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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT INITIAL DE MACAO

Compte rendu de séance

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par la Région administrative spéciale chinoise de Macao sur les mesures qu'elle a prises en application des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Mme Florinda Chan, Secrétaire à l'administration et la justice du Gouvernement de la Région administrative spéciale de Macao de la République populaire de Chine, a souligné que les politiques gouvernementales mettent l'accent sur l'accroissement des ressources consacrées à l'amélioration du bien-être de la population. De nouvelles lois ont été adoptées pour se conformer aux obligations relevant du Pacte et des autres instruments internationaux applicables à Macao en matière de droits de l'homme et d'autres droits, notamment dans des domaines comme la protection des données, la lutte contre les stupéfiants et contre la traite de personnes, les relations de travail, les personnes handicapées, les réfugiés, l'accès à la justice et à l'aide juridique ou encore la protection des femmes et des enfants. La principale fonction de l'Ombudsman est de protéger les droits et libertés des individus et de veiller à la légalité de l'exercice de l'autorité publique. S'y ajoute un nombre croissant d'institutions crées aux fins de la promotion et de la protection des droits de l'homme. Mme Chan a par ailleurs attiré l'attention sur le processus entamé l'an dernier en vue d'une démocratisation graduelle et souple du système politique. Le Représentant permanent de la Chine à Genève, M. Liu Zhenmin, a pour sa part indiqué que, selon la politique d'un pays, deux systèmes et en vertu de la Loi fondamentale de la RAS de Macao, cette dernière jouit d'un grand degré d'autonomie et relève directement du Gouvernement central de la République populaire de Chine.

La délégation de Macao était également composée de représentants du Bureau du bien-être social; du Bureau du Secrétaire pour l'administration de la justice; du Bureau du Secrétaire pour la sécurité; du Bureau du commerce et de l'économie de Macao auprès de l'Organisation mondiale du commerce; du Bureau du travail; du Bureau de l'information; du Bureau de la réforme de la loi et du droit international; des forces de police.

La délégation a fourni des réponses aux questions écrites que lui a adressées le Comité et a répondu aux questions soulevées en séance par les experts s'agissant, entre autres, des réserves émises à l'égard de certaines dispositions du Pacte; des mécanismes de promotion et de protection des droits de l'homme; de l'administration de la justice; de l'égalité entre hommes et femmes; de la lutte contre le harcèlement sexuel; des dispositions relatives aux châtiments corporels; de la législation applicable aux partis politiques; du droit de manifester; de la liberté de la presse; des droits des résidents d'origine portugaise; des travailleurs non résidents; des conditions d'entrée sur le territoire; ou encore de la situation s'agissant de la traite de personnes.

Le Président du Comité, M. Nigel Rodley, a jugé, à l'issue du dialogue, que celui-ci avait été riche d'enseignements. Il s'est notamment étonné que la Loi fondamentale soit sujette à interprétation par le Comité permanent du Congrès national du peuple de Chine, une autre experte soulignant que la Chine n'est pas partie au Pacte. S'agissant de la liberté d'expression, il est difficile pour les membres du Comité de comprendre pourquoi les journalistes, considérés parfois comme des militants, se retrouvent parfois dans des situations difficiles. Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport, M. Walter Kaelin, s'est félicité que Macao présente enfin son rapport initial, qui était dû en 2001.

Le Comité rendra publiques, après la fin de la session le jeudi 28 mars, des observations finales résultant de l'examen du rapport de Macao.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Pérou (CCPR/C/PER/5), le dernier au programme de la présente session.






Présentation du rapport

M. LIU ZHENMIN, Représentant permanent de la Chine auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que le Gouvernement chinois a recouvré, le 20 septembre 1999 la souveraineté sur Macao et a institué la Région administrative spéciale de Macao conformément à l'article 31 de la Constitution de la République populaire de Chine. Selon la politique d'un pays, deux systèmes, et selon la Loi fondamentale de la Région administrative spéciale, Macao jouit d'un grand degré d'autonomie et relève directement du Gouvernement central de la République populaire de Chine. Alors que le Gouvernement central est responsable de sa défense et des affaires étrangères y associées, la RAS de Macao dispose de ses propres pouvoirs exécutif et législatif et possède un système judiciaire indépendant. L'expérience de ces treize dernières années a montré le succès de cette politique d'un pays, deux systèmes. Les dispositions du Pacte ont continué à s'appliquer à Macao après 1999 et sont mises en œuvre par le biais de la loi de la RAS de Macao. À présent, la Chine n'est pas partie au Pacte, a-t-il rappelé; toutefois, conformément au principe d'un pays, deux systèmes, le Gouvernement chinois a transmis au Comité le rapport initial de la Région administrative spéciale de Macao, en 2011.

Présentant le rapport initial de la Région administrative spéciale (RAS) de Macao de la République populaire de Chine (CCPR/C/CHN-MAC/1), MME FLORINDA CHAN, Secrétaire à l'administration et la justice du Gouvernement de la RAS de Macao de la République populaire de Chine, a rappelé que conformément à la l'article 138 de la Loi fondamentale de Macao, les accords internationaux auxquels la Chine n'étaient pas encore partie mais qui étaient applicables à Macao ont continué à s'appliquer dans la RAS de Macao. La RAS de Macao jouit d'un statut juridique sui generis comme en témoigne le fait qu'elle puisse maintenir et développer des relations et conclure des accords avec des États et régions étrangers ou avec des organisations internationales, dans plusieurs domaines.

La RAS de Macao a une superficie d'environ 30 kilomètres carrés et une population totale de 582 000 habitants (2012). Du fait de son histoire, riche de plusieurs siècles, la Région possède une diversité multiethnique; y cohabitent différentes communautés dans une société harmonieuse où les différences culturelles, religieuses et linguistiques sont respectées et promues. Le centre historique de Macao a été inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2005, a par ailleurs fait valoir Mme Chan.

Le Gouvernement de la RAS de Macao est profondément engagé en faveur de la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a poursuivi Mme Chan. Les politiques gouvernementales mettent l'accent sur l'accroissement des ressources consacrées à l'amélioration du bien-être de la population, a-t-elle fait valoir. De nouvelles lois ont été adoptées pour se conformer aux obligations relevant du Pacte et des autres instruments internationaux applicables dans la RAS de Macao en matière de droits de l'homme et d'autres droits, notamment dans des domaines comme la protection des données, la lutte contre les stupéfiants et contre la traite de personnes, les relations de travail, les personnes handicapées, les réfugiés, l'accès à la loi et à l'aide juridique ou encore la protection des femmes et des enfants.

Mme Chan a ensuite attiré l'attention sur les activités de l'Ombudsman, dont la principale fonction est de protéger les droits et libertés des individus et de veiller à la légalité de l'exercice de l'autorité publique. Elle a également souligné le nombre croissant d'institutions créées aux fins de la promotion et de la protection des droits de l'homme, citant notamment la Commission de la protection des victimes contre les crimes violents; la Commission des réfugiés; la Commission des affaires féminines; la Commission sur le contrôle disciplinaire des forces de sécurité; la Commission de lutte contre le VIH/sida; ou encore la Commission sur la santé mentale. Le Gouvernement de la RAS de Macao maintient un dialogue régulier avec les organisations non gouvernementales et encourage pleinement la participation de la population aux affaires publiques. À cet égard, Mme Chan a attiré l'attention sur l'évolution qu'a connue le système politique de la RAS de Macao en 2012 avec l'amendement apporté à la méthodologie pour la constitution de l'Assemblée législative et à la méthodologie pour la sélection du Chef de l'Exécutif de la Loi fondamentale et leurs lois électorales locales correspondantes. Mme Chan a souligné que ce processus était conforme à la Loi fondamentale et à la réalité de Macao où un processus graduel et souple de démocratisation du système politique est en cours.

MME CHU LAM LAM, Directrice du Bureau de la réforme législative et du droit international de la Région administrative spéciale de Macao, apportant des réponses à la liste de questions écrites adressée par le Comité à la RAS de Macao, a notamment indiqué que «les traités internationaux sont applicables dans la RAS de Macao par le biais de l'incorporation» et que «les organes judiciaires peuvent directement citer les traités comme bases juridiques de leurs jugements».

Mme Chu a ensuite souligné que les droits des ressortissants chinois de Macao qui étaient originellement détenteurs de documents de voyage portugais n'ont pas été diminués après le transfert de souveraineté (20 décembre 1999); ces personnes jouissent des droits et libertés correspondants des résidents de la RAS de Macao conformément à la Loi fondamentale et aux dispositions pertinentes.

Pour ce qui est des préoccupations exprimées par le Comité concernant la liberté d'expression à Macao après le transfert de souveraineté, Mme Chu a assuré qu'elles n'avaient pas de raison d'être, la RAS de Macao respectant en effet la liberté de la presse, la liberté de parole et la liberté de publication. L'article 27 de la Loi fondamentale accorde aux résidents de la RAS de Macao la liberté de parole, de presse et de publication, a-t-elle insisté.

Afin de protéger les mineurs, les femmes, les personnes handicapées et les personnes âgées, le Gouvernement de la RAS de Macao est en train d'élaborer une loi sur la prévention de la violence domestique ainsi qu'un cadre juridique pour la protection des droits et intérêts des personnes âgées. Le Gouvernement de la RAS de Macao interdit toutes les formes de châtiments corporels sur les enfants, a indiqué Mme Chu.

Par ailleurs la loi de la RAS de Macao protège les travailleurs non-résidents contre toute discrimination lorsqu'ils travaillent dans la RAS et leur garantit un traitement et une protection qui ne sont pas moins favorables que ceux dont bénéficient les travailleurs résidents de la RAS. La Loi sur les relations de travail stipule que les employés ne doivent pas subir de préjudice ou être privés d'un droit quelconque sur la base notamment de la nationalité, de la race, de l'ascendance. Le principe de non-discrimination établi par la Loi sur l'emploi des travailleurs non-résidents accorde à ces derniers un traitement qui n'est «pas moins favorable» comparé à celui dont bénéficient les travailleurs résidents en termes de droits, d'obligations et de conditions de travail.

Le Bureau du travail mène des patrouilles de routine aux abords des lieux de travail et toute situation de discrimination à l'encontre de travailleurs locaux ou non-résidents fera l'objet de poursuites et sera pénalisée, conformément à la loi. Il est significatif qu'aucune plainte pour discrimination n'ait été rapportée au Bureau du travail jusqu'ici. Le Gouvernement de la RAS de Macao continuera de faciliter le lancement d'un dialogue tripartite (employés, employeurs et politiques) sur l'établissement d'un système de salaire minimum, «en coopération avec les circonstance et des besoins de développement» de la société.

La lutte contre le terrorisme n'affecte pas la protection des droits de l'homme, a assuré Mme Chu. Toute personne suspectée ou accusée de la commission d'un acte de terrorisme ou de financer le terrorisme dans la RAS de Macao bénéficiera des garanties procédurales pénales, du droit d'appel, de l'habeas corpus, du droit de réparation pour arrestation illégale, notamment.

Le Code pénal de la RAS de Macao prévoit des peines pour prévenir et sanctionner l'exploitation sexuelle et l'exploitation économique des personnes, a indiqué Mme Chu en réponse à une autre question.

Enfin, Mme Chu a assuré que la population de la RAS de Macao jouit de la liberté d'association; au mois de novembre 2012, quelque 5605 organisations s'étaient enregistrées auprès du Bureau d'identification.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. WALTER KAELIN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Région administrative spéciale de Macao, a rappelé que la RAS de Macao aurait dû présenter ce rapport initial dès 2001 et a regretté que ce rapport n'ait été soumis qu'en 2011. Il s'est néanmoins réjoui qu'il soit enfin présenté au Comité.

M. Kaelin a remercié la délégation pour les réponses très détaillées que la RAS de Macao a fait parvenir au Comité suite aux questions écrites qu'il lui avait adressées. Le rapporteur a souhaité savoir si les dispositions du Pacte sont d'application directe à Macao, sans qu'il soit nécessaire de les transposer en droit interne par une législation spécifique. Il a voulu connaître la place du Pacte dans l'ordre juridique interne et savoir si ses dispositions prévalent sur le droit interne en cas de conflit.

Le rapporteur a souhaité en savoir davantage au sujet des réserves que la RAS de Macao maintient à l'égard de certaines dispositions du Pacte. Relevant que les mandats d'institutions comme l'Ombudsman ou la Commission contre la corruption ont été élargis, il s'est toutefois interrogé sur la capacité de ces institutions à couvrir tous les aspects des droits de l'homme. Dans quelle mesure ces institutions sont-elles indépendantes et respectent-elles les Principes de Paris, a-t-il demandé? La question de l'indépendance de ces institutions est d'autant plus importante que certaines organisations non gouvernementales dépendent énormément du financement du Gouvernement.

M. Kaelin a en outre soulevé la question des résidents de la RAS de Macao susceptibles d'être jugés en Chine continentale ou dans des pays où la législation est plus sévère qu'à Macao, notamment du point de vue de la peine capitale qui, convient-il de rappeler, avait été abolie par le Portugal.

Un autre membre du Comité a rappelé l'importance qu'il y a à veiller à ce que des lois telles que la Loi de 2006 relative à la prévention et à l'élimination du crime de terrorisme ne donnent lieu à aucune atteinte aux droits de l'homme. Dans ce contexte, relevant qu'en vertu de cette loi, l'entrée sur le territoire de la RAS de Macao peut être refusée à des non-résidents lorsqu'ils peuvent être suspectés de crimes de terrorisme, l'experte a souhaité connaître les modalités d'application et s'est demandé si elle ces dispositions ne sont pas susceptibles d'être utilisées de manière abusive.

Un expert a relevé que la violence domestique est passible de peines pouvant aller jusqu'à cinq années d'emprisonnement et a souhaité savoir si le pays comptait bientôt adopter le projet de loi sur la violence domestique actuellement à l'étude. Il a également voulu savoir si le Gouvernement envisage d'adopter une loi spécifique sur le harcèlement sexuel. L'expert s'est ensuite penché sur la compatibilité des mesures disciplinaires en milieu carcéral avec les dispositions du Pacte, relevant avec satisfaction que le placement en isolement pour les mineurs n'est appliqué que de manière tout à fait exceptionnelle – et uniquement la nuit – et que toutes les mesures disciplinaires peuvent faire l'objet de recours. Il a néanmoins souhaité obtenir des données chiffrées relatives aux mesures disciplinaires appliquées dans la RAS de Macao et a souhaité en savoir davantage sur la composition de la population carcérale, ventilée par âges. Un autre expert a souhaité connaître le nombre de délinquants mineurs privés de liberté dans la RAS de Macao.

Un membre du Comité s'est lui aussi inquiété de l'absence, à Macao, de législation sur le harcèlement sexuel. Tout en se disant satisfait que le placement en isolement des mineurs ne soit autorisé que la nuit, il s'est néanmoins inquiété que persiste la possibilité de prolonger le placement en isolement pour une période totale d'un mois.

Une experte a relevé que dans la Loi fondamentale de la RAS de Macao, figure une disposition relative à l'interprétation de ladite Loi qui est similaire à celle qui figure dans la Loi fondamentale de la RAS de Hong Kong, à savoir que le pouvoir d'interprétation est donné au Congrès national du peuple de la Chine; on se retrouve donc ici avec une justice qui est déléguée à l'organe d'un pays qui, lui, n'est pas partie au Pacte. Qu'en est-il des cas où les tribunaux de Macao ont dû poser une telle question d'interprétation et quels domaines cela concernait-il, a demandé l'experte?

Un membre du Comité s'est interrogé sur les causes des plaintes déposées pour discrimination au Bureau du travail. L'expert s'est enquis du statut et de la situation des travailleurs migrants à Macao, faisant état d'informations selon lesquelles un grand nombre de travailleurs étrangers n'auraient pas de contrats de travail, ce qui les rendrait particulièrement vulnérables aux abus. Il ne semble pas exister de recours utile en cas de licenciement injuste, a ajouté cet expert.

Une experte s'est enquise des mesures prises pour préserver les droits des résidents qui avaient la citoyenneté portugaise avant la rétrocession de 1999.

Un expert a demandé s'il serait possible de réprimer des manifestations publiques à Macao en invoquant la législation relative aux atteintes à la sécurité publique, estimant que la terminologie très large de certaines dispositions législatives pourrait être utilisée pour restreindre la liberté d'expression. Il s'est également inquiété des abus auquel pourrait donner lieu la sanction du délit pénal de «diffusion de fausses informations».

Un autre expert a demandé des renseignements sur l'intégration des enfants de migrants dans le système scolaire. Il a aussi voulu connaître la pratique, en particulier dans le milieu scolaire, s'agissant des châtiments corporels.

La délégation a-t-elle connaissance de difficultés auxquelles seraient confrontés les partis politiques pour se faire enregistrer, a demandé un expert?

Macao s'est-elle fixée une échéance pour l'introduction d'un système électoral intégrant le suffrage universel, a-t-il également été demandé?

Qu'en est-il des mesures prises en matière de prévention et de lutte contre la traite de personnes, se sont enquis plusieurs experts?

Réponses de la délégation

En ce qui concerne la place du Pacte dans l'ordre juridique interne, la délégation a indiqué que dans la hiérarchie des normes, la Loi fondamentale se trouve au premier rang, suivie par le droit international, puis par le droit ordinaire (interne). En cas de conflit entre ce dernier et le droit international, c'est donc le droit international qui prévaudra.

Pour ce qui est des réserves émises par la RAS à l'égard des articles 12 et 13 du Pacte, la délégation a tenu à assurer que si certaines limites à la réalisation d'un droit peuvent être imposées, elles ne sauraient néanmoins aller à l'encontre de l'état de droit ni de l'ensemble du Pacte, qui a valeur constitutionnelle à Macao.

La délégation a ensuite rappelé que selon la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969), les réserves à un traité sont possibles pour autant que ledit traité ne les interdise pas et qu'elles ne soient pas incompatibles avec l'objet et le but du traité.

Conformément à l'article 143 de la Loi fondamentale de Macao, le Comité permanent du Congrès national du peuple a le pouvoir d'interprétation de la Loi fondamentale, a confirmé la délégation. En effet, la Loi fondamentale est une loi nationale chinoise et non pas une loi adoptée par l'assemblée législative de Macao; or, le Congrès national du peuple a le pouvoir d'interpréter les lois qu'il a lui-même adoptées. Cela n'empêche pas les tribunaux de Macao de prendre des décisions sans aucune interférence extérieure; l'interprétation de la Loi fondamentale est donc le fruit de l'interprétation combinée qu'en font les tribunaux de Macao et le Congrès national du peuple.

La délégation a reconnu que Macao n'avait pas encore mis en place de mécanisme indépendant de promotion et de protection des droits de l'homme. Il n'en demeure pas moins que les droits de l'homme dans la Région administrative sont garantis et protégés, a-t-elle souligné. Le bureau de l'Ombudsman a pour principale fonction de protéger les droits et libertés de chacun, a-t-elle rappelé. En outre, une aide juridictionnelle peut être apportée aux groupes les plus vulnérables, tels que les victimes de la traite, les requérants d'asile et les travailleurs non-résidents. Les mécanismes existants ont porté leur fruit et pour l'heure, point n'est besoin de mettre en place un autre mécanisme pour vérifier la façon dont fonctionnent ceux qui existent déjà voire venir s'y substituer, a déclaré la délégation. La Commission de lutte contre la corruption est une entité juridique indépendante dont le Commissaire est nommé par le Chef de l'Exécutif, a ensuite indiqué la délégation. Le Médiateur peut ouvrir des enquêtes de son propre chef, faire des recommandations, présenter des amendements voire abroger certaines initiatives, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne l'enregistrement des partis politiques, la délégation a indiqué que selon la législation en vigueur, tout groupe qui souhaite prendre part aux élections, que ce soit pour faire des propositions ou pour critiquer les activités de l'administration, peut se faire enregistrer comme groupe politique pour autant que ses objectifs soient conformes à la Constitution et qu'il soit composé de 200 membres résidents de Macao âgés de plus de 18 ans et enregistrés comme votants.

La délégation a souligné que la Loi fondamentale garantit les droits des résidents portugais, précisant que la Chine ne reconnaît pas la double nationalité: les résidents de Macao qui sont d'origine chinoise et portugaise peuvent, selon leur préférence, opter pour la nationalité chinoise ou portugaise, et bénéficient dans tous les cas de tous les droits garantis par le cadre juridique de Macao. La délégation a souligné que toutes les lois à Macao sont publiées en chinois et en portugais. Elle a précisé que 90% des habitants de Macao parlent chinois et pas le portugais; seule une petite minorité est bilingue, a-t-elle ajouté.

Le Code du travail mentionne le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, mais il est vrai que le délit de harcèlement sexuel n'a pas été défini en tant que tel. Cela ne signifie pas que le Code pénal ne permette pas de sanctionner un tel acte: en effet, l'article 171 du Code pénal prévoit, pour tous les articles du Code portant sur des délits à caractère sexuel, des circonstances aggravantes si le contrevenant à un ascendant - c'est-à-dire un pouvoir décisionnel ou autre - sur la victime.

Les mesures prises en matière de lutte contre la traite de personnes privilégient une approche multidisciplinaire et multidimensionnelle pour lutter contre ce phénomène, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a attiré l'attention sur le comité de lutte contre la traite qui a été créé et dont la composition a été élargie pour y incorporer le Bureau du travail et le Bureau des ressources humaines, deux institutions qui œuvrent dans le secteur du travail. Des systèmes de contrôle aux frontières ont été mis en place et les pays à risques sont connus des autorités. Des condamnations ont été prononcées encore ce mois-ci pour des délits de traite.

La menace à la sécurité interne ou encore la suspicion de crime en rapport avec le terrorisme constituent quelques-unes des raisons pouvant justifier le refus d'entrée d'un individu sur le territoire de Macao, a en outre indiqué la délégation.

Pour ce qui est des prétendus journalistes qui se sont vu refuser l'entrée sur le territoire de Macao, la délégation a affirmé que les autorités ont estimé que ces individus étaient plutôt des militants qui risquaient de troubler l'ordre public. Macao respecte la liberté de la presse et l'indépendance des médias, a ensuite assuré la délégation. Sur 30 kilomètres carrés et pour environ 580 000 habitants, Macao possède un secteur des médias très dynamique; elle compte en effet 16 quotidiens (contre 10 avant la rétrocession) en chinois, en anglais et en portugais.

Aucune manifestation violente n'est permise à Macao; en revanche, les manifestations pacifiques sont autorisées. L'adoption de la Loi sur la sécurité publique n'a pas provoqué de restriction du droit de manifester pacifiquement, a insisté la délégation, précisant qu'en 2011, Macao avait connu quelque 400 réunions publiques et 28 manifestations, alors qu'en 2012, 26 manifestations ont été recensées.

En 2009, le salaire moyen des femmes représentait, à travail égal, 70% de celui des hommes; aujourd'hui, l'écart a été réduit et ce taux atteint 77%, a fait valoir la délégation. D'après un recensement de 2001, quelque 14 046 personnes revendiquant le statut de chef d'entreprise, dont 74% d'hommes. La proportion de femmes chefs d'entreprises n'a cessé d'augmenter ces dernières années.

L'an dernier, le Bureau du travail a été saisi de près de 9500 plaintes dont près de la moitié avaient été déposées par des travailleurs non résidents de Macao, a indiqué la délégation. Ces plaintes ne portaient pas sur des cas de discrimination, mais sur des questions de salaires, de congés ou d'heures supplémentaires, a-t-elle précisé. Les travailleurs non résidents sont soumis à un système de quotas et doivent bénéficier d'un contrat de travail avec un employeur de Macao pour pouvoir entrer sur le territoire de la RAS; ils bénéficient des mêmes droits que les travailleurs résidents.

L'instruction n'est pas gratuite pour les personnes qui ne sont pas résidentes de Macao, a indiqué la délégation.

Pour ce qui est des châtiments corporels, la délégation a assuré qu'ils sont proscrits dans les règlements intérieurs des établissements scolaires.

Concernant l'administration de la justice, la délégation a indiqué que sur les 28 juges travaillant dans les tribunaux de première instance de la RAS de Macao, 14 ont été formés depuis la rétrocession de Macao, 5 ont été recrutés au Portugal et 9 étaient déjà en place à l'époque de l'administration portugaise. Le nombre de magistrats travaillant au Ministère public est de 34, dont 4 ont été formés au Portugal, les autres ayant été formés avant ou depuis la rétrocession.

En 2012, le nombre d'affaires déférées devant la cour de première instance de Macao s'est élevé à 16 189, soit 578 affaires par juge en moyenne, a par ailleurs indiqué la délégation.

Macao compte actuellement 1112 détenus, a par ailleurs indiqué la délégation.

La Loi fondamentale exige de Macao la protection des secrets d'État, a par ailleurs souligné la délégation. Un secret d'État peut porter sur la défense nationale, sur les relations extérieures ou encore sur des questions ayant trait au fonctionnement de l'autorité centrale et de la Région administrative spéciale, les documents visés devant au préalable avoir été classifiés comme «top secret», a-t-elle expliqué.

Conclusions

M. NIGEL RODLEY, Président du Comité, a jugé fécond le dialogue qui s'est noué entre les experts et la délégation – trilingue – de la RAS de Macao. Les informations reçues par le Comité durant ce dialogue ont été extrêmement utiles, a-t-il insisté.

M. Rodley a toutefois souligné que certaines questions étaient restées sans réponse et a rappelé que le Comité adoptera ultérieurement ses observations finales qui seront transmises au Gouvernement de la RAS de Macao à l'issue de la session. Pour ce qui est de la façon dont est interprétée la Loi fondamentale par le Comité permanent du Congrès national du peuple, M. Rodley a fait observer qu'il est assez surprenant pour le Comité qu'une assemblée législative soit chargée d'interpréter elle-même sa propre législation. En ce qui concerne le suffrage universel, la réalité parle d'elle-même, a-t-il ajouté. Quant à la liberté d'expression, là encore, il risque d'être difficile pour les membres du Comité de comprendre pourquoi les journalistes, considérés parfois comme des militants, se retrouvent dans des situations aussi difficiles que celles dans lesquelles ils ont pu se retrouver à Macao, a indiqué le Président du Comité.



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CT13/008F