Aller au contenu principal

LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE DES RAPPORTS SUR LE MALI, LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE ET SRI LANKA

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a été saisi ce matin de rapports sur la situation des droits de l'homme au Mali, en République centrafricaine et à Sri Lanka.

Mme Navi Pillay, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a présenté le rapport que le Conseil lui a demandé de préparer sur la promotion de la réconciliation et de la redevabilité à Sri Lanka. La Haut-Commissaire a notamment fait part de son trouble face à la poursuite du harcèlement et de l'intimidation des militants des droits de l'homme qui se poursuivent alors même que se déroule cette session du Conseil. Cinq ans après la fin du conflit, le Conseil ne doit pas oublier l'étendue et la gravité des violations qui ont été commises à la fin du conflit et qui a fait plusieurs milliers de morts, de blessés et de disparus parmi les civils.

Intervenant à titre de pays concerné, Sri Lanka a rappelé que le rapport découle d'une résolution du Conseil des droits de l'homme qu'il a rejetée. Elle a dénoncé des conclusions marquées par des préjugés et la politisation et a fait état de nombreuses erreurs et perceptions erronées dans le projet de rapport, malgré la visite de la Haut-Commissaire dans le pays.

Lors de la longue «discussion» concernant Sri Lanka, les délégations ont appelé les différentes communautés du pays à se réconcilier sur la base d'un dialogue constructif et les autorités à mener des enquêtes sur les allégations de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire lors du conflit, afin d'établir les responsabilités et punir les coupables. De nombreuses délégations ont souligné les progrès accomplis par Sri Lanka, tout en relevant que beaucoup reste à faire pour trouver des solutions durables. Certaines délégations ont déploré la poursuite des intimidations et arrestations arbitraires de militants des droits de l'homme. Plusieurs organisations non gouvernementales ont demandé la création d'une commission d'enquête internationale sur la situation à Sri Lanka, conformément aux recommandations de la Haut-Commissaire.

Les délégations suivantes se sont exprimées lors de la discussion sur la situation à Sri Lanka: Grèce (au nom de Union européenne), Monténégro, États-Unis, France, Irlande, Royaume-Uni, Autriche, Ex-République Yougoslave de Macédoine, Japon, Allemagne, Égypte, Norvège, Suisse, Soudan, Thaïlande, Belgique, Canada, Belarus, Soudan du Sud, Bangladesh, Myanmar, Ouzbékistan, Azerbaïdjan, Danemark, Bhoutan, Ouganda, Bolivie, Nigeria, République islamique d’Iran, Zimbabwe, République démocratique Lao. Plusieurs organisations non gouvernementales ont également pris la parole*.

Dans le cadre de l'examen des questions relatives à l'assistance technique et au renforcement des capacités, l'Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme au Mali, M. Suliman Baldo, a affirmé que son pays avait accompli des progrès remarquables dans la mise en œuvre de sa sortie d'une crise profonde «ayant débouché sur l'effondrement de l'État». En dépit de progrès, le pays demeure fragile et M. Baldo s'est dit particulièrement préoccupé par les récentes vagues de violence qui se déroulent «entre les différentes communautés ethniques et raciales du Nord». L'expert indépendant a constaté que, dans le contexte actuel, les risques de violations graves des droits de l'homme sont particulièrement importants: «le moindre incident peut mettre le feu aux poudres».

Le Ministre de la justice du Mali, M. Mohamed Aly Bathily, a souligné Les nombreuses violations des droits de l'homme occasionnées par l'occupation du pays par des bandits responsables de crimes, de meurtres, d'exécutions sommaires, de disparitions forcées ou encore de viols. Le Gouvernement a donc entamé une réforme de la justice afin de juger tous les auteurs de crimes graves. Il a également mis en place une commission des droits de l'homme et une commission vérité, justice et réconciliation. En dépit de ses efforts, le Mali continue de manquer de ressources et lance un appel à la communauté internationale, afin qu'elle l'assiste dans cette tâche.

Les délégations ont appelé le Mali à lutter efficacement contre l'impunité des auteurs de violations des droits de l'homme, notamment par le renforcement de l'autorité de l'État dans le nord du pays en mettant sur pied des institutions robustes. Plusieurs ont exhorté la communauté internationale à poursuivre son soutien au Mali.

Les délégations suivantes sont intervenues dans le cadre du débat interactif sur le Mali: Union européenne, France, États-Unis, Australie, Irlande, République tchèque, Autriche, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Burkina Faso, Sénégal, Côte d’Ivoire, Niger, Algérie, Maroc, Égypte, Togo, Espagne, Chine, Royaume-Uni, Soudan, Soudan du Sud, Djibouti. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a également fait une déclaration, ainsi que cinq organisations non gouvernementales*.

L'Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine, Mme Marie-Thérèse Keita Bocoum a rendu compte de sa première mission en République centrafricaine, qu'elle a effectuée au début du mois. Elle a constaté que de nombreuses violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire sont encore à déplorer. En l'absence de forces de sécurité et de magistrats, la lutte contre l'impunité stagne. La situation est catastrophique mais pas désespérée si l'on agit vite; il faut œuvrer à la réconciliation intercommunautaire, ainsi qu'à la restauration de la paix et de la culture du «vivre ensemble».

La République centrafricaine, en tant que pays concerné, a réitéré qu'«un plan Marshall est nécessaire si on veut sauver la République centrafricaine du chaos où elle se trouve». L'impunité semble s'établir comme règle et c'est la population centrafricaine qui est la seule et unique victime des violences commises par des groupes armés, des milices armées et des bandits de grand chemin.

Au cours du débat qui a suivi, les délégations ont appelé la communauté internationale à fournir l'assistance nécessaire aux autorités de transition afin de rétablir la paix et l'état de droit en République centrafricaine. Certaines délégations ont appelé à mettre sur pied un dialogue intercommunautaire inclusif pour renouer les liens entre les différentes composantes de la société centrafricaine. Plusieurs intervenants ont insisté sur l'importance de déployer une opération de maintien de la paix rapidement.

Les délégations suivantes ont pris part au débat sur la situation en République centrafricaine: Union européenne, Suisse, République tchèque, Norvège, Togo, Lituanie, France, Belgique, Irlande, Espagne, Organisation pour la Coopération Islamique, Djibouti, Tchad, Sénégal, Gabon, Maldives, Algérie, Maroc, Chine, Soudan, Égypte, États-Unis, Australie, Slovaquie, Mexique. Plusieurs organisations non gouvernementales sont également intervenues*.


À 15h30, le Conseil doit tenir son débat général sur les rapports du Haut-Commissariat et sera saisi dans ce cadre de rapports de la Haut-Commissaire et du Secrétaire général concernant le Guatemala, la Bolivie, la Colombie, Chypre et l'Iran. Il doit par la suite entamer un débat général sur la coopération technique et le renforcement des capacités.


Examen du rapport sur la situation des droits de l'homme au Mali

Présentation du rapport

M. SULIMAN BALDO, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme au Mali, a rappelé que son mandat avait été créé il y a un an pour une durée de 12 mois. Au cours de cette période, il s'est rendu à deux reprises à Bamako et a bénéficié de la pleine coopération des autorités maliennes. L'Expert indépendant estime que «le Mali a accompli des progrès remarquables dans la mise en œuvre de sa sortie d'une crise profonde et multidimensionnelle ayant débouché sur l'effondrement de l'État». En dépit de ces progrès, «le pays demeure fragile». M. Baldo a noté avec grande préoccupation que les groupes armés djihadistes continuent d'être impliqués dans des violations graves des droits de l'homme dans le nord du pays. Il a dit avoir pu réunir des informations sur des cas de violations graves des droits de l'homme commis par le MNLA, le Mouvement national de libération de l'Azawad. Il a également reçu des informations faisant état de violations des droits de l'homme - exécutions sommaires, disparitions forcées, viols, pillages notamment – perpétrées par les forces armées maliennes contre des populations civiles du Nord, essentiellement des membres des communautés arabes et touarègues des régions de Kidal, Gao et Tombouctou.

M. Baldo s'est dit «particulièrement préoccupé par les récentes vagues de violence qui se déroulent entre les différentes communautés ethniques et raciales du Nord», notamment entre les Arabes, les Peuls, les Touaregs et les Songhaïs. Selon lui, la prolifération des armes dans différentes communautés, du fait de l'absence d'une présence de l'État en dehors des principales villes du Nord, renforce le risque de violences intra et intercommunautaires. L'Expert indépendant constate que, dans le contexte actuel, les risques de violations graves des droits de l'homme sont particulièrement importants car les actes d'un individu sont imputés à l'ensemble de sa communauté et le moindre incident peut mettre le feu aux poudres.

L'un des défis les plus importants auxquels les nouvelles autorités maliennes font face est celui de la lutte contre l'impunité sur la base du principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi, a estimé M. Baldo. En effet, l'impunité constitue l'une des causes profondes de la répétition, sous la forme d'un cercle vicieux, des crises dans le nord du pays depuis l'indépendance. L'Expert indépendant a expliqué que le règlement des crises précédentes, notamment les rébellions de 1991 et 1994, avaient privilégié des «arrangements politiques de court terme au détriment d'une vision stratégique sur la durée, fondée sur les principes de justice et d'équité».

Malgré les «efforts louables» des autorités dans la lutte contre l'impunité, «la justice malienne éprouve d'énormes difficultés dans la poursuite des présumés auteurs des crimes graves» commis par les rebelles comme par les forces armées, a poursuivi L'Expert indépendant. Les enquêtes peinent à progresser de manière satisfaisante car les acteurs de la chaîne pénale impliqués dans la gestion de ces dossiers sont situés assez loin du lieu où les crimes ont été commis et ils n'ont pas les moyens de se rendre sur place. M. Baldo suggère aux autorités de mettre en place des «cellules d'appui judiciaires» et des «centres mobile d'écoute» pour entendre les témoins sur les lieux même des violations. Il estime par ailleurs que les initiatives de réforme de la justice qui sont appuyés par la communauté internationale devraient inclure un soutien des efforts de la lutte contre l'impunité qui visent à renforcer la capacité nationale. Par exemple, ces efforts devraient inclure de l'appui logistique, sécuritaire et financier. Concrètement, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) doit accompagner les efforts du gouvernement dans le soutien aux juges d'instruction et leurs équipes afin qu'ils puissent mener efficacement des enquêtes sur le terrain

Par ailleurs, M. Baldo note avec préoccupation que la protection des droits des femmes et leur participation au processus de dialogue et de négociations de paix n'ont pas été traitées comme des questions urgentes et prioritaires dans les efforts de consolidations de la paix. Ainsi, la lutte contre l'impunité «a négligé les crimes à caractère sexuel, malgré le caractère généralisé et systématique de ces crimes» commis par les groupes armés pendant leur occupation du nord du pays. M. Baldo estime que ces exactions auront des répercussions négatives sur la situation des femmes et renforceront les pratiques existantes telles que les mariages forcés. Il estime que les femmes devraient être davantage représentées au sein de la nouvelle Commission vérité, justice et réconciliation. M. Baldo ajoute que la Commission «offre un grand potentiel pour aider le Mali fracturé à réparer son tissu social mis à rude épreuve par les conflits répétés et les exactions» des forces de sécurité elles-mêmes.

En conclusion, l'Expert indépendant a cité ce que lui a confié un réfugié malien à Nouakchott en Mauritanie, auquel il demandait ce qui pouvait l'inciter à rentrer au pays, lui et ses proches. Il a répondu : «Le Mali, c'est notre pays. On va y rentrer même en rampant mais il nous faut d'abord des assurances pour notre sécurité et la possibilité de réclamer nos biens s'ils ont été expropriés pendant notre absence. Nous voulons aussi la justice pour les épisodes passés d'injustice et de punitions collectives subies par les membres de notre communauté».

Le rapport sur la situation des droits de l'homme au Mali (A/HRC/25/72) examine la situation politique et sécuritaire ainsi que les réformes institutionnelles entreprises au Mali depuis la sortie de la crise profonde déclenchée en janvier 2012. Il fait le point sur les violations des droits de l'homme perpétrées par les forces armées maliennes et les groupes armés dans le pays. Il estime que les protagonistes ont démontré la volonté politique de trouver des solutions durables à la crise et les encourage à persévérer dans la recherche de solutions négociées à leur problèmes internes de gouvernance tout en pressant leurs voisins dans le Sahel et le Maghreb arabe ainsi que la communauté internationale à prendre au sérieux les problèmes de criminalité transnationale et de terrorisme qui menacent de déstabiliser le Mali et toute la région.

Pays concerné

M. MOHAMED ALY BATHILY, Ministre de la justice du Mali, a commencé par exprimer ses pensées pieuses pour les familles des personnes éprouvées par la crise malienne, y compris par les ressortissants étrangers du Mali. Il a ensuite fait état des nombreuses violations des droits de l'homme occasionnées par l'occupation du pays par «des narcotrafiquants de toutes sortes, des «bandits» qu'il a accusés de crimes, de meurtres, d'exécutions sommaires, de disparitions forcées ou encore de viols. Aujourd'hui, la situation s'améliore peu à peu, a déclaré le Ministre, qui a ajouté toutefois que le Gouvernement avait hérité d'une situation lourde de défis. Le Gouvernement a donc commencé une réforme de la justice afin de juger tous les auteurs de crimes graves. Il a également mis en place une commission des droits de l'homme et une commission vérité, justice et réconciliation, ainsi qu'une cellule d'écoute judiciaire mobile qui a pour mission de parcourir les zones du pays touchées par le conflit et d'aider les personnes à accéder à la justice. La formation des juges et greffiers permettra en outre et bientôt la mise sur pied d'un tribunal militaire à Mopti afin de rendre justice dans le strict respect des normes internationales, a encore indiqué le Ministre.

En dépit de ces efforts, le Mali continue de manquer de ressources. C'est pour cette raison qu'il lance un appel à la communauté internationale, afin qu'elle l'assiste dans cette tâche. Dans ce contexte, le Ministre a exprimé sa gratitude à la Cour pénale internationale qui s'est engagée à mener des enquêtes sur les crimes commis dans le nord du Mali, notamment l'exécution de militaires maliens. La même gratitude est allée au groupe des ambassadeurs africains à Genève, ainsi qu'aux autres parties prenantes, dont le Conseil des droits de l'homme dans son ensemble. Le Ministre a assuré que son pays s'appliquera à respecter ses engagements relatifs à la promotion et la protection des droits de l'homme. Il a dans ce contexte demandé que soit prorogé le mandat de l'Expert indépendant.

Débat interactif

L'Union européenne s'est félicitée de la qualité de la coopération des autorités maliennes avec l'Expert indépendant. Les élections ont constitué une étape essentielle pour le retour du pays à l'ordre constitutionnel. Des efforts doivent encore être consentis pour consolider l'état de droit, lutter contre l'impunité et la corruption. Seul un dialogue inclusif entre les communautés permettra de trouver des solutions durables à la crise. La France salue l'engagement clair des autorités maliennes en faveur des droits de l'homme et contre l'impunité. Elle se félicite des efforts consentis pour réformer le secteur de la sécurité et rétablir l'autorité de l'État dans le Nord du pays. Elle s'interroge sur les tensions créées par les déplacements internes et sur les moyens d'encourager les personnes déplacées à rentrer dans leur région d'origine.

Les États-Unis ont déclaré que la situation des droits de l'homme s'est améliorée, en relevant que le Mali reste dans une situation fragile. Les violences intercommunautaires persistantes et la dégradation de la sécurité dans le nord sont préoccupantes. Dans ce contexte, le Mali doit poursuivre la réforme du secteur de sécurité. L'Australie s'est dite préoccupée par les violations des droits de l'homme dont l'expert indépendant fait état dans son rapport et soutient donc le renouvellement de son mandat. La paix au Mali passera par la réforme du secteur de la sécurité et la lutte contre l'impunité. Notant que la Cour pénale internationale pourrait exercer ses compétences s'agissant du Mali, elle a demandé quels devraient être les domaines prioritaires sur lesquels les autorités devraient se concentrer. L'Irlande se sent encouragée par la volonté politique démontrée par le Mali face à la crise qu'il traverse. La situation sécuritaire s'est stabilisée, mais le pays court le risque d'être exposé à des opérations de guérillas dans le nord du pays. La lutte antiterroriste doit être menée dans le strict respect des droits de l'homme. Le Gouvernement doit accorder un accès sans entrave aux procédures spéciales du Conseil et à la Croix-Rouge.

La République tchèque note que des violations des droits de l'homme ont été commises par toutes les parties au conflit. Les causes profondes du conflit sont liées au fonctionnement des institutions, notamment judiciaires. Le Mali doit donc se doter des outils nécessaires pour restaurer la paix et la démocratie. L'Autriche, qui prend note des progrès accomplis au Mali pour rétablir la sécurité dans le nord du pays et pour organiser des élections justes et libres, constate toutefois elle aussi que les problèmes dans le Nord n'ont pas disparu et que des violations des droits de l'homme ont été commises à la fois par l'armée et les groupes armés. Elle souhaite savoir quels effets le recours à la Cour pénale internationale a eus sur les procédures engagées au niveau national.

La Belgique encourage le Gouvernement à poursuivre ses efforts tout en étant préoccupée par la poursuite des violences sexuelles et sexistes, notamment utilisées par les groupes armés en représailles. Les auteurs de violences sexuelles doivent être traduits en justice pour garantir la paix et la réconciliation nationale.

Les Pays-Bas constatent que l'impunité prévaut à large échelle pour les auteurs de violations des droits de l'homme, qu'il s'agisse de membres des groupes rebelles ou des forces armées. Ils jugent essentiel que la justice se saisisse des violations des droits de l'homme commises depuis 2012 et déplorent le manque de capacité du système judiciaire pour poursuivre les responsables d'atrocités. Estimant que le retour à la normalité dans le nord du pays prendra plus de temps que prévu, les Pays-Bas demandent ce que peut faire la communauté internationale pour accélérer ce processus. La Suisse, qui partage les inquiétudes de l'Expert indépendant, lui a demandé quelles mesures la communauté internationale pourrait prendre afin de faciliter le retour de l'état de droit ainsi que la reprise du fonctionnement effectif des institutions étatiques au nord du pays. Comment pourrait-elle agir afin de faire cesser les violences, physiques ou sexuelles?

Parmi les pays voisins du Mali, le Burkina Faso, qui constate que le processus de sortie de crise et de rétablissement total des institutions pourrait prendre du temps, a néanmoins bon espoir que la dynamique enclenchée se poursuivra. Il exhorte la communauté internationale à continuer d'apporter son assistance et son appui à ce pays frère. Préoccupé par la situation d'insécurité régnant dans certaines parties du territoire malien, le Sénégal en appelle lui aussi à la communauté internationale et l'exhorte à continuer d'accompagner les autorités de Bamako dans leur volonté de renforcer l'ordre constitutionnel et l'état de droit. Il est favorable au renouvellement du mandat de l'Expert indépendant. Tout en saluant la «mobilisation exemplaire de la communauté internationale», la Côte d'Ivoire souhaite la solliciter, et en particulier les Nations Unies, «pour qu'elle donne droit à leurs engagements en faisant barrage à toute velléité de déni de justice, de droits ou de démocratie, afin de permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale». Le Niger estime que les défis en matière de sécurité demeurent importants pour le Mali comme pour toute la zone sahélo-saharienne, ce qui «nécessite encore plus une coopération soutenue entre tous les pays de la région». Il est favorable à la reconduction du mandat de l'Expert indépendant. L'Algérie réitère son plein soutien aux autorités maliennes dans le parachèvement du processus de stabilisation; elle reste attentive à l'évolution de la situation au Mali et a déjà octroyé de l'aide aux réfugiés maliens.

Pour le Maroc, la communauté internationale doit soutenir le Mali dans ses efforts pour rétablir l'ordre constitutionnel. La stabilité et la paix permettront au pays de se développer. L'Égypte se félicite de la création d'un Ministère de la réconciliation nationale et du renouvellement du dialogue au sein de la Commission vérité et réconciliation. Elle plaide pour un renforcement du soutien de la communauté internationale au Mali et appelle la communauté internationale à organiser des consultations avec le Mali et les pays voisins. Le Togo se réjouit de la dynamique de retour à l'ordre constitutionnel et de la nette amélioration de la situation sécuritaire, économique et sociale dans le pays. Il juge toutefois nécessaire de restaurer l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire et de lutter contre l'impunité.

L'Espagne rappelle qu'elle collabore depuis plusieurs années avec le Mali et les pays de la zone sahélienne en général, non seulement de manière bilatérale mais aussi au sein de l'Union européenne. La Chine soutient les efforts des Nations Unies pour préserver l'intégrité territoriale, la souveraineté ainsi que la paix dans le pays; elle a envoyé 395 soldats dans le cadre de sa contribution à la MINUSMA. Elle souhaite que la communauté internationale ne relâche pas son effort car, si la sécurité s'est considérablement améliorée, le pays demeure confronté à de profonds défis. Le Royaume-Uni appelle les autorités de Bamako à donner la priorité au rétablissement des services de base dans le nord du pays afin de répondre aux besoins urgents de la population et de permettre une résilience communautaire à long terme.

Le Soudan est convaincu que le dialogue et la réconciliation nationale représentent la seule possibilité de parvenir à un règlement durable; il se félicite de la création de la Commission vérité justice et réconciliation. Le Soudan du Sud appelle la communauté internationale à se montrer plus généreuse en matière d'assistance technique et financière dans ses efforts visant à promotion et la protection des droits de l'homme. Djibouti encourage le gouvernement à maintenir un esprit de dialogue, notamment dans le cadre de la Commission vérité et réconciliation. Il estime nécessaire le maintien de l'assistance technique de la communauté internationale.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) appelle à la libération des enfants emprisonnés pour leur enrôlement dans les groupes armés. Il souligne que les violences sexuelles et sexistes restent l'un des problèmes les plus brûlants en matière de protection. Ainsi, l'an dernier, 364 cas de viols ont été enregistrés, dont 12% concernaient des filles de moins de 18 ans.

Les organisations non gouvernementales qui se sont exprimées ce matin ont exprimé des préoccupations s'agissant de la situation au Mali. Vision Mondiale International, au nom également de l'Alliance internationale d'aide à l'enfance, Conseil norvégien pour les réfugiés, International Rescue Committee et OXFAM, a indiqué que nombre d'enfants impliqués dans le conflit restent prisonniers dans les prisons de Bamako et a demandé leur libération. Femmes Afrique Solidarité, avec d'autres ONG, s'est aussi déclaré préoccupée par la situation sécuritaire dans le nord du pays encore en proie à la violence, y compris aux violences sexuelles et sexistes contre les femmes et les enfants. Il est donc primordial de renforcer le cadre judiciaire, y compris des mesures de réparation pour les victimes. Human Rights Watch s'est pour part félicité de la volonté du Gouvernement de renouveler le mandat de l'Expert indépendant ainsi que de la coopération avec le procureur de la Cour pénale internationale. Toutefois, le Gouvernement doit faire davantage en menant des enquêtes et intenter des procès pour les crimes les plus graves.

La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) s'est félicitée de l'inculpation de militaires dans l'affaire dite des bérets rouges, la qualifiant de premier pas. Cependant, les enquêtes relatives aux crimes commis dans le Nord restent faibles et il faut mener des enquêtes sur les crimes commis par les militaires maliens. Le Bureau international catholique de l'enfance a déclaré que le retour des enfants à l'école est essentiel dans le processus de transition, de même que la réinsertion des enfants enrôlés.

Conclusion de l'expert indépendant

M. BALDO a estimé que pour le Mali, le défi actuel est de réconcilier les communautés qui se sont depuis des années senties exclues. Mais le processus en cours est encourageant, a-t-il ajouté. L'Expert indépendant a également expliqué que la présence de bandes armées dans la région sahélo-saharienne, qui vivent de rapines et d'enlèvements d'otages, menace tous les pays de la région et représente un vrai danger de déstabilisation. Cette situation mérite un appui de la communauté internationale, notamment de l'Europe, du fait que la drogue qui transite par cette région est destinée à l'Europe.

Examen du rapport sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine

Exposé de l'experte indépendante

MME MARIE-THÉRÈSE KEITA BOCOUM, Experte indépendante sur la situation des droits de l'homme en République centrafricaine, rappelant qu'elle a été nommée en janvier dernier à l'occasion de la session extraordinaire du Conseil consacrée à la situation en République centrafricaine, a fait part de ses préoccupations suite à la mission qu'elle a effectuée en République centrafricaine du 4 au 14 mars derniers. De nombreuses violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire sont à déplorer sur l'ensemble du pays. Elle a aussi souligné la faiblesse de l'autorité de l'État pour protéger les civils. La priorité doit viser à garantir la sécurité des personnes et des biens. Une conférence régionale est nécessaire et des stratégies de lutte contre l'impunité et de réforme du secteur de la sécurité doivent être mises sur pied.

En l'absence de forces de sécurité et de magistrats, la lutte contre l'impunité stagne. En outre, de nombreux prévenus de violations des droits de l'homme n'en sont pas les instigateurs, lesquels bénéficient d'une impunité intolérable. La situation est catastrophique mais pas désespérée si l'on agit vite. Mme Keita Bocoum invite à œuvrer à la réconciliation intercommunautaire et à la restauration de la paix et de la culture du «vivre ensemble». Des mesures doivent également être prises pour créer une institution nationale des droits de l'homme conforme aux Principes de Paris, notamment en vue de poursuivre les auteurs de violations des droits de l'homme. Les groupes armés doivent cesser immédiatement les violences et les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire dans les zones qu'ils contrôlent. Dans l'attente du déploiement effectif d'une opération de maintien de la paix, il faut renforcer le Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine, a encore estimé l'Experte indépendante.

«Pour éviter le chaos en République centrafricaine et dans la sous-région, on ne peut plus se contenter de mesures cosmétiques et de compter les morts», a insisté Mme Keita Bocoum, qui a souligné que le Gouvernement de transition a moins d'un an pour organiser les élections et rétablir la sécurité dans le pays. Sans l'appui de la communauté internationale, les autorités centrafricaines ne seront pas en mesure d'accomplir cette tâche titanesque, a-t-elle averti.

Le Conseil sera en outre saisi cet après-midi d'un rapport de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme sur l'évaluation des besoins en matière d'assistance technique et de renforcement des capacités République centrafricaine (A/HRC/25/43).

Pays concerné

La République centrafricaine a répété ce que a été dit devant le Conseil le 20 janvier dernier : «Il faut un plan Marshall si on veut sauver la République centrafricaine du chaos où elle se trouve», car «l'État centrafricain n'existe que de nom». L'impunité semble s'établir comme règle et c'est la population centrafricaine qui est la seule et unique victime des violences commises par des groupes armés, des milices armées et des bandits de grand chemin. Il faut agir vite pour sauver ce peuple meurtri. Les autorités de transition, malgré leur volonté affichée, ont besoin de moyens pour faire asseoir les attributs de l'État, pour faire régner la justice et éviter l'impunité.
Si la République centrafricaine «ne tend nullement une main de mendiant», elle estime que c'est le devoir de toute l'Afrique de lui venir en aide car la position géographique du pays doit être prise en compte si l'on veut «éviter la gangrène qui risque de contaminer toute la région». Pour la République centrafricaine, «à défaut d'une grave crise intercommunautaire – qui, heureusement, n'en est pas une présentement – nous risquons de connaître une crise profonde, c'est à dire régionale si rien n'est fait».

Débat interactif

L'Union européenne a déclaré que la lutte contre l'impunité doit revêtir une très haute priorité, autant que le retour de l'état de droit. La réconciliation nationale est également un préalable à un retour de la paix. Pour la Suisse, c'est l'effondrement des systèmes sécuritaire et judiciaire qui favorise ce climat d'impunité; elle a souhaité savoir comment la communauté internationale peut aider la République centrafricaine, notamment s'agissant de la réinsertion sociale des enfants soldats. Soulignant également l'important besoin de renforcement du système judiciaire, la République tchèque a souhaité savoir quelles mesures nationales le Gouvernement envisageait lui-même, sans recours à la communauté internationale. En l'absence de justice, il sera en effet difficile d'envisager la paix et la réconciliation, a prévenu la Norvège, soulignant aussi qu'il revenait d'abord au Gouvernement de transition d'assurer la reddition des comptes.

Le Togo s'est pour sa part inquiété du statut quo et du manque de perspective politique qui règne dans ce pays, pendant que des bandes armés continuent leurs exactions sur les populations. Dans ce contexte, il a invité la communauté internationale à appuyer davantage la République centrafricaine pour que ce pays puisse relever les défis auxquels il est confronté. Cette situation de violation systématique des droits de l'homme est terrifiante, a renchérit la Lituanie, ajoutant que l'absence de l'État et le règne de l'impunité de droit ne pouvaient durer. C'est pour cela qu'il faut soutenir le plan en six points du Secrétaire général et les initiatives de l'Union africaine, a dit la Lituanie, qui participera à l'opération Sangaris.

En tant que pays très impliqué dans l'opération Sangaris, la France, s'est également inquiétée du climat d'impunité qui règne dans ce pays effondré. C'est pour cette raison qu'elle se félicite de la décision de la Cour pénale internationale d'ouvrir une enquête préliminaire sur les crimes commis dans le pays depuis septembre 2012. La Belgique a elle aussi souligné l'importance de lutter contre l'impunité, ainsi que sur la réinsertion des enfants soldats. L'Irlande, qui a versé plus de 14 millions de dollars à ce pays depuis 2008 par le biais du Fonds central d'intervention pour les urgences humanitaires de l'ONU, a également appelé à ce que tout soit fait pour empêcher l'implication des enfants dans ce conflit et estimé qu'il fallait se pencher sur les causes profondes de cette crise. La grande faiblesse du pays pour assurer sa sécurité et lutter contre l'impunité préoccupent aussi gravement l'Espagne, qui enverra des troupes dans le cadre de la force de l'Union européenne dénommée EUFOR-RCA.

L'Organisation de la coopération islamique (OCI) a pour sa part appelé au rétablissement du dialogue entre les communautés religieuses, car pour elle, l'instrumentalisation des religions à des fins politiques est très dangereuse, a prévenu le représentant. Il a également appelé toutes les organisations humanitaires islamiques à apporter leur aide à ce pays, mais aussi aux pays frontaliers comme le Tchad ou le Cameroun qui reçoivent des milliers de réfugiés. Djibouti a également appelé au dialogue intercommunautaire, en tant qu'étape primordiale pour un retour à la paix, a dit son représentant. Pays frontalier et engagé dans l'opération Sangaris, le Tchad a estimé que l'assistance technique dont le pays a besoin doit être conséquente pour répondre aux défis à relever en République centrafricaine, notamment s'agissant de la lutte contre l'impunité.

Le Sénégal a exhorté la communauté internationale à poursuivre avec détermination sa mobilisation en République centrafricaine pour mettre fin aux violences intercommunautaires et religieuses. Le Sénégal a encouragé les autorités centrafricaines à poursuivre un dialogue de réconciliation nationale inclusif avec toutes les composantes de la société. Le Gabon a salué les avancées positives réalisées dans le processus de restauration de l'état de droit par les autorités de transition. Les fondements d'une paix durable doivent être posés afin d'assurer la promotion et la protection des droits de l'homme à long terme.

Les Maldives ont constaté que la situation semble plus calme que l'an passé, mais que les violences se poursuivent néanmoins. Le Conseil ne peut pas laisser les massacres se poursuivre. Les liens intercommunautaires doivent être renoués et il faut lutter résolument contre l'impunité. Pour sa part, l'Algérie a noté que la fragilité des institutions de l'État a favorisé un climat d'impunité et la poursuite des violences. Une réaction rapide et appropriée est nécessaire de la part de la communauté internationale et des mécanismes des Nations Unies. Le Maroc a pris note avec intérêt de la proposition de l'experte indépendante d'organiser une conférence régionale au sujet de cette crise. Le Maroc demeure préoccupé par la situation humanitaire et des droits de l'homme en République centrafricaine et la lenteur de la réponse de la communauté internationale.

Condamnant les attaques contre les civils, la Chine a appelé le Conseil à poursuivre son examen de la situation des droits de l'homme en République centrafricaine. La paix, la stabilité et la sécurité constituent des préalables à la promotion et protection des droits de l'homme. Le Soudan s'est dit préoccupé par l'escalade de la violence en République centrafricaine, en estimant que la réconciliation nationale est fondamentale. Le dialogue politique et social permettra de mettre en place les conditions nécessaires à la restauration de la paix. L'Égypte a réaffirmé sa solidarité avec le peuple centrafricain, avant d'appeler la communauté internationale à s'engager à rester à ses côtés, afin de restaurer l'état de droit dans le pays.

Les États-Unis ont salué la collaboration entre les autorités transitoires et le procureur de la Cour pénale internationale dans le cadre des enquêtes préliminaires sur les allégations d'atrocités. Il est nécessaire de reconstruire les capacités de la police et des institutions judiciaires pour rétablir l'état de droit au plus vite, ont-ils estimé. En outre, des mesures doivent être prises pour favoriser la réconciliation entre les différentes communautés religieuses. Pour l'Australie, les violences dont font l'objet les civils et la situation humanitaire sont alarmantes. Il faut restaurer l'ordre constitutionnel et l'état de droit au plus vite. Les efforts de réconciliation nationale, la réforme du système judiciaire et du secteur de la sécurité sont essentiels à la paix.

La Slovaquie a déclaré que la situation des droits de l'homme reste préoccupante, notamment s'agissant de l'accès à la justice et de la lutte contre l'impunité, conditions du retour à la paix. Il faut renforcer le cadre national de promotion et protection des droits de l'homme et mettre en place au plus vite l'institution nationale des droits de l'homme. Le Mexique a exprimé son inquiétude face à l'impact du conflit sur la situation des droits de l'homme dans le pays et a souscrit à la recommandation d'établir une feuille de route pour assurer la pleine consolidation de l'État de droit en République centrafricaine et à assurer la promotion et la protection des droits de l'homme.

Parmi les organisations non gouvernementales, Femmes Afrique Solidarité s'est alarmée de la situation sécuritaire préoccupante, mais aussi de l'insécurité alimentaire et des violences sexuelles. C'est pourquoi l'ONG appuie la recommandation du Secrétaire général de déployer une opération de maintien de la paix dans le pays. Du même avis, Human Rights Watch a dit qu'en attendant cette opération, Sangaris et Force africaine en Centrafrique (MISCA) doivent continuer de prendre des mesures transitoires pour ramener la paix dans le pays.

World Evengelical Alliance s'est pour sa part alarmé de la lenteur de l'aide apportée à la République centrafricaine par la communauté internationale. Il faut également s'inquiéter de l'amalgame véhiculé dans les medias et présentant les antibalakas comme une milice chrétienne et les ex-Seleka comme des musulmans, réduisant de fait la crise à un conflit religieux, alors qu'il est essentiellement politique. Pour Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale (Caritas), au nom également de la Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul, également, c'est la corruption et la marginalisation qui a précipité ce pays dans la crise et non un quelconque conflit religieux de personnes qui ont toujours vécu ensemble. Il faudrait que les nouvelles autorités veillent à ne pas répéter les erreurs du passé.

L'Alliance internationale d'aide à l'enfance a insisté sur les capacités très limités de l'État qui font qu'il ne peut venir en aide ni protéger les enfants dans ce conflit. Même constat pour CIVICUS qui a demandé aux forces régionales et internationales en présence de réduire la violence et permettre un accès humanitaire pour les personnes déplacées. L'assistance technique doit également se focaliser sur le renforcement des capacités institutionnelles. La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a accusé les deux parties d'avoir massivement violé les droits de l'homme. Dans ce contexte, la lutte contre l'impunité doit être une priorité et l'ONG préconise la création d'une cellule d'enquête en vue de traduire ces affaires en justice.

Conclusion de l'experte indépendante

MME KEITA BOCOUM a relevé les efforts déployés par les autorités de transition, qui ont une véritable volonté de restaurer l'État de droit. Il faut aujourd'hui renforcer la sécurité, ainsi que la capacité de la police et du système carcéral. La communauté internationale doit participer au renforcement des institutions et fournir une assistance technique au système judiciaire pour qu'il fonctionne efficacement. Les moyens manquent pour ce faire et il est donc nécessaire de restaurer la sécurité en augmentant les forces de police.

En ce qui concerne la réconciliation, les efforts devront inclure toutes les communautés, y compris les populations musulmanes. En effet, une implication intercommunautaire dès le début du processus est fondamentale. Par ailleurs, pour ce qui est de la lutte contre le recrutement d'enfants par les milices armées, il faut sensibiliser les parents, relancer les institutions scolaires et punir les milices. Concernant le désarmement, il faut passer au crible les agents chargés de l'application de la loi avant de mener la réforme du secteur de la sécurité, afin d'éviter que des éléments liés aux violations des droits de l'homme ne soient intégrées aux forces armées ou à la police. Le Gouvernement de transition a besoin d'aide logistique et de ressources humaines pour mener à bien les réformes et la communauté internationale doit veiller à appuyer les priorités nationales. Toutes les démarches entreprises devront être inclusives, a-t-elle souligné.

Examen du rapport sur la situation des droits de l'homme à Sri Lanka

Présentation du rapport

MME NAVI PILLAY, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a souligné que le rapport du Haut-Commissariat sur la promotion de la réconciliation et de la redevabilité à Sri Lanka examinait les progrès accomplis s'agissant des recommandations de la Commission sur les leçons tirées et la réconciliation. Ces progrès concernent la reconstruction, la réinstallation des déplacés, les élections au Conseil de la province du nord, ainsi que de certaines recommandations de la Commission, notamment celle ayant trait au trilinguisme.

Mme Pillay a regretté de ne pas pouvoir relever de grands progrès dans d'autres domaines essentiels, notamment la nécessité d'assurer des enquêtes indépendantes et crédibles dans les violations passées des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Le gouvernement n'a pas répondu positivement aux offres répétées d'assistance technique du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur des questions spécifiques susceptibles de permettre la réconciliation et l'établissement des responsabilités. La Haut-Commissaire a fait part de son trouble formes contemporaines d'esclavages à la poursuite du harcèlement et de l'intimidation des militants des droits de l'homme qui se sont poursuivies au cours de cette session même du Conseil des droits de l'homme. Cinq ans après la fin du conflit, le Conseil ne doit oublier l'étendue et la gravité des violations qui auraient été commises à la fin du conflit et qui a fait plusieurs milliers de morts, de blessés et de disparus parmi les civils.

Le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur la promotion de la réconciliation et de la redevabilité à Sri Lanka paraîtra sous la cote A/HRC/25/23 (une version préliminaire est disponible en anglais, en arabe et en chinois)

Pays concerné

Sri Lanka a rappelé que le rapport découle d'une résolution du Conseil des droits de l'homme que le pays avait rejetée. Elle a dénoncé des conclusions marquées par des préjugés de politisation constants et a fait état de nombreuses erreurs et perceptions erronées dans le projet de rapport, malgré la visite de la Haut-Commissaire dans le pays et bien que le Haut-Commissariat aux droits de l'homme ait eu cinq mois pour contrôler les faits. Les commentaires présentés par Sri Lanka traitent en détail d'un grand nombre de ces erreurs et fausses perceptions. Sri Lanka a notamment dénoncé les références faites au rapport du groupe d'experts sur Sri Lanka, alors que ce groupe est «discrédité». Sri Lanka se dit profondément préoccupée de toutes ces erreurs et s'interroge sur leurs motivations. On aurait pu espérer de la part du Haut-Commissaire aux droits de l'homme une meilleure étude des faits, alors que le rapport néglige les positions factuelles présentées par Sri Lanka. Contrairement aux assertions du rapport selon lequel Sri Lanka n'aurait pas répondu aux offres d'assistance technique du Haut-Commissariat, Sri Lanka reste ouverte aux propositions de coopération technique dans des domaines essentiels de la réconciliation, conformément aux besoins du pays tels qu'ils ont été définis dans son plan national d'action.

Sri Lanka rappelle que, lors du segment de haut niveau de la présente session, son ministre des affaires extérieures avait présenté une actualisation du processus de réconciliation en cours depuis cinq ans, soit depuis la fin des trente années de terrorisme brutal que le pays a connues. Ces progrès touchent notamment à la redevabilité, à la Commission d'enquête sur les disparitions, au recensement national des morts et blessés et des dégâts causés aux biens, entre autres. Sri Lanka a ensuite fait état de nouveaux progrès récents, comme le lancement d'une procédure visant à l'adoption d'une loi sur la protection des victimes et témoins. Le Département des statistiques et du recensement a en outre publié un rapport intérimaire sur le recensement national des morts et blessés et des dégâts causés aux biens depuis 1982. Par ailleurs, le mandat de la Commission chargée d'enquêter sur les allégations de disparitions dans les provinces du nord et de l'est, qui portait initialement sur la période 1990 -2009 a été élargi à une période remontant à 1983 à la demande de différentes parties.

Sri Lanka a réaffirmé son engagement à coopérer avec les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales. Le Gouvernement a étudié la demande du Groupe de travail sur les disparitions forcées et continuera de maintenir la vigilance face aux indices crédibles d'une résurgence des activités terroristes du LTTE.

Si Sri Lanka reconnaît que les progrès ont été inégaux selon les secteurs, elle juge très préoccupant le fait que certaines composantes de la communauté internationale continuent de qualifier injustement les efforts du Gouvernement comme étant de peu d'importance, voire distincts du processus de réconciliation. Pourtant, cette même communauté internationale a elle-même noté depuis la fin de la période de conflit que ces mesures étaient de la plus haute importance pour la réconciliation. Sri Lanka a dénoncé les tentatives faites pour la décrire comme un pays dans lequel les violations des droits de l'homme se poursuivent. Si violations il y a, elles sont sporadiques, n'ont rien de continu et ne font pas de Sri Lanka une exception par rapports aux autres pays, en particulier ceux qui sortent d'un long conflit. Par ailleurs, Sri Lanka dispose d'un système juridique solide et son système pénal offre de nombreuses garanties.
C'est au vu de cette «attitude déplacée» que Sri Lanka n'est pas en mesure d'accepter l'action du Conseil, qui ne reconnaît pas les progrès très tangibles réalisés en matière de consolidation de la paix et de réconciliation. Sri Lanka estime que le Conseil continue de lui accorder une attention disproportionnée et politiquement motivée. Sri Lanka continuera comme par le passé de rejeter les résolutions proposées par les États-Unis, qui sont fondées sur un mandat et un processus politisé et obtenu sans le consentement de l'État concerné. Sri Lanka rappelle que toute action prise pour la promotion et la protection des droits de l'homme dans un pays doit avoir le consentement de ce pays. Les processus politiques ne peuvent que saper le délicat équilibre du processus de réconciliation en cours au Sri Lanka, ainsi que l'engagement constructif que le pays continue d'entretenir avec le Conseil.

Discussion du rapport

La Grèce, au nom de l'Union européenne, a invité Sri Lanka à respecter ses obligations internationales en matière de droits de l'homme. Colombo doit en outre veiller à ce que les militants des droits de l'homme puissent s'exprimer librement. L'Union européenne appelle le Conseil des droits de l'homme à adopter une résolution sur Sri Lanka en faveur de la conduite d'une enquête internationale et appelle ce pays à collaborer avec le Haut-Commissariat. Le Monténégro a félicité Sri Lanka pour la reconstruction et pour la mise sur pied de la Commission sur les leçons à tirer du conflit et la réconciliation mais il convient de faire beaucoup plus en faveur de tous les Sri-Lankais. Il est préoccupant que les medias et les minorités religieuses soient la cible d'attaques. La communauté internationale doit continuer de se pencher sur la situation régnant dans le pays. Les États-Unis ont dit partager un grand nombre de préoccupations de la Haut-Commissaire, notamment en ce qui concerne les attaques contre les lieux de culte appartenant à des minorités religieuses. Ils appellent à la cessation du harcèlement des militants des droits de l'homme, voire des bénévoles engagés dans des actions humanitaires. Sri Lanka est invitée à collaborer avec le Haut-Commissariat.

La France, qui a dit partager la préoccupation de la Haut-Commissaire s'agissant de la situation des droits de l'homme à Sri Lanka, a rappelé que la lutte contre l'impunité est une condition sine qua non à l'établissement d'une véritable réconciliation nationale. Les autorités doivent faire toute la lumière sur les meurtres odieux dont ont fait l'objet 17 personnels humanitaires d'Action contre la faim à Muttur en 2006. Elle partage l'analyse de la Haut-Commissaire concernant l'insuffisance des enquêtes concernant les allégations de violation du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire.

L'Irlande a noté les progrès conséquents mentionnés par la Haut-Commissaire dans son rapport et s'en félicite mais reste préoccupée par le fait que de nombreuses activités ne correspondent pas à celles préconisées par la Commission sur les leçons tirées et la réconciliation ou n'ont pas été menées à bien. La réconciliation ne peut avoir lieu que si l'on respecte les droits de l'homme et si on peut établir la confiance mutuelle. L'Irlande a également condamné les entraves et menaces contre les défenseurs des droits de l'homme qui ont été commis à Sri Lanka à l'occasion de cette session du Conseil. Le Royaume-Uni a souligné que si Sri Lanka a fait des progrès, il reste néanmoins beaucoup à faire; des enquêtes crédibles doivent être menées face aux allégations de crimes de guerre commises par les deux parties au cours du conflit.

L'Autriche a souligné qu'il appartenait en premier lieu aux autorités de Colombo de prendre des initiatives crédibles et effectives en faveur de la justice pour les crimes commis pendant la guerre civile. Elle est préoccupée par l'absence persistante d'efforts à cet égard jusqu'à présent. Quant aux mécanismes mis en place, ils ont produit peu de résultats. L'Ex République Yougoslave de Macédoine a jugé bien étayé le rapport de la Haut-Commissaire. Il a noté des progrès dans certains domaines mais a regretté l'absence d'enquêtes nationales crédibles sur les exactions commises pendant le conflit, ainsi que les attaques contre des défenseurs des droits de l'homme ou encore contre des minorités. Le Gouvernement doit apporter la justice aux victimes de violations des droits de l'homme et leurs familles, respecter les minorités raciales et religieuses et s'attaquer aux violences sexuelles et sexistes. Le Conseil des droits de l'homme devrait appuyer pleinement le projet de résolution sur Sri Lanka demandant la création d'une commission d'enquête internationale.

Le Japon s'est lui aussi félicité des progrès enregistrés par Sri Lanka et de sa coopération avec les mécanismes des droits de l'homme. Néanmoins, des questions importantes restent en suspens en ce qui concerne la réconciliation nationale et les droits de l'homme. Le Japon espère que la coopération entre Sri Lanka et la communauté internationale donnera des résultats.

L'Allemagne a fait part de sa préoccupation en matière de justice et déploré les pressions contre des membres de la société civile, dont certains ont été jetés en prison. Elle a demandé à la Haut-Commissaire de quels moyens la communauté internationale disposait pour permettre la tenue d'une enquête internationale. Si elle se félicite des progrès accomplis, notamment en matière de reconstruction des infrastructures, domaine certes important, la Norvège juge qu'il reste beaucoup à faire pour que le pays parvienne à la réconciliation, à une solution politique et à l'imputabilité des responsabilités. La Norvège est en outre préoccupée par la poursuite des violations des droits de l'homme, dont les intimidations et les arrestations arbitraires de militants des droits de l'homme.

Le Danemark a dénoncé les attaques aux libertés d'expression, de réunion et d'association, notamment à l'encontre des journalistes et de la société civile en général. L'expérience montre que la justice et la reddition de comptes sont des éléments clés de toute réconciliation; Sri Lanka doit donc mener des enquêtes indépendantes sur toutes les allégations de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, afin d'établir les responsabilités et de punir les auteurs d'atrocités. La Belgique estime que si la justice de transition est une question complexe, il n'est pas souhaitable de repousser sa mise en place sine die. Or, la guerre est terminée depuis cinq ans et l'impunité continue de régner. Des enquêtes crédibles et indépendantes doivent se tenir si le pays entend instaurer une démocratie authentique. Le Canada déplore le manque de volonté affiché par le gouvernement sri-lankais de reconnaître ne serait-ce que la nécessité d'enquêtes indépendantes et crédibles. Il appuie par conséquent l'engagement du Conseil en la matière. Le représentant a confié que, lors de sa visite à Colombo en novembre on lui avait affirmé que le pays vivait une dégradation continue de l'état de droit.

La Suisse partage le constat de la Haut-Commissaire sur le fait que le Gouvernement de Sri Lanka n'a pas réalisé d'enquêtes impartiales et crédibles sur les allégations de violations des droits de l'homme par toutes les parties. Elle soutient donc la proposition d'établir un mécanisme d'enquête internationale. La Suisse attache en outre une importance particulière à la décentralisation du pays et soutient une approche inclusive de la justice transitionnelle. Elle reste préoccupée par les attaques envers des minorités religieuses et par les harcèlements et intimidations à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme. Il est indispensable pour la réconciliation nationale que la société civile puisse participer pleinement. La Suisse soutient en outre la recommandation de la Haut-Commissaire concernant l'abolition de la loi sur le terrorisme.

Le Maroc a pour sa part salué la mise en place par Sri Lanka de la Commission sur les leçons à tirer à tirer et la réconciliation. Il conviendrait toutefois d'élargir le plan d'action national à l'ensemble des 285 recommandations de la Commission. Sri Lanka devrait en outre poursuivre le dialogue avec la Haut-Commissaire et considérer positivement ses offres d'assistance technique. La réconciliation, après 30 ans de conflit meurtrier, n'est pas facile et ne se décrète pas mais il faut capitaliser sur les mesures prises pour établir un climat de confiance et de réconciliation entre les différentes composantes de la nation sri-lankaise. Le Maroc déplore par ailleurs les attaques contre des minorités religieuses par des groupes extrémistes et appelle Sri Lanka à mettre en place une politique de «tolérance zéro» dans ce domaine.

L'Algérie a pris note des progrès réalisés depuis 2009 pour la réconciliation nationale mais a exhorté Sri Lanka à adopter des mesures supplémentaires, comme celles préconisées par la Commission sur les leçons à tirer et la réconciliation. Tout projet de réconciliation doit inclure les deux piliers fondamentaux du dialogue et de la réparation. L'Algérie estime par ailleurs que le Conseil doit s'abstenir d'approches trop confrontationnelles avec le pays, compte tenu notamment du fait qu'il existe des mécanismes qui permettent de faciliter un dialogue constructif.

Le Pakistan a rappelé qu'il estimait que les initiatives visant spécifiquement des pays n'étaient pas équilibrées. Ainsi, la recommandation d'établir un mécanisme international d'enquête dépasse le mandat accordé par la résolution 22/1. Pour le Pakistan, Sri Lanka a un excellent bilan démocratique, ayant surmonté avec succès trois décennies de terrorisme brutal de la part d'un LTTE qui bénéficiait de soutiens extérieurs. Cuba a jugé que le rapport présenté aujourd'hui reflétait une fois encore la politisation et l'application de deux poids deux mesures qui se sont enracinés au sein du Conseil. Les conclusions et recommandations de la Haut-Commissaire reflètent le déséquilibre présidant au traitement des situations des droits de l'homme dans les pays du Sud. En dépit de cela, Sri Lanka a démontré un engagement authentique dans la promotion et la protection des droits de l'homme de sa population. Le Venezuela a estimé que le rapport, fruit de la résolution 22/1 imposée par les États-Unis contre Sri Lanka, résulte d'un processus fortement politisé au cours duquel le pays concerné n'a pas été entendu. Or, le pays avance résolument dans son processus de réconciliation, ainsi que le montre le plan d'action national qui applique les recommandations de la Commission sur les leçons à tirer et la réconciliation. La République islamique d'Iran a déclaré que la communauté internationale devrait encourager Sri Lanka plutôt que d'adopter une politique sélective à son encontre. La promotion et la protection des droits de l'homme doivent être basées sur la coopération des États concernés pour qu'ils puissent améliorer leurs capacités et remplir leurs obligations internationales sur le terrain.

La Fédération de Russie a rappelé qu'elle s'était opposée à plusieurs reprises à une évaluation de la situation à Sri Lanka par le Haut-Commissariat car il n'y a pas de raison de le faire. Sri Lanka est ouvert au dialogue, son Gouvernement continue de collaborer avec le Haut-Commissariat et il a indéniablement réalisé des progrès importants dans la réconciliation nationale. Le processus de réconciliation nationale doit être réalisé par les Sri Lankais et la Russie se prononce contre toute ingérence dans les affaires d'un État souverain comme Sri Lanka.

L'Égypte se félicite de l'accueil réservé par Sri Lanka à la Haut-Commissaire, qui a reconnu à la fin de sa visite les progrès accomplis par le pays. Il faut encourager les États dans leurs efforts en vue de la promotion et la protection des droits de l'homme. Ces encouragements doivent être acceptées par le pays concerné et être basés sur les principes de coopération et de dialogue. La Thaïlande aussi félicite Sri Lanka pour les progrès dans la mise en œuvre des recommandations de la commission sur la réconciliation et les leçons apprises. Consciente que la réconciliation prendra du temps, elle souhaite que la communauté internationale continue à appuyer Sri Lanka et encourage ce pays à mettre en œuvre pleinement tous les mécanismes de réconciliation nationale.

Le Bhoutan a félicité Sri Lanka pour les progrès accomplis, ainsi que pour l'accueil fait à la Haut-Commissaire, qui a pu se rendre sans difficulté dans toutes les régions du pays. Ces progrès doivent être reconnus et il faut encourager Sri Lanka à poursuivre ses efforts, sachant que les consultations et le dialogue représentent des éléments fondamentaux mais très délicats. Le Myanmar rappelle que la reconstruction et la réconciliation sont loin d'être faciles à réaliser pour un pays sortant de conflit. Le Bangladesh a félicité Sri Lanka pour sa bonne coopération avec les mécanismes des droits de l'homme. Compte tenus des difficultés que connaît ce pays, il est primordial qu'il dispose de plus de temps pour accomplir ce qui doit être fait. Il est également primordial que les principes de non sélectivité, d'impartialité et d'objectivité continue d'irriguer les travaux du Conseil.

L'Ouzbékistan estime qu'il faut notamment reconnaître les progrès accomplis dans la mise en œuvre des recommandations issues de la Commission nationale sur les leçons apprises. Il salue en outre les progrès en matière de déminage et de retour des personnes déplacées. La communauté internationale doit appuyer les efforts du Gouvernement visant à la promotion et protection des droits de l'homme, en prenant en compte les difficultés auxquelles le pays est confronté. Pour l'Azerbaïdjan, qui s'est félicité de la visite du Rapporteur spécial sur les déplacés internes en décembre 2013 à la suite de l'invitation du Gouvernement, tous les problèmes peuvent être résolus sur la base d'un dialogue ouvert et constructif entre Sri Lanka et les mécanismes des Nations Unies chargés de la promotion et protection des droits de l'homme.

Pour le Nigéria, qui s'est félicité de la poursuite des progrès accomplis par Sri Lanka dans le cadre des recommandations de la Commission de réconciliation et des leçons tirées, surmonter les défis en matière de droits de l'homme après des décennies de guerre civile implique des efforts de longue haleine. Il appelle par conséquent Sri Lanka à intensifier ses efforts pour relever ces défis et encourage la Haut-Commissaire à lui fournir toute l'assistance que le pays pourrait souhaiter.

Le Soudan du Sud a félicité Sri Lanka pour son engagement envers le Conseil et les mécanismes des droits de l'homme, et pris note des efforts de réconciliation et de réinsertion des anciens combattants et des détenus. L'Ouganda a estimé que Sri Lanka a fait des efforts louables au terme d'un long conflit mené face à l'un des terrorismes les plus sanguinaires que le monde ait connu et dont il est finalement sorti vainqueur. L'Ouganda estime que l'on devrait porter une considération spéciale aux pays émergeant de conflits de longue durée, particulièrement lorsqu'ils montrent une intention évidente de relever les défis qui se posent à eux au terme des hostilités.

Le Soudan a dit bien comprendre la position justifié de Sri Lanka face à la résolution 22/1 du Conseil des droits de l'homme et estime que la recommandation de la Haut-Commissaire concernant la mise en place d'une commission d'enquête indépendante dépasse son mandat. Le Soudan salue les efforts de Sri Lanka en faveur de la réconciliation nationale, efforts qui doivent naturellement se poursuivre, et estime que le Conseil des droits de l'homme doit éviter toute approche politisée, partiale et subjective. Le Bélarus déplore une politisation grandissante du Conseil et constate que la résolution 22/1 y a contribué; le Bélarus estime que le rapport de la Haut-Commissaire outrepasse son mandat puisqu'il comprend des conclusions et des recommandations qui ne sont pas prévues par la résolution. Le Bélarus déplore les tentatives pour exercer des pressions politique sur le pays, lesquelles n'encouragent pas un dialogue authentique, et constate que Sri Lanka n'a pas refusé pour autant de coopérer avec les Nations Unies. La Bolivie estime elle aussi que les recommandations du rapport outrepassent la résolution relative à Sri Lanka. Le dialogue, l'impartialité, la non-sélectivité et l'objectivité doivent présider aux travaux du Conseil. La Bolivie rejette les décisions prises sans l'accord des pays concernés.

La République populaire démocratique lao a constaté avec plaisir que Sri Lanka était bien engagé dans la réconciliation. C'est pourquoi une nouvelle résolution sur Sri Lanka ne permettrait pas d'améliorer la situation des droits de l'homme sur le terrain. Seul l'Examen périodique universel peut permettre un tel objectif. Le Zimbabwe, qui a estimé lui aussi que Sri Lanka avait beaucoup progressé en matière de réconciliation et que la Haut-Commissaire était allée au-delà du mandat confié par la résolution 22/1 du Conseil, considère qu'une résolution supplémentaire n'est pas nécessaire, vu l'engagement du Gouvernement sri-lankais

La Chine a félicité Sri Lanka pour ses réalisations dans les domaines de la promotion et la protection des droits de l'homme et du développement économique. Le Gouvernement a renforcé sa coopération avec les mécanismes onusiens des droits de l'homme. La Chine regrette que le rapport de la Haut-Commissaire ne présente pas de manière objective les progrès et réalisations du Gouvernement de Sri Lanka. La confrontation ne peut que saper les bases de la coopération internationale en matière de droits de l'homme. La Chine appuie Sri Lanka dans la défense de son intégrité territoriale et de sa souveraineté nationale. Il faut donner à Sri Lanka assez de temps pour réaliser son processus de réconciliation interne. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme doit respecter son mandat et apporter à Sri Lanka une assistance technique qui corresponde aux besoins du pays et avec son assentiment.

La Namibie reconnaît les efforts déployés par Sri Lanka, y compris la mise en place de la Commission sur les leçons à tirer et la réconciliation. La communauté internationale doit aider Sri Lanka à surmonter les défis de sa politique de réconciliation et de reconstruction du pays. La Namibie invite par ailleurs Sri Lanka à respecter ses obligations internationales. La Sierra Leone a souligné les efforts faits par Sri Lanka, mais regretté que la réconciliation si nécessaire, seule capable d'assurer une paix et une stabilité durables, n'était pas encore en vue. L'expérience de la Sierra Leone démontre que la paix n'est atteignable que par la justice et la réconciliation et a souligné la valeur d'exemple des mécanismes mis en place en Sierra Leone en matière de justice. Le Viet Nam a estimé que les réalisations de Sri Lanka dans le domaine de la réconciliation depuis 2009 méritent d'être encouragées. La visite de la Haut-Commissaire témoigne de sa coopération avec les mécanismes onusiens des droits de l'homme, mais les problèmes ne peuvent être résolus rapidement car les défis à relever sont considérables. Le Viet Nam est prêt à partager avec Sri Lanka son expérience en matière de réconciliation nationale et d'intégration internationale.

Parmi les nombreuses organisations non gouvernementales qui sont intervenues au sujet de la situation à Sri Lanka, la Commonwealth Human Rights Initiative a déploré que les victimes de crimes de guerre attendent toujours la justice. Les forces armées ne coopèrent pas avec la justice, les procédures manquent d'impartialité et les témoins ne sont pas suffisamment protégés. Le manque de volonté politique à faire la lumière sur les crimes du passé. Cette culture de l'impunité a des conséquences négatives car elle encourage le harcèlement de la société civile.

Human Rights Watch a affirmé qu'il fallait poursuivre tous les auteurs de violations des droits de l'homme, notamment les responsables du recrutement d'enfants-soldats. L'ONG a dénoncé le harcèlement par les autorités des défenseurs des droits de l'homme et des avocats qui défendent d'autres parties, notamment en diffusant leurs noms et photographies dans les medias. Les Nations Unies ont fait preuve de patience depuis la promesse faite par le Président sri-lankais au Secrétaire général en mai 2009, qui affirmait que Sri Lanka poursuivrait tous les responsables d'atrocité. CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens est profondément préoccupé par les intimidations visant les citoyens et les militants des droits de l'homme souhaitant communiquer ou s'exprimer au Conseil des droits de l'homme. L'ONG a cité parmi les personnes ainsi ciblées M. Ruki Fernando de l'organisation Inform et le père Praveen, un prêtre catholique. Tous deux ont été arrêtés à la mi-mars en vertu de la loi de prévention du terrorisme, un texte particulièrement liberticide, pour avoir tenté de voir Balendran Vithushaini, un adolescent de 13 ans placé sous tutelle après l'arrestation de sa mère, Balendran Jeyakumari, une militante connue des droits de l'homme poursuivie pour avoir hébergé un ancien membre présumé du LTTE.

Le Conseil norvégien pour les réfugiés a rappelé le grand nombre de personnes déplacées, cinq ans se sont écoulés depuis la fin du conflit. Un nombre inconnu de personnes déplacées à long terme ne sont plus considérées comme déplacées et n'ont pu bénéficier de solutions pérennes. En outre, le processus de réconciliation ne prend pas en compte les conséquences de la guerre sur certaines minorités, en particulier les Tamouls et les musulmans.

La Commission internationale des juristes a déclaré que le système judiciaire sri lankais ne fonctionne pas comme une instance indépendante. Les juges et avocats font l'objet de menaces et d'actes d'intimidation ; les juges qui prennent des décisions contraires aux intérêts du Gouvernement subissent des pressions allant jusqu'au limogeage. Cinq ans après la fin du conflit armé, personne n'a été poursuivi pour les violations graves des droits de l'homme commises par les deux parties. Les familles de victimes ont le droit à la justice, à la vérité et à des réparations. La Pasumai Thaayagam Foundation a déclaré qu'au moment où le Conseil examine cette situation, plusieurs personnes sont encore détenues dans les prisons dans le cadre de la loi sur le terrorisme. Depuis 36 ans, cette loi est utilisée pour réduire au silence ou éliminer toute personne critique au Sri Lanka. Le Conseil doit intervenir pour que la justice soit restaurée pour tous dans ce pays.

Le Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement a réitéré son soutien à un mécanisme international d'enquête pour les crimes commis à Sri Lanka, d'autant que certaines régions du pays sont toujours militarisées et que des graves violations des droits de l'homme sont toujours commises, y compris des exécutions sommaires ou arbitraires et des atteintes à la liberté d'expression. Lawyers' Rights Watch Canada a également appuyé l'appel à la création d'un mécanisme international d'enquête, notamment du fait que Sri Lanka n'a rien fait pour mener des enquêtes sur les violations des droits de l'homme. Au contraire, le pays continue de détenir des personnes dans le cadre de la loi sur le terrorisme, notamment des Tamouls. L'absence de mesures à l'encontre de Sri Lanka ne peut que renforcer l'impunité. France Libertés : Fondation Danielle Mitterrand a déclaré que l'heure a enfin sonné pour faire cesser les mensonges et nommer une commission d'enquête internationale, d'autant que Sri Lanka continue de militariser le nord du pays et de commettre des crimes assimilables à un génocide de la population tamoule. Il faudrait en outre abroger la loi sur le terrorisme et libérer les personnes détenues. United Nations Watch a noté que le Conseil, au lieu de condamner Sri Lanka pour les crimes qu'il commet, a adopté en 2009 une résolution présentée par Sri Lanka elle-même, appuyée par la Chine et dans laquelle le Conseil félicite le pays. Au lieu d'agir ainsi, il faut créer une commission d'enquête internationale pour faire la lumière et faire jaillir la vérité. Pour Amnesty International, le fait que Sri Lanka n'ait pas mené des enquêtes crédibles et indépendantes démontre la nécessité d'une investigation internationale. Amnesty International salue le fait que de nombreuses délégations se montrent soucieuses de protéger les personnes courageuses qui osent s'exprimer malgré les intimidations auxquelles elles sont soumises.

La World Barua Organisation a rappelé que Sri Lanka est un pays qui sort d'une guerre de 30 ans contre le terrorisme et qui progresse vers la réconciliation. Or, certains pays s'efforcent de perturber ce processus, influencés qu'ils sont par des éléments désireux de discréditer Sri Lanka au sein du Conseil. L'International Buddhist Relief Organisation a demandé où étaient ces bonnes âmes et que faisait l'ONU pendant les trois décennies au cours desquels on voyait le LTTE faire exploser des gens, tuer des femmes enceintes, des bébés et d'innocents moines bouddhistes. Et maintenant que le LTTE est défait, ces bonnes âmes viennent avec célérité exiger des comptes, de la transparence, pour savoir pourquoi cette organisation a été anéantie. L'ONG a dénoncé cette hypocrisie. L'International Buddhist Foundation a déclaré que la paix et la compassion sont nécessaires pour Sri Lanka. Elle a rappelé que les recommandations de la Haut-Commissaire visant à créer un mécanisme international d'enquête ont été rejetées par Sri Lanka. Pourquoi la Haut-Commissaire s'entête-t-elle à réitérer cette recommandation alors qu'elle a pu constater la situation sur le terrain lors de sa visite? Ceci remet en cause l'impartialité des Nations Unies et de la Haut-Commissaire.

Le Mouvement international contre toutes les formes de discrimination s'est félicité du travail de la Haut-Commissaire, dont le rapport évoque de manière juste les préoccupations que l'on peut avoir en matière de droits de l'homme à Sri Lanka. L'ONG a averti que, sans l'assistance du Haut-Commissariat, le pays glisserait vers la militarisation, l'autoritarisme et l'impunité. Action contre la faim a appuyé les recommandations émises par le Haut-Commissaire, en particulier concernant l'établissement des responsabilités et la reddition des comptes. Les rapports démontrent le manque de volonté de l'État à lutter contre l'impunité et traduire en justice les responsables d'atrocités, notamment les auteurs d'un massacre de travailleurs humanitaires en 2007. Les témoins sont bâillonnés et les enquêtes ne sont pas crédibles, estime l'ONG, qui a d'appelé toutes les parties à agir pour mettre un terme à l'impunité. Libération a pour sa part déploré que le rapport de la Haut-Commissaire néglige la dimension ethnique de ce conflit. La vaste majorité des disparus, des victimes de tortures et de meurtres sont des Tamouls, qui sont confronté à un «génocide». Le peuple tamoul ne peut attendre indéfiniment que l'on vienne à son aide, alors que l'on cherche à l'éradiquer de Sri Lanka. Les victimes ont droit à la justice et le monde doit agir pour que le peuple tamoul puisse vivre en paix à l'avenir.

World Evangilical Alliance a observé que Sri Lanka se considère comme un pays sortant de conflit, tout en réprimant ceux qui demandent que justice soit rendue et en particulier les minorités. International Educational Development a estimé qu'un génocide se poursuivait à Sri Lanka, l'objectif de Colombo étant de «détamouliser» l'île. La question de la réconciliation est sans objet, la majorité cinghalaise n'ayant nullement l'intention de se réconcilier avec la nation tamoule, désireuse qu'elle est de l'assimiler dans sa vision d'un Sri Lanka bouddhiste cinghalais. En conséquence de quoi, la seule alternative pour les Tamouls de souche est en effet l'exil ou l'assimilation. Le Collectif des femmes africaines du Hainaut a déclaré que la colonisation britannique avait modifié les équilibres existant auparavant à Sri Lanka, menant à la guerre et aux massacres récents. Il ne s'agit pas d'un problème de minorités, mais de colonisation d'une partie de l'île par la population de l'autre partie. Dressant un parallèle avec la situation à Gaza, l'ONG a dénoncé le «génocide des Tamouls», qui constituent une nation et non une minorité. Vivekananda Sevekenda O-Shisu Uddyan a dit sa déception de voir le Conseil aborder la question de Sri Lanka sous l'aspect d'une résolution qui ne donnera pas au Haut-commissariat le mandat de mener des enquêtes sur les crimes, ni sur les mesures à prendre pour empêcher le génocide des Tamouls.

Le Human Rights Law Centre, dans une déclaration conjointe, a salué le rapport de la Haut-Commissaire en indiquant que les forces de sécurité sri-lankaises se sont livrées à des massacres extrajudiciaires délibérés. Les Tigres tamouls ont pour leur part recruté des enfants-soldats, tandis que des viols et des actes de torture ont été commis par les forces de sécurité. Rien n'a été mis en place pour établir un mécanisme national de reddition des comptes. L'Association of World Citizens a demandé des nouvelles des jeunes personnes entraînées dans les camps du nord pendant trois mois par les Tigres tamouls et qui recevaient une fiole de cyanure. Où sont-elles et comment vont-elles affronter la vie, a demandé l'ONG, qui insiste sur la nécessité de leur fournir des soins, notamment des soins mentaux.
__________

Organisations non gouvernementales – Débat interactif sur le Mali:
Vision Mondiale International (au nom également de l'Alliance internationale d'aide à l'enfance, Conseil norvégien pour les réfugiés, International Rescue Committee et OXFAM ), Femmes Afrique Solidarité, Human Rights Watch, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) et le Bureau international catholique de l'enfance.

Organisations non gouvernementales – Débat interactif sur la République centrafricaine:
Femmes Afrique Solidarité, World Evangelical Allliance, Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale – Caritas (au nom également de la Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul), CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, Alliance internationale d'aide à l'enfance, Human Rights Watch et la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH).


Organisations non gouvernementales – Débat interactif sur le Sri Lanka:
Commonwealth Human Rights Initiative, Human Rights Watch, CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens , Conseil norvégien pour les réfugiés, Commission internationale de jurists, Pasumai Thaayagam Foundation, Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, Lawyers' Rights Watch Canada, France Libertés: Fondation Danielle Mitterrand, United Nations Watch, Amnesty International, World Barua Organization , International Buddhist Relief Organisation, International Buddhist Foundation , Mouvement international contre toutes les formes de discrimination, World Evangelical Alliance, International Educational Development, Le Collectif des Femmes Africaines du Hainaut, Vivekananda Sevakendra-O-Sishu Uddyan, Libération, Action contre la faim, Jubilee Campaign, Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme, Human Rights Law Centre, Association of World Citizens.



Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC14/050F