Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT EXAMINE LES RAPPORTS DU PÉROU AU TITRE DE LA CONVENTION ET DE SES DEUX PROTOCOLES FACULTATIFS
Le Comité des droits de l’enfant a examiné, hier après-midi et aujourd’hui, les rapports périodiques présentés par le Pérou sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant et de ses deux Protocoles facultatifs qui traitent, l’un, de l’implication d’enfants dans les conflits armés et, l’autre, de la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.
Présentant ces rapports, M. Alejandro Vásquez Ríos, Ministre de la justice et des droits humains du Pérou, a annoncé que son pays avait ratifié en octobre dernier le troisième Protocole facultatif à la Convention (qui institue une procédure de plaintes individuelles). Tout aussi récemment, le Congrès de la République a voté une loi interdisant les châtiments physiques et humiliants à l’encontre des enfants et adolescents, a-t-il ajouté. Parmi les mesures méritant selon lui d’être signalées, il a mentionné le Plan national d’éducation en matière de droits et devoirs fondamentaux d’ici 2021 ; la création de la Commission nationale contre la discrimination et la Plateforme contre la discrimination ; le Programme national d’éducation juridique pour l’inclusion sociale lancé en 2007 ; ou encore le Plan national d’accès pour l’enfance et l’adolescence 2012-2021.
La police et les forces armées conduisent conjointement des opérations à haut risque visant à récupérer les mineurs séquestrés par le terrorisme, a par ailleurs indiqué M. Vásquez Ríos. La dernière en date, l’an dernier, a permis de sauver 26 enfants et 13 adultes d’une ethnie amérindienne qui étaient détenus par l’organisation terroriste Sentier Lumineux; les mineurs ont reçu une carte d’identité et ont bénéficié d’un traitement médical, psychologique et de soutien de la part du Ministère de la femme et des populations vulnérables, a-t-il fait valoir. Le mandat de l’actuel Gouvernement du Pérou arrivera à échéance le 28 juin de cette année, a rappelé le Ministre, avant de se dire convaincu que les recommandations du Comité seront prises en compte par celui qui lui succédera.
La délégation du Pérou était également composée, entre autres, de M. Luis Enrique Chávez Basagoitia, Représentant permanent du Pérou auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentantes du Ministère de la femme et des populations vulnérables et du Ministère de la santé. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du Code de l’enfance et de l’adolescence; des questions de financement; des activités minières; des nombreuses questions de santé; des questions d’éducation; des populations autochtones, s’agissant notamment de l’enseignement des langues amérindiennes; des abus sexuels contre les enfants; des personnes handicapées; des châtiments corporels; des enfants vivant en prison avec leur mère; de la justice pour mineurs; de la peine de mort; des enfants des rues; des questions de mariage; du fort taux de suicide des jeunes; de la prostitution infantile; de la lutte contre la traite de personnes; ou encore des enfants soldats.
Le corapporteur du Comité pour l'examen des rapports du Pérou, M. Jorge Cardona Llorens, a constaté les grands progrès accomplis depuis l’examen du précédent rapport du pays, il y a dix ans. La guérilla qui ensanglantait le pays est pratiquement éradiquée, même si se produisent encore des accrochages de manière sporadique, a-t-il relevé. Soulignant que l’on peut s’attendre à une baisse considérable de la croissance économique à court terme, il s’est inquiété de probables coupes dans les budgets et des conséquences fâcheuses pour les enfants qui pourraient en résulter. M. Cardona Llorens a d’autre part indiqué que le Comité était très préoccupé par l’aggravation de la corruption. Il a ensuite soulevé le problème des activités minières qui ont un impact sur l’activité des enfants qui y travaillent, surtout dans les mines clandestines. Se pose aussi un problème en termes d’exploitation sexuelle dans ces zones où sont concentrés de nombreux travailleurs masculins, a-t-il souligné. Le corapporteur s’est en outre inquiété de la forte prévalence des mariages précoces. Il s’est aussi inquiété des discriminations à l’encontre des peuples autochtones, ainsi qu’à l’encontre des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées. Au Pérou, plus de 92% des personnes handicapées ne disposeraient pas de carte d’invalidité, tandis que la plupart des établissements scolaires ne sont guère à même d’accueillir les enfants souffrant d’un handicap, a fait observer le corapporteur. La surpopulation carcérale atteint les 230%, a-t-il ajouté, affirmant que la situation dans les prisons apparaît catastrophique. Par ailleurs, si l’on en croit les estimations, un jeune Péruvien sur quatre est au travail, a-t-il relevé.
Mme Sara Oviedo Fierro, corapporteuse du Comité pour l’examen des rapports péruviens, s’est étonnée quant à elle que la tuberculose fasse toujours des ravages dans le pays, du fait de la pauvreté. La troisième corapporteuse, Mme Maria Rita Parsi, s’est notamment inquiétée d’un taux de suicide élevé chez les jeunes.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Pérou et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 29 janvier 2016.
Lors de sa prochaine séance publique, mardi 19 janvier, à 10 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Zimbabwe (CRC/C/ZWE/2) en salle XXIV du Palais des Nations. Parallèlement, il entamera en salle XXV l’examen du rapport des Maldives (CRC/C/MDV/4-5).
Présentation du rapport du Pérou
Le Comité est saisi du rapport périodique du Pérou (CRC/C/PER/4-5), ainsi que des réponses du pays (CRC/C/FRA/Q/4-5/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRC/C/PER/Q/4-5).
M. ALEJANDRO VÁSQUEZ RÍOS, Ministre de la justice et des droits humains du Pérou, a annoncé que son pays avait ratifié en octobre dernier le troisième Protocole facultatif à la Convention (qui institue une procédure de plaintes individuelles). Tout aussi récemment, le Congrès de la République a voté une loi interdisant les châtiments physiques et humiliants à l’encontre des enfants et adolescents, a-t-il ajouté. Parmi les mesures méritant selon lui d’être signalées, il a mentionné le Plan national d’éducation en matière de droits et devoirs fondamentaux d’ici 2021 qui repose sur trois piliers essentiels: égalité et non-discrimination, exercice entier de la citoyenneté et culture de paix. Le premier pilier comporte trois composantes: interculturalité, égalité de genre et protections particulières des personnes handicapées. Ont en outre été créées la Commission nationale contre la discrimination et la Plateforme contre la discrimination. La Commission est chargée d’une tâche de formation ; quant à la page Internet de la Plateforme contre la discrimination, elle constitue un outil permettant de signaler les cas de discrimination, pour faire en sorte que les entités étatiques coordonnent la politique nationale visant à prêter attention et à protéger les victimes. Les victimes peuvent contacter directement la Plateforme, a indiqué M. Vásquez Ríos.
Pour sa part, le Ministère de la justice et des droits humains a lancé en 2007 le Programme national d’éducation juridique pour l’inclusion sociale, a poursuivi le Ministre. Celui-ci vise à améliorer l’inclusion des populations en situation de vulnérabilité en les sensibilisant à leurs droits et aux mécanismes pour les défendre. M. Vasquez Rios a par ailleurs insisté sur l’importance du Plan national d’accès pour l’enfance et l’adolescence 2012-2021, qui a été élaboré en s’inspirant de l’Observation générale n°5 du Comité (relatif aux mesures générales d’application de la Convention). Ce Plan national constitue le cadre permettant d’articuler les politiques publiques dans le domaine de l’enfance et de l’adolescence, sous la direction du Ministère de la femme et des populations vulnérables ; il comprend un système de suivi et d’évaluation.
Afin d’illustrer les progrès accomplis, le Comité a pu prendre connaissance de statistiques détaillées sur les niveaux d’éducation initiale, primaire et secondaire en fonction du sexe, du lieu de résidence, et du niveau socioéconomique, a déclaré le Ministre. Le Pérou a aussi communiqué ses indicateurs en matière de couverture de la santé maternelle et infantile, de vaccination, de santé mentale, de qualité des eaux, de travail des enfants ou encore de traite des personnes, a-t-il ajouté. Les rapports fournis donnent aussi des indications sur la mise en œuvre des Protocoles facultatifs, a rappelé le Ministre de la justice et des droits humains.
Par ailleurs, la police et les forces armées conduisent conjointement des opérations à haut risque visant à récupérer les mineurs séquestrés par le terrorisme, a poursuivi M. Vásquez Ríos. La dernière en date, l’an dernier, a permis de sauver 26 enfants et 13 adultes d’une ethnie amérindienne qui étaient détenus par l’organisation terroriste Sentier Lumineux; les mineurs ont reçu une carte d’identité et ont bénéficié d’un traitement médical, psychologique et de soutien de la part du Ministère de la femme et des populations vulnérables.
Examen du rapport du Pérou
Questions et observations des membres du Comité
M. JORGE CARDONA LLORENS, coapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Pérou, a constaté les grands progrès accomplis par le pays depuis l’examen de son précédent rapport il y a tout juste dix ans. La guérilla qui ensanglantait le pays est pratiquement éradiquée, même si se produisent encore des accrochages de manière sporadique, a-t-il relevé. La question de la participation à un mouvement armé ayant été effacée du Code de l’enfance pour être intégrée au Code pénal, le corapporteur s’est enquis des conséquences concrètes d’un tel transfert. Soulignant que l’on peut s’attendre à une baisse considérable de la croissance économique à court terme, il s’est inquiété de probables coupes dans les budgets et des conséquences fâcheuses pour les enfants qui pourraient en résulter. M. Cardona Llorens a souhaité savoir si l’État anticipait une telle inflexion. Il a d’autre part indiqué que le Comité était très préoccupé par l’aggravation de la corruption, dont le détournement des financements publics n’est pas l’avatar le moins grave. Que fait le Gouvernement pour éviter que des ressources destinées à l’enfance ne soient détournées, a-t-il demandé?
M. Cardona Llorens a soulevé le problème des activités minières qui ont un impact sur l’activité des enfants qui y travaillent, surtout dans les mines clandestines. Se pose aussi un problème en termes d’exploitation sexuelle dans ces zones où sont concentrés de nombreux travailleurs masculins. Par ailleurs, les populations autochtones sont-elles consultées sur ces activités minières, a-t-il demandé?
Le corapporteur s’est en outre inquiété de la forte prévalence des mariages précoces. Il a affirmé que le Pérou et sa forte tradition machiste favorisaient une forte discrimination à l’encontre des jeunes filles, qui restent souvent cantonnées dans des activités domestiques. Il s’est aussi inquiété des discriminations à l’encontre des peuples autochtones, ainsi qu’à l’encontre des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées. Qu’est-ce qui est fait concrètement pour déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant, a-t-il encore demandé?
Au Pérou, plus de 92% des personnes handicapées ne disposeraient pas de carte d’invalidité, tandis que la plupart des établissements scolaires ne sont guère à même d’accueillir les enfants souffrant d’un handicap, a poursuivi le corapporteur. Cela a aussi pour conséquence que la vaste majorité des enfants handicapés ne bénéficient pas des cantines scolaires ou des programmes publics d’alimentation. Si la malnutrition et la sous-nutrition ont été réduites, on constate néanmoins de très fortes disparités régionales à cet égard, a souligné M. Cardona Llorens.
L’expert a par ailleurs demandé ce qui était envisagé pour veiller à ce que tous les enfants soient vaccinés. La toxicomanie des jeunes apparaît en très forte augmentation, s’est-il en outre inquiété. La transmission du VIH/sida n’est apparemment pas endiguée, a ajouté le corapporteur, demandant si les autorités avaient analysé les causes de cette situation.
La surpopulation carcérale atteint les 230%, a en outre fait observer M. Cardona Llorens, ajoutant que la situation dans les prisons apparaît catastrophique. Que fait l’État en ce qui concerne les enfants incarcérés avec leur mère dans des conditions déplorables, a-t-il demandé?
Par ailleurs, si l’on en croit les estimations, un jeune Péruvien sur quatre est au travail, a relevé le corapporteur.
Pour ce qui a trait à la justice pour mineurs, un « délit grave » est susceptible d’entraîner l’incarcération d’un mineur, sans que l’on sache précisément ce que recouvre cette notion, a ajouté M. Cardona Llorens. Le Pérou envisage-t-il d’abolir la peine de mort – laquelle n’est plus appliquée depuis des décennies, a-t-il par ailleurs demandé?
MME SARA OVIEDO FIERRO, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Pérou, a jugé invraisemblable, compte tenu du stade de développement atteint par le Pérou, qu’une maladie telle que la tuberculose fasse toujours des ravages dans ce pays du fait de la pauvreté. Elle a par ailleurs souhaité savoir s’il était envisagé de faire de l’Instance chargée de l’enfance une institution qui serait chargée de la coordination des politiques de l’enfance, avec rang de vice-ministère, ce qui exigerait que lui soient octroyées les ressources nécessaires.
Mme Oviedo Fierro a estimé que les antennes du Défenseur du peuple, qui comprennent une division chargée de l’enfance, devraient exister dans toutes les régions et non pas seulement dans certaines d’entre elles. Au Pérou, de nombreuses difficultés sont à déplorer en raison d’une absence de coordination entre les différentes politiques qui sont menées en faveur de l’enfance, a-t-elle ajouté. Par ailleurs, les statistiques officielles sont lacunaires, a relevé la corapporteuse, souhaitant savoir si l’État envisageait d’y remédier.
Les enfants sont insuffisamment présents dans les politiques publiques, notamment celles concernant l’égalité entre les sexes, a poursuivi Mme Oviedo Fierro. Elle a souhaité savoir comment fonctionnaient les comités consultatifs au sein desquels les enfants sont censés pouvoir s’exprimer et a demandé pourquoi de tels comités n’existaient pas partout dans le pays.
L’État s’étant engagé à fournir un ordinateur à chaque écolier, existe-t-il une politique de prévention pour éviter que les enfants soient confrontés à des sites malsains, a-t-elle par ailleurs demandé?
Un peu plus de 8% des Péruviens ne disposent pas de documents d’identité, généralement dans les régions reculées du pays, a en outre relevé la corapporteuse, avant de demander si l’État envisageait de faire un effort pour que la totalité des citoyens aient une identité reconnue.
Que fait le Pérou dans le domaine législatif pour interdire aux enfants d’assister à des corridas, a par ailleurs demandé Mme Oviedo Fierro?
Un très grand nombre d’abus sexuels de la part du clergé sont venus à la connaissance du public, à la suite d’une véritable avalanche de plaintes, a poursuivi la corapporteuse. Or, l’État est demeuré passif face à cette situation, a-t-elle relevé, avant d’ajouter qu’il serait urgent de promulguer un texte permettant d’indemniser les victimes.
Mme Oviedo Fierro a enfin indiqué que le Comité avait eu connaissance de persécutions visant des associations de défense des droits de l’enfant. L’État entend-il y mettre un terme, a-t-elle demandé?
MME MARIA RITA PARSI, troisième corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Pérou, a souhaité savoir si l’avortement avait été dépénalisé pour les cas où la grossesse résulterait d’un viol. Peut-on avoir accès à des contraceptifs d’urgence à la suite d’une agression sexuelle, a-t-elle demandé? Existe-t-il un système institutionnalisé permettant de lutter contre la violence à l’école et au sein de la famille, a par ailleurs demandé la corapporteuse? Est-il prévu de créer un registre central des victimes et de quelle prise en charge bénéficient-elles?
Le taux de suicide chez les jeunes est élevé, a poursuivi Mme Parsi, souhaitant savoir si les autorités avaient cherché à analyser les causes de ce phénomène. Le Pérou est l’un des pays allouant le moins de ressources à l’éducation et la qualité de l’instruction s’en ressent, a-t-elle ajouté. Cela a pour conséquence de prélever un tribut sur les budgets des familles désireuses de voir leurs enfants poursuivre des études, a-t-elle fait observer.
Une autre experte s’est inquiétée de la difficulté pour la population d’avoir accès aux documents administratifs.
Un expert a demandé si l’interdiction des châtiments corporels se fondait effectivement sur l’existence de sanctions dont seraient passibles les auteurs de tels actes.
Une experte a souhaité savoir si le Pérou n’envisagerait pas de remplacer par des peines de substitution l’incarcération des femmes enceintes ou ayant un ou plusieurs enfants en bas âge, en leur imposant par exemple le port d’un bracelet électronique. Des questions ont également été posées au sujet de la justice des mineurs, s’agissant notamment des délais de garde à vue et de la détention provisoire. Une experte s’est inquiétée de la tendance à l’aggravation des peines (à l’encontre des mineurs) alors que l’on ne constate, semble-t-il, aucune augmentation de la délinquance des mineurs.
Plusieurs questions ont été posées au sujet des discriminations à l’encontre des populations autochtones et des préjugés qui les affectent, elles ainsi que les populations d’ascendance africaine. L’accent a par ailleurs été mis sur la nécessité et l’importance de diffuser l’information gouvernementale en langue quechua et, d’une manière générale, sur la nécessité de mettre en place une politique linguistique en raison de l’importance des nombreuses communautés autochtones.
Quelle est la politique du Pérou à l’égard des réfugiés, a-t-il en outre été demandé?
Un expert a souhaité en savoir davantage au sujet de la formation des agents de police, relevant que, selon de nombreux témoignages, leur comportement à l’égard des citoyens ordinaires apparaissait fréquemment inapproprié.
Réponses de la délégation
La délégation péruvienne, par la voix du Ministre de la justice et des droits de l’homme, M. Vásquez Ríos, a expliqué que le Code de l’enfance et de l’adolescence était en cours de révision, cette tâche ayant été confiée à une commission spéciale composée de représentants de l’exécutif, du législatif et du judiciaire, ainsi que de représentants de la société civile. Cette commission a ainsi été chargée de rédiger un projet de loi qui se trouve actuellement dans sa dernière ligne droite avant présentation au Congrès de la République, a précisé le Ministre.
Les financements en faveur de l’enfance et de l’adolescence sont en augmentation, parallèlement à la progression du budget de l’État lui-même, a par ailleurs indiqué M. Vásquez Ríos. Le Ministre de la justice et des droits humains a assuré que le Pérou est conscient du fléau de la corruption, dont il n’est pas le seul à souffrir dans la région. Dans l’attente de la création d’un mécanisme spécifique, c’est au Congrès qu’il incombe de contrôler l’utilisation des fonds publics, a-t-il souligné. Pour ce qui est de la « sanctuarisation » du budget consacré à l’enfance et à l’adolescence, une loi adoptée récemment stipule que les programmes en faveur des enfants disposeront d’une garantie de financement, quelle que soit la situation économique et financière du pays, a fait valoir M. Vásquez Ríos. La santé et l’éducation sont les deux postes prioritaires, a-t-il précisé.
La délégation a ensuite indiqué que le budget de l’Etat avait augmenté de 160% en neuf ans et que les dépenses consacrées à l’enfance avaient été multipliées par sept dans la même période. S’agissant des inquiétudes exprimées par un expert sur les risques de coupes budgétaires dans le secteur de l’enfance, en raison d’un probable ralentissement de l’économie mondiale, la délégation a indiqué que les prévisions concernant le Pérou envisageaient une augmentation de la croissance de trois à quatre pour cent cette année.
Le Gouvernement péruvien estime que les efforts de la société civile sont essentiels et qu’ils ne sauraient en aucun cas être entravés, a d’autre part déclaré la délégation. En ce qui concerne le droit de rassemblement, des directives ont été données, encore tout récemment, pour que les forces de l’ordre ne recourent à la force que dans les cas d’atteinte aux biens et aux personnes ; le Pérou est tout à fait respectueux de la liberté d’expression, qui est une garantie constitutionnelle, a assuré la délégation.
Pour ce qui a trait au services de protection de l’enfance et de l’adolescence, 91% des districts disposent d’un Défenseur des enfants et des adolescents, l’objectif pour cette année étant d’atteindre 94%, a indiqué la délégation péruvienne.
Le Plan national de l’enfance et de l’adolescence est décliné en 18 versions régionales, afin de l’adapter aux réalités locales et d’allouer les ressources nécessaires en fonction des thématiques considérées comme prioritaires, a indiqué la délégation. Le Bureau du Défenseur du peuple et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) participent à l’élaboration de ces plans, a-t-elle précisé.
Quant à accorder un rang ministériel à l’instance chargée de l’enfance, cela n’augurerait pas nécessairement d’une plus grande efficacité, alors même que l’opinion publique n’est guère favorable à l’augmentation de la bureaucratie.
La peine de mort, qui n’est effectivement plus appliquée depuis plus de quarante ans, demeure théoriquement en vigueur, notamment pour le crime de trahison, a rappelé la délégation. Aucun crime ou délit susceptible d’être commis par un mineur ne saurait être passible de la peine capitale, a-t-elle souligné.
Quant aux activités minières, la délégation a assuré que les autorités péruviennes s’efforcent de lutter contre toutes les activités illégales d’exploitation aurifère. Les fonctionnaires publics et les parents sont sensibilisés à la question du travail forcé et des politiques publiques adéquates sont mises en œuvre dans les régions reculées. En 2013, un programme a permis de réduire la proportion d’enfants au travail, a fait valoir la délégation.
Un service de prise en charge des victimes d’abus sexuels a été mis en place, tandis que les travailleurs sociaux ont bénéficié de formations et d’une sensibilisation à cette question, a d’autre part indiqué la délégation. Outre l’amélioration de la prise en charge des victimes de la violence faite aux femmes et aux enfants, l’objectif poursuivi consiste aussi à comprendre les causes de cette violence afin de pouvoir mieux endiguer ce fléau.
La réforme de la santé est axée sur le renforcement de l’offre publique en soins, un investissement que le Pérou considère comme essentiel à son développement, a par ailleurs expliqué la délégation. Ainsi, est-on passé de 97 à 331 dollars de dépenses annuelles de santé par Péruvien ces dernières années. Plus de 80% de la population péruvienne bénéficient d’une couverture de santé, dont plus de la moitié dépend de la sécurité sociale publique, a précisé la délégation. Depuis l’an dernier, tous les nouveau-nés sont automatiquement affiliés à l’assurance santé publique – et ils étaient au nombre de 350 000 en 2015, a-t-elle fait valoir. D’importants investissements ont été effectués dans les structures hospitalières, les soins primaires étant prioritaires, a poursuivi la délégation. Un plan intitulé « Esperanza » couvre les maladies graves et coûteuses, à commencer par le cancer, a-t-elle précisé. Un autre programme intitulé « Bienvenidos a la vida » (Bienvenus dans la vie) – déployé dans 17 régions sur 24, dont celle de Lima – permet de couvrir les soins pouvant être nécessaires pour les nouveau-nés. La couverture vaccinale a aussi été améliorée, a ajouté la délégation.
Le Congrès a adopté une loi en faveur de la lutte contre la tuberculose dont la prévalence, bien qu’en diminution, demeure élevée, a également souligné la délégation. Pour lutter contre la tuberculose, les autorités se sont efforcées d’avoir une action plus cohérente afin d’en finir avec une situation très «fragmentée». Un système d’identification et de détection a été mis en place. Le plan d’urgence contre la tuberculose adopté l’an dernier se concentre principalement sur la région de Lima, le constat ayant été fait d’une recrudescence de cette maladie en zone urbaine.
La délégation a par ailleurs rappelé que le Tribunal constitutionnel avait interdit à l’État de distribuer gratuitement la pilule du lendemain, afin d’éviter que cette molécule ne soit détournée pour être utilisée à des fins d’avortement. L’État a alors demandé un avis scientifique afin d’établir si risque de détournement était réel et cet avis sera transmis au Tribunal constitutionnel afin qu’il révise le cas échéant son arrêt. La délégation a par ailleurs indiqué que la question de la dépénalisation de l’avortement en cas de viol était posée puisque la loi autorise seulement les avortements thérapeutiques.
La délégation a en outre indiqué que la santé mentale faisait l’objet d’un plan qui cible les populations vulnérables.
Les enfants péruviens doivent être vaccinés contre quinze maladies, l’Organisation panaméricaine de la santé fournissant une assistance dans le cadre des campagnes de vaccination menées dans le pays. Au Pérou, suite au lancement d’un programme d’urgence, la couverture vaccinale est en forte augmentation pour la période 2014-2015, aussi bien dans les villes que dans les campagnes, a fait valoir la délégation. La proportion d’enfants de moins de 36 mois qui sont vaccinés est ainsi passée de 61 à 68% durant cette période.
Environ 90% des Péruviens connaissent l’existence du VIH/sida, selon les enquêtes faites sur cette question, a indiqué la délégation. Des antirétroviraux sont offerts aux femmes séropositives dès la quatorzième semaine de grossesse, la transmission de la mère à l’enfant ayant été ramenée à environ 4%, a-t-elle précisé.
Pour ce qui a trait à la santé sexuelle et génésique, la délégation a indiqué qu’à partir de 14 ans, les enfants commencent à bénéficier d’une information sur les moyens de contraception, notamment, la priorité étant accordée aux très jeunes mères, auxquelles de tels moyens sont fournis.
Le Pérou a atteint les objectifs du Millénaire pour le développement dans la lutte contre la malnutrition, a d’autre part fait valoir la délégation. Interpellée sur la situation dans les régions où l’anémie est particulièrement élevée, la délégation a indiqué que la distribution de micronutriments et de suppléments alimentaires a fortement augmenté, 99% des établissements de santé étant approvisionnés en la matière. Des centres d’allaitement, au nombre de 729, existent dans le pays et leur nombre a plus que doublé ces dernières années. Toutefois, l’allaitement maternel est en diminution dans les classes moyenne et supérieure, surtout chez les travailleuses, et un effort de sensibilisation est nécessaire à leur intention, a reconnu la délégation, avant de souligner que des campagnes encourageant l’allaitement sont régulièrement menées.
Le programme de lutte contre la consommation de drogue et d’alcool met l’accent sur les jeunes et les établissements scolaires, a ajouté la délégation. Des centres communautaires ont été mis en place sur tout le territoire, tandis que dans le cadre de la santé scolaire un programme met l’accent sur la détection.
Des mesures ont été prises pour limiter l’exposition aux métaux lourds et autres produits nocifs dans les secteurs vulnérables, a d’autre part indiqué la délégation. Des campagnes sanitaires sont menées en direction des enfants dans les régions concernées par les activités minières, a-t-elle ajouté.
En ce qui concerne précisément la pollution et l’environnement, la délégation a indiqué qu’un programme existe qui permet de traiter les patients victimes des métaux lourds, notamment dans les zones minières. Un règlement de protection de l’environnement dans le cadre des activités minières a été adopté en 2014, a ensuite fait valoir la délégation. Le Pérou est l’un des rares pays à avoir ratifié la Convention de Minamata pour réduire l’utilisation et l’exposition au mercure, qui concerne aussi les activités extractives, a-t-elle souligné. L’utilisation de produits polluants extrêmement nocifs a été réduite, a ajouté la délégation, sans préciser la nature de ces produits.
La délégation a attiré l’attention sur les normes de protection très élevées dont bénéficient les populations autochtones face aux activités extractives – et face à toute décision administrative en général – susceptibles d’avoir des conséquences sur leurs droits. Il s’agit d’une question extrêmement sensible dans le pays, dans la mesure où les activités minières doivent bénéficier à la nation dans son ensemble, y compris aux peuples autochtones, a souligné la délégation.
S’agissant des femmes autochtones, un programme concernant la région amazonienne est en vigueur qui vise en particulier à répondre aux besoins des populations visées en matière de santé et d’éducation, a indiqué la délégation. La priorité est donnée à l’éducation des paysannes dans le cadre d’un plan du Ministère de l’éducation baptisé « Selva » (forêt).
En 2014, alors que 98% des mineurs disposaient d’une carte nationale d’identité, la délivrance de ce document a été rendue gratuite afin de se rapprocher le plus possible des 100%, a d’autre part indiqué la délégation. Un système visant à améliorer l’enregistrement des naissances au sein des communautés autochtones a été mis en place par le biais de l’informatisation d’un registre national, a-t-elle ajouté.
S’agissant des langues vernaculaires, la délégation a affirmé que la question était complexe dans la mesure où le Pérou compte plus d’une soixantaine de peuples autochtones. Certains d’entre eux ne sont pas favorables à bénéficier d’un enseignement dans leur langue car ils craignent que cela ne les amène à rester marginalisés dans une société où l’espagnol est nécessaire pour une bonne intégration et pour la promotion sociale, a-t-elle expliqué. Pour autant, l’État péruvien est favorable au principe de l’enseignement des langues autochtones pour les communautés qui le souhaitent, a assuré la délégation.
Dans le domaine de l’éducation, la revalorisation des carrières des enseignants, le comblement de la « fracture éducative » ont donné lieu à des actions spécifiques. Cela s’est notamment traduit par des actions de formation en direction des instituteurs et des cadres du service de l’éducation. Le salaire moyen des personnels éducatifs a augmenté de 40% entre 2011 et 2015, en tenant compte des heures supplémentaires. Le taux de scolarisation en maternelle est de 81% et les campagnes sont incluses dans les efforts déployés en la matière, a poursuivi la délégation. L’enseignement de l’anglais a quant à lui été augmenté, passant de deux à cinq heures hebdomadaires, a-t-elle ajouté. Des établissements publics d’excellence ont été créés dans plusieurs régions afin d’y admettre les meilleurs élèves et quelque 1600 bacheliers devraient en sortir cette année, a en outre souligné la délégation. Les réformes engagées ont vu une augmentation sans précédent du budget consacré à l’éducation, qui devrait dépasser les 4% du PIB cette année, contre 2,9% en 2011. Un effort a également été fait en faveur des cantines scolaires. La délégation a ensuite indiqué que la scolarisation des enfants au niveau du primaire atteignait 94%, le Pérou faisant tout son possible pour qu’elle soit universelle à court ou moyen terme.
S’agissant de la sécurité des enfants face aux réseaux sociaux, la délégation a indiqué que la mise à disposition d’ordinateurs à l’école s’est accompagnée de la mise en place de filtres afin de limiter l’accès à des sites ne convenant pas à leur âge. Les enseignants ont été formés à dispenser des cours informatiques, avec toutes les précautions et avertissements nécessaires.
Environ 1,5 million de personnes ont déclaré un handicap et il est désormais possible de faire une demande de carte d’invalidité via Internet, a d’autre part indiqué la délégation. La priorité est d’intégrer les enfants handicapés au système éducatif tout en leur proposant les soins de santé dont ils peuvent avoir besoin, a-t-elle affirmé. La détection du handicap se fait dans les dispensaires, a précisé la délégation.
Le Ministère de l’éducation a lancé une campagne de sensibilisation et d’information visant à mettre un terme au harcèlement entre les enfants à l’école, ainsi qu’au harcèlement de la part des enseignants à l’égard des jeunes filles et des jeunes garçons, a poursuivi la délégation. Une loi réprimant le harcèlement sexuel est en vigueur suite à l’adoption d’une législation récente visant à réprimer ce type de comportement aussi bien dans l’espace public que dans le cercle familial.
La loi réprimant les châtiments corporels a été adoptée récemment, a rappelé la délégation
S’agissant des enfants vivant en prison avec leur mère, la délégation a indiqué que des équipes pluridisciplinaires accompagnent les détenues et leurs enfants sortant de prison afin de faciliter leur réinsertion dans la société. Tous les mineurs vivant avec leur mère dans ces centres de privation de liberté bénéficient d’une couverture santé, à l’instar de leur mère, a en outre fait valoir la délégation. Bien entendu, ces enfants bénéficient aussi d’une instruction, leur mère pouvant quant à elle bénéficier d’une formation professionnelle, a-t-elle ajouté. Un enfant peut séjourner en prison avec sa mère jusqu’à l’âge de quatre ans, a ensuite précisé la délégation. Elle a indiqué que 197 femmes étaient détenues dans les prisons péruviennes en compagnie de 199 enfants. Des alternatives à la détention sont désormais proposées dans de tels contextes, a fait savoir la délégation, précisant qu’un système de liberté surveillée par recours au bracelets ou puces électroniques est proposé aux personnes condamnées à moins de huit ans de réclusion.
En matière de justice des mineurs, des alternatives à la détention de mineurs sont également privilégiées dans toute la mesure du possible, notamment par le biais de travaux communautaires imposés aux jeunes délinquants condamnés.
La loi réprimant la mendicité, si elle n’a pas été abrogée, n’a pas empêché l’État de se pencher sur le sort des enfants des rues, a par ailleurs souligné la délégation. Dans 24 centres urbains, 56% des enfants, ainsi que les membres de leur famille, sont suivis par des éducateurs de rue. Il s’agit d’apporter un appui aux familles concernées afin qu’elles puissent scolariser ces enfants. La délégation a précisé que dans la grande majorité des cas, ces enfants des rues sont exploités par des individus ou des réseaux criminels.
Au Pérou, l’âge légal du mariage est de 18 ans et toute dérogation doit faire l’objet d’une demande spéciale des parents, a ensuite rappelé la délégation. Les autorités péruviennes, en ce qui les concerne, s’efforcent d’analyser les causes des mariages précoces, a-t-elle poursuivi. Elles mettent également l’accent sur la prévention de la violence domestique. Dans le cadre de la lutte contre la violence faite aux femmes, sont pris en compte les mineurs LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués).
Les politiques publiques visent à garantir la participation des enfants dans tous les domaines les concernant, a par ailleurs assuré la délégation. Des consultations ont lieu sur les plans national, régional et local dans le cadre de 117 conseils consultatifs de l’enfance. Quant à la participation à la mise en œuvre des politiques publiques, les autorités se sont efforcées de promouvoir la participation des enfants avec l’aide du Fonds des Nations Unies pour l'enfance et de l’organisation Save The Children, a indiqué la délégation.
Si le taux de suicide a tendance à diminuer, il demeure un problème de santé publique, a ensuite reconnu la délégation. Des programmes de prévention mettant l’accent sur la santé mentale ont donc été lancés pour l’exercice 2014-2016. Des formations sont en outre organisées en faveur de professionnels de la santé pour que soient détectés de manière précoce de potentiels comportements suicidaires.
Le Pérou estime que parler de «prostitution infantile» n’est pas pertinent en ce qui le concerne, même si, dans les zones minières, des enfants peuvent effectivement être exposés à des offres de nature sexuelle.
En réponse à une question sur les allégations d’abus sexuels de la part de membres du clergé, la délégation a répondu qu’une enquête de justice avait été ouverte et était toujours en cours.
S’agissant enfin des spectacles de courses de taureaux et au fait qu’ils ne soient guère recommandés à des enfants, la délégation a indiqué que la loi sur le bien-être animal adoptée récemment ne prenait pas en compte la corrida, celle-ci étant considérée comme une manifestation culturelle appartenant au patrimoine national. Toutefois, au Pérou comme partout où existe une tradition taurine, un débat oppose partisan et adversaire de la corrida, a-t-elle reconnu.
Examen du rapport soumis au titre du Protocole facultatif sur l’implication d’enfant dans les conflits armés
Questions et observations des membres du Comité
JORGE CARDONA LLORENS, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Pérou au titre du Protocole facultatif sur l’implication d’enfant dans les conflits armés, s’est enquis des moyens accordés à la mise en œuvre en œuvre de ce Protocole. Le Pérou prend-il en compte le problème du recrutement éventuel par des groupes armés non étatiques, a-t-il par ailleurs demandé? Le recrutement d’enfants de moins de quinze ans est-il qualifié de crime de guerre, a également voulu savoir le corapporteur? La juridiction extraterritoriale prévaut-elle dans tous les cas où les auteurs ou les victimes sont péruviens, a également interrogé l’expert? Le Protocole est-il invoqué dans les conventions d’extradition conclues par le Pérou, a-t-il demandé? Il a par ailleurs voulu savoir si les fonctionnaires de l’immigration étaient sensibilisés au Protocole, question pertinente dans la mesure où ils peuvent avoir à décider du sort, par exemple, d’enfants colombiens ayant pu être impliqués dans la guerre civile qui a déchiré la Colombie?
MME MARIA RITA PARSI, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Pérou au titre de ce même Protocole, a rappelé les pratiques de recrutement de mineurs, dont certains sont en outre victimes d’abus sexuels, par les mouvements révolutionnaires Sentier Lumineux et Tupac Amaru et a souhaité savoir comment ces jeunes étaient traités lorsqu’ils sont appréhendés. Des programmes de réinsertion ont-ils été mis en place en faveur de ces jeunes? La corapporteuse s’est également enquise de la politique exacte des forces armées en matière de recrutement de jeunes hommes. Elle s’est par ailleurs inquiétée de la définition du terrorisme dans la législation péruvienne, relevant que l’état d’urgence pouvait être décrété même à la suite de simples manifestations.
Réponses de la délégation
S’agissant des enfants soldats, la délégation a déclaré que les années sanglantes de l’insurrection de groupes armés non étatiques appartenaient essentiellement au passé. Trente-trois mineurs ont été sauvés de ces groupes en 2015 et aucune plainte en justice n’a été déposée sur ce thème, a-t-elle indiqué. Des groupuscules se réclamant du Sentier Lumineux continuent de sévir de manière sporadique et uniquement dans le sud du pays mais la majeure partie du territoire péruvien est pacifiée, a insisté la délégation. C’est la raison pour laquelle l’implication d’enfants dans des conflits armés est probablement devenue extrêmement marginale, a-t-elle déclaré. Par le passé, ces groupuscules ont recruté des mineurs dans leurs rangs et on ne peut totalement exclure qu’il y ait encore quelques cas, a-t-elle ajouté.
La délégation a par ailleurs souligné que des efforts de réinsertion étaient déployés à l’intention des enfants libérés (de ces groupes), dont certains sont même nés en captivité. Dans certains cas, il a fallu retrouver leur famille, dans d’autres leur assurer une protection en les transférant dans d’autres régions que celle où ils avaient été récupérés, a expliqué la délégation.
S’agissant des requérants d’asile mineurs fuyant une guerre, rien n’indique qu’il y ait un risque de refoulement à la frontière, a poursuivi la délégation. Se référant plus précisément à la situation colombienne, la délégation péruvienne a assuré que les fonctionnaires de l’immigration du Pérou étaient informés de la possibilité pour eux d’avoir à décider du sort d’anciens enfants soldats ayant déserté (en Colombie) et cherchant refuge en territoire péruvien.
Pour sa part, l’État péruvien s’est engagé à ne pas recruter d’enfants et le Ministère de la défense a la responsabilité de respecter et faire respecter cet engagement, a rappelé la délégation. Le service militaire au Pérou n’est pas obligatoire et l’âge normal d’incorporation est fixé à 18 ans révolu. Il est absolument interdit d’avoir recours à des mineurs dans le cadre du service militaire, a insisté la délégation. Il est donc clair que l’État péruvien s’est engagé sans restriction aucune à ne pas recruter de mineurs dans ses forces armées.
La délégation a par ailleurs assuré que les forces armées péruviennes n’étaient pas chargées du contrôle de l’ordre public, même si elles peuvent éventuellement épauler la police lorsque cela s’avère indispensable. Dans les situations d’urgence, l’intervention éventuelle des forces armées peut se faire uniquement sur demande formelle du chef de l’État et n’a donc rien d’automatique, a ajouté la délégation.
En l’absence d’une convention bilatérale d’extradition entre le Pérou et un pays tiers, le Protocole facultatif peut néanmoins être invoqué pour demander une extradition, dans les cas qui sont susceptibles de relever dudit Protocole, a expliqué la délégation.
Examen du Protocole facultatif sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
Questions et observations des membres du Comité
MME SARA OVIEDO FIERRO, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Pérou au titre du Protocole facultatif sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, s’est étonnée du retard considérable – dix ans – avec lequel le pays présente ce rapport. Elle a ensuite souhaité savoir de quel budget disposait le plan d’action contre la traite mis en place par le pays. Elle a par ailleurs jugé à première vue insuffisant le nombre de tribunaux spécialisés – une douzaine seulement – que compte le Pérou pour traiter de ces questions. Elle s’est en outre enquise de la coordination existante entre tous les acteurs concernés par la lutte contre la traite. Mme Oviedo Fierro a par ailleurs demandé combien le pays comptait de foyers d’accueil pour les victimes de traite et s’il existait des programmes de protection des témoins.
Qu’en est-il des activités menées de façon pérenne dans les écoles pour faire en sorte que les enfants et les adolescents connaissent les dangers qu’ils courent face aux phénomènes relevant du Protocole?
MME MARIA RITA PARSI, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Pérou au titre du Protocole, a relevé que le viol est le seul crime sexuel pouvant donner lieu à indemnisation. Aussi, a-t-elle souhaité savoir s’il est envisagé d’élargir cette possibilité à toutes les violences sexuelles. Elle a par ailleurs demandé si le Pérou entendait déployer des stratégies claires dans les régions minières et dans l’intérieur du pays, où plusieurs milliers de jeunes filles sont prostituées. L’État péruvien lutte-t-il contre le crime organisé qui exploite ces jeunes femmes? Lutte-t-il aussi contre le tourisme sexuel, fréquent dans plusieurs villes?
Mme Parsi a en outre relevé que l’aide juridictionnelle gratuite n’était pas généralisée. Elle a par ailleurs voulu savoir si des poursuites avaient été engagées contre des magistrats corrompus.
Un autre membre du Comité a demandé si au Pérou, le travail forcé d’enfants était juridiquement assimilable à la vente d’enfants.
Existe-t-il par ailleurs une responsabilité pénale des personnes morales pour des délits couverts par le Protocole, a-t-il été demandé?
Réponses de la délégation
La lutte contre la traite de personnes fait l’objet d’une politique nationale menée par le Ministère de la justice et des droits de l’homme, a indiqué la délégation. Le Plan national de lutte contre la traite est un instrument efficace qui permet de mettre en œuvre des actions efficaces dans ce domaine, a-t-elle déclaré. C’est dans la ville de Lima que le plus grand nombre de victimes ont été signalées, a-t-elle précisé, indiquant que les victimes sont généralement leurrées et abusées par des offres d’emploi fallacieuses. Le budget alloué au Plan national d’action est en augmentation même s’il demeure insuffisant au regard du défi représenté par ce fléau, a ajouté la délégation. Il est très difficile pour les victimes d’échapper à leur servitude par elles-mêmes et de se réinsérer dans la société, a-t-elle souligné.
Un mécanisme de protection est en place depuis 2003 qui permet de prendre en charge l’enfant à partir du moment où il a été arraché des griffes de criminels qui l’exploitaient; il s’agit en particulier de déterminer les meilleurs moyens de le réinsérer. Ainsi, le retour dans la famille n’est-il plus considéré comme allant de soi, dans la mesure où il n’est pas rare que celle-ci soit elle-même à l’origine de la vente de l’enfant. Par ailleurs, l’une des causes favorisant les enlèvements (d’enfants) provenait de l’absence de contrôle sur les routes, a poursuivi la délégation. Aujourd’hui, tout mineur doit se déplacer avec ses papiers d’identité et s’il est accompagné d’un adulte, celui-ci doit pouvoir justifier de son autorité sur l’enfant, a-t-elle indiqué. La majorité des sociétés de transport exigent donc désormais la présentation d’une carte d’identité ou d’une autorisation de voyager avec le mineur lorsque l’accompagnant adulte n’est pas un des parents de l’enfant; le fait d’être contrôlé en compagnie d’un enfant sans y être autorisé constitue désormais un délit, a souligné la délégation.
Le Ministère de la femme a élaboré un protocole de prise en charge (des victimes des phénomènes relevant du Protocole) qui a permis de commencer à engager des actions de formation, à l’échelle nationale, à l’intention des professionnels concernés. Sur le terrain, une équipe itinérante d’appui psychologique apporte une aide immédiate, a précisé la délégation.
En outre, des procureurs sont spécialisés dans ce type de délit mais le Pérou ne dispose pas encore d’un registre des victimes d’abus sexuels, a poursuivi la délégation. Le problème s’explique en partie par le fait que les victimes elles-mêmes ne se considèrent souvent pas comme telles, a-t-elle indiqué. Un guide de détection des victimes d’abus sexuels et un guide de prise en charge des victimes donnant des directives de base ont été édités, notamment à l’intention des enseignants.
En ce qui concerne le tourisme sexuel, la délégation a indiqué que le Ministère du tourisme avait entrepris de diffuser des informations dans les hôtels afin que leurs personnels soient sensibilisés au problème. Un code de déontologie a également été édicté et le non-respect de ses dispositions est passible de sanctions administratives, a ajouté la délégation.
Conclusions
MME OVIEDO FIERRO, corapporteuse du Comité pour l’examen des rapports du Pérou, a remercié la délégation pour ses réponses très complètes. Elle a rappelé que «la protection des enfants aujourd’hui, c’est notre protection demain» et s’est dite convaincue que la situation des enfants péruviens irait en s’améliorant.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRC16/010F