Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE L’IRLANDE
Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport de l’Irlande sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Présentant ce rapport, le Ministre de l’enfance et de la jeunesse de l’Irlande, M. James Reilly,
a souligné que les dix dernières années ont été assez turbulentes pour le pays, avec le « boom » économique puis son interruption brutale. Les conséquences ont été considérables pour les familles et les enfants, a-t-il souligné. Il s’est toutefois réjoui des succès de la stratégie économique poursuivie par le Gouvernement aujourd’hui, assurant que sans les ressources d’une économie forte, il est difficile de progresser dans la mise en œuvre des droits de l’enfant. L’affectation de ressources significatives en faveur des enfants, notamment pour la santé, l’éducation, la protection sociale et le logement, témoignent de l’engagement du pays dans ce sens, a-t-il fait valoir. Il a rappelé que son Gouvernement a créé le tout premier Ministère de l’enfance et de la jeunesse en 2011. M. Reilly a fait observer que la Constitution irlandaise reconnaît maintenant aux enfants des droits spécifiques. Il a également rappelé que l’Irlande a ratifié en 2014 le Protocole facultatif à la Convention qui établit une procédure de plaintes individuelles (communications). Enfin, le Ministre a attiré l’attention sur l’adoption, en 2014, de la toute première politique nationale en faveur des enfants et des jeunes, couvrant la période 2014-2020 (Better Outcomes, Brighter Futures).
Au nombre des autres mesures prises par son Gouvernement, M. Reilly a cité l’augmentation substantielle du nombre d’enseignants. Des investissements notables ont par ailleurs été consentis pour améliorer le système carcéral et faire en sorte que les enfants ne soient plus détenus dans des prisons pour adultes, a-t-il ajouté. Des lois ont été en outre promulguées, comme la Loi sur l’enfance (Children First Act) de 2015, en vertu de laquelle les enfants ne peuvent plus se voir infliger de châtiments corporels. La loi sur la protection internationale de 2015, elle, établit une seule et unique procédure pour l’examen des demandes d’asile. Le budget 2016 de l’Agence pour l’enfant et la famille a été accru de 5% par rapport à 2015, a poursuivi le Ministre. Enfin, les services de santé mentale pour les jeunes et les enfants ont été améliorés, a-t-il indiqué. M. Reilly a reconnu que plusieurs défis subsistent : la lutte contre la pauvreté des enfants, d’une part, et le phénomène des familles sans abri, d’autre part, sont deux priorités claires pour le Gouvernement, a-t-il indiqué.
L’imposante délégation irlandaise était également composée de la Représentante permanente de l’Irlande auprès des Nations Unies à Genève et de représentants du Ministère des affaires étrangères et du commerce ; du Ministère de la justice et de l’égalité ; du Ministère de la santé ; du Ministère de l’environnement, de la communauté et du gouvernement local ; du Ministère de l’éducation et des compétences ; du Ministère de la protection sociale ; et du Bureau du Procureur général de Dublin.
La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l’intégration des dispositions de la Convention dans le droit interne ; de la lutte contre la pauvreté des enfants ; de la protection sociale ; de la prise en charge des enfants en âge préscolaire ; des questions d’éducation et de santé ; de l’avortement ; des suicides ; de la question des abus sexuels commis par les membres du clergé ; de l’enregistrement des naissances d’enfants de parents non mariés ; de l’âge du mariage ; des questions de logement ; de l’âge de la responsabilité pénale ; des enfants placés en institution ; ou encore de la situation des enfants roms ou des gens du voyage.
Corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de l’Irlande, Mme Kirsten Sandberg, a insisté sur le problème des sans-abris, précisant que la situation est pire que jamais et que les hébergements d’urgence fournis par les autorités ne sont pas adéquats et souvent excentrés. Elle s’est aussi enquise des options qui s’offrent à une victime de viol ou d’inceste puisque l’avortement est interdit en Irlande sauf en cas de risque avéré pour la femme enceinte. Également corapporteur du Comité pour l’examen de ce rapport, M. Gehad Madi, a pour sa part fait observer que la structure du système éducatif irlandais où l’écrasante majorité des écoles primaires sont des établissements confessionnels est de nature à causer des difficultés pour les familles qui souhaitent scolariser leur enfant dans un environnement non confessionnel. Troisième corapporteur du Comité pour ce rapport, M. José Angel Rodríguez Reyes a relevé que si l’Irlande propose certes des programmes à l’attention des enfants obèses, des informations lui sont parvenues qui font état de délais d’attente excessifs en termes d’accès à ces programmes.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Irlande et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 29 janvier prochain.
Demain, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport périodique de Haïti (CRC/C/HTI/2-3) en salle XXIV du Palais des Nations. En parallèle, il poursuivra en salle XXV l’examen des rapports du Pérou entamé cet après-midi (CRC/C/PER/4-5 ; CRC/C/OPSC/PER/1 ; CRC/C/OPAC/PER/1) ;
Présentation du rapport de l’Irlande
Le Comité est saisi du rapport de l’Irlande (CRC/C/IRL/3-4) et des réponses du pays (CRC/C/IRL/3-4/Add.1) à la liste de questions écrites (CRC/C/IRL/Q/3-4) que lui a adressée le Comité.
Présentant le rapport de son pays, M. JAMES REILLY, Ministre de l’enfance et de la jeunesse de l’Irlande, a souligné que les dix dernières années ont été assez turbulentes pour le pays, avec le « boom » économique puis son interruption brutale. Les conséquences ont été considérables pour les familles et les enfants, a-t-il souligné. Il s’est toutefois réjoui des succès de la stratégie économique poursuivie par le Gouvernement aujourd’hui, assurant que sans les ressources d’une économie forte, il est difficile de progresser dans la mise en œuvre des droits de l’enfant. L’affectation de ressources significatives en faveur des enfants, notamment pour la santé, l’éducation, la protection sociale et le logement, témoignent de l’engagement du pays dans ce sens, a-t-il fait valoir. Il a rappelé que son Gouvernement a créé le tout premier Ministère de l’enfance et de la jeunesse en 2011. M. Reilly a fait observer que la Constitution irlandaise reconnaît maintenant aux enfants des droits spécifiques. Il a également rappelé que l’Irlande a ratifié en 2014 le Protocole facultatif à la Convention qui établit une procédure de plaintes individuelles (communications). Enfin, le Ministre a attiré l’attention sur l’adoption, en 2014, de la toute première politique nationale en faveur des enfants et des jeunes, couvrant la période 2014-2020 et intitulée « De meilleurs résultats, un meilleur avenir » (Better Outcomes, Brighter Futures).
Au nombre des autres mesures prises par son Gouvernement, M. Reilly a cité l’augmentation substantielle du nombre d’enseignants. Des investissements notables ont par ailleurs été consentis pour améliorer le système carcéral et faire en sorte que les enfants ne soient plus détenus dans des prisons pour adultes, a-t-il ajouté. Des lois ont été en outre promulguées, comme la Loi sur l’enfance (Children First Act) de 2015 qui apporte des garanties aux enfants et en vertu de laquelle les enfants ne peuvent plus se voir infliger de châtiments corporels. La loi sur la protection internationale de 2015, enfin, établit une seule et unique procédure pour l’examen des demandes d’asile.
Depuis le lancement du Plan d’action pour l’emploi en 2012, près de 135 000 emplois ont été créés et le taux de chômage est passé de 15,1% à 8,8% ; a poursuivi le Ministre. Le budget 2016 de l’Agence pour l’enfant et la famille a été accru de 5% par rapport à 2015. Enfin, les services de santé mentale pour les jeunes et les enfants ont été améliorés, a indiqué le Ministre.
Le chef de la délégation irlandaise a reconnu que plusieurs défis subsistent, s’agissant notamment de la lutte contre la pauvreté des enfants : en dépit des efforts réalisés pour protéger les enfants les plus vulnérables, un enfant sur douze vit dans la pauvreté, a-t-il précisé (NDLR : la délégation irlandaise a par la suite convenu que la proportion était plutôt de un enfant sur neuf, comme le faisait observer une experte du Comité). Pour y remédier, le Gouvernement a défini un objectif spécifiquement dédié à la lutte contre la pauvreté dans sa politique nationale en faveur des enfants et des jeunes couvrant la période 2014-2020, a fait valoir M. Reilly. Le problème des familles sans abri constitue également un défi majeur pour l’Irlande, a-t-il poursuivi ; pour y faire face, le Gouvernement a mis sur pied une stratégie sur le logement social. La lutte contre la pauvreté des enfants, d’une part, et le phénomène des familles sans abri, d’autre part, sont deux priorités claires pour le Gouvernement, a insisté le Ministre
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
MME KIRSTEN SANDBERG, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de l’Irlande, a reconnu que l’impact de la crise économique a été terrible pour les familles et les enfants du pays et a constaté que le Gouvernement irlandais est conscient des défis qu’il lui reste à relever. Elle a félicité le Gouvernement d’avoir ratifié le Protocole facultatif établissant une procédure de plaintes individuelles. Elle s’est alors enquise de l’intention du Gouvernement de procéder à la ratification du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, soulignant que l’Irlande est le seul État membre de l’Union européenne à ne pas être partie à ce texte.
L’experte a ensuite regretté que la Convention n’ait pas été totalement transposée dans le droit interne, relevant qu’il n’y a pas obligation pour les entités publiques de respecter les dispositions de cet instrument. Elle a aussi souhaité savoir quand la loi sur l’enfance et celle sur la famille entreraient en vigueur.
Mme Sandberg a par ailleurs salué le travail remarquable effectué par le Bureau du Médiateur depuis plus de dix ans. Rappelant toutefois la recommandation formulée à cet égard par le Comité lors de l’examen du précédent rapport de l’Irlande en 2006, elle a demandé s’il est prévu de faire en sorte que les ressources financières accordées à ce Bureau lui soient allouées directement par le biais de l’Oireachtas (Parlement national).
La corapporteuse a fait observer que les services de garde et d’éducation de la petite enfance sont particulièrement chers en Irlande et s’est inquiétée qu’il soit par conséquent difficile pour certaines familles d’y accéder. Elle a par ailleurs a souhaité savoir s’il existe une stratégie pour la prévention de la maltraitance au sein de la famille.
La situation des sans-abris est pire que jamais, a en outre déploré Mme Sandberg. Elle a souligné que les hébergements d’urgence fournis par les autorités ne sont pas adéquats et sont souvent excentrés. N’est-il pas possible de trouver une solution plus permanente pour ces familles ?
M. GEHAD MADI, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Irlande, a constaté que la loi sur la famille fixe l’âge minimal du mariage à 18 ans, sauf exception sur décision du tribunal. Il a souhaité savoir jusqu’à quel âge cette exception peut aller et dans quelles circonstances cette décision du tribunal peut être obtenue.
Constatant par ailleurs que l’écrasante majorité des écoles primaires irlandaises sont des établissements confessionnels, essentiellement sous le parrainage de l’Église catholique, l’expert a fait observer que cette structure du système éducatif est de nature à causer des difficultés pour les familles qui souhaitent que leurs enfants soient scolarisés dans un environnement non confessionnel. Il a donc invité la délégation à s’exprimer sur ce point et à préciser les mesures prises pour garantir l’accès à l’éducation pour tous les enfants, indépendamment de leurs croyances religieuses.
M. Madi s’est par ailleurs inquiété des discriminations à l’encontre des gens du voyage et des Roms, notamment en matière d’éducation, de logement et de santé. Il a souhaité savoir où en était l’intention affichée par le Gouvernement de reconnaître les gens du voyage en tant que minorités.
Le taux de suicide en Irlande est l’un des plus élevés au sein de l’Union européenne, a poursuivi le corapporteur, s’interrogeant sur les politiques ou stratégies mises en œuvre pour répondre à ce grave problème.
M. Madi s’est enquis de la situation des enfants réfugiés non accompagnés, demandant ce qui est fait pour éviter que ces enfants ne soient abandonnés dans une situation d’apatridie ou dans une situation d’ambiguïté au regard de la loi. Il a également souhaité savoir s’il était vrai qu’en Irlande il n’est pas possible de faire appel en cas de rejet d’une demande de regroupement familial. Enfin, le corapporteur a souhaité savoir si l’Irlande s’est dotée d’un système d’identification et de prise en charge des enfants réfugiés susceptible d’avoir pris part à des conflits armés.
M. JOSÉ ANGEL RODRÍGUEZ REYES, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport irlandais, a estimé que le niveau de la délégation présente devant le Comité pour cet examen témoignait de l’intérêt que le Gouvernement irlandais porte aux droits de l’enfant. Il a ensuite souhaité savoir comment la législation irlandaise protège le droit à l’identité et le droit de connaître ses origines dans le cas de naissance par mère porteuse ou en cas d’adoption. À partir de quel âge un enfant peut-il avoir accès à ces informations?
S’intéressant par ailleurs aux droits des enfants transgenres, le corapporteur s’est enquis de l’éventuelle existence de mécanismes permettant aux parents de demander pour leur enfant la reconnaissance d’un genre différent. Dans quel cas et à quel âge les enfants peuvent-ils demander ce changement? Y a-t-il des restrictions à cet égard?
M. Rodríguez Reyes a par ailleurs souhaité savoir si les châtiments corporels sont totalement interdits ou s’il existe une forme de tolérance à leur égard dans certains cas.
Relevant que l’Irlande propose des programmes à l’attention des enfants obèses, l’expert s’est enquis de l’accès à ces programmes, alors que des informations qui lui sont parvenues font état de délais d’attente excessifs en la matière.
D’autres questions soulevées par les trois rapporteurs ont porté sur la consécration du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans la loi ; sur le respect du droit à la vie privée ; sur les structures d’accueil pour les enfants victimes de violence ; ou encore sur le nombre d’hôpitaux encourageant l’allaitement maternel.
Un autre membre du Comité a demandé si l’Irlande comptait relever l’âge minimum de la responsabilité pénale.
Une experte s’est enquise des conditions d’obtention de la nationalité irlandaise.
Une experte a demandé des précisions s’agissant des mesures prises pour lutter contre les attitudes négatives à l’égard des enfants handicapés, ainsi que pour prévenir la consommation d’alcool et de tabac[NF1] .
Un expert a souhaité en savoir davantage au sujet de la politique appliquée à l’égard de l’avortement en Irlande.
Réponses de la délégation
La délégation a indiqué qu’un projet de loi a été publié qui traite des questions liées au Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Ce projet de loi devrait être adopté à la fin de l’année et pourrait mener à la ratification du Protocole facultatif, a-t-elle précisé.
S’agissant de l’intégration de la Convention dans le droit interne, la délégation a indiqué que la Constitution irlandaise prévoit la reconnaissance des principes du droit international des droits de l'homme dans la mesure où ils relèvent du droit coutumier ; les traités souscrits par l’Irlande ne sont certes pas incorporés directement dans le droit interne, mais l’essence du droit qu’ils contiennent est consacrée par la Constitution. La délégation a par ailleurs tenu à rappeler que l’Irlande n’a émis aucune réserve à la Convention.
En ce qui concerne la mise en œuvre des lois adoptées, la délégation a expliqué qu’il existe en effet une distinction entre promulgation et entrée en vigueur, cette dernière intervenant ultérieurement, le temps de s’assurer que tout est en place pour une mise en œuvre effective de la loi.
S’agissant des châtiments corporels, la délégation a annoncé que suite au retrait d’une référence au « châtiment raisonnable » dans la législation irlandaise, les enfants ne peuvent désormais plus se voir infliger de châtiments corporels, pas même au sein de la famille.
La délégation a d’autre part rappelé que face aux conséquences de la crise, le Gouvernement a veillé à assurer un certain niveau plancher de protection sociale pour les enfants. De plus, lorsque des économies sont faites, les sommes ainsi économisées sont réaffectées vers d’autres services, a-t-elle expliqué. À titre d’exemple, lorsqu’une allocation complémentaire pour frais universitaires a été annulée, une partie des sommes ainsi économisées a été allouée à un nouveau programme éducatif pour la petite enfance ; ou encore, face à la réduction des allocations familiales, l’État augmente les subventions pour les repas scolaires. Les coupes budgétaires ont toujours été accompagnées d’une réaffectation des ressources vers des besoins ciblés, a insisté la délégation.
La délégation a par ailleurs souligné que les organisations non gouvernementales sont régulièrement consultées en Irlande, notamment lorsqu’il s’agit d’établir les priorités budgétaires. Chaque année, des consultations sont organisées avec les membres de la société civile concernant un certain nombre de questions, dont celles ayant trait à l’aide aux familles.
La délégation a en outre réitéré sa préoccupation face à la pauvreté des enfants. Elle a rappelé que la crise qui a frappé le pays et le chômage qui a suivi ont eu un impact considérable sur les familles. Pour le Gouvernement, la meilleure manière de sortir de la pauvreté reste l’emploi et la promotion de l’autonomie financière ; c’est la raison pour laquelle il investit dans le domaine de l’emploi.
Le Bureau du Médiateur pour les enfants reçoit son budget du Ministère de l’enfance et de la jeunesse, a ensuite expliqué la délégation. Ce Bureau est suffisamment financé, du personnel supplémentaire ayant d’ailleurs pu être récemment recruté, a-t-elle ajouté. Ses activités sont totalement indépendantes et cette indépendance est pleinement respectée, a-t-elle assuré.
Interrogée sur la formation des juges, la délégation a précisé que cette question relève de la compétence de la commission chargée des cursus de formation qui décide en toute indépendance. Il y a toute une gamme de cours fournis aux étudiants, dont certains touchent aux questions des droits de l’enfant. La délégation a assuré que, dans la pratique, le principe de l’intérêt supérieur est respecté dans les tribunaux ; à titre d’exemple, la délégation a indiqué que les juges renoncent parfois à porter la robe lorsqu’ils entendent un mineur ou recourent à l’usage de la vidéo.
S’agissant de l’âge du mariage, la délégation a reconnu que la loi prévoyait des exceptions pour des unions dès l’âge de 16 ans. Toutefois, ces exceptions vont être abolies ; elles le seront quand les outils législatifs nécessaires seront en place.
L’Irlande disposait jusqu’en 2008 d’un Plan d’action national contre le racisme, a ensuite rappelé la délégation. Elle a ajouté que si ce Plan n’a pas encore été remplacé par un nouveau, cela ne signifie pas pour autant que rien n’est fait en la matière. Certaines mesures de l’ancien Plan fonctionnent encore en attendant que la nouvelle stratégie, actuellement peaufinée, soit mise en œuvre, a expliqué la délégation.
Quant à la question de reconnaître les gens du voyage comme groupe ethnique spécifique, elle est actuellement discutée, a ajouté la délégation. Il n’y a pas de politique spécifique de santé à l’égard des gens du voyage et des Roms, a précisé la délégation tout en reconnaissant que ces communautés ont des besoins spécifiques.
En ce qui concerne le système scolaire, la délégation a assuré que les écoles irlandaises ne sont bien entendu pas ouvertes uniquement aux catholiques. Le processus consistant à ne plus donner de dénomination religieuse aux écoles est en cours ; les progrès sont certes lents, mais les autorités ont à plusieurs reprises insisté sur l’importance d’accélérer ce processus. Un membre du Comité ayant fait observer que l’éducation religieuse fait partie du programme scolaire, la délégation a précisé qu’il est possible, au moment de l’inscription des enfants à l’école, de prévoir des arrangements pour ceux qui ne souhaitent pas suivre les cours d’éducation religieuse.
L’Irlande est à l’avant-garde des efforts pour la reconnaissance du genre, a fait valoir la délégation. Un jeune peut dès 16 ans faire une demande de changement de genre, avec le consentement parental, un avis médical et une décision des tribunaux. Le Gouvernement prévoit de réviser la législation actuelle : un processus de consultation est mené avec les jeunes et les associations concernées afin d’envisager les amendements nécessaires pour que l’intérêt supérieur des enfants soit pleinement respecté.
En réponse aux préoccupations exprimées par certains experts face à certaines dispositions de la loi relativement à l’enregistrement des naissances, la délégation irlandaise a expliqué qu’en cas de désaccord des parents non mariés sur le nom de famille à donner à leur enfant, cette donnée peut rester en blanc jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé. Il a été décidé de ne pas imposer un double nom de famille aux enfants, ni d’imposer un seul des deux noms (celui de la mère ou celui du père), mais plutôt de laisser aux parents le soin de décider. La case «nom» peut donc théoriquement rester vide jusqu’à ce que l’enfant atteigne ses 18 ans et puisse lui-même décider. Cette question reste à l’examen, a précisé la délégation, reconnaissant que la situation n’est en l’état pas pleinement satisfaisante. La délégation a par la suite indiqué que dans la pratique, en général, l’officier de l’état civil inscrivait le nom de la mère dans le registre.
En matière de santé, la délégation a expliqué que 1,8 million de cartes médicales permettant l’accès à des soins de santé gratuits pour les enfants ont été distribuées dans le pays. Grâce à cette carte, les soins de médecine générale sont gratuits pour les enfants jusqu’à l’âge de 6 ans ; le Gouvernement envisage d’étendre cette limite à 11 ans.
L’obésité est reconnue comme un problème dans la société irlandaise, a souligné la délégation, avant d’indiquer qu’une politique est actuellement finalisée pour lutter contre ce phénomène. Concernant l’allaitement, la délégation a reconnu que le taux d’allaitement maternel est faible en Irlande ; un plan couvrant la période 2016-2020 a été élaboré pour y remédier. Par ailleurs, une nouvelle stratégie de prévention du suicide a été lancée en 2014, l’Irlande ayant le quatrième taux le plus élevé de suicide chez les jeunes de 15 à 19 ans parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Enfin, un groupe a été mis sur pied pour examiner la possibilité d’élaborer une nouvelle stratégie de lutte contre la consommation de stupéfiants chez les jeunes. La délégation a aussi reconnu qu’il existe en Irlande une relation pas vraiment saine avec l’alcool, qui pose toute une série de problèmes – et pas uniquement pour les adultes.
La délégation a par ailleurs mentionné l’existence d’une stratégie qui couvre tous les domaines de la santé génésique. L'avortement est interdit en Irlande sauf en cas de risque réel pour la femme enceinte, a-t-elle rappelé. Ce risque doit être déterminé par des experts médicaux ; l’avortement ne peut être autorisé que s’il vient effectivement annuler ledit risque. À une experte qui s’interrogeait des options offertes à une victime de viol ou d’inceste, la délégation a indiqué que l’avortement est, en vertu de la loi actuelle, une option uniquement s’il y a un risque pour la mère.
L’Irlande est engagée à protéger les enfants contre la violence. La stratégie intitulée « De meilleurs résultats, un meilleur avenir » (Better Outcomes, Brighter Futures) contient plusieurs engagements dans ce sens. En outre, un projet de loi sur la violence domestique est en préparation, a indiqué la délégation.
En Irlande, l’écrasante majorité des enfants placés en institution suivent une instruction à temps plein, a par ailleurs indiqué la délégation. Les enfants des gens du voyage sont surreprésentés dans les institutions où sont placés les enfants, même si le Gouvernement essaie dans la mesure du possible de les placer dans des familles d’accueil. L’Irlande dispose par ailleurs d’une législation établissant un programme de suivi post-institutionnalisation, qui offre notamment un appui financier ou une aide concrète de formation professionnelle aux jeunes.
S’agissant de la question des abus sexuels commis par des membres du clergé, la délégation a souligné que les auteurs de ces actes sont soumis au même régime que les autres citoyens et doivent donc répondre de leurs actes. Des garanties existent dans la loi pour protéger les enfants contre tout abus sexuel ; ces infractions sont considérées comme pénales. La délégation a par ailleurs insisté sur l’importance de faire en sorte que les membres du clergé s’engagent à apporter une solution à ce problème. L’Irlande pour sa part est déterminée à aller de l’avant, a-t-elle conclu sur ce point.
La délégation a reconnu l’importance de créer davantage de logements. C’est dans cette optique qu’a été élaborée la stratégie à l’horizon 2020 pour la création de logements sociaux. Le Gouvernement envisage la création de 110 000 logements sociaux pour les 90 000 personnes en attente d’un logement, a précisé la délégation. Elle a en outre indiqué que 13 000 nouveaux logements ont été créés en 2015, soit beaucoup plus qu’en 2014. En 2016, il est prévu de construire 17 000 logements, a-t-elle ajouté. En réponse à une question portant sur les logements d’urgence, la délégation a expliqué qu’il existe deux types d’hébergements d’urgence – privés de type appartement et temporaires de type hôtel – et que tous font l’objet d’une inspection avant placement. Tout en reconnaissant la nécessité d’augmenter le nombre de ces logements pour répondre aux besoins, la délégation a fait valoir que le Gouvernement a préféré mettre la priorité sur la création de logements permanents.
L’âge de la responsabilité pénale reste fixé à 12 ans ; toutefois, des enfants âgés de 10 et 11 ans peuvent être accusés d’une infraction grave, telle que le meurtre, l’homicide ou le viol, a d’autre part indiqué la délégation irlandaise. Elle a précisé qu’il n’y a actuellement aucun enfant âgé de 12 à 14 ans qui soit en détention.
La délégation s’est également réjouie d’une évolution capitale effectuée dans le domaine de la justice pour mineurs : en effet, a-t-elle indiqué, le Gouvernement s’est engagé à mettre un terme définitif à la détention des enfants dans des prisons pour adultes. Pour ce faire, a été lancé un programme débouchant sur la création d’un nouveau centre de détention, assorti d’un centre de formation. Tous les détenus de moins de 18 ans seront intégrés dans ce centre qui place l’accent sur la rééducation et non plus sur la punition.
Répondant enfin aux questions relatives à la prise en charge des enfants en âge préscolaire, la délégation a annoncé que dès la rentrée de septembre prochain, il sera possible pour les enfants d’entrer en crèche à trois moments de l’année, soit en septembre, soit en janvier, soit en avril – et non plus en septembre seulement comme cela était le cas jusqu’ici. Par ailleurs, un programme communautaire a été mis en œuvre qui a permis d’augmenter les places en crèches depuis l’année dernière. Un autre programme, inédit, destiné à assurer un accès abordable aux crèches et une prise en charge de qualité devrait être appliqué au cours de cette année, a ajouté la délégation.
Concluant le dialogue, le Ministre de l’enfance et de la jeunesse de l’Irlande, M. JAMES REILLY, a convenu qu’il reste pour son pays beaucoup à parcourir ; mais au moins le Gouvernement a un projet, avec la stratégie Better Outcomes, Brighter Futures qui est la feuille de route du Gouvernement pour l’avenir, a-t-il souligné.
Conclusions
Corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de l’Irlande, M. MADI a salué le professionnalisme avec lequel les membres de la délégation ont apporté des réponses aux questions du Comité. Il a constaté l’intention, positive, du Gouvernement[NF2] irlandais de donner corps à ses obligations au titre de la Convention et a souhaité que cette intention se traduise en actes concrets. Beaucoup de lois ont été promulguées, mais elles ne sont pas opérationnelles, a-t-il fait observer; des stratégies sont encore en attente et il serait souhaitable qu’elles soient rapidement mises en œuvre. Enfin, M. Madi a réitéré sa préoccupation face aux exceptions prévues par la loi pour le mariage d’enfants de moins de 18 ans et a souhaité une application rapide du changement annoncé à cet égard par la délégation lors de ce dialogue.
M. RODRÍGUEZ REYES, également corapporteur du Comité pour l’examen du rapport irlandais, s’est félicité de la qualité du dialogue qui, selon lui, prouve l’intérêt porté par l’Irlande aux questions de droits de l’enfant. Elle aussi corapporteuse du Comité pour l’examen de ce rapport, MME SANDBERG a indiqué avoir apprécié ce dialogue fructueux et constructif.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRC16/008F