Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT L'EXAMEN EN PREMIÈRE LECTURE D'UN PROJET D'OBSERVATION GÉNÉRALE SUR LA LIBERTÉ ET LA SÉCURITÉ DE LA PERSONNE
Le Comité des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, les travaux qu'il avait repris hier matin sur un projet d'observation générale sur la liberté et de la sécurité de la personne, dont traite l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Le Comité s'est plus particulièrement penché sur un nouveau paragraphe consacré à la détention dite préventive ou de sécurité. Tel qu'initialement proposé, le libellé de ce paragraphe affirmait qu'en dehors du contexte d'un conflit armé international, «le Comité considère que la détention de sécurité n'est compatible avec le Pacte qu'en vertu d'une dérogation à l'article 9, paragraphe 1, qui soit conforme à toutes les exigences de l'article 4» et ajoutait que «même en présence d'une telle dérogation, le Comité considère que la détention de sécurité restera généralement incompatible avec le Pacte, à moins que ne soient remplie» une série de conditions que le texte énumère.
Une experte s'est catégoriquement opposée au libellé de ce paragraphe; elle a expliqué qu'il ne saurait être question de donner l'impression que le Comité accepte des dérogations à l'article 9. Rappelant être membre du Comité depuis 25 ans, cette experte a affirmé qu'inclure une telle acceptation dans ce projet serait le type de décision qui pourrait l'amener à envisager de mettre un terme à son mandat avant son échéance. Plusieurs autres membres du Comité ont eux aussi exprimé leur forte réticence face à l'idée d'accepter un libellé qui donnerait effectivement l'impression que le Comité accepte des dérogations à l'article 9.
En fait, le Comité a déjà accepté ce type de détention pour des raisons administratives ou politiques en affirmant que cela était conforme à l'article 9 du Pacte même sans dérogation, a alors fait observer le Président du Comité, M. Nigel Rodley. Ce qui serait donc erroné pour le Comité, c'est de continuer à dire dans ce projet d'observation, comme il l'a fait jusqu'ici dans les faits, que même en l'absence de dérogation à l'article 9, on peut détenir des personnes pour des raisons administratives ou politiques, a-t-il expliqué.
Le Comité n'est pas, selon le Pacte, autorisé à dire quels sont les motifs permettant d'affirmer qu'une détention n'est pas arbitraire, a alors souligné l'experte qui s'est opposée le plus fermement à toute tentative visant à accorder un tel rôle au Comité. En effet, a-t-elle souligné, l'article 9 stipule expressément que «Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi», ce qui implique clairement que c'est aux États et non au Comité de déterminer les motifs dont il est question. En fait, au lieu d'énumérer une série de conditions faisant office de dérogations, le texte proposé dans le présent projet d'observation générale pourrait plus judicieusement présenter une liste de conditions constituant autant de sauvegardes qu'il convient dans tous les cas d'appliquer et non pas des dérogations, a proposé l'experte. Une grande majorité de membres du Comité s'est prononcée en faveur de cette approche. Le texte de ce paragraphe additionnel sera donc remanié en conséquence.
Il faut veiller à ne pas ouvrir une brèche dans l'interprétation de l'article 9, a pour sa part souligné un expert, après avoir fait observer que le libellé du paragraphe additionnel examiné ce matin entre trop dans les détails, alors que l'objectif d'une observation générale doit être de clarifier une situation. Dans ce libellé, nous faisons trop œuvre législative alors que nous devons rester des «interprètes», a insisté cet expert.
Le projet d'observation générale est composé de sept parties qui ont successivement trait à des remarques d'ordre général, à la détention arbitraire et à la détention illégale, à la notification des motifs de l'arrestation et de toute charge pénale retenue, au contrôle judiciaire de la détention dans le cadre d'une inculpation pénale, au droit d'introduire un recours pour obtenir la libération si la détention est illégale ou arbitraire, au droit à réparation pour une arrestation ou une détention illégale ou arbitraire, ainsi qu'à la question de la relation de l'article 9 avec d'autres articles du Pacte.
Ce projet d'observation générale (future «observation générale n°35» - le document distribué en salle porte la cote CCPR/C/GC/R.35/Rev.2) doit remplacer l'observation générale n°8 adoptée en 1982 (voir la récapitulation des observations générales des organes conventionnels: HRI/GEN/1/Rev.9 (Vol.I) paragraphe 208). L'article 9 du Pacte dispose notamment que «tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs, et conformément à la procédure prévus par la loi». En outre, tout individu arrêté sera informé des raisons de cette arrestation; sera traduit dans le plus court délai devant une autorité judiciaire; devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré. Le Comité poursuivra mardi lundi matin, à 10 heures, l'examen de ce projet d'observation générale.
À sa prochaine séance publique, lundi matin à 10 heures, le Comité sera saisi de rapports préparés par son Rapporteur spécial sur le suivi des observations générales adressées aux États par le Comité, et son Rapporteur spécial sur le suivi des constatations qu'il a adoptés suite à l'examen de plaintes contre des États parties.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CT14/010F