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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT TIENT UN DÉBAT SUR LA PRÉVENTION DE LA COURSE AUX ARMEMENTS DANS L'ESPACE

Compte rendu de séance
L'Indonésie assume la présidence de la Conférence

La Conférence du désarmement a tenu, ce matin, un débat thématique sur la question de la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique. Onze délégations se sont exprimées à l'occasion de cette séance qui s'inscrit dans le cadre de discussions thématiques sur les questions inscrites à l'ordre du jour de la Conférence. M. Victor Vasiliev, Président du groupe d'experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, s'est également adressé à la Conférence du désarmement.

Le nouveau Président de la Conférence, l'Ambassadeur Triyono Wibowo, de l'Indonésie, a indiqué qu'il s'efforcerait, tout au long de son mandat, d'identifier les obstacles qui s'opposent à l'adoption d'un programme de travail consensuel, ainsi que les formulations, modalités et méthodes acceptables à cet égard. L'objectif de la présidence sera de trouver un dénominateur commun permettant à la Conférence du désarmement d'assumer son rôle véritable. À cet égard, le dernier programme de travail consensuel (CD/1864) servira de référence à la présidence indonésienne.

Dans leurs interventions, les délégations ont insisté sur l'importance de réserver l'espace extra-atmosphérique, véritable patrimoine commun de l'humanité, à des activités pacifiques. Elles ont relevé des lacunes dans l'ordre juridique actuel destiné à prévenir la militarisation de l'espace. Elles ont aussi souligné la nécessité de prendre mesures urgentes afin de prévenir les risques induits par les débris spatiaux. Les délégations ont également exprimé leur l'appui à l'élaboration de mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, tout en relevant que ces mesures ne doivent pas se substituer à un instrument juridique multilatéral sur la prévention de la course aux armements dans l'espace. Plusieurs délégations ont déclaré que le projet sino-russe de 2008 (CD/1839), pour un traité relatif à la prévention du déploiement d'armes dans l'espace, constitue une base pour des discussions voire des négociations sur la prévention d'une course aux armements dans l'espace. Enfin, l'élaboration, par l'Union européenne, d'un projet de code de conduite pour les activités dans l'espace extra-atmosphérique a été saluée comme étant une démarche efficace et pragmatique pour garantir la sécurité à long terme dans l'espace.

Ont fait des déclarations les délégations des États suivants: Kirghizistan (au nom des États membres de l'Organisation du Traité de sécurité collective), Irlande (au nom de l'Union européenne), Japon, Chine, États-Unis, Australie, Égypte, Iran, Inde, Bélarus et Algérie.

Le Président du groupe d'experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales a pour sa part observé que ces mesures doivent faciliter la réduction des tensions internationales, le désarmement, l'exploitation sûre et durable de l'espace extra-atmosphérique et la prévention des collisions et des situations dangereuses.


La prochaine séance plénière de la Conférence, le mardi 26 mars à 10 heures, sera consacrée aux arrangements internationaux efficaces pour garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace de ces armes, ou «assurances négatives de sécurité».




Débat sur la prévention de la course aux armements dans l'espace

Le Kirghizistan, au nom des États membres de l'Organisation du Traité de sécurité collective, a déclaré que la prévention d'une course aux armements dans l'espace est un aspect indispensable de la sécurité internationale. Le Kirghizistan estime nécessaire que la communauté internationale entame rapidement des débats de fond sur cette question, en vue de l'adoption d'un document juridiquement contraignant. Pour le Kirghizistan, le projet sino-russe de traité relatif à la prévention du déploiement d'armes dans l'espace et de la menace ou de l'emploi de la force contre des objets spatiaux (document CD/1839 présenté en 2008) constitue une bonne base de départ pour le débat à ce sujet. La délégation a dit en outre l'appui de son pays à l'élaboration de mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, sur la base des travaux du groupe d'experts gouvernementaux et de la Conférence du désarmement. Le Kirghizistan a appelé les États à s'engager à ne pas déployer les premiers d'armes dans l'espace.

L'Irlande a déclaré que l'Union européenne avait pris note du projet sino-russe de traité relatif à la prévention du déploiement d'armes dans l'espace (CD/1839) ainsi que des idées lancées au sujet d'un instrument juridique interdisant les essais et l'utilisation d'armes antisatellites. Elle relève en outre que de plus en plus de pays s'engagent à prendre des mesures de transparence et de confiance en tant que moyens de sécuriser l'espace. Tous les États membres de l'Union européenne ont appuyé la résolution portant création du groupe d'experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, dont ils se félicitent des débuts des travaux, en juillet dernier. C'est dans ce contexte que l'Union européenne a lancé des consultations autour de la rédaction d'un code de conduite international sur les activités spatiales. Facultatif et ouvert à tous les États, le code préciserait les règles de base à respecter par les États ayant des activités tant civiles que militaires dans l'espace. Le projet ne contient pas de disposition relative au déploiement d'armes dans l'espace, mais insiste sur l'importance de prendre toutes les mesures nécessaires pour que l'espace ne se transforme pas en une zone de conflit. Le Code aurait une portée très générale. C'est pourquoi l'Union européenne estime qu'il ne conviendrait pas de tenir des négociations multilatérales de fond à ce sujet dans les forums internationaux dévolus uniquement à la non-prolifération et au désarmement, comme la Conférence du désarmement, ou aux utilisations civiles de l'espace extra-atmosphérique, comme le Comité des Nations unies pour l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique (COPUOS). Elle juge au contraire utile d'engager des discussions hors de ces instances, dans le cadre d'un processus ouvert à tous les membres des Nations Unies. Cette approche, espère l'Union européenne, accélérera l'adoption du code.

Le Japon a souligné que, dans un contexte de forte dépendance à l'égard des services dispensés depuis l'espace, il convient de renforcer les initiatives internationales visant à garantir l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique. C'est pourquoi le Japon s'engage à examiner attentivement tous les aspects de la prévention de la course aux armements dans l'espace. Il estime que le projet de traité déposé par la Fédération de Russie et la Chine doit être étudié avec soin. Parallèlement, le Japon contribue activement à l'élaboration du Code de conduite de l'Union européenne, dont il juge qu'il pourrait servir de précurseur au développement de nouvelles règles internationales. Le Japon accorde de même une grande attention aux travaux du groupe d'experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et salue le rôle de l'initiative de l'Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) d'organiser une conférence sur la sécurité de l'espace, les 2 et 3 avril prochain à Genève. Le Japon estime, enfin, que l'interdiction des armes antisatellites mérite d'être étudiée, aux fins de prévenir la dissémination de nouveaux débris dans l'espace.

Pour la Chine, la prévention de la course aux armements dans l'espace est une dimension fondamentale des travaux de la Conférence du désarmement. Depuis l'an dernier, les initiatives internationales autour de la sécurité de l'espace se multiplient, notamment les travaux du groupe d'experts gouvernementaux et la préparation d'un code de conduite facultatif par l'Union européenne. La Chine, qui a toujours plaidé pour l'utilisation pacifique de l'espace, s'oppose à la militarisation de l'espace, qui compromet fondamentalement la sécurité de l'espace. C'est pourquoi elle participe activement aux négociations autour de l'adoption d'un instrument juridique international en la matière. Dans ce cadre, elle estime qu'il ne faut pas mettre l'accent sur l'incidence, pour la sécurité de l'espace, de problèmes liés au développement, comme par exemple les débris, tout en ignorant les risques posés par la militarisation et de la course aux armements dans l'espace. La Chine estime, d'autre part, que la préservation de la sécurité dans l'espace dépend de la négociation et de l'adoption d'un traité international qui vienne combler les lacunes dans l'ordre juridique actuel destiné à prévenir la militarisation de l'espace.

Pour les États-Unis, les mesures multilatérales et bilatérales de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales ont la capacité d'engager les États à se comporter de manière responsable. Ces mesures ont aussi vocation à prévenir les malentendus que la méfiance et les erreurs de calculs risquent de susciter entre les États. Les États-Unis ont décidé de s'associer aux travaux d'élaboration du code de conduite de l'Union européenne, une démarche efficace et pragmatique pour garantir la sécurité à long terme de l'espace. Les États-Unis observent, en outre, que les travaux du groupe d'experts gouvernementaux sont l'occasion de progresser dans l'adoption de mesures de confiance volontaires qui pourraient concrètement mitiger les risques et dangers pour la sécurité dans l'espace. Enfin, les États-Unis encouragent toutes les délégations à participer à la prochaine conférence de l'UNIDIR consacrée à la sécurité dans l'espace, qu'ils parrainent.

Comme d'autres États, l'Australie dépend de plus en plus de l'espace pour un certain nombre de services essentiels à son bien-être social, environnemental et économique, de même qu'à sa sécurité. C'est pourquoi elle partage l'intérêt d'autres pays pour la pérennité de l'environnement spatial, au profit des futures générations notamment. L'Australie a contribué aux travaux du groupe d'experts gouvernementaux par la présentation d'une communication consacrée à l'application du droit international aux questions de sécurité internationale dans l'espace. L'Australie y soutient que certains principes et obligations du droit international pourraient s'appliquer aux activités spatiales des États, portant notamment sur les actes étatiques qui risqueraient de contaminer l'environnement. L'Australie est ouverte à la discussion sur toute proposition concrète et réalisable en matière de contrôle des armements dans l'espace. Elle a donc pris bonne note du projet de traité soumis à la Conférence du désarmement, estimant toutefois que ce projet soulève une série de problèmes importants en ce qui ce concerne sa portée, ses définitions et sa vérification. L'Australie considère, a contrario, qu'il est d'ores et déjà possible de prendre des mesures efficaces pour résoudre le problème des débris spatiaux: le projet de code de conduite de l'Union européenne donne, en effet, à la communauté internationale des moyens d'action simples et efficaces.

L'Égypte a souligné que la dépendance de nos modes de vie modernes envers les activités spatiales est telle que la moindre entrave à l'accès à l'espace aurait des conséquences très graves. La seule manière de sécuriser l'espace consiste à faire en sorte qu'aucun armement n'y soit jamais déployé: mieux vaut, en effet, prévenir que guérir. L'Égypte estime qu'il faut considérer l'espace comme le patrimoine commun de l'humanité, ce qui devrait exclure toute tentative d'un État de le monopoliser. Elle considère en outre que les accords et déclarations bilatéraux ou unilatéraux, s'ils jouent un rôle utile pour renforcer la confiance, ne mettent pas en cause la nécessité d'adopter un instrument multilatéral contraignant relatif à la prévention de la course aux armements dans l'espace, couvrant aussi les armes antisatellites basées à terre. L'Égypte espère que ce traité sera négocié bientôt à la Conférence du désarmement.

L'Iran a déclaré que l'espace étant le patrimoine commun de l'humanité, il importe d'assurer la sécurité des activités spatiales pour les générations futures. Tous les États ont le droit de tirer parti des avantages des technologies spatiales, dont les nombreuses applications s'étendent de l'exploitation des ressources naturelles à la surveillance climatique, par exemple. Il importe donc que la sécurité règne dans l'espace extra-atmosphérique, qui doit demeurer pacifique. La communauté internationale doit agir pour éviter que la course aux armements ne se propage dans l'espace. L'Iran, en tant que pays spatial, est d'avis que tous les efforts doivent être consentis pour éviter le déploiement d'armes dans l'espace. Il estime que les mesures de confiance non contraignantes ne sont pas suffisantes à cet égard. C'est pourquoi la négociation autour d'un instrument juridique contraignant relatif à la prévention de la course aux armements dans l'espace devrait être au cœur des travaux de la Conférence du désarmement. Le projet de traité sino-russe est une étape intéressante sur le chemin de l'adoption d'un instrument contraignant.

Pour l'Inde, l'espace extra-atmosphérique doit devenir non pas le champ d'expression de politiques concurrentes, mais plutôt la «nouvelle frontière» de la coopération. Les nations présentes dans l'espace ont donc la responsabilité de contribuer à sa préservation en tant qu'héritage commun de l'humanité. Opposée à la militarisation de l'espace, l'Inde soutient les initiatives internationales pour améliorer la sécurité dans l'espace. Elle estime que les mesures de confiance jouent à cet égard un rôle certes nécessaire, mais seulement complémentaire à un instrument juridiquement contraignant.

Le Bélarus regretté le manque d'intérêt de la Conférence du désarmement pour un débat sérieux autour de l'adoption d'un traité sur l'interdiction de la militarisation de l'espace, de nombreuses délégations préférant s'intéresser aux travaux d'autres instances. Or, la prévention de la course aux armements dans l'espace reste l'un des points les plus importants à l'ordre du jour de la Conférence du désarmement. Le Bélarus estime que le projet de traité relatif à la prévention du déploiement d'armes dans l'espace déposé par la Fédération de Russie et la Chine est un bon point de départ dans le traitement de cette question.

M. VICTOR VASILIEV, Président du groupe d'experts gouvernementaux sur les mesures de transparence et de confiance relatives aux activités spatiales, a observé que l'importance de l'espace a crû de manière exponentielle depuis vingt ans: aujourd'hui, plus de 130 États ont des activités spatiales. Il faut donc mettre en place des mesures complémentaires pour la sécurité de l'espace et la pérennité des activités spatiales, en particulier pour prévenir les risques induits par les débris spatiaux. Les travaux du groupe d'experts gouvernementaux s'inscrivent dans le cadre général des lignes directrices de l'Assemblée générale sur les mesure de confiance, adoptées il y a près de vingt-cinq ans. Les mesures de confiance relatives aux activités spatiales doivent faciliter la réalisation de plusieurs objectifs: réduction des tensions internationales, désarmement, exploitation sûre et durable de l'espace extra-atmosphérique et prévention des collisions et des situations dangereuses (et, par conséquent, prévention de la dissémination de débris spatiaux). M. Vasiliev a cité un certain nombre de mesures susceptibles de conférer davantage de transparence aux activités dans l'espace extra-atmosphérique: visites, échanges d'information, notifications de lancement d'engins ou de débris, adoption d'un code de conduite, ainsi que le propose l'Union européenne, coopération et consultations internationales, plaidoyer et enfin coordination des activités spatiales.

Les experts gouvernementaux sont d'avis que ces mesures doivent compléter le cadre juridique international relatif aux activités dans l'espace, ne pas limiter les obligations juridiques en vigueur ni entraver l'utilisation pacifique de l'espace extra-atmosphérique. Les mesures de confiance ne remplacent pas non plus les accords juridiquement contraignants. La plupart des experts estiment que ces mesures doivent être facultatives; ils estiment aussi qu'une fois adoptées, certaines de ces mesures pourraient avoir force de loi, en particulier si leur mise en œuvre exige la promulgation de lois au niveau national.

L'Algérie a déclaré que la question de la sûreté de l'espace est déterminante pour la communauté internationale, vu les nombreuses applications de l'espace à la vie civile. Les travaux du groupe d'experts gouvernementaux et l'initiative de l'Union européenne soulignent l'importance de la transparence des activités spatiales. L'Algérie estime que ces démarches se complètent. Mais elle est d'avis que la communauté internationale doit adopter un traité international juridiquement contraignant à ce sujet. Le projet sino-russe peut être une source d'inspiration à cet égard. Le représentant a demandé à M. Vasiliev des précisions sur le caractère facultatif ou non des mesures de confiance.

M. VASILIEV a précisé que certaines des obligations juridiques actuelles des États sont basées sur l'application de mesures de confiance, comme par exemple l'obligation de signaler les phénomènes planétaires ou spatiaux qui pourraient avoir une incidence sur la sécurité dans l'espace. Une majorité d'experts gouvernementaux souscrit à cette interprétation, a souligné le Président du groupe d'experts gouvernementaux.

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DC13/012F