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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LA QUESTION DE LA BONNE GOUVERNANCE FONDÉE SUR LES DROITS DE L'HOMME DANS LE SERVICE PUBLIC

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, à la mi-journée, une réunion-débat consacrée à «une approche de la bonne gouvernance fondée sur les droits de l'homme dans le service public» (résolution 25/8 du Conseil).

M. Ibrahim Salama, Directeur de la Division des traités au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a ouvert la réunion en rappelant que la bonne gouvernance constituait la mission centrale de tout gouvernement. Mais ce concept fait face à de nombreux défis, telles que les politiques d'austérité, les privatisations sauvages, la corruption, les conflits et la violence. Les conséquences les plus graves en sont une perte de légitimité, l'instabilité sociale et bien souvent pour une partie de la population la quête d'une vie meilleure sous d'autres cieux. C'est la raison pour laquelle les droits de l'homme et la bonne gouvernance sont étroitement liés.

Le débat était animé par la Directrice de l'Institut Max Planck, Mme Anne Peters, qui a donné des exemples concrets de ce lien: un service public de qualité est essentiel dans le cadre du droit à la santé ou à un procès rapide et en bonne et due forme, par exemple; les divergences portent sur la question de savoir quels services doivent être publics et lesquels peuvent être délégués au privé.

Les experts invités étaient M. Adetokunbo Mumuni, Directeur exécutif du Socio-Economic Rights and Accountability Project à Lagos au Nigéria; M. Kim Taekyoon, Professeur de développement international à l'École des études internationales de l'Université nationale de Séoul (République de Corée); Mme Safak Pavey, membre du Comité des droits des personnes handicapées et Vice-Présidente et membre de la Grande Assemblée nationale de Turquie; Mme Mariana González Guyer, Directrice de l'Institution nationale des droits de l'homme et Médiatrice du peuple de l'Uruguay; et M. Jan Pastwa, Directeur de l'École nationale d'administration publique de Pologne.

M. Mumuni a axé son intervention sur le rôle des organisations non gouvernementales dans l'engagement d'actions en justice contre la corruption. Selon lui, il serait nécessaire de mettre sur pied une cour internationale anti-corruption contre les mafias internationales. M. Kim a estimé que la bonne gouvernance jouerait un rôle essentiel dans la définition du Programme de développement durable pour l'après-2015 mais a noté que le concept était devenu controversé, perçu par les pays en développement comme une conditionnalité imposée à l'aide au développement. Mme Pavey a cité plusieurs cas concrets de corruption et de services publics déficients, ajoutant que, trop souvent, les organisations de la société civile ne peuvent pas protester car elles sont en fait dépendantes d'un soutien politique pour survivre. Mme González Guyer, a estimé ainsi que l'on n'avait pas porté une attention suffisante au lien entre genre et gouvernance, que ce soit de manière théorique ou empirique. Enfin, M. Pastwa a rappelé que c'était un travailleur des chantiers navals de Gdansk qui, en août 1980, avec la création du syndicat Solidarité, avait fait figurer au nombre de ses revendications la question de l'égalité d'accès aux services publics, qui constitue aujourd'hui une règle pour les services publics polonais.

Au cours du débat, les délégations de pays* ont dans leur grande majorité mis en avant les mesures prises par leur gouvernement pour assurer des services publics de qualité accessibles à tous. Certaines mettant l'accent sur la coopération internationale qu'elles fournissent dans ce domaine. La lutte contre la corruption est apparue comme la priorité des priorités dans le cadre des mesures prises en faveur de l'amélioration de l'administration des services de l'État. Des délégations ont expliqué que l'informatisation ou l'accès des personnes handicapées figuraient parmi les principales mesures concrètes prises par leur gouvernement.

Les organisations non gouvernementales** ont pour leur part dénoncé la corruption de la fonction publique dans certains pays qui compromet tout effort de promotion des droits de l'homme. Plusieurs ont dénoncé l'attitude du gouvernement de la Norvège qui a pris des mesures contre une organisation non gouvernementale, Global Network for Rights and Development (GNRD), ce qui témoignerait de ce que les fonctionnaires ne respectent pas l'égalité de traitement sur la base de l'origine ou de la religion.


Cet après-midi, le Conseil doit procéder à l'adoption des documents finals s'agissant de la Mongolie, de Panama et des Maldives, dans le cadre de l'Examen périodique universel.


Réunion-débat sur la bonne gouvernance dans le service public

Déclarations liminaires

M. IBRAHIM SALAMA, Directeur de la Division des instruments des droits de l'homme du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a rappelé que la bonne gouvernance dans chacun des aspects de l'espace public constituait la mission centrale de tout gouvernement. Pourtant, beaucoup de gens dans le monde continuent de revendiquer vainement cette bonne gouvernance. Celle-ci fait face à de nombreux défis, telles que les politiques d'austérité, les privatisations sauvages, la corruption, les conflits et la violence. Il en résulte une perte de légitimité des pouvoirs publics, une désillusion massive des populations, un échec du développement durable, l'instabilité sociale. Dans de nombreux cas, la mauvaise gouvernance est à l'origine de la quête d'une vie meilleure dans un autre pays.

Les droits de l'homme et la bonne gouvernance sont intrinsèquement liés, a ajouté M. Salama, car cette dernière ne peut être réalisée sans respect des droits fondamentaux. Une approche des droits de l'homme à la bonne gouvernance dans le service public exige que les États garantissent la non-discrimination et l'égalité dans la fourniture des services à la population, en assurant leur disponibilité, leur accessibilité, et leur qualité.

M. Salama a rappelé que l'on avait assisté à une tendance grandissante à privatiser les services publics ainsi qu'à instaurer des partenariats public-privé dans la fourniture des services au public, ce qui peut entraîner des effets indésirables sur les droits fondamentaux des gens et des communautés en matière d'éducation, de logement, d'accès à l'eau et à l'assainissement. Le rapport récent du Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation relatif à la protection de ce droit contre toute «commercialisation» de l'éducation est particulièrement révélateur à cet égard, a-t-il estimé. Le Haut-Commissariat estime que dans les cas de privatisation ou de semi-privatisation de services publics, il est essentiel que l'on mette en place des mécanismes efficaces d'établissement des responsabilités des fournisseurs et de contrôle de la qualité des services, ainsi aussi que des procédures d'appel d'offres transparentes.

MME ANNE PETERS, Directrice de l'Institut Max Planck et animatrice du débat, a estimé que l'accès à un service public de qualité et non corrompu pouvait permettre la jouissance des droits de l'homme. Il y a les droits de l'homme des citoyens ordinaires et de tous les droits, comme par exemple le droit à la santé, à un procès rapide et en bonne et due forme ou encore le droit de ne pas subir de la violence. Mais il y a aussi les droits de l'homme des fonctionnaires. Lorsque leurs droits sont respectés, ils sont à même de faire leur travail et d'éviter la corruption, a expliqué Mme Peters.

Mme Peters a ensuite observé qu'il existe des divergences de vue sur les responsabilités de l'État. La controverse porte sur la question de savoir quels services doivent être publics et lesquels peuvent être dévolus au secteur privé. Mais un État qui est partie à un instrument international relatif aux droits de l'homme ne peut se défausser de ses responsabilités et dire par exemple qu'il ne peut fournir des services de santé adéquats. Cela ne signifie pas non plus que le secteur privé n'a pas sa place. Le tout est une question de bonne gouvernance, a estimé Mme Peters.

Exposés des panélistes

M. ADETOKUNBO MUMUNI, Directeur exécutif du Socio-Economic Rights and Accountability Project (SERAP, Lagos, Nigéria), a expliqué que le SERAP est une organisation non gouvernementale dont le mandat inclut la promotion de la transparence et de l'obligation redditionnelle dans les secteurs public et privé par le biais des droits de l'homme. Il a axé son intervention sur le rôle des ONG dans l'engagement d'actions en justice contre la corruption, là où les institutions de lutte contre la corruption manquent à leurs obligations en la matière, et sur le soutien de son organisation à la mise sur pied d'une cour internationale anti-corruption afin de juger la grande corruption et de faciliter le rapatriement des fonds volés aux États qui en sont victimes. Il est nécessaire que la communauté internationale se rassemble pour souscrire à cette nouvelle solution en vue de régler un problème complexe, a insisté M. Mumuni. Pour lui, une cour internationale anti-corruption serait un outil complémentaire permettant de lutter contre la grande corruption. Contrairement à ce que certains voudraient faire croire, la création d'une telle cour ne saurait être contre-productive, a-t-il affirmé.

M. KIM TAEKYOON, Professeur de développement international à l'École des études internationales de l'Université nationale de Séoul (République de Corée), a déclaré que la bonne gouvernance jouerait un rôle essentiel dans la définition du Programme de développement pour l'après-2015. Pourtant, bien que cette bonne gouvernance soit fondamentale pour obtenir des succès, la question de sa prise en compte dans les objectifs du Millénaire pour le développement n'est pas claire, a-t-il reconnu. En outre, l'expression «bonne gouvernance» est devenue controversée en raison de son utilisation dans le domaine de l'aide au développement.

Le concept de bonne gouvernance est apparu dans le rapport de 1989 de la Banque mondiale consacré au développement de l'Afrique subsaharienne, a rappelé M. Kim. La fusion de la démocratie et du libéralisme économique dans le discours sur la bonne gouvernance fait que cette notion ne s'écarte pas sensiblement des théories sur la modernisation du passé: elle incarne l'image d'une bonne société largement construite sur des valeurs et expériences occidentales. Il n'empêche que l'affirmation selon laquelle il n'est pas de bonnes politiques sans bonnes institutions constitue une évidence, voire une tautologie. Pour leur part, les pays en développement sont préoccupés par l'utilisation d'objectifs et d'indicateurs de bonne gouvernance en matière d'aide publique au développement car ils les perçoivent comme une forme de conditionnalité. Or, c'est un fait que l'aide au développement a plus de chance de conduire à des succès dans des contextes où elle a davantage de chances d'être efficace et moins dans des environnements plus difficiles ou inhospitaliers.

MME SAFAK PAVEY, membre du Comité des droits des personnes handicapées et Vice-Présidente et membre de la Grande Assemblée nationale de Turquie, a fait observer que désormais, tous les États à travers le monde savent qu'ils deviennent des membres respectés de la communauté internationale lorsqu'ils acceptent les principes communs de celle-ci. Or, chacun s'accorde aujourd'hui pour dire que la gestion des services publics doit être fondée sur les droits de l'homme. Mme Pavey a fourni des exemples de cas où un employé ayant refusé d'être corrompu a été mis à l'oubli au sens littéral du terme, où une municipalité a choisi, avec le soutien d'une majorité des administrés, de ne pas fournir de services aux membres d'une secte religieuse minoritaire et où les questions devant être posées à un examen avaient été transmises à l'avance à certains candidats favorisés. Face à ce type de cas, il arrive trop souvent que les organisations de la société civile ne puissent pas protester car elles sont en fait dépendantes d'un soutien politique pour survivre.

Par ailleurs, une certaine propagande présente le droit et les principes universels comme un nouvel instrument inventé par certains pays pour exploiter les autres. Jusqu'ici, cette propagande est parvenue à convaincre les masses, a déploré Mme Pavey. Aucun consensus n'a été atteint à ce jour concernant les programmes, stratégies et objectifs visant à créer un avenir où la technologie, l'industrie et l'information aideraient toutes les sociétés à fonctionner à la même vitesse et avec le même sens moral, à l'échelle planétaire, a fait observer l'experte du Comité des droits des personnes handicapées.

MME MARIANA GONZÁLEZ GUYER, Directrice de l'Institution nationale des droits de l'homme et Médiatrice du peuple de l'Uruguay, a consacré son exposé à la bonne gouvernance du point de vue des femmes. Elle a affirmé que les femmes transformaient déjà les processus de gouvernance au travers de leur participation dans les différentes institutions étatiques, ainsi que dans les organisations de la société civile. Toutefois, on ne doit pas méconnaître le fait que les institutions sont aussi traversées par le système de genre, comme le montrent les charges occupées par les femmes et les hommes dans celles-ci. L'intervenante estime ainsi que l'on n'a pas porté une attention suffisante au lien entre genre et gouvernance, ni du point de vue théorique, ni dans les études empiriques.

M. JAN PASTWA, Directeur de l'École nationale d'administration publique de Pologne, a souligné que pour assurer la bonne gouvernance, une législation adéquate est un préalable certes nécessaire mais insuffisant. Le concept de bonne gouvernance offre de réelles opportunités de mettre en lumière les liens existants entre droits de l'homme et bonne gouvernance, a-t-il indiqué. Il a rappelé que c'est un travailleur des chantiers navals de Gdansk qui, en août 1980, formant le mouvement social Solidarnosc, faisait figurer au nombre de ses «21 demandes» la question de l'égalité d'accès aux services publics. Aujourd'hui, cette règle fait office de principe pour les services publics polonais. La jouissance des droits de l'homme par des individus et des groupes dépend largement de la conscience et de l'attitude des fonctionnaires publics, a par ailleurs souligné M. Pastwa.

Débat

La Pologne, au nom des principaux auteurs de la résolution du Conseil des droits de l'homme sur la bonne gouvernance dans la fonction publique, a dit souscrire entièrement aux recommandations du rapport du Haut-Commissariat et ses recommandations. La Pologne plaide pour la création d'institutions efficaces et rentables les droits de l'homme au cœur de la prestation des services publics.

L'Union européenne a souligné qu'une fonction publique professionnelle, compétente et responsable constituait un élément central de la bonne gouvernance inscrite au nombre des objectifs du développement durable pour 2030. Elle demande au Conseil des droits de l'homme de continuer d'examiner la question de la bonne gouvernance des institutions publiques. La France s'est dite convaincue que le service public doit jouer un rôle de premier plan dans la protection des droits de l'homme. C'est pourquoi elle a mis en place des mécanismes pour diffuser les droits de l'homme dans toutes les actions publiques, sous la surveillance de la société civile. Elle assure aussi la formation de fonctionnaires de pays étrangers. La Belgique a relevé que la fourniture de services publics est de plus en plus confiée à des entités privées, de sorte que toute réflexion sur la bonne gouvernance des services publics doit également se pencher sur le rôle du secteur privé.

L'Irlande a notamment insisté sur l'importance que revêtent les droits de l'homme dans la formation des forces de police et de défense du pays et sur l'importance d'assurer coordination et cohérence au niveau international dans l'approche des questions de services publics. L'Estonie a indiqué que la bonne gouvernance ne pouvait être fondée que sur des services respectant les principes de responsabilité, de participation et d'accessibilité pour tous. Elle a ensuite présenté les mesures qu'elle a prises pour promouvoir la bonne gouvernance des services publics, notamment au travers de l'utilisation de supports électroniques dans le domaine de la santé. Pour le Monténégro, une bonne gouvernance et une administration publique qui fonctionne bien ne peuvent se concevoir sans une société civile efficace.

L'Algérie, au nom du Groupe africain, a souligné que l'impartialité et la lutte contre la corruption devaient être placées au cœur de la gouvernance des pouvoirs publics, outre la responsabilité sociale et l'engagement citoyen. En son nom propre, l'Algérie a souligné la complémentarité entre la bonne gouvernance et les droits de l'homme et expliqué que l'intégration des droits de l'homme se faisait au plan national à travers le service public selon une approche inclusive de toutes les dimensions des droits de l'homme et sans aucune discrimination pour cause de naissance, de race, de sexe ou d'opinion.

Au nom de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le Maroc a préconisé des mesures institutionnelles pour faire en sorte que les institutions publiques tiennent compte des droits de l'homme. La corruption peut entraver la jouissance des droits de l'homme et c'est pourquoi les États membres de l'OIF ont pris des engagements concrets contre la corruption et pour la coopération dans ce domaine, notamment en matière judiciaire. En son nom propre, Le Maroc a précisé que son administration publique s'était donnée pour objectif l'amélioration des prestations de service en faveur du citoyen ainsi que le renforcement de la transparence dans la gestion publique, la lutte contre la corruption et la promotion d'une nouvelle culture de gestion des ressources humaines.

Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, a souligné les difficultés matérielles qui empêchent de nombreux États de donner suite aux engagements qu'ils ont pris pour la bonne gouvernance. Pour le Bangladesh, la gouvernance, indépendamment du système de gouvernement, est la clé de la lutte contre la pauvreté. Le Bangladesh a procédé à des réformes du fonctionnement de son administration en vue d'une plus grande efficacité de l'action publique. Il est aussi nécessaire de réformer la gouvernance des institutions financières internationales, a plaidé le Bangladesh. Pour l'Inde, la bonne gouvernance est celle qui met la population au cœur du développement, en particulier la population rurale: le pays a fait du 25 décembre la Journée nationale de la bonne gouvernance.

La Fédération de Russie a dit faire des efforts considérables pour rendre transparent le fonctionnement de l'administration publique. Les citoyens disposent notamment de nouveaux mécanismes de plainte et de meilleurs délais en matière de possibilités de recours. Les fonctionnaires coupables de corruption sont passibles de sanctions pénales. La Géorgie a notamment fait observer que le pays était en train de finaliser sa réforme des services publics. L'Azerbaïdjan a déclaré que des services publics transparents et rendant des comptes étaient essentiels pour des sociétés démocratiques fondées sur la bonne gouvernance et les droits de l'homme. La bonne gouvernance renvoie aux valeurs d'équité dans la fourniture de services publics pour tous sans distinction; elle renvoie aussi à la participation du public.

Le Qatar a présenté les principaux aspects de son plan national d'amélioration de la gestion des affaires publiques, en particulier l'ouverture de «guichets électroniques», la formation des fonctionnaires aux droits de l'homme et la création d'un organe de contrôle administratif pour la transparence et contre la corruption. Bahreïn a dit offrir des services à ses citoyens en ayant à l'esprit les objectifs des Nations Unies. L'Égypte a mis l'accent sur la lutte contre la corruption et le perfectionnement professionnel des fonctionnaires. La Tunisie s'est dite convaincue que l'administration publique doit donner l'exemple de la transparence. La liberté d'information joue un rôle déterminant à cet égard, puisque elle seule permet à la population de dénoncer des faits de corruption. La Tunisie a créé un organisme de contrôle des marchés publics.

L'Australie a rappelé que la bonne gouvernance, qui facilite la prévisibilité, est la clef de la prospérité. La mauvaise gouvernance provoque le gaspillage, la corruption, la discrimination et une perte de confiance. L'Australie s'est enquise auprès des panélistes du rôle des services publics pour assurer la réalisation des Objectifs du développement durable. Les États-Unis ont axé leur intervention sur la question de l'accès des personnes handicapées aux services publics et leur participation à la vie publique. Ils ont attiré l'attention sur la hausse significative, ces dernières années, du nombre d'employés handicapés dans la fonction publique des États-Unis. Ces derniers ont demandé aux panélistes leur étaient les défis et les obstacles auxquels les pays sont confrontés en termes de promotion du nombre de personnes handicapées dans la fonction publique.

La République islamique d'Iran a rappelé que les États étaient les premiers responsables dans la fourniture d'un service public de qualité optimale, ainsi que l'a souligné la résolution 25/8 du Conseil des droits de l'homme. La Chine a affirmé a effectué des efforts d'administration de son service public, en mettant l'accent sur le respect des droits, par l'examen des plaintes des usagers par exemple. Les gouvernements de tous les niveaux sont encouragés à renforcer la confiance du public dans leur administration. La Chine mène une action sur tous les fronts en faveur de l'état de droit. Tous les actes de corruption doivent être punis.

Singapour a dit avoir adopté une approche gouvernementale pragmatique et non dogmatique, mettant l'accent sur la mise en œuvre des politiques; à tel point qu'une immense majorité de sa population fait confiance en son administration. Pour la Turquie, seule une approche basée sur les droits de l'homme peut permettre d'élaborer des politiques de lutte contre la corruption. Il faut en effet que les fonctionnaires aient à l'esprit l'intérêt du public, a poursuivi le Ghana ajoutant que les fonctionnaires doivent également être à l'abri des manipulations ou des pressions politiques.

Pour l'Éthiopie, la bonne gouvernance, c'est également la possibilité de choisir ses gouvernants en toute liberté et sans pressions extérieures. Elle souhaite savoir comment la communauté internationale peut aider les pays qui ont des contraintes financières. La Sierra Leone a indiqué disposer d'une Commission nationale des droits de l'homme dotée du statut A auprès du Comité international de coordination des institutions nationales de droits de l'homme. Le pays s'est enquis auprès des panélistes de recommandations réalistes à l'intention des États concernant la question à l'étude. La Namibie a rappelé que l'article 18 de sa Constitution prévoit une justice administrative; le pays dispose en outre d'un médiateur dont le premier objectif est de protéger le public contre tout abus des droits de l'homme.

L'Afrique du Sud a déclaré que les services publics constituaient un rouage essentiel dans la fourniture des services de base afin d'assurer le bien public. Les fonctionnaires publics sont censés se comporter en faisant preuve d'intégrité et d'efficacité. Il convient dans ce contexte d'assurer l'accès de tous aux services publics, sans distinction aucune. Parce qu'il considère qu'une administration optimale et une bonne gouvernance sont devenus des outils de pleine jouissance des droits de l'homme, le Sénégal a créé un organe de lutte contre la fraude et la corruption et a nommé un médiateur de la République chargé de recueillir les plaintes des usagers de la fonction publique procèdent de cette logique.

L'Équateur souscrit au point de vue selon lequel les services publics renvoient à des services essentiels du point de vue des droits de l'homme et a pris à cet à égard de nombreuses mesures, notamment en matière de logement, contribuant à réduire très sensiblement la pauvreté entre 2005 et 2014. L'Équateur se situe au sixième rang des pays de la région latino-américaine en termes d'efficacité des services publics. La Colombie a affirmé que «le bon gouvernement» était devenu une priorité pour elle. Elle s'est donnée pour priorité la transparence, la reddition de comptes, l'efficacité du service public et la lutte contre la corruption.

Parmi les organisations non gouvernementales, Americans for Democracy in Bahrain Inc a dénoncé la corruption de la fonction publique de Bahreïn, un problème qui compromet tout effort pour les droits de l'homme dans ce pays. La société nationale d'aluminium est accusée d'avoir versé plus de cent millions de dollars de dessous-de-table; certains membres de la famille royale utilisent des fonds publics pour organiser des fêtes privées. La Commission arabe des droits de l'homme a souligné qu'il faut parvenir à concilier les particularités culturelles et l'universalité des droits de l'homme. La Commission recommande aux États de ratifier les deux Pactes internationaux relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels et aux droits civils et politiques, ainsi que les conventions pertinentes de l'Organisation internationale du Travail.

L'Agence pour les droits de l'homme a demandé au gouvernement de la Norvège d'expliquer pourquoi ils a attaqué l'organisation non gouvernementale Global Network for Rights and Development (GNRD) et pourquoi elle refuse de délivrer un permis de séjour à un des employés de l'organisation en se basant sur la mauvaise réputation qui est faite à cette organisation dans la presse. L'Institut international pour la paix la justice et les droits de l'homme a également accusé le gouvernement norvégien d'avoir violé de nombreux droits de l'homme en attaquant le personnel de GNRD. Africa Speaks a relevé qu'il y avait consensus sur le fait que la bonne gouvernance était la pierre angulaire du respect des droits fondamentaux. L'ONG a cité comme un contre-exemple donné la Norvège, du fait des accusations que ce pays a portées contre GNRD, qu'Africa Speaks, juge infondées et qui témoignent selon elle que les fonctionnaires ne respectent pas l'égalité de traitement sur la base de l'origine ou de la religion.

Le Groupe des ONG pour la Convention relative aux droits de l'enfant, au nom également de Geneva Infant Feeding Association (IBFAN-GIFA); Alliance internationale d'aide à l'enfance; et Plan International, a demandé aux États de mobiliser les financements nécessaires à la réalisation des droits de l'enfant. Les États doivent, dans leurs politiques, prendre en compte à titre prioritaire les enfants les plus vulnérables; ces politiques doivent être accompagnées de mécanismes de vérification et de suivi.

Réponses et conclusions des panélistes

M. PASTWA a déclaré que dans la pratique, pour assurer la bonne gouvernance, il convenait de réfléchir à la manière d'harmoniser les mesures à prendre et les buts à atteindre. Il faut définir un budget de mise en œuvre et disposer de personnes qui s'impliquent et savent convaincre tout en encourageant la participation. Il faut aussi disposer d'exemples de bonnes pratiques. M. Pastwa a recommandé que le service public invite des parties tierces dans la conception des politiques publiques. Les citoyens doivent pour leur part avoir conscience de leurs droits et des recours à leur disposition pour les faire valoir. Certes, des mesures ont un coût, mais celui-ci peut être mitigé par le recours au «cyber gouvernement». Il faut briser le cercle vicieux de la corruption dans l'administration.

En réponse aux questions la manière d'empêcher la corruption parmi les fonctionnaires de haut niveau, M. MUMUNI a rappelé que, pour lutter contre la corruption, on ne pouvait s'en tenir au seul niveau national. C'est pour cela qu'il appelle à la création d'une cour internationale anti-corruption qui agirait de la même manière que la Cour pénale internationale. Après les observations de plusieurs délégations africaines, il a estimé que l'échec des services publics en Afrique était effectivement imputable à la corruption, avant de recommander que des sanctions soient prises systématiquement en cas de manquement. Il faudrait adopter un code de conduite très explicite à cet égard, a ajouté M. Mumuni, pour qui la volonté politique est moins importante que l'existence d'institutions solides.

MME GONZÁLEZ GUYER a notamment rappelé que les institutions nationales de droits de l'homme ont pour rôle de contrôler les États et les gouvernements du fait de leur devoir de protection des droits de l'homme. Ces institutions constituent donc un levier qu'il convient de renforcer pour assurer la bonne gouvernance dans les services publics.
Mme Gonzáles Guyer a en outre recommandé l'adoption d'indicateurs permettant de mesurer l'efficacité des «pratiques exemplaires» en matière de gouvernance, puis d'«exporter» ces dernières vers d'autres pays. La lutte contre la corruption est en effet primordiale. Par ailleurs, de nombreux pays voient l'implication croissante des entreprises privées dans la fourniture de services publics, ce qui pose nécessairement la question de la responsabilisation de ces entreprises s'agissant du respect des principes de la bonne gouvernance. Les nouvelles technologies ne sont pas en soi une garantie de bonne gouvernance, a souligné l'experte.

MME PAVEY a attiré l'attention sur les différences de perceptions culturelles, qui nécessitent l'organisation de campagnes pour modifier l'état d'esprit des gens. Dans certaines cultures, on pense qu'il faut courber l'échine pour travailler et rester à l'abri du besoin, a-t-elle relevé, avant d'insister sur la nécessité de convaincre les populations de l'importance de la bonne gouvernance déjà à l'échelon local. L'experte a en outre préconisé la généralisation de l'éducation inclusive au profit des handicapés. Les États doivent pour ce faire vaincre, si nécessaire, les réticences exprimées par certains parents, voire certaines catégories de populations.

M. KIM a quant à lui fait observer qu'il existe parmi les organisations internationales concernées différentes manières d'appréhender la lutte contre la corruption; aussi, convient-il dans ce contexte d'encourager les synergies en se fondant sur les bonnes pratiques. Ce qui est certain, c'est que la communauté internationale a l'obligation de contribuer au financement du développement. Rares sont malheureusement les pays qui respectent les objectifs dans ce domaine, a-t-il regretté, avant d'estimer qu'il fallait trouver des sources alternatives de financement des services publics des pays en développement. La République de Corée a introduit une «taxe de solidarité» pour ce faire. On peut imaginer de taxer des secteurs qui échappent encore à l'impôt, a-t-il conclu.

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* Des déclarations ont été faites par les délégations des pays suivants: Union européenne, Pologne (au nom d'un groupe d'États), Algérie (au nom de the Groupe africain), Maroc (au nom de Groupe Francophone), Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique), Bangladesh, France, Qatar, Fédération de Russie, Égypte, Tunisie, Inde, Australie, Géorgie, Irlande, Sierra Leone, Belgique, Namibie, États-Unis, Singapore, Turquie, Ghana, Éthiopie, Monténégro.

** Des déclarations ont été faites par les organisations non gouvernementales suivantes:
Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc; Commission arabe des droits de l'homme; Agence pour les droits de l'homme; Institut international pour la paix, la justice et les droits de l'Homme (IIPJDH); Global Network for Rights and Development (GNRD); Africa Speaks; Groupe des ONG pour la Convention relative aux droits de l'enfant (au nom également de Geneva Infant Feeding Association (IBFAN-GIFA); Alliance internationale d'aide à l'enfance; et Plan International).


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HRC15/125F