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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT SON DÉBAT ANNUEL CONSACRÉ À L'INTÉGRATION D'UNE PERSPECTIVE SEXOSPÉCIFIQUE DANS SES TRAVAUX

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, son débat annuel sur l'intégration d'une perspective sexospécifique dans tous ses travaux et ceux de ses mécanismes.

Ouvrant les débats, Mme Jane Connors, Directrice de la division de la recherche et du droit au développement, a dressé un bilan globalement positif de l'effort fait par le Conseil pour intégrer les questions de genre dans les travaux du Conseil. Elle a ainsi noté qu'une recommandation sur cinq adressée aux États dans le cadre de l'Examen périodique universel était liée aux droits des femmes ou à l'égalité entre hommes et femmes. Elle a néanmoins constaté que l'effort était inégal. Mme Connors a souhaité que l'on s'assure que les droits des femmes et le genre soient pris en compte systématiquement dans toutes les résolutions spécifiques de pays. Elle a enfin estimé que le Conseil devrait inciter à utiliser un vocabulaire cohérent en matière de genre. On ne devrait ainsi plus uniquement catégoriser les femmes comme groupe «vulnérable».

Les panélistes invités à la tribune pour faire le point de la question étaient: M. Morez Doraid, Directeur de la division de la coordination d'ONU-Femmes; Mme Gloria Maira Vargas, Vice-Ministre du Service national des femmes du Chili; M. Ahmad Shaheed, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran; et Mme Bineta Diop, fondatrice et présidente de Femmes Afrique Solidarité, envoyée spéciale de l'Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité. Le débat était animé par Mme Christine Chinkin, Professeur de droit international des droits de l'homme à la London School of Economics.

M. Doraid a souligné que l'intégration des questions de genre était primordiale s'agissant des mandats des procédures spéciales du Conseil, ainsi que dans le cadre de leurs visites sur le terrain, indiquant à cet égard qu'ONU-femmes était tout à fait désireuse de coopérer avec les procédures spéciales, notamment en mettant à leur disposition les données ventilées dont elle dispose. M. Doraid a estimé nécessaire d'investir dans les capacités et l'expertise d'enquête sur les violences basées sur le genre, notamment la capacité à déployer cette expertise rapidement sur le terrain. Il a précisé que de porter l'attention sur les violences sexuelles n'empêche pas de prendre également en compte les autres formes de violences. Mme Maira Vargas a affirmé que le Conseil des droits de l'homme pourrait renforcer ses actions en intégrant les résolutions d'autres organismes des Nations Unies ayant pour objet la protection des droits de l'homme en situations de conflit, notamment la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. La Vice-Ministre chilienne a par ailleurs souligné que les processus de négociation et de construction de la paix seraient renforcés par la prise en compte de la violence sexuelle et de la nécessaire participation des femmes.

M. Shaheed a assuré que les titulaires de mandat s'efforçaient de mettre l'accent sur une perspective de genre dans leurs travaux. Le Rapporteur spécial sur la République islamique d'Iran a dit avoir constaté par ailleurs qu'il existait un fossé profond entre les lois et les pratiques. Cela constitue un obstacle significatif au progrès des initiatives internationales destinées à rééquilibrer les inégalités, de genre notamment. Mme Diop s'est félicitée des progrès accomplis par le Conseil pour intégrer la perspective de genre dans plusieurs de ses bureaux et mécanismes. Elle a toutefois regretté que les femmes figurent toujours parmi les plus pauvres et les plus marginalisées. L'envoyée spéciale de l'Union africaine a souligné que les conflits en Afrique rendaient les femmes particulièrement vulnérables aux violences sexuelles, notamment en République centrafricaine et au Soudan du Sud. Elle a expliqué que son combat au sein de Femmes Afrique Solidarité, visait à protéger les droits et la dignité des Africaines et de s'assurer que leur voix soit entendue dans les processus de paix et de résolution des conflits.

Au cours du débat, les délégations* ont jugé que l'intégration d'une approche de genre – entendue comme la prise en compte des préoccupations et de l'avis des femmes - dans les travaux du Conseil et du système des Nations Unies constituait une «tâche prioritaire». La plupart sont d'accord pour estimer que l'on doit s'assurer de la pleine participation des femmes dans tous les processus qui les concernent, en nommant par exemple des femmes en tant que titulaires de mandats des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Il faut aussi faire en sorte que les titulaires de mandats par pays rencontrent les organisations de femmes lors de leurs visites de terrain. S'agissant de pays sortant de conflits, les délégations appellent de leurs vœux la participation pleine et entière des femmes dans les processus de paix, de sécurité et de réconciliation.


Le Conseil poursuivra demain matin son débat général sur la promotion et la protection de tous les droits de l'homme. Il sera ensuite saisi du rapport de la Commission d'enquête sur la République arabe syrienne avant de tenir un débat interactif avec son Président, M. Paulo Pinheiro.


Intégration d'une perspective sexospécifique dans tous les travaux du Conseil et ceux de ses mécanismes

Déclaration liminaire

MME JANE CONNORS, Directrice de la division de la recherche et du droit au développement du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a déclaré que cette réunion constituait une excellente occasion de débattre de la manière dont le Conseil pouvait tenir compte des intérêts des deux sexes dans des situations nationales concrètes. Mme Connors a observé que ce n'était que lorsque l'on appliquait consciemment une analyse de genre que les manques en matière de protection et de mise en œuvre des lois apparaissaient nettement. Elle a estimé que le Conseil avait démontré de manière constante son engagement en faveur de l'intégration d'une perspective de genre dans ses travaux depuis qu'il a adopté, en 2007, sa résolution 6/30 sur «la prise en compte des droits fondamentaux des femmes dans tous les organismes du système des Nations Unies». Cet aspect apparaît de plus en plus souvent dans des résolutions établissant ou prorogeant les mandats des procédures spéciales. Il est tout aussi encourageant que les derniers rapports des mécanismes du Conseil intègrent quasiment tous la perspective de genre, a encore souligné Mme Connors.

Plusieurs commissions d'enquête et missions d'établissement des faits ont mis en lumière de quelle manière la discrimination envers les femmes recoupait d'autres violations, plaçant les femmes et les filles dans une position de vulnérabilité. Ces commissions et missions ont montré, par exemple, comment les attitudes patriarcales et les rôles sexuels stéréotypés avaient contribué à restreindre l'accès des femmes non seulement à la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels tels que le droit à la santé, à l'alimentation ou à l'éducation, mais aussi à la vie publique et à la justice. S'agissant de l'Examen périodique universel, Mme Connors a indiqué que sur les 35 469 recommandations faites aux États lors des dix-huit sessions de ce mécanisme, 7108, soit une sur cinq, étaient liées aux droits des femmes ou à l'égalité entre les sexes.

Mme Connors a néanmoins constaté que l'on observe, d'un rapport à l'autre, une inégalité dans les efforts en matière de prise en compte des intérêts et droits des femmes dans les activités du Conseil, tandis que les statistiques ventilées par sexe font souvent défaut. Mme Connors a souhaité que l'on s'assure que les droits et intérêts des femmes soient pris en compte systématiquement dans toutes les résolutions concernant des pays. Tous les mandats sans exception devraient être encouragés à accorder une attention particulière aux droits des femmes lors de leurs missions sur le terrain. Mme Connors a enfin estimé que le Conseil devrait inciter à utiliser un vocabulaire cohérent en matière de genre. On ne devrait ainsi plus uniquement catégoriser les femmes comme groupe «vulnérable»: les causes spécifiques de vulnérabilité affectant les femmes et les jeunes filles devraient être identifiées et analysées, afin de recommander des mesures permettant de les surmonter.

Exposés des panélistes

M. MOEZ DORAID, Directeur de la Division de la coordination de l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes (ONU-Femmes), a souligné le caractère primordial de la prise en compte des droits et des intérêts des femmes dans les mandats des procédures spéciales, notamment lors des visites sur le terrain. ONU-femmes est toujours disposée à coopérer avec les procédures spéciales, notamment en mettant à leur disposition ses propres statistiques ventilées. Pour M. Doraid, il est nécessaire d'investir dans les capacités en matière d'enquête sur les violences motivées par le sexe de leurs victimes, violences qui, selon l'expert, constituent des crimes internationaux à part entière. Cet investissement inclut la capacité à déployer l'expertise rapidement sur le terrain. M. Doraid a ajouté que le fait de se concentrer sur les violences sexuelles n'empêche pas de se pencher en même temps sur les autres formes de violences dont sont victimes les femmes et les filles et qui rentrent dans le cadre des mandats des commissions d'enquête. C'est pourquoi ces dernières doivent, elles aussi, intégrer la perspective de genre dans leurs recommandations.

MME GLORIA MAIRA VARGAS, Vice-Ministre au Service national des femmes du Chili, a observé que le Conseil des droits de l'homme pourrait renforcer son action en tenant compte des résolutions d'autres organismes des Nations Unies ayant pour objet la protection des droits de l'homme en situations de conflit, comme par exemple la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. Par ailleurs, les processus de négociation et de construction de la paix seraient renforcés s'ils incluaient, au nombre de leurs priorités, la lutte contre la violence sexuelle et la nécessaire participation des femmes aux processus politiques.

M. AHMAD SHAHEED, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran, a rappelé que les mandats spécifiques à des pays sont considérés, par les pays concernés, comme une mesure punitive. Cette réalité a un impact profond sur la capacité du Rapporteur spécial de dresser le bilan de la situation des droits de l'homme et d'établir une relation fructueuse susceptible de résulter en un progrès substantiel. Vu l'impossibilité de se rendre en Iran et vu l'absence de coopération des autorités de ce pays, le Rapporteur spécial a recours à des informations disponibles sur Internet. La situation de l'Iran peut aussi être appréhendée par le biais des centaines de journalistes, avocats, militants des droits de l'homme et universitaires émigrés qui constituent «une sorte de société civile iranienne en miniature». M. Shaheed a dit avoir constaté, par ailleurs, un fossé profond entre les lois et les pratiques. Cela constitue un obstacle important au progrès des initiatives internationales destinées à rééquilibrer les inégalités entre les sexes, en particulier.

MME BINETA DIOP, présidente-fondatrice de Femmes Afrique Solidarité et envoyée spéciale de l'Union africaine pour les femmes, la paix et la sécurité, s'est félicitée des progrès accomplis par le Conseil des droits de l'homme pour intégrer la perspective de genre dans plusieurs de ses bureaux et mécanismes. Mais Mme Diop a regretté que les femmes figurent toujours parmi les plus pauvres et les plus marginalisés, avec un accès limité aux droits, aux ressources et aux opportunités. Elle a souligné que les conflits en Afrique rendent les femmes particulièrement vulnérables aux violences sexuelles, surtout en République centrafricaine et au Soudan du Sud. Mme Diop a rappelé que son combat, par le biais de Femmes Afrique Solidarité, est de protéger les droits et la dignité des Africaines et d'assurer que leur voix soit entendue dans les processus de paix et de résolution des conflits.

Les initiatives récentes de Femmes Afrique Solidarité en République centrafricaine ont abouti dans l'envoi, par ce pays, d'une femme pour le représenter au Conseil des droits de l'homme en 2013. Au cours de cette année-là, le Conseil a adopté deux résolutions ayant conduit à la désignation d'un expert indépendant, Madame Keita Bocoum, qui présentera son rapport à cette assemblée la semaine prochaine.

Forte de son expérience, Mme Diop considère que les organisations féminines de la société civile et les groupes locaux constituent un lien essentiel entre la politique et l'action. Mme Diop s'est dite convaincue que le soutien à l'inclusion des femmes dans les processus de paix, de sécurité et de défense des droits de l'homme ne peut que porter des fruits.

Débat

L'Union européenne a qualifié de «tâche prioritaire» l'intégration d'une approche de genre dans les travaux du Conseil et du système des Nations Unies, consistant dans la prise en compte des préoccupations et des avis des femmes. Pour le Costa Rica, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, il convient en outre d'assurer l'autonomisation et la pleine participation des femmes dans tous les processus qui les concernent. C'est ainsi que, par le passé, ce groupe régional a insisté pour que l'on nomme neuf femmes en tant que titulaires de procédures spéciales.

La Norvège a observé, au nom des pays nordiques, qu'en raison de la difficulté à atteindre l'objectif de la promotion des droits des femmes, le Conseil des droits de l'homme et ONU-Femmes doivent jouer pleinement leur rôle, notamment en nommant des femmes titulaires de procédures spéciales. La participation des femmes est une priorité, a ajouté le Qatar, appelant à ce que les procédures spéciales et les organes de traités intègrent davantage de femmes. Le sexe doit en effet être un critère de sélection des titulaires de mandats, a enjoint le Canada. Le Canada a demandé aux experts de dire comment garantir la responsabilisation des auteurs de violences faites aux femmes et aux filles. L'Estonie s'est dite favorable à la mise en place d'un réseau permettant aux mécanismes du Conseil de mieux appréhender toutes ces questions.

Le Japon travaille, pour sa part, à faire en sorte que les femmes occupent un tiers des postes à haute responsabilité d'ici à 2020 ; entretemps, il a multiplié par cinq sa contribution à ONU-femmes. Au nom du Groupe africain, l'Éthiopie a appelé de ses vœux la pleine participation des femmes dans les processus de paix, de sécurité et de réconciliation. Le Monténégro a demandé, à cet égard, que la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité soit dûment appliquée.

Pour le Bangladesh, il importe de se pencher sur les causes premières des inégalités et de la violence à l'encontre des femmes, notamment dans les situations de conflit. Le Conseil devrait renforcer sa coordination avec les autres mécanismes qui s'occupent de cette question, ont dit les États-Unis, citant notamment l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour les femmes dans les conflits armés. La Suisse, qui attache une grande importance à la réalisation du droit des femmes et considère l'intégration d'une perspective de genre dans toutes les agences onusiennes comme essentielle, a demandé aux panélistes quels seraient les meilleurs moyens pour améliorer l'accès des femmes à la justice.

La Grèce considère que la promotion de l'égalité des genres est une mesure de sauvegarde, en particulier en période de crise économique, et estime qu'un certain nombre de lacunes doivent être comblées rapidement en adoptant des mesures concrètes à cet égard. L'Australie et la Nouvelle-Zélande regrettent que la promotion du droit des femmes ne soit pas toujours considérée comme une priorité fondamentale et souhaitent que les conférenciers disent comment le Conseil pourrait y remédier. Constatant que la discrimination persiste dans toutes les sociétés, quels que soient leur niveau de développement et leur régime politique, l'Algérie souhaite que des mesures ciblées soient envisagées, par exemple dans le programme de développement pour l'après-2015. Se félicitant que le Conseil accorde plus de place aux femmes, les Maldives encouragent les mécanismes existants à garantir en particulier une meilleure écoute des femmes sur les discriminations et les violences dont elles sont victimes. De son côté, la Thaïlande souhaite qu'une formation supplémentaire soit fournie aux fonctionnaires internationaux déployés sur le terrain pour les sensibiliser davantage aux violations des droits des femmes.

Reconnaissant l'importance des efforts déployés par le système onusien pour l'intégration des femmes de manière systématique et transparente tout en regrettant les retards pris par certains pays, l'Angola a souligné qu'il a intégré un système de quota de 30% de femmes dans le système public, de même que l'égalité de salaires, et a créé un Ministère des droits des femmes. Le Rwanda a souligné qu'il n'a cessé d'adapter ses lois à ce principe d'égalité entre hommes et femmes, souhaitant éradiquer toutes les formes de discrimination et de violence fondées sur le genre. Il souhaite une volonté politique concertée pour intégrer la perspective sexospécifique. Consciente que la question de la perspective de genre est essentielle à tous les niveaux, la Namibie respecte la parité dans ses institutions, mais regrette que les femmes restent très désavantagées pour les droits économiques, sociaux et culturels. Le Venezuela a indiqué avoir mis en place un cadre juridique pour sensibiliser la population aux questions de genre, comme dans les organisations populaires de base, les universités, les pouvoirs publics.

Considérant que le respect des droits de l'homme pour la moitié de la population mondiale doit être une priorité de la communauté internationale, la Slovénie a intégré cette perspective de genre dans ses institutions. L'Italie estime elle aussi que la promotion du respect des droits des femmes et de leur autonomisation est essentielle mais souligne que beaucoup reste à faire, raison pour laquelle elle défend la mise en place de politiques, citant son plan d'action en faveur des femmes et un gouvernement italien composé à 50% de femmes.

Pour la Turquie, il faut que tous les mandats spécifiques du Conseil, y compris les missions et commissions d'enquête, s'attaquent en priorité aux causes profondes des violences faites aux femmes. Les procédures spéciales doivent aussi aider les pays à combattre ces causes premières, a ajouté l'Organisation pour la coopération islamique.

La Constitution de l'Iraq proscrit en toute circonstance la violence à l'encontre des femmes, la délégation indiquant aussi que des quotas ont été mis en place pour promouvoir les droits des femmes. Dans le contexte des agissements de Daech (EIIL), l'Iraq lance un appel à la communauté internationale pour l'aider à protéger la femme iraquienne.

Le Soudan a pour sa part présenté les mesures prises par son gouvernement pour mieux défendre et protéger les droits des femmes, dont des groupes de protection des femmes et une division des femmes auprès du Ministère et de la justice. La Bulgarie aussi s'est dotée d'une série de programmes spécifiques incluant un Conseil national sur l'égalité, dans lequel la société civile est représentée. Le Maroc a également pris des mesures en encourageant par exemple la participation des femmes à la vie politique et publique ou son autonomisation. Dans ce contexte, quels critères peut-on retenir pour mesurer les performances en matière d'intégration de la perspective de genre dans les travaux du Conseil, a demandé le Maroc?

Pour la Lituanie, pays membre du Conseil de sécurité et qui présidera l'Union européenne en octobre, aucun domaine ne doit être négligé dans l'intégration de l'approche de genre dans les travaux du Conseil des droits de l'homme. Cela passe notamment par le renforcement des mécanismes dédiés à la protection des droits de la femme. Le Portugal a pour sa part demandé aux panélistes dans quels domaines ils estiment que la protection des femmes est la plus efficace.

S'agissant des organisations non gouvernementales, le Service international pour les droits de l'homme (au nom également de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, Amnesty International, Center for Reproductive Rights, et l'Association civile des filles mères – MADRE) a plaidé pour que cessent les représailles contre les défenseurs des droits fondamentaux des femmes. La Commission to Study Organization of Peace a évalué à cinq millions le nombre d'enfants qui ne sont pas scolarisés au Pakistan, dont 60 % de filles: dans les milieux ruraux, leur scolarité dure moins d'un an, a ajouté la délégation. La situation scolaire est identique en Afghanistan, a ajouté l'European Union of Public Relations, mettant en cause la culture imposée par les talibans.

Action Canada pour la population et le développement a dit que le conseil devait veiller à l'égalité et à la justice pour suivre l'intégration de la perspective sexospécifique, et consulter la société civile et les autres acteurs travaillant sur ces questions. Verein Sudwind Entwicklungspolitik a relevé les efforts déployés par le Conseil mais estime qu'il faut admettre que dans certains pays, comme l'Iran, les changements peuvent avoir des effets négatifs pour les femmes, et souhaite savoir quels types de mécanismes sont suggérés pour agir sur la volonté de ces États dans ce domaine.

Réponses et conclusions des panélistes

M. DORAID a souligné l'importance de ne pas faire l'impasse sur les droits économiques, sociaux et culturels et de ne pas mettre uniquement l'accent sur la violence sexuelle. Dans les situations de conflit, l'approche doit être plus globale. Il faut notamment évaluer le fardeau que représente la charge de famille lorsque l'un des deux époux, homme ou femme, reste seul responsable des enfants, par exemple. Quant à la question de l'établissement des responsabilités, de nombreuses résolutions ont été adoptées, a rappelé M. Doraid, soulignant la nécessité de la mise en place de «marqueurs sexospécifiques».

Le représentant d'ONU-Femmes a souligné l'importance de faire en sorte que les titulaires de mandats par pays rencontrent les organisations de femmes lors de leurs visites de terrain. Il a aussi souligné le caractère crucial de disposer de données ventilées. Quant aux commissions d'enquête sur des pays en conflit, celles-ci ne doivent pas se focaliser uniquement sur les crimes sexuels. Il a qualifié de très constructive la proposition d'une délégation en faveur du renforcement du lien entre le Conseil et le Comité pour l'élimination de toutes les discriminations à l'égard des femmes.

MME MAIRA VARGAS a souligné qu'il faut entendre la voix des femmes en général, et pas seulement celle des femmes victimes. Les femmes sont les mieux placées pour émettre des propositions sur la prise en compte de la dimension relative à l'éducation. Le Conseil devrait intégrer, à chacune de ses résolutions concernant des pays, les aspects relatifs à l'égalité entre les sexes, reprenant les grandes lignes de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, a estimé Mme Maira Vargas, rappelant le rôle crucial des femmes dans la résolution des conflits.

La Vice-Ministre chilienne a estimé que le Conseil devait aller au-delà des formulations juridiques. Il s'agit en effet de combattre les réalités empêchant les femmes de réaliser leurs droits, la situation étant très variable quant aux causes des inégalités sexuelles d'un pays à l'autre. Elle a rappelé que les plans d'action nationaux en vue d'appliquer la résolution 1325 devaient prévoir trois volets: la prévention en premier lieu, la participation des femmes et enfin leur protection.

M. SHAHEED est convenu qu'une meilleure coordination est souhaitable entre les titulaires de mandats par pays et thématiques. Les droits fondamentaux sont autant de prismes permettant de s'assurer dans quelle mesure les droits des femmes sont respectés. Les lois ne suffisent pas pour parvenir à l'égalité: elles doivent s'accompagner de plans d'action concrets.

Le Rapporteur spécial a reconnu qu'il y avait souvent un fossé entre la ratification des instruments des droits de l'homme et leur application. Il est souvent difficile d'obtenir des informations, particulièrement lorsque le pays concerné ne reconnaît pas le mandat d'une procédure spéciale. Il existe toujours néanmoins des sociétés civiles plus ou moins dynamiques qui permettent de se faire une idée de la situation. Il a noté par ailleurs qu'en ce qui concerne les objectifs du Millénaire pour le développement, on avait tendance à prendre davantage en considération ceux qui ont été atteints au détriment de ceux qui ne l'ont pas été. Cela peut être le cas en ce qui concerne les perspectives de genre que l'on a tendance à oublier de prendre en compte dans les objectifs atteints.

MME DIOP a pris acte de la volonté du Conseil de nommer davantage de femmes parmi ses titulaires de mandats. Elle a recommandé la création de synergies au niveau national afin de passer à la mise en œuvre des résolutions adoptées. Évoquant son expérience avec ONU-Femmes, Mme Diop a recommandé l'organisation, sur le terrain, de missions conjointes du Conseil de sécurité et du Conseil des droits de l'homme pour veiller au suivi de leurs résolutions respectives. Il convient de voir comment les gouvernements, les sociétés civiles et l'ONU peuvent travailler de concert.

L'envoyée spéciale de l'Union africaine a noté que si certains pays avaient d'excellents outils juridiques inspirés par la résolution 1325, la mise en œuvre ne suit guère. Souvent, dans les pays sortant de conflits, les questions de genre sont abordées mais rien ne permet de s'assurer que les principes soient suivis d'effets. S'agissant de la lutte contre l'impunité, elle a souligné l'importance de former un nombre plus important de femmes juges. Il faut aussi que les juges de sexe masculin soient sensibilisés dans leur formation à la perspective de genre.

L'animatrice du débat, MME CHRISTINE CHINKIN, Professeur de droit international des droits de l'homme à la London School of Economics, a évoqué à la fois les défis qui demeurent mais attiré aussi l'attention sur l'importance des bonnes pratiques. Parmi les difficultés, figurent les traditions, certaines croyances religieuses qui contribuent à entraver les droits des femmes. Elle a également dit avoir le sentiment d'une absence de volonté politique. S'agissant de l'«invisibilité» de certains droits des femmes, ceux-ci s'inscrivent dans la vie quotidienne. Le Conseil doit ainsi intégrer la résolution 1325 dans ses travaux. Les titulaires de mandats des droits de l'homme doivent en outre travailler avec les représentants de la société civile. Il faut prendre garde toutefois à ne pas considérer que ce qui marche dans un pays fonctionnera nécessairement dans un autre. Les titulaires de mandat doivent mettre le doigt sur ce qui est invisible et poser les questions qui dérangent, a-t-elle conclu.

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*Les délégations suivantes ont participé aux échanges avec les panélistes: Union européenne, Costa Rica (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes - CELAC), Norvège (au nom au nom des pays nordiques), Éthiopie (au nom du Groupe africain), Monténégro, Estonie, Autriche, Qatar, Bangladesh, Japon, Canada, États-Unis, Angola, Grèce, Venezuela, Slovénie, Namibie, Italie, Maldives, Algérie, Suisse, Rwanda, Australie, Thaïlande, Turquie, Soudan, Bulgarie, Lituanie, Pays-Bas, Iraq, Portugal, Maroc, Organisation de la coopération islamique, Service international pour les droits de l'homme (au nom également de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, Amnesty International, Center for Reproductive Rights, et l'Association civile des filles mères – MADRE), Commission to Study the Organization of Peace, European Union of Public Relations, Action Canada pour la population et le développement et Verein Südwind Entwicklungspolitik.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC14/119F