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LE CONSEIL TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT DE HAUT NIVEAU SUR LE CINQUANTIÈME ANNIVERSAIRE DES DEUX PACTES INTERNATIONAUX

Compte rendu de séance
Les droits inscrits dans les deux Pactes sont indissociables et constituent une force vertueuse pour le développement humain, déclare le Haut-Commissaire

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, une réunion-débat de haut niveau sur le thème : «Cinquantième anniversaire des Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme: caractère universel, indivisible, interdépendant et indissociable de tous les droits de l'homme».

Dans une déclaration liminaire, le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein, a rappelé que l'expérience collective de l'humanité avait fait comprendre l'importance des droits de l'homme en tant qu'outils de paix et de développement pour tous. Les droits inscrits dans les deux Pactes sont indissociables et constituent une force vertueuse pour le développement humain, a-t-il ajouté. Jugeant crucial que les deux Pactes soient universellement mis en œuvre, il a rappelé que 27 États n'en avaient ratifié aucun, tandis que huit n'en ont ratifié qu'un seul. Avouant ne pas comprendre les réticences de ces États, il les a enjoints à adhérer aux Pactes au cours de cette année anniversaire.

S'exprimant également à l'ouverture de cette réunion-débat, le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Guennady Gatilov, a rappelé que l'accord sur les textes des deux Pactes n'avait pas été obtenu facilement et a noté que, cinquante ans plus tard, ils faisaient encore débat puisque l'accent est davantage mis, aujourd'hui encore, sur les droits civils et politiques, au détriment des droits sociaux, économiques et culturels.

Cinq panélistes ont ensuite pris la parole dans le cadre de ce débat et ont tous mis l'accent sur le caractère universel et indivisible des droits de l'homme. M. Fabián Omar Salvioli, Président du Comité des droits de l'homme, et M. Waleed Sali, Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, ont rappelé que c'est la guerre froide qui avait imposé la distinction des droits en deux Pactes, cette distinction s'étant ensuite progressivement effacée, notamment à l'occasion de la Conférence de Vienne de 1993. Mme Catarina de Albuquerque, Présidente exécutive du Partenariat «Assainissement et eau pour tous» et M. Andrey Klishas, Président du Comité sur la législation constitutionnelle et lmédification de l'État du Conseil de la Fédération de l'Assemblée fédérale de Russie, ont tous deux abondé dans le sens de l'élimination de la distinction entre ces deux catégories de droits, Mme de Albuquerque exhortant les États Membres à «rectifier cette erreur historique» (de la distinction) et à ressusciter la vision tendant à la réunification des traités. Mme Sakiko Fukuda-Parr, Professeur de relations internationales, a pour sa part fait observer que les droits de l'homme sont devenus de plus en plus essentiels pour le développement, le concept du développement s'axant aujourd'hui davantage sur les droits de l'homme.

Dans le cadre du débat interactif qui a suivi ces présentations, plusieurs délégations ont plaidé pour un traitement égalitaire de tous les droits de l'homme, regrettant que les deux Pactes établissent de fait une distinction, voire une hiérarchie, entre les droits. Un appel a été lancé à tous les États pour qu'ils procèdent à la ratification des deux Pactes, une délégation regrettant notamment que des membres du Conseil ne soient pas parties à ces deux textes. Enfin, plusieurs intervenants ont mis en garde contre la politisation de ces questions, appelant au contraire à davantage de coopération.

L'Union européenne ainsi que les pays suivants ont participé à ce débat de haut niveau: Afrique du sud, Australie, Botswana, Brésil, Bolivie, Chine, Colombie, Égypte, Équateur, Fédération de Russie, Finlande (au nom des pays nordiques), France, Grèce, Inde, Indonésie, Kirghizistan, Mexique, Namibie, Népal, Pakistan (en son nom propre et au nom de l'Organisation de la coopération islamique), Pays-Bas, Philippines, République islamique d'Iran, Roumanie, Slovénie, Soudan, Venezuela et Viet Nam. Plusieurs organisations non gouvernementales sont également intervenues.


Le Conseil poursuit durant le reste de la journée de mardi son débat de haut niveau, entamé hier.


Réunion-débat de haut niveau sur cinquantième anniversaire des deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme

Remarques liminaires

M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a déclaré que l'expérience collective de l'humanité, marquée notamment par les guerres dévastatrices, les génocides et l'oppression coloniale, a fait comprendre l'importance des droits de l'homme en tant qu'outils de paix et de développement pour tous. Aujourd'hui, ce qui unit l'humanité est plus fort que ce qui la divise et va au-delà des deux Pactes internationaux dont on célèbre cette année le cinquantième anniversaire, à savoir le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Tous les droits inscrits dans ces deux instruments sont indissociables et constituent une force vertueuse qui soutient le développement humain, a déclaré le Haut-Commissaire. Il a ensuite observé que si les deux Pactes ont été largement ratifiés, il reste tout de même 27 États qui n'en ont ratifié aucun des deux et huit autres qui n'en ont ratifié qu'un seul. M. Zeid a avoué ne pas comprendre le refus ou les réticences de ces États et les a enjoints à y remédier au cours de cette année anniversaire.

Le Haut-Commissaire a relevé l'importance d'améliorer la mise en œuvre des deux Pactes, dans un contexte où la liberté d'expression, le droit à un procès équitable, le droit à l'éducation ou à un logement et à travail décents ne sont pas garantis dans tous les États, et où la torture et l'esclavage persistent. Il est crucial que ces deux Pactes soient universellement mis en œuvre, dans un monde où les inégalités économiques persistent aussi, avec 62 personnes qui disposent d'autant de richesses que 3.8 milliards d'autres, a encore plaidé le Haut-Commissaire, ajoutant que ce cinquantième anniversaire offre une occasion de réparer ces injustices. Ces textes sont le fondement d'une bonne gouvernance, ils incarnent les espoirs de paix du monde, a-t-il conclu.

M. GUENNADY GATILOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a annoncé que son pays a lancé l'initiative de la tenue de cette réunion à Genève, ville qu'un grand nombre de pays considèrent, à juste titre, comme le lieu où sont concentrées la plupart des organisations chargées des droits de l'homme. Les Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme revêtent une signification sans pareille car il s'agit des premiers instruments juridiquement contraignants. M. Gatilov a souligné qu'il n'avait pas été aisé de parvenir à un accord sur ces textes. Cinquante années après leur adoption, ils font encore débat puisque l'accent est davantage mis, aujourd'hui encore, sur les droits civils et politiques, au détriment des droits économiques, sociaux et culturels. Partant, il conviendrait de respecter le principe d'égalité entre tous ces droits, a-t-il recommandé, en émettant le vœu que cette réunion offre l'occasion d'adopter ces documents sans réserve.

Panélistes

M. FABIÁN OMAR SALVIOLI, Président du Comité des droits de l'homme, a estimé qu'il ne devrait y avoir qu'un Pacte et non deux. C'est en effet la guerre froide qui a imposé la distinction des droits en deux catégories et donc en deux Pactes, a-t-il rappelé. M. Salvioli a toutefois ajouté que cette distinction s'était progressivement effacée. A cet égard, la Conférence de Vienne de 1993 a marqué un jalon puisque les États y ont consacré le caractère universel, indépendant et indivisible des droits de l'homme. Aujourd'hui, la communauté internationale doit faire le point en fonction de ce triple caractère des droits de l'homme. Les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme sont des textes vivants, a ajouté le Président du Comité. Pour le Comité des droits de l'homme, comme pour le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, l'interdépendance et l'indivisibilité des droits de l'homme sont des notions essentielles, a encore rappelé M. Salvioli. Le déni de droits économiques, sociaux et culturels comme le droit à la grève ou le droit à l'alimentation implique souvent la privation des droits civils et politiques, a-t-il ainsi fait observer. Il a conclu en soulignant que les deux Pactes sont la boussole des États : sans la réalisation des droits contenus dans ces deux Pactes, il sera impossible de réaliser les Objectifs de développement durable.

M. WALEED SADI, Président du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, a lui aussi mentionné les liens organiques entre droits civils et politiques et droits économiques, sociaux et culturels, ainsi qu'entre les deux Comités. Se référant à la formule selon laquelle les deux Pactes sont «les deux ailes d'un même oiseau», il a fait remarquer que sans l'une de ses ailes, l'oiseau ne peut pas voler. M. Sadi a également rappelé que la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 traitait, elle, des deux types de droits. La plupart des droits civils et politiques ont une dimension économique, sociale ou culturelle, a-t-il souligné, rappelant qu'on avait essayé de rédiger un seul Pacte mais qu'on s'était heurté à des conceptions idéologiques, dont celle considérant que les droits civils et politiques sont immédiatement réalisables alors que les droits économiques, sociaux et culturels constituent des droits plus longs à concrétiser. Avec l'effacement progressif de cette distinction, il a évoqué la vision d'un monde dans lequel les deux Comités et les deux Pactes seraient réunifiés. L'oiseau pourra alors s'envoler, a-t-il conclu.

MME CATARINA DE ALBUQUERQUE, Présidente exécutive du Partenariat «Assainissement et eau pour tous», a examiné, quant à elle, les défis relatifs à l'universalité, l'indivisibilité et l'interdépendance des deux Pactes au cours des cinquante années écoulées. Elle a fait remarquer que l'absence de textes juridiques, au niveau national, sur certains types de droits cause un manque de protection juridique. D'autre part, la répartition inégale des richesses affecte les plus vulnérables, dont les droits civils et politiques ne sont pas dûment respectés ni protégés. Les discriminations existantes et les tabous, comme ceux liés à l'orientation et l'identité sexuelle, violent aussi une série de droits, ce qui a un impact certain sur d'autres droits fondamentaux des personnes marginalisées et vulnérables. La panéliste a souligné que la catégorisation des droits de l'homme est utile dans une salle de classe mais s'avère délétère dans la vie de tous les jours. Les droits ont été subdivisés en deux traités, ce qui les fragmentent et va à l'encontre de l'indivisibilité et l'interdépendance des droits de l'homme. S'adressant directement aux États membres, elle a exhorté à «rectifier cette erreur historique» et à ressusciter la vision tendant à la réunification des traités.

M. ANDREY KLISHAS, Président du Comité sur la législation constitutionnelle et l'édification de l'État du Conseil de la Fédération de l'Assemblée fédérale de Russie, a abondé dans le sens de l'élimination de la distinction entre les droits civils et politiques, d'un côté, et les droits économiques, sociaux et culturels, de l'autre. Présentant l'expérience nationale de traitement global de tous ces droits, il a expliqué dans quelle mesure la législation russe tentait de se concentrer sur tous les aspects de la protection des droits et des libertés fondamentales par l'Etat, à commencer par ceux des enfants handicapés, orphelins ou vulnérables. Il a notamment mis en avant le moratoire sur l'abolition de la peine de mort; il a souligné que le droit à l'autodétermination est un principe constitutionnel fondamental concrétisé au niveau fédéral; enfin, il a indiqué qu'un Conseil spécifique sur les droits a pour mandat de veiller à la protection des personnes détenues. En conclusion, M. Klishas a mis l'accent sur la crise des institutions internationales des droits de l'homme qui, selon lui, n'ont pas su réagir à temps, ou comme il se doit, à des situations politiques difficiles.

MME SAKIKO FUKUDA-PARR, Professeur de relations internationales, The New School, a fait observer que les droits de l'homme sont devenus de plus en plus essentiels pour le développement. Le concept du développement a été redéfini, s'est davantage axé sur les droits de l'homme. Les militants des droits de l'homme interviennent en outre davantage sur les terrains traditionnels du développement: lutte contre la pauvreté, contre l'austérité budgétaire et les programmes d'ajustement structurels, ou résolution des conflits et reconstruction post-conflit. De son côté, la communauté du développement utilise de plus en plus le cadre des droits de l'homme dans ses analyses et programmes. Pour Mme Fukuda-Parr, l'adoption du Programme de développement durable à l'horizon 2030 reflète ces transitions. C'est grâce au plaidoyer des organisations de la société civile et d'autres organisations qu'il a été possible de modifier les paradigmes du développement. La panéliste a insisté sur l'importance de faire face aux excès tant du capitalisme que du totalitarisme; elle a également relevé la nécessité de pallier les lacunes actuelles de l'économie de marché et a appelé à la responsabilisation des entreprises.

Débat interactif

L'Union européenne a insisté sur le caractère universel, interdépendant et indivisible de tous les droits édictés dans ces deux Pactes. On ne peut les choisir indépendamment, a réaffirmé son représentant, appelant tous les États à signer et ratifier les deux Pactes. Pour la Fédération de Russie également, tous les droits doivent être considérés sur un pied d'égalité, sans hiérarchie aucune. Il faut donc que tous les États ratifient les deux Pactes pour reconnaître cette égalité entre tous les droits de l'homme. La Bolivie aussi a plaidé pour un traitement égalitaire de tous les droits de l'homme, passant par la ratification par tous les pays des deux Pactes, appuyée en cela par le Népal. Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, a également observé que ces droits ont été répertoriés dans deux Pactes au lieu d'un seul document, établissant de fait une distinction. La délégation a en outre regretté qu'alors que l'Islam promeut les droits de l'homme dans sa philosophie, l'islamophobie ne cesse de grandir. Les deux Pactes devraient être utilisés pour lutter contre ce phénomène.

Le Botswana s'est dit conscient des défis persistants pour la pleine réalisation de tous les droits de l'homme tant que des conflits perdurent dans le monde. La délégation a observé que les deux Pactes établissent de fait une distinction et une hiérarchie entre les droits, se demandant ce que le système des Nations Unies peut faire pour que tous les droits de l'homme soient égaux. L'Égypte a mis l'accent sur l'importance vitale de la mise en œuvre des deux Pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme et des Protocoles facultatifs, compte tenu de l'émergence croissante de conflits sociaux et politiques. Ce pays a appelé au respect des dispositions de ces documents «en tout temps et toutes circonstances». Le Brésil s'est dit prêt de son côté à travailler avec les autres délégations pour faire avancer les objectifs inscrits dans les deux Pactes internationaux. La Grèce est d'avis que le Conseil devrait se pencher sur ces deux séries de droits. Sa délégation présentera dans ce contexte un projet de résolution sur le travail décent au cours de cette session. Pour les Philippines, tous les droits de l'homme étant égaux et interdépendants, le Conseil aurait dû considérer de débattre conjointement des deux Pactes mais aussi du droit au développement.

La Namibie est préoccupé par le nombre d'États qui ne sont pas parties aux deux Pactes, dont des membres du Conseil. Le Pakistan a annoncé son intention de présenter sa candidature aux prochaines élections du Conseil des droits de l'homme, et appelé tous les États à souscrire aux deux Pactes. L'Indonésie, qui a ratifié les deux Pactes en même temps en 2005, a souhaité savoir comment promouvoir l'égalité entre les deux Pactes et leur ratification universelle. La France a pour sa part ratifié en mars dernier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Elle appelle tous les États à ratifier ces instruments. Depuis 1968, date de leur ratification par la Colombie, ces deux Pactes ont été appliqués avec pragmatisme dans le pays, a assuré sa représentante, de même qu'au Mexique, où ils ont été intégrés à la dernière modification constitutionnelle. L'Inde a rappelé qu'en tant que signataire des deux Pactes, il a veillé à la mise sur pied d'un système de justice indépendant pour que tous les citoyens y aient accès sur un pied d'égalité. Le représentant a fait état de plusieurs programmes inspirés des dispositions de ces textes, notamment des mesures de protection des droits de l'homme et de respect des actions de la société civile. Le Soudan, qui a ratifié sans réserve les deux documents, a inclus leurs dispositions dans sa Constitution nationale. L'Australie, partie aux deux Pactes, a dit prendre très au sérieux ces deux instruments. Elle est favorable à ce que les auteurs de violations des droits reconnus par ces deux pactes soient traduits en justice.

Le Viet Nam a pour sa part souligné qu'il n'y pas de modèle unique qui puisse s'appliquer à tous de la même manière indépendamment des réalités sociales et culturelles. Il faut donc travailler à éviter toute politisation de ces questions. Dans la même idée, le Kirghizistan, qui est partie aux deux Pactes, s'est dit prêt à travailler à cette dépolitisation et à chercher des consensus sur ces questions. La Chine a déclaré avoir choisi un modèle de développement à la chinoise et rendu prioritaire la promotion des droits de l'homme. La politisation de ces questions doit être rejetée, a dit la délégation appelant à ce que la communauté internationale privilégie la coopération pour réaliser la noble cause des droits de l'homme. La République islamique d'Iran a également déploré que l'on tente d'universaliser les droits de l'homme, tout en établissant une hiérarchie et en niant les réalités sociales et culturelles propres aux pays. Mettre un accent excessif sur certains droits et politiser ces questions contre certains pays est contreproductif et va à l'encontre de l'esprit des deux Pactes.

La Slovénie a de son côté, fustigé le relativisme culturel souvent évoqué par certains pays pour nier les droits inscrits dans ces deux Pactes. Elle a demandé comment les États peuvent concrètement contribuer à ce que les garanties accordées par les Pactes soient des jalons pour le développement. La Finlande, au nom des pays nordiques, a souligné le rôle de la société civile dans la promotion des droits émanant des deux Pactes, avant de s'interroger sur les moyens de protéger davantage les défenseurs des droits de l'homme. Pour sa part, le Venezuela s'est inquiété du fait que le capitalisme, dans sa phase néolibérale, porte atteinte aux libertés et à plusieurs aspects des droits de l'homme.

La Roumanie a évoqué les changements remarquables intervenus dans le monde depuis l'adoption des deux Pactes, et a salué le travail des organes conventionnels et leur capacité d'évolution ainsi que leur travail de réflexion pour la rédaction des observations générales qui approfondissent l'interprétation de ces documents. L'Equateur s'est réjoui que grâce à la mise en œuvre de ces Pactes, la pauvreté ait été réduite, tout comme la proportion de personne vivant dans l'extrême pauvreté. Les Pays-Bas ont fait observer que les deux Pactes ont donné naissance à de nombreuses règles, dont les Principes de Maastricht relatifs aux obligations extraterritoriales des États dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. L'Afrique du sud, s'exprimant au nom du Groupe africain, s'est pour sa part félicitée que ce cinquantième anniversaire tombe l'année où l'Union africaine consacre 2016 comme l'année des droits de l'homme, avec un accent particulier sur les femmes. La communauté internationale doit tirer profit de cette occasion afin que ces deux Pactes soient mis en œuvre.

La Commission des droits de l'homme de Malaisie a rappelé que la Malaisie n'a pas adhéré aux Pactes mais que le Gouvernement a mis en place un sous-comité technique chargé d'étudier la possibilité de le faire. Elle demande à ce pays d'adhérer au Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels ainsi qu'à d'autres instruments internationaux des droits de l'homme. La Commission des droits de l'homme de Mauritanie a estimé que ce pays connaît aujourd'hui une nouvelle dynamique et un feu vert pour les droits de l'homme, avec une véritable consolidation, depuis 2009, des bases d'un État de droit.

Le Centre pour les droits civils et politiques - Centre CCPR s'est félicité des travaux et des résultats obtenus par les Comités chargés de surveiller la mise en œuvre des deux Pactes et a dit craindre que les progrès réalisés ne soient menacés par certains États qui, sous prétexte d'harmonisation et d'économies, s'attaquent aux méthodes de travail des organes de traité et remettent en cause leur mandat. L'Organisation a en outre dénoncé la persistance de certains États parties à ne pas collaborer avec ces deux Comités. La Fondation de la Maison des droits de l'homme a pour sa part déploré que les droits inscrits dans les deux Pactes soient loin d'avoir été réalisés cinquante ans après l'adoption de ces instruments. Espace Afrique International a demandé à la communauté internationale d'avoir l'audace de travailler pour réaliser pleinement les droits de l'homme inscrits dans les deux Pactes, ce qui n'est, selon l'organisation, pas encore le cas. Elle demande en outre aux États qui ne l'ont pas encore fait d'adhérer aux deux Pactes et à leurs Protocoles.

Le Pacific Disability Forum a affirmé que, malgré de réels progrès, beaucoup reste à faire pour changer le regard sur les personnes handicapées. Il ne s'agit pas seulement d'une question médicale, mais aussi d'une perspective de droits de l'homme. Enfin, la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté a attiré l'attention sur les effets négatifs de la mondialisation et appuyé les recommandations du Comité des droits de l'homme liées aux industries d'extraction minière et notamment sur la responsabilité des entreprises dans la violation des droits de l'homme dans les pays où elles mènent des activités.

M. SALVIOLI a rappelé que les droits économiques, sociaux et culturels devaient être judiciarisés comme les droits civils et politiques. Il a jugé important d'adopter une démarche fondée sur le caractère indivisible des droits de l'homme afin, à terme, d'éliminer cette faute que fut la séparation des droits de l'homme en deux Pactes. Il a rappelé que les organes de protection des droits de l'homme étaient internationaux et n'avaient donc pas une approche nationale ou régionale: les mêmes normes universelles sont appliquées à tous les États. Face aux représailles contre les défenseurs des droits de l'homme, il a attiré l'attention sur les «Directives de San José» adoptées récemment. Par ailleurs, il a constaté que la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples utilisait beaucoup les travaux du Comité des droits économiques, sociaux et culturels et d'autres organes de traités. Il y a eu plusieurs cas d'adoptions de conclusions communes par différents organes de traités et il y en aura d'autres, a-t-il conclu.

M. SADI a précisé que des contacts avaient été établis entre le Comité des droits économiques, sociaux et culturels et le Comité des droits de l'homme, et que des réunions conjointes informelles étaient prévues. On ne peut pas séparer droits civils et politiques des droits économiques, sociaux et culturels de manière permanente, a-t-il répété. M. Sadi a par ailleurs estimé que les rapports périodiques de pays permettaient d'approfondir les choses mais a regretté que le Comité, pour des raisons budgétaires, dispose de moins de réunions pour examiner les rapports. Les examens sont de plus en plus espacés dans le temps, a-t-il déploré, estimant que cela nuit à l'efficacité de l'exercice de suivi: lorsque sept ou dix ans après un examen de rapport, le Comité découvre que les problèmes sont les mêmes, que faire, s'est-il demandé? Il a préconisé que les examens se tiennent tous les deux ou trois ans. Enfin, il a rappelé la tentative très ambitieuse de réunir les comités de différents traités de droits de l'homme et s'est dit persuadé qu'en ce qui concerne les Comités liés aux deux Pactes, on assistera à terme à une fusion. En attendant, il faudra que les Comités puissent organiser des réunions communes.

MME DE ALBUQUERQUE a, en réponse à une question du Botswana, reconnu qu'il faut abattre les cloisons entre les différents droits de l'homme. Evoquant les situations de discriminations multiples, elle a indiqué à titre d'exemple que le manque d'accès des communautés Roms à l'eau potable expliquait aussi le fait que les enfants n'allaient pas à l'école. Elle a souhaité, par ailleurs, une coordination accrue entre les organes conventionnels et a rappelé que l'application des Pactes internationaux ne s'arrêtait pas aux frontières des pays. Rien n'est impossible, a déclaré la panéliste, arguant qu'il est possible de pleinement harmoniser l'application des deux Pactes. Elle a proposé la création d'un nouveau Protocole qui inclue les changements intervenus depuis l'adoption des Pactes en 1966. Elle a aussi souligné l'importance de la ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui ne semble pas jouir du même intérêt. Quant aux progrès réalisés au niveau national, ils gagneraient à être mieux quantifiés en mesurant, par exemple, la jouissance de tous les droits par les plus vulnérables, d'une part, et par la population générale, d'autre part, a-t-elle conclu.

M. KLISHAS a rejeté la notion d'incompatibilité entre la souveraineté de l'État et l'application des textes relatifs aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Certains textes législatifs ne sont pas constitutionnels s'ils violent les droits de certaines catégories de personnes, a-t-il fait valoir. Il a toutefois jugé qu'il convient de respecter la souveraineté des États et de freiner l'ingérence consistant à contredire des décisions prises souverainement par un État donné. De nombreuses religions du monde représentent un potentiel humaniste important qu'il faut respecter, a-t-il conclu en écho à un commentaire sur ce point.

MME FUKUDA-SARR a déclaré qu'en tant qu'économiste, elle ne cessait d'être agréablement surprise par la clarté et la flexibilité des deux Pactes internationaux quant à la stratégie de leur mise en œuvre propre. Elle est revenue sur le Programme de développement durable à l'horizon 2030 qui, a-t-elle insisté, constitue un progrès extraordinaire dans la voie de l'application des Pactes, les 17 Objectifs étant interdépendants. Elle a rappelé qu'il n'est pas possible de choisir d'une manière sélective et que ce Programme exige une application simultanée de tous les Objectifs.


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HRC16/006F