Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA COLOMBIE
Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de la Colombie sur les mesures qu'elle a prises pour appliquer les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Le rapport a été présenté par la Directrice de l'Institut colombien de protection de la famille, Mme Cristina Plazas Michelsen, qui a souligné que la Colombie avance vers la paix dans le cadre du dialogue qui se déroule actuellement à La Havane entre le Gouvernement et les FARC. Alors que le pays approche de la fin du conflit, le Plan de développement proposé par le Président Juan Manuel Santos pour les quatre prochaines années est structuré autour de trois piliers au centre desquels figure la protection de l'enfance et de l'adolescence: paix, équité et éducation. La Colombie dispose d'une législation et d'une jurisprudence protectrices de l'enfance, de l'adolescence et de la jeunesse, qui se fondent sur la reconnaissance constitutionnelle de la primauté des droits de l'enfant Le pays dispose notamment d'un Code de l'enfance et de l'adolescence - qui incorpore les obligations découlant de la Convention de l'ONU - ainsi que d'un Système national de protection de la famille. En outre, l'investissement en faveur de l'enfance et de l'adolescence est passé de 1,3 milliard de dollars en 2011 à 2 milliards de dollars en 2014. Le pays compte également une Stratégie nationale de prévention et d'éradication du travail infantile, ainsi que des plans nationaux de lutte contre la traite de personnes et de prévention et d'éradication de l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Le chef de la délégation a par ailleurs fait valoir qu'au cours des quatre dernières années, quelque 2,4 millions de Colombiens sont sortis de la pauvreté et 1,5 million de la pauvreté extrême. L'éducation publique est gratuite depuis 2011. Le grand défi pour le pays reste de résoudre les inégalités entre régions et entre populations, en particulier celles dont souffrent les plus vulnérables – peuples autochtones, communautés afrocolombiennes, victimes du conflit, communautés frontalières et rurales.
La délégation colombienne était également composée du Vice-Ministre des relations de travail, M. Enrique Borda Villegas; du Représentant permanent de la Colombie auprès des Nations Unies à Genève, M. Juan José Quintana; ainsi que de représentants du Bureau du Procureur général de la nation, de l'Unité de prise en charge et de réparation des victimes, du Ministère des relations extérieures, de la Commission intersectorielle de la petite enfance, du Système national de protection de la famille et du Conseil présidentiel pour les droits de l'homme. La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, du renforcement des capacités des institutions chargées de l'enfance; de la lutte contre le travail des enfants; de la protection des groupes les plus vulnérables, en particulier des populations autochtones et d'ascendance africaine; des personnes déplacées et de la question des victimes du conflit armé et des réparations; des questions d'éducation et de santé, en particulier s'agissant de l'incidence des grossesses d'adolescentes. Ces dernières constituent l'un des plus grands problèmes sociaux auxquels le pays soit confronté, a reconnu la délégation.
La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Colombie, Mme Kirsten Sandberg, a salué l'adoption en 2006 du Code de l'enfance et de l'adolescence, mais s'est inquiétée quant à sa mise en œuvre. Elle a par ailleurs attiré l'attention sur le problème de l'extraction minière à laquelle procèdent certaines entreprises, forçant au déplacement de communautés entières, ce qui engendre des violations des droits de l'enfant. Elle s'est également inquiétée de la violence qui frappe les enfants en Colombie, notamment dans le contexte des phénomènes de bandes, et de la responsabilité directe ou indirecte d'agents de l'État dans des cas de décès d'adolescents.
Le Comité rendra publiques à la fin des travaux, le 30 janvier prochain, des observations finales sur chacun des rapports examinés au cours de la session.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen de rapports présentés par la Suisse (CRC/C/CHE/2-4 et CRC/C/OPSC/CHE/1 - rez-de-chaussée du Palais Wilson) et poursuivra l'examen des rapports de l'Iraq (premier étage).
Présentation du rapport de la Colombie
Le Comité est saisi du rapport périodique de la Colombie (CRC/C/COL/4-5, ainsi que de ses réponses (CRC/C/COL/Q/4-5/Add.1) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (CRC/C/COL/Q/4-5).
MME CRISTINA PLAZAS MICHELSEN, Directrice de l'Institut colombien de protection de la famille (ICBF, selon l'acronyme espagnol), a rappelé que son pays compte quelque 15,5 millions d'enfants dont 5 millions ont moins de cinq ans. Elle a souligné que la Colombie avançait vers la paix alors que le monde entier a les yeux rivés vers le dialogue de La Havane (dialogue pour la paix en Colombie). Nous vivons un moment historique où, plus que jamais, la paix est une possibilité réelle, a-t-elle insisté. Alors qu'avec espoir le pays se rapproche de la fin du conflit, le Plan de développement proposé par le Président Juan Manuel Santos pour les quatre prochaines années est structuré autour de trois piliers au centre desquels figure la protection intégrale de l'enfance et de l'adolescence: paix, équité et éducation.
La Colombie dispose d'une législation et d'une jurisprudence protectrices de l'enfance, de l'adolescence et de la jeunesse, qui se fondent sur la reconnaissance constitutionnelle de la primauté des droits de l'enfant, a poursuivi Mme Plazas Michelsen. Le pays dispose notamment d'un code de l'enfance et de l'adolescence, approuvé en 2006, qui incorpore les obligations découlant de la Convention et d'autres instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme, a-t-elle précisé. Elle a également attiré l'attention sur le Système national de protection de la famille.
Le chef de la délégation a fait valoir que l'investissement en faveur de l'enfance et de l'adolescence était passé de 1,3 milliard de dollars des États-Unis en 2011 à 2 milliards de dollars en 2014. En outre, le Bureau du Procureur général de la nation assure le suivi des droits de l'enfant et la Colombie, conformément à ce que lui avait recommandé le Comité, a mis sur pied un Système unifié d'information sur l'enfance comportant 53 indicateurs de jouissance effective des droits, a également souligné Mme Plazas Michelsen. La Politique de protection intégrale de la petite enfance cherche à créer les conditions favorables au développement des moins de six ans.
S'agissant de l'enseignement supérieur, Mme Plazas Michelsen a notamment fait valoir que le Gouvernement colombien avait offert 10 000 bourses à des jeunes ayant de faibles ressources afin qu'ils puissent suivre des études dans les meilleures universités du pays. Elle a en outre attiré l'attention sur l'ambitieux programme d'accès aux nouvelles technologies développé par les autorités, grâce auquel 777 des 1102 municipalités que compte le pays sont connectées par fibre optique. Elle a aussi fait valoir que la connexion des foyers colombiens a augmenté de 90% au cours des quatre dernières années.
Évoquant d'autres politiques ayant une incidence sur la garantie des droits des enfants, Mme Plazas Michelsen a fait état de la politique concernant les femmes et les questions de genre, ainsi que de la politique de lutte contre la discrimination qui s'efforce de promouvoir la valorisation des différences et la non-discrimination fondée sur le sexe, le handicap, l'orientation sexuelle, le culte ou la condition économique. Dans le cadre de la politique de santé génésique, une stratégie globale a été élaborée en vue de réduire les grossesses adolescentes en tenant compte des aspects sociaux, économiques et culturels associés à ce phénomène.
Mme Plazas Michelsen a également rendu compte de la Stratégie nationale de prévention et d'éradication du travail infantile et des plans nationaux de lutte contre la traite de personnes et de prévention et d'éradication de l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. La Colombie compte plus d'une soixantaine de centres de prise en charge pénale pour les plaintes et enquêtes relatives à des délits de violence sexuelle et intrafamiliale, a-t-elle fait valoir.
S'agissant des questions de logement, la Directrice de l'Institut colombien de protection de la famille a indiqué que l'État colombien avait fourni une centaine de milliers de logements gratuits à des familles vulnérables.
Insistant sur les résultats engrangés grâce aux efforts déployés par le pays, Mme Plazas Michelsen a notamment indiqué qu'au cours des quatre dernières années écoulées, quelque 2,4 millions de Colombiens sont sortis de la pauvreté et 1,5 million de la pauvreté extrême. En matière d'éradication de la faim, le pays a atteint l'objectif de réduire à moins de 10% le taux de déficit pondéral à la naissance, a-t-elle fait valoir. Elle a aussi attiré l'attention sur la réduction du taux de mortalité des enfants de moins d'un an. En matière d'éducation, le pays approche du taux de 100% de scolarisation pour l'éducation de base, et se situe autour de 93% au niveau du secondaire. L'éducation publique est gratuite depuis 2011.
Pour autant, a reconnu le chef de délégation, le grand défi reste de résoudre les inégalités entre régions et entre populations, en particulier celles dont souffrent les plus vulnérables – peuples autochtones, communautés afrocolombiennes, victimes du conflit, communautés frontalières et rurales. Le taux de pauvreté extrême est 3,2 fois plus élevé en zone rurale qu'en zone urbaine et il est supérieur à 25% dans les trois départements où vivent majoritairement des autochtones et des personnes d'ascendance africaine. Surmonter les inégalités doit-il constituer le premier pilier de la paix, a déclaré Mme Plazas Michelsen, ajoutant que la réconciliation était un autre pilier pour parvenir à une paix stable et durable. Elle a aussi attiré l'attention sur l'application, depuis 2012, d'une loi sur les victimes et pour la restitution des terres.
Les enfants ont été gravement affectés par le conflit armé, à travers le recrutement forcé, le déplacement, les violences et l'exploitation sexuelles, l'orphelinat, ou encore les handicaps induits par les mines antipersonnel et autres munitions non explosées. C'est pourquoi l'État n'a ménagé aucun effort pour apporter une attention globale, spécialisée et différenciée à ces enfants, afin d'assurer le rétablissement de leurs droits et une réparation intégrale. À cet égard, quelque 30 000 enfants ont obtenu réparation ces dernières années. En outre, depuis 1999, l'État a pris en charge plus de 5600 adolescents victimes de recrutement qui ont été dissociés des groupes armés organisés agissant en marge de la loi.
Il n'en demeure pas moins que les autorités colombiennes sont conscientes que la réconciliation ne pourra être que le fruit de transformations impliquant un changement culturel fondé sur la garantie et la mise en œuvre effective des droits de l'homme, a affirmé Mme Plazas Michelsen. Au centre de ce défi figure le renforcement des capacités des familles et des communautés à protéger les enfants et adolescents contre toute forme de violence et d'exploitation, a-t-elle souligné. Étant donné que l'impunité est une forme de violence, la Bureau du Procureur général de la nation a récemment été réformé afin d'élargir et renforcer ses capacités techniques et opérationnelles sur l'ensemble du territoire national pour le contrôle et la surveillance des agents de l'État.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
MME KIRSTEN SANDBERG, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Colombie et Présidente du Comité, a salué l'adoption en 2006 du Code de l'enfance et de l'adolescence, mais s'est inquiétée d'informations laissant entendre que la mise en œuvre de ce Code serait un problème. Qu'en est-il de l'adoption de lois-cadres permettant d'assurer la mise en œuvre effective de cette législation, a-t-elle demandé?
Mme Sandberg a par ailleurs souhaité savoir si le Plan national de développement 2010-2014 avait fait l'objet d'une évaluation et, le cas échéant, quels ont été les résultats de cette évaluation. Elle a en outre fait état d'informations laissant apparaître un manque de capacités dont pâtiraient les institutions agissant dans le domaine de l'enfance et qui se répercuterait sur la coordination de l'action en la matière.
Entre 2003 et 2010, la part du budget total consacré à l'enfance a augmenté, notamment du fait de la hausse des budgets de l'éducation et de la santé; mais elle a ensuite baissé pour retomber au même niveau qu'en 2003, a fait observer la rapporteuse, qui a voulu connaître les raisons de cette baisse.
Mme Sandberg s'est en outre enquise de la formation des travailleurs sociaux et autres personnels chargés de la protection de l'enfance suite à l'adoption du Code de l'enfance et de l'adolescence.
La rapporteuse a par ailleurs attiré l'attention du Comité sur le problème de l'extraction minière à laquelle procèdent certaines entreprises, forçant au déplacement des communautés entières, ce qui engendre des violations des droits de l'enfant.
Mme Sandberg s'est ensuite enquise de l'âge minimum du mariage en vigueur en Colombie, rappelant que le pays s'était vu recommander de porter cet âge à 18 ans.
Des informations parvenues au Comité indiquent que des fonctionnaires publics ou des institutions gouvernementales aient une responsabilité directe ou indirecte dans un tiers des décès d'enfants âgés de 15 à 17 ans, a poursuivi la rapporteuse. Il semblerait en outre que la violence dans les rues soit courante, en particulier entre bandes, et que les enfants soient les premières victimes de ce phénomène, a ajouté Mme Sandberg.
Les enfants victimes de violence domestique, en particulier sexuelle, sont souvent séparés de leur famille sans que l'auteur de la violence ne soit puni, a par ailleurs déploré la rapporteuse. D'après certaines informations, un grand nombre de jeunes filles victimes de violence intrafamiliale ou domestique sont précisément des jeunes filles qui exercent un travail domestique, a-t-elle en outre fait observer.
Mme Sandberg a souhaité savoir si les autorités colombiennes avaient l'intention d'abroger la disposition du Code civil qui prévoit le droit de corriger un enfant, en dépit de l'interdiction des châtiments corporels par la Convention.
La rapporteuse s'est enfin inquiétée de la pratique de la tauromachie en milieu scolaire et a demandé si les autorités avaient l'intention d'interdire de telles pratiques.
M. WANDERLINO NOGUEIRA NETO, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport colombien, a relevé que si le principe de non-discrimination avait été intégré dans la législation colombienne, toutes les mesures en la matière - notamment à l'intention des enfants autochtones et des enfants d'ascendance africaine - laissent encore à désirer. Dans ce contexte, l'expert a voulu savoir quelles mesures sont prises pour placer le sort de ces populations qui sont victimes de discrimination au cœur des priorités de l'État, notamment des mesures de discrimination positive. Pour les populations autochtones, la question de l'état civil et de l'enregistrement des naissances est primordiale, a rappelé le corapporteur. Qu'en est-il du programme national d'enseignement bilingue et du taux d'analphabétisme au sein de la population autochtone, a par ailleurs demandé M. Nogueira Neto? Il a en outre fait observer que les enfants de ces communautés sont particulièrement touchées par la malnutrition.
M. Nogueira Neto s'est félicitée que le principe d'intérêt supérieur de l'enfant a été consacré dans la Constitution du pays, laquelle prévoit que les droits de l'enfant doivent prévaloir sur les droits de tout autre citoyen. Mais qu'en est-il de l'application de ce principe dans la réalité, notamment dans les tribunaux, a-t-il demandé?
Les enfants et les jeunes sont souvent exclus de la société, a poursuivi le corapporteur, attirant l'attention sur les nombreuses inégalités dans le pays, en particulier en ce qui concerne la répartition des richesses. M. Nogueira Neto a dénoncé la forte culture de l'impunité qui règne dans le pays et qui fait que souvent, les femmes et les jeunes filles sont elles aussi victimes de ces violences et inégalités. Dans ce contexte, qu'est-ce qui est fait pour protéger les enfants contre toutes sortes de délits et contre toutes les formes d'exploitation, a demandé le corapporteur? Est-il vrai que les enfants âgés de 10 à 14 ans sont les principales victimes de violence sexuelle, a-t-il voulu savoir?
Parmi les autres membres du Comité, une experte a souligné combien la violence est une grande préoccupation en Colombie, à tous égards. Elle a souhaité connaître les mesures prises par les autorités en matière de prévention des grossesses précoces. Elle s'est en outre inquiétée du nombre assez élevé d'enfants abandonnés en Colombie; les problèmes familiaux à l'origine de ces abandons résultent notamment de la pauvreté et du déplacement des familles. Aussi, l'experte s'est-elle enquise des mesures prises par les autorités pour encourager le regroupement familial.
L'attention a par ailleurs été attirée sur les difficultés auxquelles se heurte la Colombie en matière de toxicomanie, notamment s'agissant de l'alcoolisme. Le taux de suicide chez les jeunes est très élevé, a aussi fait observer une experte, qui a voulu être renseignée sur les campagnes de prévention des problèmes psychosociaux auxquels sont confrontés les enfants et leurs familles.
Certes, la Colombie a enregistré d'importants progrès en matière d'éducation, comme en témoigne le décret-loi de 2011 visant l'application progressive de la gratuité de l'éducation, a relevé un expert. Il s'est toutefois enquis de ce qui a été fait en matière d'éducation en faveur des populations autochtones et d'ascendance africaine. Quelles mesures ont-elles été prises pour assurer une éducation gratuite aux communautés les plus défavorisées, a insisté l'expert?
Un autre membre du Comité s'est inquiété que, selon les informations disponibles, quelque cinq millions de personnes soient actuellement déplacées en Colombie, dont la moitié seraient des enfants et des adolescents. Aussi s'est-il enquis des causes profondes de ces déplacements et des mesures prises pour assurer une protection adéquate des enfants déplacés, notamment en termes de nourriture, de logement de d'éducation. Malgré les progrès réalisés sur les plans politiques et législatifs, il semblerait que le travail des enfants continue d'augmenter dans le pays, a poursuivi l'expert; selon les informations disponibles, il y avait, en 2011, 1,7 million d'enfants âgés de 5 à 17 ans occupés dans des activités économiques, dans certains cas au domicile. D'après des informations reçues, la Colombie continue d'être un pays d'origine pour la traite de personnes au niveau international, a fait observer l'expert.
Des préoccupations ont également été exprimées au sujet des chiffres alarmants de la violence sexuelle à l'encontre des enfants.
Il semblerait que les forces armées établissent leurs camps près des écoles, s'est inquiété une experte. Elle a par ailleurs demandé à la délégation des informations sur l'implication éventuelle d'agents de l'État à des violences sexuelles. Une experte a pour sa part souhaité savoir s'il y avait eu en Colombie des cas de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants imputables à des agents de l'État ou à des paramilitaires.
Un membre du Comité s'est inquiété du taux de mortalité particulièrement élevé chez les adolescentes enceintes.
Réponses de la délégation
En 2006, a rappelé la délégation, les dispositions de la Convention ont été reprises dans la législation colombienne à travers la loi sur l'enfance et le Code de l'enfance et de l'adolescence. Pour faire appliquer comme il se doit les dispositions du Code, il convient pour les autorités colombiennes de bien connaître la réalité de la situation des enfants sur le terrain et de déléguer les compétences adéquates au niveau local, a souligné la délégation. Précisément, diverses politiques sociales ont été élaborées au niveau des départements et des municipalités, a-t-elle fait observer.
La délégation a reconnu que la Colombie doit encore faire des progrès pour tout ce qui a trait à la formation et au renforcement des capacités de certaines institutions.
La délégation a attiré l'attention sur l'aide apportée à quelque 400 000 familles dans le besoin à travers le pays.
Pour tout ce qui relève du droit constitutionnel, le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant est essentiel, a par ailleurs déclaré la délégation.
Aujourd'hui, a fait valoir la délégation, le budget du Ministère de l'éducation est le premier poste budgétaire de l'État, raflant ainsi la première place au Ministère de la défense. En Colombie, l'éducation est un domaine prioritaire, dont le budget a cru ces quatre dernières années de 20%, a précisé la délégation. Elle a fait état d'un élargissement de la couverture éducative, en particulier en faveur des populations vulnérables, parmi lesquelles les autochtones. Le taux d'abandon scolaire, qui était auparavant de 4,89%, se situe actuellement à 3,62%, a aussi fait valoir la délégation. Il n'en demeure pas moins que l'éducation reste un défi pour la Colombie, qui reste un pays d'après-guerre. La délégation a assuré le Comité de la volonté des autorités de faire de la Colombie un pays sans analphabétisme.
Évoquant la problématique des grossesses d'adolescentes, la délégation a assuré qu'aucune jeune fille en Colombie ne peut être exclue ou victime de discrimination du fait de sa grossesse. La Colombie n'a pu atteindre l'objectif du millénaire pour le développement concernant la réduction des grossesses adolescentes, lesquelles restent l'un des principaux problèmes sociaux auxquels le pays soit confronté et l'une des causes et conséquences des principales inégalités socioéconomiques que connaît la Colombie, a poursuivi la délégation, précisant que les grossesses chez les adolescentes atteignent un taux de 19,5%. La Colombie dispose d'une politique publique visant à prévenir les grossesses chez les adolescentes, a assuré la délégation. Elle a ajouté que le parquet est immédiatement saisi après toute grossesse adolescente; les médecins ont l'obligation de rapporter au parquet tout cas de grossesse d'adolescente. Les relations sexuelles avec un enfant de moins de 14 ans constituent un délit, a par ailleurs souligné la délégation.
Interpelée sur l'accès à l'avortement et la distribution des moyens de contraception dans le pays, la délégation a notamment affirmé qu'il est difficile d'imposer à des jeunes d'utiliser tel ou tel moyen de contraception. En Colombie, tout jeune qui le souhaite peut accéder gratuitement à des moyens de contraception, a-t-elle néanmoins souligné. L'avortement est interdit par la Constitution sauf en cas de viol, de malformation du fœtus ou de danger pour la vie de la mère, a par ailleurs indiqué la délégation.
La Colombie dispose d'une politique publique en faveur des femmes visant à leur garantir une vie sans violence, a déclaré la délégation. Pour ne pas être vouée à l'échec, une telle politique doit tenir compte des hommes et c'est pourquoi les autorités ont veillé à instaurer un dialogue avec la population masculine pour assurer l'efficacité de cette politique. La Colombie a adopté une politique de tolérance zéro à l'égard de la violence contre les femmes, a insisté la délégation, reconnaissant que la culture machiste n'a pas encore disparu du pays.
La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur le Plan stratégique de lutte contre la transmission du VIH/sida de la mère à l'enfant.
Évoquant les mesures prises en faveur de la protection des groupes vulnérables contre le racisme et la discrimination, la délégation a notamment attiré l'attention sur le décret présidentiel qui a été adopté en Colombie et en vertu duquel les peuples autochtones peuvent désormais mettre sur pied leurs propres systèmes de santé et d'éducation, permettant ainsi la reconnaissance des spécificités de ces peuples. La délégation a également attiré l'attention sur l'adoption d'une loi permettant de protéger et renforcer les langues autochtones.
La délégation a mis l'accent sur la Stratégie de prévention et de soins aux victimes de violences sexuelles au sein des communautés autochtones mise en place par les autorités colombiennes, précisant que trois projets pilotes ont été déployés dans ce contexte. Certaines pratiques culturelles sont en effet violentes pour les femmes au sein des foyers, a souligné la délégation. Aussi, le but de la stratégie poursuivie est-il de parvenir à un accord culturel à des fins de transformation de ces pratiques. La délégation a par ailleurs fait état d'une réduction des cas de mutilations génitales féminines rapportés aux hôpitaux.
S'agissant de la réglementation des activités des entreprises, afin de veiller à ce qu'elles ne violent pas les droits de l'enfant, la délégation a indiqué que les rapports entre le Gouvernement et les entreprises aux fins du respect de la Convention et de ses Protocoles se fondent sur un certain nombre de stratégies, au nombre desquelles figure le renforcement du système d'inspection et de contrôle par l'État quant au respect du droit du travail, y compris l'interdiction du travail des enfants. La liste des activités interdites aux enfants dans les entreprises a été allongée et le montant des amendes encourues par les entreprises enfreignant la loi en la matière a été fortement augmenté, a précisé la délégation. Les entreprises minières sont tenues de disposer d'une licence environnementale pour pouvoir commencer leurs opérations, a par ailleurs rappelé la délégation.
Aujourd'hui, il existe 31 centres de soins pour les victimes de violences sexuelles à travers le pays et 32 centres pour les victimes de violence familiale, a indiqué la délégation. Au total, environ 25 000 procès pour violences sexuelles se sont déroulés dans le pays dont les victimes étaient des enfants.
La délégation a souligné qu'en 2012, le Gouvernement avait reconnu l'existence d'un conflit armé ayant fait des centaines de milliers de victimes, dont environ un tiers d'enfants, alors que les autorités n'évoquaient auparavant que le terme de terrorisme. Cette reconnaissance a constitué un pas très important, a insisté la délégation, avant de rappeler que la fin du conflit est en train d'être négociée à La Havane. La délégation a attiré l'attention sur l'adoption et la mise en œuvre d'une loi sur les victimes fondée sur les principes des droits de l'homme.
L'écrasante majorité des victimes mineures du conflit armé ont été victimes de déplacements, de recrutements forcés et de violences et abus sexuels, a précisé la délégation, faisant état d'un chiffre de deux millions d'enfants victimes du conflit armé. Il existe un lien étroit entre déplacements et recrutements dans les groupes armés, a souligné la délégation, les familles déplacées souhaitent échapper au risque de voir un de leurs membres être recruté par ces groupes. Actuellement, la Colombie compte quelque 1,3 million de foyers déplacés, soit 4,6 millions de personnes - dont 31% sont des enfants, des adolescents et des jeunes, a indiqué la délégation, avant de préciser que 78% des foyers déplacés ont pu se réinstaller. La plupart des foyers déplacés vivent actuellement dans les villes où leur installation doit maintenant être pérennisée, a ajouté la délégation. Aujourd'hui plus que jamais, a-t-elle poursuivi, le Gouvernement colombien est engagé dans la lutte contre la vulnérabilité - notamment la vulnérabilité à la violence – de ces personnes déplacées. Le regroupement familial est, précisément, l'un des moyens de lutter contre la vulnérabilité de ces personnes, a souligné la délégation.
La délégation a rappelé qu'en 2004, la Cour suprême avait décrété que l'État colombien ne respectait pas les dispositions de sa Constitution vis-à-vis des victimes de déplacements. Or, désormais, plus de 47% des familles qui demandent le regroupement familial se le voient accorder, contre environ 20% auparavant, de sorte que l'on peut affirmer qu'il y a une amélioration du respect des droits des familles déplacées.
S'agissant de la question des réparations, la délégation a indiqué que des réparations vont devoir être apportées à plus de 30 000 enfants des deux sexes. Pour l'heure, 60% des victimes de violences sexuelles ont déjà pu obtenir réparation et l'objectif est de faire en sorte que la totalité des victimes de ce type de violence reçoive réparation d'ici la fin de cette année.
La délégation a en outre fait part de l'existence d'un mécanisme de réinsertion des guérilleros des FARC dans la vie civile, incluant la réinsertion d'enfants. Plus de 5500 enfants démobilisés ont été pris en charge, a précisé la délégation.
La délégation a reconnu l'existence de cas de meurtres, dans le cadre du conflit armé, dont on présume que les auteurs sont des agents des forces de l'ordre. Par ailleurs, il y a eu jusqu'en 2013 des cas de torture dont l'Unité des droits de l'homme et du droit humanitaire s'est saisie; mais depuis deux ans, il n'y a plus eu de telles plaintes pour torture, a fait valoir la délégation.
L'État colombien s'est engagé à garantir la protection des défenseurs des droits de l'homme, a par ailleurs souligné la délégation. Entre 2011 et 2014, le Procureur général a entamé 80 procédures disciplinaires pour atteintes contre des défenseurs des droits de l'homme.
S'agissant des questions d'adoption, la délégation a rappelé que la Colombie avait ratifié la Convention de La Haye relative aux adoptions internationales. Au niveau national, la compétence en matière d'adoption revient à l'Institut colombien de protection de la famille (ICBF), a précisé la délégation. Il n'y a que huit institutions dans le pays qui soient autorisées à mettre en œuvre le programme d'adoption; elles doivent respecter les normes nationales ainsi que celles découlant de la Convention de La Haye; elles doivent en outre se soumettre à la supervision de l'ICBF. Le Code pénal colombien considère la traite d'enfants comme un délit et sanctionne tout intermédiaire, a par ailleurs fait valoir la délégation, ajoutant que l'assentiment des parents de la victime ne saurait constituer une circonstance atténuante. L'adoption internationale est considérée comme un système subsidiaire lorsque l'on ne trouve pas de famille colombienne pour adopter l'enfant, a d'autre part indiqué la délégation.
Le Code de l'enfance et de l'adolescence prévoit que, dans le système pénal, les enfants doivent être traités différemment des adultes et bénéficier d'une justice de réparation, a par ailleurs fait valoir la délégation. En 2014, a-t-elle précisé, un peu plus de 173 000 adolescents sont passés par le système de justice pénale, dont 21,3% ont été condamnés à des peines privatives de liberté. Les délits les plus fréquents en cause étaient ceux de trafic de stupéfiants, d'attaque avec blessures et de violences intrafamiliales, a ajouté la délégation.
Conclusion
La rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Colombie, MME SANDBERG, a remercié la délégation pour ce dialogue très fructueux avec les experts, même si des interrogations subsistent quant à la mise en œuvre pratique, sur le terrain, d'un certain nombre de lois et de mesures.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRC15/012F