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LE CONSEIL ENGAGE UN DÉBAT INTERACTIF AVEC L'EXPERTE INDÉPENDANTE SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a engagé ce lundi soir – au titre de l'assistance technique et du renforcement des capacités – son débat interactif avec l'Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine, Mme Marie-Thérèse Keita Bocoum, qui a présenté une mise à jour orale concernant la situation dans ce pays.

Mme Keita Bocoum, qui a indiqué s'être rendue à Bangui du 1er au 11 mars dernier, a notamment rappelé que les Centrafricains avaient élu à la tête de l'État, le 14 février dernier, M. Faustin Archange Touadéra et a souligné que les défis qui attendent le nouveau chef de l'État sont nombreux et vont demander une forte mobilisation de la communauté internationale. «La situation sécuritaire connaît une amélioration, en particulier à Bangui, grâce à la présence et aux actions des forces internationales, aux mesures de sécurité prises par le Gouvernement et à l'esprit civique de la population centrafricaine», a affirmé l'Experte indépendante. Cependant, a-t-elle ajouté, «la situation reste très précaire et des poches d'insécurité et de violence persistent, notamment à l'intérieur du pays». Selon Mme Keita Bocoum, «la mise en œuvre immédiate d'un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion, et la réforme du secteur de la sécurité, seront des étapes cruciales». L'Experte indépendante a par ailleurs déploré qu'il n'y ait pas eu de progrès tangibles concernant la mise en place effective de la Cour pénale spéciale.

Intervenant en tant que pays concerné, la République centrafricaine a rappelé qu'elle n'est à encore qu'à moitié du gué et qu'il lui reste beaucoup à faire, ce dont vient de témoigner l'exposé de l'Experte indépendante. La République centrafricaine a lancé un appel pressant à tous ses partenaires pour l'accompagner dans la mise en place d'un État garant de la paix, du droit et du bien-être de sa population, respectueux des instruments internationaux auxquels il est partie. Le pays a dit «oui» à la réconciliation nationale, mais pas sans réparation, a ajouté la délégation centrafricaine. Indispensable, la réconciliation ne saurait être synonyme d'impunité, a-t-elle souligné. C'est pourquoi la Cour pénale spéciale sera opérationnelle dans les prochains jours afin de connaître des crimes commis, dont les auteurs, quel que soit leur camp, auront à répondre. La restauration de l'État reste une priorité pour la République centrafricaine, qui appelle à la mise en place à son profit d'un «plan Marshall».

Quelques délégations* ont ensuite engagé un débat interactif avec l'Experte indépendante. Elles se sont félicitées de la bonne tenue de l'élection présidentielle et du premier tour des législatives, voyant dans le vote une claire volonté de la population de tourner la page des violences et des divisions et d'inscrire le pays dans un processus de démocratisation et de réconciliation. Les délégations ont invité les autorités à maintenir le cap, à rétablir l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire et à assurer l'obligation redditionnelle pour les crimes commis. Certains intervenants ont appelé à la vigilance, car des groupes armés continuent d'opérer dans certaines parties du pays. Les femmes doivent être intégrées dans le processus de paix, a-t-il par ailleurs été souligné. La communauté internationale a été invitée à apporter une assistance technique urgente pour aider le pays à consolider ses acquis.


Le Conseil achèvera demain matin, à partir de 9 heures, son débat avec Mme Keita Bocoum, avant de tenir un dialogue renforcé sur le Burundi avec un représentant de la mission d'experts indépendants dépêchée dans ce pays, suite à la décision prise en ce sens par le Conseil des droits de l'homme lors de sa session extraordinaire du 18 décembre dernier.


Assistance technique et renforcement des capacités

Dialogue interactif avec l'Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine

Mise à jour orale de l'Experte indépendante

MME MARIE-THÉRÈSE KEITA BOCOUM, Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine, a rappelé que les Centrafricains avaient élu à la tête de l'État, le 14 février dernier, M. Faustin Archange Touadéra. Elle a indiqué s'être rendue à Bangui du 1er au 11 mars, notant que les défis qui attendaient le nouveau chef de l'État étaient nombreux et qu'ils allaient demander une forte mobilisation de la communauté internationale. «La situation sécuritaire connaît une amélioration, en particulier à Bangui, grâce à la présence et aux actions des forces internationales, aux mesures de sécurité prises par le Gouvernement et à l'esprit civique de la population centrafricaine», a affirmé l'Experte indépendante. «Cependant», a-t-elle constaté, «la situation reste très précaire et des poches d'insécurité et de violence persistent, notamment à l'intérieur du pays». Selon Mme Keita Bocoum, «la mise en œuvre immédiate d'un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion, et la réforme du secteur de la sécurité, seront des étapes cruciales».

La lutte contre l'impunité et le renforcement de l'indépendance du pouvoir judiciaire restent des demandes pressantes des Centrafricains, a-t-elle constaté. Depuis sa précédente visite en septembre dernier, si Mme Keita Bocoum a noté «quelques progrès avec la nomination des autorités judiciaires sur le terrain», la plupart tardent à prendre fonction dans les faits. Depuis lors, «il n'y a pas eu de progrès tangible concernant la mise en place effective de la Cour pénale spéciale». Des initiatives de dialogue, de paix et de réconciliation ont porté leurs fruits, l'Experte indépendante citant en particulier le «rôle catalyseur» de la visite du Pape qui, selon elle, «a contribué à un changement de mentalité et à la reprise du dialogue communautaire».

Sur le plan économique et social, «il n'est pas une autorité, un représentant de la société civile ou de la communauté internationale qui n'ait pas fait état du besoin urgent d'éducation, de formation professionnelle et de création d'activités génératrices de revenus» auprès de Mme Keita BocouM. Sur le plan humanitaire, «on note un retour progressif et croissant des personnes déplacées et des réfugiés dans leur foyer». Les défis humanitaires restent majeurs, et seule l'aide internationale peut apporter un soulagement, selon l'Experte indépendante. Celle-ci a réitéré en conclusion son appel à la communauté internationale, secteur privé inclus, à accompagner concrètement les nouvelles autorités dans les programmes prioritaires: désarmement, démobilisation, réinsertion, d'une part; et réforme du secteur de la sécurité, d'autre part.

Pays concerné

La République centrafricaine a rappelé qu'elle n'est à encore qu'à moitié du gué et qu'il lui reste beaucoup à faire, ce dont vient de témoigner l'exposé de l'Experte indépendante. La République centrafricaine a lancé un appel pressant à tous ses partenaires pour l'accompagner dans la mise en place d'un État garant de la paix, du droit et du bien-être de sa population, respectueux des instruments internationaux auxquels il est partie.

La République centrafricaine a rappelé qu'il y a trois ans, elle entrait une nouvelle fois dans une turbulence qui faillit l'emporter. Aujourd'hui, grâce à sa population, un choix sans équivoque a été fait. Le pays a dit «oui» à la réconciliation nationale, mais pas sans réparation. Indispensable, la réconciliation ne saurait être synonyme d'impunité. C'est pourquoi la Cour pénale spéciale sera opérationnelle dans les prochains jours afin de connaitre des crimes commis, dont les auteurs, quel que soit leur camp, auront à répondre.

De nombreux défis restent à relever: humanitaires, sécuritaires, structurels, entre autres. La restauration de l'État reste une priorité pour la République centrafricaine, qui appelle à la mise en place à son profit d'un «plan Marshall». En conclusion, la République centrafricaine a remercié tous ceux qui ont consentis des efforts pour l'accompagner dans les moments difficiles qu'elle a vécus.

Débat interactif

L'Afrique du Sud, au nom du Groupe africain, s'est félicitée de la tenue d'élections pacifiques en République centrafricaine. Elle a demandé à tous les pays de fournir l'assistance nécessaire à la République centrafricaine, notamment en vue de créer la cour pénale spéciale et de réinsérer les membres des groupes armés. L'Algérie a salué le courage et l'engagement du peuple centrafricain en faveur du parachèvement du processus de transition dans les délais prévus, par la tenue des élections présidentielles et législatives, grâce à l'appui apporté, depuis le début de la crise, par l'Union africaine, les autorités de transition et la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine. L'Algérie a condamné toutes les tentatives visant à empêcher la restauration de la paix et la réconciliation nationale, avant de réaffirmer son attachement à la mise en œuvre des recommandations figurant dans le rapport de l'Experte indépendante pour restaurer la paix, la sécurité et la stabilité dans la République centrafricaine.

La France a déclaré qu'un chemin remarquable avait été parcouru, tout en appelant à la vigilance car il reste des milices actives dans certaines parties du territoire de la République centrafricaine. Elle a appelé à poursuivre les efforts de reconstruction, de désarmement et de redéploiement des services judiciaires sur l'ensemble du territoire pour que les populations puissent être protégées contre les milices. La France a aussi encouragé le rétablissement de toute la chaîne pénale et pénitentiaire, assurant de sa disposition à accompagner la République centrafricaine.

L'Union européenne a salué l'engagement de l'Experte indépendante qui a tenu à se rendre en République centrafricaine au lendemain d'un scrutin historique; et a encouragé le Président élu à prendre, avec son Gouvernement, des mesures fortes en vue du renforcement de l'état de droit, de la lutte contre l'impunité, de la protection des droits de l'homme et de la réconciliation nationale; ainsi que de la mise en œuvre immédiate d'un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion. L'Union européenne a voulu savoir quelles sont les mesures, selon l'Experte indépendante, nécessaires pour s'assurer qu'une réponse appropriée soit apportée au besoin urgent d'éducation, de formation professionnelle et de sensibilisation aux droit de l'homme dans la République centrafricaine.

Le Royaume-Uni, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, le Portugal et la Norvège ont chacun insisté pour que les soldats des opérations de maintien de la paix coupables de crimes sexuels soient sanctionnés. La Norvège a également recommandé l'inclusion de femmes dans le processus de paix et espéré que le nouveau Gouvernement poursuivrait sa coopération avec le Haut-Commissaire, l'Experte indépendante et d'autres mécanismes des droits de l'homme. Les États-Unis ont dit avoir offert plus d'un million de dollars en guise d'aide au Programme des Nations Unies pour le développement dans le pays. Le Royaume-Uni a dit sa préoccupation devant la facilité avec laquelle les groupes armés circulent dans les zones hors du contrôle du gouvernement, à l'extérieur de Bangui.

La Lybie a demandé, pour sa part, la cessation des exactions à l'encontre des musulmans. La Chine a soutenu le Gouvernement centrafricain et appelé la communauté internationale à écouter le nouveau Gouvernement avait de décider de l'aide qu'elle pourrait apporter.

La poursuite du processus de réconciliation nationale et la lutte contre l'impunité semblent être, de l'avis de la Belgique, des conditions préalables essentielles afin de protéger les civils des violences et de consolider les progrès récents enregistrés par la République centrafricaine. Le renforcement de l'indépendance du pouvoir judiciaire et de l'accès à la justice est aussi primordial. Notant que le pays a eu une présidente de la transition emblématique, la Belgique a demandé comment renforcer encore le leadership féminin dans la prise de décision en République centrafricaine. Le Luxembourg a appelé toutes les parties à respecter les résultats des élections et la volonté du peuple centrafricain.

L'Espagne a plaidé pour l'application urgente d'un programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion en République centrafricaine et pour la mise en marche rapide de la cour pénale spéciale qui devrait contribuer à lutter contre l'impunité de longue date qui mine ce pays. La Côte d'Ivoire, qui «connaît mieux que quiconque les mécanismes de désarmement, démobilisation et réinsertion» appuie la mise en œuvre d'un tel programme en République centrafricaine, en particulier en ce qui concerne les enfants. La délégation ivoirienne suggère en outre à la République centrafricaine d'engager des réformes dans le domaine sécuritaire et appelle la communauté internationale à l'appuyer pour la mise en place de la cour pénale spéciale. L'Égypte, est également d'avis que la lutte contre l'impunité doit être une priorité, y compris en ce qui concerne le phénomène grandissant de la violence faite aux femmes. Comme d'autres délégations, l'Égypte demande à la communauté internationale de fournir aide et assistance à la République centrafricaine.

Le Soudan recommande lui aussi à la République centrafricaine de mettre en œuvre au plus vite un programme de désarmement, démobilisation et réinsertion, mais lui recommande également de promouvoir la réconciliation nationale, qui elle seule peut consolider la paix dans le pays. Le Sénégal exhorte non seulement la République centrafricaine à suivre les recommandations de Mme Keita Bocoum, mais aussi la communauté internationale à fournir toute l'aide pour la mise en place du programme de désarmement, démobilisation et réinsertion. Le Mozambique de son côté s'est réjoui des dernières avancées enregistrées par la République centrafricaine, notamment la tenue d'élections crédibles, même si les problèmes persistent comme la question des réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur du pays. Pour l'heure, les autorités centrafricaines doivent travailler à la consolidation des institutions, a estimé le Mozambique.
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* Délégations ayant participé au dialogue interactif avec l'Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine: Union européenne, Afrique du sud (au nom du Groupe africain), Nouvelle-Zélande, Portugal, Norvège, Lybie, France, États-Unis, Belgique, Royaume-Uni, Luxembourg, Algérie, Chine, Espagne, Côte d'Ivoire, Égypte, Soudan, Sénégal, Mozambique.


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HRC16/046F