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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT SON DÉBAT DE HAUT NIVEAU

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a poursuivi dans l'après-midi, le débat de haut niveau de sa trente et unième session, entamé hier et qui se prolongera aujourd'hui jusqu'à 21 heures avant de s'achever demain. Il a ainsi entendu de hauts dignitaires de plus d'une vingtaine de pays, qui ont notamment mis l'accent sur le caractère indissociable, interdépendant et universel de tous les droits de l'homme.

Les victimes des violations des droits de l'homme, indépendamment de leur origine, de leur langue et de leur religion, mettront toujours l'accent sur l'universalité des droits de l'homme, a-t-il été souligné.

Plusieurs intervenants ont abordé la problématique de la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent. Dans le contexte des négociations en cours sur la Syrie, le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie a déclaré que les «terroristes et les extrémistes n'ont leur place ni dans l'accord de cessez-le-feu ni dans le processus de règlement politique», car leur idéologie et leurs pratiques sont incompatibles avec les principes de l'existence de la civilisation humaine. En outre, la défaite massive de l'État islamique (EIIL), de Jabhat al-Nosra et consorts est une condition préalable à la garantie des droits des peuples de Syrie, d'Iraq et de toute la région du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, qui n'ont que trop souffert, a affirmé le Ministre russe.

En dépit de ses actions contre le terrorisme du mouvement Boko Haram, qui sévit dans la région nord-est du pays, le Nigéria, par la voix de son Ministre des affaires étrangères, a regretté la persistance du problème des réfugiés et des déplacés internes. Aussi, le Ministre nigérian a-t-il vivement exhorté le Conseil à envisager d'apporter une assistance financière et humanitaire supplémentaire aux pays du bassin du Lac Tchad, conformément à sa résolution 23/1. Le Ministre adjoint des affaires étrangères de Chypre a signalé qu'il était du devoir des États de veiller à ce que les mesures de lutte contre le terrorisme soient « moralement saines, proportionnées et qu'elles respectent les droits de l'homme ».

L'État de Palestine, à travers son Ministre des affaires étrangères, a exhorté les États Membres à appliquer des sanctions contre Israël. Il a prié le Conseil de demeurer saisi de la situation des droits de l'homme dans les territoires occupés palestiniens et a salué l'initiative de la France d'organiser une conférence internationale de la paix.

Le Ministre des affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée a pour sa part fortement critiqué la politisation, la sélectivité et l'approche de «deux poids, deux mesures» au sein du Conseil, dont il a catégoriquement rejeté les résolutions sur la situation des droits de l'homme dans son pays. La Ministre des affaires étrangères du Botswana a quant à elle demandé au Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée de collaborer avec les organismes de droits de l'homme.

Le Ministre canadien des affaires étrangères du Canada a plaidé en faveur d'une augmentation du budget ordinaire du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et a annoncé le versement par son pays de 15 millions de dollars pour les trois prochaines années, qui viendra s'ajouter aux crédits fournis pour soutenir des projets particuliers.

Face à la nouvelle donne engendrée par l'arrivée massive en Europe de réfugiés fuyant les affres de la guerre, le Secrétaire général du Conseil de l'Europe a jugé «vital aujourd'hui de trouver une solution à la crise syrienne» et a appelé la Fédération de Russie et les États-Unis à agir en ce sens. De son côté, le Président du Comité international de la Croix-Rouge a estimé que la meilleure façon de contrer l'impact à long terme des conflits prolongés susceptibles d'affecter des générations entières consiste à prévenir les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme.

Ont pris part au débat de haut niveau : le Ministre des affaires étrangères de l'État de Palestine, M. Riyad Al Malki; le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, M. Sergei Lavrov; le Ministre d'État, Ministre des affaires étrangères et de la Coopération internationale de l'Algérie, M. Ramtane Lamamra; le Ministre de la Justice et des droits de l'homme de l'Angola, M. Rui Carneiro Mangueiro; le Ministre des droits de l'homme, de l'égalité des chances et de la législation de la République tchèque, M. jiřĺ Dienstbier; le Ministre des affaires étrangères de l'Albanie, M. Ditmir Bushati; le Ministre des affaires étrangères du Danemark, M. Kristian Jensen; le Ministre des affaires étrangères du Canada, M. Stéphane Dion; la Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de Botswana, Mme Pelonomi Venson-Moitoi; le Ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, M. Igor Crnadak; le Ministre de la justice de la Jordanie, M. Bassam Talhouni; la Commissaire pour la politique des droits de l'homme et de l'aide humanitaire du Gouvernement fédéral de l'Allemagne, Mme Bärbel Kofler,; le Vice-Ministre des affaires étrangères de Chypre, M. Alexandros N. Zenon; la Vice-Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, Mme Dragoljuba Benčina; le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Grèce, M. Ionnis Amanatidis; le Vice-Président et Ministre de la justice et des affaires juridiques et parlementaires du Zimbabwe, M. Emmerson D. Mnangagwa; le Vice-Premier Ministre pour les droits de l'homme de la Guinée équatoriale, M. Alfonso Nsue Mokuy; le Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et de l'intégration européenne du Monténégro, M. Igor Lukšić; le Ministre des affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée, M. Ri Su-yong; le Ministre de la justice de la République centrafricaine, M. Saïd Paguindji; le Ministre des affaires étrangères du Nigéria, M. Geoffrey Onyeama; et le Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Congo, M. Jean-Claude Gakosso.

D'autre part, le Président du Comité international de la Croix-Rouge, M. Peter Maurer, ainsi que le Secrétaire général du Conseil de l'Europe, M. Thorbjorn Jagland, ont prononcé des allocutions.


Suite du débat de haut niveau

M. RIYAD AL MALKI, Ministre des affaires étrangères de l'État de Palestine, a souligné que la communauté internationale doit veiller à ce que le peuple palestinien puisse jour de tous ses droits. Cela est consacré par nombre de résolutions des Nations Unies et du Conseil des droits de l'homme, a dit le Ministre, ajoutant que lorsque le système international ne parvient pas à faire respecter les droits de l'homme, il faut changer le système ou s'interroger sur le chemin qu'emprunte l'humanité.

L'État de Palestine respecte pour sa part les droits de l'homme et s'est doté des institutions nécessaires pour les appliquer, a expliqué le Ministre. Or, son peuple souffre de l'occupation et des pratiques israéliennes, comme l'a établi la Commission d'enquête mandatée par le Conseil des droits de l'homme. Israël, la puissance occupante, continue sa politique d'arrestations et de détentions arbitraires, de construction et d'extension de colonies, de blocage de Gaza et de déplacements de population; elle tente de changer la nature des lieux saints, a déploré le Ministre palestinien, estimant qu'Israël se dresse par ces actes comme un État au-dessus des lois. Il faut que ce Conseil et la communauté internationale assument leurs responsabilités pour veiller à ce qu'Israël respecte le droit international, a-t-il insisté, mettant en garde contre une inaction qui pourrait porter atteinte à la crédibilité de la communauté internationale dans son ensemble. La communauté internationale doit adopter des sanctions, notamment économiques, contre Israël, et boycotter les produits émanant des colonies. Pour sa part, le Conseil doit conserver inscrit à son ordre du jour la situation en Palestine et rejeter toute tentative visant à retirer cette question de ses travaux. En ce qui la concerne enfin, l'Autorité palestinienne reste attachée et déterminée à mettre en œuvre la solution des deux États, avec Jérusalem comme capitale. Le Conseil de sécurité doit donc prendre ses responsabilités, a encore déclaré le Ministre, préconisant que cet organe adopte une résolution condamnant les colonies de peuplement en tant qu'obstacle à la solution et à la paix à deux États.

M. SERGEY LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a déclaré que le façonnement d'un système mondial de gouvernance qui réponde aux exigences du XXIe siècle et apporte une réponse adéquate aux défis contemporains est la tâche la plus fondamentale à l'ordre du jour international. Tout un chacun reconnaît que la stabilité de l'ordre mondial ne saurait être réalisée qu'avec des mécanismes d'action collective viables dans toutes les sphères, l'édification d'une sécurité équitable et indivisible, la garantie d'un espace durable de coopération libre en termes de commerce et d'économie, et la mise en œuvre de normes communes dans la sphère humanitaire. De l'avis de M. Lavrov, il est inacceptable de recourir aux droits de l'homme pour s'immiscer dans les affaires internes des États. De telles tentatives présentent un danger réel pour la stabilité de nombreux pays, a-t-il averti, en mettant également en garde contre les tentatives de changement du format de travail des Nations Unies et d'autres entités sous le slogan d'une «nouvelle lecture» du concept des droits de l'homme, et ce dans le dessein d'imposer des vues et valeurs non universelles. De telles tentatives obstruent le travail collectif, discréditent les objectifs ultimes de garantie du respect universel des droits de l'homme, a-t-il souligné.

Dans le contexte de la crise syrienne, le Ministre russe des affaires étrangères a constaté que la dimension humanitaire est exploitée sans vergogne par ceux qui conçoivent l'idée d'un changement de régimes non désirés et retracent même les frontières en violation des résolutions du Conseil de sécurité. L'amélioration de la situation humanitaire en Syrie est l'une des priorités clés des Nations Unies, a-t-il souligné, relevant les récents progrès dans l'acheminement de l'assistance aux personnes dans le besoin et à un accès accru dans les zones assiégées. M. Lavrov a toutefois reconnu que seul un cessez-le-feu durable et l'amorce d'un véritable dialogue inclusif entre Syriens sur l'avenir du pays, déterminé par les seuls Syriens sans interférence étrangère, résoudra définitivement les problèmes humanitaires et de transition vers la restauration de ce pays détruit par la guerre. Pour lui, les terroristes et les extrémistes n'ont leur place ni dans l'accord de cessez-le-feu ni dans le processus de règlement politique, car leur idéologie et leurs pratiques sont incompatibles avec les principes de l'existence de la civilisation humaine. La défaite massive de l'État islamique de l'Iraq et du Levant, de Jabhat al-Nosra et consorts est une condition préalable à la garantie des droits des peuples de Syrie, d'Iraq et de toute la région du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord qui n'ont que trop souffert. Le Ministre a estimé à cet égard que la tâche la plus pressante consiste à priver les terroristes de toute assistance extérieure d'où la nécessité de la fermeture de la frontière turco-syrienne puisque ces groupes reçoivent par cette voie les armements et les convois humanitaires. Il a regretté que les journalistes qui ont dénoncé cette situation aient été jugés et condamnés à de lourdes peines alors que leur travail s'inscrit dans le cadre de la liberté d'expression. M. Lavrov s'est aussi inquiété en particulier du sort des minorités religieuses et ethniques, notamment chrétiennes dans la région.

S'agissant de l'Ukraine, il a fustigé la poursuite de graves violations des droits des minorités nationales dans ce pays et affirmé qu'en l'absence de progrès dans la réalisation des réformes politiques envisagées dans les mesures de Minsk, les autorités de Kiev favorisaient la montée de «comportements nationalistes radicaux agressifs».

M. RAMTANE LAMAMRA, Ministre des affaires étrangères de l'Algérie, a déclaré que la révision constitutionnelle du 7 février 2016 couronne une série de réformes engagées par le Président Bouteflika, reflétant la volonté des autorités de répondre aux demandes du peuple algérien. Ces réformes ont permis un renforcement de l'État de droit, un approfondissement de la démocratie participative ainsi qu'une consolidation des libertés démocratiques à travers des avancées dans les domaines de l'information, des associations, et de la représentation des femmes dans les instances élues. La Constitution consacre ainsi l'indépendance des juges, ainsi que celle du Parlement qu'elle renforce par des mécanismes nouveaux comme les commissions d'enquête et les missions d'information. L'opposition parlementaire voit, elle aussi, ses droits davantage renforcés. Dans le même esprit, la révision constitutionnelle prévoit la création d'une haute instance permanente indépendante de surveillance des élections. Pour le Ministre, la Constitution amendée apporte des réponses claires et fortes aux problèmes sociaux, économiques et politiques que connait l'Algérie.

M. Lamamra a également assuré de la détermination de son Gouvernement pour la paix au Mali et en Lybie. Sur ce dernier point, il a souligné l'impératif d'une solution politique afin que les problèmes auxquels fait face le pays soient réglés par un Gouvernement d'union nationale, dans le strict respect de l'unité et de l'intégrité territoriale de ce pays. D'autre part, le Ministre algérien a attiré l'attention sur la situation du peuple palestinien, victime d'une politique de domination et de répression. Les droits de ce peuple sont toujours bafoués, alors que la puissance occupante refuse toujours toute coopération avec le Conseil des droits de l'homme et la communauté internationale dans son ensemble, a-t-il déploré, avant d'ajouter que la situation est identique pour le peuple du Sahara Occidental, dernière colonie d'Afrique dont le processus d'autodétermination est contrarié depuis 1975. L'Algérie continuera à ne ménager aucun effort pour apporter son appui à l'action du Secrétaire général et de son Envoyé personnel, M. Christopher Ross, pour un règlement juste et définitif de ce conflit à travers un référendum d'autodétermination libre et régulier.

M. RUI CARNEIRO MANGUEIRA, Ministre de la justice et des droits de l'homme de l'Angola, a rendu un vibrant hommage à l'ancien Secrétaire général des Nations Unies, Boutros Boutros-Ghali, décédé récemment. Il s'est félicité du bilan en matière de droits de l'homme cinquante ans après l'adoption des deux Pactes relatifs aux droits de l'homme, et des espoirs suscités au sein de la communauté internationale par l'adoption, en septembre dernier, du Programme de développement durable à l'horizon 2030. Il a également fait observer que la Conférence internationale sur le financement du développement a démontré comment les processus intergouvernementaux peuvent contribuer à l'éradication de la pauvreté. Pour le Ministre cependant, il n'en reste pas moins que des millions de personnes dans le monde vivent encore dans des conditions de pauvreté intolérables et qu'il faut réduire davantage le fossé entre pays développés et pays en développement, d'autant que les effets du changement climatique seront bien plus ressentis par les pays les plus vulnérables. L'Angola estime à cet égard que le Programme 2030 est un outil crucial pour réduire le fossé qui sépare les pays développés de ceux en voie de développement.

Pour conclure, le Ministre s'est fait le porte-parole des déplacés et réfugiés, de ces personnes forcées à fuir leur maison en quête de sécurité, dont beaucoup sont des enfants et des femmes. Il a exhorté à des efforts concertés de la part de la communauté internationale. Il s'est dit atterré par la montée en puissance du racisme, de la xénophobie, de l'intolérance et de l'antisémitisme, en particulier à l'encontre des réfugiés et des migrants.

M. JIŘĺ DIENSTBIER, Ministre des droits de l'homme, de l'égalité et de la législation de la République tchèque, a rappelé que son pays a été un membre fondateur de ce Conseil, qu'il espère réintégrer dans un délai de trois ans. L'objectif n'est pas seulement d'évoquer ici les droits de l'homme, mais de changer la situation sur le terrain, a dit le Ministre. En attendant, le Conseil doit procéder à des réformes, notamment concernant ses méthodes de travail et accroître sa présence sur le terrain. M. Dienstbier a ensuite estimé que les deux Pactes internationaux dont on célèbre le cinquantième anniversaire cette année offrent une occasion à la communauté internationale de dresser un bilan. Pour sa part, la République tchèque continuera d'œuvrer pour améliorer et étoffer le droit à la participation aux affaires publiques, en soutenant notamment la société civile et les défenseurs des droits de l'homme, a dit le Ministre.

La République tchèque dont le rapport a récemment été examiné par le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes est consciente des défis qu'elle rencontre dans le domaine de la protection des droits de la femme. De nombreuses mesures ont été prises, a assuré le Ministre, précisant qu'il présentera prochainement à son Gouvernement un plan d'action pour l'égale représentation des hommes et des femmes dans les postes de décision. La République tchèque accorde par ailleurs une attention particulière aux personnes vivant en situation d'exclusion; une stratégie nationale de lutte contre l'exclusion sociale a d'ailleurs été adoptée pour la période 2016-2020. Le Ministère des droits de l'homme a en outre établi un groupe de travail pour la mise en œuvre des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme.

M. DITMIR BUSHATI, Ministre des affaires étrangères de l'Albanie, a déclaré que son pays entendait œuvrer avec le Conseil pour protéger les droits fondamentaux dans les zones de conflits. L'Albanie présentera ainsi lors de la présente session une résolution sur la situation des droits de l'homme au Soudan du Sud. M. Bushati a en outre dénoncé la montée sans précédent de l'intolérance religieuse, de l'extrémisme violent dans plusieurs régions du monde et des persécutions contre des minorités. L'Albanie juge urgent d'adopter des programmes sociaux et éducatifs pour combattre les causes profondes de ce phénomène. Elle-même a adopté en novembre dernier une stratégie nationale contre l'extrémisme violent, dont le succès dépendra aussi de l'action en ce sens de ces voisins. C'est pourquoi est actuellement mis en place un bureau régional de coopération pour la jeunesse, afin d'inculquer la tolérance et le rejet de la xénophobie, afin de contribuer aussi à la mise en œuvre de la résolution 2250 du Conseil de sécurité sur les jeunes, la paix et la sécurité. L'Albanie, a ajouté le ministre, est un exemple de tolérance religieuse, ce qui qui lui a permis d'être choisie l'an dernier pour accueillir une conférence sur ce thème.

La crise des réfugiés a débordé sur tout le continent européen, a poursuivi le chef de la diplomatie albanaise. A cet égard, il dit avoir entendu des préoccupations légitimes sur le terrorisme et la migration, et d'autres moins légitimes sur la fermeture des frontières. Il a demandé une intensification des efforts pour protéger les droits de l'homme des migrants avec la participation des pays d'origine, de transit et de destination. Le Conseil des droits de l'homme peut aider à maintenir les valeurs de libertés et de solidarité face à des politiques de moins en moins libérales sur le continent européen, a-t-il conclu.

M. KRISTIAN JENSENS, Ministre des affaires étrangères du Danemark, a présenté les droits de l'homme comme des règles universelles qui, en fixant le bien et le mal, « nous permettent de dormir la nuit ». Estimant que, dix ans après sa création, le Conseil des droits de l'homme avait de nombreuses choses à célébrer, le ministre a cité en exemple l'Examen périodique universel, qui a « un grand potentiel d'amélioration des droits de l'homme », ainsi que les résolutions thématiques. A cet égard, il a rappelé que l'égalité homme-femme était une priorité de son pays, de même que la lutte contre la torture et les mauvais traitements. Le Danemark présentera une résolution consacrée spécifiquement à la torture lors des situations de détention policière.

M. Jensen a ensuite énuméré les progrès des droits de l'homme dans plusieurs pays, en citant la Tunisie, la Géorgie, le Burkina Faso et le Kenya. Il a également applaudi la création d'une commission vérité et réconciliation au Mali. Le ministre a ensuite invité d'autres pays, comme la Somalie et Sri Lanka, à travailler activement à l'amélioration des droits de l'homme, avant de se pencher sur les « situations déplorables » dans l'est de l'Ukraine et dans la Crimée illégalement annexée, au Burundi, au Soudan du Sud et au Moyen-Orient. Concernant cette région, il a condamné le nombre élevé et croissant d'exécutions, y compris d'enfants et de prisonniers politiques, et a rappelé la responsabilité spéciale à cet égard de deux importants acteurs régionaux, l'Arabie saoudite et la République islamique d'Iran. Il a en outre demandé l'arrêt des attaques indiscriminées contre les civils en Syrie et estimé qu'il n'y aurait pas de solution militaire au Yémen. M. Jensen s'est encore alarmé des atteintes aux droits de l'homme par les groupes terroristes, Daech et Boko Haram en particulier.

Le Danemark, qui n'a jamais été membre du Conseil des droits de l'homme, souhaite y siéger pour la période 2019-2021. Il s'engage à combattre pour la dignité, le développement et le dialogue. Le Danemark soutient en outre la candidature de la Finlande, au nom des pays nordiques, pour 2020-2022.

M. STÉPHANE DION, Ministre des affaires étrangères du Canada, a déclaré que dix ans après que les États Membres aient pris la décision de renforcer l'architecture internationale des droits de l'homme, et cinquante ans après l'adoption des pactes internationaux, force est de constater que les manifestations de l'extrémisme et des comportements discriminatoires sont en hausse, de même que la prolifération d'idées selon lesquelles la diversité est un danger. Pourtant le Canada a réussi le pari du respect de la diversité, preuve, s'il en faut, que d'autres États peuvent mettre le pluralisme en pratique. A cet égard, il a exhorté à œuvrer de concert pour aborder cette question d'une manière ouverte et transparente. Traitant de l'égalité hommes-femmes, il a fait état de la persistance d'une inégalité salariale et mis l'accent sur les efforts du gouvernement Trudeau en faveur de la parité. M. Dion a en outre évoqué un engagement sans faille en vue de rapports de nation à nation avec les peuples autochtones fondés sur la reconnaissance, les droits, le respect, la coopération et le partenariat, dans un esprit de réconciliation.

Par ailleurs, le Canada a été examiné la semaine dernière par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels qui lui a posé des questions de fonds, notamment en ce qui concerne la pauvreté, les sans-abri, l'égalité hommes-femmes, les droits des autochtones et l'éducation. Le ministre canadien des affaires étrangères a fermement dit sa conviction que les gouvernements devaient être ouverts à la critique. S'agissant du financement des organes internationaux des droits de l'homme, il a déclaré que son pays, qui jusqu'ici n'avait pas contribué au budget de base du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, entendait y remédier en versant 15 millions de dollars au cours des trois prochaines années. Ce financement s'ajoutera aux crédits fournis pour soutenir des projets particuliers, a-t-il indiqué. Il a également annoncé une contribution additionnelle de son pays au renforcement de la présence sur le terrain du Bureau du Haut-Commissariat au Burundi, avant de plaider en faveur d'un financement stable du Haut-Commissariat pour qu'il puisse remplir son mandat.

MME PELOMONIE VENSON-MOITOI, Ministre des affaires étrangères du Botswana, a déclaré que le Conseil des droits de l'homme restait une véritable plate-forme pour un dialogue authentique et la coopération entre les nations. C'est encore plus vrai aujourd'hui avec les conflits et actes terroristes ou encore les pandémies. Le Botswana est très préoccupé par le conflit en Syrie et alarmé de la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée. La ministre a demandé au Gouvernement de ce pays de collaborer avec les organismes de droits de l'homme et de permettre l'accès humanitaire.

En Afrique, le Botswana est préoccupé par la situation des droits de l'homme au Burundi. Il appuie les mandats des personnalités désignées par l'Union africaine pour entrer en contact avec les différentes parties. Il se félicite par ailleurs de la signature de l'accord de transition au Soudan du Sud et de la création de la commission mixte d'évaluation, présidée par un ancien Président du Botswana. Au vu de la crise de la migration, notamment en Europe, il reste beaucoup à faire pour lutter contre le racisme et la xénophobie, a estimé Mme Venson-Moitoi, qui a souhaité que la Décennie des personnes d'ascendance africaine et les lignes directrices du Haut-Commissariat sur le profilage racial y contribuent.

Après avoir salué le mécanisme d'Examen périodique universel, la ministre a souhaité qu'à l'issue de son second cycle soit mis en place au Conseil un mécanisme de suivi de la mise en œuvre des recommandations acceptées par les États examinés. Le Botswana, pour sa part, continue de remplir ses obligations en tant que démocratie et s'engage à coopérer pleinement avec tous les organes de droits de l'homme des Nations Unies car il y voit un moyen d'améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays. Mme Venson-Moitoi par ailleurs rendu hommage à l'action des organisations non gouvernementales et de la société civile en faveur des droits de l'homme. Elle a enfin apporté son soutien à la position du Haut-Commissaire - pour qui nommer et blâmer les auteurs des violations des droits de l'homme ne porte pas atteinte à la souveraineté des États. Elle s'est prononcée en faveur de l'indépendance du Haut-Commissariat, « miroir des besoins de nos concitoyens, même au prix de l'inconfort des Gouvernements ».

M. IGOR CRNADAK, Ministre des affaires étrangères de la Bosnie-Herzégovine, a déclaré que le Conseil des droits de l'homme demeurait le seul organe international permettant aux États et aux organisations non gouvernementales et de la société civile de se rencontrer. La Bosnie-Herzégovine s'est engagée en faveur du dialogue au sein de sa société, le renforcement des droits de l'homme étant l'un des éléments clés de l'ère démocratique post-conflit, a-t-il ajouté. L'éducation, la prise de conscience et la coopération mutuelle sont indispensables à l'éducation du peuple aux fins de mieux sensibiliser au respect des droits de tous par tous. M. Crnadak a souligné que la Bosnie-Herzégovine était l'un des six États dans le monde à avoir pleinement mis en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. Il a également fait valoir que son Gouvernement s'employait à apporter une réponse démocratique à l'escalade de la violence grâce à des politiques de prévention de la radicalisation, du terrorisme et de l'extrémisme.

La Bosnie-Herzégovine ne se trouve pas sur la principale route migratoire mais son Gouvernement prépare néanmoins un scénario pour le cas où afflueraient des réfugiés. Cette préparation implique également la sensibilisation de sa population à accueillir des personnes dans le besoin, comme elle en a elle-même bénéficié pendant la guerre. En conclusion, M. Crnadak a encouragé à trouver un juste équilibre entre les dimensions sociales, économiques et environnementales du développement, tout en respectant les droits de l'homme. Enfin, la Bosnie-Herzégovine a présenté sa candidature à l'Union européenne le 15 février aux fins de la faire entrer dans « la grande famille des nations de l'Europe ».

M. BASSAM TALHOUNI, Ministre de la justice de la Jordanie, a dénoncé les « groupes terroristes et gangs » qui utilisent la religion comme paravent pour leurs violations des droits de l'homme au Moyen-Orient. Il a réaffirmé que la clé du règlement des conflits dans la région et ailleurs dans le monde était le règlement de la question palestinienne. Il a rappelé à cette fin la nécessité de voir créé un État palestinien dans les frontières de 1967 et ayant Jérusalem comme capitale, avant de dénoncer la politique israélienne et la colonisation. Par ailleurs, la Jordanie appelle chacun à œuvrer pour une transition pacifique en Syrie qui permettrait de garantir l'intégrité territoriale et l'indépendance politique du pays, permettant ainsi le retour des millions de réfugiés syriens.

La Jordanie a réalisé d'importantes avancées dans le domaine des droits de l'homme, a affirmé le ministre, qui a insisté notamment sur la diffusion d'une culture de modération et de tolérance, y compris dans la Constitution, dont le tiers des articles ont été modifiés en ce sens. M. Talhouni a cité de nombreuses réformes dont le pays s'enorgueillit, rappelant notamment que la Jordanie avait mis en place un organe indépendant d'organisation et de supervision des élections pour en garantir la transparence.

M. Talhouni a mis en avant la coopération de son pays avec le Conseil des droits de l'homme et les organes de traités, dont la Jordanie reconnaît le rôle central. Elle a d'ailleurs ratifié de nombreux instruments internationaux des droits de l'homme et a lancé des invitations aux titulaires de mandat des procédures spéciales, la dernière visite datant de l'automne dernier. La Jordanie insiste en outre sur l'importance de la coopération régionale en matière de protection des droits de l'homme . Elle a ainsi été le premier État arabe à ratifier, en 2004, la Charte arabe des droits de l'homme, puis à soumettre son premier rapport à la Commission arabe des droits de l'homme, en 2010. Le Ministre a conclu en présentant la Jordanie comme « une oasis de stabilité et de respect des droits de l'homme ».

MME BARBEL KOFLER, Commissaire pour la politique des droits de l'homme et de l'aide humanitaire du Gouvernement fédéral d'Allemagne, a fait observer qu'il y a dix ans, nul ne pouvait prévoir que l'Europe ferait face à une crise des réfugiés sans précédent. Trop longtemps, la communauté internationale a gardé le silence face au régime syrien, préférant accorder la priorité à la stabilité politique et à la sécurité plutôt qu'aux droits de l'homme. Suspendre les droits de l'homme pour maintenir la stabilité équivaut à arrêter sa montre pour suspendre le temps, a-t-elle estimé. Mme Kofler a ensuite livré un plaidoyer en faveur du respect des libertés fondamentales, en particulier de la société civile, des dissidents, des défenseurs des droits de l'homme et des manifestants qui affirment leur droit de protester. Par ailleurs, si la protection des droits de l'homme et des normes du travail relèvent en premier lieu des États, les entreprises sont également une partie déterminante de l'équation de la chaîne de l'offre et du droit à un emploi digne et décent. Etant donné les activités mondiales des entreprises allemandes, l'Allemagne a tenu à prendre en considération l'impact de leurs activités dans des pays tiers, notamment en s'appuyant sur les Principes directeurs des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l'homme. Elle a insisté sur le caractère universel et indivisible des droits de l'homme, arguant que cela n'avait rien à avoir avec la tolérance et le respect de la diversité culturelle. Les droits de l'homme ne diffèrent pas d'une région à l'autre. Les victimes des violations des droits de l'homme, indépendamment de leur origine, leur langue et la religion qu'il professent, mettront toujours l'accent sur l'universalité des droits de l'homme, a-t-elle affirmé en conclusion.

M. ALEXANDRE N. ZENON, Vice-Ministre des affaires étrangères de Chypre, a estimé que la phrase prononcée voici deux cents ans par Thomas Jefferson – « La prise en charge de la vie humaine et le bonheur, et non leur destruction, est le premier et le seul objet de bon gouvernement » - devait servir de ligne de conduite à la communauté internationale. Face aux horreurs du terrorisme, il faut avant tout protéger le droit à la vie, droit humain le plus sacré, a poursuivi M. Zenon. La valeur de la vie est consacrée par la Déclaration universelle des droits de l'homme et est reconnue comme sacrée dans toutes les religions, a également rappelé le Vice-ministre. Il a cité le roi Abdallah de Jordanie pour qui « la victoire ou la défaire dans la guerre mondiale (contre le terrorisme) fixera les valeurs mondiales et définira notre sécurité et notre mode de vie au XXIe siècle ». Mais les États ont aussi le devoir de veiller à ce que les mesures de lutte contre le terrorisme soient moralement saines, proportionnées et qu'elles respectent les droits de l'homme, a poursuivi M. Zenon. Des mesures excessives pourraient susciter un sentiment d'injustice et d'aliénation et être exploitées par des extrémistes, a averti le Vice-Ministre.

M. Zenon a souligné que la situation des droits de l'homme à Chypre ferait l'objet d'un rapport annuel lors de la présente session du Conseil. Il a regretté que, malgré de nombreux jugements de la Cour européennes des droits de l'homme qui ont condamné la Turquie pour des violations à Chypre, celle-ci n'avait toujours pas donné effet à ces décisions. Face à la division, les deux communautés de l'île ont renoué le dialogue et des progrès ont été réalisés dans de nombreux domaines, s'est félicité M. Zenon, qui a toutefois rappelé la persistance de problèmes complexes. M. Zenon a en outre fait observer que, quel que soit le niveau de bonne volonté des deux communautés, la contribution active de la Turquie, qui compte 40 000 militaires dans l'île, était indispensable. Il a en outre annoncé l'intention de Chypre de présenter au Conseil une résolution sur la protection du patrimoine et des droits culturels en temps de conflit car les destructions se font de plus en plus importantes et nombreuses. Le texte, a-t-il précisé, réaffirmera l'importance du patrimoine culturel en tant qu'élément d'une meilleure compréhension d'un passé commun et, par ce biais, d'un avenir commun.

M. PETER MAURER, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que l'un de ses premiers déplacements l'avait conduit en Syrie avant le conflit, où il est retourné la semaine dernière et où le constat est accablant. La guerre a coupé la population du reste du monde, sans aucun accès à des secours. Tout ce qui permet à une société de tenir debout est anéanti par les effets de la guerre. En quelques années seulement, des décennies d'efforts peuvent être réduits à néant, à l'instar de ce que l'on voit en Somalie, en Afghanistan, en Iraq ou au Soudan du Sud. La Croix-Rouge tente de maintenir un semblant de fonctionnement des infrastructures de base.

Lorsque le droit international humanitaire n'est pas respecté, la vie – une vie digne – devient impossible et lorsque les droits fondamentaux ne sont pas respectées, il n'y a plus d'espoir, a-t-il dit. Pour M. Maurer, la meilleure façon de contrer l'impact à long terme des conflits prolongés susceptibles d'affecter des générations entières, consiste à prévenir les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme. « C'est votre rôle, en tant qu'États, de maintenir, de protéger et de soutenir les services publics, même, aussi et surtout en temps de guerre et de violence », a ensuite déclaré le Président du CICR, qui a demandé à tous les États de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour que la dignité et les droits des hommes, des femmes et des enfants soient respectés et pour que tous puissent accéder, sans entraves, aux services de base tels que la santé, l'eau, le logement et l'éducation.

M. THORBJON JAGLAND, Secrétaire général du Conseil de l'Europe, a déclaré qu'il était temps de dresser un bilan de la situation mondiale. Pour le Secrétaire général, tout a commencé avec le nationalisme qui a conduit l'Europe à la guerre. Du nationalisme, on est passé à l'internationalisme, qui devait défendre les droits de tous, y compris des minorités. Cet esprit est aujourd'hui menacé par la crise des migrants et des réfugiés, à cause des initiatives nationales de certains pays qui ne veulent plus appliquer ces principes nés au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, principes qui constituent pourtant les fondements du système international. En Hongrie par exemple, le Premier ministre entend organiser un référendum sur l'accueil des migrants et réfugiés. En Norvège, le gouvernement veut que les traités soit réécrits. Des États veulent fermer des portes, renvoyer des enfants à la guerre, sans tenir compte de leur intérêt supérieur, a déploré le Secrétaire général, regrettant que cela se produise dans les pays riches. Il est vital aujourd'hui de trouver une solution à la crise syrienne, a encore déclaré le Secrétaire général du Conseil de l'Europe qui appelé la Fédération de Russie et les États-Unis à agir en ce sens. M. Jagland a également mis en garde contre les instabilités qui secouent le monde et qui sont parties d'événements en apparence mineurs, notamment en Tunisie où tout a commencé par l'immolation d'un jeune homme.

M. IOANNIS AMANATIDIS, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Grèce, a expliqué que son pays avait présenté sa candidature au Conseil des droits de l'homme pour la période 2019-2021, ce qui serait son premier mandat au sein de cette institution. Alors que l'impact des mesures d'austérité et de la dette extérieure pour les droits de l'homme étaient particulièrement visibles en Grèce, le pays a participé très activement à diverses initiatives, en particulier au niveau régional, afin de traiter de questions importantes comme le droit au travail, le problème mondial de la drogue ou encore la défense et la promotion des droits culturels et du patrimoine. Le Vice-Ministre, qui a rappelé que la Grèce avait été un des parrains de la résolution sur la protection des journalistes, a annoncé que son pays présenterait au Conseil un projet de résolution sur la promotion des droits de l'homme au travers du sport et de l'idéal olympique.

Revenant sur les conséquences de la crise économique en Grèce, notamment sur le tissus social, M. Amanatidis a affirmé que, tout en respectant ses engagements internationaux, le pays s'attacherait à venir en aide aux plus nécessiteux. Il a cité l'adoption en 2014 du premier plan national sur les droits de l'homme, un plan national d'action pour les droits de l'enfant et un nouveau plan d'action pour l'égalité de genre, en cours d'élaboration pour traiter des défis posés par la crise économique. Ces efforts témoignent de la volonté de la Grèce de continuer à promouvoir les droits de l'homme pour tous, avec un accent particulier en faveur des plus vulnérables, a poursuivi le Vice-Ministre. M. Amanatidis a rappelé que, compte tenu de sa situation géographique, son pays était exposé à une pression particulièrement forte de la part des migrants et réfugiés, dont la plupart fuient des situations de guerre et de conflit. Il a déclaré que la Grèce dépensait des efforts et des ressources financières considérables pour les accueillir le plus dignement possible, y compris avec l'appui de la population locale. Prendre des mesures unilatérales et fermer les frontières ne sauraient être une solution durable aux migrations et pourrait déboucher sur une crise humanitaire très grave, a-t-il averti. Le principal objectif de la Grèce est de sauver des vies et de protéger la dignité et les droits fondamentaux des personnes et groupes qui sont le plus dans le besoin, personnes âgées, femmes enceintes, enfants…. Toutefois, a-t-il conclu, la solution réaliste à cette crise consiste à mettre un terme, d'urgence, au conflit en Syrie et à trouver une solution politique viable.

MME DRAGOLJUBA BENČINA, Ministre adjointe des affaires étrangères de la Slovénie, a mis l'accent sur la complémentarité qui existe entre paix et sécurité, développement durable et droits de l'homme. Elle a insisté sur l'attention qu'il convient donc d'accorder aux situations des droits de l'homme à travers le monde, en accordant une attention spéciale aux droits des femmes et à la protection des groupes vulnérables – parmi lesquels figurent les enfants, les personnes âgées et les personnes appartenant à diverses minorités – et en combattant toutes les formes de discrimination.

Les défis découlant de différentes crises et les migrations internationales qui en résultent figurent parmi les principaux problèmes auxquels la communauté des États soit aujourd'hui confrontée, a poursuivi Mme Benčina. Il convient de redoubler d'efforts pour trouver des solutions durables à ces questions et, ce faisant, de se souvenir que les droits de l'homme s'appliquent à tout un chacun, y compris aux migrants et aux réfugiés, a-t-elle indiqué. La Ministre adjointe des affaires étrangères de la Slovénie a ensuite relevé qu'après cinq années de conflit, l'on assiste à une cessation des hostilités en Syrie, ce qui offre une opportunité d'œuvrer à une cessez-le-feu durable, à un accès humanitaire sans entrave et à un processus de transition politique mené par les Syriens eux-mêmes; elle a appelé tous ceux qui sont impliqués à respecter leurs engagements et à continuer de soutenir les efforts de l'Envoyé spécial, M. de Mistura, en vue de reprendre les pourparlers de Genève conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité. Mme Benčina a par ailleurs souligné qu'il doit être un terme aux atrocités commises par les groupes terroristes tels que Daech et Boko Haram, les responsables devant en outre être traduits en justice et rendre des comptes pour leurs crimes. Mme Benčina a d'autre part souhaité que le Conseil des droits de l'homme établisse sans délai une procédure spéciale consacrée à la triste situation qui prévaut au Soudan du Sud. L'Ukraine est un autre sujet de préoccupation pour la Slovénie, a-t-elle ajouté, indiquant suivre de près l'évolution sur le terrain dans l'est du pays et dans la péninsule de Crimée. Enfin, Mme Benčina a indiqué que son pays présenterait à la présente session un projet de résolution sur l'éducation aux droits de l'homme.

M. EMMERSON D. MNANGAGWA, Vice-Président et Ministre de la Justice et des affiaires juridiques et parlementaires du Zimbabwe, a rappelé que le Gouvernement de son pays s'était engagé à maintenir la coopération avec le Conseil des droits de l'homme et a affirmé que le Zimbabwe poursuivait son élan en faveur de la promotion et la protection des droits de l'homme. Le pays met en œuvre une programme de développement social et économique durable par l'utilisation judicieuse et optimale des ressources dont il dispose (programme ZIMASSET), a expliqué M. Mangagwa, qui a annoncé la réalisation du droit au développement grâce aux quatre piliers du ZIMASSET: sécurité alimentaire et nutrition, services sociaux et éradication de la pauvreté, infrastructure et ajout de valeur et partage.

Le Zimbabwe s'est engagé à remplir ses obligations internationales en présentant des rapports aux organes de traités de droits de l'homme auxquels il a adhéré, a poursuivi le Vice-Président. Il a en outre rappelé que son pays avait accepté 130 des 177 recommandations qui lui avaient été adressées à l'issue de premier Examen périodique universel en 2011 et s'est dit persuadé que le rapport du pays serait prêt pour le second EPU, prévu pour lui en juin prochain. M. Mnangagwa a par ailleurs indiqué qu'un mécanisme avait été mis en place pour assurer la transposition en droit interne des obligations contractées par le pays au titre des différents traités. Il a en outre rappelé que son avait adopté en 2013 une nouvelle Constitution saluée pour son contenu démocratique et a expliqué que le Gouvernement avait entrepris une vaste processus de révision de ses lois pour les rendre conformes à cette Constitution. Il a en outre rappelé que, récemment, la Cour constitutionnelle s'était prononcée sans équivoque contre le mariage des enfants, sur la base de la nouvelle Constitution.

M. ALFONSO NSUE MOKUY, Vice-Premier Ministre pour les droits de l'homme de la Guinée équatoriale, a confirmé la volonté de son Gouvernement de promouvoir et protéger les droits de l'homme et de maintenir une coopération avec le système des Nations Unies à cet effet. Cette volonté se manifeste par l'adhésion et la ratification de divers instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, qui ont par ailleurs été incorporés au système législatif national, a-t-il indiqué. Le Gouvernement a par ailleurs jeté les bases d'un développement et d'une gouvernance sociale pour tous les citoyens, a-t-il ajouté. Le cadre institutionnel et les infrastructures économiques et sociales ont également été améliorés, de même que la gestion des ressources humaines, a-t-il poursuivi.

Le Vice-Premier Ministre pour les droits de l'homme a également souligné que la Guinée équatoriale avait accepté les visites des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme et garanti leur libre circulation. Les personnes qui coopèrent avec elles ne feront l'objet d'aucune représailles, a-t-il assuré. Les libertés d'expression, d'association et de la presse, ainsi qu'un libre accès à l'Internet sont garantis en Guinée-Equatoriale, a-t-il ajouté. Les droits sociaux et économiques ont également fait l'objet d'une attention du Gouvernement, notamment aux fins de la réduction de la pauvreté et d'une amélioration du système de santé ainsi que des infrastructures routières. Nonobstant tous ces efforts et réalisations, le Gouvernement équato-guinéen demande tout de même l'appui et l'assistance de la communauté internationale pour qu'il puisse poursuivre son œuvre en faveur des droits de l'homme.

M. IGOR LUKŠIĆ, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et de l'intégration européenne du Monténégro, a affirmé que son pays continuerait de faciliter et garantir l'indépendance du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Il a salué le rôle dirigeant du Conseil des droits de l'homme et a estimé que les crises et violations actuels exigeaient que les États Membres des Nations Unies rappellent leur rattachement à un système de promotion et de protection des droits de l'homme fort. Il a jugé déplorables les violations des droits de l'homme massives commises à travers le monde, citant en particulier la situation en Syrie, qui contraint des millions de personnes à fuir leur foyer, qui plus est en courant le risque d'être victimes de la traite ou d'autres violations des droits de l'homme.

M. Lukšić a en outre rappelé que les besoins en développement pouvaient être source de conflit et donc de violations des droits de l'homme. Il a plaidé pour le renforcement des relations entre le Conseil des droits de l'homme et les organes de traités, d'une part, et la société civile et les organisations non gouvernementales, de l'autre. M. Lukšić a rappelé que le Sommet du Millénaire de 2005 avait insisté sur l'inclusion et la participation de tous les groupes et individus. Alors que l'on célèbre les dix ans du Conseil des droits de l'homme, il faut s'interroger sur tout ce qui n'a pas été fait, a-t-il déclaré.

M. RI SU-YONG, Ministre des affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée, a rappelé qu'à la dernière session du Conseil des droits de l'homme, son pays avait fait part de son intention de réfléchir à sa participation à cet organe, compte tenu de la politisation, de la sélectivité et de la pratique d'une politique du «deux poids, deux mesures» au sein du Conseil. Une année plus tard, il a constaté avec regrets que la situation avait empiré. M. Ri a affirmé que son pays est un État socialiste centré sur le peuple, qui place la personne au cœur de toutes ses actions. De ce fait, le système socialiste garantit la jouissance de tous les droits de l'homme et des libertés fondamentales, avec, notamment, un plein accès à l'éducation et aux soins de santé.

Le Ministre a ajouté qu'il n'existait pas dans son pays de violations des droits de l'homme aussi persistantes et massives que celles liées à la violence armée qui fait 13 000 victimes par an aux États-Unis. Il n'y a pas non plus des dizaines de milliers de réfugiés noyés en mer ou asphyxiés dans des conteneurs comme c'est le cas en Europe, ni de crimes contre l'humanité commis à grande échelle, à l'instar des massacres de millions de civils innocents commis par le Japon durant la Seconde Guerre mondiale, a poursuivi M. Ri. Il ne saurait y avoir de dialogue sincère sur les droits de l'homme sans vérité, a-t-il souligné. Il a estimé regrettable que le Conseil, dont la seule mission est de promouvoir et protéger les droits de l'homme, ait été transformé en mécanisme politisé. Il a dit refuser d'être lié par les résolutions du Conseil relatives à son pays, dénonçant par là-même la «commercialisation» du processus de vote au sein des mécanismes internationaux des droits de l'homme, ce qui constitue une manifestation extrême de la politisation des droits de l'homme et un obstacle majeur à la coopération sincère dans ce domaine.

M. SAÏD PAGUINDJI, Ministre de la justice de la République centrafricaine, a commencé par remercier la communauté internationale pour l'appui et l'assistance accordés à son pays, dès les premières heures de la crise qu'a traversé son pays en 2012, puis en 2013. Cet appui a abouti à la tenue sans encombre d'une élection présidentielle; le nouveau Chef de l'État, M. Faustin-Archange Touadéra, prendra officiellement ses fonctions le 30 mars 2016. Dans l'intervalle, le Gouvernement de transition a insisté sur le fait que la lutte contre l'impunité serait sa priorité, a précisé le Ministre. Il a annoncé que pour la première fois dans un pays toujours en conflit, un tribunal spécial a été créé : cette Cour pénale spéciale sera un mécanisme hybride composé de magistrats nationaux et internationaux, établi pour une durée de cinq ans, renouvelable. Le mandat de cette Cour prévoit une coopération avec la Cour pénale internationale, mais aussi la compétence de poursuivre les crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis sur le territoire centrafricain. Elle aura la possibilité de prononcer des peines allant jusqu'à la perpétuité, a encore indiqué le Ministre, soulignant que cette démarche confirme de fait la volonté de la République centrafricaine d'abolir la peine de mort, qui de toute façon n'a plus été appliquée depuis 1981. Il a cependant fait observer que pour devenir réalité, cette Cour a maintenant besoin de personnel qualifié et de financements, tant nationaux qu'internationaux. En conclusion, il a reconnu que son pays doit encore faire face à de nombreux défis, tout en soulignant les acquis en matière de paix enregistrés avec l'appui de la communauté internationale.

M. GEOFFREY ONYEAMA, Ministre des affaires étrangères du Nigéria, a réitéré l'attachement de son pays aux idéaux du Conseil et à tous ses mécanismes, y compris les procédures spéciales. Il s'est dit particulièrement satisfait du fonctionnement de l'Examen périodique universel, miroir permettant aux États de jauger les progrès dans la mise en œuvre des instruments relatifs aux droits de l'homme. Le Ministre nigérian a fait observer que cette session coïncide avec une période exceptionnellement difficile qui impose aux États de s'attacher encore davantage au plein respect et à la garantie de tous les droits. L'égalité et l'élimination de la pauvreté endémique sont au cœur du Programme de développement durable à l'horizon 2030, a-t-il encore commenté, en rappelant que le Nigéria avait nommé des femmes à des postes de décision et s'employait activement à l'élimination de toutes formes de discrimination à leur égard. Il a enfin assuré le Conseil de l'engagement indéfectible du Nigéria en faveur de la promotion et la protection de tous les groupes vulnérables.
Le Nigéria lutte en outre contre le terrorisme et l'extrémisme violent, surtout avec la présence du mouvement Boko Haram dans les régions du Nord-Est. Ce faisant, il reconnaît la nécessité de respecter les droits de l'homme et ses obligations humanitaires. Le Ministre a à cet égard trouvé regrettable qu'en dépit des actions menées contre le terrorisme, le problème des réfugiés et des personnes déplacées subsiste. Il a exhorté le Conseil à envisager d'apporter une assistance financière et humanitaire supplémentaire aux pays du bassin du Lac Tchad, conformément à sa résolution sur «Les atrocités commises par le groupe terroriste Boko Haram et leurs effets sur les droits de l'homme dans les pays touchés» adoptée en avril dernier. Le Ministre des affaires étrangères du Nigéria a en outre invité tous les États à respecter et protéger les droits de tous les migrants, des demandeurs d'asile, des apatrides et des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays partout dans le monde.

M. JEAN-CLAUDE GAKOSSO, Ministre des affaires étrangères et de la coopération de la République du Congo, a affirmé que la politique de son Gouvernement visait à améliorer le cadre juridique et institutionnel en l'adaptant aux exigences du temps et en veillant au renforcement des capacités des organes de promotion et de protection des droits de l'homme. Ceci se fait notamment par l'intégration des dispositions des instruments internationaux et régionaux de droits de l'homme auxquels le Congo est lié. Dans ce contexte, le Ministre a annoncé que son Gouvernement a érigé au niveau de disposition constitutionnelle l'abolition de la peine de mort. Sa Constitution reconnaît en outre aux minorités, aux personnes âgées, aux personnes handicapées, aux femmes et aux jeunes les places valorisantes qui auraient dû toujours être les leurs dans la société congolaise.

La République du Congo, qui entend participer pleinement au renforcement de l'autorité du Conseil des droits de l'homme, réaffirme son attachement au multilatéralisme, aux valeurs de paix et de progrès. Ainsi, elle veille attentivement à la stabilité de l'Afrique centrale et apporte sa modeste contribution au retour de la paix en République Centrafricaine. À cet égard, M. Gakosso a salué le succès des élections dans le pays et a appelé la communauté internationale à soutenir le nouveau président centrafricain. Le Ministre a ensuite fait part de la préoccupation de son pays face à la situation au Burundi. Il a apporté son appui à l'envoi d'une délégation de haut niveau de l'Union africaine, de même qu'à la médiation menée par la Communauté des États de l'Afrique de l'Est. Revenant sur la crise des migrants, le Ministre a estimé que la communauté internationale devait combattre avec détermination «les nationalismes renaissants, les postures racistes sans vergogne et les actes xénophobes», de même que tous les comportements haineux «islamophobie, afrophobie, arabophobie». La Seconde guerre mondiale avait elle aussi commencé par la montée des nationalismes, a rappelé M. Gakosso.


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