Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE MONACO
Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport de Monaco sur les mesures prises par ce pays en application de la Convention relative aux droits de l'enfant.
La Représentante permanente de Monaco à Genève, Mme Carole Lantieri, a fait part des avancées législatives et des mesures concrètes intervenues depuis les observations finales du Comité de 2001, notamment s'agissant de l'âge de la majorité qui a été fixé à 18 ans pour les filles comme pour les garçons, ou encore la création du Centre de coordination prénatale et de soutien familial. S'agissant de la protection des mineurs en danger du fait des conditions d'existence de sa famille, lorsque la situation ne revêt pas un caractère d'urgence et que les parents sont favorables à la mise en œuvre de mesures de soutien, un simple «suivi des familles» sans signalement au juge des enfants peut être effectué. Lorsque la gravité de la situation nécessite un signalement à la justice, une mesure de protection de l'enfant est ordonnée par le juge, lequel peut notamment prononcer un placement dans un établissement spécialisé. Mme Lanteri a ensuite fait valoir le renforcement de la répression des crimes et délits commis à l'encontre des enfants. Elle a en outre souligné qu'un arrêté de 2012 du Directeur des services judiciaires prévoit que quelle que soit la faute, les mineurs de moins de 16 ans ne peuvent pas être placés en cellule disciplinaire, un arrêté en date du 2 avril dernier précisant que le placement en cellule disciplinaire de mineurs de plus de 16 ans ne peut excéder trois jours quel que soit le degré de la faute.
La délégation monégasque était composée d'autres fonctionnaires du Département des relations extérieures, de représentants du Département des affaires sociales et de la santé, ainsi que du Directeur de l'action sanitaire, du Directeur du travail et de l'Administrateur juridique principal du Service du droit international, des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Des conseillers de la Direction des services judiciaires et de la Direction de l'éducation nationale complétaient la délégation. Elle a répondu aux questions posées par les membres du Comité s'agissant, notamment, des enfants nés hors mariage; des châtiments corporels; de la protection des enfants contre les abus liés à l'Internet; de la situation des enfants handicapés; du rôle du Conseiller en charge des recours et de la médiation; de la législation relative à l'interdiction du travail des enfants; de l'incrimination du blanchiment d'argent; des questions d'adoption; de la consommation de tabac, d'alcool et autres drogues; ou encore de l'administration de la justice pour mineurs.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, M. Jorge Cardona Llorens, a reconnu les progrès réalisés ces dernières années par la Principauté dans le domaine des droits de l'enfant. Rappelant que Monaco est qualifié de paradis fiscal, il a notamment souhaité savoir ce qu'il en est du contrôle des activités des entreprises financières, notamment pour ce qui a trait au blanchiment d'argent susceptible de provenir d'activités où les droits de l'enfant sont violés. La corapporteuse, Mme Maria Rita Parsi, a déploré que la législation existante ne comporte aucune disposition interdisant les châtiments corporels au sein de la famille, à l'école et dans les institutions, en dépit de la recommandation que le Comité avait adressée à cette fin au pays.
Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, ses observations finales sur le rapport de Monaco. Les observations finales sur l'ensemble des rapports examinés au cours de la session seront rendues publiques après la clôture de la session.
Le Comité tiendra sa prochaine séance publique le vendredi 4 octobre dans l'après-midi, à partir de 15 heures, pour clore les travaux de sa soixante-quatrième session.
Présentation du rapport de Monaco
Présentant le rapport de Monaco (CRC/C/MCO/2-3), Mme CAROLE LANTERI, Représentante permanente de Monaco auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que la Principauté est un État indépendant et souverain couvrant une superficie de seulement 2,02 km2. C'est une monarchie héréditaire et constitutionnelle qui affirme la primauté du droit et la séparation des pouvoirs et qui ne compte que 36 000 habitants, dont 8600 environ de nationalité monégasque. Plus de 125 nationalités composent la population monégasque, a précisé Mme Lanteri.
La Principauté de Monaco est très engagée dans la promotion et la protection des droits de l'homme, domaines qui constituent l'une des priorités de sa politique nationale et internationale, a poursuivi Mme Lanteri. Cet engagement de la famille princière, du Gouvernement princier, du législateur et de la société civile monégasques se traduit en particulier par des actions en faveur des personnes les plus vulnérables: les enfants, les femmes et les personnes handicapées.
Depuis les observations finales du Comité de 2001, de nombreuses avancées législatives et mesures concrètes ont été enregistrées en lien avec les droits de l'enfant, a affirmé Mme Lanteri. Faisant part, en premier lieu, des progrès accomplis dans le domaine de l'égalité hommes-femmes, elle a expliqué que les textes ne correspondant plus aux valeurs admises dans la société, il est apparu nécessaire au Gouvernement princier d'adapter les textes législatifs à la réalité. Ainsi, la loi du 23 décembre 2002 a fixé l'âge de la majorité à 18 ans pour les filles comme pour les garçons. La loi du 29 décembre 2003 a quant à elle modifié certaines dispositions du code civil, du code de procédure civile et du code de commerce, établissant ainsi l'égalité entre l'homme et la femme au sein du foyer en révisant les dispositions relatives à l'entretien de la famille, à la communauté de vie et au lieu de résidence choisi conjointement. En outre, la notion de puissance paternelle a disparu du code civil et a été remplacée par la notion d'autorité parentale, a ajouté Mme Lanteri, avant de signaler l'instauration de congés de paternité et d'adoption. Par ailleurs, en ce qui concerne la nationalité, plusieurs lois ont été adoptées depuis 2001, modifiant les dispositions du code civil relatives au divorce et à la séparation de corps, assurant ainsi l'égalité des hommes et des femmes en ce qui concerne l'acquisition ou la conservation de la nationalité, ainsi que la transmission de la nationalité.
Pour ce qui est des questions de santé, Mme Lanteri, après avoir indiqué que la Principauté de Monaco affirme le droit de chaque enfant à un accès équitable à des soins de santé appropriés, adaptés et de bonne qualité, a expliqué que le Gouvernement s'attache à développer des politiques générales d'information et de prévention visant à garantir à l'enfant un cadre de vie sain, de sa conception à l'âge adulte, mais aussi à garantir son accès, dans les meilleures conditions, aux soins de santé. Mme Lanteri a ensuite attiré l'attention sur la loi du 24 avril 2009 qui a créé un Centre de coordination prénatale et de soutien familial et a instauré trois cas dans lesquels il est possible de recourir à l'interruption médicale de grossesse, à savoir: la préservation de la vie de la femme enceinte, la détection chez l'enfant à naître d'une affection grave reconnue comme incurable au moment du diagnostic prénatal et le viol, quel qu'en soit l'auteur.
Faisant état des efforts mis en œuvre par le Gouvernement en faveur des personnes handicapées, Mme Lanteri a mis l'accent sur la nomination, en 2006, au sein du Gouvernement, d'un délégué en charge des personnes handicapées. En ce qui concerne les enfants handicapés, leur intégration scolaire est activement soutenue par la Direction de l'action sanitaire et sociale au moyen de la mise à disposition de personnel entièrement dédié à l'enfant, chargé de l'accompagner et de faciliter sa scolarisation en milieu ordinaire, dès que nécessaire. En outre, lorsque les enfants en situation de handicap ne peuvent être maintenus dans le milieu scolaire ordinaire à Monaco et sont placés dans un établissement situé sur le territoire français, les services sociaux monégasques poursuivent, tout au long de ce placement, un suivi régulier tant auprès de l'enfant que de sa famille et les autorités françaises assurent l'évaluation des conditions de vie et de traitement de ces enfants. Sur le plan international, Monaco a signé en septembre 2009 la Convention relative aux droits des personnes handicapées, a ajouté Mme Lanteri.
L'éducation est régie par la loi n°1334 de juillet 2007, laquelle a réaffirmé les principes essentiels d'égalité, d'obligation scolaire et de gratuité de l'enseignement tout en mettant en exergue la prééminence du rôle de l'État dans ce domaine, a poursuivi la Représentante permanente. Elle a indiqué que la Principauté compte 5884 élèves dont 30% ne vivent pas à Monaco. Parmi les élèves, a-t-elle ajouté, sont représentées plus de 75 nationalités. Mme Lanteri a ensuite fait état des mesures prises pour lutter contre la violence à l'école et a également souligné que les psychologues de l'association monégasque Action Innocence interviennent dans les établissements scolaires de la Principauté avec le programme de formation «Surfer avec prudence sur Internet».
La politique gouvernementale en faveur des droits de l'enfant comprend un dispositif destiné à protéger les enfants en danger et à réprimer les violences dont ils sont victimes. La Direction de l'action sanitaire et sociale est le service de l'État chargé d'organiser et d'assurer la protection des mineurs en danger établissant pour se faire un partenariat avec toutes les instances concernées, a indiqué Mme Lanteri. «Un enfant est considéré en danger lorsque les conditions d'existence de sa famille risquent de mettre en danger sa santé, sa sécurité, sa moralité ou son éducation», a précisé Mme Lanteri. Les représentants légaux des mineurs sont systématiquement informés dès lors qu'une difficulté apparaît et leur adhésion aux mesures préconisées est toujours recherchée. Lorsque la situation ne revêt pas un caractère d'urgence et que les parents sont favorables à la mise en œuvre des mesures de soutien préconisées, un simple «suivi des familles» sans signalement au juge tutélaire (juge des enfants) peut être effectué, a indiqué Mme Lanteri. Lorsque la gravité de la situation nécessite un signalement à la justice, une mesure de protection de l'enfant – appelée mesure d'assistance éducative – est ordonnée par le juge tutélaire, lequel peut, selon la gravité, notamment prononcer un placement dans un établissement spécialisé, en l'occurrence le Foyer de l'Enfance Princesse Charlène.
Dans tous les cas, a ajouté Mme Lanteri, des interventions ciblées sont assurées au sein de la famille et peuvent relever des domaines suivants: éducatif, social (tutelle aux prestations familiales, relogement, aides financières…), soutien à la parentalité (droit de visite des parents en présence de tiers, médiation familiale..), médical (suivi psychologique/psychiatrique de l'enfant et/ou de ses parents). En second lieu, la protection de l'enfance passe également par la répression des violences commises à leur encontre, a poursuivi la Représentante permanente de Monaco. Elle a en particulier attiré l'attention sur la loi du 26 décembre 2007 relative au renforcement de la répression des crimes et délits commis à leur encontre, soulignant que ce texte contient notamment deux avancées importantes puisque, d'une part les règles relatives à la prescription des poursuites ont été spécialement aménagées dans les domaines couverts par cette loi et, d'autre part, les règles de compétence des juridictions monégasques ont également été adaptées et élargies, à la faveur d'une compétence juridictionnelle extraterritoriale.
La loi du 20 juillet 2011 a introduit au sein du code de procédure pénale un Titre VIII intitulé «Dispositions particulières concernant les mineurs et les majeurs incapables», spécialement à l'effet de renforcer le respect de l'opinion de l'enfant en lui offrant des droits procéduraux accrus, a par ailleurs fait valoir Mme Lanteri. Elle a également attiré l'attention sur la refonte de la garde à vue des mineurs opérée par la loi du 25 juin 2013 portant réforme du code de procédure pénale en matière de garde à vue. Mme Lanteri a en outre souligné qu'un arrêté du Directeur des services judiciaires en date du 4 juin 2012 prévoit que quelle que soit la faute, les mineurs de moins de 16 ans ne peuvent pas être placés en cellule disciplinaire, un arrêté en date du 2 avril dernier précisant que le placement en cellule disciplinaire de mineurs de plus de 16 ans ne peut excéder trois jours quel que soit le degré de la faute.
Depuis l'examen de son précédent rapport, Monaco a ratifié (en 2001 et en 2008) les deux premiers Protocoles se rapportant à la Convention et une étude d'impact est en cours au sein des services juridiques du Gouvernement concernant le troisième Protocole établissant une procédure de communications (plaintes), a en outre indiqué la Représentante permanente.
Mme Lanteri a enfin rappelé que le Gouvernement princier mène depuis plus de 20 ans une politique de coopération internationale visant principalement à éradiquer la pauvreté.
«Sur la base des observations du Comité, la Principauté de Monaco poursuivra son engagement et continuera d'œuvrer sur le plan national et international à la promotion et la protection des droits de l'enfant», a conclu la Représentante permanente.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. JORGE CARDONA LLORENS, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, a reconnu les progrès réalisés ces dernières années par la Principauté dans le domaine des droits de l'enfant. Monaco est un pays développé, riche, attaché aux droits et le niveau d'exigence du Comité concernant cette Principauté est donc élevé, a-t-il souligné. Si certaines des recommandations que le Comité avait adressées au pays à l'issue de l'examen de son précédent rapport ont été suivies d'effet, d'autres ne l'ont pas été, comme, par exemple, celle qui visait le retrait de la déclaration et des réserves que le pays a émises à l'égard de la Convention. Monaco a-t-il mis au point un plan national global en matière de droits de l'enfant et, le cas échéant, comment est-il coordonné, a en outre demandé le rapporteur? La Principauté de Monaco a-t-elle l'intention de créer une institution nationale chargée des droits de l'enfant comme cela lui avait été demandé en 2001, s'est-il également enquis?
M. Cardona Llorens a ensuite déploré l'absence pour Monaco de statistiques ventilées - par sexe et nationalité par exemple - concernant les enfants.
Le rapporteur s'est en outre enquis des mesures adoptées pour contrôler les activités des entreprises privées afin de s'assurer qu'elles respectent les droits de l'enfant. Rappelant que Monaco est qualifié de paradis fiscal, il a souhaité savoir ce qu'il en est du contrôle des activités des entreprises financières, notamment pour ce qui a trait au blanchiment d'argent, par exemple par le biais des casinos, susceptible de provenir d'activités où les droits de l'enfant sont violés.
En ce qui concerne enfin le droit à la vie, le rapporteur a exprimé sa préoccupation s'agissant de statistiques indiquant un taux élevé de suicides parmi les jeunes. Si ces statistiques sont exactes, qu'en est-il des mesures de prévention prises dans ce domaine?
MME MARIA RITA PARSI DI LODRONE, corapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, a salué les modifications apportées à la loi sur la nationalité afin d'éviter les cas d'enfants apatrides. Monaco dispose de lois efficaces protégeant les enfants contre la violence, a poursuivi la corapporteuse, avant de déplorer toutefois que la législation existante ne comporte aucune disposition interdisant les châtiments corporels au sein de la famille, à l'école et dans les institutions, en dépit de la recommandation que le Comité avait adressée à cette fin au pays à l'issue de l'examen de son précédent rapport. Il semblerait qu'il y ait une acceptation sociale des châtiments corporels au sein de la société et c'est pourquoi il faut envoyer un message fort à la population quant à l'interdiction de ces pratiques, a insisté Mme Parsi.
Mme Parsi a par ailleurs souhaité savoir si la Principauté envisageait l'instauration d'une ligne téléphonique gratuite disponible 24 heures sur 24 afin de recevoir les plaintes émanant des enfants.
Un autre membre du Comité a relevé que Monaco a signé mais n'a pas encore ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées et s'est enquis des intentions de la Principauté en la matière. Qu'en est-il de l'âge minimum du mariage à Monaco, a poursuivi cet expert; est-il désormais fixé à 18 ans pour les personnes des deux sexes ou reste-t-il fixé à 15 pour la fille comme cela était le cas lors de l'examen du précédent rapport monégasque?
Une experte a souhaité savoir si subsistait à Monaco une différence de statut juridique entre enfants nés hors mariage et enfants issus d'un mariage, notamment pour ce qui a trait aux questions d'héritage.
Une experte s'est inquiétée d'informations selon lesquelles des mineurs de Monaco se rendraient à l'étranger pour avorter. Les causes des grossesses précoces, de l'addiction aux drogues et de la délinquance ont-elles été étudiées et qu'en est-il des mesures prises pour prévenir ces phénomènes, a en outre demandé cette experte? Sur les 21 cas de violence sexuelle enregistrés à Monaco en 2012, 15 avaient trait à l'exploitation sexuelle de mineurs, notamment sur Internet, a-t-elle par ailleurs relevé.
Un expert s'est inquiété d'informations selon lesquelles le pays connaîtrait un problème de travail des enfants, plus particulièrement dans les secteurs du commerce (petits magasins) et du tourisme. L'âge de la responsabilité pénale est fixé à Monaco à 13 ans, ce qui est assez bas en comparaison de celui qui prévaut dans les autres pays européens, a en outre fait observer cet expert, avant de demander si la Principauté envisageait d'élever quelque peu cet âge. Cet expert a en outre souhaité connaître le nombre de mineurs privés de liberté à Monaco. Il s'est d'autre part inquiété que des mineurs âgés de 16 à 18 ans puissent être placés en cellule disciplinaire.
Réponses de la délégation
La Principauté de Monaco compte environ 2000 enfants âgés de moins de 18 ans, a indiqué la délégation.
La législation relative à l'âge minimum du mariage a été modifiée en juillet 2011, de sorte que l'article 116 du code civil prévoit désormais que la femme – comme l'homme – ne peut se marier avant l'âge de 18 ans, a indiqué la délégation.
Interpellée sur d'éventuelles distinctions entre enfants nés hors mariage et enfants issus d'un mariage, la délégation a indiqué que la loi n°1278 du 29 décembre 2003 portant modification de certaines dispositions du code civil, du code de procédure civile et du code du commerce a bien abrogé l'article 776 du code civil. C'est donc désormais l'article 615 du code civil qui est appliqué par les tribunaux s'agissant plus particulièrement des droits de succession; cet article prévoit que «les droits successoraux s'appliquent dès qu'une filiation est légalement établie», indépendamment donc de la question de savoir si l'enfant est né hors mariage ou non, a expliqué la délégation.
La délégation a par ailleurs indiqué que Monaco a connu deux accouchements sous X au cours de ces vingt dernières années.
S'agissant de la protection des enfants contre les abus liés à l'Internet, la délégation a indiqué que la sensibilisation en la matière intervient en milieu scolaire dès l'âge de huit ans. Chaque élève signe en début d'année une charte relative à l'utilisation d'Internet à l'école, a-t-elle précisé. En outre, les autorités monégasques travaillent avec l'ONG Action Innocence, laquelle intervient en milieu scolaire par le biais de débats pour sensibiliser les élèves en leur permettant, sans aucune censure, d'exposer leurs pratiques, lesquelles font ensuite l'objet de commentaires en vue, le cas échéant, de les corriger.
Le code pénal monégasque a été enrichi de nouvelles incriminations liées à la lutte contre la cybercriminalité et de nouvelles dispositions procédurales visant à protéger les enfants ont été aménagées. Ainsi, sont désormais sanctionnés le stockage, l'enregistrement, la production et la diffusion d'images de nature pornographique – quel que soit le vecteur de communication utilisé (ce qui inclut donc l'Internet); une circonstance aggravante est prévue lorsque ces images impliquent des mineurs. À en outre été introduite dans le code pénal l'incrimination de la sollicitation en ligne d'enfants à des fins sexuelles (grooming). De nouveaux moyens d'investigation et d'enquête, telle la saisine de matériels informatiques, ont été mis à disposition de la police et autres autorités concernées, a-t-elle ajouté.
En ce qui concerne «l'appréhension pénale des châtiments corporels», la délégation a reconnu que le code pénal monégasque ne contient pas, en l'état actuel, d'incrimination spécifique des châtiments corporels, ne serait-ce que parce que la définition des châtiments corporels est «protéiforme». Le Gouvernement a donc adopté une approche par étapes et graduée de cette question, a-t-elle indiqué. Aujourd'hui, n'importe quel acte de violence à l'encontre d'un enfant est passible d'une peine de 1 à 5 jours d'emprisonnement et il existe une série de circonstances aggravantes permettant de prendre en compte la gravité de la violence exercée, a expliqué la délégation. Ainsi, a-t-elle notamment précisé, est passible d'une peine de 1 à 5 ans d'emprisonnement toute blessure ou coup volontaire porté à l'égard d'un mineur de moins de 16 ans ou toute autre violence ou voie de fait, ainsi que la privation de l'alimentation à l'encontre d'un tel mineur. La peine encourue pourra aller de 5 à 10 ans d'emprisonnement si les coups et blessures ont été suivis d'une mutilation ou de toute autre incapacité permanente grave, a indiqué la délégation.
S'agissant de la prise en compte de l'opinion de l'enfant, la délégation a notamment indiqué que sur le plan civil, l'enfant est entendu lors des procédures de divorce; il peut également saisir lui-même le juge des tutelles, a-t-elle fait valoir, avant de concéder ne pas connaître de cas où un mineur aurait ainsi saisi ce juge.
Rien ne peut freiner la participation des enfants handicapés, lesquels participent à tous les niveaux comme tous les enfants; si les conditions matérielles de départ constituent un obstacle, des décisions sont prises afin de pouvoir répondre au mieux à la situation rencontrée, a par ailleurs indiqué la délégation. Les autorités veillent à ce que chaque enfant handicapé puisse accéder à tous les niveaux d'enseignement, a-t-elle notamment souligné. S'agissant de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, la délégation a expliqué que Monaco a manifesté sa volonté de ratifier cet instrument mais que la concrétisation de cette volonté reste liée à la nécessité de réaliser des avancées en ce qui concerne la mise en conformité du droit national avec les dispositions de cet instrument. Aussi, un projet de loi visant une refonte du droit dans certains domaines relevant de ladite Convention se trouve actuellement entre les mains du Parlement; lorsque ce texte aura été voté, la Convention pourra être ratifiée, a indiqué la délégation.
Il n'y a pas vraiment de notion de minorités à Monaco, étant donné que les Monégasques sont en fait eux-mêmes minoritaires dans leur pays, a par ailleurs expliqué la délégation.
La délégation a indiqué que le Conseiller en charge des recours et de la médiation est un élément central du mécanisme monégasque de protection et de promotion des droits de l'homme. Il a un pouvoir fondamental d'investigation auprès de l'administration et peut entendre toute personne qui s'estime lésée par une action de l'administration; il bénéficie pour cela d'une indépendance fonctionnelle et financière et a une faculté de recommandation à l'intention de l'administration, a précisé la délégation. Aujourd'hui, le Gouvernement princier n'exclut pas d'accroître les prérogatives de ce Conseiller, a-t-elle ajouté.
Répondant à des questions sur l'incidence des cas de suicides parmi les jeunes monégasques, la délégation a fait valoir qu'en la matière, aucun décès de mineur n'a été recensé à Monaco au cours de ces dernières années. Les tentatives de suicide sont prises en charge par les psychiatres du Centre de psychiatrie de l'hôpital Princesse Grace, a ajouté la délégation; un suivi des patients mineurs est assuré à leur sortie par des pédopsychiatres, a-t-elle précisé.
Pour ce qui est de l'incrimination spécifique du blanchiment d'argent, la délégation a indiqué que la possibilité de poursuivre des personnes qui utiliseraient des capitaux provenant du produit d'une activité d'exploitation d'enfants dans des conditions qui ne seraient pas dignes relève du code pénal qui incrimine notamment le fait d'obtenir d'une personne dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont connus de l'auteur la fourniture de services non rétribués ou insuffisamment rétribués; la peine encourue est alors de cinq ans d'emprisonnement.
En réponse aux inquiétudes exprimées par certains experts au sujet d'un éventuel travail des enfants dans des commerces, la délégation a notamment souligné que Monaco – même si elle n'a pas adhéré aux Conventions n° 138 et 182 de l'OIT relatives à l'âge minimum d'admission à l'emploi et aux pires formes de travail des enfants – dispose d'une législation qui reprend ces principes.
La législation en vigueur dispose qu'avant leur libération de l'obligation scolaire, les enfants ne peuvent pas être employés, sauf dans les entreprises n'employant que des membres de la famille – et encore, dans ce contexte, l'obligation de scolarité reste-t-elle valable, de sorte que l'enfant de moins de 16 ans ne pourrait travailler dans l'entreprise familiale qu'en dehors des périodes scolaires, a indiqué la délégation. L'inspecteur du travail peut faire procéder par la médecine du travail à un examen médical de tout enfant de moins de 16 ans qui serait admis à exercer une activité dans les conditions susmentionnées, a-t-elle ajouté. Il convient de garder à l'esprit que l'enseignement est obligatoire de 6 à 16 ans révolus, ce qui met une borne définitive à l'âge d'admission au travail, a par ailleurs souligné la délégation. Aucune infraction à ces dispositions n'a été enregistrée dans la Principauté par les inspecteurs du travail, a-t-elle fait valoir.
Monaco mène et poursuit une réflexion concernant son éventuelle adhésion à l'Organisation internationale du travail, a poursuivi la délégation. Néanmoins, le fait demeure que «certains principes se heurtent au système de priorité d'emploi» en vigueur dans la Principauté – système en vertu duquel certains emplois sont réservés prioritairement aux Monégasques, a expliqué la délégation. «C'est ce principe-là qui fait que pour le moment, Monaco ne peut envisager son adhésion à l'OIT», a insisté la délégation.
En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué que le nombre total de mineurs écroués en 2012 s'est élevé à six, dont 4 garçons. Les mineurs incarcérés en 2012 ont représenté environ 4% du total des personnes incarcérées, a-t-elle ajouté. La délégation a précisé qu'en dessous de l'âge de 13 ans, un mineur délinquant ne peut être accessible à une peine de détention.
Un nouveau texte de loi régissant la garde à vue des mineurs a été adopté en juin dernier, qui prévoit notamment que pour un mineur de plus de plus de 13 ans, la garde à vue ne peut intervenir qu'en cas de soupçon sérieux de commission ou de tentative de commission d'un crime et pour les crimes passibles d'une peine de plus de cinq ans d'emprisonnement. La garde à vue du mineur n'est pas une mesure de première intention; en effet, la loi relative aux mineurs délinquants prévoit pour les mineurs d'autres mesures telles que l'admonestation ou la remise aux parents. Bref, la garde à vue des mineurs reste exceptionnelle et parfaitement encadrée, a insisté la délégation.
La délégation a par ailleurs indiqué qu'en 2012, le budget alloué à l'éducation s'était élevé à «47 millions», ce qui correspond à 5,3% du budget de l'État.
La délégation a cité des chiffres attestant des hausses, ces dernières années, des consommations de tabac, d'alcool, de cannabis et autres drogues à Monaco, les filles étant généralement davantage touchées que les garçons par ces hausses, l'API (alcoolisation ponctuelle importante) étant par exemple en baisse pour les garçons mais en hausse pour les filles.
Le code civil monégasque prévoit deux types d'adoptions: l'adoption simple et l'adoption «légitimante», cette dernière n'étant ouverte qu'aux couples mariés depuis plus de cinq ans, a indiqué la délégation.
Il n'y a pas d'enfants à Monaco qui seraient susceptibles de faire l'objet d'une adoption internationale, ce qu'explique notamment le fait, déjà mentionné, que seuls deux accouchement sous X ont été enregistrés dans la Principauté ces vingt dernières années, a souligné la délégation.
Observations préliminaires
M. CARDONA LLORENS a remercié la délégation pour la sincérité avec laquelle elle a exposé la situation dans la Principauté. La situation du pays présente certaines difficultés, notamment du fait de sa petite taille, a souligné le pour l'examen du rapport du Monaco. Il peut certes paraître exagéré de présenter une recommandation pour un seul enfant qui travaille, par exemple, a-t-il admis, mais c'est aussi ainsi qu'une série de petits problèmes s'additionnent. Le rapporteur a exprimé l'espoir que Monaco témoignerait de sa volonté de donner suite aux recommandations que le Comité présentera à l'issue de l'examen de ce rapport.
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