Ministère de la justice du Brésil; M. Wayne MC Cook, Représentant permanent de la Jamaïque auprès des Nations Unies à Genève; M. Mihir Kanade, Chef du Département de droit international et des droits de l'homme, Directeur du Centre des droits de l'homme de l'Université pour la paix de San José, Costa Rica; et M. Martin Khor, Directeur exécutif du Centre Sud, Genève.

Dans ses remarques liminaires, le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein, a estimé que depuis l'adoption de la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement, certains progrès ont été accomplis, même s'ils ont été inégaux, en particulier pour les pays les moins développés ou en développement, ainsi que pour les personnes défavorisées au Nord et au Sud. Il s'est en outre félicité du Programme de développement durable à l'horizon 2030, du Programme d'action d'Addis Abeba sur le financement du développement et de l'Accord de Paris sur le climat. Il faut maintenant que les moteurs de la mondialisation, en l'occurrence le commerce, l'investissement, les finances et la propriété intellectuelle, soient rendus compatibles avec les obligations des États au regard des droits de l'homme, a souligné le Haut-Commissaire.

Le débat de ce matin était animé par M. Amr Ramadan, Représentant permanent de l'Égypte auprès des Nations Unies à Genève. Ce dernier a souligné le rôle clef joué en son temps par le Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement, créé par la Commission des droits de l'homme et dont le mandat consistait à examiner les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Déclaration. Il a estimé que la réunion-débat devrait porter sur le rôle des Nations Unies et de ses mécanismes, mais aussi sur le rôle de la coopération internationale pour réaliser les objectifs entérinés par la Déclaration, ainsi que sur les voies à explorer pour renforcer les capacités dans le domaine du droit au développement.

En tant que panélistes, Mme Piovesan, a expliqué que la Déclaration sur le droit au développement avait permis d'introduire une dimension droits de l'homme dans la définition du développement, en plus des seuls indicateurs économiques. Cependant, les trois grandes composantes qui sont désormais prises en compte, à savoir la justice sociale, la participation et la coopération internationale, ne sont toujours pas pleinement remplies, avec une pauvreté qui se généralise et se féminise, la démocratie qui n'est pas installée dans tous les pays du monde et la coopération internationale qui, elle non plus, n'est pas pleinement effective. Cela montre aussi que le développement est un processus, a expliqué la panéliste.

M. McCook a ajouté que le droit au développement implique également la pleine réalisation du droit des peuples à l'autodétermination et la pleine souveraineté des peuples sur leurs richesses et ressources, d'autant que la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement dérive directement de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Il faut donc mettre fin à la hiérarchie entre les droits et se consacrer au contraire à leur réalisation pour tous, a-t-il souligné.

M. Kanade a notamment insisté sur la nécessité d'assurer la participation de toutes les parties et le respect des priorités de développement des peuples et des États. Il a également souligné l'importance, pour les bailleurs de fonds lorsqu'ils apportent une aide financière et technique, de respecter les principes des droits de l'homme.

M. Khor a pour sa part identifié cinq obstacles à la réalisation du droit au développement. Il a cité la crise économique, qui entraine une chute des échanges, des investissements, des monnaies et place ainsi les pays endettés à la merci des fonds vautours. Le second défi est la capacité de nombreux États à appliquer leurs programmes de développement dans les domaines de la santé, de l'alimentation ou même des infrastructures. Les troisième et quatrième défis touchent aux changements climatiques et à leurs conséquences, y compris en matière de santé publique. Le dernier obstacle est la disponibilité des ressources et technologies pour réaliser les objectifs de développement, les pays pauvres n'ayant pas toujours accès aux technologies, notamment pour la fabrication des médicaments.

Au cours du débat qui a suivi, les délégations ont dans leur majorité réaffirmé leur attachement au droit au développement, qualifié de droit à part entière, universel et inaliénable. Il ne peut y avoir de hiérarchie entre les droits, ont souligné nombre d'intervenants, déplorant que certains veuillent nier le droit au développement et privilégier d'autres droits.

Ce constat dressé, de nombreuses délégations* ont demandé l'opérationnalisation du droit au développement. Selon elles, sa mise en œuvre passe par une coopération internationale renforcée, notamment par l'établissement d'un cadre propice aux échanges mondiaux, la mise à disposition de ressources suffisantes et le transfert de technologies en direction des pays les moins développés. À cette fin, le programme de développement durable à l'horizon 2030, de même que le Programme d'action d'Addis-Abeba ou l'Accord de Paris sur le climat constituent des cadres pertinents pour lever les entraves à la mise en œuvre de la Déclaration sur le droit au développement, a-t-il été souligné. L'adoption d'une convention sur le droit au développement est à envisager, ont ajouté plusieurs délégations. Une délégation a toutefois estimé que le droit au développement n'était pas une condition nécessaire au plein respect des droits de l'homme.


Le Conseil poursuivait ensuite à la mi-journée son débat interactif groupé avec le Rapporteur spécial sur le droit à la santé et avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des personnes en particulier les femmes et les enfants, qui ont tous deux présenté leurs rapports hier après-midi.


Réunion-débat sur la promotion et la protection du droit au développement

La séance s'est ouverte par la projection d'un court-métrage réalisé par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme à l'occasion du trentième anniversaire de l'adoption de la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement.

Déclarations liminaires

M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a déclaré qu'il y a trente ans, la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement avait constitué une percée dans le combat pour plus de liberté, d'égalité et de justice. Le texte de la Déclaration pose notamment le principe l'égalité pour tous les peuples et toutes les nations – y compris le droit à l'autodétermination et à la souveraineté sur les ressources naturelles. L'accent principal de la Déclaration porte sur la personne humaine, appelée à participer pleinement et librement à la prise des décisions vitales, a souligné le Haut-Commissaire. Elle défend aussi l'égalité des chances et la distribution équitable des ressources économiques, notamment pour les personnes traditionnellement marginalisées, impuissantes et exclues du développement, comme les femmes, les minorités, les peuples autochtones, les migrants, les personnes âgées, les personnes handicapées et les pauvres.

M. Zeid a indiqué qu'en jetant un pont entre les droits de l'homme et les relations internationales, la Déclaration préconise une meilleure gouvernance du cadre économique international et redéfinit le développement d'une manière plus approfondie, élargie et complexe que dans la vision étriquée des décennies passées, laquelle reposait sur la croissance et le profit. Le Haut-Commissaire a estimé que le bien-fondé de cette approche multidimensionnelle avait résisté à l'épreuve du temps.

Dans le contexte d'une croissance économique faible et de la chute des prix des matières premières, ce trentième anniversaire rappelle à la communauté internationale l'objectif profond du développement: améliorer le bien-être de tous les membres de la société, a souligné M. Zeid, pour qui le développement réel génère davantage de justice sociale, moins d'exploitation et réduit les inégalités qui privent de leurs droits fondamentaux les personnes marginalisées et pauvres.

Le Haut-Commissaire a ensuite affirmé que les progrès accomplis depuis l'adoption de la Déclaration sur le droit au développement avaient été inégaux, en particulier pour les peuples africains, les pays les moins développés, les pays en développement enclavés, les petits États insulaires en développement et les nations en développement en général. L'encadrement insuffisant de la mondialisation, la pauvreté et les inégalités croissantes privent de nombreuses personnes de la jouissance de leurs droits et alimentent crises et conflits. Cette violence, a-t-il ajouté, détruit à son tour les acquis du développement si durement gagnés, comme elle tue et déplace des personnes, en une terrible spirale de souffrances pourtant évitables.

Le Haut-Commissaire s'est félicité, en revanche, du Programme de développement durable à l'horizon 2030, du Programme d'action d'Addis Abeba sur le financement du développement et de l'Accord de Paris sur le climat, qui établissent des programmes détaillés et réalistes, capables de garantir la jouissance des droits de l'homme par des millions de personnes. La Déclaration sur le droit au développement donne aussi des réponses pour remédier aux déficits de réglementation de la mondialisation.

Le Haut-Commissaire a plaidé pour que les moteurs de la mondialisation – commerce, investissement, finances et propriété intellectuelle – soient rendus compatibles avec les obligations des États au regard des droits de l'homme. Le développement mondial ne saurait signifier que l'on refuse l'accès aux médicaments essentiels et aux moyens de subsistance, ni que l'on autorise les pays à crouler sous le fardeau d'une dette insoutenable, a souligné le Haut-Commissaire.

M. Zeid a assuré que le Haut-Commissariat continuerait d'aider tous les États et les parties prenantes à assumer leurs obligations individuelles et collectives dans la réalisation du droit au développement.

Animant ce débat, M. AMR RAMADAN, Représentant permanent de l'Égypte auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a fait observer que l'importance de cette réunion-débat tient non seulement à son thème, mais également à l'opportunité qu'elle offre de s'intéresser aux progrès réalisés dans le domaine du développement. Alors que la communauté internationale fête le trentième anniversaire de la Déclaration sur le droit au développement qui a consacré ce dernier comme droit à part entière, force est de constater que les progrès ont été mitigés, comme en attestent les situations dans les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement. M. Ramadan a attiré l'attention sur trois instruments utiles pour relever les défis: le Programme de développement durable à l'horizon 2030, le Programme d'action d'Addis Abeba pour le financement du développement et l'Accord de Paris sur le climat. Il a également souligné le rôle clef joué en son temps par le Groupe intergouvernemental d'experts sur le droit au développement, mécanisme créé par la Commission des droits de l'homme et dont le mandat consistait à examiner les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Déclaration.

La réunion-débat devrait porter sur le rôle des Nations Unies et des mécanismes des droits de l'homme pour la mise en œuvre du droit au développement; sur la contribution possible des Nations Unies pour surmonter les difficultés dans la réalisation du droit au développement; sur le rôle de la coopération internationale pour réaliser les objectifs entérinés par la Déclaration; et sur les voies à explorer pour renforcer les capacités dans le domaine du droit au développement.

Exposés des panélistes

MME FLAVIA PIOVESAN, Secrétaire en charge des droits de l'homme au Ministère de la justice du Brésil, a observé que trente ans après l'adoption de la Déclaration sur le droit au développement, on constate que ce document important a permis de définir ce qu'est le développement, pour y adjoindre, au-delà des seuls indicateurs économiques, une dimension de droits de l'homme. On considère que le droit au développement contient désormais trois composantes nécessaires: la justice sociale, la participation et la coopération internationale. Cependant, les inégalités ne cessent de se creuser. La pauvreté ne cesse de se féminiser et de se généraliser: 60 pourcent des pauvres sont des femmes et 80 pourcent de la population se partage seulement six pourcent de la richesse mondiale. La démocratie ne prévaut pas encore dans tous les pays. Enfin, la coopération internationale, bien que faisant partie des obligations des États et mentionnée, notamment, dans le programme de développement durable à l'horizon 2030, n'est toujours pas pleinement effective. Compte tenu de ces réalités, il faut admettre que le développement est un processus, a expliqué la panéliste.

M. WAYNE MCCOOK, Représentant permanent de la Jamaïque auprès des Nations Unies à Genève, a jugé nécessaire que chacun ait la possibilité de participer et de contribuer au développement économique, social, culturel et politique grâce auquel sont réalisés les droits et libertés fondamentales de tous. Le droit au développement implique également la pleine réalisation du droit des peuples à l'autodétermination, lequel suppose à son tour, conformément aux dispositions pertinentes des deux pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, l'exercice du droit inaliénable à la pleine souveraineté des peuples sur leurs richesses et ressources, a expliqué M. McCook. La Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement dérive de la dignité inhérente de toute personne humaine, elle-même fondée sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, a poursuivi le représentant jamaïcain. Il s'est enorgueilli que la proclamation de Téhéran, adoptée le 13 mai 1968 par la Conférence internationale sur les droits de l'homme, ait été proposée par la Jamaïque en 1967. M. McCook a plaidé pour la suppression de toute hiérarchie entre les droits et pour la réalisation de tous les droits, au profit de tous.

M. MIHIR KANADE, Chef du Département de droit international et des droits de l'homme, Directeur du Centre des droits de l'homme de l'Université pour la paix de San José, Costa Rica, a affirmé que l'opérationnalisation effective du droit au développement est indispensable à la réalisation des objectifs de développement durable. De fait, le Programme de développement durable à l'horizon 2030 se base sur le droit au développement et s'inspire explicitement de la Déclaration de 1986. Selon M. Kanade, la mise en œuvre effective du droit au développement se révèle même la manière la plus judicieuse de réaliser les objectifs du développement durable. Plus concrètement, il préconise de ne pas mettre l'accent uniquement sur le résultat, mais également sur les moyens d'y parvenir. Ceci inclut la participation de toutes les parties prenantes et le respect des priorités de développement des peuples et des États. Le développement, pour être durable, ne doit pas être vu comme de la charité, de la générosité ou un privilège, mais bien comme un droit pour tous.

L'opérationnalisation du droit au développement requiert une approche globale et multisectorielle, ce qui signifie que les objectifs du développement durable doivent être réalisés dans le respect des droits de l'homme: «aucun but ne doit être atteint au prix d'un autre droit humain, a insisté M. Kanade». Enfin, il a relevé l'importance que les bailleurs de fonds n'oublient pas qu'ils sont tenus de respecter les principes des droits de l'homme lorsqu'ils apportent une aide financière et technique. Concrètement, les bailleurs de fonds doivent veiller à ce que les pays en développement aient l'espace politique nécessaire pour définir leurs propres priorités de développement et leurs propres mécanismes pour la réalisation des objectifs du développement durable.

Pour M. MARTIN KHOR, Directeur exécutif du Centre Sud, Genève, l'application effective du droit au développement exige que l'on surmonte au préalable cinq grands obstacles. Le premier est la crise économique, au cours de laquelle les échanges, les investissements, les monnaies se sont effondrés et de nombreux pays se sont fortement endettés. Le second défi est la capacité de nombreux États à appliquer leurs programmes de développement dans les domaines de la santé, de l'alimentation ou même des infrastructures. Le troisième défi touche aux changements climatiques qui impactent aujourd'hui les pays les plus pauvres surtout, a poursuivi M. Khor. Le quatrième défi, conséquence du changement climatique, est la résistance aux médicaments, qui va précipiter le monde dans l'ère post-antibiotique. Le dernier obstacle est le fait que les pays pauvres ne disposent pas des technologies pour atteindre les objectifs de développement. Si l'on ne tient pas compte de ces éléments, on réalisera ni les objectifs ni le droit au développement, a mis en garde le panéliste.

Débat interactif

La République islamique d'Iran, au nom du Mouvement des pays non alignés, a appelé à trouver la volonté politique pour la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement, un droit humain inaliénable. Le Mouvement appelle les institutions financières internationales et les institutions des Nations Unies à tenir compte de ce droit dans leur programmation. L'Union européenne a affirmé que le Programme de développement durable à l'horizon 2030 est la feuille de route de toutes les parties prenantes, y compris la société civile et le secteur privé. La déléguée a insisté sur la création d'un mécanisme d'examen et de suivi de ce programme. La Chine a trouvé que la mise en œuvre de la Déclaration n'avait pas répondu aux attentes. Les objectifs et cibles du Programme de développement durable à l'horizon 2030 doivent être considérés comme autant de mesures concrètes. La Chine a recommandé d'accorder une assistance technique aux États qui en ont besoin.

La République dominicaine, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a saisi l'occasion du trentième anniversaire de l'adoption de la Déclaration pour lancer un appel à redoubler d'efforts en vue de la promotion et de la protection effective du droit au développement. L'Afrique du Sud, au nom du Groupe africain, a rappelé que le droit au développement était une priorité pour l'Afrique bien avant l'adoption de la Déclaration. Le Groupe africain estime que le droit au développement est un droit de l'homme universel, qui appartient à tous les peuples. Il a invité à lever toute entrave à la réalisation de ce droit. Il serait opportun que le Conseil des droits de l'homme prenne des initiatives plus résolues en vue de la promotion du droit au développement, a demandé le Brésil, au nom des pays lusophones. Ces pays recommandent un renforcement de l'aide publique au développement et de la coopération internationale.

La Tunisie a jugé que l'adoption à l'unanimité par l'Assemblée générale du Programme de développement durable à l'horizon 2030 constitue un pas important vers la reconnaissance universelle et la mise en œuvre effective du droit au développement pour créer enfin les conditions propices au respect de tous les droits de l'homme dans tous les pays. Le Nigéria a appelé à la création d'un environnement international et national propice au développement des populations et des individus. Pour atteindre les objectifs du développement durable, ce pays a préconisé d'accorder la priorité au droit au développement. El Salvador a recommandé d'examiner le droit au développement à la lumière de l'élan donné par toutes les grandes conférences tenues dernièrement sous l'égide des Nations Unies. Le modèle économique et financier actuel n'est pas durable, a-t-il tranché, comme en témoigne la persistance de la pauvreté et des disparités sociales. Plus que jamais, la coopération internationale revêt une importance fondamentale. Les Émirats arabes unis ont rendu hommage au Groupe de travail sur le droit au développement qui s'est évertué à combler les lacunes dans l'application de ce droit.

L'Éthiopie a rappelé, pour sa part, l'adoption en juillet dernier du Programme d'action d'Addis-Abeba sur le financement du développement, qui permettra le financement des dix-sept objectifs du développement durable. La Namibie a attiré l'attention sur les difficultés économiques auxquelles les pays en développement sont confrontés dans la réalisation du droit au développement pour leurs populations, en particulier la fourniture de services de base comme l'éducation, l'eau et l'assainissement et un logement décent.

Pour la République islamique d'Iran, le droit au développement doit être considéré comme un droit à part entière et ne pas être intégré à d'autres droits. La Déclaration sur le droit au développement est en effet le cadre dans lequel les États ont reconnu leurs responsabilités internationales en faveur du développement, a dit la représentante de la Sierra Leone, ajoutant que le Programme d'action d'Addis-Abeba offre un cadre pertinent pour la mise à disposition des ressources suffisantes à la réalisation de ce droit. Tout en reconnaissant l'importance de la Déclaration sur le droit au développement, l'Afrique du sud a ajouté qu'en absence de coopération internationale effective, il est essentiel que la communauté internationale élabore une convention internationale sur le droit au développement. En attendant, quel rôle peut jouer le secteur privé pour promouvoir de droit, a-t-elle demandé?

Le Venezuela a indiqué qu'il continuerait lui aussi de plaider pour que le droit au développement reste un droit distinct et inaliénable. Mais pour qu'il puisse se réaliser, il faut encourager un environnement favorable, de coopération sincère, sans conditionnalité ni privilèges. L'Équateur a rappelé qu'il plaidait pour une lutte contre les inégalité à l'intérieur, mais aussi à l'extérieur. Il faut en effet que les pays riches ne dressent pas des barrières aux produits des pays pauvres, a souligné Cuba, insistant aussi sur le rôle de la coopération internationale. On ne peut en effet pas opérer une sélection entre les droits de l'homme, a déclaré la Malaisie, plaidant pour que le système international participe aux efforts communs visant la réalisation du droit au développement.

L'Égypte a observé que les documents internationaux sont légion en matière de développement, sans pour autant être pleinement mis en œuvre. La coopération internationale et les transferts de technologies restent les pierres d'achoppement pour parvenir aux objectifs fixés, a souligné le pays, ajoutant être engagé dans un processus interne pour réaliser le droit au développement, sans être sûr d'y parvenir. Il faut aller au-delà des mots négociés dans les textes et mettre à disposition les ressources suffisantes, a pour sa part souligné le Bangladesh . C'est exactement dans cette optique que s'inscrit l'Arabie saoudite , qui consacre 4% de son PIB à l'aide internationale en faveur du développement. L'Indonésie , pour sa part, reconnaît que les pays peuvent avoir des niveaux de développement différents et est d'avis que le développement globalisé ne peut se faire que par le biais de la coopération internationale afin de combler toutes les lacunes.

Le Pakistan, qui investit beaucoup au plan national, est aussi d'avis que le droit au développement inclut aussi le droit à l'autodétermination, en particulier pour les peuples occupés. Les Philippines ont pour leur part attiré l'attention sur la situation particulière des pays en conflit, sortant de conflit ou en transition et sur leurs besoins spécifiques. Le problème des inégalités est la conséquence directe de l'histoire, du colonialisme et d'une mondialisation inégale, a expliqué la Bolivie. L'élan offert par cette célébration doit fournir l'occasion de relancer le processus, a affirmé Sri Lanka.

Les États-Unis ont pour leur part affirmé que le développement n'était pas une condition nécessaire au plein respect des droits de l'homme. Les États peuvent lutter contre la pauvreté, lutter contre les discriminations, ont-ils souligné.

L'Inde a insisté sur le caractère inaliénable et fondamental du droit au développement, essentiel pour la réalisation de tous les autres droits de l'homme. L'Algérie a souligné que ce droit est à la fois individuel et collectif et exige la création de conditions favorables à l'amélioration de la qualité de vie de tout un chacun au sein de la société. L'Algérie a regretté que les réunions du Groupe de travail sur le droit au développement soient entravées par des désaccords sur ce droit. Le Portugal a estimé que le Programme de développement durable à l'horizon 2030 était sans précédent et que les 17 objectifs représentent un engagement fort pour en finir avec la pauvreté. Le Sénégal a jugé plus que jamais nécessaire de prendre en compte le sort de 2,5 milliards de personnes vivant dans la pauvreté. Il a considéré que ce trentième anniversaire de la Déclaration sur le droit au développement devrait inciter à réfléchir aux voies et moyens de faire de ce droit une réalité en tant que droit inaliénable.

L'Organisation de la coopération islamique a ajouté, pour sa part, que les restrictions aux transferts de technologies vers les pays en développement figurent parmi les raisons qui entravent la pleine jouissance du droit au développement. L'OCI a indiqué avoir créé en son sein une commission chargée de réfléchir au droit au développement parmi ses pays membres.

Plusieurs organisations non gouvernementales ont participé au débat. Le Conseil indien d'Amérique du Sud (CISA) a estimé que, trente ans après l'adoption de la Déclaration et au vu des problèmes qui s'accumulent pour les peuples autochtones notamment, il s'avère chaque jour plus nécessaire d'envisager l'élaboration d'un document contraignant sur le droit au développement. La Commission arabe pour les droits de l'homme a déploré que le Groupe de travail sur le droit au développement n'ait guère avancé depuis 1998 à cause du refus catégorique de certains pays occidentaux de souscrire à plusieurs objectifs du développement. La Commission s'est demandé comment aider les membres du Groupe de travail à surmonter leurs divisions.

Le Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies a recommandé que le Conseil demande à l'Assemblée générale d'inclure la Déclaration sur le droit au développement dans les traités internationaux pour qu'elle bénéficie enfin du retentissement qu'elle mérite.

Action Canada pour la population et le développement a déclaré que les désaccords sur la nature et la définition du droit au développement ne doivent pas détourner l'attention de la nécessité de réaliser les droits de l'homme; or, cette responsabilité incombe aux États. Effectivement le développement relève de la responsabilité des États, même si les individus y ont également leur part à jouer, a poursuivi China Society for Human Rights Studies. Mais comment inventer un partage des ressources quand les États dits développés ont des dettes abyssales, a demandé la représentante de ONG Hope International, avant de juger intéressant de former des groupes de travail composés d'États et de la société civile qui trouverait des réponses dans la cadre d'accords bilatéraux? On pourrait appeler ce processus «l'Examen périodique de développement».

Associazione Comunita Papa Giovanni XXVIII, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1, a regretté que de nombreux individus continuent de souffrir inutilement à cause de l'absence de volonté politique de certains États au sujet du droit au développement et de l'identification des critères. La mise en œuvre du développement est d'autant plus nécessaire que le monde traverse une crise économique et financière sans précédent.

Le Conseil international pour le soutien à des procès équitables et aux droits de l'homme a déploré la corruption et le pillage des ressources des peuples arabes. Il a en outre fait état des difficultés des représentants de la société civile, notamment au Bahreïn et en Arabie Saoudite.

Réponses des panélistes

MME PIOVESAN est revenue sur le rôle que peut jouer le Conseil pour promouvoir et protéger le droit au développement. Selon elle, le Conseil est le lieu où le devoir de coopération se forme. Il importe notamment de placer les êtres humains au centre des efforts de développement; il faut s'intéresser aussi au financement des technologies pour aider les pays en développement à réaliser les objectifs du développement durable. Enfin, Mme Piovesan a relevé l'importance de la parité hommes-femmes et la nécessité d'autonomiser les femmes, condition sine qua non d'un développement authentique.

Constatant la polarité idéologique entre les États qui souhaitent un traité contraignant et ceux qui se contentent d'une Déclaration sur le droit au développement, Mme Piovesan a recommandé de surmonter cette polarité et d'adopter des mesures concrètes pour la réalisation du droit au développement.

Répondant à une question sur les droits des peuples autochtones dans le cadre plus large du droit au développement, M. MCCOOK a préconisé de renforcer le dialogue interne entre les parties intéressées au niveau national, dans le respect de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. Il faut aussi assurer des possibilités de recours à la justice nationale en cas de violation des droits des peuples autochtones, par exemple lors de confiscation de terres. De manière plus générale, M. McCook a rappelé que le droit au développement doit reconnaître aux peuples leur droit inaliénable sur les ressources naturelles. Les pratiques du passé doivent être corrigées.

M. KANADE a estimé que le rôle du Conseil est avant tout de renforcer le droit au développement et de fixer des objectifs pour le réaliser – de donner une marche à suivre, en quelque sorte. Le droit au développement n'est pas un privilège, mais un droit, a-t-il insisté. D'autre part, M. Kanade a estimé que les procédures spéciales qui ont un mandat de pays doivent promouvoir la coopération en matière de développement. Enfin, le Conseil peut jouer un rôle grâce à l'éducation aux droits de l'homme.

M. Kanade a fait observer que la coopération internationale ne porte pas uniquement sur le volet financier mais également sur le renforcement des capacités. Les pays qui reçoivent cette coopération doivent pouvoir décider de leurs priorités de développement, a-t-il insisté.

Pour M. KHOR, le Conseil joue un rôle de la plus haute importance en continuant à promouvoir ce droit, en organisant d'autres débats de ce type et en supervisant les activités qui, au sein du Conseil, sont pertinentes pour le droit au développement. À titre d'exemple, il a fait remarquer que les travaux sur les droits des paysans menés par le Conseil sont très pertinents pour le droit au développement. Enfin, il a préconisé d'établir des liens entre le Conseil et le Secrétariat des objectifs du développement durable, certains de ces objectifs étant étroitement liés au droit au développement, comme l'objectif n°7 sur l'accès à l'énergie et l'objectif n°10 sur la réduction des inégalités.

M. Khor a relevé le rôle joué dans le contexte du droit au développement par les acteurs non étatiques et les sociétés transnationales. Il a souligné que des mesures doivent être prises lorsque les sociétés transnationales ne respectent pas les droits de l'homme tels qu'ils sont consacrés dans les Principes directeurs de l'ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme.
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*Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat interactif: Afrique du Sud (au nom du Groupe africain et en son nom propre), Algérie, Arabie saoudite, Bangladesh, Bolivie, Brésil (au nom des pays lusophones), Chine, Cuba,Égypte, El Salvador, Émirats arabes unis, Équateur, États-Unis, Éthiopie, Inde, Indonésie, Malaisie, Namibie, Nigéria, Organisation de la coopération islamique, Pakistan, Philippines, Portugal, République islamique d'Iran (au nom du Mouvement des pays non alignés et en son nom propre),République dominicain (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes), Sénégal, Sierra Leone, Sri Lanka, Tunisie, Union européenne, Venezuela.

**Les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat interactif: Conseil indien d'Amérique du Sud (CISA), Commission arabe des droits de l'homme, Mouvement international de la jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies, Action Canada pour la population et le développement, China Society for Human Rights Studies, ONG Hope International, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), et le Conseil international pour le soutien à des procès équitables et aux Droits de l'Homme.

1Déclaration conjointe: Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Organisation internationale pour le droit a l'éducation et a la liberté d'enseignement (OIDEL); Institution Teresiana; Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul; Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs; Pax Christi International, mouvement international catholique pour la paix; Edmund Rice International Limited; New Humanity; Mouvement International d'Apostolate des Milieux Sociaux Independants; Association Points-Cœur ; Volontariat international femmes éducation et développement; Istituto Internazionale Maria Ausiliatrice delle Salesiane di Don Bosco.


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HRC16/068F