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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND DES HAUTS DIGNITAIRES DE LA RUSSIE, DE L'ALGÉRIE, DE LA SUÈDE, DES PAYS-BAS, DE L'ARGENTINE ET DE L'UKRAINE

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a entendu aujourd'hui des déclarations des Ministres des affaires étrangères de la Fédération de Russie, de l'Algérie, de la Suède et des Pays-Bas, ainsi que des Vice-Ministres des affaires étrangères de l'Argentine et de l'Ukraine. Les délégations des États-Unis, du Royaume-Uni et de la Fédération de Russie sont intervenues suite à ces déclarations.

Le Ministre russe des affaires étrangères, M. Sergei Lavrov, a notamment souligné que la parité stratégique est influencée par toute une gamme de facteurs: parmi eux figurent les actions unilatérales des États-Unis et de leurs alliés dans le domaine des missiles de défense stratégique – actions qui sont déjà devenues un important facteur destructeur sapant la stabilité stratégique. M. Lavrov a rappelé que dans le cadre de l'application des initiatives présidentielles de 1991-1992, la Fédération de Russie avait réduit de trois-quarts son arsenal d'armes nucléaires non stratégiques, une mesure sans précédent entreprise en dépit du déploiement en Europe d'armes nucléaires opérationnelles améliorées par les États-Unis capables d'atteindre le territoire russe et alors que certains États européens non nucléaires membres de l'OTAN prennent une part active dans les prétendues missions de «partage nucléaire». De telles formations conjointes à l'utilisation des armes nucléaires par des membres de l'OTAN constituent une violation des deux premiers articles fondamentaux du TNP, a déclaré M. Lavrov.

Le Ministre algérien des affaires étrangères, M. Ramtane Lamamra, a annoncé que l'Algérie venait de ratifier la Convention sur certaines armes conventionnelles et les Protocoles I, III et IV qui lui sont annexés. Il a en outre rappelé que l'Algérie mène avec succès, en tant que chef de file d'une équipe internationale, une médiation entre le Gouvernement malien et les mouvements politico-militaires du Nord du Mali pour promouvoir une solution pacifique qui servirait autant les intérêts nationaux de ce pays que ceux de toute la région du Sahel. M. Lamamra a ensuite déploré que peu de progrès aient été réalisés en matière de désarmement nucléaire et a formé le vœu que la neuvième Conférence d'examen du TNP, que l'Algérie aura le privilège de présider dans quelques semaines, puisse parvenir à des résultats tangibles à même de renforcer les trois piliers du TNP.

La Ministre suédoise des affaires étrangères, Mme Margot Wallström, a jugé inacceptable que subsistent aujourd'hui quelque 16 000 armes nucléaires. Elle a d'autre part annoncé que la Suède aura bientôt démantelé toutes ses sous-munitions, conformément à ses obligations découlant de la Convention interdisant ces armes inhumaines. La Ministre suédoise s'est dite profondément préoccupée par les informations faisant état de l'utilisation de sous-munitions contre des populations civiles au Soudan du Sud et en Syrie.

Malheureusement, plusieurs cas d'utilisation de sous-munitions ont été rapportés ces dernières années, a lui aussi déploré le Ministre néerlandais des affaires étrangères, M. Bert Koenders, avant de préciser que le 3 février dernier, la Mission spéciale d'observation de l'OSCE a rapporté l'utilisation apparente de sous-munitions à Luhansk, en Ukraine. Le ministre a reconnu que la situation géopolitique actuelle n'est pas propice au désarmement, mais il les difficultés actuelles ne sont pas une raison pour abandonner le désarmement nucléaire.

Le Vice-Ministre argentin des affaires étrangères, M. Eduardo Zuain, a estimé que l'on se trouve encore à un stade très précaire en termes d'application du Traité de Tlatelolco, interdisant la présence d'armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes, en raison des déclarations interprétatives au Protocole additionnel II qui engage les signataires à ne pas introduire d'armes nucléaires sur le territoire couvert par ce traité. Cette application précaire du Traité se voit également défiée par la présence militaire illégitime, disproportionnée et injustifiée, du Royaume-Uni dans les îles Malouines et dans les îles de Georgie du Sud et Sandwich du Sud et les espaces qui entourent toutes ces îles, incluant le déplacement dans l'Atlantique Sud de sous-marins ayant la capacité de porter des armements nucléaires dans la zone dénucléarisée.

Enfin, M. Sergiy Kyslytsya, Vice-Ministre ukrainien des affaires étrangères, a déclaré qu'à la veille du 70ème anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale, l'ordre mondial subit une attaque majeure alors qu' «une guerre hybride sur l'Ukraine a été déclenchée par un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies». Pleinement engagée en faveur de la mise en œuvre des Accords de Minsk de septembre 2014 et de février 2015, l'Ukraine considère leur application comme le seul moyen de parvenir à un règlement pacifique de la situation dans le Donbass. Malheureusement, le fragile cessez-le-feu est en danger en raison d'attaques et de provocations constantes de la part de terroristes soutenus par la Russie. L'Ukraine a engagé des consultations avec les Nations Unies en vue du déploiement d'une opération de maintien de la paix en Ukraine. Les actions de la Fédération de Russie en tant qu'État nucléaire constituent une menace directe pour le régime international établi par le TNP, a insisté le Vice-Ministre.

Trois délégations ont pris la parole à l'issue de ces allocutions, la délégation des États-Unis a assuré que ses missiles de défense ne sont pas pointés sur la Fédération de Russie et a rejeté catégoriquement l'affirmation selon laquelle les États-Unis violent le TNP dans le contexte d'un «partage nucléaire». Le Royaume-Uni n'a aucun doute quant à sa souveraineté sur les Falklands, a pour sa part indiqué la délégation britannique. La délégation russe a pour sa part expliqué que «nous ne sommes pas partie au conflit au Donbass».


Cet après-midi, à partir de 15h30, la Conférence doit entendre des hauts dignitaires du Liban, du Maroc, du Qatar et de la Turquie.


Déclarations ministérielles

M. SERGEI LAVROV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, a affirmé que depuis la dernière fois qu'il s'est adressé à cette instance, en mars 2011, des menaces se sont accumulées dans le domaine de la sécurité internationale et des crises se sont aggravées qui affectent non seulement des pays mais des régions entières. Dans un tel contexte, s'avère urgemment nécessaire une coopération multilatérale constructive visant à développer des approches mutuellement acceptables fondées sur un équilibre d'intérêts et non pas sur les ambitions de ceux qui perçoivent le monde à l'aune de leur propre exceptionnalité, a ajouté le Ministre russe. Dans les conditions actuelles, a-t-il poursuivi, la Fédération de Russie est convaincue qu'il ne saurait y avoir d'alternative à la triade que constituent la Première Commission de l'Assemblée générale, la Conférence du désarmement et la Commission du désarmement des Nations Unies, M. Lavrov a déclaré que le potentiel de l'instance de négociations qu'est la Conférence est loin d'avoir été épuisé. Afin de parvenir à la Conférence à un programme de travail mutuellement acceptable, nous devrons tous faire preuve de souplesse et trouver un équilibre des intérêts, a-t-il indiqué. Alors que dans moins de deux mois s'ouvrira à New York la prochaine Conférence d'examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), M. Lavrov a appelé chacun à respecter ce Traité.

Nous sommes profondément préoccupés par l'incertitude qui entoure le respect de la décision visant à convoquer une conférence sur l'établissement d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen-Orient, a poursuivi le Ministre russe des affaires étrangères, plaidant pour une poursuite du dialogue avec les pays de la région afin de convoquer cette conférence sans délai. M. Lavrov a précisé que la Fédération de Russie était disposée à signer le Protocole au Traité de Bangkok sur une zone exempte d'armes nucléaires en Asie du sud-est. Il a par ailleurs affirmé que les pourparlers entre les «P5 +1» et l'Iran constituent l'un des facteurs encourageants renforçant le régime du TNP et a ajouté que la Fédération de Russie contribue pleinement à leur conclusion fructueuse, s'efforçant d'œuvrer à un accord qui soit solidement basé sur les principes du TNP et les meilleures pratiques de l'AIEA. M. Lavrov a ensuite souligné que l'été dernier, s'était achevée avec succès une opération sans précédent de démilitarisation chimique, avec le retrait de toutes les armes chimiques de Syrie – auquel la Fédération de Russie a contribué de manière significative, tant du point de vue politique que du point de vue financier. Moscou est engagée à poursuivre le désarmement nucléaire, a ensuite assuré M. Lavrov, faisant valoir le strict respect par la Fédération de Russie du Traité qu'elle a conclu avec les États-Unis sur les mesures concernant de nouvelles réductions et limitations d'armes stratégiques offensives. Il est évident que toute nouvelle réduction et limitation des arsenaux nucléaires ne peut être effectuée qu'en assurant une sécurité égale et indivisible pour tous les États, sans exception, a précisé le Ministre russe des affaires étrangères. La parité stratégique est influencée par toute une gamme de facteurs, a-t-il poursuivi: parmi eux, figurent les actions unilatérales des États-Unis et de leurs alliés dans le domaine des missiles de défense stratégique – actions qui sont déjà devenues un important facteur destructeur qui sape la stabilité stratégique et met à mal la perspective d'avancer vers l'option du «zéro nucléaire», un objectif qui est semble-t-il partagé par nombre de pays présents ici. Personne ne doit négliger le fait qu'aujourd'hui, de nombreux types d'armement de haute précision sont déjà proches de la qualification d'armes de destruction massive en termes de capacités et, en cas de pleine renonciation aux armes nucléaires ou de réduction drastique des capacités nucléaires, les nations qui sont leaders dans le développement et la production de systèmes de haute précision auront un avantage militaire clair qui mènerait à l'interruption de la parité stratégique et à la déstabilisation, a souligné M. Lavrov. Il a ajouté que la Fédération de Russie était profondément préoccupée par le report pour une période indéfinie de l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. M. Lavrov a rappelé que dans le cadre de l'application des initiatives présidentielles de 1991-1992, la Fédération de Russie avait réduit de trois-quarts son arsenal d'armes nucléaires non stratégiques; il s'agit d'une mesure sans précédent qui a été entreprise en dépit du fait que des armes nucléaires opérationnelles déployées par les États-Unis et capables d'atteindre le territoire russe restent en Europe. Aujourd'hui, ces armes sont même améliorées, a insisté le Ministre russe. De plus, a-t-il ajouté, certains États européens non nucléaires membres de l'OTAN prennent une part active dans les prétendues missions de «partage nucléaire». De telles formations conjointes à l'utilisation des armes nucléaires par des membres de l'OTAN constituent une violation des deux premiers articles fondamentaux du TNP, a déclaré M. Lavrov. Il a enfin souligné que les perspectives d'assurer une sécurité indivisible et égale pour tous les pays dépendent aussi directement de la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique. À cet égard, il s'est réjoui de constater une consolidation de la position de la communauté internationale sur cette question. Aussi, a-t-il estimé que le projet de traité sur la prévention du placement d'armes dans l'espace, que la Fédération de Russie a présenté conjointement avec la Chine, peut, dans sa version récemment révisé, constituer une base nécessaire pour le lancement de négociations appropriées au sein de la Conférence. M. Lavrov a donc encouragé tous les participants de la Conférence de prendre dès que possible une décision pour engager les travaux sur le projet de traité russo-chinois.

M. RAMTANE LAMAMRA, Ministre des affaires étrangères de l'Algérie, a tenu à réaffirmer l'engagement de son pays à participer à toute initiative «qui viserait à asseoir les bases solides et durables de notre aspiration commune à la paix, à la sécurité et à la stabilité». Dans le monde globalisé actuel, ouvert et imprévisible, a-t-il poursuivi, la sécurité et la stabilité de chacun de nos États sont intimement liées à celles des autres. De ce constat général, se dégage l'exigence d'une coopération au service d'une sécurité collective, fondée sur les principes de la Charte des Nations Unies. M. Lamamra a annoncé que l'Algérie vient de ratifier la Convention sur certaines armes conventionnelles et les Protocoles I, III et IV qui lui sont annexés. Il a en outre rappelé que l'Algérie mène avec succès, en tant que chef de file d'une équipe internationale, une médiation entre le Gouvernement malien et les mouvements politico-militaires du Nord du Mali pour promouvoir une solution pacifique qui servirait autant les intérêts nationaux de ce pays que ceux de toute la région du Sahel. L'adoption d'une feuille de route et la signature d'une déclaration pour renforcer la confiance et consolider le cessez-le-feu sur le terrain ont permis de parvenir à l'Accord-cadre de paix et de réconciliation nationale qui a été paraphé hier, 1er mars, à Alger. Dans le même esprit, a poursuivi le Ministre algérien des affaires étrangères, l'Algérie œuvre avec détermination, avec d'autres acteurs de bonne volonté, à faire taire les armes et à favoriser un dialogue inclusif et une solution politique à la crise libyenne en vue de la restauration d'une paix durable dans ce pays frère et de la préservation de son unité et de son intégrité territoriale.

Depuis la précédente Conférence d'examen du TNP, a ensuite souligné M. Lamamra, force est de constater que «malheureusement, peu de progrès ont été réalisés en matière de désarmement nucléaire». Parmi les engagements majeurs non honorés, a-t-il précisé, nous déplorons tout particulièrement le fait que la Conférence internationale de 2012 sur la création d'une zone exempte d'armes nucléaires et d'autres armes de destruction massive au Moyen-Orient n'ait pas pu se tenir. Les doctrines de dissuasion nucléaires, encore en vigueur, appuyées par des programmes de modernisation, sont très dangereuses en ce qu'elles sont porteuses de graves risques d'anéantissement de l'humanité, a en outre fait observer M. Lamamra, avant de rappeler que les trois conférences successives sur l'impact humanitaire des armes nucléaires ont clairement révélé la nature des dévastations susceptibles d'être infligées à notre monde. Dans ce contexte, le Ministre algérien a réitéré l'appel lancé par la Conférence ministérielle du Mouvement des pays non alignés, en mai dernier à Alger, en vue du lancement des négociations pour l'élimination complète des armes nucléaires dans le cadre d'un programme échelonné et selon un calendrier précis débouchant sur une convention opposable à tous. À cet égard, a insisté M. Lamamra, «les États dotés d'armes nucléaires sont instamment priés d'agir conformément à la responsabilité particulière qui est la leur pour donner effet concret aux dispositions de l'article VI du TNP relatif au désarmement nucléaire et conformément aux engagements souverains pris, en particulier celui de procéder à l'élimination totale de leurs arsenaux nucléaires». Dans un tel contexte, la conclusion d'un traité sur l'interdiction de la production des matières fissiles pour la fabrication d'armes nucléaires aurait tout son sens, tout comme serait alors possible une prise en charge appropriée de la question des stocks de matières fissiles, a souligné le Ministre algérien. L'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires serait une contribution certaine au désarmement et à la non-prolifération nucléaires, a-t-il également fait observer, lançant un appel pressant pour que ce traité soit ratifié par tous les États qui ne l'ont pas encore fait. L'Algérie estime en outre qu'une avancée significative en matière de garanties négatives de sécurité, à travers la conclusion d'un instrument international juridiquement contraignant, demeure impérative pour mettre à l'abri les États non dotés de l'arme nucléaire contre l'emploi ou la menace d'emploi de ces armes. Par ailleurs, il est de notre intérêt à tous d'assurer les conditions nécessaires pour une utilisation pacifique de l'espace, a ajouté M. Lamamra. Il a enfin salué l'initiative du Secrétaire général (par intérim) de la Conférence d'organiser un forum informel avec les acteurs de la société civile. L'impasse dans laquelle se trouve la Conférence nuit dangereusement à la crédibilité, à la pertinence et à l'utilité des travaux de cette instance et, partant, au multilatéralisme dans ce domaine vital pour l'humanité, a déclaré le Ministre algérien des affaires étrangères. Il a conclu en formant le vœu que la Neuvième Conférence d'examen du TNP, que l'Algérie aura le privilège de présider dans quelques semaines, puisse parvenir à des résultats tangibles à même de renforcer les trois piliers du TNP que sont le désarmement nucléaire, la non-prolifération nucléaire et l'utilisation pacifique de l'atome.

MME MARGOT WALLSTRÖM, Ministre des affaires étrangères de la Suède, a jugé inacceptable qu'aujourd'hui, subsistent quelque 16 000 armes nucléaires, alors que les bombes larguées sur Hiroshima et Nagasaki, qui, comparées aux bombes atomiques d'aujourd'hui, étaient simples et grossières, ont déjà tué 200 000 personnes. Il faut que toutes les armes nucléaires soient abolies, a souligné la Ministre. Elle s'est réjouie que trois conférences internationales aient mis l'accent sur les conséquences catastrophiques des armes nucléaires sur les hommes, les femmes et les enfants. Une perspective humanitaire sur les armes nucléaires nous aide à faire avancer le désarmement, a-t-elle affirmé. La Suède œuvrera activement avec toutes les parties prenantes, lors de la prochaine Conférence d'examen du TNP et au-delà, à la poursuite de mesures effectives visant à éliminer toutes les armes nucléaires, a-t-elle indiqué. Mme Wallström a annoncé que la Suède rejoignait aujourd'hui le Groupe de sortie de l'état d'alerte.

Mme Wallström s'est ensuite réjouie de la poursuite des discussions sur les systèmes autonomes létaux d'armes. Elle a par ailleurs attiré l'attention sur les bienfaits du retrait (nettoyage) de mines antipersonnel et de l'aide aux victimes menés à bien à travers le monde, avant d'affirmer que beaucoup reste néanmoins à faire. La Suède fera sa part et poursuivra son engagement actif et de longue date dans ce domaine, a indiqué la Ministre des affaires étrangères. Mme Wallström a d'autre part annoncé que la Suède aura bientôt démantelé toutes ses sous-munitions, conformément à ses obligations telles que découlant de la Convention interdisant ces armes inhumaines. La Ministre suédoise des affaires étrangères s'est dite profondément préoccupée par les informations faisant état de l'utilisation de sous-munitions contre des populations civiles au Soudan du Sud et en Syrie. L'usage de sous-munitions est inacceptable, a-t-elle insisté, avant d'appeler tous les acteurs à respecter strictement le droit humanitaire international. Mme Wallström a par ailleurs insisté sur l'importance particulière que revêtent l'adhésion universelle à la Convention sur les armes biologiques et le renforcement des mesures d'instauration de la confiance dans ce domaine. La Suède se réjouit que les discussions avancent sur la manière de mettre à jour les règles internationales concernant l'espace, a poursuivi la Ministre, avant de saluer le Code de conduite pour les activités dans l'espace. Enfin, Mme Wallström a salué l'initiative visant à tenir un Forum de la Conférence sur la société civile. Si la Conférence reste incapable de s'acquitter de son mandat, a-t-elle conclu, il nous faudra envisager d'autres lieux possibles pour faire avancer les travaux de désarmement – y compris l'Assemblée générale des Nations Unies.

M. BERT KOENDERS, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, a salué les nombreux progrès réalisés depuis la fin de la guerre froide, faisant observer que, par comparaison avec les années 1980, les stocks des arsenaux nucléaires ont été réduits de 80%. Ce succès peut être en partie porté au crédit de la Conférence, a-t-il souligné. Néanmoins, au regard des critères fixés par la première résolution de l'Assemblée générale en 1946, nous nous en sortons encore misérablement. Pour être juste, il convient de reconnaître que la situation géopolitique actuelle n'est pas propice au désarmement, a fait observer le Ministre néerlandais des affaires étrangères, soulignant que la Conférence n'opère pas dans le vide. Pour autant, les difficultés actuelles sur la scène internationale ne sont pas une raison pour abandonner le désarmement nucléaire, a-t-il affirmé. Plus que jamais dans les périodes troubles, il convient de maintenir ouverts les canaux de communication et aller de l'avant avec les négociations sur le désarmement, a-t-il souligné. Pour cela, il convient de disposer d'une Conférence du désarmement qui fonctionne bien. C'est pourquoi l'impasse actuelle à la Conférence est un sujet de grande préoccupation pour les Pays-Bas. Cette impasse est inacceptable et les Pays-Bas continueront d'œuvrer à la revitalisation de cette instance en se concentrant sur les domaines où il est possible de progresser: le programme de travail sur les quatre questions essentielles; l'élargissement de la composition de la Conférence; les méthodes de travail; et la participation de la société civile. Les Pays-Bas feront de leur mieux, en particulier durant leur présidence de la Conférence en juillet et août prochains. L'une des priorités essentielles des Pays-Bas dans le programme de travail est le lancement de négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles à des fins d'armement.

S'agissant de la Conférence d'examen du TNP qui s'ouvrira dans deux mois à New York, le Ministre néerlandais des affaires étrangères a affirmé qu'une Conférence couronnée de succès signifie une Conférence traitant des trois piliers du TNP: le désarmement, la non-prolifération et l'utilisation pacifique (de l'énergie nucléaire). Il convient de prendre acte de la frustration de la communauté du TNP face à la lenteur du désarmement, a poursuivi M. Koenders. Il existe un fossé croissant entre les ambitions et aspirations de nombreuses parties et les perspectives de progrès, a-t-il souligné, faisant observer que les Conférences d'Oslo, Nayarit et Vienne (sur l'impact humanitaires des armes nucléaires), auxquelles les Pays-Bas ont participé, ont reflété ces ambitions et aspirations. S'il convient certes de prendre en compte les considérations de sécurité et de stabilité, que certains négligent, ces facteurs ne doivent pas devenir une excuse pour l'inaction, a estimé le Ministre néerlandais. Tous les États, qu'ils soient parties au TNP ou se trouvent en dehors de ce Traité, peuvent prendre des mesures, comme promouvoir l'entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires, le lancement de négociations sur un traité d'interdiction de la production future de matières fissiles, ou encore la réduction du rôle des armes nucléaires dans les doctrines militaires et de sécurité. Les Pays-Bas visent le renforcement du régime du TNP et soutiennent la pleine application de ce Traité.

Le Ministre néerlandais a ensuite attiré l'attention sur la nécessité d'appliquer le Traité sur le commerce des armes, entré en vigueur en décembre dernier, et sur la première Conférence d'examen de la Convention sur les sous-munitions, qui se tiendra à Dubrovnik en septembre prochain. Malheureusement, plusieurs cas d'utilisation de sous-munitions ont été rapportés ces dernières années, a déploré M. Koenders. Le 3 février dernier, a-t-il précisé, la Mission spéciale d'observation de l'OSCE a rapporté l'utilisation apparente de sous-munitions à Luhansk, en Ukraine. Les Pays-Bas sont profondément préoccupés par ces informations et demandent à chacun, y compris à tous les gouvernements, de s'abstenir d'utiliser des sous-munitions et de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils contre les sous-munitions. Enfin, les Pays-Bas soutiennent les discussions en cours sur les systèmes d'armement létal autonomes. M. Koenders a conclu en annonçant que les Pays-Bas, soucieux de promouvoir la paix et la sécurité internationale, sont candidats à un siège non permanent au Conseil de sécurité pour la période 2017-2018.

M. EDUARDO ZUAIN, Vice-Ministre des affaires extérieures de l'Argentine, a souligné que le fait que la Conférence n'ait pas engagé la moindre négociation depuis près de vingt années ne peut que marginaliser cette instance. Il est évident que les problèmes auxquels est confrontée la Conférence pour reprendre des négociations se situent principalement en dehors de cette instance, a-t-il fait observer. La réactivation de la Conférence ne sera possible qu'avec la volonté politique des États, a-t-il souligné. L'Argentine appuie la continuité du Groupe de travail informel chargé de travailler à un programme de travail, a ajouté le Vice-Ministre des affaires étrangères. Ayant par ailleurs participé activement aux travaux du Groupe d'experts gouvernementaux sur un traité d'interdiction des matières fissiles à des fins d'armement nucléaire, l'Argentine réitère son souhait de voir ce traité devenir un pas fondamental vers la réalisation d'un monde exempt d'armes nucléaires, a indiqué M. Zuain. Il a également souligné que l'Argentine appuie le processus visant à faire prendre conscience des conséquences humanitaires de l'utilisation d'armes nucléaires et à mettre en évidence qu'il n'existe aucune possibilité éthique de possession légitime de ces armes. Traditionnellement, l'Argentine a toujours accordé un traitement prioritaire à la question du désarmement nucléaire, a rappelé le Vice-Ministre argentin.

M. Zuain a rappelé que l'Argentine maintient un vigoureux programme nucléaire à des fins exclusivement pacifiques, dans le cadre du plus strict respect des normes consacrées dans le TNP. Dans ce contexte, l'Argentine développe, emploie et exporte de la technologie nucléaire à des fins pacifiques, a-t-il ajouté. Il a ensuite fait part de la préoccupation de son pays de constater que les avancées de quatre décennies dans le domaine de la non-prolifération ne se sont pas accompagnées d'avancées équivalentes dans le domaine du désarmement nucléaire, 45 ans après l'entrée en vigueur du TNP. L'Argentine considère que la taille redoutable des arsenaux nucléaires existants constitue une menace pour la stabilité mondiale et la sécurité collective et porte atteinte aux efforts déployés dans le domaine de la non-prolifération des armes nucléaires. Aussi, l'Argentine réitère-t-elle son soutien à toute mesure qui promeut l'élimination complète des armes nucléaires sur la base des principes de transparence, d'irréversibilité et de vérification des mesures de désarmement nucléaire. Nous nous trouvons encore à un stade très précaire en termes d'application du Traité de Tlatelolco (qui interdit totalement la présence d'armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes), en raison des déclarations interprétatives au Protocole additionnel II qui engage les signataires à ne pas introduire d'armes nucléaires sur le territoire couvert par ce Traité, a par ailleurs déclaré M. Zuain. Cette application précaire (du Traité de Tlatelolco) se voit également défiée par la présence militaire illégitime, disproportionnée et injustifiée, du Royaume-Uni dans les îles Malouines, dans les îles de Georgie du Sud et Sandwich du Sud et les espaces qui entourent toutes ces îles, incluant le déplacement dans l'Atlantique Sud de sous-marins ayant la capacité de porter des armements nucléaires dans la zone dénucléarisée établie par le Traité de Tlatelolco. Cette zone comprend une grande partie de territoire national argentin illégitimement occupé par le Royaume-Uni et de ce fait faisant l'objet d'un différend de souveraineté reconnu par les Nations Unies, a rappelé M. Zuain. Le silence du Royaume-Uni sur cette question résulte simplement du fait qu'il n'est pas en mesure d'expliquer sa présence militaire et nucléaire dans l'Atlantique Sud, a insisté le Vice-Ministre argentin.

M. SERGIY KYSLYTSYA, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Ukraine, a fait observer qu'en ce moment, beaucoup d'attention continue d'être concentrée sur la situation dans la région du Donbass dans l'est de l'Ukraine et en Crimée occupée. À la veille du 70ème anniversaire de la fin de la Seconde guerre mondiale, l'ordre mondial subit une attaque majeure, a-t-il ajouté. «Une guerre hybride sur l'Ukraine a été déclenchée par un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies», lequel a pour responsabilité particulière de maintenir la paix et la sécurité internationales, a souligné M. Kyslytsya. L'Ukraine, pour sa part, respecte la paix, a besoin de la paix et s'efforce d'œuvrer à la paix, a-t-il indiqué. Pleinement engagée en faveur de la mise en œuvre des Accords de Minsk de septembre dernier et de février 2015, l'Ukraine considère leur application comme le seul moyen de parvenir à un règlement pacifique de la situation dans le Donbass, a déclaré le Vice-Ministre des affaires étrangères. Jeudi dernier, 26 février, l'Ukraine a commencé à retirer ses armes lourdes de la ligne de contact, sous contrôle et vérification de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a-t-il poursuivi. Ayant entériné la Déclaration des dirigeants de l'Ukraine, de la France, de l'Allemagne et de la Fédération de Russie et le Paquet de mesures, l'Ukraine s'acquitte rapidement de ses obligations et attend que la partie russe exécute elle aussi ses obligations en totalité, sans aucun délai ni réserve ni interprétation ambiguë ou autre demande additionnelle ou ultimatum. Malheureusement, le fragile cessez-le-feu est en danger en raison d'attaques et de provocations constantes de la part de terroristes soutenus par les Russes. Aussi, avons-nous engagé des consultations avec les Nations Unies en vue du déploiement d'une opération de maintien de la paix en Ukraine, a indiqué M. Kyslytsya; il pourrait s'agir là d'un instrument indispensable pour aider en fin de compte à appliquer les Accords de Minsk et ramener la paix, a-t-il ajouté. L'Ukraine apprécie la solidarité mondiale et compte de nouvelles manifestations de soutien pour assurer la paix, la stabilité et la prospérité de sa nation.

Ayant fait le pas inédit de renoncer volontairement à son arsenal nucléaire, l'Ukraine croit fermement que le désarmement nucléaire complet et irréversible est la seule garantie de protection de l'humanité contre les conséquences mortelles de l'utilisation possible d'armes nucléaires. Toutefois, cet objectif ne saurait être atteint sur une courte période et requiert donc une approche sur le long terme, a souligné M. Kyslytsya, plaidant pour la mise en place d'un système d'instruments se renforçant mutuellement aux fins de la réalisation et du maintien d'un monde exempt d'armes nucléaires. «La position de la Fédération de Russie concernant l'éventuel déploiement d'armes nucléaires sur le territoire de la Crimée temporairement occupée est très irresponsable et destructrice», a déclaré le Vice-Ministre ukrainien. De plus, en contravention avec les Statuts de l'AIEA, la partie russe a saisi les installations et matières nucléaires de l'Ukraine situées en Crimée. Les actions de la Fédération de Russie en tant qu'État nucléaire constituent une menace directe pour le régime international établi par le TNP auquel l'Ukraine a adhéré en tant qu'État non possesseur d'arme nucléaire. L'attitude agressive actuelle russe vis-à-vis de l'Ukraine et d'autres États amoureux de la paix sape de manière significative la sécurité internationale et provoque la course aux armements au niveau mondial, a insisté M. Kyslytsya. Il a enfin attiré l'attention sur l'importance vitale d'une entrée en vigueur du traité d'interdiction complète des essais nucléaires et sur la priorité qu'accorde son pays à la fourniture de garanties négatives de sécurité aux États non dotés de l'arme nucléaire. Face aux risques croissants de prolifération des armes de destruction massive, un traité d'interdiction de la production de matières fissiles reste une priorité de premier plan, a ajouté le Vice-Ministre ukrainien, plaidant également pour une prévention de la course aux armements dans l'espace.

Autres déclarations

Les États-Unis ont souhaité répondre à un certain nombre d'observations faites ce matin par le Ministre russe des affaires étrangères concernant les missiles de défense balistiques. La Fédération de Russie a toujours refusé les offres de coopération avancées dans ce domaine par les États-Unis, a déclaré la délégation des États-Unis. Nos missiles de défense ne sont pas pointés sur la Fédération de Russie, a-t-elle en outre souligné. Nous n'accepterons aucune contrainte qui nuirait à nos capacités à nous défendre et ceci vaut aussi pour nos alliés et partenaires, ont par ailleurs indiqué les États-Unis. Quant à la prévention de la course aux armements dans l'espace, les États-Unis ont rappelé avoir proclamé en 2010 une politique spatiale nationale et clairement dit être prêts à mener des discussions équitables en la matière dans l'intérêt des États-Unis et de leurs alliés; or, la proposition russo-chinoise ne présente pas ces caractéristiques.

Le Royaume-Uni a souhaité répondre à l'intervention faite ce matin par le Vice-Ministre argentin des affaires étrangères en soulignant notamment que le Royaume-Uni n'a jamais brandi la menace d'une utilisation de l'arme nucléaire. Le Royaume-Uni a rappelé avoir signé le Traité de Tlatelolco en 1969. Il est regrettable que l'Argentine émette des prétentions non fondées quant à la présence militaire britannique dans l'Océan atlantique, a poursuivi la délégation britannique. Le Royaume-Uni maintient ses positions concernant les Falklands, a-t-elle indiqué. Le Royaume-Uni n'a aucun doute quant à sa souveraineté sur les Falklands et est attaché au principe d'autodétermination, qui est sous-jacent à la position du pays concernant ces îles, a insisté la délégation. Il ne saurait y avoir d'évolution à ce sujet tant que la population elle-même n'en émettra pas le vœu, a-t-elle affirmé.

«Nous ne sommes pas partie au conflit au Donbass», a assuré la Fédération de Russie en réponse à l'intervention faite ce matin par le Vice-Ministre ukrainien des affaires étrangères. Parler de «guerre hybride» qui se serait déclenchée sur ce territoire est donc une accusation sans fondement, a insisté la délégation russe. La Fédération de Russie invite toutes les parties à respecter les accords de Minsk II. Nous ferons tout pour que le retrait des forces de la première ligne (ligne de contact) s'accomplisse sous le contrôle de l'OSCE, a assuré la délégation russe. Quant au prétendu appui de la Fédération de Russie à des terroristes, la Fédération de Russie s'inscrit en faux contre de telles accusations; de plus, il ne s'agit pas de terroristes mais de citoyens ukrainiens auxquels on refuse le droit de s'exprimer, a déclaré la délégation russe.

Les États-Unis ont souhaité répondre aux propos tenus ce matin par le Ministre russe des affaires étrangères en rejetant catégoriquement l'affirmation selon laquelle les États-Unis violent le TNP dans le contexte d'un «partage nucléaire».


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

DC15/013F