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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EST SAISI DE RAPPORTS SUR L'EXPLOITATION DES ENFANTS ET SUR LES DROITS CULTURELS

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a été saisi, au cours d'une séance supplémentaire à la mi-journée, du rapport annuel sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, ainsi que d'un rapport sur les «processus mémoriels», dans le cadre des questions relatives aux droits culturels.

La Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, Mme Najat Maalla M'jid, a déclaré qu'elle avait pu constater, au cours de son mandat qui se termine cette année, que la vente et l'exploitation sexuelle des mineurs était un phénomène toujours croissant, et qu'il était devenu alarmant sur Internet. Elle constate aussi un accroissement de la vulnérabilité des enfants qui s'explique en partie par la tolérance sociale et l'impunité dont jouissent un grand nombre de prédateurs. Il faudra renforcer les législations, revoir les politiques mises en place. En outre, la dimension transnationale de ces questions impose la mise en place d'un cadre légal global harmonisé et d'un cadre de coordination transnationale efficace. La Rapporteuse spéciale a enfin rendu compte des missions qu'elle a effectuées au Kirghizstan, à Madagascar et au Bénin, dont les délégations ont pris la parole en tant que pays concernés.

De nombreuses délégations ont souligné la nécessité de dénoncer toutes les violations des droits des enfants, d'en trouver les causes profondes mais aussi de punir les auteurs, ce qui exige des cadres juridiques efficaces et adéquats. Certaines délégations ont souhaité disposer d'exemples de bonnes pratiques et d'une analyse des lacunes juridiques dans le domaine.

La Rapporteuse spéciale chargée du domaine des droits culturels, Mme Farida Shaheed, a pour sa part consacré son rapport de cette année aux processus mémoriels, sur le discours historique et le discours mémoriel dans les sociétés divisées ou sortant d'un conflit, a indiqué Mme M'jid qui a donné lecture de la présentation de Mme Shaheed en son absence. Mme Shaheed recommande notamment de promouvoir la connaissance de l'histoire pour favoriser la pensée critique, l'apprentissage analytique et le débat et encourage les États sortant de conflits ou de périodes de répression à s'engager dans des politiques mémorielles actives afin de reconnaître les victimes de graves violations des droits de l'homme et comme garantie de non-répétition. La Bosnie-Herzégovine a pris la parole à titre de pays concerné par le rapport de mission présenté par la Rapporteuse spéciale.

Plusieurs délégations ont partagé l'avis de la Rapporteuse spéciale en ce qui concerne la nécessité de rendre hommage à la mémoire des victimes. Cela peut en effet être un élément de la justice transitionnelle, un moyen de prévention ou de réparation. Certaines délégations ont évoqué les activités mémorielles entreprises au niveau national.

Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat qui a suivi ces présentations: Argentine, Australie, Botswana, Brésil, Burkina Faso, Chine, Commission nationale des droits de homme de Irlande du Nord, Costa Rica, Cuba, Égypte, Estonie, États-Unis, Fonds des Nations Unies pour enfance, France, Honduras, Indonésie, Malaisie, Maroc, République islamique d'Iran, Serbie, Suisse, Thaïlande, Union européenne, Venezuela, Yémen (au nom du Groupe arabe). Plusieurs organisations non gouvernementales ont également fait des déclarations*.


Cet après-midi, à 16 heures, le Conseil tient un débat interactif avec les Représentants du Secrétaire général chargés, respectivement, de la violence contre les enfants, et des enfants dans les conflits armés.


Examen de rapports sur la vente d'enfants et sur les droits culturels

Présentation des rapports

MME NAJAT MAALLA M'JID, Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants, a constaté que la vente et l'exploitation sexuelle des mineurs était un phénomène toujours croissant et qu'il était devenu alarmant sur Internet. Il y a aussi un accroissement tout aussi alarmant de la vulnérabilité des enfants, ce qui s'explique en partie par la tolérance sociale et l'impunité dont jouissent un grand nombre de prédateurs. La protection des enfants demeure insuffisante malgré les engagements répétés et les nombreuses actions entreprises.

Comment mieux agir face à ces phénomènes? Pour la Rapporteuse spéciale, il faudra renforcer les législations et leur effectivité, revoir les politiques et stratégies mises en place, dans un monde de plus en plus globalisé et de plus en plus connecté. Ces phénomènes étant multiformes, l'approche adoptée se doit d'être «intersectorielle, systémique, globale et fortement coordonnée, impliquant tous les acteurs concernés, y compris les enfants». L'implication responsable et soutenue des fournisseurs d'accès internet, télécom, secteurs du tourisme et du voyage et des compagnies financières est capitale pour lutter contre ces crimes. Et enfin la dimension transnationale impose la mise en place d'un cadre légal global harmonisé et d'un cadre de coordination transnationale efficace.

Avant de conclure, Mme M'jid a donné un compte-rendu de ses visites effectuées l'an dernier au Kirghizstan, à Madagascar et au Bénin.

La Rapporteuse spéciale a fait part de son émotion en faisant cette ultime présentation devant le Conseil. Elle a dit avoir eu «le plaisir d'attester d'excellentes pratiques au cours de mes différentes missions. Mais je me suis également indignée. Indignée de la tolérance sociale qui peut parfois exister autour de l'exploitation sexuelle des enfants. Indignée de la justification de ce phénomène, ou d'autres formes d'abus, par la pauvreté. Je peux vous assurer que le chemin est encore long. Il ne faudra ménager aucun effort pour assurer une vie plus digne à tous les enfants.»

Le rapport sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (A/HRC/25/48), dresse un bilan des six années de mandat de la Rapporteuse spéciale, qui a constaté une évolution préoccupante de la nature de la vente et de l'exploitation sexuelle d'enfants, ainsi que de l'ampleur prise par le phénomène, même s'il est mieux connu aujourd'hui. Les facteurs de risque s'accroissent et se multiplient. La tolérance sociale face à ces crimes, l'impunité, la corruption et la précarité socioéconomique demeurent les principaux obstacles que rencontrent ceux qui luttent contre ce fléau. Pour prévenir et réprimer efficacement la vente et l'exploitation sexuelle d'enfants au cours des prochaines années, il faudra renforcer ou mettre au point des stratégies globales relatives aux droits de l'enfant, fondées à la fois sur des systèmes de protection nationaux complets et axés sur les droits de l'enfant et une coopération transnationale globale également axée sur les droits de l'enfant.

Trois additifs au rapport portent sur les missions effectuées par la Rapporteuse spéciale au Kirghizistan (A/HRC/25/48/Add.1), à Madagascar (A/HRC/25/48/Add.2), et au Bénin (A/HRC/25/48/Add.3).

Présentant également le rapport de la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, Mme FARIDA SHAHEED, qui n'a pu être présente aujourd'hui, Mme M'jid a indiqué que le rapport de cette année sur les droits culturels constitue la deuxième de deux études que la Rapporteuse spéciale a réalisées sur le discours historique et le discours mémoriel dans les sociétés divisées ou sortant d'un conflit. Depuis la création de son mandat, et en particulier lors des visites sur le terrain, la Rapporteuse spéciale a reçu à plusieurs reprises des témoignages soulignant l'importance cruciale de discours historiques et commémoratifs pour la formation des identités collectives contemporaines. En dernière analyse, cette question concerne la grande majorité, sinon la totalité, des sociétés, y compris celles qui ont connus des conflits internationaux ou internes dans le passé récent ou moins récent, les sociétés postcoloniales et les sociétés qui ont connu l'esclavage, notamment.

Mme Shaheed recommande dans son rapport que la connaissance de l'histoire favorise la pensée critique, l'apprentissage analytique et le débat. En particulier, elle a encouragé les États sortant de conflits ou de périodes de répression à s'engager dans des politiques mémorielles actives afin de reconnaître les victimes de graves violations des droits de l'homme et comme garantie de non-répétition. Cependant, la Rapporteuse spéciale a noté que, si les processus de commémoration peuvent servir à la réconciliation, ils peuvent parfois constituer un obstacle pour y parvenir. La commémoration doit être comprise comme un processus qui offre l'espace nécessaire aux personnes touchées d'exprimer leurs récits. La Rapporteuse spéciale recommande d'adopter, en matière de justice transitionnelle, une approche fondée sur les droits culturels. Ces droits appellent en effet à mettre en œuvre des politiques visant à promouvoir l'interaction culturelle et la compréhension entre les personnes et les communautés, le partage des points de vue sur le passé et la conception d'un paysage culturel qui reflète la diversité culturelle.

La Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels a soumis un rapport sur les processus mémoriels (A/HRC/25/49) qui examine la manière dont les sociétés sortant d'un conflit ou les sociétés divisées font un travail de mémoire; elle étudie en particulier les éléments mémoriels et les musées d'histoire ou de la mémoire, dont elle souligne l'utilité pour atteindre des objectifs sociaux de la justice de transition. Le rapport examine aussi certaines difficultés posées par le travail de mémoire et formule un certain nombre de recommandations fondées sur le principe que, par travail de mémoire, on entend le processus qui offre à ceux qui ont été touchés par des violations des droits de l'homme les lieux dont ils ont besoin pour structurer leurs récits.

Un additif au rapport est consacré à une mission effectuée en Bosnie-Herzégovine (A/HRC/25/49/Add.1, à paraître en français)

Parties concernées

La Bosnie-Herzégovine a estimé que les recommandations de la Rapporteuse spéciale sur les droits culturels donneront un nouvel élan au pays, qui est résolu à préserver son caractère multiculturel, qu'il considère comme une richesse. La Bosnie-Herzégovine comprend trois peuples constitutifs et 17 minorités nationales. Le développement durable et le bien être de toutes ces composantes ne pourront être obtenus que par des efforts constants pour développer les droits de tous. Le pays a réformé son système éducatif essentiel dans le cadre de la réconciliation et du respect de la diversité culturelle. La Bosnie-Herzégovine est heureuse que la Rapporteuse spéciale ait constaté les avancées réalisées, tout en étant pleinement consciente des efforts encore à faire. La Bosnie-Herzégovine voit son important patrimoine culturel comme une richesse pour l'avenir. Des mesures importantes ont été prises en faveur des droits des minorités, avec notamment la mise en place d'un conseil rom pour cette minorité, dans le cadre d'un plan décennal 2005-2015 pour l'insertion des Rom.

Le Kirghizistan a remercié la Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants d'avoir reconnu les mesures prises par son gouvernement au moyen de nombreux plans d'action, lois et autre mesures. Le Kirghizistan, qui a une population jeune, avec 38,2% d'enfants de moins de 15 ans, collabore avec les Nations Unies et applique dans sa législation les dispositions des divers instruments internationaux relatifs aux droits de l'enfant et à leur protection. Un code de l'enfance a été adopté en 2012 avec la participation de la société civile; il repose sur le principe de la défense des intérêts supérieurs de l'enfant, y compris contre les activités criminelles et la pornographie. Il est prévu de créer des services spécialisés pour la protection de l'enfance dans les bureaux régionaux de l'ombudsman. La délégation a aussi souligné que le Kirghizistan présentera cette année son rapport périodique au Comité des droits de l'enfant.

Madagascar a insisté sur le caractère délicat de la protection de l'enfance et a dit partager le constat sévère et outré de la Rapporteuse spéciale. Madagascar a bien pris en compte les recommandations qui lui ont été faites sur la nécessité d'une forte implication de l'État, notamment face aux pratiques de tourisme sexuel et à la pornographie et la prostitution infantiles, si contraires aux traditions de Madagascar. La délégation a rappelé la pauvreté extrême du pays, avec ses conséquences, comme l'absence d'éducation et son cortège de conditions dégradantes. Madagascar estime que la rhétorique diplomatique n'est guère utile et veut des actions pour protéger ses enfants. Le président nouvellement élu a défini comme priorité nationales la promotion de l'état de droit et des droits de l'homme. L'accès à l'école primaire est désormais obligatoire et gratuite, ce qui permettra de rescolariser les enfants et de mieux les protéger ainsi contre toute forme d'exploitation, notamment sexuelle. Madagascar appelle à une forte mobilisation internationale pour lui fournir une assistance et s'engager dans une lutte mondiale contre le tourisme sexuel. Au-delà de son propre cas, Madagascar demande que cesse le massacre de nos enfants, meurtris par les conséquences de la guerre, affamés ou condamnés à errer dans les rues. Nos enfants payent de leur vie le cynisme économique et les arrogances stratégiques. La communauté internationale doit agir ensemble pour «préserver leur sourire et l'expression de leur innocence».

Le Bénin a déclaré que la Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants avait pu, lors de sa mission, rencontrer tous les acteurs de la protection de l'enfance du pays, ce qui lui a permis de mesurer les enjeux et défis. Les droits de l'enfant constituent une priorité pour le Gouvernement béninois, qui a prévu d'importantes mesures pour protéger leurs droits et assurer leur développement. Le Bénin a ainsi adopté plusieurs plans d'actions et diverses mesures, comme l'ouverture d'une ligne téléphonique gratuite à l'office de protection des mineurs, des actions de sensibilisation et d'éducation, la surveillance des activités de centre de jeux pour enfants et d'Internet afin de lutter contre les déviances pornographiques ou encore de la lutte contre la vente et le trafic d'enfants. Le projet de code de l'enfant actuellement en discussion prévoit toute une série de mesures juridiques et institutionnelles pour assurer la protection de l'enfance et réprimer les abus. Il reste cependant beaucoup à faire et il existe aussi des obstacles socioculturels, notamment l'analphabétisme des parents, en particulier dans les campagnes. Toutefois, le Bénin a établi l'enseignement primaire gratuit qui a permis d'assurer une scolarisation de plus de 98% à ce niveau, ainsi que la gratuité des soins de santé primaires. Le Gouvernement du Bénin est disposé à mettre en œuvre les recommandations présentées par la Rapporteuse spéciale avec le soutien de la communauté internationale.

Débat interactif sur la vente d'enfants et l'exploitation des enfants

Pour lutter contre le phénomène de la vente, de la prostitution ou de la pornographie mettant en scène des enfants, il faut disposer d'un système juridique qui les érige en crimes, empêche qu'ils se produisent et apporte soutient et assistance aux victimes a plaidé l'Argentine. L'Égypte a déclaré que c'est précisément l'objet de nouvelles lois adoptées par le pays, avant d'estimer qu'au niveau international, les mesures prises actuellement sont insuffisantes au regard en particulier de l'importance prise par Internet. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a dit rejoindre l'appel de la Rapporteuse spéciale pour l'adoption de cadres juridiques et institutionnels renforcés pour la protection des enfants contre la violence et l'exploitation et a souhaité savoir comment cette question pouvait être abordée dans le cadre du programme de développement pour l'après 2015. L'Australie et l'Union européenne ont quant à elles souhaité entendre des exemples de bonnes pratiques et une analyse des lacunes juridiques en ce qui concerne la protection des enfants.

Le Burkina Faso a rappelé que chaque État partie au Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants devait adapter sa législation aux dispositions de ce texte et a présenté un certain nombre de mesures prises en ce sens. Pour le Maroc, il faut des approches holistiques et participatives de tous les acteurs intervenant et agissant dans le domaine de la protection des enfants. Le Botswana estime qu'il y a nécessité urgente à développer et renforcer les législations nationales avec des structures socioculturelles favorables afin d'assurer une protection significative des enfants, notamment dans l'usage d'Internet et dans les situations de conflits.

Sur le plan national, l'Indonésie a indiqué poursuivre ses efforts dans son engagement à combattre la traite et l'exploitation des mineurs. Elle a ratifié les instruments internationaux, la Convention des droits de l'enfant en premier lieu, ainsi que le Protocole facultatif. Un plan national d'action lancé en 2009 arrive à son terme à la fin de cette année. L'Estonie a mis l'accent sur les mesures prises pour assurer un accès sûr et libre à Internet tout en protégeant les enfants, dans le cadre du projet Smartly on the Web.

Le Brésil a dit accorder la plus grande priorité à la protection de l'enfance, soulignant que les grandes manifestations sportives permettaient de mener des campagnes contre le tourisme sexuel en particulier. Le Costa Rica a indiqué qu'il veillait à assurer une protection particulière des mineurs pour les aider à faire face aux situations de vulnérabilité ou quand ils sont victimes d'une atteinte à leurs droits. Parmi les initiatives concrètes prises par le Costa Rica figure la création d'une ligne téléphonique, ainsi qu'un système de dénonciation passant aussi bien par les moyens classiques que par les technologies de l'information et de la communication.

La Chine a fait valoir qu'elle réglementait Internet et que la loi punit fermement la pornographie mettant en scène des enfants, avant d'appeler à créer un réseau vaste et international visant à protéger les enfants de ce phénomène. Les États-Unis ont mis en avant leur premier plan quinquennal fédéral pour lutter contre la traite des personnes, y compris les enfants, et venir en aide aux victimes, qui sont impliquées dans l'élaboration des mesures d'aide. Quant au Venezuela, il a expliqué avoir adapté sa législation nationale à la doctrine de protection intégrale des enfants consacrée par la Constitution de 1999. La révolution bolivarienne se préoccupe beaucoup de l'éradication de ces phénomènes. Il s'agit d'impulser le renforcement du cadre légal vénézuélien pour sanctionner les réseaux de délinquance organisée.

La République islamique d'Iran a observé que la vente d'enfants et la prostitution et pornographie mettant en scène des enfants s'aggravaient avec la désacralisation et la désagrégation de la structure familiale, la sexualisation précoce des enfants et la place prise par Internet. La délégation a insisté sur le rôle protecteur de la famille, la responsabilité des medias, des entreprises et des fournisseurs d'accès dans la diffusion d'images pornographiques et celle des Gouvernements pour la protection des enfants. Pour la Thaïlande, c'est la conjugaison des défis de la mondialisation, des catastrophes naturelles ou humaines et des guerres qui aggrave l'exploitation des enfants, et les États doivent mettre en place des systèmes de sécurité sociale adéquats capables de protéger les enfants les plus pauvres et les plus vulnérables en cas de crise. Elle a aussi prôné le renforcement des moyens des agences compétentes et de la répression des auteurs d'atteintes aux droits des enfants.

Le Yémen, au nom du Groupe arabe, a souligné la nécessité de dénoncer toutes les violations des droits des enfants, d'en trouver les causes profondes mais aussi de punir les auteurs. Il a également alerté le Conseil sur la situation des enfants palestiniens vivant sous occupation israélienne. Quant au Honduras, il constate que le caractère multidimensionnel de la vente et de l'exploitation des enfants contraint à réaliser un travail de coordination considérable entre les parties intéressées. Ainsi, le Honduras a créé une Commission interinstitutionnelle contre l'exploitation sexuelle commerciale des enfants et des adolescents.

Cuba a estimé que l'action coordonnée de tous les pays, la communauté internationale et la lutte contre les causes de ce phénomène, telles que la pauvreté, la discrimination, l'insécurité et le crime organisé doivent recevoir la plus grande attention des organisations internationales et de chaque gouvernement. Concernant les nécessaires initiatives collectives, la France a dit partager l'analyse de la Rapporteuse spéciale sur l'importance d'une réponse coordonnée multidimensionnelle, accompagnée d'une forte volonté politique. La Malaisie a exprimé un point de vue similaire, que le fléau nécessite une approche et des stratégies d'ensemble impliquant la formulation et la mise en œuvre de politiques sociales traitant les causes de ces phénomènes. En conséquence, les recommandations contenues dans le rapport méritent plus ample considération par le Conseil.

La Commission nationale des droits de l'homme de l'Irlande du Nord a indiqué qu'en l'absence d'un accord avec l'Irlande du Nord, l'Agence nationale contre le crime du Royaume Uni, qui intègre dans ses compétences l'exploitation sexuelle des enfants, ne peut pleinement opérer en Irlande du Nord.

Parmi les organisations non gouvernementales, l'Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, au nom également de Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs, a attiré l'attention du Conseil sur la situation des mères porteuses marchandes, estimant qu'on pouvait assimiler leur activité à de la vente d'enfants, puisque des personnes issues de pays à haut revenu vont dans des pays pauvres où des femmes sont encouragées à louer leur corps, liée par un contrat juridique d'achat, ce qui représente une atteinte à la dignité humaine. Human Rights Now a alerté le Conseil sur la situation des enfants dans les mines de charbon en Inde, souvent victimes de la traite, expliquant que des milliers d'enfants se voient voler leurs droits et leur enfance et sont forcés de travailler, en violation des engagements pris par l'Inde.

Franciscain international a alerté le Conseil sur le phénomène des enlèvements d'enfants dans les hôpitaux du Cameroun, à des fins d'adoption et sur les mariages précoces dans le Nord du pays. Bureau international catholique de l'enfance, au nom également de Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs et la Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul, a mis l'accent sur la coordination des efforts de la police, du système judiciaire et de l'action sociale pour une meilleure protection des enfants, raison pour laquelle les États doivent apporter toute l'aide dont ces institutions ont besoin. Terre des Hommes s'est pour sa part déclaré préoccupée par un nouveau phénomène, le tourisme sexuel par caméra interposé, qui conduit des enfants à pratiquer des actes sexuels devant des caméras. Une enquête menée par l'ONG a révélé que la plupart des enfants impliqués dans ce nouveau phénomène sont originaires des Philippines.
Débat interactif sur les processus mémoriels (droits culturels)

Le Yémen, au nom du Groupe arabe, a dit partager l'avis de Mme Shaheed sur la nécessité de rendre hommage à la mémoire des victimes. Pour le Maroc, il est en effet regrettable que ce devoir de mémoire ne soit toujours pas intégré dans les processus transitionnels, car il participe des garanties de non-répétition. L'Argentine a expliqué que le travail de mémoire avait été un élément de la démocratisation du pays après la dictature militaire. Des lieux et sites de violation des droits de l'homme ont par exemple été sanctuarisé et des plaques rendant hommage aux victimes ont été apposés ou transformés en musées.

Le travail de mémoire peut en effet être un élément de la justice transitionnelle, un moyen de prévention ou de réparation, a estimé la représentante de l'Union européenne, qui a toutefois ajouté que ce devoir de mémoire doit se faire dans un climat de respect de la liberté d'expression, des diversités ethniques et culturelles et de participation de la société civile. Pour la Suisse aussi, il ne faut en effet pas négliger cette question dans les processus transitionnels, mais le processus mémoriel lui-même est aussi important que sa réalisation, dans l'intérêt des victimes et dans le souci d'apaiser les consciences et éviter toute répétition à l'avenir.

Le devoir de mémoire est aussi un processus d'espoir qui ouvre la voie vers une réconciliation nationale, a poursuivi l'Algérie qui a connu une période sombre marquée par une décennie de terrorisme. Pour la Chine, l'édification de monuments pour la mémoire n'a pas pour seule fonction d'honorer les victimes, mais aussi de servir de leçon d'histoire et de garantie de non-répétition. C'est à cette fin que les autorités ont instauré une journée nationale de la mémoire pour les victimes du massacre de Nanjiin (Nankin) en 1937 par l'armée japonaise, a expliqué le représentant.

Mais la Serbie a mis l'accent sur la complexité des processus mémoriels dans les sociétés post-conflit, qui provoquent parfois une politisation qui va à l'encontre des objectifs recherchés de réconciliation et de garanties de non-répétition. Les États doivent donc se montrer prudents et veiller à la transparence et à l'inclusion de tous les acteurs concernés, et veiller à ce que le travail de mémoire sur les événements récents ne fasse pas négliger celui qui concerne le passé plus lointain.

L'Estonie s'est dite convaincue de l'importance de la gestion publique des lieux de mémoire et soutient le principe du travail de mémoire et de la création d'espaces qui donnent aux victimes l'occasion de présenter leur témoignages, et qui impliquent les artistes, par exemple dans le cas d'un mémorial des victimes de l'holocauste dans le pays ou encore d'un musée des occupations, ce dernier étant une initiative privée.

Consciente des risques de manipulation de l'histoire, la Suisse a souhaité savoir ce que pouvait faire la communauté internationale pour éviter ces détournements. Le Costa Rica, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a dit reconnaître le mérite des politiques culturelles susceptibles de promouvoir des valeurs reflétant le respect de la vie, de la dignité humaine, des cultures plurielles des principes de justice, de tolérance et le rejet de la violence comme éléments intégrateurs dans la construction d'une culture de paix.

La Commission nationale des droits de l'homme de l'Irlande du Nord a indiqué au Conseil avoir publié un rapport sur l'absence de défense des droits culturels en Irlande du Nord en tant que région sortant d'un conflit. La Commission nationale des droits de l'homme du Royaume du Maroc a pour sa part fait état des progrès en cours et de ceux déjà réalisés par son Gouvernement, notamment la reconnaissance de langues et cultures minoritaires.

S'agissant des organisations non gouvernementales, Human Rights Advocates a alerté le Conseil sur la vente d'objets culturels et demandé que les États et institutions adoptent des mesures de rapatriement de ces objets d'arts auprès des peuples d'origine. L'International Buddhist relief Organization a déclaré que la culture bouddhiste était en disparition dans la péninsule indienne, en raison notamment de la persistance des castes. Libération a également déploré que le système de castes maintienne les Dalits dans un statut de rang inférieur. Chinese People Association for Peace and Disarmament a reconnu les lacunes persistantes en matière de droits de l'homme en Chine, tout en soulignant que de nombreux programmes ont été mis en œuvre pour la protection des peuples et langues minoritaires, notamment la conservation de leurs langues et cultures par le biais de l'enseignement bilingue.

Conclusions

MME M'JID a salué la volonté des États qu'elle a visités de mettre en œuvre les recommandations émises suite aux missions effectuées. En revanche, elle a déploré que, cinq ans et demi après la Conférence mondiale de Rio sur l'exploitation des enfants, de nombreuses recommandations n'aient pas encore été mises en œuvre. Les enfants victimes doivent bénéficier d'une aide juridique, mais aussi médicale et psychologique. Par ailleurs, il faut utiliser Internet pour en faire un outil de prévention et d'autonomisation des enfants. La Rapporteuse spéciale a encore estimé que le Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants est complémentaire aux Conventions de Lanzarote.

Mme M'jid a noté que la coopération internationale en la matière, bilatérale ou multilatérale, se renforce grâce à l'engagement de multiples acteurs à tous les niveaux. Enfin, il est très important de disposer d'indicateurs qui reflètent la vulnérabilité des enfants, comme le taux d'enregistrement des enfants à la naissance, le pourcentage de victimes ayant reçu une assistance juridique et ayant été réhabilitées, les délais des procédures judiciaires ou encore les peines prononcées. La Rapporteuse spéciale a conclu son intervention en remerciant les délégations qui l'ont soutenue tout au long de son mandat, qui s'achèvera prochainement, et en souhaitant bonne chance à son successeur.
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Les organisations non gouvernementales suivantes ont fait des déclarations dans le cadre du débat interactif sur la vente d'enfants et l'exploitation des enfants et sur les processus mémoriels (droits culturels) *: Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII (au nom également de Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs), International Buddhist Relief Organisation, Libération, Bureau international catholique de l'enfance (au nom également de Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs et la Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul), Terre des Hommes, Human Rights Advocates, International Buddhist relief Organization, Libération, et Chinese People Association for Peace and Disarmament.


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HRC14/025F