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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME À SRI LANKA

Compte rendu de séance
Il examine aussi des rapports concernant le Cambodge, le Yémen, le Soudan du Sud, l'Iraq, les atrocités commises par Boko Haram et la situation des Rohingyas au Myanmar

Le Conseil des droits de l'homme a été saisi, cet après-midi, de rapports établis par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme à Sri Lanka. Il s'est également penché sur plusieurs autres rapports établis, à sa demande, par le Haut-Commissariat concernant la situation au Cambodge, au Yémen, au Soudan du Sud et en Iraq, ainsi que les atrocités commises par Boko Haram et la situation des Rohingyas au Myanmar. Le Conseil a enfin ouvert un débat général concernant ces rapports ainsi que l'assistance technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme.

Le Haut-Commissaire, M. Zeid Ra'ad Al Hussein, a présenté l'enquête menée par le Haut-Commissariat qui conclut notamment qu'il existe de bonnes raisons de croire que des violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme ont été commises par toutes les parties au conflit. M. Zeid a recommandé la création d'un tribunal spécial chargé de juger les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, doté de ses propres moyens d'enquête, de poursuite et de protection des témoins et victimes. Dans un environnement particulièrement polarisé, un mécanisme de cette nature est essentiel pour donner à tous les Sri-Lankais, surtout aux victimes, la confiance dans l'indépendance et l'impartialité du processus, a souligné M. Zeid.

Sri Lanka a souligné qu'avec le changement de Gouvernement intervenu au début de cette année, le pays laissait derrière lui une décennie marquée par une culture de l'impunité au cours de laquelle les droits individuels ont été bafoués. Le Président et le Premier ministre ont placé la réconciliation et le développement en tête de leurs priorités gouvernementales. Sri Lanka s'est dit déterminée à coopérer avec le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, avec son institution, ainsi qu'avec les systèmes et procédures du Conseil des droits de l'homme.

Au cours du débat, des délégations* ont salué les efforts du nouveau gouvernement de Sri Lanka pour créer des mécanismes crédibles et indépendants pour établir la vérité, rendre la justice, apporter des réparations et garantir que les crimes du passé ne se reproduiront plus. Sri Lanka a été prié d'appliquer les engagements qu'elle a pris pendant cette session, à commencer par l'organisation d'une consultation nationale pour concevoir un processus intégral de justice. Des délégations ont observé qu'il appartenait à Sri Lanka seule de décider quelle voie et quelle assistance recevoir, et que les nouvelles mesures prises par le Gouvernement montrent qu'il est manifestement disposé à regarder son passé en face. Les organisations non gouvernementales ayant participé au débat ont quant à elles jugé inacceptable un processus judiciaire purement national qui ne serait pas en mesure de répondre aux griefs du peuple tamoul. Elles ont donc salué la recommandation du Haut-Commissaire pour la création d'un mécanisme de justice capable de répondre aux attentes de la population. Une organisation a dénoncé les mesures d'intimidation dont ont été victimes des Sri Lankais qui se sont efforcés d'informer le Haut-Commissariat des crimes commis dans leur pays.

Mme Flavia Pansieri, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, et M. Ivan Šimonović, Secrétaire général adjoint aux droits de l'homme, ont présenté une série de rapports établis par le Haut-Commissariat portant sur plusieurs thèmes relatifs à des situations particulières: les violations des droits de l'homme contre les musulmans rohingyas et d'autres minorités au Myanmar; le rôle et les réalisations du Haut-Commissariat pour aider le Cambodge à appliquer les droits de l'homme; la situation des droits de l'homme au Yémen; la situation des droits de l'homme au Soudan du Sud; les atrocités commises par Boko Haram; et l'assistance technique fournie par le Haut-Commissariat à l'Iraq à la lumière des violations commises par l'«État islamique d'Iraq et du Levant». Les pays concernés par ces rapports ont fait des déclarations: Myanmar, Cambodge, Yémen, Soudan du Sud, Cameroun, Tchad, Nigéria et Iraq.

Le Luxembourg (pour l'Union européenne), le Maroc (pour Organisation internationale de la Francophonie), l'Arabie saoudite (pour le Groupe arabe), l'Inde (pour un groupe de pays), l'Algérie (pour le Groupe africain) et le Pakistan (pour l'Organisation de la Coopération islamique) ont ensuite pris la parole dans le cadre du débat général sur les rapports Secrétariat et sur l'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme. Le Soudan a exercé le droit de réponse.


Le Conseil doit achever demain matin ce débat général avant d'entamer l'examen de projets de décision et de résolution dont il est saisi à la présente session, qui se termine vendredi, 2 octobre.


Situation des droits de l'homme à Sri Lanka

Présentation de rapports

Le Conseil est saisi du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme intitulé «Favoriser la réconciliation et l'établissement des responsabilités et promouvoir les droits de l'homme à Sri Lanka» (A/HRC/30/61, à paraître en français), ainsi que d'un rapport sur l'enquête du Haut-Commissariat sur Sri Lanka (dont seule une version préliminaire en anglais est disponible).

M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, dans une intervention par vidéoconférence depuis New York, a relevé que le contexte de la présentation du rapport était très différent de celui qui a présidé à sa rédaction. L'élection d'un nouveau président sur une plateforme centrée sur la gouvernance, les droits de l'homme et l'état de droit offre une occasion historique de faire la lumière sur les violations très graves des droits de l'homme qui ont ravagé Sri Lanka. Le gouvernement précédent avait catégoriquement rejeté l'enquête mandatée par le Conseil des droits de l'homme, refusant tout accès et toute coopération, et, de façon plus inquiétante encore, se livrant à une campagne effrénée d'intimidation contre les victimes, témoins et représentants de la société civile qui auraient pu donner des informations au Haut-Commissariat aux droits de l'homme.

Les nouvelles autorités n'ont pas davantage ouvert le pays aux enquêteurs ni coopéré avec l'enquête du Haut-Commissariat. Par contre, elles collaborent de manière plus constructive avec le Haut-Commissariat et ses services au sujet de modalités de reddition de comptes et sur le processus de réconciliation, a précisé M. Zeid. Les autorités ont également invité le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition à faire une visite technique en mars dernier; elles accueilleront aussi le Groupe de travail sur les disparitions forcées en novembre prochain.

En l'état, six ans après la fin de la guerre, de nombreuses personnes déplacées n'ont toujours pas trouvé de solution durable à leur exil interne. L'occupation de terres privées par l'armée pose également des problèmes, même si les autorités ont libéré quelques parcelles ces derniers mois. Le Gouvernement doit encore donner des informations sur le nombre et l'identité des personnes encore détenues en vertu de la loi sur la prévention du terrorisme. En outre, les violences contre les musulmans et les chrétiens n'ont pas complètement cessé.

Depuis janvier 2015, le Président Maithripala Sirisena a mentionné à plusieurs reprises, dans ses discours, la nécessité de parvenir à la réconciliation. Le jour de l'indépendance, le 4 février, le Gouvernement a publié une «déclaration de paix» en trois langues, exprimant sympathie et regrets pour toutes les victimes du conflit qui a duré près de trente ans. Le Gouvernement a aussi ouvert un Bureau de l'unité et de la réconciliation nationales, chargé notamment de la libération des personnes détenues et de la restitution aux civils des terres occupées par l'armée. Quant à la Commission chargée d'enquêter sur les plaintes pour la disparition de personnes, nommée par le précédent gouvernement, elle continue de travailler, malgré des questions quant à sa crédibilité et son efficacité.

Le rapport présente l'enquête réalisée par l'équipe du Haut-Commissariat composée de Mme Silvia Cartwright, Mme Asma Jahangir et M. Martti Ahstisaari. Son objectif était d'identifier des schémas de violations des droits de l'homme et du droit humanitaire non seulement pendant les derniers moments du conflit armé, mais également pendant la période de neuf ans couverte par le mandat. Au terme de l'enquête, il apparaît qu'il existe de bonnes raisons de croire que des violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme ont été commises par toutes les parties au conflit. Si elles étaient soumises à l'appréciation d'un tribunal, nombre des allégations pourraient être qualifiées de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, a estimé le Haut-Commissaire.

Le rapport présente ces allégations en détail. Le nombre extrêmement important de ces allégations, leur gravité, leur récurrence et la similarité de leur modus operandi pointent vers des crimes «systémiques» ne pouvant être traités comme des crimes ordinaires.

Le Haut-Commissaire s'est félicité des engagements pris par le Gouvernement sri-lankais devant le Conseil de diligenter des enquêtes sur ces crimes et d'en établir les responsabilités, en dépit de l'opposition de certains partis politiques et de franges de l'armée et de la société. La triste réalité, a regretté M. Zeid, est que le système de justice pénale de Sri Lanka n'est pas en mesure de mener des enquêtes crédibles et indépendantes sur des allégations de cette ampleur et de cette gravité, ni d'en demander des comptes aux responsables, comme le demande la résolution 25/1 du Conseil.

En premier lieu, Sri Lanka ne dispose pas d'un dispositif fiable de protection des témoins et des victimes dans un contexte où le risque de représailles est très élevé. En deuxième lieu, le cadre juridique interne ne peut traiter de crimes internationaux de cette ampleur. Les crimes commis pendant le conflit sont poursuivis comme des délits définis par le code pénal, le meurtre par exemple. Cette approche ne peut rendre compte de la gravité des crimes ou de leur caractère international, non plus qu'elle ne peut rendre justice au préjudice subi par les victimes. En troisième lieu, le système de justice et le secteur de la sécurité sortent corrompus de plusieurs décennies d'impunité. L'indépendance et l'intégrité d'institutions aussi importantes que le Ministère public et la commission des droits de l'homme sont compromises. Un processus de sélection rigoureuse devrait être créé pour démettre de leurs fonctions les membres des forces de sécurité et les fonctionnaires suspectés d'avoir participé à des violations des droits de l'homme.

C'est pourquoi le Haut-Commissaire recommande la création d'un tribunal spécial chargé de juger les crimes de guerre et contre l'humanité, doté de ses propres moyens d'enquête, de poursuite et de protection des témoins et victimes. Dans un environnement particulièrement polarisé, un mécanisme de cette nature est essentiel pour donner à tous les Sri-Lankais, surtout aux victimes, la confiance dans l'indépendance et l'impartialité du processus. La responsabilisation devant la justice doit s'accompagner de mesures de justice transitionnelle pour assurer réparation aux victimes.

Le Haut-Commissaire a conclu la présentation de son rapport en soulignant que ce moment est riche d'espoir: Sri Lanka peut enfin briser le cycle de l'impunité qui le mine depuis longtemps.

Pays concerné

Sri Lanka a déclaré qu'un changement d'époque était survenu au début de l'année lorsque la population a voté pour le changement à la tête de l'État. Le pays a laissé derrière lui une décennie marquée par une culture de l'impunité au cours de laquelle les droits individuels ont été violés. La population a souhaité vivre dans un pays où la diversité ethnique, culturelle et linguistique serait respectée, célébrée et valorisée. Le Président et le Premier ministre ont placé la réconciliation et le développement en tête de leurs priorités gouvernementales. Des efforts ont été immédiatement entrepris afin de rétablir de bonnes relations avec la communauté internationale dans son ensemble. Tout de suite après les élections législatives du 17 août dernier, le chef de l'État et le Premier ministre se sont efforcés de composer un gouvernement d'unité nationale, une initiative essentielle à la stabilité politique indispensable si l'on entend réussir la réconciliation. C'est cette nouvelle vision que la délégation représente désormais dans sa participation au sein du Conseil. Ses membres ont pu le comprendre lorsqu'ils ont entendu le chef de la diplomatie sri-lankaise, le 14 septembre dernier, exposer le nouveau cours politique à Colombo.

Sri Lanka est déterminée à coopérer avec le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, avec son institution, ainsi qu'avec les systèmes et procédures du Conseil des droits de l'homme et de la communauté internationale, y compris ses partenaires bilatéraux, afin de franchir les étapes nécessaires en faveur de la sauvegarde et de l'application des droits de l'homme de tous ses citoyens. Cela implique de solliciter leur avis et leur assistance. Dans cette optique, Sri Lanka a coopéré avec le principal auteur de la résolution la concernant, ainsi qu'avec d'autres membres du Conseil, afin de parvenir à un consensus.

Débat

Se présentant comme un pays qui a connu une période de démocratisation fort longue et troublée, la République de Corée s'est dite consciente des difficultés d'assurer la reddition des comptes, notamment du fait que cela implique l'engagement dans un processus d'apaisement et de réconciliation. Le Gouvernement de Sri Lanka s'est engagé sur la voie de la paix, de la démocratie et de la prospérité; il incombe aujourd'hui à la communauté internationale d'être des partenaires fiables et sérieux à ses côtés. Le Monténégro a, lui, rappelé qu'il avait connu lui-même des conflits interethniques, ce qui le rend conscient que la transition requiert du temps et une volonté politique pour renforcer l'état de droit et la reddition des comptes. Il estime que le rapport propose des directives claires à la communauté internationale et au Gouvernement de Sri Lanka pour permettre la réconciliation et une stabilité sur le long terme, et que le pays a aujourd'hui une opportunité historique de remédier aux graves violations des droits de l'homme et abus commis pendant le conflit. Fidji a dit savoir à quel point il est difficile d'œuvrer pour le développement quand un pays est forcé de contenir l'instabilité politique et de préserver l'état de droit quand certains distillent la méfiance interethnique. Elle apprécie la réaction positive du Gouvernement de Sri Lanka au rapport du Haut-Commissaire, de même que les nombreuses mesures positives prises par les autorités sri-lankaises dans le domaine de l'État de droit.

La Fédération de Russie estime que les nouvelles mesures prises par Sri Lanka lui permettront de progresser, le pays étant manifestement disposé à regarder son passé en face. Elle estime que c'est à Sri Lanka de décider de sa voie et de l'assistance qu'elle souhaite recevoir.

Tout en reconnaissant que la réconciliation est un processus, l'Irlande estime que cela ne signifie pas que les progrès concrets peuvent être reportés indéfiniment et que l'engagement et l'assistance extérieure n'ont aucun rôle à y jouer. Elle se félicite néanmoins des engagements pris par Sri Lanka en vue de la réconciliation et de reddition de comptes qui devront faire l'objet d'un suivi méticuleux dans le cadre des futurs travaux du Conseil. La Sierra Leone a félicité le gouvernement sri-lankais pour sa volonté affichée de s'engager dans le dialogue et la coopération avec les divers mécanismes internationaux de droits de l'homme, tout en soulignant que les violations des droits de l'homme au cours d'un conflit ne devraient jamais demeurer impunies. De même, l'ex-République yougoslave de Macédoine a regretté que les enquêtes menées au niveau national aient manqué d'indépendance. Elle est toutefois encouragée par l'approche adoptée par le nouveau Gouvernement en vue d'assurer un processus impartial de justice et de reddition des comptes. La pleine application de la loi de protection des témoins est, à cet égard, fondamentale et le Gouvernement de Sri Lanka devrait se montrer ouvert à l'idée d'impliquer des experts internationaux dans ce processus.

L'Union européenne a constaté que le rapport faisait état d'événements terribles, qui montrent que des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité ont vraisemblablement été commis par les deux parties au conflit. Elle espère que ce rapport apportera une contribution majeure aux efforts déployés pour établir la vérité et rendre justice à Sri Lanka. Il est temps maintenant de mettre en œuvre les engagements pris par Sri Lanka à cette session, à commencer par lancer une vaste consultation nationale, avec la participation de tous et en particulier des victimes, pour concevoir un processus de justice intégral. Le Royaume-Uni salue les conclusions et les recommandations du rapport, ainsi que les engagements nombreux formulés par le chef de la diplomatie sri-lankaise devant le Conseil et l'attitude constructive de la délégation sri-lankaise en faveur du projet de résolution. Ce texte n'est que le début d'un processus qui exigera l'engagement des parties concernées si l'on entend parvenir à une réconciliation significative et la paix et la stabilité à long terme.

La Norvège salue les efforts déployés par le nouveau Gouvernement de Sri Lanka pour mettre en place des mécanismes crédibles et indépendants pour établir la vérité, rendre justice, apporter réparations et garantir que de tels actes ne se reproduiront plus. Le Danemark estime avec le Haut-Commissaire que Sri Lanka a devant elle une opportunité historique lui permettant de traiter des violations des droits de l'homme commises envers la population en établissant les fondations d'une conciliation et d'une paix à long terme. La Suisse est en revanche extrêmement préoccupée par les conclusions du rapport qui fournissent des motifs raisonnables de croire que des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre ont été commis par les deux parties au conflit à Sri Lanka. Elle appelle le pays à modifier son code pénal afin d'y intégrer pleinement les infractions de crimes de guerre, crimes contre l'humanité, génocide et disparitions forcées avec un effet rétroactif et tout en garantissant leur imprescriptibilité.

La France estime essentiel que toute la lumière soit faite sur les responsabilités des crimes contre l'humanité dépeints dans le rapport et que justice soit rendue, tant pour les familles des victimes qui ont courageusement contribué à ce rapport, que pour faciliter le processus de réconciliation à Sri Lanka et tourner définitivement la page de la guerre civile. Elle estime que le projet de résolution porte un réel espoir de changement et encourage Sri Lanka à pleinement la mettre en œuvre. L'Estonie reste préoccupée par les violations à l'encontre des femmes et des enfants et espère que la situation s'améliorera. Elle estime que la composante internationale proposée pour les enquêtes sur les violations des droits de l'homme permettrait de garantir un mécanisme efficace et crédible pour la reddition des comptes. Elle invite en outre Sri Lanka à ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

La République tchèque s'est félicitée des signaux prometteurs lancées par le nouveau Gouvernement et espère que ces engagements continueront d'être traduits en action dans le cadre de la coopération du pays avec le Haut-Commissariat. Les progrès de Sri Lanka en vue de l'établissement d'une société pleinement respectueuse des droits de l'homme dépendront du succès de la réconciliation et de la reddition des comptes. La Belgique a souligné que les constatations de la Commission d'enquête ne pouvaient pas laisser indifférent: les exécutions extrajudiciaires, les violences sexuelles, le recrutement d'enfants et les enlèvements d'adultes en vue de les faire combattre ne doivent pas rester impunis. Il est important d'agir rapidement si l'on veut que le processus de justice réponde de façon adéquate à la gravité des préjudices causés aux victimes des deux parties au conflit. La Belgique relève en outre l'importance de renforcer les capacités de la police scientifique afin d'améliorer la qualité des preuves récoltées dans le cadre du processus judiciaire.

Le Japon s'est félicité de l'établissement de plusieurs mécanismes internes visant à rétablir la vérité et la justice. Il se réjouit aussi de l'annonce faite par le Ministre Samaraweera s'agissant de l'ouverture du Gouvernement à une assistance technique de la communauté internationale et à un appui de la part des experts pour mettre en œuvre ces mécanismes. Le Japon prévoit d'envoyer à Sri Lanka le mois prochain un Procureur renommé et ancien juge international des chambres extraordinaires des tribunaux cambodgiens.

Pour les États-Unis, en dépit des premiers efforts accomplis, il reste beaucoup à faire. Toutefois il est clair que l'on assiste à un grand changement d'attitude de la part de Sri Lanka, qui va dans la bonne direction. Le Canada a encouragé Sri Lanka à continuer sur la voie qui l'amènera à une paix durable et au développement économique dans l'intérêt de tous les individus et toutes les communautés du pays. Il juge important que le pays honore son engagement d'établir un mécanisme crédible pour la reddition des comptes s'agissant des crimes sérieux perpétrés par toutes les parties au conflit.
Pour la Nouvelle-Zélande, 2015 a été une année importante pour Sri Lanka, du fait notamment des élections parlementaires et présidentielles, qui ont figuré parmi les plus libres de l'histoire du pays. Les engagements pris par Sri Lanka représentent des pas importants vers la réconciliation et l'autonomie politique. L'Australie s'est félicitée de la réaction constructive de Sri Lanka face au rapport et de son engagement à améliorer la situation des droits de l'homme et à œuvrer pour la réconciliation et la reddition de comptes. Son attitude témoigne d'une réelle détermination à soigner les blessures du passé.

La Thaïlande a appelé Sri Lanka à réformer sa législation afin que le pays puisse effectivement mettre en œuvre ses propres engagements, et l'a exhorté à poursuivre son engagement auprès des divers mécanismes du Conseil. Le Myanmar a pris note avec satisfaction de ce que le Haut-Commissaire lui-même faisait état des progrès réalisés par Sri Lanka dans le domaine des droits de l'homme et de la réconciliation. Il recommande à ce pays de poursuivre sa collaboration avec les institutions des droits de l'homme. Le Viet Nam a demandé aux Nations Unies et à la communauté internationale de poursuivre sur la voie du dialogue constructif avec Sri Lanka et de renoncer définitivement à la politisation. Les événements récents dans ce pays sont dignes d'éloge et pourront améliorer la situation sur le terrain.

L'Albanie accorde sa confiance au Gouvernement de Sri Lanka et l'appelle à entreprendre des réformes radicales du système judiciaire, qui aujourd'hui n'est pas encore en mesure de rendre justice à ceux qui la réclament. Pour l'Allemagne les dernières élections présidentielles à Sri Lanka sont un signe encourageant pour les citoyens. La société sri-lankaise doit lancer un vaste programme de réconciliation nationale accompagné d'un processus de justice. L'Allemagne juge très équilibré le projet de résolution qui sera présenté. Le Pakistan s'est félicité de voir que l'approche qu'il recommande depuis toujours, à savoir que l'adoption d'une résolution concernant un pays exige la présentation requiert l'approbation de celui-ci, ait enfin été acceptée par les auteurs du projet de résolution sur Sri Lanka. La République islamique d'Iran a estimé que l'assistance technique et le renforcement des capacités pouvaient jouer un rôle essentiel dans le renforcement des droits de l'homme. Il faut tenir compte des caractéristiques spécifiques des régions et pays ciblés et l'assistance du Haut-Commissariat doit être menée avec l'assentiment du pays concerné.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a souligné que les enfants et ceux qui étaient enfants durant la guerre civile devaient pouvoir faire entendre leur voix dans tous les processus proposés par le rapport. Les familles des enfants qui ont été enrôlés, tués, mutilés doivent quant à elles être soutenues dans tous ces processus en tant que groupes d'intérêt particulier.

Pour les organisations non gouvernementales, Human Rights Watch a salué le tournant que marque le rapport du Haut-Commissariat pour la justice en faveur de la population de Sri Lanka. Le Gouvernement de ce pays doit maintenant appliquer les recommandations du rapport de façon sérieuse et transparente. Les autorités sri-lankaises ont demandé qu'on leur fasse confiance: elles doivent profiter de cette occasion pour engager une réforme efficace du système de justice, notamment. Le Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement a condamné les crimes systématiques et éhontés décrits par le rapport, avant de noter les engagements pris par le Gouvernement de Sri Lanka devant le Conseil en matière de justice et de réparation, et sa reconnaissance de ses lacunes en matière judiciaire.
Le Mouvement international contre toutes les formes de discrimination a plaidé pour que Sri Lanka tourne le dos à l'autoritarisme et remédie de manière constructive aux carences dans son système de justice. L'ONG appelle le gouvernement à appliquer toutes les recommandations du rapport.

United Nations Watch s'est dit pour sa part déçu du refus du Gouvernement sri-lankais de collaborer avec l'enquête du Haut-Commissariat. Les autorités ont aussi sapé le travail de l'équipe d'enquête. L'organisation condamne la répression des Tamouls et d'autres membres de groupes minoritaires à Sri Lanka et souhaite que la collaboration annoncée des autorités avec le Conseil des droits de l'homme porte ses fruits. CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens a dénoncé les mesures d'intimidation dont été victimes les Sri Lankais qui se sont efforcés d'informer le Conseil des crimes commis dans leur pays.

Pasumai Thaayagam Foundation a estimé que Sri Lanka ne disposait pas de l'autorité morale pour juger les crimes commis pendant la guerre. Libération a salué la recommandation du rapport du Haut-Commissaire de création d'un mécanisme de justice capable de répondre aux attentes du peuple sri-lankais. Mais l'ONG se demande, avec d'autres organisations, dans quelle mesure le mécanisme proposé par le projet de résolution suffira à cette mission.

Plusieurs ont ainsi estimé que le processus judiciaire devait être supervisé par la communauté internationale, Lawyers' Rights Watch Canada a constaté que le rapport reconnaissait enfin les graves violations des droits commises et s'est félicité des recommandations qui y sont formulées. Il a appelé le Conseil à adopter une résolution les reprenant à son compte. Mais l'ONG juge inacceptable un processus judiciaire purement national, qui ne serait pas, selon elle, en mesure de répondre aux griefs du peuple tamoul. L'Alliance Creative Community Project a estimé fondamental de tenir compte des conclusions du rapport, qui souligne l'incapacité de la justice sri-lankaise et de forces de sécurité de mener des enquêtes impartiales. Ces institutions sont corrompues, d'où la nécessité de disposer d'une supervision internationale. L'Association burkinabé pour la survie de l'enfance a souligné que personne ne pouvait être le juge de sa propre cause. Une enquête pénale doit être menée au niveau international car les 18 commissions qui se sont succédé à Colombo depuis un demi-siècle n'ont jamais établi la vérité. Sri Lanka ne dispose pas des capacités pour enquêter sur ses propres crimes. L'Association mauritanienne pour la promotion du droit, qui était représentée par une femme tamoule dont le mari a été enlevé par l'armée, a souligné qu'un État impliqué dans un génocide n'avait pas la légitimité pour mener une enquête. Le système d'État unitaire de l'île refuse aux Tamouls tout droit à l'autodétermination. L'ONG exige une enquête internationale indépendante. Le Centre indépendant de recherches et d'initiatives pour le dialogue a déclaré qu'un tribunal chargé de juger les criminels de guerre n'était pas adapté pour rendre la justice, toutes les parties prenantes à Colombo étant impliquées, y compris le chef de l'État actuel. C'est la raison pour laquelle seul un tribunal international peut être chargé de rendre la justice.

Certains intervenants ont souhaité un éventuel renvoi devant la Cour pénale internationale. La League of Persons with Disabilities a souligné que le peuple tamoul avait énormément souffert au cours du dernier demi-siècle. Le peuple tamoul est déçu que le rapport ne fasse pas explicitement mention de la Cour pénale internationale ou d'un mécanisme international. Le Haut-Commissariat devrait ouvrir une antenne dans le nord de Sri Lanka et les Nations Unies doivent demander à Colombo d'accepter une solution politique permanente. Si aucun progrès n'est accompli, le Haut-Commissariat doit renvoyer Sri Lanka devant la Cour pénale internationale. Pour la Commission internationale des juristes, la Cour pénale internationale est l'instance compétente pour établir les responsabilités individuelles des crimes commis à Sri Lanka, compte tenu du manque actuel de compétence des tribunaux sri-lankais

Le Minority Rights Group s'est dit encouragé par l'attention accordée au sort des femmes, des membres des minorités et des populations civiles victimes de la violence des forces armées. L'organisation a salué la recommandation de création d'un tribunal spécialisé dans la poursuite des crimes commis pendant la guerre. La World Evangelical Alliance, qui a dénoncé les persécutions subies par les évangélistes, a affirmé que les victimes de telles atteintes à la liberté religieuse, se voyaient souvent dénié toute possibilité de recours en justice, les tribunaux incitant des victimes sous pression et les avocats à conclure des accords à l'amiable. Enfin, Amnesty International, qui était représenté par le père d'un jeune homme assassiné il y a neuf ans sur une plage de Sri Lanka, a remercié le Conseil pour le soutien apporté au rapport concernant son pays. Étreint par l'émotion et incapable de poursuive sa déclaration, il a appelé à tenir les promesses faites aux familles des personnes disparues. Enfin, L'Association des jeunes pour l'agriculture du Mali a dénoncé le fait que le conflit n'était toujours pas réglé, la seule solution étant de s'attaquer aux racines du problème, notamment au problème de la spoliation des terres tamoules.

Conclusion

MME FLAVIA PANSIERI, Haut-Commissaire adjointe des Nations Unies aux droits de l'homme, a insisté sur la contribution essentielle des témoins dans l'élaboration du rapport sur Sri Lanka, parfois dans un contexte très difficile. Elle a noté le changement en cours dans le pays, ajoutant qu'avec l'assistance de la communauté internationale, il devrait enfin être possible d'apporter des réponses à des questions depuis longtemps posées. Le Haut-Commissariat est disposé à fournir une assistance technique pour un certain nombre de tâches clés auxquelles s'est engagé le gouvernement sri-lankais. Des réformes législatives doivent être menées, notamment s'agissant de la lutte contre le terrorisme, tandis que le secteur judiciaire devra lui aussi être remanié. Mme Pansieri a aussi noté que Colombo s'était dit disposé à recevoir les procédures spéciales et a appelé le gouvernement à lancer une invitation ouverte à leur intention.

Rapports du Haut-Commissariat et du Secrétaire général sur des situations spécifiques

Présentation des rapports

MME PANSIERI, Haut-Commissaire adjointe, a d'abord présenté une mise à jour sur la situation des droits de l'homme des musulmans rohingyas (A/HRC/30/CRP.3, version préliminaire en anglais), soulignant qu'après 50 années de régime militaire et les conflits armés, le Gouvernement avait entrepris des réformes radicales et potentiellement transformatrices, accéléré le développement économique, et assoupli les restrictions sur les droits civils et politiques, mais ces avancées bienvenues sur un certain nombre de questions importantes relatives aux droits de l'homme n'ont pas été accompagnées de progrès pour lutter contre la discrimination institutionnalisée contre les Rohingyas et d'autres minorités. Le rapport pointe en particulier des problèmes dans l'acquisition de la nationalité du Myanmar par les résidents rohingyas et leur exclusion de la vie politique du pays. Une action concertée est nécessaire de toute urgence pour résoudre les problèmes de discrimination et de politiques d'exclusion systémique et d'assurer la reddition de comptes pour les violations des droits de l'homme et de violences au Myanmar, notamment contre les Rohingyas et d'autres minorités ethniques. L'absence d'enquêtes et de poursuites pour les crimes commis contre les Rohingyas et d'autres minorités donne un signal clair de l'impunité et encourage la répétition. L'obligation de l'État d'établir l'état de droit et d'assurer la reddition de comptes pour les violations des droits de l'homme et d'abus devrait se situer au centre des efforts visant à développer une société pacifique et harmonieuse, où les droits des minorités sont reconnus et respectés. Tant que les questions de discrimination ne seront pas pleinement prises en compte au Myanmar, en particulier la discrimination institutionnalisée contre les Rohingyas, le déplacement forcé des minorités du Myanmar se poursuivra.

Mme Pansieri a également présenté un rapport sur le Cambodge s'agissant du rôle joué et le travail accompli par le Haut-Commissariat pour aider le Gouvernement et le peuple à promouvoir et protéger les droits de l'homme (A/HRC/30/30, à paraître en français). Il décrit les activités du Haut-Commissariat dans ce pays du 1er juin 2014 au 30 juin 2015 dans les domaines du renforcement de l'état de droit, de la réforme des prisons, de la protection des droits économiques, sociaux et culturels et des libertés fondamentales.

Un autre rapport du Haut-Commissariat concernant la situation des droits de l'homme au Yémen (A/HRC/30/31, à paraître en français) fait une évaluation actualisée de la situation générale des droits de l'homme au Yémen à partir du 1er Juillet 2014 au 30 Juin 2015, dans le contexte de la détérioration de la situation sécuritaire depuis septembre 2014. Le rapport décrit à la fois les violations de droit international des droits de l'homme alléguées et les violations présumées du droit international humanitaire par les parties au conflit. Le Haut-Commissaire est préoccupé par l'escalade constante de la violence au Yémen et les allégations liées de violations du droit international humanitaire, dont certaines peuvent constituer des crimes de guerre et les violations et les abus du droit international dans le domaine des droits de l'homme. Le Haut-Commissaire recommande à toutes les parties au conflit de respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, le cas échéant, y compris en prenant toutes précautions pour éviter et minimiser les pertes civiles; de respecter les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution dans le cadre des hostilités; de mettre fin au recrutement et à l'utilisation des enfants à des fins militaires; d'assurer l'accès immédiat, sûr et sans entrave de l'aide humanitaire. Le Haut-Commissaire recommande que les forces de la coalition et du Gouvernement du Yémen mènent des enquêtes sur les allégations de violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Le Haut-Commissaire recommande que le gouvernement du Yémen, dans l'attente l'abolition de la peine de mort, d'établir un moratoire sur son application. Il demande à la communauté internationale d'encourager la mise en place d'une organisation internationale indépendante et d'un mécanisme impartial pour enquêter sur les violations présumées du droit international dans le domaine des droits de l'homme et du droit international humanitaire et d'assurer l'intensification de l'aide humanitaire au Yémen. Chaque jour, les pertes en vies humaines s'accumulent: Plus de 2355 civils ont été tués et plus de 4862 ont été blessés.

M. IVAN Šimonović, Secrétaire général adjoint aux droits de l'homme, a présenté un premier rapport (à paraître) sur la mission réalisée par le Haut-Commissariat au Soudan du Sud pour y évaluer la situation des droits de l'homme. L'équipe d'enquête s'est rendue sur place en septembre dernier. Elle a constaté que la volatilité de la situation s'accompagne de nombreuses violations des droits de l'homme et d'une détérioration de la situation humanitaire. La crise s'étend aux autres États. Ces derniers mois ont été marqués par des limitations à la liberté d'expression, tandis que les auteurs des violations des droits de l'homme bénéficient de l'impunité.

Le Conseil avait prié le Haut-Commissariat de faire rapport sur les atrocités commises par le groupe terroriste Boko Haram dans les États touchés par de tels actes (A/HRC/30/67, à paraître - une version préliminaire est disponible uniquement en anglais). Le rapport recueille des informations sur l'homicide volontaire et l'enlèvement de civils et le ciblage de cibles civiles protégées, l'utilisation des enfants dans les hostilités, le viol et d'autres formes de violence sexuelle et de torture ou de mauvais traitements par Boko Haram. Le ciblage systématique apparent de civils et la nature généralisée des violations commises dans les territoires où Boko Haram est actif constituent des crimes contre l'humanité et crimes de guerre si elles sont commises en relation avec un conflit armé. Ces allégations doivent toutes rapidement faire l'objet d'enquêtes exhaustives. Le Haut-Commissariat a aussi reçu des informations préliminaires sur des allégations de violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises par certaines forces de gouvernement pendant les opérations de lutte contre Boko Haram, y compris les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées, d'arrestations et de détentions arbitraires et de mauvais traitements. Le Haut-Commissariat fait plusieurs recommandations à cet égard.

M. Šimonović a aussi présenté le rapport du Haut-Commissaire sur l'assistance technique et le renforcement des capacités en faveur des droits de l'homme en Iraq à la lumière des violations commises par l'«État islamique d'Iraq et du Levant» (EIIL) et les groupes terroristes associés (A/HRC/30/66). La Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq a estimé, au 27 septembre, à 5902 le nombre de civils tués en 2015. La brutalité de l'État soi-disant islamique dans le Levant s'est poursuivie sans relâche. Les communautés ethniques et religieuses prises pour cibles ont continué à souffrir d'une série de violations aux mains de l'EIIL, en particulier les femmes et les enfants. Assurer la responsabilité pour les crimes et les violations et rendre justice aux victimes sont indispensables pour rétablir la confiance entre les communautés. Il faut espérer que les futures réformes dans le pays seront été menées d'une manière inclusive, transparente et consultative.

Pays concernés

Le Myanmar estime que la résolution 29/21 du Conseil des droits de l'homme qui demande au Haut-Commissaire de faire une mise à jour orale lors de la présente session, va à l'encontre des principes d'universalité, d'objectivité et de non-sélectivité. Cette résolution n'a absolument rien à voir avec la promotion et la protection des droits de l'homme; son objectif et intention véritables sont d'attirer l'attention sur une communauté et une foi particulières. Le Myanmar ne se sent d'aucune manière lié par cette résolution. Revenant sur les propos du Haut-Commissariat, la délégation précise que le terme «Rohingya» n'a jamais existé dans son histoire ethnique. Ce terme est lié à un mouvement séparatiste et a été inventé par un groupe de gens qui ont des intentions cachées.

En ce qui concerne les boat people, le Myanmar souligne que la majorité des personnes se trouvant sur ces bateaux sont des victimes de la traite. La marine nationale a sauvé de nombreux bateaux et fourni soins et assistance à leurs occupants. Il apparaît que ces personnes ne sont pour la majorité pas originaires du Myanmar. Ce n'est un secret pour personne que la plupart des occupants de ces bateaux se prétendent rohingya dans le seul but d'obtenir une protection internationale. Ils recourent à ces tactiques, qui sont suggérées par les passeurs. La cause du problème des réfugiés dans la région est la traite des êtres humains. S'agissant de la question de la citoyenneté, tout citoyen a le droit de voter et de se présenter comme candidat. Le Myanmar tient à préciser que personne n'est rejeté sur des bases religieuses ou raciales. En outre, il n'y a aucune restriction sur les conversions religieuses; et la loi sur la monogamie est claire: un homme, une femme.

Le Cambodge a affirmé qu'il avait accompli des progrès remarquables en matière de promotion et la protection des droits de l'homme, en étroite coopération et partenariat avec le Haut-Commissariat. Il a redit son engagement ferme en faveur de la réforme de la justice, afin d'assurer l'indépendance des magistrats. Dans cette perspective, trois textes de loi ont été adoptés l'an dernier régissant le statut des juges et des procureurs, l'organisation et le fonctionnement des tribunaux et enfin l'organisation et le fonctionnement du Conseil suprême de la magistrature.

Le Cambodge se félicite de la poursuite de la coopération entre le Haut-Commissariat et le Département général des prisons dépendant du Ministère de l'intérieur. Le gouvernement a par ailleurs accompli des efforts importants pour établir le droit de propriété et à la terre en s'inspirant des instruments internationaux. Le Cambodge a souligné que l'éviction des gens du lieu où ils vivent ne constituait en aucun cas la politique gouvernementale en la matière. Enfin, la loi réglementant les associations et les organisations non gouvernementales adoptée cette année ne vise en rien à limiter leur liberté mais bien plutôt à élargir leur marge de manœuvre et à les légitimer dans le cadre d'un fonctionnement plus transparent.

Le Yémen a dit avoir pris connaissance du rapport du Haut-Commissariat. Il a regretté que le groupe d'enquête n'ait pas été en mesure, pour des questions de moyens, d'examiner toutes les violations des droits de l'homme commises par les milices houties, dont le plus grand crime est de détruire le tissu social et l'âme du pays par des discours haineux et sectaires. La communauté internationale doit intervenir pour aider le Gouvernement à rétablir la sécurité.

Le Gouvernement du Yémen mène actuellement des enquêtes au sujet des victimes civiles imputables aux bombardements aériens. Il luttera sans faillir contre l'impunité et pour l'établissement des responsabilités. Toujours disposé à coopérer de manière constructive avec le Conseil des droits de l'homme, le Gouvernement yéménite sollicite la coopération internationale pour l'aider à mettre fin au conflit.

Le Soudan du Sud a précisé avoir facilité la visite de l'équipe pilote en septembre dernier pour fournir au Conseil cette mise à jour orale. La délégation rappelle que la responsabilité première de la protection des civils et de la promotion des droits de l'homme incombe aux États. Jusqu'ici le Soudan du Sud a mis en place des mécanismes pour assurer la réconciliation, l'apaisement et la reddition des comptes, mécanismes parmi lesquels figure la «Commission d'enquête du Sud». Le cessez-le-feu et des arrangements de sécurité sont en place, la situation sécuritaire est revenue à la normale dans le pays et l'armée nationale a commencé à se retirer de Juba. La communauté internationale est invitée à apporter son assistance technique pour la mise en œuvre de l'accord de paix.

En tant que pays concernés par le rapport sur les actes commis par Boko Haram, le Cameroun a indiqué avoir enregistré 11 attentats suicides dans la région de l'Extrême Nord; le bilan de ces atrocités est de 115 morts et près de 400 blessés. Le Gouvernement fait tout ce qu'il peut pour protéger ses populations et contenir, voire circonscrire, à défaut de les éradiquer, les attaques du Groupe Boko Haram, qui lui impose une guerre asymétrique.

Le Cameroun regrette profondément les allégations qui sont faites par certaines organisations non gouvernementales; il invite à la prudence et appelle à se garder de faire l'écho des accusations souvent exagérées et manquant de fondements. La question à laquelle le Conseil se doit de réfléchir est celle de savoir quel est l'intérêt du Cameroun à mener des attaques indiscriminées, y compris contre ses propres populations déjà en butte aux affres de la guerre. La guerre contre Boko Haram se mène dans le strict respect des obligations et des engagements du Cameroun dans le domaine des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Il ne faut pas mettre sur un pied d'égalité une nation civilisée et une horde de barbares. Le Cameroun a tenu à assurer qu'il n'y a pas de condition spécifique régissant la détention des prisonniers de Boko Haram dans le pays; ceux-ci sont logés à la même enseigne que tous les autres prisonniers. La surpopulation carcérale ne doit pas être comprise comme une politique voulue par le Gouvernement; elle s'explique plutôt comme le mauvais côté d'une volonté d'humanisme qui commande d'emprisonner les détenus dans les lieux de détention proches de leurs familles. La délégation en profite pour lancer un appel aux partenaires de bonne volonté pour aider le Cameroun à informatiser et mettre en réseau les prisons camerounaises en vue d'un meilleur suivi des condamnés et des prévenus.

Le Tchad souligne que la montée en puissance du groupe terroriste et ses attaques meurtrières perpétrées contre les populations innocentes, en particulier les femmes et les enfants, dans la région du Lac Tchad ont entraîné une vague supplémentaire de réfugiés venus du Nigéria et une quasi-paralysie de cette région vitale en matières agricoles et en échanges commerciaux entre le Tchad, le Nigéria, le Niger et le Cameroun. L'impact de la nébuleuse Boko Haram engendre des conséquences certaines sur la situation socio-économique du Tchad; l'insécurité réduit considérablement, quand elle ne supprime simplement, les exportations et les importations. En plus des effets sur les recettes, le phénomène Boko Haram a engendré des charges supplémentaires sur le budget de l'État; en effet, le Tchad assure seul les charges liées au déploiement de ses troupes dans les pays voisins concernés: il est obligé de puiser dans le budget des programmes prioritaires. Les activités telles que la pêche, l'agriculture, le commerce et le transport dans la zone du Lac Tchad ont ralenti, voire cessé. Cette situation engendre des crises alimentaires et socio-sanitaires dans la région.

Si le phénomène Boko Haram persiste, les efforts déployés actuellement par la communauté internationale pour la sauvegarde du Lac Tchad seront vains. Enfin, la délégation a expliqué que si une dizaine de membres du groupe terroriste Boko Haram ont été jugés et condamnés, c'est parce qu'ils ont reconnu les faits qui leur étaient reprochés et affirmé que, même libérés, ils commettraient des actes similaires. Il précise que la mesure prise est exceptionnelle car les actes commis ont créé une psychose à la population.

Le Nigéria a souligné qu'un facteur positif était apparu avec le fait que les activités haineuses de Boko Haram avaient continué de diminuer du fait des efforts renouvelés des forces militaires combinés du Nigéria, du Cameroun, du Tchad, du Niger et du Bénin. Ainsi que l'a déclaré le Président Muhammadu Buhari à la tribune de l'Assemblée générale des Nations Unies, «il s'agit d'une guerre des valeurs, entre le progrès et le chaos, entre la démocratie et l'état de droit». Le chef de l'État nigérian a aussi affirmé que «Boko Haram était aussi éloigné de l'islam que l'on puisse l'imaginer».

Le rapport confirme la gravité des atrocités commises, par l'utilisation en particulier d'enfants et de femmes comme kamikazes. Le rapport souligne aussi que le Nigéria, à l'instar des autres États affectés, a dû prendre des mesures contre-insurrectionnelles. Le Nigéria assure que cette action est respectueuse des obligations du pays en matière de droit international et des droits de l'homme reconnus sur le plan interne, dans les meilleurs intérêts de la population. L'armée nigériane fait preuve d'un grand professionnalisme et de discipline; elle n'a jamais eu recours à des enfants soldats et elle ne le fera jamais. La campagne militaire ne constitue qu'un volet du combat. Des solutions à long terme ont commencé à être mises en œuvre en faveur notamment de la «déradicalisation» et de la «réorientation psychosociale». Le Nigéria appelle le Conseil à reconnaître la nécessité de mobiliser une assistance matérielle de manière urgente: «Nos pays ont besoin d'un soutien matériel pour donner un coup d'arrêt à une dangereuse insurrection terroriste qui fait tache d'huile». Le Nigéria a assuré en conclusion qu'il conservait la capacité souveraine d'enquêter et de poursuivre tout cas identifié et vérifié d'allégation de violation des droits de l'homme. Il a appelé à la fourniture d'un soutien humanitaire et d'une assistance technique aux pays affectés par Boko Haram.

L'Iraq a remercié le Haut-Commissariat de son rapport, et dit avoir facilité les travaux de sa mission d'enquête. Cette dernière a pu constater les atteintes aux droits fondamentaux des civils commis par Daech, une organisation terroriste qui ne respecte aucun des principes du droit international. L'Iraq précise que les milices sunnites engagées actuellement dans le combat contre Daech se battent pour leur liberté. Les autorités ont déjà organisé le retour de plusieurs milliers de personnes déplacées. Le rapport décrit des crimes horribles commis par Daech, attestés par lui-même, dont certains constituent des crimes contre l'humanité. L'Iraq est prêt à mettre en œuvre toutes les garanties judiciaires dans sa lutte contre Daech. Il demande une assistance technique renforcée pour l'aider à respecter ses engagements internationaux.

Débat général sur l'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme et sur les rapports du Secrétariat sur des situations spécifiques

États membres et groupes de pays

Le Luxembourg, au nom de l'Union européenne, a fait part de sa préoccupation devant le nombre croissant de victimes et la poursuite de graves violations des droits de l'homme dans l'est de l'Ukraine et en Crimée illégalement occupée par la Fédération de Russie. L'Union européenne est préoccupée en outre par la situation sécuritaire, humanitaire et des droits de l'homme en Libye. Elle s'inquiète des heurts meurtriers survenus à Bangui les 26 et 27 septembre dernier et incite à la vigilance. L'Union européenne est très préoccupée également par le rapport du Haut-Commissariat sur l'enquête à Sri Lanka, estimant que les révélations de violations flagrantes des droits de l'homme appellent toutes les parties à poursuivre leurs efforts de clarification dont le succès est indispensable pour un authentique processus de réconciliation.

Le Maroc, au nom de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a salué les progrès accomplis par la République démocratique du Congo, en particulier la mise en œuvre du nouveau plan d'action des forces armées contre la violence sexuelle et la création de la nouvelle Commission nationale des droits de l'homme. À l'approche des futures échéances électorales provinciales de 2015 et présidentielles de 2016, le groupe exhorte les autorités de la République démocratique du Congo à veiller à ce que les libertés fondamentales de tous les citoyens soient respectées. Il les encourage à renforcer leur collaboration avec le Bureau conjoint des Nations Unies, la MONUSCO et tous les autres partenaires, dont l'OIF. À la République centrafricaine, le groupe réitère ses encouragements et son plein soutien pour les efforts déployés en vue des prochaines élections présidentielles et législatives. La communauté internationale est invitée à poursuivre son appui afin de permettre l'organisation desdites élections selon le calendrier prévu. Enfin, le Groupe demande que des mesures soient prises pour punir les auteurs d'abus sexuels commis par des forces internationales dans ce pays.

L'Arabie saoudite, au nom du Groupe arabe, rappelle que le Yémen a fait face à plusieurs crises violentes. Les groupes armés y ont commis des graves violations, ont détruit des maisons et empêché que l'aide alimentaire et médicale soit acheminée à la population. Les conditions graves et tragiques dans lesquelles se trouve ce pays nécessitent une assistance de la part de la communauté internationale; il faut soutenir le retour à la sécurité et la stabilité, ainsi que la transition démocratique et l'état de droit. Les pays arabes, en particulier, ne doivent n'épargner aucun effort pour assister le Yémen. Enfin, la délégation fait remarquer que d'une manière générale, les mandats par pays du Conseil, s'ils veulent avoir les effets escomptés, doivent être établis avec le consentement et la coopération du pays concerné.

L'Inde au nom d'un groupe de vingt-cinq États, a déclaré que l'on pouvait constater ces dernières années une augmentation notable du nombre de résolutions adoptées en vertu de l'assistance technique et du renforcement des capacités, celui-ci ayant doublé entre 2008 et 2011, passant en moyenne de cinq à dix textes. Certaines des résolutions adoptées énumèrent des violations, inspirées qu'elles sont par l'affirmation de condamnations et alors que quelques-unes seulement touchent réellement à l'assistance technique. Il est préoccupant de constater que soient souvent ignorés les principes cardinaux relatifs à l'assistance technique aux États à la demande et avec le consentement de l'État concerné.

L'Algérie a déclaré, au nom du Groupe africain, que les efforts régionaux et les activités combinées de la Force opérationnelle multinationale interarmées avaient permis d'enregistrer des résultats pour réduire la capacité de nuisance du groupe terroriste Boko Haram. Mais, en dépit de ces réalisations, Boko Haram continue de terroriser la population civile innocente, y compris en utilisant des jeunes femmes kamikazes qui ont provoqué de nombreux morts dans le nord-est du Nigéria. Le Groupe africain lance, une fois de plus, un appel à l'ensemble des organisations humanitaires pour qu'elles accélèrent l'envoi de matériel de secours, pour aider les personnes déplacées et les réfugiés dont la situation est fort critique. Le Groupe africain demande également que l'assistance technique nécessaire soit fournie à la Force opérationnelle multinationale interarmées pour lui permettre de poursuivre efficacement la guerre contre les groupes terroristes.

Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la Coopération islamique (OCI), a réaffirmé que la responsabilité de la promotion et la protection des droits de l'homme incombait en premier lieu aux États. L'OCI demande donc au Gouvernement du Myanmar d'assurer la protection des droits de l'homme de tous les musulmans sur son territoire. L'OCI croit au dialogue et à la coopération plutôt qu'à la confrontation; elle reste engagée aux côtés du Gouvernement de ce pays; elle a dans ce contexte proposé toute une série de projets pour le développement et la promotion d'un dialogue interculturel, qui n'ont malheureusement pas pu être mis en œuvre. L'OCI souligne la nécessité de s'atteler de toute urgence aux causes de la violence contre les musulmans rohingya. Elle recommande de mener des enquêtes indépendantes et crédibles sur les violations systématiques de leurs droits et de réformer la loi sur la citoyenneté de 1982 en vue d'accorder la citoyenneté à tous les musulmans rohingya.

Droit de réponse

Le Soudan a confirmé sa volonté de coopérer avec toutes les organisations internationales chargées des droits de l'homme. Il a déploré l'attitude d'un pays voisin qui ferme les yeux sur les abus des droits de l'homme commis par des groupes terroristes, déploré aussi les sanctions internationales décrétées par certains gouvernements et qui rendent très difficile le respect de ses obligations internationales en matière de droits de l'homme.

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* Délégations ayant pris part au débat interactif sur la situation à Sri Lanka: Union européenne, Irlande, République de Corée, Sierra Leone, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Japon, Estonie, Monténégro, France, Ex-République de Macédoine, Viet Nam, Pakistan, Allemagne, États-Unis, Albanie, Thaïlande, Australie, Canada, Suisse, Myanmar, Fidji, Norvège, Danemark, République islamique d'Iran, Fonds des Nations Unies pour l'enfance, République tchèque, Belgique, Nouvelle Zélande, United Nations Watch, Minority Rights Group, Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, Mouvement international contre toutes les formes de discrimination, Commission internationale de juristes, Pasumai Thaayagam Foundation, Libération, CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, Human Rights Watch, Amnesty International, Lawyers' Rights Watch Canada, League of Persons with Disabilities, Alliance Creative Community Project, Association des Jeunes pour l'Agriculture du Mali, Association Burkinabé pour la Survie de l'Enfance, Association Mauritanienne pour la promotion du droit, World Evangelical Alliance, et le Centre Independent de Recherches et d'Iniatives pour le Dialogue (CIRID).


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC15/138F