Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LES RAPPORTS DE LA SUISSE
Le Comité des droits de l'enfant a examiné, hier après-midi et aujourd’hui, les rapports présentés par la Suisse sur les mesures qu'elle a prises pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits de l'enfant et le Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.
Le Chef du Domaine «Affaires internationales» de l'Office fédéral des assurances sociales de la Suisse, l’Ambassadeur Stephan Cueni, a déclaré que si la situation des enfants est plutôt bonne en Suisse, il faut reconnaître qu'il subsiste des questions sensibles et des lacunes. «Chez nous aussi, malheureusement, des enfants sont affectés par la pauvreté, victimes d'abus sexuels ou de violences, des jeunes se suicident, se mutilent; les comportements addictifs ou liés à l'alimentation ou aux médias, aux jeux et à l'Internet posent des problèmes et des interrogations pour les proches, les parents et la société». L'égalité des chances doit être promue pour les enfants appartenant à des groupes vulnérables, comme les demandeurs d'asile mineurs et les mineurs non accompagnés, les enfants appartenant à des groupes minoritaires, ainsi que les enfants sans papiers, a ajouté M. Cueni. Une nouvelle loi fédérale sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse est entrée en vigueur en 2013 et une ordonnance sur des mesures de protection des enfants et des jeunes et sur le renforcement des droits de l'enfant a été adoptée. Mme Anne-Claude Demierre, membre du Comité de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales, a pour sa part attiré l'attention sur les volets de la politique de l'enfance et de la jeunesse qui s'inscrivent dans le domaine de compétences des cantons.
La délégation suisse était également composée, notamment, de représentants de l'Office fédéral de la santé publique; de l'Office fédéral de la justice; de l'Office fédéral de la police; du Secrétariat d'État aux migrations; de la Direction du droit international public. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des réserves que la Suisse maintient à l'égard de trois dispositions de la Convention; du droit de l'enfant d'être entendu et de participer; de la notion d'intérêt supérieur de l'enfant; du droit de l'enfant de connaître ses parents biologiques, y compris dans le contexte de la procréation médicalement assistée et des maternités de substitution; des décisions de certaines communes d'instaurer un couvre-feu pour les enfants d'un certain âge; des dispositions relatives aux châtiments corporels; de la situation des enfants migrants, étrangers et requérants d'asile; de l'absence d'une loi générale contre la discrimination; des questions de santé et d'éducation, y compris pour les enfants migrants et les enfants Roms; de l'âge minimum de la responsabilité pénale (actuellement fixé à 10 ans); ainsi que des phénomènes visés par le Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants.
Le rapporteur du Comité pour l'examen des rapports de la Suisse, M. Bernard Gastaud, s'est félicité que le pays ait accentué la mise en œuvre de la Convention dans le droit suisse mais a regretté qu'il n'existe toujours pas en Suisse d'institution nationale des droits de l'homme indépendante. Il a en outre attiré l'attention sur les réglementations instituées dans certaines communes, en vertu desquelles il est interdit aux enfants en-dessous d'un certain âge de se trouver dans l'espace public la nuit, ce qui peut constituer une atteinte à la liberté de réunion et d'association. Le rapporteur a par ailleurs regretté que la Suisse n'ait toujours pas explicitement interdit les châtiments corporels dans sa législation. Le corapporteur, M. Gehad Madi, a notamment fait observer que les discours d'incitation à la haine en ligne contre les minorités sont de plus en plus courants en Suisse. Il s'est aussi inquiété du taux élevé de suicide de jeunes dans le pays.
La Suisse était le dernier pays au programme de la présente session du Comité, qui se poursuit à huis clos jusqu'à la fin des travaux afin de procéder à l'adoption des observations finales du Comité sur chacun des rapports examinés en cours de session.
La séance de clôture du Comité doit se tenir dans l'après-midi du vendredi 30 janvier prochain.
Présentation des rapports de la Suisse
Le Comité est saisi du rapport de la Suisse au titre de la Convention et du Protocole facultatif (CRC/C/CHE/2-4 et CRC/C/OPSC/CHE/1), ainsi que de ses réponses (CRC/C/CHE/Q/2-4/Add.1 et CRC/C/OPSC/CHE/Q/1/Add.1) aux listes de points à traiter que lui a adressées le Comité (CRC/C/CHE/Q/2-4 et CRC/C/OPSC/CHE/Q/1).
M. STEPHAN CUENI, Chef du Domaine «Affaires internationales» de l'Office fédéral des assurances sociales de la Suisse, a tenu à souligner que si, du fait de l'importance de la tâche, les présents rapports sont parvenus avec retard – ce que le pays regrette vivement –, les travaux pour améliorer la situation des enfants dans le pays ne s'en sont pas pour autant trouvés ralentis. Un nouveau concept de suivi des recommandations du Comité a été élaboré qui inclut en particulier des mesures de coordination au sein de l'administration fédérale et avec les cantons, a-t-il indiqué, précisant que l'ensemble des tâches de présentation des rapports et de suivi de la Convention a été regroupé à l'Office fédéral des assurances sociales.
M. Cueni a ensuite souligné que le respect et la promotion des droits de l'homme est l'un des cinq objectifs de la politique étrangère de la Suisse. La Suisse a l'intime conviction que défendre les droits de l'homme c'est œuvrer directement pour la paix et la stabilité internationales, a-t-il insisté. En faisant de la jeunesse une priorité de son mandat, le Président de la Confédération de l'année 2014 a renforcé la place des droits de l'enfant en Suisse et dans la politique étrangère helvétique. L'implication accrue des jeunes a également constitué une des priorités de la présidence suisse de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Les rapports présentés par la Suisse aujourd'hui soulignent les acquis et les progrès réalisés et montrent clairement comment la Suisse a tenu compte des observations finales et des recommandations du Comité. M. Cueni a ajouté que ces rapports ont été publiés en plusieurs langues et diffusés sur plusieurs sites de l'administration et d'organisations non gouvernementales afin de les rendre accessibles au plus grand nombre.
Si la situation des enfants est plutôt bonne en Suisse, il faut reconnaître qu'il subsiste des questions sensibles et des lacunes, a reconnu M. Cueni. «Chez nous aussi, malheureusement, des enfants sont affectés par la pauvreté, victimes d'abus sexuels ou de violences, des jeunes se suicident, se mutilent; les comportements addictifs ou liés à l'alimentation ou aux médias, aux jeux et à Internet posent des problèmes et des interrogations pour les proches, les parents et la société», a poursuivi le chef de la délégation. Il a reconnu que des efforts sont à faire sur le plan de la participation des enfants et il faut améliorer la collecte de données concernant les enfants. «L'égalité des chances doit être promue pour les enfants appartenant à des groupes vulnérables, comme les demandeurs d'asile mineurs et les mineurs non accompagnés, les enfants appartenant à des groupes minoritaires, ainsi que les enfants sans papiers», a ajouté M. Cueni. En outre, «le développement des structures d'accueil extrafamilial doit se poursuivre, notamment pour améliorer la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle».
Évoquant ensuite les progrès accomplis récemment pour améliorer la situation des enfants en Suisse, M. Cueni a indiqué qu'une nouvelle loi fédérale sur l'encouragement de l'enfance et de la jeunesse était entrée en vigueur en 2013 et qu'une ordonnance sur des mesures de protection des enfants et des jeunes et sur le renforcement des droits de l'enfant avait été adoptée. La Confédération encourage dès lors la collaboration entre acteurs privés et publics dans le domaine de l'enfance et de la jeunesse et peut définir des thèmes prioritaires et des objectifs pour des aides financières, a-t-il expliqué, précisant que la nouvelle loi permet à la Confédération d'allouer, pendant huit ans, des aides financières aux cantons.
Le pays a mis en place le programme national «Jeunes et médias», qui s'étend jusqu'en 2015 et dont l'objectif principal est de promouvoir auprès des enfants et des adolescents une utilisation sûre, adaptée à leur âge et responsable des médias numériques, a poursuivi M. Cueni. Afin de permettre aux parents de mieux concilier famille, travail ou formation et de créer de nouvelles places d'accueil de jour pour les enfants, a-t-il en outre indiqué, un Programme d'impulsion de la Confédération a été mis en œuvre en 2003; au vu de la réussite de ce programme et de l'insuffisance de l'offre de structures d'accueil extrafamilial, ce programme de 120 millions de francs suisses a été prolongé jusqu'en 2019.
S'agissant des enfants issus de la migration, «il s'agit de faire en sorte que ces enfants puissent profiter, au même titre que les autres enfants, d'une éducation et d'un encadrement précoces de qualité», a d'autre part souligné M. Cueni. Les demandeurs d'asile mineurs non accompagnés bénéficient de mesures de protection spéciales dans le cadre de la procédure d'asile.
Concernant les enfants handicapés, l'accent est mis sur l'intégration des enfants et des jeunes handicapés dans le système scolaire régulier et dans la formation professionnelle, a par ailleurs expliqué M. Cueni, rappelant que la Suisse avait ratifié en 2014 la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
L'autorité parentale conjointe est devenue la règle en juillet 2014, a en outre souligné M. Cueni. Il a également indiqué que le nouveau droit de la protection de l'enfant et de l'adulte est entré en vigueur en 2013, qui fixe les normes minimales de droit fédéral pour les autorités de protection de l'adulte et de l'enfant. Par ailleurs, des modifications du code pénal renforçant la protection des mineurs contre l'exploitation et les abus sexuels ont été effectuées et ont permis à la Suisse d'adhérer à la Convention de Lanzarote du Conseil de l'Europe. En vigueur depuis juillet dernier, le nouvel article 196 du code pénal sanctionne les actes d'ordre sexuel commis avec des mineurs contre rémunération; la prostitution des personnes âgées de 16 à 18 ans n'est plus tolérée en Suisse. La Suisse dispose par ailleurs d'un plan d'action national contre la traite des êtres humains, qui couvre les années 2012 à 2014 et comprend 23 mesures dans les domaines de la prévention, de la répression, de l'aide aux victimes et de la collaboration, a indiqué M. Cueni.
M. Cueni a en outre fait savoir qu'en ce qui concerne l'adhésion de la Suisse au troisième Protocole facultatif à la Convention établissant une procédure de communications auprès du Comité, les travaux en vue d'une consultation des milieux intéressés avaient été initiés. Enfin, M. Cueni a rappelé que le Congrès mondial sur la justice juvénile, co-organisé par Terre des hommes et le Département fédéral des affaires étrangères, aura lieu à Genève du 26 au 30 janvier 2015.
MME ANNE-CLAUDE DEMIERRE, Conseillère d'État, Directrice de la santé et des affaires sociales du canton de Fribourg et membre du Comité de la Conférence des directeurs et directrices des affaires sociales, a pour sa part souligné que de nombreux volets de la politique de l'enfance et de la jeunesse s'inscrivent dans le domaine de compétences des cantons: scolarité obligatoire, police, exécution des peines, certains aspects de la politique de santé, encouragement de la culture et de l'intégration, ou encore d'importants éléments de la politique sociale, notamment le placement des enfants en dehors de leur famille et la coordination de la politique de l'enfance et de la jeunesse. Les communes sont quant à elles compétentes pour développer les offres et activités générales concernant les enfants et les jeunes ainsi que l'accueil extrafamilial et reçoivent en général un soutien du canton. Aménagement du territoire, espaces publics, logement, mobilité, sont des domaines qui ont une forte influence sur la qualité de vie des enfants et se situent à l'intersection entre compétences communales et cantonales, a insisté la Conseillère d'État, avant de faire valoir que le fédéralisme permet une action publique plus proche des besoins des citoyens.
Confédération, cantons et communes doivent respecter les normes minimales en matière de droits de l'homme et de droits de l'enfant; mais au-delà, une certaine marge de manœuvre leur est laissée, a poursuivi Mme Demierre. Afin de mettre en œuvre les conventions internationales auxquelles elle est partie, la Suisse n'a pas impérativement besoin d'harmoniser ses législations cantonales, ni d'uniformiser ses dispositifs, a-t-elle expliqué. Le fédéralisme et la diversité cantonale ont même parfois pour effet que certains cantons se dotent de dispositifs de protection des droits allant au-delà des exigences minimales. «Un inconvénient est qu'il est parfois difficile de disposer d'une vue d'ensemble nationale des solutions élaborées au plan cantonal voire régional», a admis la Conseillère d'État. Ce n'est pas pour autant que les cantons travaillent chacun de leur côté; au contraire, ils collaborent au sein de diverses conférences intercantonales, telles que la Conférence des directrices et directeurs cantonaux des affaires sociales, pour échanger les informations et les bonnes pratiques et harmonisent leurs politiques, là où c'est nécessaire, par le biais d'accords intercantonaux.
Ces dernières années, a fait observer Mme Demierre, de nombreux cantons ont adopté des bases légales spécifiques en matière d'enfance et de jeunesse. Au niveau cantonal, les cantons et les communes disposent tous d'un réseau plus ou moins étendu de services spécialisés et d'organismes ayant pour mission de conseiller ou d'accompagner les enfants, les jeunes et leurs parents dans différentes situations et, au besoin, d'intervenir dans le cadre de leur mission de protection de l'enfant. Quinze cantons ont nommé au sein de leur administration une personne responsable de la mise en œuvre de la politique de promotion de l'enfance et de la jeunesse, a précisé la Conseillère d'État, avant d'ajouter que trois autres ont délégué cette tâche à des organisations privées par le biais de contrats de prestation. De nombreux cantons et communes ont institué des commissions de l'enfance et de la jeunesse, a en outre indiqué Mme Demierre. Elle a ensuite attiré l'attention sur «les importants progrès réalisés sur le plan de la participation où des efforts sont déployés dans certains cantons et certaines communes pour associer les enfants et les jeunes aux processus politiques de planification et de décision».
Concernant le placement d'enfants, Mme Demierre a par ailleurs souligné que la nouvelle ordonnance fédérale de 2014 oblige les cantons à surveiller le travail accompli dans le cadre des structures existantes. Les cantons sont en train de mettre en place des mécanismes pour assurer cette surveillance.
Examen du rapport présenté au titre de la Convention
Questions et observations des membres du Comité
M. BERNARD GASTAUD, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Suisse, a fait remarquer que cela fait plusieurs années qu'il n'y avait pas eu de dialogue entre la Suisse et le Comité. Toutefois, ce long délai a été mis à profit par les autorités fédérales et cantonales pour accentuer la mise en œuvre de la Convention dans le droit suisse, s'est félicité le rapporteur. En témoigne la levée de diverses réserves que le pays avait émises à l'égard de la Convention, a-t-il souligné, avant de déplorer le maintien d'autres réserves ayant trait, notamment, à la réunification familiale et à la séparation des mineurs et adultes dans les centres de détention.
M. Gastaud a souhaité savoir dans quel délai la réflexion engagée en vue d'une ratification du troisième Protocole facultatif se rapportant à la Convention était susceptible d'aboutir.
Le rapporteur a ensuite salué les modifications apportées à un certain nombre de législations, parmi lesquelles le code pénal, la loi sur les personnes handicapées ou encore la loi sur l’encouragement de l’enfance et de la jeunesse. Il s'est enquis de la manière dont fonctionne, au niveau fédéral, la coordination de l'action en faveur des droits de l'enfant. Il a aussi voulu savoir quand le rapport sur la politique de l'enfance et de la jeunesse, en cours d'élaboration, doit-il être présenté aux autorités.
M. Gastaud a ensuite regretté qu'il n'existe toujours pas en Suisse d'institution nationale de droits de l'homme indépendante. Quels sont les motifs faisant obstacle à la création d'une telle institution, a-t-il demandé? À quel organe fédéral incombe le contrôle de la conformité des lois aux dispositions des conventions internationales auxquelles le pays a souscrit, a par ailleurs demandé le rapporteur? Les dispositions de la Convention peuvent-elles être invoquées devant le Tribunal fédéral et l'ont-elles déjà été, a également demandé M. Gastaud?
Le rapporteur a par ailleurs déploré le manque de données disponibles concernant, entre autres, la pornographie infantile, la situation des enfants handicapés ou encore des enfants vulnérables.
En ce qui concerne les droits de l'enfant et les activités des entreprises suisses à l'étranger, M. Gastaud s'est enquis de la stratégie élaborée par les autorités suisses aux fins de la mise en œuvre des principes des Nations Unies en la matière.
Dans certaines communes suisses, a poursuivi M. Gastaud, des réglementations ont été instituées qui interdisent aux enfants en-dessous d'un certain âge de se trouver dans l'espace public la nuit, ce qui peut constituer une atteinte à la liberté de réunion et d'association. Aussi, le rapporteur a-t-il voulu savoir comment la légalité de ces règlements communaux pourrait être juridiquement contestée.
M. Gastaud a par ailleurs fait état d'allégations selon lesquelles des actes assimilables à la torture ou aux mauvais traitements auraient été infligés à des enfants étrangers se trouvant sur le territoire suisse.
Dans ses précédentes recommandations, a rappelé le rapporteur, le Comité avait recommandé à la Suisse d'interdire purement et simplement les châtiments corporels. Or, apparemment, rien n'a été fait à cet égard.
M. GEHAD MADI, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Suisse, a pris acte de l'amendement apporté en 2013 à l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative, qui définit les conditions dans lesquelles les sans-papiers peuvent avoir accès à une activité professionnelle. Il s'est toutefois surpris qu'une année après l'adoption de cet amendement, seules deux demandes aient été soumises au Secrétariat d’État aux migrations.
Le corapporteur a ensuite attiré l'attention sur la nécessité de mettre en place des stratégies de mise en œuvre de la Convention afin de veiller à ce que les droits de l'enfant soient appliqués de manière cohérente dans tout le pays.
M. Madi a fait observer que les discours d'incitation à la haine en ligne contre les minorités, y compris contre les enfants lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres, sont de plus en plus courants en Suisse. Aussi, s'est-il demandé si les campagnes de sensibilisation menées en la matière étaient suffisantes ou si elles devaient également s'accompagner de nouvelles législations visant à prévenir et combattre de tels actes.
Les décisions concernant le statut résidentiel des étrangers ne reconnaissent ni ne tiennent systématiquement compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, s'est en outre inquiété le corapporteur.
Les suicides sont, après les accidents de la route, la deuxième cause de décès parmi les jeunes âgés de 15 à 19 ans, a par ailleurs relevé M. Madi, qui a demandé combien de suicides avaient été enregistrés ces trois dernières années et quelles mesures ont été prises par les autorités pour prévenir ce phénomène.
Parmi les autres membres du Comité, une experte a relevé qu'en Suisse, un enfant adopté a le droit de connaître ses origines lorsqu'il a atteint l'âge de 18 ans; mais qu'en est-il de ce droit dans le cas d'un enfant issu d'une procréation médicalement assistée?
Évoquant la situation des enfants nés avec une sexualité indéfinie ou mal définie, une experte s'est inquiétée qu'il soit possible que ces enfants soient opérés à un âge très précoce sans que ni eux, ni leurs parents le plus souvent, ne soient pleinement en mesure de donner leur consentement. Les autorités suisses ont-elles l'intention d'interdire ce type d'opération sans consentement préalable pleinement éclairé des personnes concernées?
Un expert a relevé que les mutilations génitales féminines sont pénalement sanctionnées, qu'elles aient été commises en Suisse ou à l'étranger par des personnes résidant en suisse. Y a-t-il déjà eu des condamnations pour ce délit, a-t-il demandé?
L'obésité semble toucher un nombre important d'enfants, sans qu'aucune stratégie ne semble avoir été adoptée pour contrer ce phénomène, s'est en outre inquiété le même expert.
Aucune mesure ne semble non plus avoir été prise pour faire bénéficier les enfants autistes d'une éducation inclusive, a-t-il déploré, regrettant le peu d'efforts déployés pour encourager, d'une manière générale, l'éducation inclusive des enfants handicapés. Le problème de l'absentéisme scolaire semble être une réalité mais les informations font défaut quant à l'ampleur du phénomène, a ajouté cet expert. Il s'est en outre inquiété des difficultés d'accès des enfants migrants à l'école.
Tout en saluant les nouvelles dispositions de la loi suisse sur l'asile selon lesquelles les demandes d'asile émanant d'enfants non accompagnés seront traitées de manière prioritaire, un autre membre du Comité a relevé que les demandes d'asile sont rejetées si le requérant ne soumet pas des documents de voyage ou d'identité dans les 48 heures qui suivent le dépôt de sa demande. Il conviendrait de veiller à ce que les requérants mineurs non accompagnés ne soient pas soumis à cette règle, a estimé l'expert. Il a plaidé en faveur d'une abrogation des dispositions de l'article 85.7 de la loi sur les étrangers s'agissant des personnes au bénéfice d'une admission provisoire. En effet, a précisé l'expert, ces dispositions entravent le droit au regroupement familial de ces personnes puisqu'elles ne sont généralement pas en mesure de satisfaire aux conditions, notamment en matière de logement.
L'expert a encouragé la Suisse à faire en sorte que la nationalité suisse soit accordée aux enfants apatrides. Il a également encouragé le pays à envisager d'adhérer à la Convention de 1961 sur la réduction de l'apatridie. Il s'est en outre enquis des efforts entrepris en vue de remédier aux problèmes des enfants Roms.
Le Comité continuera de demander à la Suisse d'accroître l'âge minimum de la responsabilité pénale, a poursuivi le même expert, qui a souligné que 10 ans n'est pas un âge adéquat pour la responsabilité pénale. Il a voulu connaître les motifs pour lesquels les autorités suisses ne consentent pas à relever ce minimum.
L'article 4 du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés ne s'applique pas uniquement aux États qui ont des groupes armés non étatiques sur leur territoire, a souligné l'expert. Il y a en effet des groupes armés non étatiques étrangers qui recrutent des Européens, y compris des enfants. Il a prié la délégation suisse de dire si elle dispose d'informations sur des enfants suisses qui auraient quitté le pays pour rejoindre des groupes armés non étatiques, en Iraq ou en Syrie, par exemple.
Évoquant la question des tours d'abandon - ou «boîtes à bébé» -, qui permettent aux mères d'abandonner anonymement un enfant, une experte s'est enquise des mesures prises pour garantir à l'enfant le droit de connaître ses origines. Elle a aussi voulu savoir quel était le statut d'un enfant de parents suisses qui serait né à l'étranger de mère porteuse, étant donné que les mères porteuses sont interdites en Suisse.
Réponses de la délégation
En ce qui concerne la réserve que la Suisse maintient à l'égard de l'article 37(c) de la Convention s'agissant de la séparation entre jeunes détenus et adultes détenus, la délégation a expliqué que les cantons ont jusqu'à la fin de 2016 pour créer les conditions nécessaires relatives au placement et à la privation de liberté des délinquants mineurs. Fin 2016, la séparation des jeunes et des adultes détenus sera complète et la Suisse pourra alors retirer cette réserve. Il ne fait aucun doute que cela sera fait car les cantons sont en train de travailler dans ce sens et il leur reste encore deux ans pour aboutir, a relevé la délégation.
Pour ce qui est de la réserve à l'égard de l'article 40 de la Convention, s'agissant du droit de tous les enfants en conflit avec la loi à l'assistance juridique, la délégation a rappelé qu'en vertu de cette réserve, est réservée la procédure pénale suisse des mineurs qui ne garantit ni le droit inconditionnel à une assistance ni la séparation, au niveau personnel et de l'organisation, entre l'autorité d'instruction et l'autorité de jugement. La délégation a indiqué que la procédure pénale en vigueur en Suisse prévoit que le prévenu mineur ou ses représentants légaux peuvent désigner un avocat, faute de quoi, le prévenu s'en voit désigner un d'office. Les coûts peuvent être mis à la charge de l'adolescent ou de ses parents s'ils en ont les moyens, a expliqué la délégation, avant de souligner que le Gouvernement n'avait pas l'intention de modifier cette règle de la procédure pénale applicable aux mineurs.
Quant à la réserve relative à l'article 10 de la Convention, sur le regroupement familial, la délégation a expliqué que cette réserve découle du fait que la législation suisse ne reconnaît pas le regroupement familial à certaines catégories d'étrangers. La Suisse maintient cette réserve car le regroupement familial ne peut être garanti pour les requérants d'asile dont la demande est en cours d'examen ou qui ont été déboutés, a précisé la délégation.
Interpelée sur le statut de la Convention dans le droit interne, la délégation a indiqué qu'en cas de conflit entre le droit national et le droit conventionnel, les dispositions du droit international priment en principe sur celles du droit interne. Le législateur a toutefois la possibilité de se soustraire à cette obligation sauf dans le cas des règles impératives du droit; mais en tout état de cause, les garanties internationales en matière de droits de l'homme l'emportent toujours sur le droit interne, a assuré la délégation.
Des membres du Comité ayant souligné que la notion de bien ou de bien-être de l'enfant prévu par la législation suisse ne couvre qu'une partie de ce qui est entendu par l'intérêt supérieur de l'enfant prévu par la Convention, la délégation a assuré que par «bien» ou «bien-être» de l'enfant, la Suisse entend exactement la même chose qu' «intérêt supérieur de l'enfant»; la délégation n'en a pas moins assuré qu'elle transmettrait aux autorités suisses les remarques du Comité à ce sujet.
Soulignant que, ces dernières années, les cantons avaient renforcé la coordination de leur action dans le domaine de l'enfance et de la jeunesse, la délégation a indiqué que la moitié d'entre eux étaient favorables à l'adoption d'une base légale constitutionnelle dans ce domaine, alors que l'autre moitié restait favorable au maintien de la situation actuelle. Des conférences intercantonales réfléchissent à l'adoption de normes minimales applicables aux stratégies cantonales dans le domaine de l'enfance et de la jeunesse, a ajouté la délégation.
La délégation a indiqué qu'un programme national de prévention Jeunes et violence est en cours au niveau de la Confédération. Elle a aussi indiqué qu'une évaluation de la politique d'encouragement de l'enfance et de la jeunesse serait menée en 2017. Elle a par ailleurs reconnu que l'application en Suisse du droit de l'enfant d'être entendu et de participer laissait encore à désirer.
La question de la création d'une institution nationale des droits de l'homme est discutée en Suisse depuis de nombreuses années, a rappelé la délégation. Elle a souligné qu'un Centre de compétence pour les droits humains avait été créé pour une période pilote de 5 ans qui prend fin cette année. Les enfants ne peuvent faire appel à cette institution. Quoi qu'il en soit, ce centre ne constitue pas une institution nationale au sens des Principes de Paris. L'évaluation de la phase pilote du Centre de compétence pour les droits humains est en cours, a-t-elle précisé.
Depuis le 1er janvier 2001, a poursuivi la délégation, la procréation médicalement assistée en Suisse est régie par une loi qui oblige les personnes et institutions conservant et utilisant du sperme qui provient de dons à consigner de manière sûre l'identité du donneur ainsi que celle de la receveuse. Les données sont conservées pendant 80 ans; à compter de 18 ans révolus, l'enfant issu d'une telle procréation peut accéder à ces données et donc au nom du donneur, a expliqué la délégation. En cas d'intérêt légitime (raison de santé par exemple), l'enfant peut accéder à ces données avant l'âge de 18 ans.
En l'état actuel, la loi suisse prévoit qu'à compter de 18 ans révolus, l'enfant adopté ou issu d'une procréation médicalement assistée a un droit inconditionnel de connaître l'identité de ses parents biologiques. Une révision de la loi est en cours qui envisage des modifications afin que ce droit de connaître l'identité de ses parents pour un enfant mineur ne soit plus soumis à la condition d'intérêt légitime susmentionnée.
S'agissant de l'enfant né d'une mère porteuse à l'étranger, la délégation a rappelé que la maternité de substitution est interdite en Suisse; par conséquent, des liens de filiation de ce type conclus à l'étranger ne sont pas reconnus en Suisse car ils ne sont pas compatibles avec l'ordre public suisse, a expliqué la délégation. Ainsi, en Suisse, ne sont pas reconnus comme parents, même s'ils sont inscrits sur l'acte de naissance, les parents ayant conclu un tel lien de filiation, a-t-elle insisté. Néanmoins, souvent, le père est le père génétique et peut donc reconnaître l'enfant à son retour en Suisse, a fait observer la délégation. Quoi qu'il en soit, le droit de l'enfant de connaître l'identité de ses parents biologiques reste entier même pour les enfants issus d'une maternité de substitution, a ajouté la délégation.
Interpelée au sujet des décisions prises par certaines communes d'instaurer un couvre-feu nocturne aux enfants en dessous d'un certain âge, la délégation a rappelé que la «liberté d'association n'est pas un droit absolu»; ce droit doit être évalué à l'aune d'une «pesée d'intérêts» dans laquelle interviennent la sécurité et l'ordre public. La décision en la matière incombe aux communes et cette décision peut être contestée, a souligné la délégation.
En ce qui concerne les châtiments corporels, la délégation a indiqué qu'il n'existe en Suisse aucune disposition pénale interdisant les châtiments corporels infligés aux enfants. Néanmoins, les autorités suisses estiment que les dispositions légales existantes, relativement aux voies de faits et aux lésions corporelles simples, permettent déjà de protéger les enfants contre toute forme de violence physique ou mentale. Il y a déjà eu contre des parents ayant fait usage de violence sur des enfants des condamnations pour voie de faits, a indiqué la délégation. Elle a fait état d'un projet de loi visant à élargir et généraliser à tous les professionnels ayant un contact avec les enfants (y compris ceux qui sont soumis au secret professionnel) le droit voire l'obligation de notification aux autorités concernant tout cas de violence ou de maltraitance à l'encontre d'un enfant, afin que l'autorité de protection puisse intervenir comme il se doit. Récemment, dans le canton de Vaud, un père a été condamné pour voie de fait pour avoir giflé sa fille, a indiqué la délégation.
L'égalité des chances dans le domaine de la santé des migrants est un sujet à l'ordre du jour des autorités suisses, car il est vrai que pour les nourrissons des migrants, par exemple, sont en moins bonne santé que ceux des autres, a poursuivi la délégation.
S'agissant du renvoi à l'étranger d'un parent étranger et de son enfant mineur, la délégation a indiqué que les autorités suisses tiennent compte de la situation particulière de l'enfant, notamment au regard de sa situation en matière de santé et d'éducation. Le fait que l'enfant soit né en Suisse ne constitue pas forcément un obstacle à son renvoi; c'est davantage la situation particulière de l'enfant qui est évaluée dans sa globalité, a expliqué la délégation.
La loi fédérale sur les étrangers de 2008 n'interdit plus le regroupement familial pour les titulaires d'une autorisation de séjour limitée, a par ailleurs indiqué la délégation. En revanche, la loi sur l'asile ne prévoit pas le regroupement familial pour les requérants d'asile dont la procédure est en cours, a-t-elle ajouté.
L'article 30 de la loi suisse sur la naturalisation prévoit que les mineurs apatrides bénéficient d'une naturalisation facilitée, après un séjour de cinq ans dans le pays, a par ailleurs fait valoir la délégation.
Les prestations d'assurance-chômage sont les mêmes sur l'ensemble du territoire suisse, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a en outre fait état de l'existence, au niveau cantonal, de prestations complémentaires pour les familles à faibles revenus, expliquant que ces prestations sont délivrées sous condition de ressources afin de combattre la pauvreté des familles. Il s'agit là d'un instrument efficace pour combattre ladite pauvreté, a insisté la délégation.
Les prestations fédérales sont des prestations de sécurité sociale qui, au travers des neuf branches de sécurité sociale, interviennent lorsqu'un risque est réalisé (maladie, chômage...), a expliqué la délégation. Les cantons, eux, interviennent lorsque la sécurité sociale n'est plus suffisante et dans les situations où le risque n'est pas réalisé: cela s'appelle alors l'aide sociale et chaque canton a son propre régime en la matière, a-t-elle poursuivi. Enfin, existent des prestations complémentaires aux familles, qui viennent compléter et soulager l'aide sociale dans certains cantons, a ajouté la délégation.
La Suisse ne dispose pas de loi générale contre la discrimination, a par ailleurs indiqué la délégation. Néanmoins, a-t-elle rappelé, la Suisse a adopté le système moniste, en vertu duquel le droit international déploie immédiatement ses effets dans le droit interne suisse. Ainsi, toutes les normes antidiscriminatoires figurant dans les instruments internationaux ratifiés par le pays sont directement applicables en Suisse, a fait valoir la délégation.
Relevant que très peu de cas de discrimination sont portés devant les tribunaux suisses, la délégation a reconnu que cela semble témoigner de l'existence d'un certain nombre d'obstacles à cet égard. Aussi, afin de voir où sont les problèmes, une étude a-t-elle été engagée sur ces questions, dont les résultats seront publiés cette année, a indiqué la délégation.
Rendant compte des mesures prises par les autorités suisses en faveur de la prévention du suicide, la délégation a affirmé qu'il s'agit là d'une problématique que la Suisse prend très au sérieux. Des cantons comme ceux de Zoug ou de Zurich ont mis en place des programmes de prévention, mais des stratégies en la matière sont également prises au niveau national, a fait valoir la délégation. Elle a indiqué qu'un plan national pour la prévention du suicide était en cours d'élaboration, en collaboration avec les cantons, une fondation et divers experts.
Les chiffres officiels de l'Office des statistiques font état, pour 2012, de 3 cas de suicide chez les moins de 15 ans (tous trois parmi les garçons) et de 318 cas chez les 15-44 ans (78 cas chez les femmes et 240 chez les hommes).
La mutilation génitale féminine (MGF) est explicitement punissable en vertu de l'article 124 du code pénal suisse depuis le 1er juillet 2012, a indiqué la délégation. Néanmoins, aucune infraction pour violation de cet article n'a encore à ce jour été enregistrée dans le pays, a-t-elle précisé. Un contrat lie Caritas Suisse et l'Office fédéral de la santé publique s'agissant de la prévention et de la lutte contre les MGF, a expliqué la délégation. Elle a ajouté que l'organisation Caritas Suisse forme des migrants pour intervenir en tant que relais (pour la prévention contre les MGF) au sein de leur communauté. Les traitements consécutifs aux MGF peuvent être pris en charge par l'assurance-maladie de base pour autant qu'ils répondent aux critères habituels, c'est-à-dire qu'ils soient efficaces, adéquats et économiques, a en outre souligné la délégation.
S'agissant de la question de l'obésité, la délégation a indiqué qu'au niveau international, les bases de la stratégie nutritionnelle ont été fondées en 1992. La stratégie actuelle de la Suisse, qui couvre la période 2013-2016, se fonde, elle, sur les principales conclusions du Rapport sur la nutrition en Suisse. Dans le cadre de cette stratégie nationale, une grande importance est accordée à la santé de la mère et de l'enfant et un soutien particulier est apporté à l'allaitement maternel. La Suisse a désormais adhéré à la Convention n°183 de l'Organisation internationale du travail sur la protection de la maternité.
En ce qui concerne l'éducation des enfants handicapés, la délégation a attiré l'attention sur l'approche privilégiée par la Suisse consistant à encourager l'intégration des enfants handicapés dans l'école régulière. L'intégration de ces enfants dans les écoles ordinaires relève des cantons, a-t-elle fait observer. En avril dernier, a-t-elle en outre rappelé, la Suisse a adhéré à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.
La délégation n'a pas connaissance du recours en Suisse à la méthode du «packing», ou enveloppement humide, pratiqué sur des enfants autistes. Interpelée sur les raisons pour lesquelles cette pratique n'est pas purement et simplement interdite en Suisse, la délégation a souligné que dans le pays, c'est la liberté thérapeutique qui prévaut.
Interrogée sur l'ampleur du phénomène de l'abandon scolaire en Suisse, la délégation a notamment fait valoir que l'objectif de 95% de jeunes devant atteindre la fin de leur scolarité obligatoire est désormais atteint; ainsi, seuls 5% des jeunes n'achèvent pas leur scolarité obligatoire.
En ce qui concerne l'intégration des enfants migrants dans l'éducation, la délégation a indiqué que les principales mesures prises à cette fin prennent la forme de cours de langues pour enfants allophones. Sont aussi proposés des cours intensifs ou des classes spéciales pour enfants allophones, a ajouté la délégation.
Quant aux enfants Roms, la délégation a déclaré que conformément à la Convention-cadre du Conseil de l'Europe sur les droits des minorités nationales, à laquelle la Suisse a adhéré, les gens du voyage de nationalité suisse sont reconnus comme une minorité nationale; à ce titre, la Suisse s'engager à protéger cette minorité. Selon les Roms eux-mêmes, environ 600 enfants voyagent avec leurs parents en Suisse, a précisé la délégation. En ce qui concerne les questions d'éducation, les gens du voyage continuent d'être globalement satisfaits de la manière dont sont traités leurs enfants, a-t-elle indiqué.
Pour ce qui est des enfants en conflit avec la loi, la délégation, tout en rappelant que l'âge minimum de la responsabilité pénale est effectivement fixé à dix ans, a souligné que pour les mineurs âgés de 10 à 15 ans, la législation pénale ne prévoit que des mesures de protection ou des peines légères. Des peines plus sévères ne peuvent être prononcées qu'à l'encontre de mineurs ayant 15 ans révolus.
Répondant à une question sur la participation de jeunes Suisses qui auraient quitté le pays pour rejoindre des groupes armés non étatiques, notamment en Iraq ou en Syrie, la délégation a fait état de deux cas d'adolescents âgés de 15 et 16 ans qui seraient partis de la région zurichoise pour rejoindre la Syrie et l'EI. Un groupe de sécurité a été créé par les autorités suisses pour évaluer les défis qui se posent au pays en termes de sécurité. Ce groupe a mis en place une équipe spéciale (task force) dont la mission est d'empêcher que des personnes soient tentées de partir faire le jihad et d'éviter que des actions soient commises en Suisse par des «touristes du jihad» qui reviendraient dans le pays. Toute personne revenant en Suisse après s'être livrée à l'étranger à des activités djihadistes fera l'objet d'une surveillance par les services de renseignement de la Confédération, pour autant que son identité soit connue, a ajouté la délégation.
La délégation a en outre rendu compte des mesures prises en faveur des enfants impliqués dans des conflits armés qui entrent en Suisse, que ce soit au stade de la détection ou à celui de la prise en charge. Tout requérant d'asile est soumis à un entretien avec les autorités compétentes afin de déterminer les motifs de sa demande, a rappelé la délégation.
La délégation a indiqué qu'actuellement cinq villes suisses disposent d'un tour d'abandon, ou boîte à bébés. La délégation a admis que ces boîtes à bébés vont à l'encontre du droit de l'enfant de connaitre son identité; néanmoins, elles permettent de sauver des vies et c'est pour cette raison que le Gouvernement suisse considère qu'il serait inopportun de les interdire.
Examen du rapport de la Suisse sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants
Questions et observations des membres du Comité
M. GASTAUD a salué les progrès substantiels réalisés par la Suisse dans la mise en œuvre de la législation, des procédures et des entités administratives visant à se conformer à cet instrument. Il a notamment salué l'incrimination de la plupart des délits visés à l'article 3 du Protocole. M. Gastaud a toutefois relevé que si le code pénal, en son article 182, incrimine un certain nombre de ces délits, la peine minimale prévue est alors d'une année d'emprisonnement, ce qui amène à s'interroger sur la suffisance et le caractère dissuasif de cette peine minimale, d'une part, et sur la peine maximale encourue, de l'autre.
En outre, il apparaît qu'en l'état, le code pénal suisse ne permette pas de sanctionner de manière complète toute possession et diffusion de matériels pédopornographiques, a poursuivi l'expert. Relevant que l'âge de protection légale est fixé à 16 ans en ce qui concerne la pornographie mettant en scène des enfants, M. Gastaud a souhaité savoir si des modifications de la loi étaient envisagées pour couvrir aussi les jeunes âgés de 16 à 18 ans.
Apparemment, il n'existe pas de mécanisme permettant d'assurer le suivi des délinquants sexuels après leur libération; cette lacune constitue un danger pour les enfants, a par ailleurs déclaré M. Gastaud, avant de s'enquérir de la manière dont les autorités entendaient y remédier.
L'extradition requiert pour les autorités suisses la nécessité de la double incrimination – dans le droit suisse et dans le droit du pays requérant, a d'autre part relevé M. Gastaud. Aussi, a-t-il demandé si le Protocole pouvait servir de base pour une extradition entre la Suisse et un pays étranger.
Une autre experte s'est enquise des mesures prises en Suisse en vue d'assurer une évaluation adéquate des parents adoptifs dans les cas d'adoption internationale impliquant des pays qui ne sont pas partie à la Convention de La Haye sur les adoptions internationales.
Réponses de la délégation
La délégation a précisé que la peine encourue pour infraction à l'article 182 du code pénal va de 1 à 20 ans d'emprisonnement. Une motion parlementaire est en cours concernant l'interdiction des images montrant des enfants nus, a par ailleurs indiqué la délégation. L'article 197.4 du code pénal suisse stipule que quiconque fabrique, importe, prend en dépôt ou met en circulation du matériel pornographique illégal encourt des sanctions, a par ailleurs fait valoir la délégation.
La délégation a ensuite attiré l'attention sur le Plan national d'action contre la traite d'êtres humains adopté par la Suisse. Elle a rappelé que la Suisse avait ratifié la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains et va très bientôt être évaluée à ce titre par le Conseil de l'Europe. La délégation a par ailleurs fait état de l'élaboration d'une base légale pour les mesures de prévention (de la traite) prises par la Confédération, soulignant qu'il s'agissait là d'une importante avancée dans la mesure où une telle base légale n'existait pas jusqu'ici.
Quant à la violence sexuelle, la délégation a notamment renvoyé aux résultats d'une étude récemment publiée par la Fondation UBS Optimus concernant la victimisation sexuelle des enfants et adolescents.
Pour ce qui est des questions d'extradition, la délégation a fait observer que l'article 5 du code pénal suisse prévoit expressément que pour certaines infractions, la double incrimination n'est pas nécessaire si les victimes sont mineures.
Conclusion
Le corapporteur du Comité pour l'examen des rapports de la Suisse, M. MADI, a remercié la délégation suisse pour sa patience et le professionnalisme dont elle a fait preuve alors qu'elle a été submergée de questions souvent très précises provenant des membres du Comité. La Suisse est un pays développé qui n'est pas dépourvu de ressources financières, a fait observer le corapporteur. Il a exprimé l'espoir que dans son prochain rapport, la Suisse aura su tenir compte des observations finales qui lui aura transmises le Comité à l'issue de l'examen du présent rapport.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CRC15/014F