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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES RAPPORTS SUR L'INDÉPENDANCE DES JUGES ET DES AVOCATS ET SUR LES EFFETS DE LA DETTE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu cet après-midi un débat interactif avec la Rapporteuse spéciale sur l'indépendance des juges et des avocats, Mme Gabriela Knaul, et l'Expert indépendant sur les effets de la dette extérieure, M. Cephas Lumina, qui avaient présenté leurs rapports annuels en fin de journée hier.

La plupart des délégations qui se sont exprimées sur le rapport de Mme Knaul ont souligné que l'assistance judiciaire garantit l'exercice effectif de plusieurs droits de l'homme. Certains pays ont mis en avant les services d'aide judiciaire offerts par leurs institutions aux catégories de la population contraintes d'y faire appel. Plusieurs ont expliqué qu'ils avaient étendu progressivement les possibilités de recourir à l'aide judiciaire, prioritairement dans certains cas aux litiges familiaux ou au droit du travail. Plusieurs délégations ont souligné l'obstacle majeur constitué par des ressources budgétaires limitées pour fournir un service d'aide judiciaire à tout citoyen qui en aurait besoin.

Les délégations qui se sont exprimées au sujet les effets de la dette extérieure sur la pleine jouissance des droits de l'homme ont souligné l'extrême difficulté à mettre en place un système de désendettement gérable pour les pays qui ne sont pas en mesure d'en supporter le fardeau. Pour plusieurs États, une restructuration du système financier mondial est indispensable pour le rendre plus équitable et ainsi lutter contre les effets négatifs de la dette extérieure.

Les pays suivants ont participé aux débats de cet après-midi: Cuba, Union européenne, Gabon (au nom du Groupe africain), Argentina, Pakistan (au nom de l'OIC), Algérie (au nom du Groupe arabe), Maroc, Équateur (au nom du GRULAC), Belarus, Brésil, Fédération de Russie, Thaïlande, Australie, Nicaragua, États Unis, Égypte, Sri Lanka, Costa Rica, Estonie, Botswana, Arabie saoudite, China, Afrique du Sud, Burkina Faso, Indonésie, Lebanon, Algérie, Venezuela, Bulgarie et Libye.

El Salvador, le Pakistan et les Maldives sont intervenus concernant les missions effectuées par la Rapporteuse spéciale sur l'indépendance des juges et des avocats dans ces pays. La
Lettonie a pour sa part commenté la visite qu'y a effectuée l'expert indépendant sur la dette.

L'Iraq et Cuba ont exercé le droit de réponse en fin de séance s'agissant de déclarations faites lors des débats d'hier.


Le Conseil doit conclure, à partir de 9 heures, le débat interactif avec les titulaires des mandats sur l'indépendance de la justice et la dette, avant de se saisir de rapports sur les droits de l'homme des personnes déplacées dans leur propre pays et sur la question des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires.


Effets de la dette sur les droits de l'homme

L'Expert indépendant sur les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l'homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, a présenté hier après-midi son rapport annuel (A/HRC/23/37, à paraître en français) ainsi que son rapport sur la mission qu'il a effectuée en Lettonie du 14 au 18 mai 2012 (A/HRC/23/37/Add.1 à paraître en français).

Pays concerné

La Lettonie a déclaré que, même si elle n'est pas d'accord avec certaines conclusions du Rapporteur spécial, elle entend coopérer avec lui. La délégation a regretté qu'un certain nombre d'observations des autorités lettonnes n'aient pas été prises en compte par le Rapporteur spécial. La crise économique a contraint l'État letton à faire des coupes structurelles dans le budget national. À la différence de ce qui est dit dans le rapport, les amendements à la loi n'ont pas toujours été liés aux mesures d'austérité. Les lois lettonnes ne renvoient pas nécessairement aux lois soviétiques car la Lettonie n'est pas un État successeur de l'URSS: le rapport devrait en faire état. La Lettonie ne partage pas non plus la conclusion selon laquelle les personnes issues de minorités sont plus susceptibles que les autres de se retrouver au chômage. Elle ajoute que les mesures prises pour optimiser le budget national ont touché toute la population, sans distinction. La délégation a précisé que, depuis 2011, le redressement économique a permis une amélioration de la situation sociale.

Débat interactif

L'Équateur, au nom du Groupe des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a déclaré qu'il est nécessaire de restructurer le système financier mondial pour le rendre plus équitable et ainsi lutter contre les effets négatifs de la dette extérieure. De même, Cuba a estimé que les mécanismes actuels de réduction de la dette ne sont pas à même d'atteindre leurs objectifs. L'établissement d'un ordre démocratique et équitable est nécessaire pour lutter efficacement contre les effets de la dette. L'Égypte, qui estime nécessaire de créer un système plus équitable et plus inclusif, s'est interrogée sur les moyens à mettre en œuvre pour parvenir à une gestion soutenable de la dette.

Pour l'Algérie, au nom du Groupe arabe, les initiatives visant à réduire la dette doivent soutenir les processus de développement dans les pays endettés. Le Groupe arabe souligne que l'existence de ces dettes exorbitantes continue de saper la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels et d'atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Le Maroc a évoqué la problématique du surendettement, soulignant qu'il faut repenser le mode de fonctionnement des institutions de Bretton Woods pour les adapter au monde du XXIe siècle. Le Gabon, au nom du Groupe africain, a demandé une réaction appropriée de la communauté internationale pour rapatrier les fonds illicites vers leurs pays d'origine, afin de permettre aux pays pauvres de jouir de leur droit au développement. Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, a noté que des termes de l'échange non-équitables, l'octroi de prêts irresponsables et les carences dans les mécanismes d'allégement de la dette empêchent de lutter efficacement contre les effets de la dette extérieure.

L'Arabie saoudite a noté que les initiatives de réduction de la pauvreté exigeaient des efforts concertés sur le plan international. Or, les conditions extrêmement strictes mises par les créanciers et l'impossibilité de faire face aux échéances dans le contexte actuel pour les pays endettés constituent un obstacle majeur. La Chine a souligné qu'il fallait une mobilisation de la communauté internationale face à la croissance constante de la dette, dont le fardeau devient excessif. La Chine fait sa part en réduisant la dette de pays débiteurs en difficulté.

Le Liban a dénoncé les conditionnalités de prêt qui parfois portent atteinte à la souveraineté des États. Dans ce contexte, la délégation a dit partager les recommandations de Mme Knaul, tout en se demandant si la volonté politique suffit à elle seule pour les mettre en œuvre. Comment en effet trouver un équilibre entre prêteur et emprunteur s'est aussi interrogée la délégation de l'Indonésie. Compte tenu des effets de la dette sur les pays en développement, l'Afrique du Sud soutient une réforme fondamentale des institutions financières internationales, à savoir la Banque mondiale et le Fonds monétaire international.

Le Venezuela a souligné que les dettes insoutenables mettent en danger la viabilité même des États, mettant ainsi en évidence la nécessité de mécanismes transparents et prévisibles. Il faut établir un équilibre axé sur la responsabilité partagée et le respect de la souveraineté, a plaidé l'Algérie.

Indépendance des juges et des avocats

L'Experte indépendante sur l'indépendance des juges et avocats a présenté hier son rapport annuel (A/HRC/23/43) ainsi que les rapport sur ses missions au Pakistan (A/HRC/23/43/Add.2) , en El Salvador (A/HRC/23/43/Add.1, à paraître en français) et aux Maldives (A/HRC/23/43/Add.3, à paraître en français). Mme Knaul présente en outre le résultat de consultations à Panama (A/HRC/23/43/Add.4, en espagnol).

Pays concernés

El Salvador a relevé que la garantie des droits fondamentaux constituait un impératif éthique indiscutable, qui doit être respecté à tout moment dans un État démocratique. À cet égard, l'État salvadorien lutte constamment contre l'impunité et pour garantir les droits de l'homme. La promotion et la protection des droits de l'homme passent notamment par l'autonomie et l'indépendance du pouvoir judiciaire. L'administration de la justice est efficace et saine en El Salvador, dans le cadre d'un État de droit démocratique, a assuré la délégation. Elle a fait observer que les rapports ne doivent pas être présentés aux médias avant leur présentation officielle.

Le Pakistan a déclaré que le Gouvernement et le peuple du Pakistan ont fait beaucoup d'efforts en faveur de l'indépendance des juges. Ainsi un certain nombre de réformes a été introduit, dont une promotion des juges par le mérite. La représentante a indiqué que la loi islamique fait partie du corpus juridique du Pakistan, garantie par la Constitution. Il n'y a pas de concurrence entre les lois au Pakistan, d'autant que les lois islamiques sont interprétées par le Parlement. Des procédures de sauvegarde sont en outre en place pour éviter tout abus.

Les Maldives ont admis des problèmes d'efficacité et de manque de ressources dans leur système judiciaire. Les réformes engagées vont prendre du temps, a ajouté la délégation, qui attend une assistance technique du Rapporteur spécial et du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Cependant, le travail avec les différents partenaires ne doit pas saper les juridictions nationales, estiment les Maldives.

Débat interactif

Les délégations ont généralement souligné, à l'instar de l'Union européenne et du Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, que l'indépendance des juges est un pilier fondamental d'un État de droit et est garante des droits de l'homme. L'assistance judiciaire garantit l'exercice effectif d'un certain nombre de droits de l'homme. Il faut combattre les menaces et les attaques contre les représentants du pouvoir judiciaire, qui sapent l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Plusieurs délégations, dont l'Équateur, au nom du Groupe des États d'Amérique latine et des Caraïbes, ont observé que l'accès à l'assistance judiciaire doit être garantie, en particulier pour les groupes vulnérables. Le Maroc a souligné qu'il appartient à chaque État de définir des mécanismes d'accès à l'assistance judiciaire. La Thaïlande a relevé que les individus devraient avoir accès à l'assistance judiciaire avant et pendant les procédures judiciaires. En Thaïlande, les défenseurs et les plaignants ont droit à l'assistance d'un avocat d'office. Les États portent la responsabilité première de développer et mettre en œuvre un système d'assistance juridique. Les États-Unis conviennent que le déni de l'accès à la justice constitue une atteinte aux droits de l'homme, d'où l'importance d'offrir une aide judiciaire aux secteurs de la population qui en ont besoin. Tous les Américains qui ne peuvent se payer les services d'un avocat peuvent solliciter une telle aide. La délégation a souhaité par ailleurs que la rapporteuse spéciale s'intéresse au cas des Cubains qui souhaitent bénéficier d'une aide judiciaire. Pour le Burkina Faso, c'est le manque de ressources qui limite l'accès des plus pauvres à la justice. En tant que droit pour tous, ce droit doit être garanti par les États.

Le Brésil a indiqué que le Bureau du défenseur public a la responsabilité d'aider les justiciables dans les procédures judiciaires. Le défi principal est l'universalisation des services. Le Brésil prend l'engagement d'assurer un accès à la justice adéquat pour tous les citoyens, a ajouté la délégation. Pour sa part, l'Australie a indiqué qu'elle s'était engagée en faveur d'une aide juridique pour ceux qui n'ont pas les moyens de payer un conseil. L'aide judiciaire, sur les questions non pénales telles que le droit de la famille par exemple, pour des affaires personnes surtout, est privilégiée. Le système australien d'aide judiciaire incorpore nombre des recommandations qui sont faites par la Rapporteuse spéciale

La Fédération de Russie a estimé que les conclusions de la Rapporteuse spéciale contribueront à réformer le pouvoir judiciaire, conformément aux obligations internationales de la Russie. Le Bélarus a attiré l'attention du Conseil sur la situation de Julian Assange, pour qui la Suède a présenté une demande d'extradition qui ne contient pas d'inculpation. La situation de M. Assange constitue un précédent très dangereux. Le Rapporteur spécial ne devrait pas fermer les yeux sur ce cas, qui revêt une importance particulière. L'Égypte, qui a le souci de se mettre en conformité avec les normes internationales, souhaite développer son propre système d'aide judiciaire. Sri Lanka, qui a institutionnalisé l'aide judiciaire en 1978, a précisé qu'un effort était effectué pour fournir ce service dans les régions qui ont sorties du conflit. En outre, un effort est fait pour permettre aux femmes qui en ont besoin de bénéficier d'une aide judiciaire. La loi prévoit que toute personne doit pouvoir bénéficier des services d'un avocat. L'Estonie a indiqué que 20 000 personnes par an, soit 2% de sa population, bénéficiaient de l'aide judiciaire dans le pays. Des «cliniques» d'aide juridique ont été mises en place où les consultations sont gratuites. Le Botswana a souligné qu'un projet pilote avait été lancé afin de tester un système d'aide judiciaire, l'objectif étant de mettre en place à terme une institution conforme aux normes internationales. Compte tenu des ressources limitées du pays, une aide judiciaire ne peut être fournie que progressivement. Priorité a été donnée au civil à ce stade. Les tribunaux pénaux de première instance n'offrent pas ce privilège qui ne peut être obtenu qu'au niveau de la Cour suprême.

Le Costa Rica juge importante l'idée avancée par Mme Knaul selon laquelle l'aide judiciaire doit pouvoir être obtenu à tous les stades des procédures. Il reconnaît qu'il est difficile pour des raisons financières de garantir une aide judiciaire universelle à quiconque en a besoin. Le Costa Rica a d'abord donné la priorité à la justice pénale avant d'étendre progressivement cette aide à la justice civile, notamment aux affaires familiales et aux différends relevant du droit du travail. La Chine a indiqué que l'aide judiciaire dans le pays, qui n'était octroyée au départ qu'au stade du procès, était désormais offerte dès le démarrage de l'enquête, cette aide ayant aussi été étendue au pénal. La Bulgarie a indiqué qu'un nouveau code est en préparation afin de garantir l'accès de tous à la justice. De même, la Constitution à laquelle travaillent les autorités de la Lybie entend répondre à tous les standards internationaux en matière d'indépendance des juges et avocats.

L'Argentine a déploré que la Rapporteuse spéciale ait publié un communiqué de presse qui préjugeait du fond d'une question sensible, sans avoir attendu la réponse de l'Argentine, en contradiction avec le code de conduite des procédures spéciales du Conseil. Le Nicaragua a pour sa part critiqué les contre-vérités à son sujet contenues dans le rapport. Le système judiciaire nicaraguayen est indépendant, a assuré la délégation qui a regretté que la Rapporteuse spéciale ne se soit pas adressée aux autorités judiciaires de Managua pour obtenir les éclaircissements nécessaires. Le Nicaragua compte présenter au haut-Commissariat son propre rapport et affirme sa détermination à continuer à coopérer avec les procédures spéciales du Conseil.

Droit de réponse

L'Iraq, en réponse à une organisation non gouvernementale qui s'est exprimée hier sur des cas de violations du droit à la santé à Camp Liberty, a rejeté ses allégations qui sont sans fondement. L'Iraq a publié un mémorandum à cet égard, remis aux partenaires onusiens, qui ont pu eux même vérifier ces informations sur le terrain. Il ajoute qu'une mission de l'ONU se trouve sur place.

Cuba, répondant à une déclaration faite hier par les États-Unis, a déclaré que tout le monde sait que Cuba a un des mécanismes d'indépendance totale de la justice les plus performants au monde et a rappelé qu'une enquête a été menée sur les faits tragiques évoqués par les États-Unis et que les responsables ont été poursuivis.


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HRC13/060F