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CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT: DÉCLARATIONS DU PRÉSIDENT ENTRANT, DU KENYA, DE L'UKRAINE, DE L'AFRIQUE DU SUD, DE LA RUSSIE, DE LA TURQUIE ET DES ÉTATS-UNIS

Compte rendu de séance
La Conférence achève cette semaine la deuxième partie de sa session de 2014

La Conférence du désarmement a tenu, ce matin, la dernière séance publique de la deuxième partie de sa session de 2014 en entendant des déclarations du Kenya, de l'Ukraine, de l'Afrique du Sud, de la Fédération de Russie, de la Turquie et des États-Unis. Nombre d'intervenants ont commenté les propositions faites le 20 mai dernier par le Secrétaire général par intérim de la Conférence, M. Michael Møller, en vue de revitaliser les travaux. L'Ukraine, la Fédération de Russie et les États-Unis se sont en outre exprimés au sujet de la situation en Ukraine.

L'Ukraine a fait observer que la Fédération de Russie, pourtant État garant de cet accord, avait violé la quasi-totalité des articles du Mémorandum de Budapest; aussi, à compter de maintenant, l'Ukraine va-t-elle rechercher l'adoption d'un accord international qui remplacerait le Mémorandum de Budapest. Les États-Unis ont eux aussi souligné que la Fédération de Russie avait violé ses engagements au titre du Mémorandum de Budapest et ont indiqué soutenir l'application du cessez-le-feu par le Président Porochenko et ses efforts en cours pour assurer une désescalade de la situation en Ukraine et assurer la paix et l'unité du pays. Les États-Unis appellent toutes les parties impliquées à engager un dialogue à cette fin. La Fédération de Russie a pour sa part a affirmé qu'elle n'est pas une partie au conflit en Ukraine et qu'il faut maintenant que toutes les parties à ce conflit s'assoient à une table de négociation.

Le Président entrant de la Conférence, l'Ambassadeur Anthony Andanje du Kenya, a indiqué qu'il s'engagerait, tout au long de sa présidence de la Conférence, qui couvre l'intersession, à maintenir l'esprit de coopération parmi les six Présidents de la Conférence pour 2014 (le «P6»). Depuis janvier dernier, la Conférence a progressé de manière louable dans ses travaux, a-t-il déclaré le Président, faisant observer que le Groupe de travail informel (chargé de présenter un programme de travail) avait été rétabli et qu'il allait apparemment commencer ses travaux à la fin du mois de juillet. D'autre part, a ajouté M. Andanje, la Conférence a progressé en ce qui concerne son calendrier d'activités, le travail étant achevé en ce qui concerne les points 1 à 4 de l'ordre du jour – au sujet desquels les coordonnateurs respectifs sont en train de préparer leurs rapports – alors que le travail en ce qui concerne les points 5, 6 et 7 de l'ordre du jour va commencer demain pour, a priori, s'achever vendredi. M. Andanje a fait part de son intention, durant la période intersession, de poursuivre ses consultations avec les délégations, les coordonnateurs ainsi que les coprésidents et vice-coprésidents du Groupe de travail informel.


La troisième et dernière partie de la session de 2014 de la Conférence du désarmement se tiendra du 28 juillet au 12 septembre. La date et l'heure de la prochaine séance publique plénière sera annoncée ultérieurement.


Déclarations

Le Président de la Conférence, l'Ambassadeur ANTHONY ANDANJE du Kenya, a fait part de la grande importance qu'attache son pays à la diplomatie multilatérale, soulignant que «dans notre monde de plus en plus interdépendant, aucun des graves problèmes auxquels nous sommes confrontés ne peut être résolu par aucun de nous à lui seul». M. Andanje a ensuite indiqué qu'il s'engagerait, tout au long de sa présidence de la Conférence, à maintenir l'esprit de coopération parmi les «P6» (c'est-à-dire les six Présidents de la Conférence pour 2014). Depuis janvier dernier, la Conférence a progressé de manière louable dans ses travaux, a déclaré le Président, faisant observer que le Groupe de travail informel (chargé de présenter un programme de travail) avait été rétabli et qu'il allait apparemment commencer ses travaux à la fin du mois de juillet. D'autre part, a ajouté M. Andanje, la Conférence a progressé en ce qui concerne son calendrier d'activités, le travail étant achevé en ce qui concerne les points 1 à 4 de l'ordre du jour – au sujet desquels les coordonnateurs respectifs sont en train de préparer leurs rapports – alors que le travail en ce qui concerne les points 5, 6 et 7 de l'ordre du jour va commencer demain pour, a priori, s'achever vendredi. Les débats sur les questions de fond inscrites à l'ordre du jour ont été francs, sans retenue et parfois interactifs, ce qui est inhabituel à la Conférence, de sorte que l'on peut dire que «nous sommes allés au-delà des attentes», a déclaré le Président de la Conférence, jugeant encourageant le degré de flexibilité et d'ouverture qui a caractérisé ces débats.

M. Andanje a fait part de son intention, durant la période intersession (c'est-à-dire d'ici l'ouverture de la troisième et dernière partie de la session de 2014, le 28 juillet prochain), de poursuivre ses consultations avec les délégations, les coordonnateurs ainsi que les coprésidents et vice-coprésidents du Groupe de travail informel. Le Président a insisté sur son intention de conduire les travaux de la Conférence de manière ouverte et transparente et en gardant à l'esprit les intérêts et préoccupations des délégations. Il a indiqué être ouvert à toute proposition susceptible de contribuer à faire avancer les travaux. Enfin, indiquant n'être sous l'emprise d'aucune illusion, M. Andanje a souligné qu'il ne lui a pas échappé que les délibérations de la Conférence se sont déroulées dans un cadre informel; toutefois, a-t-il fait valoir, «contrairement aux seize années précédentes, nous avons été capables de maintenir une dynamique qui a donné un élan à nos travaux».

Au nom du Kenya, M. Andanje a ensuite fait part de sa conviction selon laquelle le désarmement constitue la meilleure protection contre les dangers de la prolifération nucléaire. Le Kenya accorde la plus haute priorité au désarmement nucléaire, a-t-il insisté. De l'avis du Kenya, a-t-il ajouté, si la Conférence ne parvient pas à lancer des négociations, cela n'a que peu à voir avec un manque de volonté politique ou avec des questions institutionnelles telles que celles afférentes au Règlement intérieur; cela est dû à l'environnement extérieur de la Conférence. La politique des intérêts nationaux en compétition les uns avec les autres continue de définir nos relations, a poursuivi le Kenya. L'environnement à l'extérieur de la Conférence reste inhospitalier pour la diplomatie multilatérale fondée sur la coopération, a-t-il insisté. La question politique est centrale pour expliquer le manque de mouvement vers le désarmement nucléaire, a déclaré le Kenya, précisant que les États dotés de l'arme nucléaire sont partisans d'une progression lente vers la réalisation d'un monde exempt d'armes nucléaires et préfèrent des mesures de contrôle des armements et de non-prolifération plutôt que des mesures de désarmement nucléaire. La croissance dans les dépenses en armement nucléaire intervient à un moment où les inégalités et la faim augmentent et où les services sociaux subissent des coupures radicales, a fait observer le Kenya. La rhétorique concernant la réduction des arsenaux nucléaires s'accompagne d'une modernisation simultanée des armes nucléaires qui démontre que les politiques de sécurité reposent toujours sur ces armes, a-t-il ajouté, jugeant cela contreproductif. Le Kenya a d'autre part déploré que l'on continue à croire que la dissuasion nucléaire est nécessaire pour la protection; une guerre nucléaire ne saurait en effet avoir de vainqueur, a rappelé le pays. Il convient d'accepter le fait que les armes nucléaires constituent une menace existentielle pour la race humaine, a insisté le Kenya, indiquant soutenir la démarche visant à attirer l'attention sur les conséquences humanitaires des armes nucléaires.

L'Ukraine a commenté les propositions avancées par le Secrétaire général par intérim de la Conférence, M. Michael Møller, en indiquant qu'elle soutenait la création d'un groupe de travail chargé de se pencher sur les méthodes de travail de la Conférence en augmentant le rôle de la présidence et en reconsidérant l'ordre du jour de manière à ce qu'il corresponde mieux aux priorités de désarmement du XXIème siècle. Bien que l'impasse au sein de la Conférence ne soit pas due à la règle du consensus, qui reste la seule garantie de voir les préoccupations de sécurité des États membres être protégées, cette règle du consensus doit être considérée comme un privilège permettant de trouver les moyens d'atteindre un accord général et non comme un instrument permettant de bloquer les négociations susceptibles d'aboutir à des compromis essentiels. D'autre part, l'Ukraine soutient l'idée d'une participation plus active de la société civile, notamment des ONG, dans les travaux de la Conférence et estime que tenir un forum informel de la société civile à la Conférence pourrait également contribuer à la revitalisation de cette instance. S'agissant de la proposition visant l'élaboration de conventions-cadres, l'Ukraine estime qu'elle mérite un examen attentif, d'autant plus que cette proposition est en correspondance directe avec l'engagement de l'Ukraine de parvenir à un monde exempt d'armes nucléaires par l'adoption d'un accord international global tel qu'une convention sur les armes nucléaires accompagnée de protocoles additionnels couvrant les matières fissiles et les garanties négatives de sécurité. Mais il faut admettre que la situation politique et sécuritaire actuelle dans le monde ne permet pas d'atteindre dans un bref délai cet objectif par l'adoption d'un traité unique, de sorte qu'il faudrait privilégier une approche à long terme fondé sur la mise en place d'un cadre d'instruments juridiques se renforçant mutuellement. Enfin, l'Ukraine tient à souligner que si des mesures volontaires politiquement contraignantes pourraient être un premier pas pour engager les travaux de fond, elles ne sauraient en aucun cas constituer une fin en soi et empêcher la Conférence de s'acquitter de sa tâche essentielle qui est de négocier des instruments juridiquement contraignants.

Il faut admettre que la confiance dans des instruments politiquement contraignants a été quelque peu compromise récemment, a poursuivi l'Ukraine, dénonçant le fait que l'un des États garants du Mémorandum de Budapest sur les garanties de sécurité en faveur de l'Ukraine avait enfreint cet accord et manqué à ses obligations internationales en menant une intervention militaire déclarée annexant une partie intégrante du territoire ukrainien, à savoir la République autonome de Crimée, et en alimentant des mouvements séparatistes dans la partie orientale de l'Ukraine, fournissant également des mercenaires, des munitions et des formations à des groupes armés terroristes dans les régions de Donetsk et de Lugansk. Pour tout dire, a insisté l'Ukraine, la vérité est que la Fédération de Russie a violé tous les articles de cet accord fondamental pour l'architecture sécuritaire internationale qu'est le Mémorandum de Budapest – à l'exception de son article 5 qui vise l'utilisation d'armes nucléaires contre l'Ukraine. Aussi, l'Ukraine a-t-elle estimé qu'il ne saurait exister de substitut à des instruments internationaux juridiquement contraignants pour assurer la souveraineté, l'indépendance, l'unité et l'intégrité territoriale d'un État. C'est pourquoi le Président Petro Porochenko a indiqué dans son discours inaugural qu'à compter de maintenant, l'Ukraine allait rechercher l'adoption d'un accord international qui remplacerait le Mémorandum de Budapest; un tel accord devra fournir des garanties directes et fiables de paix et de sécurité – jusqu'au soutien militaire dans le cas où l'Ukraine verrait son intégrité territoriale menacée.

L'Afrique du Sud a également commenté les propositions avancées par le Secrétaire général par intérim de la Conférence, M. Michael Møller, en se réjouissant qu'une convergence de vues semble apparaître quant à la nécessité d'un engagement accru de la société civile dans les travaux de la Conférence. Étant donné qu'il n'y a de consensus sur aucune question clef, l'idée d'une ou plusieurs conventions-cadres pourrait fournir l'occasion de rapprocher des points de vue jusqu'ici éloignés, a par ailleurs estimé l'Afrique du Sud. D'autre part, si l'Afrique du Sud n'est pas opposée à l'idée d'explorer des mesures volontaires politiquement contraignantes, de telles mesures ne sauraient se substituer à des accords juridiquement contraignants devant être négociés au sein de la Conférence. L'Afrique du Sud soutient en outre la création d'un organe subsidiaire chargé des méthodes de travail et destiné à revitaliser la Conférence. De l'avis de l'Afrique du Sud, la règle du consensus n'a pas été instituée pour octroyer un droit de veto empêchant la Conférence de traiter des questions inscrites à son ordre du jour, mais bien pour donner une voix égale à chaque pays et assurer que les intérêts de sécurité collectifs et nationaux vitaux sont protégés de manière adéquate. L'Afrique du Sud a par ailleurs indiqué être favorable à la création d'un organe subsidiaire sur la prévention d'une course aux armements dans l'espace et considère le projet de traité soumis en la matière par la Fédération de Russie et la Chine comme une contribution constructive. L'Afrique du Sud continue néanmoins d'accorder de l'importance au désarmement nucléaire et accorde la plus haute priorité à des progrès dans l'adoption des d'instruments juridiquement contraignants nécessaires en la matière.

La Fédération de Russie a répondu à l'intervention de l'Ukraine en affirmant que ce n'est malheureusement pas la première fois que l'on assiste à une tentative de politiser les travaux d'un organe tel que la Conférence. S'agissant du Mémorandum de Budapest, la Fédération de Russie a déclaré que parler d'un non-respect par la Fédération de Russie de ce mémorandum n'a pas de fondement puisque l'essentiel de ce mémorandum porte sur les garanties négatives de sécurité et le non-recours à l'utilisation ou à la menace d'utilisation des armes nucléaires. L'intégrité territoriale et l'indépendance de l'Ukraine ont été remises en question par les autorités ukrainiennes elles-mêmes et par les circonstances qui ont émergé en Ukraine, a poursuivi la Fédération de Russie. Il ne s'agit pas de quelque chose qui a été imposé de l'extérieur; les causes profondes de la crise résident en Ukraine même, a-t-elle insisté. Dire qu'il y a eu de l'extérieur une menace à l'intégrité territoriale de l'Ukraine est donc juridiquement et politiquement erroné, a déclaré la Fédération de Russie. Pour ce qui est de la prétendue annexion de la Crimée, la Fédération de Russie a déjà répondu à plusieurs reprises à cette allégation. Les peuples ont droit à l'autodétermination, comme cela est établi dans la Charte des Nations Unies, a rappelé la délégation russe, faisant valoir qu'une écrasante majorité de la population s'était prononcée pour un rattachement à la Fédération de Russie; parler d'annexion militaire dans ce contexte ne correspond donc pas non plus à la réalité. Quant à la grave accusation de soutien au terrorisme portée contre la Fédération de Russie, elle est totalement injustifiée et n'est étayée par aucun élément concret.

S'agissant également de la situation dans la partie orientale de l'Ukraine, la Fédération de Russie a rappelé que le Président Poutine avait appelé les opposants dans le sud et dans l'est de l'Ukraine à respecter le cessez-le-feu et à s'engager sur la voie du dialogue. Les bombardements qui sont opérés le sont non contre des terroristes mais contre des populations pacifiques, a poursuivi la Fédération de Russie, faisant état de milliers de réfugiés et de plus de 300 morts parmi les civils. La Fédération de Russie n'est pas une partie au conflit en Ukraine et il faut maintenant que toutes les parties à ce conflit s'assoient à une table de négociation, a conclu la Fédération de Russie.

La Turquie estime que la Conférence doit adopter un programme de travail par consensus et qu'il s'agit là du seul moyen de ressusciter cette instance pour lui permettre de négocier des instruments multilatéraux. Les problèmes rencontrés par la Conférence ne sont pas créés par ses procédures, sa composition ou ses dynamiques internes, a par ailleurs souligné la Turquie. Il n'y a pas à ce stade de consensus sur la question de l'élargissement de la Conférence, a-t-elle fait observer, appelant les membres à ne pas perdre de vue les principales questions de fond.

Les États-Unis ont souhaité réagir à l'intervention de la Fédération de Russie en rappelant qu'à leur avis, la Fédération de Russie a violé ses engagements au titre du Mémorandum de Budapest, ce qui est regrettable et sape la confiance nécessaire pour permettre de mener à bien les travaux. Les États-Unis soutiennent l'application du cessez-le-feu par le Président Porochenko et ses efforts en cours pour assurer une désescalade de la situation en Ukraine et assurer la paix et l'unité du pays; ils appellent toutes les parties impliquées à engager un dialogue à cette fin.

L'Ukraine a indiqué partager l'avis de la Fédération de Russie selon lequel la situation en Ukraine et autour de l'Ukraine est complexe et difficile. Il n'en demeure pas moins que l'Ukraine est engagée en faveur du dialogue; elle souhaite un dialogue. L'Ukraine a fait valoir que le plan pacifique proposé par le Président Porochenko vendredi dernier, 20 juin 2014, constituait un plan concret et détaillé qui permettra de stabiliser la situation dans le pays et d'apporter la paix et la sécurité dans les régions du territoire ukrainien affectées par les activités terroristes. À cet égard, l'Ukraine se félicite du soutien apporté à ce plan par de nombreux pays, dont la Fédération de Russie, ainsi que par plusieurs organisations internationales, au nombre desquelles l'ONU, l'OSCE et le Conseil de l'Europe. L'Ukraine a indiqué n'être en revanche pas d'accord avec un certain nombre d'allégations portées par la délégation russe. En effet, à compter du 20 juin dernier, l'Ukraine a complétement mis fin à ses opérations antiterroristes et respectera les engagements qu'elle a pris. Quant aux données relatives aux réfugiés qui auraient quitté le territoire de l'Ukraine, les chiffres mentionnés par la Russie qui ne correspondent pas à la réalité sur le terrain ni à ceux fournis par les organisations internationales qui s'occupent du problème des réfugiés.


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DC14/023F