Aller au contenu principal

LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L'ORGANISATION POUR L'INTERDICTION DES ARMES NUCLÉAIRES EN AMÉRIQUE LATINE ET DANS LES CARAÏBES

Compte rendu de séance
Le Maroc assume la présidence de la Conférence

La Conférence du désarmement a entendu ce matin le Secrétaire général de l'Organisation pour l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), M. Luiz Filipe de Macedo Soares, ainsi que l'Ambassadeur du Maroc, M. Mohamed Auajjar, qui assume la présidence de la Conférence à partir de cette semaine. Les États-Unis, le Brésil et l'Inde ont également pris la parole.

Soulignant que c'était la première fois depuis quatre ans que le Secrétaire général de l'OPANAL s'adressait à la Conférence du désarmement, M. Soares s'est attaché à démontrer le caractère unique de son organisation, à la fois seul organe régional de suivi d'un traité instituant un zone exempte d'armes nucléaires actuellement en place et instance officiellement désignée par la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) comme «l'organe spécialisé de la région» en matière de désarmement nucléaire. M. Soares a par ailleurs attiré l'attention sur la tenue prochaine à New York de la troisième Conférence des États parties et signataires aux traités établissant des zones exemptes d'armes nucléaires et de la Mongolie, qui permettra à ces États de discuter de questions d'intérêt commun, dont l'une est sans doute la création d'une zone exempte d'armes nucléaires et d'armes de destruction massive au Moyen-Orient. M. Soares a souhaité que la conférence de New York ne recule pas par rapport au consensus obtenu en 2010 sur cette question, mais resté sans suite. Le Brésil est intervenu au sujet de l'allocution du Secrétaire général de l'OPANAL.

Le Président de la Conférence du désarmement a souligné que, dans un monde globalisé, la sécurité d'un pays ou d'une région est plus que jamais intimement liée à celle du reste du monde. Il est donc impératif sortir la Conférence de son «hibernation prolongée». L'Ambassadeur Auajjar a précisé qu'il entendait poursuivre le travail entamé par ses prédécesseurs pour organiser des consultations informelles. Il présentera des propositions sur le programme de travail de la Conférence quand il estimera que celles-ci disposent d'un soutien suffisant et envisage d'établir un plan de travail pour la seconde partie de la session, qui commencera le 25 mai. À cet égard, l'Inde a suggéré la convocation, la semaine prochaine, d'une réunion informelle pour discuter des points sur lesquelles les délégations ne sont pas très loin d'un accord.

Au cours de la séance de ce matin, le Secrétariat de la Conférence a rappelé la tenue, le jeudi 19 mars, du premier Forum Conférence du désarmement - société civile, organisé à l'initiative du Secrétaire général par intérim de la Conférence, M. Michael Møller. Les États-Unis sont intervenus à cet égard pour saluer cette initiative. Ils ont par ailleurs regretté la décision annoncée la semaine dernière par la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté de ne plus suivre les travaux de la Conférence du désarmement et espèrent qu'elle reviendra sur cette décision.


La prochaine séance plénière de la Conférence se tiendra mardi prochain, 24 mars, à 10 heures, alors que se termine première partie de la session de 2015 de la Conférence du désarmement.


Allocution du Secrétaire général de l'OPANAL

M. LUIZ FILIPE DE MACEDO SOARES, Secrétaire général de l'Organisation pour l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (OPANAL), a déclaré que la Conférence du désarmement avait œuvré avec constance et obtenu des résultats pendant la première moitié de de son existence. Durant la deuxième moitié en revanche, elle n'a en revanche pu aboutir à des résultats, malgré les efforts patients de ses diplomates. Des progrès importants ne sont pourtant pas impossibles, a estimé M. Soares, et les États membres et l'Assemblée générale peuvent sortir de l'impasse actuelle. Mais en attendant, blâmer la Conférence du désarmement ne mène à rien.

L'Ambassadeur a souligné que l'on n'avait pas assisté à une multiplication des institutions mondiales ou régionales dans le domaine du désarmement nucléaire comme ce fut le cas dans d'autres domaines. Lors des conférences de révision du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, le nombre des organisations internationales accréditées est relativement limité par comparaison avec les instances de négociation dans d'autres domaines. En outre, celles qui sont accréditées ne sont même pas des organisations internationales spécialisées dans le désarmement. L'OPANAL est véritablement une exception à cet égard et il est donc normal que, de temps à autre, le Secrétaire général de cette agence se présente devant la Conférence, ce qui n'avait pas été le cas depuis quatre ans. Le Secrétaire général a ajouté que neuf seulement des 33 membres de l'OPANAL sont membres de la Conférence du désarmement, une proportion nettement plus faible que dans d'autres régions du monde.

M. Soares a rappelé la tenue en janvier dernier du troisième sommet des chefs d'États et de Gouvernement de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes. Lors des deux derniers sommets de ce type, la CELAC a adopté des déclarations sur le désarmement nucléaire et identifié l'OPANAL comme «l'organe spécialisé de la région» en la matière. Ce qui signifie que la CELAC attend de l'OPANAL qu'elle promeuve des positions communes et des actions conjointes en matière de désarmement nucléaire, a expliqué M. Soares. Il a en outre fait observer que les déclarations de la CELAC comme de l'OPANAL sur le désarmement nucléaires étaient remarquables du fait qu'aucune autre région du monde n'accorde une telle attention au plus haut niveau à ces questions.

Le Secrétaire général de l'OPANAL a souligné que toute utilisation ou menace d'utilisation de l'arme nucléaire est considérée comme une violation de la Charte, une violation du droit international et du droit international humanitaire et un crime contre l'humanité. Il faut adopter au plus vite un instrument international contraignant sur les garanties négatives de sécurité. Il est essentiel que les États dotés d'armes nucléaires respectent leurs engagements au titre de l'article VI du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. La négociation d'un traité universel et contraignant d'interdiction complète des armes nucléaires ne peut être reportée plus longtemps. Il est urgent de réunir une conférence internationale pour la mise en place d'une zone exempte d'armes nucléaires et de destruction massive au Moyen-Orient. Il est essentiel que les États dotés d'armes nucléaires suppriment le rôle assigné à ces armes dans leur doctrine militaire et que les États qui bénéficient de politiques de dissuasion nucléaire dans le cadre d'alliances adoptent des politiques qui leur permettent de s'en passer. L'amélioration qualitative des armes nucléaires doit cesser, le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires doit rapidement entrer en vigueur et les campagnes d'information sur les conséquences humanitaires d'une guerre nucléaire doivent se poursuivre, de même que les programmes d'éducation en faveur du désarmement nucléaire.

L'Ambassadeur a ensuite évoqué les préparatifs de la troisième Conférence des États parties et signataires aux traités établissant des zones exemptes d'armes nucléaires et de la Mongolie, qui aura lieu à New York le 24 avril. Il a rappelé que, des quatre traités qui ont créé des zones exemptes d'armes nucléaires, seul le traité de Tlatelolco a prévu et effectivement mis en place une institution spécifiquement chargée de veiller à la mise en œuvre des disposition du traité. À ce jour, l'OPANAL reste donc un modèle unique et une institution dotée de la personnalité juridique aux termes du droit international. Sans l'OPANAL, la zone exempte d'armes nucléaires de l'Amérique latine et des Caraïbes est juridiquement valide mais incomplète en termes de fonctionnement. En revanche, du fait qu'il n'existe pas d'équivalent à l'OPANAL dans les autres zones exemptes d'armes nucléaires, les conférences comme celle se tiendra prochainement à New York servent de plates-formes pour les États parties aux autres arrangements régionaux pour faire progresser les positions communes de leur région respective. Rappelant que 115 États participeront à la conférence de New York, parties aux Traités de Tlatelolco, Bangkok, Pelinbada, Rarotongo et de l'Asie centrale, auxquels s'ajoute la Mongolie, M. Soares a estimé que cette réunion pouvait juridiquement augmenter les chances d'un consensus lors de la neuvième conférence de révision du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, qui s'ouvrira trois jours plus tard.

Ces deux réunions auront sans doute un important sujet d'intérêt commun: la création d'une zone exempte d'armes nucléaires et d'armes de destruction massive au Moyen-Orient, a poursuivi M. Soares. Il a souhaité que la Conférence ne recule pas par rapport au consensus obtenu en 2010 mais resté sans suite et qu'au contraire un nouvel esprit surgisse pour aboutir à des mesures concrètes. Il a également cité comme questions d'intérêt commun la coopération entre les différentes zones exemptes, ou encore la participation, par le biais de Protocoles, d'États n'appartenant pas aux régions concernées.

Déclaration du nouveau Président

M. MOHAMED AUAJJAR (Maroc), Président de la Conférence du désarmement, a déclaré que le Maroc attachait une grande importance à la Conférence en tant qu'unique instance multilatérale pour les négociations sur le désarmement. Il a rappelé qu'elle avait connu des succès historiques qui restent hélas en deçà des attentes de la communauté internationale, avant de déplorer l'état «d'hibernation prolongée» dont souffre aujourd'hui cette instance, malgré l'espoir qu'avait suscité en 2009 l'adoption d'un nouveau programme de travail, qu'elle s'est ensuite révélée impuissante à mettre en œuvre.

Dans un monde globalisé, la sécurité d'un pays ou d'une région demeure plus que jamais intimement liée à celle du reste du monde. Le Maroc reste attaché à la préservation du rôle de la Conférence du désarmement en tant qu'unique instance de négociation multilatérale sur le désarmement. Pour y parvenir, il n'y a pas de solution magique, mais une volonté politique. La Conférence du désarmement étant le reflet de la volonté des États membres, il est impératif que toutes les bonnes volontés de ces derniers convergent vers la mise en œuvre du mandat. Les États doivent faire preuve de souplesse et de responsabilité. Pour l'Ambassadeur, la reprise rapide des négociations au soin de la Conférence du désarmement demeure une exigence internationale. La Conférence doit innover dans la recherche de solutions de compromis et adopter une approche globale et intégrée qui lui permette de s'acquitter de son mandat.

Le Maroc reste convaincu que le désarmement est la meilleure garantie contre les dangers de la prolifération des armes de destruction massive. Il partage la conviction de la majorité écrasante des pays selon lesquelles les armes nucléaires ne doivent plus jamais être utilisées. Il considère que la prolifération du terrorisme et le recours par les terroristes à des armes de destruction massive sont des menaces grandissantes, réelles et quotidiennes. Cette situation requiert que les États membres redoublent d'efforts pour avancer sur les questions de non-prolifération, de contrôle des armes et de désarmement. L'impasse actuelle ne fait que favoriser la prolifération nucléaire.

L'Ambassadeur Auajjar a rappelé que la présidence mongole avait fait circuler trois document de travail portant sur le renouvellement du mandat du groupe de travail informel chargé d'élaborer un programme de travail, sur le calendrier des activités de la Conférence du désarmement pour 2015 et sur la création d'un groupe de travail informel chargé d'examiner les méthodes de travail de la Conférence. La Présidence marocaine entend poursuivre le travail entamé par la présidence mongole, y compris dans le cadre de consultations informelles. Pendant ce processus, la présidence tiendra compte des vues et propositions constructives des États membres dans la perspective de trouver un terrain d'entente et ne compte présenter de propositions à la Conférence du désarmement que lorsqu'elle estimera qu'elles disposent d'un soutien suffisant. M. Auajjar a précisé qu'en fonction des résultats obtenus durant la première partie de sa présidence, il établirait un plan de travail pour la seconde partie, qui commencera le 25 mai.

Débat

Les États-Unis ont pris note de la décision annoncée le 10 mars par la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté de ne plus suivre les travaux de la Conférence du désarmement. Les États-Unis regrettent cette décision et sont eux aussi frustrés par l'incapacité de la Conférence du désarmement à reprendre ses travaux. Dans le cadre de leur politique nationale, les États-Unis soutiennent l'engagement de la société civile et reconnaissent sa contribution dans de multiples domaines. Ils espèrent donc que la Ligue décidera à un moment ou un autre de revenir suivre les travaux de la Conférence. Ils saluent en outre l'initiative du Secrétaire général par intérim de la Conférence d'organiser un Forum Conférence du désarmement - Société civile le 19 mars pour discuter des moyens de renforcer l'engagement de la Conférence à collaborer avec la société civile.

Le Brésil a estimé que le message adressé par le Secrétaire général de l'OPANAL témoignait d'un effort considérable de coordination des pays de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes en matière de désarmement. Il a regretté l'absence, dans le cadre du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, d'une organisation permanente comparable à celle que joue l'OPANAL pour le traité de Tlatelolco.

L'Inde a rappelé que la Conférence du désarmement en était arrivée à l'avant dernière semaine de travaux de la présente session. Elle a promis son soutien au Président, jugeant important que la Conférence puisse dresser un bilan durant l'intersession. L'Inde, qui a assisté aux séances plénières organisées par la Mongolie sur les quatre points essentiels de l'ordre du jour, constate en effet que les délégations qui mettent en question la validité même des travaux de la Conférence sont restées très silencieuses lors de ces travaux. Elle suggère la convocation la semaine prochaine d'une réunion informelle pour discuter des points sur lesquelles les délégations ne sont pas très loin d'un accord, dans la perspective d'un tel bilan.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

DC15/022F