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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA NAMIBIE

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique de la Namibie sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le rapport a été présenté par le Ministre de la justice de la Namibie, M. Albert Kawana, qui a souligné que le pays était marqué par la stabilité politique, une gestion macroéconomique prudente, une croissance économique modérée et une politique de conservation de ses ressources naturelles, mais qu'il avait subi une sécheresse prolongée due au changement climatique, rendant encore plus ardue la lutte contre la pauvreté et l'inégalité. Il a par ailleurs fait valoir que le budget du Médiateur avait été augmenté afin de lui permettre d'enquêter sur les cas d'abus des droits de l'homme et de mener des campagnes de sensibilisation. Le Ministre de la justice a aussi indiqué qu'un projet de loi devrait être déposé devant le Parlement avant la fin de l'année pour remédier à l'absence de loi spécifique criminalisant la torture. Si la violence contre les femmes demeure un phénomène préoccupant pour les autorités, les services d'assistance aux victimes ont été améliorés et des campagnes de sensibilisation sont menées en direction de la société. La loi réprimant la violence domestique est en cours de révision afin d'aggraver les peines. M. Kawana a souligné que la Namibie comptait actuellement quelque 3000 réfugiés et demandeurs d'asile, une trentaine supplémentaire arrivant dans le pays tous les mois, et a attiré l'attention à cet égard sur la mise en œuvre d'une politique d'intégration.

La délégation namibienne était également composée de Mme Sabine Böhlke-Möller, Représentante permanente de la Namibie à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de l'intérieur et de l'immigration, du Ministère de l'égalité de genre et du bien-être de l'enfance, du Ministère de la sûreté et de la sécurité et du Ministère de l'éducation, des arts et de la culture. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du projet de loi sur la torture; du statut du Médiateur; de la parité hommes-femmes; des mesures antidiscriminatoires prises en faveur des personnes séropositives; de cas de stérilisation forcée; de la discrimination résultant des mariages coutumiers; de la violence domestique; du problème des grossesses précoces, de l'avortement et de l'abandon de nouveau-nés; de l'égalité des enfants nés hors mariage; des questions d'éducation; du respect du droit du travail; d'allégations sur l'existence de fosses communes datant de la guerre de libération.

Les membres du Comité ont notamment souligné que, pour être pleinement conforme aux Principes de Paris, le bureau du Médiateur devrait pouvoir contrôler son budget et gérer directement son personnel. La question de la discrimination d'ordre culturel envers les femmes, fondée sur le droit coutumier, a également été abordée. Les experts ont aussi noté que l'interdiction de l'interruption de grossesse volontaire avait pour conséquence l'abandon de nouveau-nés et des avortements clandestins. Contrairement à ce qu'affirme la délégation, il semble bien que des pratiques néfastes persistent dans certaines régions du pays, notamment les mutilations génitales féminines. Les experts ont aussi porté leur attention sur la violence à l'égard des femmes et la nécessité de changer les mentalités dans ce domaine. L'importance de garantir le respect des droits des peuples autochtones a aussi été soulignée.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport de la Namibie qu'il rendra publiques à l'issue de la session, qui se termine le jeudi 31 mars.


Le Comité entame cet après-midi l'examen du rapport périodique de la Suède (CCPR/C/SWE/7) qu'il achèvera demain matin.


Présentation du rapport de la Namibie

Le Comité est saisi du rapport périodique de la Namibie (CCPR/C/NAM/2), ainsi que de ses réponses (CCPR/C/NAM/Q/2/Add.1, en anglais seulement) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CCPR/C/NAM/Q/2).

M. ALBERT KAWANA, Ministre de la justice de la Namibie, a précisé que le rapport de son pays avait été élaboré en concertation avec le Forum des organisations non gouvernementales, organisation faîtière des ONG dans le pays. Il a souligné que la Namibie avait fait l'objet d'un examen dans le cadre de l'Examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme en janvier dernier et qu'il venait d'être entendu par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels. Au cours des vingt-cinq dernières années, le pays a été marqué par la stabilité politique, une gestion macroéconomique prudente, une croissance économique modérée, une politique de conservation de ses ressources naturelles. Malheureusement, il subit une sécheresse prolongée due au changement climatique. Cela a pour résultat de rendre encore plus ardue la lutte contre la pauvreté et l'inégalité en raison de la nécessité de réorienter les ressources pour faire face à la sécheresse.

Répondant aux questions adressées à son pays par le Comité en prévision de l'examen de son rapport périodique, M. Kawana a notamment indiqué que le budget du Médiateur avait été augmenté afin de lui permettre d'enquêter sur les cas d'abus des droits de l'homme et de mener des campagnes de sensibilisation. Son personnel a été augmenté afin de créer une division chargée de l'éducation aux droits de l'homme. Le Médiateur a rendu un projet de loi sur les droits des communautés marginalisées. Il a facilité le processus de préparation et de rédaction du Plan national d'action des droits de l'homme qui a été adopté à la fin 2014. Bien que le bureau du Médiateur bénéficie déjà du statut A accordé par le Comité international de coordination des institutions nationales des droits de l'homme, les autorités sont conscientes qu'il soit nécessaire de consolider son autonomie, ainsi que le recommande le Comité de coordination.

Les principaux problèmes auquel fait face la Namibie étant liés au chômage, l'État a lancé une Stratégie d'éradication de la pauvreté, qui prétend être plus ambitieuse qu'un simple plan de réduction de la pauvreté. Le Ministère de l'éradication la pauvreté et de l'assistance sociale a été créé en 2015 avec le mandat de coordonner tous les programmes visant à en finir avec la pauvreté dans le pays. Le pourcentage de personnes recevant des allocations sociales – pour handicap, au titre de l'aide à la vieillesse indigente, à l'enfance ou en faveur des orphelins – a fortement augmenté. Par ailleurs, un salaire minimum a été instauré pour les travailleurs domestiques à la fin 2014, et il est envisagé de l'étendre à tous les travailleurs.

M. Kawana a indiqué que pour remédier à l'absence de loi spécifique criminalisant la torture, un projet de loi devrait être déposé devant le Parlement avant la fin de l'année. Ce projet reprend la définition de la torture contenue dans la Convention contre la torture.

L'an dernier, a été adoptée la loi de protection de l'enfance qui traite de la justice juvénile, ainsi que de l'adoption et de la protection contre les pratiques néfastes. Il a précisé que les mutilations génitales féminines n'étaient pas pratiquées en Namibie. Par ailleurs, le premier «Avocat des enfants» a été nommé auprès du Médiateur. Quant à la loi sur le statut de l'enfant de 2006, elle instaure l'égalité absolue entre les enfants nés dans ou hors mariage. Depuis 2014, l'école élémentaire est gratuite, la mesure ayant été étendue au secondaire l'an dernier.

La violence contre les femmes demeure un phénomène préoccupant pour les autorités, qui ont amélioré les services d'assistance aux victimes. Des campagnes de sensibilisation sont aussi menées en direction de la société. La loi réprimant la violence domestique est en cours de révision afin d'aggraver les peines. Par ailleurs, la politique nationale du genre est en cours d'application pour la décennie 2010-2020.

M. Kawana a souligné que la Namibie compte actuellement quelque 3000 réfugiés et demandeurs d'asile, une trentaine supplémentaire arrivant dans le pays tous les mois. Une politique visant à leur intégration est appliquée par le Ministère de l'intérieur et de l'immigration qui concerne notamment les derniers réfugiés angolais, qui sont au nombre de 2400.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a abordé la question de la place accordée au Pacte dans l'ordre juridique national. Il a constaté que le Parlement avait le pouvoir d'adopter des lois dérogeant aux dispositions du Pacte et a souhaité savoir si la délégation pouvait préciser le statut du Pacte dans le droit namibien.

En ce qui concerne la procédure de plainte, l'expert a demandé si un plaignant ayant obtenu gain de cause auprès du Comité devait néanmoins en repasser par un tribunal national pour faire valider son bon droit.

Cet expert a aussi souligné que pour être pleinement conforme aux Principes de Paris, le Médiateur devait pouvoir contrôler son budget et gérer directement son personnel. Le Parlement namibien envisage-t-il de faire en sorte que ce soit le cas, a-t-il demandé, soulignant que c'était une nécessité pour assurer une indépendance complète de l'institution du médiateur.

Le même expert a abordé la question des droits des handicapés, estimant nécessaire d'obliger les employeurs à embaucher un minimum de travailleurs handicapés. Il s'est interrogé sur les raisons d'une relative inefficacité du droit du travail, estimant qu'il était sans doute nécessaire de renforcer la législation dans ce domaine.

Un autre membre du Comité, qui a mentionné les multiples discriminations à l'égard des femmes, a noté que le Plan national des droits de l'homme prévoyait un certain nombre d'actions à cet égard. Ces projets, ainsi que les textes contre la discrimination se traduisent-ils dans la réalité, a-t-il demandé. Il a aussi voulu savoir ce qu'il en était des cas de stérilisation forcée, notamment concernant des personnes porteuses du VIH/sida, notant que le rapport était silencieux à ce sujet. Une experte a souhaité savoir si les victimes de stérilisations forcées avaient bénéficié d'une indemnisation.

Un expert a aussi évoqué les droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres, notant que le Gouvernement estimait que ces personnes ne souffraient pas de discrimination, leur identité s'exprimant dans la sphère privée. Il a néanmoins relevé des informations faisant état d'actes de harcèlement de la part de la police à leur endroit. Il a aussi demandé ce qui retardait la présentation du projet de loi sur la torture au Parlement.

Une experte a pour sa part attiré l'attention sur la discrimination d'ordre culturel envers les femmes sur la base du droit coutumier, qui a un statut de même rang que la Common Law, comme l'indique la Namibie dans ses réponses aux questions écrites du Comité. La société civile est préoccupée notamment de l'absence de législation permettant d'enregistrer les mariages coutumiers. Où en est le projet de loi visant à éradiquer les discriminations envers les femmes en vertu du droit coutumier, notamment en matière de succession, a-t-elle demandé, s'inquiétant de la lenteur du processus législatif. Les enfants nés hors mariage ne peuvent-ils pas bénéficier des droits de succession comme les enfants légitimes?

Un expert a noté que l'interruption de grossesse n'était pas possible en Namibie, sauf à remplir des conditions strictes liées aux risques d'atteinte à la santé de la femme enceinte. L'obtention d'une autorisation d'avorter se heurte à de lourdes procédures administratives, et exigent l'aval d'un juge. L'abandon de nouveau-nés paraît très répandu, ce qui pourrait s'expliquer par toutes les démarches à entreprendre pour avorter. Les avortements clandestins semblent également relativement fréquents. L'État envisage-t-il d'amender sa législation dans ce domaine, a-t-il demandé. Il a aussi souhaité savoir si les jeunes avaient accès à la contraception.

Contrairement à ce qu'affirme la délégation, selon diverses sources dont le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, un certain nombre de pratiques néfastes existent bien dans certaines régions du pays, en particulier dans la bande de Caprivi, notamment les mutilations génitales féminines.

Bien que le viol soit évidemment un crime dans la législation namibienne, et fait même l'objet d'un Plan d'action national, l'expert a déclaré que le Comité souhaiterait savoir dans quelle mesure les dispositions de la loi étaient mises en œuvre. Quelles mesures sont prises pour enquêter sur les allégations de viol? Il semble qu'un nombre important de victimes retirent leur plainte, soit sous la pression familiale, le sentiment de honte ou la menace, soit parce qu'elles sont découragées par la longueur de la procédure judiciaire, voire même parce qu'elles reçoivent une somme d'argent de la part de l'auteur afin qu'elle retire sa plainte. Des mesures sont-elles en place pour apporter un soutien et une protection aux victimes de viol et de violence familiale, et accroître le nombre de refuges et de services de protection pour les femmes et les enfants? L'expert a aussi souhaité avoir des statistiques sur le nombre de refuges et sur les peines infligées pour viol. Des efforts de formation sont-ils faits en direction de la police et des juges s'agissant de la violence domestique, et des actions de sensibilisation menées en direction de la société?

Une experte a souligné que malgré la loi sur l'égalité salariale, une étude d'ONU-Femmes montrait qu'il existait un écart d'au moins 16% entre hommes et femmes. Elle a aussi noté la faible représentation des femmes dans les postes de responsabilité dans le secteur privé. La délégation peut-elle préciser ce qui est fait pour y remédier? L'experte a mentionné par ailleurs la pratique de la dot, notant que certaines femmes étaient victimes de violences lorsqu'elles n'étaient pas en mesure de la payer. Les autorités entendent-elles abolir cette pratique? Elle a enfin soulevé le problème des crimes passionnels, souhaitant savoir quelles actions de dissuasion les autorités avaient éventuellement prises.

Un autre membre du Comité a attiré l'attention sur la découverte de fosses communes dans la bande de Caprivi qui contiendraient les corps de personnes victimes des forces de l'ordre. Des poursuites ont-elles été engagées contre les responsables, a-t-il demandé. Il a aussi évoqué d'autres cas de disparitions forcées de membres dissidents de la SWAPO, l'ancien mouvement de libération du pays.

Une enquête de 2013 sur la démographie et la santé en Namibie a montré que 40 % des hommes et 35 % des femmes estimaient justifié qu'une femme soit battue par son partenaire lorsqu'elle a laissé brûler les aliments, qu'elle est sortie sans autorisation ou qu'elle a refusé d'avoir des rapports sexuels, a rapporté une experte. Face à ce constat, des mesures sont-elles prises pour faire appliquer plus efficacement la loi contre la violence familiale, a-t-elle demandé. Est-il envisagé d'interdire la pratique du paiement de la lobola, pratique en vertu de laquelle le futur époux fait un don avant le mariage qui justifierait à ses yeux son droit absolu à maltraiter sa femme s'il estime que celle-ci n'est pas à la hauteur.

Une experte a affirmé que contrairement aux affirmations de la délégation, le Comité a connaissance de cas de discrimination envers les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués qui n'ont pas fait l'objet d'actions en justice. Elle a posé une série de questions sur le droit du travail, notamment sur celui des enfants et les actions éventuellement intentées en cas de non-respect. Elle a aussi souhaité avoir des précisions sur le traitement des réfugiés et demandeurs d'asile, souhaitant savoir si des lignes directrices avaient été édictées à cet égard.

Un expert a demandé à avoir des précisions sur les conditions de détention et la détention préventive, notant les lacunes relevées par l'Inspection générale namibienne des prisons. Il a notamment demandé si les magistrats pouvaient effectuer des visites inopinées dans les centres de détention sans crainte de subir des mesures de rétorsion. Des travaux d'intérêt général sont-ils infligés comme alternative à la détention ? Le même expert a aussi observé que, selon certaines informations, il était pratiquement impossible d'obtenir une aide juridictionnelle. La Namibie envisage-t-elle de ratifier le Protocole facultatif à la Convention au Pacte, a-t-il encore demandé. Il a souhaité connaître par ailleurs la position de la Namibie envers le tribunal arbitral de la SADC, la Communauté de développement de l'Afrique australe, dont les prérogatives ont été considérablement réduites.

Une experte a posé une série de questions sur les droits de l'enfant, sur la justice des mineurs en particulier. La loi y relative est très complète, a-t-elle reconnu, saluant son adoption. Elle a souhaité connaître les ressources financières, humaines et techniques qui seront affectées à la mise en œuvre de cette loi.

Un membre du Comité a noté que la loi sur la traite ne différenciait pas le trafic à des fins sexuelles des autres cas, ce qui est peut s'avérer problématique dans le cas des mineurs. Il a aussi abordé la question des droits des minorités, notant que les peuples autochtones, le peuple San en particulier, étaient principalement concernés. Un rapport d'un rapporteur spécial de l'ONU indique que ceux-ci sont rarement consultés, s'agissant notamment des activités minières ou hydro-électriques sur leur territoire. Il a noté par ailleurs le fort taux d'abandon scolaire des enfants autochtones. Existe-t-il des interprètes en langues autochtones dans les tribunaux ?

Un autre expert a mentionné un procès, à la suite des troubles à la fin des années1990 dans la région du Zambèze, dont la procédure, et la détention préventive, a duré une quinzaine d'années, 22 des prévenus, sur plus d'une centaine d'accusés, étant décédés en détention avant son aboutissement. Il semble qu'un certain nombre d'aveux aient été obtenus sous la contrainte, voire la torture. Une plainte a été déposée par ailleurs en 2001 à la suite de la disparition d'une quinzaine de personnes de l'ethnie san, le même expert souhaitant savoir à quoi cette action en justice avait abouti.

Réponses de la délégation

La délégation a pris note des propositions formulées afin d'améliorer le statut du Médiateur, et répondu qu'elles seraient étudiées attentivement. Elle a précisé que le Médiateur avait d'ores et déjà la latitude d'effectuer des visites en prison et d'enquêter sur d'éventuelles violations qui lui sont signalées. Le Médiateur établit un budget prévisionnel qui s'inscrit dans celui de l'État, sous réserve de l'approbation par le Parlement. Il y a ainsi subi des coupes budgétaires l'an dernier pour pouvoir subventionner les paysans victimes de la sécheresse, la délégation soulignant à cet égard que la Namibie était le pays le plus aride de la région.

La discrimination fondée sur le sexe, la couleur ou le statut économique est interdite par la loi, a rappelé la délégation. Les individus les plus susceptibles d'être en butte à des discriminations sont les personnes handicapées, les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués, ainsi que les autochtones. Un nouveau texte doit être adopté afin de prendre en compte des formes nouvelles de discrimination, s'agissant notamment des personnes atteintes d'albinisme. La loi ne contient pas de dispositions permettant le mariage entre personnes du même sexe. Compte tenu de l'histoire coloniale du pays, la loi namibienne condamne la discrimination et l'apartheid et vise à remédier à certaines erreurs du passé. Des dispositions en matière de discrimination positive ont été édictées s'agissant de l'emploi dans la fonction publique. Depuis l'indépendance, le Gouvernement fait la promotion d'une politique de réconciliation nationale qui affirme que tous les Namibiens sont traités sur un pied d'égalité.

Le parti au pouvoir, qui a obtenu près de 80% des voix lors des dernières élections, a décidé d'instaurer la parité hommes-femmes au sein de ses instances et du Gouvernement, ce qui n'a pas été une tâche aisée, a reconnu la délégation. Aujourd'hui, la représentation parlementaire est paritaire. Le Premier Ministre est une femme, ainsi que le Vice-Premier Ministre. La parité a aussi été instaurée dans les collectivités locales. Si le maire est un homme, son adjoint doit être une femme. Les autorités s'efforcent de convaincre les autres formations politiques d'adopter le principe de la parité. Par ailleurs, la loi sur le mariage prévoit l'égalité des droits des époux en matière de propriété.

Un projet de loi intitulé «Nouveau cadre économique équitable» prévoit de tendre à l'égalité dans les postes de direction des entreprises en favorisant l'ascension sociale des secteurs défavorisés. Un pourcentage minimum devrait être respecté s'agissant de trois groupes : les Namibiens défavorisés du temps de l'apartheid, les femmes et les personnes handicapées.

Des mesures antidiscrimination ont été prises en faveur des personnes contaminées par le VIH/sida. Des séropositifs peuvent être recrutés dans les services administratifs de l'armée, par exemple, à l'exclusion des activités physiques qui seraient susceptibles de les exposer à une détérioration de leur état de santé. Les personnes qui ont été stérilisées contre leur volonté du fait de leur statut sérologique peuvent prétendre à des indemnités en justice. Toutefois, on ne peut considérer qu'il se soit agi de stérilisations forcées mais bien plutôt d'une insuffisance d'information ayant conduit ces personnes à opter pour une telle intervention. Ce problème appartient désormais au passé, a assuré la délégation. La délégation a par la suite expliqué qu'une une personne séropositive pouvait se faire stériliser, ce qui implique qu'elle signe une déclaration volontaire en ce sens.

En réponse aux questions sur la discrimination dans les mariages coutumiers, la délégation a répondu que la lobola payée par l'homme avant le mariage constitue une preuve d'amour et de l'engagement du futur époux. Lorsque le mariage est dissous, l'homme n'est pas censé pouvoir demander la restitution de ce don. La délégation est d'avis, sur le principe, que la polygamie devrait être abolie, une pratique concernant essentiellement les zones rurales. Elle a attiré l'attention sur le problème du statut des mariages polygames existants en cas d'interdiction de la pratique.

Le projet de loi sur la torture est à un stade avancé mais il ne pourra pas être présenté au Parlement lors de la session qui vient de débuter.

Le problème de la violence domestique est d'abord un problème masculin et ce sont les hommes qui doivent y remédier, a reconnu la délégation. Les chefs traditionnels ont été appelés à s'exprimer à ce sujet dans les 14 régions du pays afin de sensibiliser les jeunes garçons au problème. Cette campagne a débuté le jour de présentation du rapport namibien, le 8 mars, Journée internationale de la femme.

Les Namibiens étant chrétiens à 95%, l'Église s'est fortement mobilisée contre la légalisation de l'avortement, qui n'est permis que dans un certain nombre de cas spécifiques. La délégation n'a pas exclu l'organisation d'un référendum sur cette question. En attendant, les autorités s'efforcent de lutter contre l'abandon de nouveau-nés, dans le meilleur des cas - quand il ne s'agit pas purement et simplement de meurtres de bébés. L'État a besoin du concours de la population dans ce domaine. Les orphelins sont placés dans des institutions où ils sont très bien pris en charge. La loi sur la protection de l'enfance adoptée l'an dernier devrait entrer en vigueur d'ici peu, une fois parus les décrets d'application. Elle règlementera l'adoption nationale et internationale, ce qui permettra une meilleure prise en charge de ces orphelins.

La loi de 2006 établissant l'égalité des enfants qu'ils soient nés dans le cadre du mariage ou hors mariage permet de garantir leurs droits à l'héritage. Lorsqu'un parent néglige d'entretenir un enfant naturel, celui ou celle qui en a la charge peut demander à un juge d'ordonner la saisie d'une fraction du salaire de l'autre géniteur, la délégation assurant que ce genre de procédure n'est pas exceptionnel.

La Namibie est l'un des pays d'Afrique ayant consacré le plus de moyens à l'éducation, un quart du budget de l'État lui étant consacré. Plus de 60% des diplômés à l'université sont des jeunes femmes. En Namibie, on affirme que lorsque l'on éduque une femme, on instruit la nation toute entière.

Des centres spécialisés pour les jeunes mettent gratuitement des contraceptifs à la disposition de ceux et celles qui en font la demande. Dans un passé récent, lorsqu'une jeune fille avait ses premières règles, une femme adulte lui prodiguait des conseils en matière de grossesse et de mise en garde sur les risques d'avoir un enfant prématurément par exemple. Il en a résulté une diminution des grossesses précoces. Malheureusement, cette pratique a tendance à disparaître à l'heure actuelle.

Il n'y a pas de fosses communes dans l'enclave de Caprivi, a assuré la délégation – indiquant au passage que la région, qui donne à la Namibie un accès au fleuve Zambèze, avait été rebaptisée «Zambezi». Elle a dit ignorer d'où venaient ces informations. Elle a ajouté que des allégations de même nature avaient surgi il y a vingt ans, s'agissant d'une autre région. Il s'agit selon elle de tentatives de ternir la réputation du pays. L'intégrité territoriale de la Namibie n'est pas négociable et celle-ci se défendra contre toute remise en cause, a-t-elle souligné. Elle a rappelé que la Société des Nations avait défini les frontières de l'ancien Sud-Ouest africain, devenu aujourd'hui la Namibie. Cela s'est fait sur la base de deux traités conclus aux XIXe et XXe siècle, le dernier en date étant un accord germano-britannique conclu sous les auspices de la SDN. Il y a vingt ans, de soi-disant fosses communes censées avoir été creusées par l'Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO pour South West Africa People's Organization), ou par des forces angolaises résultaient en fait d'exactions de l'armée sud-africaine, a expliqué la délégation qui s'est dite disposée à conduire les membres du Comité sur ces sites. La délégation namibienne a ajouté que certaines organisations non gouvernementales namibiennes bien connues des autorités étaient à l'origine des allégations relatives aux disparitions forcées.

La guerre de libération a duré près d'un quart de siècle, a poursuivi la délégation, les Nations Unies ayant reconnu le droit de la population à se libérer, y compris par la lutte armée. L'ONU a supervisé les premières élections libres qui ont donné la majorité à la SWAPO. Par la suite, une amnistie a été prononcée en faveur de toutes les parties, les forces sud-africaines comme celles de la SWAPO. Il s'agit d'une page malheureuse de l'histoire du pays, la page a été tournée afin de former une nation unie, disposant d'une armée et d'une police solides, unies et professionnelles, a conclu la délégation à ce sujet.

Des recommandations ont été faites sur les mesures à prendre face aux violences domestiques et la Namibie espère être en mesure d'adopter de nouvelles dispositions législatives permettant aux tribunaux d'ordonner des mesures d'éloignement des auteurs. Il existe sept centres d'hébergement pour les victimes dans le pays, dont certains ont besoin d'être rénovés.

La loi namibienne, si elle ne reconnaît pas le mariage entre personnes du même sexe, n'autorise pas pour autant la police à violer le domicile des couples homosexuels. La Namibie passe pour la société la plus tolérante en Afrique à cet égard, a assuré la délégation. Il convient néanmoins de prendre en compte certains aspects de cette question, notamment la puissance de l'Église. Il convient d'éduquer la population pour affirmer que la tolérance est à l'ordre du jour.

Le travail des enfants est interdit par la Constitution et aucune dérogation n'est susceptible d'être octroyée par le Ministère du travail.

Les questions posées au sujet du droit du travail, de l'inspection du travail et de ses moyens financiers ou humains en particulier, feront l'objet de réponses écrites ultérieures. La délégation s'est néanmoins dite en mesure de préciser que les inspecteurs du travail avaient toute latitude pour se rendre dans les entreprises, dans les exploitations agricoles en particulier, tout en reconnaissant que leur nombre était insuffisant. Le salaire minimum est défini par la loi et tout entrepreneur qui ne le respecterait pas est passible de poursuites.

Un projet de loi sur la traite renforçant les dispositions existantes devrait être présenté incessamment au Parlement.

En matière de détention préventive, toute personne interpellée par la police doit être présentée devant un juge dans un délai de 48 heures, la délégation attirant néanmoins l'attention sur le fait que ce délai ne peut pas toujours respecté en raison des distances à parcourir sur un immense territoire de 800 000 kilomètres carrés. Le système judiciaire n'en reste pas moins l'un des meilleurs parmi les pays en développement, selon diverses instances internationales. Les tribunaux de première instance sont ceux qui accusent les plus grands retards dans le traitement des affaires. Des tribunaux mobiles ont été mis en place pour juger les affaires en retard. La justice est pleinement indépendante, a assuré la délégation.

Il est difficile de changer les pratiques traditionnelles préjudiciables et certainement pas du jour au lendemain dans un continent en développement comme l'Afrique. Il s'agit de sensibiliser les chefs traditionnels, par le biais en particulier du grand Conseil qui les réunit annuellement, charge à eux de répercuter à leur population les préoccupations gouvernementales à cet égard. Ces questions doivent faire l'objet d'une concertation approfondie, la délégation se disant satisfaite des bons rapports entretenus avec les chefs traditionnels.

Un établissement destiné à la détention provisoire doit être construit, a indiqué la délégation. Elle a par ailleurs démenti qu'il soit difficile d'obtenir une aide juridictionnelle ou un avocat commis d'office.

En réponse à une question sur les troubles survenus dans le pays à la fin des années 90, la délégation a expliqué qu'il s'agissait d'une véritable confrontation armée qui a effectivement fait des victimes, mais une amnistie a été prononcée en 1999.

La liberté de la presse est absolue en Namibie, a assuré la délégation. Depuis l'indépendance, la Namibie n'a connu qu'un seul cas de condamnation en justice d'un journaliste, la délégation n'ayant pas connaissance de cas d'intimidation envers la presse.

Le droit de vote fait partie des droits fondamentaux de la population. L'identité d'un citoyen ne disposant pas de papiers d'identité doit être certifiée par deux témoins.

En réponse aux questions relatives au respect des droits des peuples autochtones, la délégation a précisé que des indemnisations devaient être versées aux populations concernées lorsque des autorisations d'exploitation sont accordées. Par ailleurs, tout procès doit se tenir dans une langue comprise par les prévenus.

Il existe en Namibie trois types de mariages: coutumier, religieux et civil. Les motifs de divorce, la répartition des biens se font de manière différente, selon les cas. Il n'existe pas par ailleurs de mariage forcé en Namibie, a assuré la délégation. Un projet de loi prévoit de faire passer l'âge de nubilité de 16 à 18 ans.

Le Tribunal de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) est une question multilatérale qui relève des 14 États membres. Par conséquent, la Namibie n'est pas la seule concernée, a rappelé la délégation en réponse à une question relative au fait qu'il ne pouvait plus recevoir de plaintes individuelles.

Répondant à une question sur la politique namibienne à l'égard des réfugiés, la délégation a rappelé que la Namibie, qui a dû lutter pour son indépendance et dont les dirigeants ont dans certains cas été en exil, estime que c'est à son tour désormais de «rendre la pareille» en se montrant accueillante aux demandeurs d'asile.

Conclusions

M. KAWANA a déclaré que ces vingt-cinq dernières années, la Namibie avait accompli des progrès notables en matière de développement économique, de réforme législative et d'amélioration de l'accès aux services sociaux. Dans le même temps, les autorités reconnaissent que malgré ces progrès significatifs, elles restent confrontées à d'importants défis. Comme l'indique le rapport et les réponses apportées par la délégation, l'État a mis en place de nombreuses lois, politiques et programmes visant à les relever. Concernant les réformes imposées par l'héritage de l'histoire, priorité a été donnée à l'adoption des lois nécessaires au cours de l'actuelle législature. Le Ministre de la justice s'est engagé à ce que son gouvernement prenne en compte les recommandations du Comité.

M. FABIÁN OMAR SALVIOLI, Président du Comité des droits de l'homme, a déclaré que ce dialogue avait été particulièrement utile pour mettre en lumière les projets, les politiques et les lois en vigueur. En revanche, d'autres interactions entre les deux parties n'ont pas été aussi utiles compte tenu de la réaction manifestée par la délégation face à certaines observations des membres du Comité. Il n'y a pas lieu d'être surpris par des remarques résultant d'informations publiques des Nations Unies ou de recommandations formulées par le passé. M. Salvioli a dit souhaiter avoir des réponses plus précises, par écrit, de la part de la Namibie. Un grand nombre de projets de lois ont été mentionnés lors de l'examen mais le Comité ne siège pas pour analyser des ébauches de textes. Les droits de l'homme ne sauraient faire l'objet de consultations populaires ou de plébiscites, a rappelé par ailleurs le Président du Comité des droits de l'homme.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

CT16004F