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CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT: LE PRÉSIDENT SOUMET UNE PROPOSITION INFORMELLE SUR LE PROGRAMME DE TRAVAIL DE LA SESSION DE 2013

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement, qui a entamé la semaine dernière les travaux de sa session de 2013, a entendu, ce matin, les déclarations de l'Argentine, de la Suisse, de l'Algérie, de la France, de l'Italie et de l'Autriche. Elle a également entendu son Président, l'Ambassadeur András Dékány de la Hongrie, qui l'a tenue informée des consultations qu'il a menées à bien en vue de faire avancer les travaux.

M. Dékány a indiqué qu'il avait fait distribuer une première version informelle de la proposition de programme de travail qu'il soumet pour la session de 2013 de la Conférence. Ce document représente l'évaluation globale de la présidence, à ce stade, quant à la meilleure façon d'avancer au sein de la Conférence; il constitue un effort honnête de sortir de l'impasse dans laquelle se trouve la Conférence depuis 16 ans, a souligné M. Dékány. La nouveauté de l'approche proposée procède de la fusion des deux questions que sont le désarmement nucléaire et l'interdiction des matières fissiles au sein d'un seul et même groupe de travail, a-t-il expliqué. Ces deux questions ne doivent en effet pas être perçues comme entrant en compétition l'une avec l'autre.

Les délégations qui se sont exprimées ce matin ont notamment attiré l'attention sur les résultats de la dernière session de l'Assemblée générale des Nations Unies s'agissant des questions de désarmement, notamment la mise en place d'un groupe de travail de l'Assemblée générale pour faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire. Ils ont également mis l'accent sur la nécessité pour la Conférence de sortir de l'impasse dans laquelle elle se trouve depuis maintenant seize ans. L'attention a également été attirée sur plusieurs rendez-vous importants de cette année 2013 en matière de désarmement, parmi lesquels la conférence d'examen de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques; la tenue, au mois de mai, à Genève, du Comité préparatoire de la Conférence d'examen de 2015 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires; ou encore, en septembre, la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le désarmement nucléaire.

Ce matin, la Conférence a par ailleurs accepté la demande des pays suivants de participer à ses travaux en tant qu'observateurs: Bosnie-Herzégovine, Ghana, Philippines et ex-République yougoslave de Macédoine.


La prochaine séance plénière publique de la Conférence du désarmement se tiendra le mardi 5 février, à 10 heures.


Déclaration du Président

Le Président de la Conférence, l'Ambassadeur András Dékány de Hongrie, a tenu la Conférence informée des consultations qu'il a menées à bien en vue de faire avancer les travaux de cette instance et a indiqué avoir fait distribuer une première version informelle de sa proposition de programme de travail pour la Conférence. Il s'agit d'un document informel évolutif aux fins de parvenir à un document qui puisse être adopté par consensus. Ce document représente l'évaluation globale de la présidence, à ce stade, quant à la meilleure façon de permettre aux travaux de la Conférence d'avancer; il constitue un effort honnête de sortir de l'impasse dans laquelle se trouve la Conférence depuis 16 ans. Il envisage que les quatre questions essentielles seraient traitées quant au fond. La nouveauté de l'approche proposée procède de la fusion des deux questions que sont le désarmement nucléaire et l'interdiction des matières fissiles au sein d'un seul et même groupe de travail, a expliqué M. Dékány. Ces deux questions ne doivent en effet pas être perçues comme entrant en compétition l'une contre l'autre, comme en témoigne d'ailleurs le fait qu'elles ont traditionnellement été traitées au sein de la Conférence sous le même point de l'ordre du jour – le point 1. Placer le travail sur les matières fissiles sous le parapluie du désarmement nucléaire souligne clairement l'importance que la Conférence attache à la cessation de la course aux armements nucléaires et à l'élimination des armes nucléaires, a souligné M. Dékány. Il s'est dit pleinement conscient qu'un programme de travail doit s'accompagner aussi d'un plan de mise en œuvre concerté et a assuré ne pas avoir oublié les questions de la sélection des présidents des groupes de travail et de l'allocation de temps pour les réunions desdits groupes. Il s'agit là d'éléments importants du paquet final, a-t-il affirmé. Néanmoins, a-t-il ajouté, «je dois d'abord voir si l'approche que je propose constitue une base suffisamment bonne pour avancer vers le consensus». Le Président a précisé que selon lui, le groupe de travail fusionné qu'il propose de mettre en place pour traiter de deux questions fondamentales a besoin du double de temps que les deux autres. Il a précisé que son équipe et lui-même restent disposés à tenir avec chacun des consultations supplémentaires.

Aperçu du débat

L'Argentine a réagi à la proposition de programme de travail du Président de la Conférence en assurant de la souplesse que sa délégation manifestera à l'égard de ce nouveau texte. Aussi, l'Argentine fait-elle confiance au diagnostic de la présidence quant à la mesure dans laquelle ce texte peut servir de base réelle pour avancer en vue de l'adoption d'un programme de travail. La priorité est d'avancer de façon décisive sur le désarmement nucléaire, a-t-elle ajouté. Évoquant les causes qui empêchent la Conférence d'avancer, l'Argentine a cité les différentes perceptions de sécurité des États membres, qui empêchent de trouver un dénominateur commun minimum. Un simple calendrier d'activités pour chacun des sujets inscrits à l'ordre du jour et sans préciser les mandats pourrait constituer un progrès concret vers la recherche de nouveaux consensus et permettrait d'analyser la possibilité de lancer des négociations sur ces points.

La Suisse a souligné que l'Assemblée générale, en établissant des mécanismes chargés d'aborder des thématiques couvertes de longue date par la Conférence du désarmement, indique qu'elle est attachée à ce que des progrès soient réalisés en matière de désarmement et de non-prolifération nucléaires et que la Conférence a un rôle central a jouer sur ces question. Mais elle montre aussi que la communauté des États n'est pas disposée a rester inactive si la Conférence continue a être dans l'incapacité d'assumer ses fonctions et à permettre que des sujets centraux pour la promotion de la sécurité internationale restent éternellement en jachère. La Suisse demeure convaincue qu'en principe la Conférence reste le cadre privilégié pour faire progresser ces thématiques. En même temps, sa revitalisation doit continuer de représenter un objectif prioritaire. À cet égard, l'adoption et la mise en œuvre d'un programme de travail constituent la meilleure mesure de revitalisation de la Conférence et la Suisse salue les efforts du Président à cette fin. Il lui semble toutefois important d'avoir déjà à l'esprit que si la Conférence ne devait pas être en mesure d'adopter et de mettre en œuvre un programme de travail, la question de sa revitalisation et de la manière d'y procéder se posera immanquablement. La Suisse s'engagera activement si un tel cas de figure devait se présenter. Elle entend par ailleurs participer activement aux travaux du groupe de travail a composition non limitée chargé de faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire, et s'appliquera à faire en sorte que l'objectif qui lui a été fixé d'élaborer des propositions pour faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire se réalise. Le représentant suisse a également relevé que l'année 2013 sera marquée par la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale de septembre prochain et la deuxième session du Comité préparatoire a la Conférence d'examen de 2015 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui se tiendra à Genève ce printemps. La Suisse salue par ailleurs la tenue d'une nouvelle réunion des P5 a Genève sous présidence russe en avril prochain dans le cadre de l'engagement des États dotés d'armes nucléaires à accélérer les progrès concrets sur les mesures tendant au désarmement nucléaire.

L'Algérie a déclaré que l'impasse prolongée de la Conférence pour la seizième année est un réel motif de préoccupation quant à sa pertinence pour apporter des réponses adéquates aux multiples menaces qui fragilisent davantage la paix et la sécurité internationales. Elle estime que la première priorité pour la Conférence est le désarmement nucléaire; à cet égard, la mise en œuvre intégrale et effective du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) à l'échelle universelle est nécessaire. Malheureusement, on ne peut que constater le peu de progrès réalisé dans ce domaine. Le véritable obstacle qui empêche le désarmement nucléaire réside dans les doctrines de dissuasion. Voilà l'enjeu: tant que les États dotés de l'arme nucléaire et leurs alliés s'appuient sur les armes nucléaires et poursuivent leur modernisation comme expression de supériorité et moyen pour sanctuariser leurs intérêts, d'autres, pour les mêmes motifs ou pour se prémunir contre des attaques nucléaires pourraient être tentés de les avoir. Dans cet ordre d'idées, la conclusion d'un traité vérifiable sur l'interdiction de la production des matières fissiles pour la fabrication d'armes nucléaires n'aurait de sens que si elle assure que cet instrument s'inscrit dans la voie du désarmement, c'est à dire le traitement approprié de la question des stocks de matières fissiles. L'Algérie souhaite que les débats du Comité préparatoire à la Conférence d'examen du TNP en avril prochain démonteront que des progrès sont en voie d'être réalisés dans le domaine du désarmement, conformément aux engagements pris. L'Algérie déplore par ailleurs que la région du Moyen Orient demeure dépourvue du statut de zone exempte d'armes nucléaires, ainsi que le report de la conférence internationale sur le sujet qui devait se tenir en décembre dernier.

S'agissant des travaux de la Conférence, l'Algérie remercie la présidence pour le document non officiel soumis ce matin et qui est actuellement en cours d'examen à Alger. Elle continue de considérer que la décision CD/1864 adoptée en 2009, s'il s'agit d'un document de compromis, aspirait à lancer une dynamique de consultations dans la perspective de parvenir, à terme, à des négociations sur l'ensemble des questions. Elle est en outre favorable, dans 'attente d'un programme de travail, à la tenue de discussions en plénière officielle sur les questions principales sans mandat précis. En ce qui concerne les résolutions récentes de l'Assemblée générale mettant en place des mécanismes pour aborder des sujets relevant du mandat de la Conférence, l'Algérie, si elle en partage les objectifs, estime cependant que ces mécanismes risquent de porter préjudice à la Conférence, sans apporter des solutions efficaces aux problèmes politiques qui l'ont empêchée de travailler.

La France a tenu à souligner ses priorités en indiquant, à l'intention des membres de la Conférence, que «plus que jamais, la question des armements conventionnels et de leur dissémination doit être au cœur de nos préoccupations». À l'heure où la France est engagée, en appui des forces maliennes et aux côtés des États de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et du Tchad, dans une «importante opération contre les groupes armés terroristes au Nord du Mali», la situation dans la région sahélienne démontre malheureusement les risques associés à la dissémination de ce type d'armements. C'est une priorité et une urgence, que la communauté internationale ne peut plus remettre au lendemain, estime la France, ajoutant que «le traité sur le commerce des armes devrait nous fournir bientôt un outil efficace». «En mars prochain, nous devrons parvenir à un accord sur le texte de ce traité, sans remettre en cause les équilibres et les compromis auxquels nous sommes parvenus en juillet»; le véritable accord idéal est celui qui fera une différence sur le terrain.

La France a par ailleurs rappelé l'importance qu'elle attache aux discussions dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques. Elle a affirmé que cette Convention est «l'enceinte naturelle, à vocation générale, pour répondre aux défis du désarmement humanitaire», avant de rappeler qu'elle a été désignée pour assurer la présidence de la prochaine réunion des États parties, en novembre prochain. En matière de désarmement et de non-prolifération, a en outre indiqué la France, l'année 2013 sera notamment marquée par la conférence d'examen de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques et par la tenue, en mai, à Genève, du Comité préparatoire de 2015 de la Conférence d'examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Sur le volet du désarmement nucléaire, «l'essentiel pour nous est d'agir de manière concrète et progressive, sans nous disperser à la poursuite d'objectifs sans doute estimables mais irréalistes», a affirmé la France. «Nous avons une feuille de route. C'est le plan d'action du TNP, adopté par consensus en 2010. Nous devons nous y tenir», a-t-elle déclaré. Le plan d'action du TNP de 2010 nous fixe une priorité, «très explicitement mentionnée par l'action 15 du plan d'action», a déclaré la France: c'est le démarrage immédiat de la négociation d'un traité sur l'interdiction de la production de matière fissile pour les armes nucléaires (FMCT en anglais) à la Conférence du désarmement. C'est la raison pour laquelle la France a soutenu, lors de la dernière Assemblée générale des Nations Unies, l'adoption de la résolution présentée par le Canada concernant le FMCT et qui prévoit notamment la création d'un groupe d'experts gouvernementaux à Genève. Ce matin, la France a tenu à mettre ses collègues en garde contre le risque de dispersion des enceintes du désarmement. Enfin, la France a rappelé que la présidence a la tâche difficile de préparer et proposer un programme de travail «en ayant à l'esprit la décision sur un programme de travail adopté par la Conférence le 29 mai 2009 – CD/1864 – ainsi que d'autres propositions pertinentes passées, présentes et futures», selon les termes de la résolution 67/72 de l'Assemblée générale. Cette résolution «donne une orientation claire et le document CD/1864, dernier programme de travail adopté par la Conférence, fournit une référence incontournable», a souligné la France.

L'Italie a constaté que si des progrès ont été enregistrés sur la scène du désarmement, ce n'était pas le cas pour ce qui est des travaux de la Conférence du désarmement. Elle a rappelé que pour elle, comme pour la communauté internationale, le désarmement nucléaire constitue une priorité. Tout en se réjouissant du succès des négociations entre les États-Unis et la Fédération de Russie qui ont abouti à la signature et à l'entrée en vigueur en février 2011 du nouveau traité START et du résultat positif de la Conférence d'examen de 2010 du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), l'Italie souligne que ces résultats appartiennent au passé et le moment est venu de regarder vers l'avant. Relevant l'engagement des «P5» à mener à bien la mise en œuvre du document final de la Conférence d'examen de 2010 du TNP, l'Italie a dit attendre les résultats du prochain cycle de consultations des «P5», qui doit se tenir à Genève. Parallèlement, l'Italie regrette profondément qu'ait été reportée la Conférence sur un Moyen-Orient exempt d'armes nucléaires et d'autres armes de destruction massive. Elle estime néanmoins que «nous n'avons jamais été aussi près que maintenant d'être en mesure de convoquer une telle Conférence» et exhorte tous les acteurs à franchir la dernière étape et à faire tout leur possible pour créer les conditions permettant à la Conférence de se tenir sans délai. Une autre année d'impasse à la Conférence est tout simplement inacceptable, a poursuivi l'Italie; la Conférence doit reprendre ses travaux et le plus tôt sera le mieux. À cet égard, elle pense que le programme de travail contenu dans le document CD/1864 pourrait encore être viable et mérite d'être appliqué. Néanmoins, l'Italie reste disposée à explorer d'autres solutions, telle que celle sur laquelle travaille actuellement la présidence de la Conférence. Rappelant que les négociations sur un traité sur l'arrêt de la production de matières fissiles au sein de la Conférence se font attendre depuis longtemps, l'Italie s'est dite consciente que de graves questions doivent être abordées durant les négociations, dont celle des stocks; mais cette question devrait être traitée durant les négociations et non pas constituer une condition préalable pour les négociations.

L'Autriche a indiqué apprécier les efforts déjà entrepris par la présidence de la Conférence pour lui permettre de se rapprocher du commencement de ses travaux. Elle a remercié le Président pour sa proposition de programme de travail et a indiqué qu'elle allait l'examiner avec soin. L'Autriche a ensuite souligné que la dernière session de l'Assemblée générale avait été remarquable par le message clair exprimé par l'écrasante majorité des États Membres de l'ONU quant au caractère inacceptable du blocage des négociations multilatérales dans le domaine du désarmement, lequel ne doit plus se faire passer pour une crise temporaire. L'Autriche espère que la Conférence répondra à ces expressions quant à l'urgence de la question et qu'émergera sans délai la volonté politique nécessaire pour entamer les travaux et parvenir à l'adoption, et surtout l'application, d'un programme de travail. L'Autriche espère également que les résolutions 67/53 et 67/56 de l'Assemblée générale (qui visent à promouvoir un travail de fond sur les questions essentielles de l'ordre du jour du désarmement nucléaire et de la non-prolifération) et la réunion de haut niveau de l'Assemblée générale sur le désarmement nucléaire qui doit être convoquée en septembre 2013 contribueront aux progrès cette année. Étant l'un des initiateurs de la résolution 67/56, l'Autriche se félicite particulièrement de la mise en place d'un groupe de travail à composition non limitée de l'Assemblée générale pour faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire. L'Autriche accorde la priorité au multilatéralisme qu'elle considère comme essentiel pour progresser, au niveau international, sur les questions de désarmement et de non-prolifération. Le pire cas de figure serait, du point de vue de l'Autriche, de poursuivre sur la voie actuelle de l'érosion du régime de désarmement et, de ce fait, de l'ensemble du mécanisme de désarmement. Il en va de notre responsabilité collective d'assurer des progrès substantiels, a conclu l'Autriche.


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DC13/003F