Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE L'EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par l'ex-République yougoslave de Macédoine sur les mesures qui ont été prises dans le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Le rapport a été présenté par la Secrétaire d'État au Ministère macédonien des affaires étrangères, Mme Elena Kuzmanovska, qui a notamment attiré l'attention sur l'adoption, en avril 2010, de la loi sur la prévention et la protection contre la discrimination. Cette loi interdit explicitement la discrimination directe et indirecte pour de nombreux motifs. Pour sa part, le code pénal sanctionne toute atteinte à l'égalité entre les citoyens pour divers motifs. Mme Kuzmanovska a ensuite rendu compte des activités de la Commission pour la protection contre la discrimination, créée en 2011 et qui reçoit les plaintes des citoyens. Elle a par ailleurs expliqué le processus mis en place afin de passer en revue l'ensemble des politiques découlant de l'Accord-cadre d'Ohrid de 2001. Depuis lors, la représentation des petites communautés ethniques dans l'administration publique n'a cessé de croître. Le pays n'a ménagé aucun effort pour améliorer la situation des non-ressortissants, tels que les migrants, les réfugiés et les requérants d'asile; ainsi, la durée maximale de détention dans les centres de réception pour étrangers sera réduite, passant de 12 à 6 mois. Mme Kuzmanovska a reconnu la position est particulièrement vulnérable des Roms et a souligné que des efforts majeurs ont été consentis pour remédier à cette situation.
La délégation macédonienne était également composée de représentants du Ministère de l'intérieur, du Ministère du travail et de la politique sociale, du Ministère de la santé, du Ministère de l'éducation et des sciences, du Ministère des affaires étrangères; et du Secrétariat pour la mise en œuvre de l'Accord-cadre. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, des questions linguistiques; de l'éducation, notamment s'agissant des enfants roms; des problèmes liés aux mariages précoces au sein de la communauté rom; du problème des enfants des rues; du comportement de la police à l'égard des Roms.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, M. José Augusto Lindgren Alves, a déclaré que, comme cela est fréquent dans l'ensemble des pays des Balkans, ainsi que dans d'autres parties d'Europe, les questions les plus sensibles du pays impliquent des différends entre les deux plus grandes «majorités», à savoir les personnes appartenant aux ethnies macédonienne et albanaise, et non pas entre ces personnes d'une part et les minorités vulnérables de l'autre. L'Accord-cadre d'Ohrid de 2001, qui a mis un terme au conflit interethnique entre les deux groupes majoritaires, a accordé une grande attention à la question de la représentation équitable, a-t-il rappelé. D'une manière générale, les dispositions de cet Accord-cadre visant à surmonter les tensions ethniques ont entraîné des résultats positifs durables. Le rapporteur a néanmoins rappelé qu'en mai dernier, la presse internationale avait couvert avec inquiétude certains incidents, dont l'un s'est soldé par un bilan de plus d'une vingtaine de morts. Par ailleurs, le rapporteur a relevé que certaines informations faisaient état de la persistance d'irrégularités dans le traitement des migrants en transit et des requérants d'asile. À l'instar du rapporteur, plusieurs membres du Comité se sont félicités des progrès considérables constatés en ex-République yougoslave de Macédoine dans un grand nombre de domaines.
Les observations finales du Comité sur tous les rapports examinés au cours de la session seront rendues publiques à la clôture des travaux, le vendredi 28 août.
Avant de commencer l'examen du rapport, le Président du Comité s'est réjoui de la retransmission publique macédonienne, inédite à ce jour dans l'histoire du Comité, des deux séances consacrées à l'examen de ce rapport.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la République tchèque (CERD/C/CZE/10-11), qui se poursuivra demain matin.
Présentation du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine
Le Comité est saisi du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine (CERD/C/MKD/8-10), ainsi que de la liste des thèmes à traiter établie par le rapporteur pour le pays (CERD/C/MKD/Q/8-10).
MME ELENA KUZMANOVSKA, Secrétaire d'État au Ministère des affaires étrangères, a d'emblée tenu à attirer l'attention sur le fait majeur intervenu depuis la soumission du précédent rapport, à savoir l'adoption, en avril 2010, de la loi sur la prévention et la protection contre la discrimination. Cette loi interdit explicitement la discrimination directe et indirecte aux motifs du sexe, de la race, de la couleur de peau, du genre, de l'appartenance à un groupe marginalisé, de l'origine ethnique, de la langue, de la nationalité, de l'origine sociale, de la religion, de la confession ou de tout autre type de croyance, de l'éducation, de l'affiliation politique, du statut personnel ou social, du handicap physique ou mental, de l'âge, du statut familial ou marital, du statut au regard de la propriété, de la condition de santé ou pour tout autre motif, cette liste n'étant en effet pas exhaustive.
Par ailleurs, a poursuivi Mme Kuzmanovska, le code pénal macédonien sanctionne toute atteinte à l'égalité entre les citoyens pour des motifs de genre, de race, de couleur de peau, d'origine nationale ou sociale, de conviction politique ou religieuse, de statut de propriété, de statut social, de langue ou pour tout autre motif se rapportant à des caractéristiques ou des circonstances personnelles. En février 2014, la loi portant amendement du code pénal a été adoptée pour renforcer les dispositions de protection à cet égard.
Depuis que la loi sur la prévention et la protection contre la discrimination est entrée en vigueur, en janvier 2011, les tribunaux de première instance ont prononcé quatre jugements suite à des plaintes déposées par des personnes qui estimaient avoir été victimes de discrimination et de violation de leurs droits au regard de cette loi, a indiqué Mme Kuzmanovska. En 2012, la Cour constitutionnelle a examiné 27 plaintes concernant la protection des droits de l'homme, dont 15 étaient liées à la protection contre la discrimination; 10 plaintes y étaient liées sur
13 examinées en 2013 et 7 sur 16 en 2014.
Mme Kuzmanovska a ensuite attiré l'attention sur la création, en janvier 2011, de la Commission pour la protection contre la discrimination, composée de sept membres nommés par l'Assemblée de la République pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Outre le traitement des requêtes, cette Commission organise des réunions de travail avec les représentants des autorités locales, les coordonnateurs pour l'égalité des chances au niveau local et les citoyens, afin de sensibiliser chacun aux concepts d'égalité et de non-discrimination et aux mécanismes de protection existants. Entre le 1er mai 2013 et le 27 juillet 2015, la Commission a reçu un total de 202 requêtes et a achevé les procédures concernant 121 d'entre elles; elle a établi qu'il n'y avait pas eu de discrimination dans 66 cas et qu'il y avait eu discrimination dans 12 cas et n'a pas traité 39 requêtes conformément à l'article 24 de la loi relative aux compétences de cette institution; elle a également clos les procédures dans 4 affaires. Durant cette période, 83 des requêtes avaient trait au travail et aux relations de travail et 29 aux soins de santé et à la sécurité sociale; 28 avaient trait à l'accès aux biens et services et 15 à l'éducation, aux sciences et aux sports; 16 étaient liées au système de justice et à l'administration; 9 à l'information publique et aux médias; 8 au logement; 4 à l'appartenance à des syndicats ou des partis politiques ou à des activités y afférentes; et 3 à la culture. La plupart des requêtes, soit 46, alléguaient une discrimination fondée sur l'appartenance ethnique; 27 requêtes alléguaient une discrimination fondée sur le statut personnel ou social; 20 alléguaient une discrimination fondée sur le handicap; 16 une discrimination fondée sur le sexe; 21 une discrimination fondée sur la condition de santé; et 15 une discrimination fondée sur l'éducation.
Mme Kuzmanovska a ensuite fait état de la Stratégie nationale 2012-2015 sur l'égalité et la non-discrimination et a indiqué qu'un projet de loi amendant la loi sur le Médiateur avait été préparé en vue de renforcer le rôle de cette institution en tant que mécanisme de prévention. Insistant d'autre part sur les mesures visant à favoriser de bonnes relations interethniques, la Secrétaire d'État a rendu compte du processus mis en place afin de passer en revue l'ensemble des politiques découlant de l'Accord-cadre d'Ohrid. Depuis 2001, la représentation des petites communautés ethniques dans l'administration publique n'a cessé de croître.
L'Agence pour l'exercice des droits des communautés qui a été créée a pour mandat de surveiller l'application de toutes les lois réglementant les droits des personnes appartenant à des communautés constituant moins de 20% de la population totale du pays, a par ailleurs expliqué la Secrétaire d'État. Son pays n'a ménagé aucun effort pour améliorer le statut des non-ressortissants, tels que les migrants, les réfugiés et les requérants d'asile, a-t-elle également fait valoir, insistant notamment sur la croissance du nombre global de personnes prises en charge chaque année dans les centres pour étrangers. Une nouvelle loi sur les étrangers est en cours de préparation qui devrait inclure des dispositions envisageant que les mineurs non accompagnés et les familles comportant des mineurs ne soient détenus qu'en mesure de dernier recours et pour le moins de temps possible. En vertu des nouvelles dispositions législatives, la durée maximale de détention dans les centres de réception pour étrangers sera réduite, passant de 12 à 6 mois, a précisé Mme Kuzmanovska. Elle a en outre fait état de l'existence d'une Stratégie 2008-2015 pour l'intégration des réfugiés et des ressortissants étrangers.
S'agissant de la situation des Roms, la Secrétaire d'État a reconnu que leur position est particulièrement vulnérable et a souligné que des efforts importants ont été consentis pour remédier à cette situation. Elle a particulièrement insisté sur la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour les Roms, soulignant que les activités du Plan d'action national associé à cette Stratégie se concentrent sur les domaines de l'éducation, du logement, des soins de santé et de l'emploi.
Mme Kuzmanovska a par ailleurs souligné que les personnes appartenant à des communautés ont droit à une instruction dans leur langue maternelle ou dans l'une des langues d'instruction en usage dans le pays. Les personnes appartenant aux communautés albanaise, turque et serbe disposent d'une éducation à tous les niveaux dans leurs langues maternelles respectives, alors que les personnes appartenant aux communautés bosniaque, valaque et rom disposent d'un sujet optionnel pour l'étude de leurs langues maternelles respectives à compter du troisième niveau d'éducation primaire et jusqu'à la fin de celle-ci.
La Secrétaire d'État a enfin attiré l'attention sur l'abolition de l'article 37, paragraphe 1, alinéa 6 et de l'article 38, paragraphe 4 de la «loi sur les documents de voyage des ressortissants de la République de Macédoine» – les dispositions de ces articles n'étant donc plus invoquées comme motifs de rejet des demandes de passeport ou de visa.
Examen du rapport
Questions et observations des experts
M. JOSÉ AUGUSTO LINDGREN ALVES, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'ex-République yougoslave de Macédoine, a salué l'abolition des dispositions des articles 37 et 38 de la loi sur les documents de voyage des ressortissants macédoniens mentionnée par la Secrétaire d'État. Il a par ailleurs relevé que nombre de sources font état de progrès sensibles réalisés dans le pays, ajoutant qu'à défaut, l'Union européenne n'aurait pas engagé des négociations en vue de l'accession du pays à l'Union et les investisseurs n'y auraient pas afflué, attirés par les opportunités.
M. Lindgren Alves a rappelé que sur les plus de deux millions d'habitants que compte l'ex-République yougoslave de Macédoine, 1,3 million sont d'ethnie macédonienne et 507 000 d'ethnie albanaise, alors que 200 000 autres appartiennent à des groupes reconnus comme minorités – essentiellement les Turcs, les Valaques, les Serbes et les Bosniaques. Comme cela est fréquent dans l'ensemble des pays des Balkans, ainsi que dans d'autres parties de l'Europe, les questions les plus sensibles du pays impliquent des différends entre les deux plus grandes «majorités», et non pas entre ces deux groupes d'une part et les minorités vulnérables de l'autre. L'Accord-cadre d'Ohrid de 2001, qui a mis un terme au conflit interethnique entre les deux groupes principaux, a accordé une grande attention à la question de la représentation équitable, a rappelé M. Lindgren Alves, soulignant en outre que cet Accord ne visait pas seulement la représentation des personnes appartenant aux deux majorités mais aussi celle des personnes appartenant à toutes les communautés – un principe qui a été incorporé à la Constitution. D'une manière générale, les dispositions de cet Accord-cadre visant à surmonter les tensions ethniques ont entraîné des résultats positifs durables, a estimé le rapporteur. Si des cas de violences interethniques continuent de se produire, ils sont isolés et aujourd'hui rares, a-t-il insisté.
Rappelant cependant qu'en mai dernier, la presse internationale avait couvert avec inquiétude certains incidents, dont l'un s'est soldé par un bilan de plus d'une vingtaine de morts, M. Lindgren Alves a souhaité en savoir davantage au sujet de ce qui s'est passé plus tôt cette année à Kumanovo et des risques qui en découlent. Les causes de cette violence ont-elles été traitées de manière adéquate et les personnes ayant commis des crimes ont-elles été jugées et punies, a-t-il demandé?
Relevant d'autre part que le dernier recensement réalisé dans le pays remonte à 2002, soit peu après la fin de la guerre, le rapporteur a souhaité savoir s'il subsistait encore des difficultés politiques pour tenir un nouveau recensement.
M. Lindgren Alves a souligné que le fait que l'ex-République yougoslave de Macédoine partage des frontières avec la Serbie, l'Albanie et le Kosovo la rend particulièrement vulnérable aux effets de la guerre du Kosovo des années 90, avec un grand nombre de personnes déplacées et de réfugiés venant vers son territoire. Cette même tendance se poursuit aujourd'hui, dans un contexte différent, sous la forme de nombreux migrants économiques en provenance du Kosovo, auxquels s'ajoutent désormais des nombres dramatiques de requérants d'asile provenant d'Afghanistan, de Syrie et de Somalie, a ajouté le rapporteur. Même si la plupart de ces personnes ne sont qu'en transit vers l'Europe occidentale, l'ex-République yougoslave de Macédoine, comme d'autres pays des Balkans, est l'un des premiers territoires à assumer la charge de ces personnes déplacées, a fait observer M. Lindgren Alves, insistant sur la nécessité pour le pays de respecter ses obligations internationales en termes de non-refoulement et d'interdiction des détentions illégales. Le rapporteur s'est néanmoins réjoui que le centre de détention pour étrangers de Gazi Baba, de triste réputation, soit désormais presque vide et que le Gouvernement ait l'intention de le rénover pour le rendre conforme aux normes internationales. Pour autant, a ajouté M. Lindgren Alves, certaines informations font état de la persistance d'irrégularités, notamment de longues périodes de détention administrative ou encore la détention de mineurs non accompagnés, dans le traitement des migrants en transit et des requérants d'asile.
Le rapporteur s'est réjoui de l'adoption par le pays de la loi sur la prévention et la protection contre la discrimination, qui contient une liste de motifs de discrimination allant bien au-delà de la définition prévue à l'article premier de la Convention. Certes, cette loi ne mentionne pas le terme d'«ascendance», mentionné à l'article premier de la Convention; mais d'une part la discrimination fondée sur l'ascendance n'est pas un sujet de préoccupation dans les Balkans et, d'autre part, la Convention est constitutionnellement considérée comme faisant partie du droit interne, de sorte qu'elle peut être invoquée devant les tribunaux macédoniens, a fait valoir le rapporteur.
M. Lindgren Alves a ensuite souhaité savoir si la majorité des agents publics – y compris les maires, les travailleurs sociaux et les agents de police – dans les villes majoritairement habitées par des Roms étaient eux-mêmes roms ou si, au contraire, les Roms vivant dans ces villes sont, comme souvent ailleurs, des nomades qui se contentent de camper dans ces municipalités. Le rapporteur a par ailleurs rappelé que l'un des problèmes mis en lumière par le Médiateur avait trait aux difficultés que rencontrent les Roms et les Albanais pour traverser la frontière et voyager à l'étranger – une question qui avait déjà été soulevée en 2007 comme constituant une forme de discrimination à l'encontre de ces deux communautés. M. Lindgren Alves a souhaité savoir si, de l'avis de la délégation, ces problèmes découlent des préjugés des gardes-frontières macédoniens ou des pressions exercées de l'étranger pour éviter de recevoir les visiteurs indésirables. Relevant que les informations reçues concernant la situation des Roms présentent les mêmes caractéristiques que celles observées dans d'autres pays européens et portent sur l'éducation, les soins de santé, le logement, l'enregistrement des naissances ou encore l'octroi de documents, le rapporteur a salué l'intention de l'État partie de surmonter la discrimination en prenant des mesures spéciales et en prenant part à la Stratégie européenne associée à la Décennie pour l'intégration des Roms. Il a d'autre part attiré l'attention sur le phénomène des enfants des rues roms.
Le rapporteur a souhaité savoir quelles langues étaient considérées comme langues officielles en ex-République yougoslave de Macédoine.
Relevant en outre que le pays compte 15 églises, 7 communautés religieuses et 8 groupes religieux, M. Lindgren Alves s'est enquis des différences entre ces groupes.
Parmi les autres membres du Comité, plusieurs se sont félicités des progrès considérables constatés en ex-République yougoslave de Macédoine dans de nombreux domaines. Le cadre juridique et institutionnel s'est considérablement développé, a souligné l'un d'entre eux. Un membre du Comité a fait observer que, d'après des informations émanant d'ONG, la population des communautés sintis, ashkalis et roms avait augmenté dans le pays. L'expert s'est en outre enquis des raisons qui empêchent que l'institution nationale des droits de l'homme (Médiateur) obtienne le statut A auprès du Comité international de coordination des institutions nationales de droits de l'homme (CIC), a en outre demandé l'expert? Quel est le statut de la langue rom en ex-République yougoslave de Macédoine, a-t-il également demandé?
Un autre expert a salué l'activité du Médiateur ainsi que l'adoption de mesures spéciales en faveur des Roms, notamment dans les domaines de l'éducation, du logement de l'emploi, qui commencent à porter des fruits. Pour ce qui est de la législation, si la loi interdit la discrimination raciale, elle ne la définit pas comme le prévoit la Convention, a toutefois déploré cet expert. Les cas de policiers utilisant une force disproportionnée contre les Roms constituent un phénomène qui mérite de retenir l'attention de l'État, a-t-il poursuivi. Les Valaques en ex-République yougoslave de Macédoine sont-ils apparentés à ceux de la Voïvodine ou bien à ceux de l'est de la Serbie, a par ailleurs demandé l'expert?
Un expert s'est inquiété d'informations faisant état de l'existence de discriminations sur le lieu de travail et a souhaité en savoir davantage au sujet des dispositions régissant les contrats de travail.
Un autre expert a soulevé le problème du mariage précoce des jeunes femmes roms et s'est enquis des mesures prises par le pays pour y remédier, déplorant le caractère uniquement punitif des mesures qui semblent être prises à cette fin.
Il a aussi été demandé quels groupes sont considérés par les autorités du pays comme étant des groupes vulnérables et quels sont les problèmes auxquels ils se heurtent. Une experte a insisté sur le problème que constitue la ségrégation sociale des Roms et Sintis. Un expert s'est enquis de la situation de la communauté albanaise en ex-République yougoslave de Macédoine.
Un membre du Comité a souhaité en savoir davantage sur la distinction entre les compétences respectives du Médiateur et de la Commission pour la protection contre la discrimination.
Un expert a félicité l'État partie de l'ouverture d'au moins quatre abris régionaux pour les victimes de la violence et de la violence domestique et l'a engagé à en ouvrir également au sein des communautés roms, y compris pour les victimes de moins des 18 ans, les femmes et les jeunes filles roms étant souvent mariées avant l'âge de 18 ans. La délégation a également été interrogée sur les mesures prises pour intégrer davantage les enfants roms dans les écoles locales et les experts ont voulu savoir quelles mesures étaient en place pour veiller à l'application de la politique globale en faveur des Roms dans les domaines de l'éducation, du logement, de l'emploi notamment.
En ce qui concerne la situation des femmes et des femmes des minorités en particulier, Les experts ont demandé quels progrès avaient été accomplis dans la mise en œuvre des recommandations du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes en ce qui concerne une augmentation de l'allocation de ressources en faveur de la lutte contre la violence contre les femmes et quels objectifs ont été fixés.
Le problème de la violence de la police envers les personnes appartenant à des minorités ethniques, et contre les Roms en particulier, exige une amélioration de la formation et de la sensibilisation de la police; il faut également prévoir des sanctions, a souligné un expert.
Le pays connaît un problème d'enregistrement des migrants et des réfugiés, empêchant l'accès à la santé, l'éducation et autres services sociaux. En outre, certains demandeurs d'asile ont été détenus à la frontière pour obtenir leurs témoignages contre les passeurs; les experts ont exprimé l'espoir que les procédures impliquées ne comportaient pas la détention prolongée des migrants. Il a été noté qu'en 2015, une seule personne s'était vu accorder le statut de réfugié.
La délégation a été priée de clarifier l'utilisation du terme «ségrégation positive». Des membres du Comité ont par ailleurs exprimé des préoccupations s'agissant d'une ségrégation de fait dans le pays et ont souligné l'importance de commencer tôt une l'éducation à cet égard et de renforcer la sensibilisation au respect de l'autre de manière appropriée parmi les élèves et étudiants.
Réponses de la délégation
La délégation a tenu à souligner que selon la Constitution de l'ex-République yougoslave de Macédoine, le nom constitutionnel du pays est «République de Macédoine».
S'agissant de l'apprentissage de la langue macédonienne par les élèves étrangers, la délégation a précisé qu'il s'agissait d'une matière obligatoire. La langue rom existe sous forme écrite depuis 1990, suite à son élaboration par un professeur enseignant à Paris, a en outre souligné la délégation. L'étude des langues valaque et rom est facultative à l'école primaire et les enseignants de ces matières sont diplômés de la Faculté de pédagogie, a-t-elle précisé.
Le droit à l'éducation est garanti par la Constitution à toute personne, quelle que soit son origine ethnique, a par ailleurs rappelé la délégation. La loi relative à l'éducation interdit toute discrimination pour quelque motif que ce soit, a-t-elle ajouté.
La délégation macédonienne a fait valoir qu'un nombre plus important de motifs de discrimination ont été retenus dans la Constitution et la législation. Un projet de loi concernant le Bureau du Médiateur est en préparation pour renforcer son mandat et assurer son rôle en tant que mécanisme national de prévention.
En réponse à certaines préoccupations exprimées au sujet de la ségrégation des Roms dans l'éducation, la délégation a rappelé que l'éducation de base avait été décentralisée et que ce sont désormais les municipalités qui sont chargées d'organiser la scolarisation des enfants, lesquels sont donc appelés à suivre les cours dans l'école la plus proche de chez eux. Pour ce qui est des enfants roms sans papiers, la délégation a souligné que, conformément à l'article 8 de la loi sur l'éducation, les enfants sans papiers ont les mêmes droits à l'éducation que les enfants macédoniens.
Les Roms sont considérés comme des citoyens à part entière et jouissent des mêmes droits que tout autre citoyen et partagent les mêmes responsabilités. Les Roms macédoniens sont très actifs politiquement et ont fondé des partis politiques. Le pays compte un maire rom, ainsi qu'un ministre, un membre du Parlement et plusieurs directeurs d'institutions de l'État, notamment. La Stratégie nationale pour les Roms a été mise en œuvre par le biais de plans d'action nationaux et des ressources sont allouées dans ce cadre par chaque ministère. Un certain nombre de programmes sont en place pour soutenir la population rom, notamment le programme sur l'intégration des enfants roms à l'éducation préscolaire, en place depuis 2006; la création de centres d'information des Roms dans les 14 municipalités ayant le plus grand nombre de communautés roms; l'aide juridique gratuite; des programmes de bourse.
Le problème des enfants des rues prend de l'ampleur, a reconnu la délégation, et la mendicité est souvent liée à des problèmes d'abus et de négligence des mineurs, y compris par leurs parents. Un protocole sur les enfants de la rue a été préparé et fournit une méthode pour aider les enfants dans la rue à parvenir à une meilleure intégration dans la société.
Afin de lutter contre le phénomène des mariages précoces, notamment parmi les Roms, des programmes sont en place pour l'inclusion dans l'éducation de programmes préscolaires et de bourses pour les Roms et les transferts d'argent, sous condition, aux parents dont les enfants fréquentent régulièrement l'école. En réponse à une autre question, la délégation a assuré que toutes les femmes et les filles, quel que soit leur âge, ont accès aux refuges pour les victimes de violence domestique.
La Commission pour la protection contre la discrimination a été créée en 2011 afin d'assurer la mise en œuvre de la loi sur la prévention et la protection contre la discrimination, et la Stratégie nationale de l'égalité et de la non-discrimination a été mise en œuvre.
Les activités visant à améliorer les conditions de logement des migrants clandestins et des demandeurs d'asile dans le Centre d'accueil pour étrangers se sont intensifiées depuis la seconde moitié de 2014, avec le soutien du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et du Comité international de la Croix-Rouge. Les migrants irréguliers ont reçu des soins de santé gratuits dans le pays. Plus de 30 000 ressortissants étrangers se sont vus remettre un certificat d'asile, dont 23 958 ressortissants de Syrie et le reste à des ressortissants d'Irak, du Pakistan, de Palestine, de Somalie et d'autres pays.
Afin de répondre à tout usage disproportionné de la force par la police contre les Roms, le Ministère de l'intérieur a mis en place des mesures pour améliorer le comportement de la police à l'égard des citoyens, sans distinction de sexe, de race, d'origine ethnique, d'âge. Plusieurs projets ont été mis en place afin de renforcer la confiance entre les communautés roms et la police. La police est composée de 76% de Macédoniens et de 19% d'Albanais. Au ministère de la Défense, y compris l'armée, les Macédoniens représentent 73% du personnel, les Albanais 19% et les Turcs 2%.
Outre langue macédonienne, les langues officielles du pays sont toutes celles qui sont parlées par plus de 20% de la population. La mise en œuvre du principe de la représentation équitable dans l'administration publique a abouti à une augmentation de la représentation des minorités et à leur participation à l'élaboration des politiques, au renforcement des institutions et au renforcement de la confiance.
UN projet de loi modifiant la loi sur le Bureau du Médiateur a été préparé de manière à ce que l'institution soit en conformité avec les exigences d'un statut A et pour renforcer la capacité de l'institution à agir en tant que mécanisme national de prévention de la torture.
La loi sur la prévention et la protection contre la discrimination autorise la discrimination positive et l'utilisation de mesures de discrimination positive jusqu'à ce que l'égalité de fait soit atteinte; cette disposition assure l'exercice de l'égalité des chances de certains groupes dans la société et garantit l'exercice effectif de leur droit à l'égalité des chances. Dans le domaine de l'éducation, c'est bien un système de discrimination positive qui est en place et no de «ségrégation positive». Les enfants roms peuvent accéder à l'école secondaire, a assuré la délégation.
Les soins de santé sont fournis aux enfants roms, qu'ils aient ou non des documents d'identité. Répondant à des questions sur la toxicomanie parmi les enfants roms, la délégation a indiqué que le nombre d'enfants roms toxicomanes était très faible, mais le problème est pris très au sérieux et un protocole pour le traitement des enfants utilisateurs de substances psychotropes et des lignes directrices thérapeutiques ont été préparés.
En ce qui concerne le profilage aux postes frontaliers, la délégation a déclaré que la Section de contrôle interne et des normes professionnelles du Ministère de l'intérieur répondait aux plaintes présentées par des citoyens, des organisations non-gouvernementales et des avocats. Elle procède notamment à des contrôles internes sur le respect des droits de l'homme aux frontières afin d'éviter les abus commis par les fonctionnaires
Répondant à d'autres questions, la délégation a précisé que les Roms macédoniens n'étaient pas nomades et que le pays ne comptait pas de Sintis dans sa population. Environ 1500 Roms travaillent dans une institution de l'État aux niveaux national et local. L'âge du mariage est de 18 ans, mais peut être autorisé dès 16 ans avec autorisation parentale. Les filles roms qui ne fréquentent pas l'école ont souvent été contraintes par la culture de se marier tôt, mais le nombre de mariages précoces a diminué grâce à des programmes de promotion de la scolarisation des Roms, en particulier les filles. Elle a rappelé que son pays était est le seul qui ait développé une stratégie et un plan national pour les femmes roms et il organisera la cinquième Conférence internationale des femmes roms à Skopje en octobre 2015.
Les Roms représentent les populations les plus vulnérables du pays et c'est pourquoi la Décennie et la Stratégie pour les Roms avait été lancée en 2005 qui prévoyait des plans d'action et des ressources spécifiques pour les Roms. Les résultats sont aujourd'hui visibles, comme en témoigne l'augmentation du nombre de Roms qui terminent leurs études secondaires et étudient à l'université ou travaillent. La délégation a assuré que les efforts menés pour améliorer la participation des Roms dans la société ne s'arrêteraient pas là.
Conclusions
M. LINDGREN ALVES a déclaré que les observations finales prendront acte de l'évolution positive de l'ex-République yougoslave de Macédoine. Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport a exprimé l'espoir que le pays poursuivra sur cette voie positive et deviendra un exemple pour l'ensemble des pays des Balkans.
MME KUZMANOVSKA a exprimé sa satisfaction devant l'engagement des experts dans les échanges avec son pays. Le chef de la délégation macédonienne a aussi souligné l'engagement de l'ensemble de la société macédonienne en faveur de l'amélioration de la situation dans le pays.
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CERD15/020F