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LE COMITÉ DES DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES EXAMINE LE RAPPORT DE LA LITUANIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par la Lituanie sur les mesures qu'elle a prises pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Présentant ce rapport, Mme Algimanta Pabedinskiené, Ministre de la sécurité sociale et du travail de la Lituanie, a rappelé que son pays avait hérité quantité de problèmes de l'ancien système d'État-parti. Elle a indiqué que la Lituanie comptait environ 250 000 personnes handicapées, soit un peu plus de 8% de la population totale. Le nombre d'enfants handicapés est de 15 000; quant au nombre d'adultes handicapés en âge de travailler, il est de 169 000 dont 47 000 ont effectivement un emploi, a-t-elle précisé. Les politiques gouvernementales visent à assurer l'égalité et la non-discrimination, a poursuivi la Ministre. La Lituanie évolue actuellement du modèle médical vers le modèle psychosocial de l'approche du handicap, a-t-elle fait valoir.

La Lituanie a aboli la loi réglementant l'éducation spécialisée, a ensuite souligné Mme Pabedinskiené. La législation afférente à la capacité juridique personnelle a quant à elle été réformée, des amendements ayant été apportés aux limitations dont la capacité juridique pouvait faire l'objet. Par ailleurs, un projet de loi prévoit la possibilité de voter par Internet, ce qui devrait être effectif dès le prochain scrutin, prévu en 2019, a fait valoir la Ministre. Afin d'en finir avec les effets néfastes du placement en institution, avec l'aide de l'Union européenne, a été créée une infrastructure de soins ambulatoires pour les enfants et les personnes handicapées, a par ailleurs indiqué Mme Pabedinskiené. Toutefois, le nombre de personnes en institution ne diminue pas aussi vite qu'on aurait pu l'espérer, a-t-elle reconnu. Une autre question pressante est celle de l'accessibilité, a poursuivi la Ministre, précisant que l'État finance en grande partie l'adaptation des immeubles d'habitation. La route, le rail, les transports aériens et maritimes ont été au moins partiellement adaptés, a-t-elle également fait valoir. Il en a été de même avec les établissements de santé. Par ailleurs, afin d'améliorer l'information des personnes handicapées, des budgets ont été débloqués l'an dernier afin de fournir des interprètes en langue des signes. Beaucoup a été fait mais il reste encore beaucoup à faire pour concrétiser la Convention, a conclu la Ministre.

La délégation lituanienne était également composée, entre autres, de Mme Jadbyga Zinkevièiûtë, Vice-Ministre de la santé, et de M. Rytis Paulauskas, Représentant permanent de la Lituanie auprès des Nations Unies à Genève. Elle comprenait également la Directrice générale des Statistiques et un député du Parlement lituanien, ainsi que des représentants des Ministères de l'éducation et de la science; de la justice; des transports et des communications; et de l'environnement.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du Conseil pour les affaires des personnes handicapées; des questions relatives à l'emploi des personnes handicapées; des plaintes pour discrimination; des questions d'accessibilité; des questions de santé et d'éducation; des questions de justice; de l'incapacité juridique; de la sensibilisation aux droits des personnes handicapées; des châtiments corporels; des mesures prévues en cas de catastrophe ou de situation d'urgence; de l'hospitalisation forcée; de la modernisation des lieux de détention; de la protection contre la violence et de l'assistance aux victimes; de la prise en charge médicale.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Lituanie, M. Stig Langvad, a relevé que la Convention n'était pas encore pleinement incorporée dans le cadre juridique du pays relatif au handicap. Il semble que l'on se trouve en Lituanie face à une absence de stratégie claire et globale s'agissant des questions de handicap, a-t-il déclaré. Passer de l'approche caritative ou médicale du handicap à une approche reposant sur les droits de l'homme implique un infléchissement des programmes et politiques publics en faveur des personnes handicapées, a-t-il souligné. Aussi, la Lituanie doit-elle faire davantage dans un certain nombre de domaines et les lois et réglementations doivent refléter ce changement d'approche, a déclaré le rapporteur. De l'avis de M. Langvad, les mesures prises en faveur de l'accessibilité ne progressent pas suffisamment en Lituanie. D'autre part, la loi contient encore des dispositions qui permettent de priver les personnes handicapées de leur capacité juridique, ce qui est contraire à la Convention, s'est-il inquiété. Par ailleurs, de trop nombreux élèves ne bénéficient pas d'une éducation inclusive, a déploré le rapporteur. Il a en outre jugé bien trop élevé le taux de chômage des adultes handicapés. Il est également inacceptable, dans une démocratie moderne, que l'on prive des électeurs de leur droit de vote sous prétexte de leur handicap, a souligné M. Langvad.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Lituanie et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le jeudi 21 avril prochain.


Cet après-midi et demain matin, le Comité procèdera à l'examen du rapport initial présenté par l'Ouganda (CRPD/C/UGA/1).


Présentation du rapport de la Lituanie

Le Comité est saisi du rapport initial de la Lituanie (CRPD/C/LTU/1), ainsi que des réponses du pays (CRPD/C/LTU/Q/1/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRPD/C/LTU/Q/1).

MME ALGIMANTA PABEDINSKIENÉ, Ministre de la sécurité sociale et du travail de la Lituanie, a rappelé que son pays avait hérité quantité de problèmes de l'ancien système d'État-parti. Elle a précisé que la quasi-totalité des ministères avaient participé à l'élaboration du rapport. Par ailleurs, les organisations représentant les personnes handicapées ont préparé leur propre rapport parallèle, a-t-elle ajouté. Elle a indiqué que la Lituanie comptait environ 250 000 personnes handicapées, soit un peu plus de 8% de la population totale. Des pensions pour invalidité sont versées pour 48% à des hommes et pour 52% à des femmes, a-t-elle précisé. Le nombre d'enfants handicapés est de 15 000, a poursuivi la Ministre. Quant au nombre d'adultes handicapés en âge de travailler, il est de 169 000 dont 47 000 ont effectivement un emploi.

Les politiques gouvernementales visent à assurer l'égalité et la non-discrimination, a poursuivi la Ministre. La Lituanie évolue actuellement du modèle médical vers le modèle psychosocial de l'approche du handicap, a-t-elle fait valoir. Depuis le début de l'année, un plan d'action en faveur de la fourniture de services à la famille à l'horizon 2020 a été lancé, dont le but est d'aider les familles à faire face aux situations critiques et à élever les enfants, en réduisant l'exclusion sociale et en développant les services de proximité, a indiqué Mme Pabedinskiené.

Le Parlement lituanien débat actuellement d'un projet de texte sur les droits de l'enfant qui interdira notamment toute forme de violence, y compris les châtiments corporels, à l'encontre des enfants, a poursuivi la Ministre. Elle a souligné que la Lituanie reprenait à son compte les directives européennes et les recommandations du Conseil de l'Europe. Elle a par ailleurs insisté sur l'importance de garantir les droits des femmes handicapées, rappelant qu'elles étaient menacées d'un risque accru d'exclusion sociale et de pauvreté. Une étude de 2014 a montré que plus de 80% des femmes interrogées témoignaient des difficultés qu'elles éprouvent à trouver du travail. Afin de les soutenir dans cet effort, a été lancé le Plan d'action 2015-2017 pour la mise en œuvre du Programme national d'égalité des chances hommes-femmes, qui vise à combler le fossé séparant les deux sexes. Il s'agit en particulier d'aider les femmes à démarrer une activité professionnelle et à réduire les écarts injustifiés de salaires, tout en incitant à l'embauche de personnes handicapées, a précisé Mme Pabedinskiené.

En matière d'éducation, la Lituanie a aboli la loi réglementant l'éducation spécialisée, a poursuivi la Ministre. S'agissant par ailleurs de la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d'égalité, conformément à la Convention, Mme Pabedinskiené a indiqué que la législation afférente à la capacité juridique personnelle avait été réformée, des amendements ayant été apportés aux limitations dont elle pouvait faire l'objet. Cette réforme permet désormais à la personne handicapée de conclure un accord écrit avec une personne majeure en laquelle elle a pleinement confiance afin que cette dernière l'assiste dans les décisions la concernant dans certains domaines de la vie. Par ailleurs, un projet de loi prévoit la possibilité de voter par Internet, ce qui devrait être effectif dès le prochain scrutin, prévu en 2019, a fait valoir la Ministre.

Afin d'en finir avec les effets néfastes du placement en institution, avec l'aide de l'Union européenne, a été créée une infrastructure de soins ambulatoires pour les enfants et les personnes handicapées, a par ailleurs indiqué Mme Pabedinskiené. Toutefois, le nombre de personnes en institution ne diminue pas aussi vite qu'on aurait pu l'espérer, a-t-elle reconnu. On constate en effet un manque de coopération interinstitutionnelle entre les services sociaux, de santé et éducatifs dans l'organisation et la fourniture d'une assistance à ces personnes, a-t-elle expliqué. En 2014, un plan d'action en faveur de la transition de l'institutionnalisation vers des services de proximité a commencé à être mis en œuvre avec la collaboration des collectivités locales et des associations de personnes handicapées, a précisé la Ministre.

Une autre question pressante est celle de l'accessibilité, a reconnu Mme Pabedinskiené, précisant que l'État finance en grande partie l'adaptation des immeubles d'habitation. La route, le rail, les transports aériens et maritimes ont été au moins partiellement adaptés, a-t-elle fait valoir. Il en a été de même avec les établissements de santé. Par ailleurs, afin d'améliorer l'information des personnes handicapées, des budgets ont été débloqués l'an dernier afin de fournir des interprètes en langue des signes, tout en formant de nouveaux professionnels, a-t-elle ajouté.

Beaucoup a été fait mais il reste encore beaucoup à faire pour concrétiser la Convention, a déclaré la Ministre, avant de faire observer que cet instrument couvre la plupart des grands domaines de la vie publique, ce qui implique une coordination large et globale des mesures prises – des mesures qui doivent s'inscrire dans une vision globale des solutions à apporter et recueillir le consensus le plus large possible. En conclusion, Mme Pabedinskiené a reconnu que la sensibilisation du public demeurait un défi à relever.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. Stig Langvad, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Lituanie, a déclaré qu'il n'était pas dans son rôle premier de souligner les aspects positifs de la situation dans l'État partie. Il s'agit plutôt, a-t-il rappelé, de mettre au jour les sujets de préoccupation et les possibilités d'amélioration. Le principal souci du Comité, a-t-il ajouté, n'est pas tant de savoir ce qui s'est passé depuis la ratification de la Convention mais plutôt de savoir si le fossé entre personnes handicapées et non handicapées a été ou va être réduit. L'objet de ce dialogue est en effet de fournir toute une gamme de propositions concrètes et réalisables susceptibles de permettre la prise en compte et la mise en œuvre de la Convention aux niveaux local, régional, national, européen et mondial.

Pour M. Langvad, si la Convention a pu être négociée avec succès en 2006, après plusieurs tentatives qui s'étaient conclues par des échecs, c'est parce qu'un nombre non négligeable de personnes handicapées ont pu participer à un processus de négociations qui s'est étalé sur six années à l'ONU à New York. Pour la première fois, les personnes handicapées, qui étaient unies au-delà de leur handicap, étaient extrêmement bien préparées à jouer un rôle actif en tant que partenaires de négociation respectés. Ce succès a aussi été dû au fait que pour la première fois également plusieurs futurs États parties soutenaient activement et sans barguigner ce projet très particulier de Convention internationale, ce qui explique qu'elle soit aujourd'hui ratifiée par 80% des membres de la communauté internationale.

Après ce rappel, M. Langvad a abordé la situation lituanienne et a noté en premier lieu que la Convention n'était pas encore pleinement incorporée dans le cadre juridique du pays relatif au handicap. Il semble que l'on se trouve en Lituanie face à une absence de stratégie claire et globale s'agissant des questions de handicap, a-t-il déclaré. Passer de l'approche caritative ou médicale du handicap à une approche reposant sur les droits de l'homme implique un infléchissement des programmes et politiques publics en faveur des personnes handicapées, a-t-il souligné. Aussi, la Lituanie doit-elle faire davantage dans un certain nombre de domaines, a poursuivi le rapporteur. Les lois et réglementations doivent refléter ce changement d'approche, a-t-il insisté. Par ailleurs, les organisations de personnes handicapées et leurs représentants doivent être pleinement et suffisamment soutenus et impliqués dans tous les processus de prise de décision et dans les questions les concernant. De l'avis de M. Langvad, les mesures prises en faveur de l'accessibilité ne progressent pas suffisamment en Lituanie. D'autre part, la loi contient encore des dispositions qui permettent de priver les personnes handicapées de leur capacité juridique, ce qui est contraire à la Convention, s'est inquiété le rapporteur. Quelles mesures ont-elles été prises pour remplacer le placement sous tutelle ou curatelle par une assistance à la prise de décision afin de respecter l'autonomie de la personne, a-t-il demandé?

Par ailleurs, de trop nombreux élèves ne bénéficient pas d'une éducation inclusive, en raison d'une absence de mécanismes de soutien, a poursuivi M. Langvad, avant d'attirer l'attention sur le manque d'enseignants dûment formés pour instruire des élèves handicapés. Le rapporteur a d'autre part jugé bien trop élevé le taux de chômage des adultes handicapés, trop de personnes handicapées étant encore considérées comme incapables de travailler. Il est également inacceptable, dans une démocratie moderne, que l'on prive des électeurs de leur droit de vote sous prétexte de leur handicap, a souligné M. Langvad.

Enfin, le rapporteur a rappelé que la mise en œuvre de la Convention ne saurait se faire toute seule et que la mise en place d'un mécanisme de coordination fort, un point focal central influent, s'imposait à cette fin.

Une autre membre du Comité a demandé si les enfants handicapés étaient impliqués dans les questions les concernant.

Un membre du Comité s'est enquis des possibilités de se déplacer de manière autonome pour un voyageur qui arriverait en avion et souhaiterait aller dans le centre de la capitale lituanienne pour se rendre à son hôtel.

Un expert a souhaité savoir comment la Lituanie réussissait à en finir avec l'héritage du passé, que partagent de nombreux pays est-européens ayant eu le même système politique.

Un expert a souhaité savoir si la Lituanie avait pris des mesures inspirées du Cadre d'action de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes afin de prendre en compte les besoins des personnes handicapées dans ce contexte.

Un autre expert a souhaité avoir des précisions sur l'accessibilité des tribunaux et sur l'usage de la langue des signes. De quelles formations bénéficient les magistrats s'agissant des dossiers qu'ils pourront avoir à traiter impliquant des personnes handicapées.

Un autre a demandé si la délégation avait une explication quant au faible nombre de plaintes pour discrimination.

Par ailleurs, les autorités s'assurent-elles de la pérennité des mesures prises et des services fournis grâce aux fonds structurels européens, une fois que ceux-ci s'achèveront, a-t-il été demandé?

Une experte a demandé si des mesures étaient prises pour ne plus interner contre leur gré et ainsi priver de liberté des personnes handicapées. Des mesures sont-elles également prises pour interdire la stérilisation ou la castration forcées? Une autre experte a rappelé que le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes avait recommandé à la Lituanie d'en finir avec la possibilité légale de pratiquer des stérilisations forcées.

Une experte a évoqué des cas de pédophilie et d'exploitation sexuelle dans des institutions, voire de traite d'enfants handicapés. Des mécanismes de protection sont-ils en place en faveur des enfants placés en institution?

Un expert a souhaité savoir combien d'enfants de moins de 3 ans étaient encore placés en institution. Par ailleurs, toute personne, jeune ou adulte, ayant une déficience a-t-elle l'assurance de ne pas se voir imposer de vivre dans des résidences pour personnes âgées, a-t-il été demandé?

Des formations sont-elles prévues à l'intention des professionnels des soins de santé concernant l'approche du handicap fondée sur les droits de l'homme, a-t-il également été demandé?

Il a été rappelé à la délégation que la possibilité d'accès à un tribunal en fauteuil roulant n'était pas la même chose que l'accès à la justice.

Un membre du Comité a demandé des précisions sur les mesures existantes permettant d'obtenir une assistance personnelle et sur l'origine – locale, nationale ou en provenance des fonds européens – et les modalités de leur financement.

Un expert a demandé si la Lituanie prévoyait de ratifier le Traité de Marrakech visant à faciliter l'accès aux œuvres publiées des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés. Selon un autre membre du Comité, le service public a réduit de moitié ses émissions doublées en langue des signes, qui sont passées de six heures à trois heures. Un expert a demandé si les campagnes électorales étaient sous-titrées.

Une experte a attiré l'attention sur le fait que le bureau du Médiateur ne répondait pas entièrement, en particulier en termes de financement, aux Principes de Paris.

Un membre du Comité a demandé si la Lituanie disposait d'un plan visant à passer d'un système reposant sur l'éducation spécialisée à un système inclusif.

Une experte a souhaité savoir quelle proportion des fonds européens allait aux programmes d'emploi sur le marché du travail au sens large, par rapport aux subventions en faveur des emplois réservés à des personnes handicapées.

Réponses de la délégation

L'une des principales institutions représentant les personnes handicapées et leurs organisations est le Conseil pour les affaires des personnes handicapées, a rappelé la délégation.

Les textes de loi pertinents pour les personnes handicapées sont rédigés par les institutions publiques responsables en coordination avec les associations de personnes handicapées, a souligné la délégation. Les subventions aux associations de personnes handicapées avaient baissé ces dernières années, mais elles sont désormais à la hausse depuis 2015, a-t-elle précisé. Concrètement, le Conseil pour les affaires des personnes handicapées est en charge de la surveillance de la mise en œuvre de la Convention, a indiqué la délégation; il soumet au Ministre du travail et de la sécurité sociale des propositions relatives à la mise en œuvre de la Convention. Le Bureau du Médiateur doit pour sa part contrôler la mise en œuvre des dispositions de la Convention relatives à l'égalité de traitement, en enquêtant sur les plaintes relatives à la discrimination fondée sur le handicap.

L'an dernier il y a eu 265 plaintes pour discrimination dont 23 seulement concernaient des personnes handicapées – plaintes qui concernaient majoritairement des femmes, a précisé la délégation. Ces plaintes ont essentiellement trait à des allégations de discrimination sur le lieu de travail, a-t-elle indiqué.

Aucune plainte n'a été enregistrée en matière de santé reproductive depuis plusieurs années, a ensuite souligné la délégation. Les médecins sont formés à l'accueil de patients handicapés, notamment dans les hôpitaux et les maternités, a-t-elle ajouté.

La stérilisation est réglementée et aucune plainte n'a été enregistrée à ce sujet, a ensuite déclaré la délégation, avant de se dire ouverte à toute information dont aurait eu connaissance le Comité relativement à d'éventuelles allégations de cas de stérilisation forcée.

La délégation a expliqué qu'il était prévu d'abroger la disposition légale qui permet d'exclure du monde du travail une personne en raison de son de handicap (à partir d'un certain taux de handicap). Pour ce qui est de l'emploi des personnes handicapées, la délégation a indiqué que ces cinq dernières années, quelque 11 000 personnes handicapées se sont inscrites à une bourse aux emplois qui leur est réservée, ce qui est relativement faible, a-t-elle reconnu. Les aides à l'emploi d'une personne handicapée varient de 300 à 380 euros par mois par individu, en fonction de la gravité du handicap. La délégation a reconnu que la question de l'emploi des personnes handicapées est l'une des plus importantes à l'heure actuelle.

S'agissant de l'accessibilité, la délégation a souligné que les associations concernées participent aux processus de consultation préalables aux travaux d'adaptation des bâtiments. Il est prévu d'adopter le «principe de conception universelle», qui régirait les projets architecturaux devant obligatoirement prendre en compte l'accessibilité des personnes handicapées. Il est également prévu de former une soixantaine de spécialistes du «principe de conception universelle», a indiqué la délégation. Une mesure spécifique concerne l'adaptation des palais de justice afin de les rendre parfaitement accessibles à toute personne ayant des difficultés à se déplacer, a-t-elle par la suite souligné.

De son côté, le Ministère des transports a donné un certain nombre de directives visant à faciliter l'accès des personnes handicapées à tous les modes de transport, en ville comme à l'extérieur des villes. Des mesures concrètes ont d'ores et déjà été prises pour améliorer l'accessibilité des aéroports, par exemple.

Par ailleurs, le comité pour le développement des technologies de la communication a donné un certain nombre d'indications visant à rendre accessible les sites Internet à toute personne handicapée visuelle.

La délégation a reconnu que les programmes télévisés accessibles étaient insuffisants, attirant toutefois l'attention sur le coût que représente le doublage des émissions. A l'heure actuelle, un peu plus de six pour cent d'entre elles sont accessibles, ce pourcentage devant aller en augmentant, a précisé la délégation. Par ailleurs, des efforts sont accomplis pour former des interprètes en langue des signes, a-t-elle ajouté.

La délégation lituanienne a estimé que la question de la ratification du Traité de Marrakech visant à faciliter l'accès aux œuvres publiées doit être appréhendée sous l'angle de la conformité et dans le cadre des compétences de l'Union européenne. La Cour européenne de justice doit rendre un avis sur le Traité de Marrakech, a rappelé la délégation. La Lituanie est d'avis que l'Union européenne et ses États membres devraient avoir une compétence partagée concernant le Traité de Marrakech.

La Lituanie s'efforce de mettre en place un système d'éducation qui soit inclusif, a par ailleurs souligné la délégation. Si toutes les écoles n'ont pas adapté leurs structures afin d'accueillir des enfants handicapés, l'objectif est néanmoins de parvenir à rendre accessible 80% des établissements scolaires. Sur avis médical, il est possible d'assurer l'instruction de l'enfant à domicile, a d'autre part souligné la délégation. Des abus ont toutefois été constatés dans ce domaine, a-t-elle ajouté.

Le droit des enfants à s'exprimer et à participer au processus de décision les concernant est reconnu, a par ailleurs souligné la délégation. Toutes les écoles ont un conseil des enfants, a-t-elle notamment fait valoir, avant d'admettre qu'elle n'était pas en mesure de dire si de telles instances existaient aussi pour les enfants handicapés.

En juin prochain, un premier centre d'accueil pour enfants victimes de violence doit être ouvert, a par ailleurs indiqué la délégation. Les deux tiers des écoles ont d'ores et déjà un programme de prévention du harcèlement et l'objectif est de parvenir à ce que la totalité des établissements en soient dotés.

Les châtiments corporels ne sont pas formellement interdits en tant que tels dans le Code pénal, a ajouté la délégation. Toutefois, plusieurs articles prévoient des sanctions pour dommages causés à la santé ou dommages causés à autrui, a-t-elle souligné, avant de reconnaître un manque de précision de la loi dans ce domaine.

Deux programmes de protection contre la violence ont été lancés depuis le début 2012. En 2015, on a constaté une augmentation des cas de violence psychologique envers les enfants, qui s'expliquerait par le fait que l'on sait mieux les déceler – alors que jusqu'ici, les statistiques étaient stables. La délégation a précisé que les chiffres faisaient apparaître que 59% des enfants affirmaient avoir été victimes de violences, majoritairement psychologiques, mais aussi physiques pour 35% d'entre elles et sexuelles pour 6%. À 90%, cette violence provient de proches.

En matière de justice pénale, le handicap est considérée comme une circonstance aggravante lorsqu'un délit est commis contre une personne handicapée, a d'autre part fait valoir la délégation.

Pour ce qui est de la sensibilisation aux droits des personnes handicapées, la délégation a expliqué que l'on s'efforce en Lituanie de faire en sorte que ces personnes soient présentes dans les médias en mettant en valeur leurs réalisations. Le bureau de l'égalité des chances doit néanmoins faire davantage, notamment en organisant des campagnes visant à populariser les droits des personnes handicapées.

Le budget en faveur de l'intégration sociale a augmenté entre l'an dernier et cette année. Les subventions aux ONG sont elles aussi en hausse, étant passées de 5,5 millions à 6,2 millions d'euros depuis 2010, a d'autre part indiqué la délégation.

Les budgets en faveur de l'amélioration des conditions de vie, en matière d'accessibilité (moyens autonomes de déplacement, améliorations des transports publics et de l'accès aux administrations), sont aussi en augmentation, a poursuivi la délégation.

Pour ce qui est des mesures prévues en cas de catastrophes et de situations d'urgence, la délégation a indiqué que la population – et les personnes âgées et handicapées en particulier – est informée de l'existence du numéro 112, qui permet de s'informer de la situation. Il est aussi prévu de créer des applications spécifiques de téléphonie mobile pour les personnes handicapées en pareilles circonstances.

Les dispositions concernant l'incapacité légale ont été en partie amendées, depuis le 1er janvier dernier, a rappelé la délégation, reconnaissant toutefois une certaine confusion sur cette question et admettant que les mesures prises n'étaient pas satisfaisantes.

La loi permet à la justice de déchoir de leurs droits civiques des personnes gravement handicapées, une disposition qu'il n'est pas prévu d'abroger, a ensuite expliqué la délégation. Toutefois, des mesures nouvelles sont prises, notamment par l'utilisation d'Internet, afin de faciliter le vote des personnes handicapées, a-t-elle fait valoir. Pour autant, la délégation a reconnu la nécessité d'améliorer l'accessibilité électorale; les personnes handicapées devraient pouvoir être scrutatrices ou observatrices, par exemple.

Une assistance judiciaire peut être fournie à toute personne handicapée, une fois évalué son handicap et cela, quel que soit son niveau de revenu – ce qui n'est pas le cas pour les personnes non handicapées. Les plaignants gardent le choix de leur avocat, a précisé la délégation.

Lorsqu'une personne handicapée est victime d'un délit et lorsqu'il n'est pas possible de trouver le coupable, le préjudice subi doit être compensé par l'État. La prise en compte des besoins des victimes, s'agissant particulièrement des personnes handicapées, s'inspire des directives européennes à ce sujet, a en outre indiqué la délégation.

La sécurité sociale permet une prise en charge psychiatrique gratuite, a ensuite souligné la délégation. Des prestations spéciales existent, notamment en matière d'art-thérapie (ou thérapie artistique). Si, en 2010, quelque 338 personnes faisaient l'objet d'un traitement «coercitif», ce nombre était tombée à 133 en 2014. L'hospitalisation forcée ne peut se justifier que par des nécessités médicales, faute de quoi elle est passible d'une peine de cinq années d'emprisonnement. Tout en reconnaissant la nécessité d'améliorer la législation lituanienne en la matière, la délégation a souligné que l'éventuelle interdiction totale de la privation forcée de liberté pour les malades mentaux impliquait de trouver des solutions alternatives; cette question fait l'objet d'un débat dans le pays.

Un programme de modernisation des lieux de détention a été lancé, a d'autre part souligné la délégation, avant de reconnaître la modestie du budget alloué à ce programme, du fait de la crise économique. Des centres de détention ont été aménagés pour les délinquants handicapés, a-t-elle ajouté. Les améliorations ne vont pas aussi loin qu'il serait souhaitable, a-t-elle reconnu, avant de préciser qu'un nouveau centre de détention serait ouvert à l'automne.

Depuis l'an dernier, des spécialistes sont formés à la fois au sein de la police et de la justice et parmi les travailleurs sociaux afin de déceler les cas et de fournir une assistance aux victimes de la traite, a poursuivi la délégation. L'année dernière, un projet pilote dans cinq municipalités a été testé avec l'aide d'organisations non gouvernementales afin de développer une méthodologie de fourniture d'assistance aux victimes.

En matière de prise en charge médicale, la délégation a reconnu que si les personnes ayant un handicap léger étaient bien prises en compte par la médecine ambulatoire, ce n'était malheureusement pas le cas de celles souffrant de handicaps lourds. Afin d'y remédier, les budgets alloués par l'État dans ce domaine sont en augmentation, a fait valoir la délégation. Là encore, les fonds structurels européens jouent un rôle important, une enveloppe de 76 millions d'euros ayant été promise par Bruxelles pour l'amélioration des infrastructures.

Les services de proximité, qui étaient au nombre de 58 en 2000 étaient 122 en 2014, ce qui ne signifie pas que tous les besoins soient comblés, a reconnu la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que la Lituanie avait consulté le Haut-Commissariat aux droits de l'homme dans la perspective de la transformation du bureau du Médiateur en une institution nationale des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris, sans avoir pour autant à modifier sa législation.

Observations préliminaires

M. LANGVAD, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Lituanie, a déclaré que la délégation avait peut-être été trop honnête car l'abondance d'informations rend difficile de se faire une idée précise de la situation. Il n'est pas impossible que certaines remarques du Comité apparaîtront comme injustes, a-t-il averti, reconnaissant que l'on peut en effet avoir une perception erronée de la situation en Lituanie. Par exemple, le retard pris dans la ratification du Traité de Marrakech peut donner l'impression de l'existence d'une discrimination indirecte, a-t-il expliqué. La Constitution d'un État doit être comprise dans le temps présent et non pas rétroactivement en fonction de l'époque de son adoption, a par ailleurs souligné M. Langvad. Trouver des solutions modernes est une question d'imagination, a-t-il ajouté. Les possibilités d'abolir l'interdiction de vote, par exemple, sont réelles pour une raison simple: si l'on ne vous dit pas que vous êtes incapable, alors vous être capable, a déclaré le rapporteur.


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CRPD16008F