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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE SA COMMISSION D'ENQUÊTE SUR LA SYRIE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, à la mi-journée, un débat interactif avec la commission internationale indépendante d'enquête sur la République arabe syrienne, dont le Président, M. Paulo Sérgio Pinheiro, a présenté le rapport le plus récent.

Créée par le Conseil des droits de l'homme à sa dix-septième session extraordinaire, la commission a pour mandat d'enquêter sur toutes les violations alléguées du droit international des droits de l'homme commises en République arabe syrienne depuis mars 2011.

M. Pinheiro a indiqué que les parties au conflit en Syrie mènent des hostilités au mépris total du droit international humanitaire. Les forces gouvernementales tuent, torturent et intimident tous ceux qui hébergent des membres de l'opposition. Elles assiègent les zones tenues par l'opposition, prenant au piège les civils. Les centres médicaux sont la cible de tirs qui ne font pas la distinction entre civils et belligérants; des munitions à fragmentation sont utilisées. Les groupes armés utilisent les civils comme des boucliers humains, les prenant parfois en otage. La Syrie compte aujourd'hui 4 millions de personnes déplacées. Alors que la bataille de Qousseir bat son plein, les civils devraient bénéficier d'un couloir humanitaire pour fuir les combats. «Plus il y aura d'armes, plus il y aura de blessés», a souligné M. Pinheiro. Il existe, de plus, un risque important que les armes livrées aux deux parties servent à commettre des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des violations graves des droits de l'homme.

La Syrie, s'exprimant à titre de pays concerné, a rejeté les conclusions excessives du rapport et a regretté que la commission ferme les yeux sur les exactions commises par les takfirs. La Syrie n'aura aucune confiance dans la commission tant que celle-ci ne rapportera tous les faits. Par ailleurs, l'implication de certains va à l'encontre du droit international et de la souveraineté des peuples et entrave les efforts pour une solution pacifique.

Les délégations qui ont pris la parole ont déploré la détérioration de la situation et la poursuite des hostilités en Syrie. Plusieurs délégations ont souligné que le conflit n'aura pas de solution militaire et que des négociations politiques doivent être entamées au plus vite afin de mettre un terme à ce conflit dramatique. De nombreux États ont appelé les parties au conflit à garantir un accès libre et sans entrave à l'aide humanitaire, pour soulager les souffrances des millions de personnes réfugiées et déplacées dans le pays. D'autres délégations ont appelé le Conseil de sécurité à saisir la Cour pénale internationale, compte tenu de la gravité des atrocités commises. Il ne faut pas que les responsables de ces atrocités restent impunis, a-t-il été relevé à plusieurs reprises. Selon certaines délégations, l'implication de groupes armés non étatiques est un facteur de déstabilisation de la région. Pour d'autres, il faut cesser de fournir aux belligérants des armes qui participent à la dégradation de la situation.

Les délégations suivantes sont intervenues au cours du débat interactif: Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Botswana, Brésil, Canada, Chili, Chine, Costa Rica, Cuba, Danemark (au nom des pays nordiques), Égypte, Émirats arabes unis, Équateur, Espagne, Estonie, États-Unis, Fédération de Russie, France, Indonésie, Iran, Italie, Japon, Jordanie, Koweït, Libye, Malaisie, Maldives, Maroc, Mexique, Monténégro, Nigéria, Pays-Bas, Pérou, Pologne, Portugal, Qatar, République de Corée, République populaire démocratique de Corée, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie, Suisse, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Union européenne, Uruguay et Venezuela. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a également pris part au débat.

Les organisations non gouvernementales suivantes ont également fait des déclarations: Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, Presse Emblème Campagne, Défense des enfants – international, Mouvement international de la réconciliation, L'Institut du Caire pour les études sur les droits de l’homme, United Nations Watch, Union des juristes arabes, Human Rights Watch et Worldwide Organization for Women.


Le Conseil se penchera, cet après-midi à 15 heures, sur les rapports des Rapporteurs spéciaux chargés, respectivement, de la situation des droits de l'homme au Bélarus et en Érythrée.


Situation des droits de l'homme en République arabe syrienne

Présentation du rapport

M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, Président de la commission internationale indépendante d'enquête sur la Syrie, a présenté le rapport le plus récent de la commission d'enquête (A/HRC/23/58, à paraître), en soulignant que la crise syrienne met à l'épreuve la volonté de la communauté internationale de protéger les civils et d'empêcher l'effondrement d'un pays. Les parties au conflit mènent des hostilités sans aucun respect pour le droit international humanitaire.

Les forces gouvernementales tuent, torturent et intimident tous ceux qui hébergent des membres de l'opposition. Elles assiègent les zones tenues par l'opposition, prenant au piège les civils. Les centres médicaux sont la cible de tirs, qui ne font pas la distinction entre civils et ceux qui participent aux hostilités; des munitions à fragmentation sont utilisées. La Syrie compte aujourd'hui quatre millions de personnes déplacées. Les groupes armés utilisent les civils comme des boucliers humains, les prenant parfois en otage. Certains groupes armés mènent en outre des procès et des exécutions publiques pour affermir leur autorité, a dénoncé M. Pinheiro, qui a rappelé que toute personne a le droit à un procès équitable selon des règles établies. En outre, aucune partie ne respecte la protection des biens culturels, ciblant volontairement des monuments historiques et religieux.

Le Président de la commission d'enquête a souligné que la Syrie était dans une situation explosive, car les deux parties au conflit s'enracinent dans certaines communautés. Il faut agir face à cette situation catastrophique, a estimé M. Pinheiro, appelant les États à influencer les parties pour qu'elles distinguent les civils des belligérants. Alors que la bataille de Qousseir bat son plein, tous les civils doivent bénéficier d'un couloir humanitaire pour fuir les combats. L'escalade militaire fait payer un lourd tribut à la population civile. Il est illusoire de penser qu'augmenter l'armement des parties qui s'affrontent modifiera la stagnation du conflit. Au contraire, plus il y aura d'armes, plus il y aura de blessés, a souligné M. Pinheiro. Il existe en outre un risque grave que les armes livrées aux deux parties servent à commettre des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des graves violations des droits de l'homme. Compte tenu des atrocités commises, les parties ont l'obligation de négocier constructivement en vue d'atteindre une paix durable qui respecte la mosaïque culturelle syrienne. Les États membres ont le devoir de mettre un terme à cette guerre, a conclu M. Pinheiro.

Une version préliminaire du rapport de la commission internationale indépendante d’enquête sur la République arabe syrienne (A/HRC/23/58) est disponible en anglais et en arabe.

Pays concerné

La République arabe syrienne a rejeté les conclusions excessives du rapport, regrettant par ailleurs sa publication tardive. Il a en outre dénoncé l'hypocrisie de pays se disant amis du peuple syrien. La commission d'enquête ferme les yeux sur les exactions épouvantables commises par les takfirs, qui vont jusqu'au cannibalisme. Elle passe sous silence le fait que des casques bleus ont été pris pour cible ou que l'on tente d'entraîner le Liban dans le conflit. Comment le monde peut-il faire confiance à la commission, ne pas s'interroger sur son professionnalisme et le sérieux de ses travaux, s'interroge la Syrie? La Syrie n'aura aucune confiance dans la commission tant que celle-ci ne rapportera tous les faits. Elle estime par ailleurs que la Turquie et le Qatar devraient être inscrits sur la liste des pays soutenant le terrorisme. Leur implication va à l'encontre du droit international et de la souveraineté des peuples, une implication qui entrave les efforts pour une solution pacifique. La question est en fait de savoir s'ils souhaitent réellement l'émergence d'une telle solution, a conclu la délégation syrienne.

Débat interactif

L'Argentine s'est dite préoccupée par la militarisation croissante du conflit, déplorant la gravité des violations des droits de l'homme qui sont commises. Toutes les parties doivent respecter le droit international humanitaire et les droits de l'homme, a-t-elle souligné. Ce conflit n'aura pas de solution militaire, il faut donc mettre un terme aux hostilités et entamer des pourparlers de paix. Il faut également cesser le financement des belligérants par des acteurs externes. Le Chili a déclaré qu'il est urgent de créer les conditions propices à la paix, insistant sur l'importance d'un embargo total sur la fourniture d'armes aux parties. Le Conseil doit mobiliser la communauté internationale pour créer les conditions d'une transition politique dans le respect des droits de l'homme.

La Suisse a appelé tous les acteurs du conflit syrien à respecter leurs obligations internationales, appelant les autorités syriennes à autoriser la venue de la mission d'établissement des faits du Secrétaire général sur les allégations d'utilisation d'armes chimiques. La lutte contre l'impunité est une condition essentielle pour l'établissement d'une paix durable, estimé en outre la Suisse.

La Suisse, l'Italie, la Turquie et les Maldives ont appelé les belligérants à garantir un accès libre et sans entrave à l'aide humanitaire, ainsi qu'à organiser des couloirs humanitaires permettant aux civils de fuir les combats. Il faut soulager les souffrances des 4,2 millions de déplacés dans le pays et des 1,2 millions de réfugiés, ont souligné ces délégations. Pour leur part, l'Union européenne, le Danemark, l'Argentine et les Maldives se sont dits en faveur d'une saisine de la Cour pénale internationale au vu de la gravité des crimes commis.

Le Danemark, au nom des pays nordiques, a déploré que le Gouvernement syrien et l'opposition se rendent coupables de graves violations du droit international humanitaire et des droits de l'homme. L'Italie a également condamné la violence commise contre les civils, soulignant que tous les auteurs d'atrocités devront rendre des comptes. Le conflit prend une nature sectaire qui menace le tissu social de la Syrie et la cohabitation des communautés qui composent le pays. Il faut instaurer une autorité politique transitoire, a-t-elle estimé.

L'Union européenne s'est dite préoccupée par la violence croissante et la participation de groupes armés non étatiques. Elle a déploré les violations graves perpétrées par les groupes armés antigouvernementaux, même si elles n'ont pas atteint l'intensité des violations commises par les forces gouvernementales. Par ailleurs, le recours à des armes chimiques constituerait une violation grave du droit international. Comment le Conseil pourrait-il soutenir le mandat de la commission d'enquête, s'est-elle interrogée. Pour le Qatar, les autorités syriennes sont les principales responsables des violences commises en Syrie. Les crimes de guerre et contre l'humanité perpétrés par les milices progouvernementales ne font que s'exacerber. Les autorités syriennes semblent persister à refuser l'accès des membres de la commission d'enquête, en dépit des demandes répétées, a déploré le Qatar. Il faut distinguer les crimes commis à titre individuel et ceux commis de manière systématique et flagrante, a estimé la délégation. On ne saurait en effet rester silencieux face à toutes les violations des droits de l'homme a estimé l'Égypte, soulignant que le processus politique doit permettre une transition en réponse aux aspirations du peuple syrien.

Pour leur part, les États-Unis ont rappelé que le conflit a commencé il y a plus de 800 jours, lorsque les autorités syriennes ont décidé d'avoir recours à la force contre les manifestants pacifiques. Ils ont condamné les violations des droits de l'homme de la population syrienne. Il faut mettre un terme à la violence et aux violations du droit international humanitaire commises par le Gouvernement syrien. Alors que les efforts se concentrent sur une solution politique, il faut que les auteurs d'atrocités soient tenus responsables de leurs actes. Ils ont condamné l'implication du Hezbollah dans le conflit, qui engendre des tensions dans toute la région. Les Maldives se sont également dites préoccupées par la dimension régionale que prend le conflit depuis quelques mois. Les acteurs non étatiques régionaux sapent les efforts de la communauté internationale pour mettre un terme au conflit, qui n'aura pas de solution militaire. Le Botswana a souligné qu'il apparaît clairement que le conflit syrien peut déborder sur l'ensemble de la région désormais. En outre, l'implication d'extrémistes dans le conflit soulève de graves préoccupations sur l'éventualité que la Syrie ne soit entraînée dans la cause djihadiste mondiale. Il est clair enfin qu'une solution militaire sera très difficile à atteindre et qu'elle se ferait à un prix très élevé. Le Botswana appelle la Syrie à permettre l'accès à son territoire des membres de la commission d'enquête.

Pour la France, les risques de contamination du conflit dans toute la sous-région sont importants, notamment en raison de la radicalisation des parties. La situation actuelle pourrait fouler au pied la stabilité dans toute la région ont ajouté les Pays-Bas. La République tchèque s'est quant à elle alarmée du caractère de plus en plus sectaire que revêt le conflit. Bien qu'il y ait des différences entre les parties, les responsables des crimes de guerre doivent être traduits devant la Cour pénale internationale. L'Espagne a observé que le risque d'une guerre à grande échelle augmente tous les jours du fait de la crise en Syrie. La recherche d'une solution négociée est donc tout à fait urgente. L'Espagne observe que la possibilité existe de trouver une manière négociée de mettre un terme au bain de sang.

La Turquie s'est pour sa part dite effrayée par l'incapacité de la communauté internationale à mettre un terme aux massacres. Le terrorisme international est une menace pour le pays, a-t-elle estimé, avant d'appeler la communauté internationale à prendre ses responsabilités et à mettre un terme aux souffrances inutiles du peuple syrien. L'Arabie saoudite a pour sa part relevé qu'il est fait état de crimes contre l'humanité en Syrie, ainsi que d'actes inhumains. Or, la communauté internationale n'est toujours pas mesure d'adopter une position unifiée, ce qui est indispensable, en particulier pour que la commission d'enquête puisse se rendre sur place. Par ailleurs, l'assistance humanitaire doit pouvoir accéder au territoire syrien. Pour leur part, les Émirats arabes unis relèvent que plus de quatre millions de personnes sont des déplacés dans leur propre pays tandis qu'un million de Syriens ont fui le pays. Le pays appelle la Syrie à permettre sans délai l'accès de l'aide humanitaire. La communauté internationale doit redoubler d'efforts pour parvenir à une solution diplomatique. Pour sa part et en tant que pays fournisseur d'aide humanitaire, le Canada a demandé à ce qu'un accès humanitaire soit accordé aux travailleurs humanitaires. Le Monténégro, le Maroc et l'Australie ont demandé au Gouvernement syrien de lever tous les obstacles administratifs à l'action des agences humanitaires en Syrie. Le Mexique a aussi rappelé que tous les acteurs du conflit, y compris les éléments étrangers impliqués, ont pour obligation de faciliter l'aide aux populations civiles. La Slovaquie a déploré les attaques contre les écoles et les hôpitaux, observant que le flux d'armes ne fait qu'alimenter la crise et retarde une issue pacifique à la crise. Pour le Nigéria, la situation humanitaire exige un accès sans limite aux travailleurs humanitaires. Le peuple syrien n'a que trop souffert et il est temps de mettre fin à cette crise. La communauté internationale doit parler d'une seule voix pour résoudre ce conflit, tout en accordant la priorité à l'ouverture d'un couloir humanitaire, a dit la Libye.

Le Koweït a condamné les violations systématiques des droits de l'homme du peuple de la Syrie par les autorités de ce pays, et recensées par le rapport de la commission d'enquête. Les responsables de l'escalade grave des opérations militaires, notamment le recours à des armes lourdes contre les populations civiles, devront être traduits en justice. Le Maroc a déclaré que la recrudescence des violences en Syrie, source de tueries barbares, donne lieu à des violations très graves des droits de l'homme. La politique consistant à affamer les populations et à les priver des services de base doit inciter la communauté internationale à prendre des mesures urgentes pour trouver une solution à la crise, a dit le Maroc.

La Fédération de Russie a rappelé qu'elle n'avait pas soutenu la résolution créant la commission d'enquête, tout en relevant qu'elle se conforme aux décisions du Conseil et reste attentive aux recommandations de la commission. Un règlement politique de la crise syrienne est nécessaire. La délégation russe a déploré les prises d'otages et les exécutions extrajudiciaires commises par les groupes armés antigouvernementaux. Outre les constatations objectives du rapport, celui-ci contient des prises de position politiques, a-t-elle regretté. L'Iran a dit partager certaines des recommandations de la commission d'enquête. En particulier, l'Iran estime que la solution au conflit ne sera pas de nature militaire mais politique. L'Iran vient justement d'organiser une conférence régionale pour la recherche d'une solution politique à la crise en Syrie. L'Iran contribue à l'amélioration des conditions de vie des Syriens par la fourniture de médicaments, notamment.

Le Royaume-Uni a constaté que le conflit atteignait des proportions catastrophiques. Si des abus sont commis de part et d'autre, ceux-ci apparaissent beaucoup plus graves du côté des forces gouvernementales. Le Royaume-Uni reste attaché à une solution négociée. Il appuie le travail de la commission d'enquête qui a démontré son impartialité. La seule façon de lui permettre de travailler de façon totalement satisfaisante est de lui permettre d'accéder au territoire syrien. L'Australie a condamné les violations des droits de l'homme commises par toutes les parties, observant cependant que les crimes commis par les forces d'opposition n'ont ni l'ampleur ni l'intensité des violations des droits de l'homme des forces du gouvernement.

Le Pérou, a pour sa part estimé que les crimes commis par l'opposition ne méritent pas une condamnation moindre de la part de la communauté internationale. En effet, quel que soit l'ampleur de la responsabilité tous les acteurs doivent être traduits devant la Cour pénale internationale, a ajouté le Portugal. Dans ce contexte, il est important de faire un relevé de preuves pour examiner la responsabilité des deux parties de manière proportionnée, a prôné l'Estonie.

L'Indonésie a souligné que le désespoir des parties a entraîné de nouveaux excès, ce qui est facilité par disponibilité des armes. Le défi croissant en Syrie contraint à donner plus de chances à la solution diplomatique. Toute condition préalable au dialogue ne revient qu'à fermer la porte à une issue négociée. Genève doit prouver une fois encore qu'elle est la ville de la paix, l'Indonésie étant disposée à faire sa part pour la réunion d'une conférence de paix au plus tôt. La Slovaquie a déploré les attaques contre les écoles et les hôpitaux. Le flux d'armes ne fait qu'alimenter la crise et repousse une issue pacifique à la crise, a-t-elle estimé. Les crimes de guerre et contre l'humanité ne doivent pas rester impunis et le Conseil de sécurité devrait saisir la Cour pénale internationale, estime la Slovaquie avec de nombreuses autres délégations. La Belgique a aussi déclaré que les crimes de guerre et crimes contre l'humanité sont le pain quotidien des Syriens. Les hôpitaux ne sauraient être pris pour cibles ou servir de base pour les forces gouvernementales. Ceux qui sont chargés d'assurer la paix et la sécurité doivent oublier leurs intérêts propres et agir en toute responsabilité, a déclaré le Costa Rica, ajoutant que ceux qui transfèrent des armes dans la région sont des complices et devraient rendre des comptes à la communauté internationale.

L'Allemagne a souligné que si le Gouvernement est sincère dans ses affirmations, il devrait lever toute restriction à la venue sur place de la commission d'enquête. L'Allemagne est consternée par les dernières tueries commises par des groupes affiliés au Gouvernement. Elle est choquée par les informations faisant état de maltraitance d'enfants et des violences sexuelles semble-t-il commises par toutes les parties. Il faut en outre pouvoir établir la véracité des allégations sur l'utilisation d'armes chimiques. Le Brésil estime que le Conseil ne peut demeurer silencieux face à la dégradation de la situation. Il réitère sa condamnation de tous les actes de violence, appelant en particulier le Gouvernement à tout faire pour résoudre la crise. Les informations faisant état de l'usage d'armes chimiques sont particulièrement troublantes, ainsi que le ciblage systématique du personnel médical. Les livraisons d'armes repoussent toute perspective d'issue au conflit et le Brésil appelle au respect d'un embargo. Une solution politique est la seule façon de sortir de cette tragédie et la diplomatie doit mettre un terme à l'effusion de sang. L'initiative des États-Unis et de la Russie en faveur de la convocation d'une conférence de paix doit recevoir tout l'appui qu'elle mérite.

De très nombreuses délégations ont observé que l'utilisation d'armes chimiques est particulièrement préoccupante et que les responsables devront en être identifiés et sanctionnés par la justice. La République de Corée a déclaré qu'alors que tout porte à croire que des armes chimiques ont été utilisées, rien ne permet de justifier leur utilisation. Pour la Thaïlande si utilisation d'armes chimiques il y a eu, ceux qui s'en s'ont servi doivent rendre des comptes.

L'Autriche a demandé à M. Pinheiro de donner des précisions sur les conditions du recours à ces armes par les deux parties en conflit. Les informations du rapport sur l'utilisation d'armes chimiques par les deux belligérants sont très préoccupantes, dit le Monténégro, préconisant lui aussi la recherche d'une solution politique à la crise.

La Chine a aussi souligné qu'une solution militaire ne saurait qu'exacerber les tensions et empirer la situation. Dans ce contexte, elle a salué l'initiative prise par les États-Unis et la Fédération de Russie pour organiser une conférence de paix à Genève. Cette Conférence doit aboutir à une Syrie où toutes les parties auront un rôle à jouer ont encore complété les Pays-Bas. Pour que qu'une telle initiative réussisse, le Japon a appelé toutes les parties prenantes à pleinement jouer leur rôle. La Roumanie a aussi exhorté toutes les parties à faire preuve de sagesse et à participer à la Conférence de Genève. La Jordanie a déclaré que la solution à trouver, même temporaire, devra respecter les principes de souveraineté et d'intégrité territoriale.

L'Équateur s'est dit particulièrement préoccupé par le caractère sectaire que prend le conflit en Syrie. Il a dénoncé les actes de barbarie commis dans ce contexte, surtout ceux commis par des membres de l'opposition armée. Cuba a jugé particulièrement alarmants les appels à un changement de régime, à l'usage de la force et de la violence au lieu de contribuer au dialogue et à la négociation entre les parties. Il rejette la tendance à faire la sourde oreille aux propositions et mesures prises par le Gouvernement syrien, ainsi qu'aux efforts légitimes de certains pays pour éviter que la violence ne perdure. Cuba rejette toute tentative de porter atteinte à l'indépendance, à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la Syrie. Le Venezuela a souligné que ce rapport de plus manquait une fois encore de tout équilibre dans son constat. Épris de paix, le Venezuela déplore les pertes de vies humaines, dont les principaux responsables sont les États occidentaux qui alimentent en armes la rébellion tout en faisant la sourde oreille à toutes les initiatives des autorités légitimes. Tout processus politique doit être inclusif et rejeter tout type d'ingérence militaire étrangère. Toute solution doit avoir pour objectif le bien-être du pays et sa souveraineté. Le Venezuela n'appuiera aucune mesure unilatérale. Pour la République populaire démocratique de Corée, les droits de l'homme ne sauraient être un prétexte pour accuser le Gouvernement syrien. Le recours à deux poids deux mesures ne fait qu'exacerber les tensions.

Les autorités doivent en outre laisser la commission d'enquête faire librement son travail en lui permettant l'accès à son territoire, a renchérit la délégation de la Tunisie. Comme la Malaisie et nombre d'autres délégations, la Pologne a déploré le fait que les autorités de la Syrie ne coopèrent pas avec la commission d'enquête. La situation déjà difficile devient tragique du fait que les organisations humanitaires n'ont pas accès aux populations civiles dans le besoin. Les autorités syriennes ne se montrent pas à la hauteur de leurs obligations de protection, ce qui justifie la saisine de la Cour pénale internationale. La Malaisie a regretté qu'en dépit des demandes répétées de la commission, les autorités syriennes n'aient pas coopéré avec elle. Elle a déploré les attaques contre les centres médicaux, appelant les parties au conflit à garantir l'accès de l'aide humanitaire. Seules des négociations permettront de trouver une issue au conflit, a-t-elle conclu.

Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance a pour sa part souligné que les enfants sont les plus touchés par ce conflit. Ils constitueraient la moitié des réfugiés éparpillés dans la région. La crise a également eu un effet sur l'éducation.

Organisations non gouvernementales

La Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté a noté que les Syriennes étaient depuis longtemps à l'avant-garde des revendications en faveur de l'égalité, de la liberté et de la justice sociale et a demandé que les femmes de Syrie puissent participer aux initiatives concernant leur pays en raison du rôle qu'elle sont à même de jouer en faveur de la paix et de la réconciliation, dans l'esprit de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. L'instauration d'un cessez-le-feu est indispensable sans délai pour trouver une fin à ce conflit, a-t-elle conclu appelant les parties à cesser d'armer les belligérants. La Défense des enfants - international, qui a alerté sur les risques d'enrôlement de mineurs dans le conflit, a averti sur les risques pour les enfants non accompagnés, notamment ceux se trouvant dans des camps de réfugiés. Elle a appelé à la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Presse Emblème Campagne a appelé à la libération des journalistes emprisonnés, soulignant que l'arrestation de travailleurs des médias faisait partie des moyens de répression courant utilisés par la police syrienne. Le représentant, qui a cité plusieurs noms de journalistes disparus, a appelé la commission à consacrer un chapitre à ce sujet dans son prochain rapport. L'Institut du Caire pour les études sur les droits de l’homme a constaté que depuis deux ans, les autorités syriennes avaient eu recours à une coercition aveugle et excessive contre leur population. L'usage systématique de la violence par les forces gouvernementales a favorisé un contexte favorisant aussi le viol des femmes, ces exactions étant utilisées comme moyen de punition collective.

L'Union des juristes arabes a souligné que le rapport de la commission montrait l'impossibilité d'une solution militaire. Elle a toutefois déploré que le document ne tienne pas compte de la réalité et de la diversité syrienne, ignorant les exactions des groupes armés illégaux, le slogan de la chute du régime syrien étant imposé aux musulmans du monde entier par des fatwas édictés par des cheikhs du Golfe. L'ONG a appelé la commission à se pencher sur les violations graves perpétrées avec l'appui d'États de la région. Le Mouvement international de la réconciliation a souligné qu'il ne saurait y avoir de solution militaire au conflit. L'organisation publie demain un rapport sur la situation, qui confirme les affirmations de la commission d'enquête. Human Rights Watch a pour sa part indiqué disposer de preuves de la pratique généralisée de la torture, et que ces faits sont assimilables à des crimes contre l'humanité. L'organisation a appelé le Conseil à agir pour que soient traduits en justice tous les auteurs de crimes. HRW estime que la question de la situation en Syrie doit être renvoyée devant la Cour pénale internationale.

Conclusion

M. PINHEIRO, Président de la commission, a déclaré qu'il est difficile d'enquêter en Syrie faute d'accès au terrain, étant donné les refus du pays concerné. La commission continuera cependant de faire des demandes d'accès en Syrie, avec le soutien du Conseil. M. Pinheiro a indiqué que son rapport relève des atrocités telles qu'enlèvements et mutilations commises par toutes les parties. Pour aider la commission dans l'exercice de son mandat, les États peuvent exercer des pressions sur les belligérants et lui communiquer des informations. Les conclusions de la commission sont basées sur des informations confirmées et recoupées, a précisé le Président. Elle est prête à remettre ses fonctions à toute autorité judiciaire prête à agir sur la base des éléments disponibles. Les belligérants devraient faire des déclarations publiques selon lesquelles les jeunes gens et les jeunes filles ne sont pas les bienvenus dans leurs forces armées. La commission note qu'il est difficile d'identifier précisément la nature des agents chimiques éventuellement utilisés en Syrie. La commission continuera d'enquêter sur les allégations à ce sujet. Elle restera en contact avec l'expert sur cette question désigné par l'Assemblée générale.


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HRC13/070F