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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME CONCLUT SES DÉBATS SUR LES QUESTIONS DE FOND EN SE PENCHANT SUR L'ASSISTANCE TECHNIQUE DANS LE DOMAINE DES DROITS DE L’HOMME

Compte rendu de séance
Il est saisi d'un rapport sur l'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme au Kirghizistan et conclut l’examen de la situation en Haïti

Le Conseil des droits de l'homme a conclu ce matin ses débats sur les questions de fond en consacrant la matinée aux questions relatives à l'assistance technique et au renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme. Il a ainsi achevé le débat interactif, entamé hier, avec l'Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, puis tenu son débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités après avoir été saisi, notamment d'un rapport sur l'assistance technique et la coopération dans le domaine des droits de l'homme au Kirghizistan.

Les États suivants ont fait des déclarations dans le cadre de l'examen du rapport sur la situation des droits de l'homme en Haïti: Honduras (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes), Mexique, Venezuela, Espagne, Cuba, Allemagne, Chili, Suisse, Guatemala, Bénin, Maroc, Brésil, Royaume-Uni, République dominicaine, Luxembourg, Uruguay et Nigéria. Sont aussi intervenus le Fonds des Nations Unies pour l'enfance et trois organisations non gouvernementales: Fédération internationale des ligues de droits de l'homme, Human Rights Watch et American Civil Liberties Union. Plusieurs délégations se sont dites favorables à l'ouverture d'un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l'homme en Haïti pour remplacer la section chargée des droits de l'homme de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti. D'autres ont appelé la communauté internationale à assumer ses engagements pour la reconstruction de ce pays. L’Expert indépendant M. Michel Forst, a conclu le débat en se félicitant des mesures énergiques prises par Haïti pour instaurer l'état de droit et reconstruire le pays. Il a appelé la communauté internationale à ne pas relâcher son soutien financier.

Mme Kyung-wha Kang, Haut-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, a ensuite fait un exposé sur les services d'assistance technique et de renforcement des capacités, en particulier ceux fournis par le Haut-Commissariat et les organismes compétents des Nations Unies, et sur les succès, les pratiques optimales et les problèmes dans ce domaine. Elle a notamment cité des exemples concrets des succès et de pratiques optimales, notamment les services d'experts fournis à la Tunisie et un appui technique à l'Union européenne dans le cadre des activités de son agence de coopération pour la gestion des frontières extérieures. S'agissant du rapport du Haut-Commissariat sur le Kirghizistan, le Haut -Commissariat note les graves lacunes institutionnelles qui entravent l'administration de la justice et compromettent l'état de droit dans ce pays, tout en prenant acte de l'esprit de coopération régnant entre le Gouvernement et le Haut-Commissariat. La Haut-Commissaire se rendra à Bichkek dans les prochains jours. Intervenant à titre de pays concerné, le Kirghizistan a regretté que les critiques figurant dans ce rapport occultent les progrès réalisés.

M. Deepika Nelum Udagama, Présidente du Conseil d'administration du Fonds volontaire des Nations Unies pour la coopération technique dans le domaine des droits de l'homme, a souligné que les besoins en matière de financement ont considérablement crû ces dernières années et que la situation de 2012 est préoccupante, lançant un appel aux contributeurs du Fonds.

Les délégations suivantes ont participé au débat général: Chypre (au nom de l'Union européenne), Brésil (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes), Chine, États-Unis, Indonésie, Thaïlande, Suisse, Tunisie, Maroc, Algérie, Soudan, République de Corée et Royaume-Uni, le Népal intervenant en fin de séance pour exercer le droit de réponse s'agissant de l'intervention faite au nom de l'Union européenne. La Fédération internationale des ligues de droits de l'homme, UN Watch, Amnesty International, Verein Südwind Entwicklungspolitik et Association des citoyens du monde ont également pris la parole. Les orateurs ont notamment observé qu'il est crucial de renforcer les synergies entre les activités de coopération technique, d'une part, et les organes conventionnels, le Conseil des droits de l'homme, l'Examen périodique universel et les procédures spéciales, d'autre part. Il a également été suggéré d'évaluer et comparer les projets d'assistance technique et de coopération dans le domaine des droits de l'homme afin d'en tirer des enseignements et ainsi pouvoir optimiser l'impact de l'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme.


À sa prochaine réunion publique, demain matin à 10 heures, le Conseil entamera le processus d'adoption de projets de résolution et de décision dont il est saisi à la présente session, qui se termine vendredi.

Examen du rapport sur la situation des droits de l'homme en Haïti

Suite du débat interactif avec l'Expert indépendant

Le Honduras a fait part de la solidarité du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC) avec le peuple haïtien. Ces pays saluent la ratification du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels par Haïti, qui ouvre des perspectives intéressantes pour ce pays dans les domaines de la santé, du logement et de l'éducation en particulier. Le GRULAC estime que l'Expert indépendant joue un rôle important pour sensibiliser la communauté internationale aux besoins d'Haïti. Le Brésil a ajouté que l'Expert indépendant peut également jouer un rôle important pour encourager la communauté internationale à aider Haïti à surmonter les défis en matière de droits de l'homme. Par ailleurs, le Brésil souhaiterait que M. Forst explique comment la série d'ateliers thématiques qu'il propose sur les droits économiques, sociaux et culturels avec la participation des titulaires de mandats des procédures spéciales est susceptible de permettre d'améliorer la situation sur le terrain.

Le Mexique a remercié l'Expert indépendant et souligné, avec lui, l'importance d'intégrer une dimension de droits de l'homme aux efforts de redressement d'Haïti. Le Mexique collabore pour sa part avec Haïti dans les domaines de la santé, de l'agriculture et du développement socioéconomique, en particulier. Le Mexique est favorable à l'ouverture d'un bureau du Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour remplacer, à terme, les activités du bureau «Droits de l'homme» de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Le Guatemala se félicite de l'action du Gouvernement haïtien en vue du redémarrage économique du pays. Le Guatemala, en tant que pays vulnérable aux catastrophes naturelles, a expérimenté lui-même l'importance capitale de l'assistance humanitaire dans les différentes phases de récupération et de reconstruction. Il exhorte tous les acteurs à intégrer la dimension droits de l'homme dans ses activités d'appui à la population.

Le Bénin a salué l'esprit d'ouverture et de dialogue dont font preuve les autorités haïtiennes, se félicitant de l'évolution positive en matière de droits de l'homme. Il se félicite lui aussi de l'effort entrepris en faveur du redémarrage économique dans les zones urbaines comme rurales. Il invite les autorités de Port-au-Prince à davantage coopérer avec les organes conventionnels. Le Nigéria, a pour sa part salué les initiatives du Gouvernement, dont le programme «pas un jour de plus en prison», les initiatives pour la reconstruction et la reprise économique ou encore les efforts de l'Ombudsman pour établir des bureaux régionaux.

Le Venezuela observe, avec l'Expert indépendant, que l'exclusion économique est une menace pour la stabilité politique du pays. Le Venezuela déplore la crise humanitaire qui frappe Haïti depuis le tremblement de terre, en particulier l'épidémie de choléra, qui pourrait affecter plus de 170 000 personnes. Les Nations Unies doivent assumer leur responsabilité de mettre un terme à cette épidémie mortelle, en soignant les personnes atteintes et en garantissant l'accès à l'eau potable. Le Venezuela apporte, pour sa part, une importante aide matérielle aux Haïtiens. Cuba, qui estime qu'Haïti ne doit pas devenir un protectorat des Nations Unies, a demandé la communauté internationale d'assumer les engagements pris pour la reconstruction de ce pays. Cuba axe sa propre action sur la réponse concrète et économique aux besoins sanitaires de la population.

L'Espagne estime que le Conseil doit se concentrer sur le rétablissement de l'État de droit et la réforme du système judiciaire, par le biais de l'octroi de l'assistance technique réclamée. La question de la police n'est peut-être pas le problème le plus grave dans un pays comme Haïti, mais, mal équipée et mal formée, elle doit néanmoins être épaulée par la MINUSTAH. Le Conseil doit travailler avec les ordres religieux, vecteur d'éducation important en Haïti, à la reconstruction du système éducatif. Enfin, il appartient à la justice haïtienne de fixer ses propres priorités s'agissant de la question des poursuites contre l'ancien dictateur Duvalier. Le Chili est préoccupé par les difficultés auxquelles se heurte la réforme de la justice, même si l'on constate des progrès encourageants. Il appelle la communauté internationale pour qu'elle continue d'appuyer les efforts qu'exige ce défi. L'exemple à suivre à cet égard est illustré par le financement de l'assistance juridique assuré par l'Union des nations sud-américaines (UNASUR). L'Uruguay s'est félicité que l'état de droit soit une des quatre priorités décidées par les autorités haïtiennes, avec l'éducation, l'emploi et l'énergie. À cause du danger potentiel de l'extrême pauvreté et de l'exclusion, l'Uruguay est d'avis qu'il faut également accorder la priorité la reconstruction et la reprise économique. Dans ce contexte les bailleurs de fonds doivent appuyer les stratégies du gouvernement haïtien en privilégiant la reprise économique, la reconstruction ou encore les droits sociaux culturels de la population. En tant que coordinateur du groupe des amis d'Haïti, l'Uruguay est d'avis que le Haut-Commissariat devrait ouvrir une antenne locale, en remplacement de la section droits de l'homme de la MINUSTAH.

La Suisse juge d'une grande importance les activités du traitement du passé et le travail de mémoire. C'est la raison pour laquelle la Suisse soutient l'idée proposée par l'UNASUR de créer un institut haïtien de recherche et de formation sur les droits de l'homme. Elle a demandé à l'Expert indépendant ses recommandations pour assurer la pérennité, en termes de ressources et de personnel notamment, de l'Institut haïtien de recherche et de formation sur les droits de l'homme et pour favoriser la collaboration avec les organisations de défense des droits de l'homme.

Le Royaume-Uni a rappelé que le renvoi forcé de ressortissants haïtiens par des États tiers demeurait un problème. Il encourage les autorités de Port-au-Prince à régler le problème urgent constitué par l'inexistence de documents personnels des citoyens haïtiens, des certificats de naissance en particulier. Il s'agit d'un problème pour les Haïtiens qui migrent ou qui entrent illégalement dans des pays tiers et qui ne peuvent être régularisés en conséquence. Le Royaume-Uni appelle aussi Haïti à ratifier la Convention de La Haye sur l'adoption. Le Maroc soutient à ce sujet l'appel lancé aux organisations internationales et aux pays donateurs par M. Forst à ne plus financer des structures d'adoption fonctionnant sans autorisation légale. D'une manière plus générale, il se félicite qu'un grand nombre des recommandations de l'Expert indépendant au sujet des violations à l'égard des femmes aient été mises en œuvre. Quant à l'accueil d'enfants haïtiens.

La République dominicaine a noté que si tout État, y compris Haïti, avait pour devoir de respecter les droits de l'homme, il convenait de considérer au préalable la situation catastrophique que continue de vivre la population haïtienne. Cela signifie qu'avant de faire des critiques, de lancer des accusations et d'adresser des condamnations à la République sœur d'Haïti, il conviendrait de réaliser que nombre d'actes effectivement délictueux étaient dus à la faim, au désespoir et aux nouvelles stratégies de survie imaginées par une population livrée à un abandon quasi-total. Il convient, en d'autres termes, de prendre en compte l'état de désespérance dans lequel vit la grande majorité de la population.

L'Allemagne a demandé à l'Expert indépendant comment améliorer concrètement les conditions de vie dans les prisons haïtiennes. L'Allemagne estime en outre que la création d'un poste de vice-ombudsman pour les droits des femmes améliorerait la capacité d'action du protecteurs des droits. Le Luxembourg a souhaité avoir l'avis de l'Expert indépendant sur la proposition de l'ancien Président américain Bill Clinton visant à appuyer l'autosuffisance alimentaire. De quelle manière le Conseil pourrait-il promouvoir cette idée ?

La représentante du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a souligné le manque de fonds disponibles et la faible présence d'organisations non gouvernementales depuis le séisme de 2010. Elle s'est ensuite inquiétée de la situation des enfants en conflit avec la loi, détenus dans des centres qui parfois représentent un danger réel pour eux. Ainsi seulement 9% de ces institutions évaluées n'ont pas d'autorisation gouvernementale et 30% devraient fermer en raison des cas d'abus, de violence ou d'exploitation des enfants.

Organisations non gouvernementales

La Fédération internationale des ligues de droits de l'homme a constaté que si le nombre de personnes déplacées à cause du séisme a diminué, leur situation n'en reste pas moins préoccupante en ce qu'elles continuent de vivre dans des conditions de grandes insalubrité et vulnérabilité. Le Gouvernement doit aller au-delà des efforts et des promesses des autorités, notamment en adoptant une véritable politique publique du logement. De même, la situation des personnes incarcérées nécessite toute l'attention du Gouvernement. De son côté, Human Rights Watch a déploré le nombre persistant des crimes sexistes et a appelé le Gouvernement à lutter contre ce phénomène et à assurer la formation des femmes. En outre, l'impunité dont continue de jouir l'ancien président Duvalier doit maintenant prendre fin, il doit répondre des nombreux crimes qu'il a commis. Enfin, American Civil Liberties Union s'est déclarée troublée par les expulsions d'haïtiens par les États-Unis. Les autorités américaines expulsent entre 50 à 60 haïtiens par mois, dont la plupart sont des résidents ayant vécu aux États-Unis depuis longtemps, des enfants ou des malades mentaux, en violation des engagements internationaux des États-Unis, a encore déploré la représentante.

Conclusion de l'expert indépendant

M. MICHEL FORST, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, s'est félicité des mesures énergiques prises par Haïti pour instaurer l'état de droit et appelé la communauté internationale à ne pas relâcher son soutien financier dans ces circonstances. L'Expert indépendant est en contact avec les milieux d'affaires haïtiens qui pointent certaines incertitudes juridiques comme explication de la lenteur de l'amélioration du climat des affaires. L'exclusion économique est une menace pour la jouissance des droits de l'homme, d'où l'importance d'agir dorénavant pour la jouissance effective des droits à la santé et à l'éducation, notamment. L'Expert indépendant entend proposer à Haïti un cadre légal le mettant à même d'agir en ce sens. M. Forst a en outre déclaré que l'ouverture d'un bureau du Haut-Commissariat doit être envisagée, la relève de la MINUSTAH devant être assurée. Les activités conjointes du bureau au plan international et de l'Office de la protection du citoyen au niveau national pourraient remplacer à terme l'action de la Mission de stabilisation. L'Expert indépendant a par ailleurs fait valoir que le processus de certification des personnels de police mis en place en Haïti peut servir de modèle pour d'autres pays.

Assistance technique et renforcement des capacités

Exposé annuel sur les services d'assistance technique et de renforcement des capacités fournis par le Haut-Commissariat et présentation de rapports

MME KYUNG-WHA KANG, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a dressé un bilan des grands défis, des pratiques optimales et des leçons retenues en termes d'assistance et de renforcement des capacités dans les efforts fournis par les Nations unies en général et le Haut-Commissariat en particulier. L'objectif de notre assistance technique, a-t-elle rappelé, est de fournir un soutien de qualité en temps opportun aux États membres et aux autres parties prenantes afin de les assister dans leurs efforts en faveur de la mise en œuvre de leurs obligations dans le domaine des droits de l'homme. Les États sont d'abord encouragés à ratifier les instruments internationaux des droits de l'homme, puis à en transcrire les dispositions dans leur législation. Par ailleurs, la coopération technique est guidée par les six grandes priorités thématiques du Haut-Commissariat dont la lutte contre l'impunité, le renforcement de l'imputabilité, de l'état de droit et de la démocratie.

Mme Kang a cité des exemples concrets des succès et des pratiques optimales mises en avant par le Haut-Commissariat. Elle a cité l'expertise fournie à la Tunisie sur le rôle des partis politiques et de la société civile. Elle a mentionné les conseils techniques fournis à divers pays dans la gestion de l'administration pénitentiaire. En matière de lutte contre la discrimination, le Haut-Commissariat a poursuivi son travail sur les castes au Népal, par exemple. S'agissant de la pauvreté et des droits économiques, sociaux et culturels, il a continué à coopérer étroitement avec les États membres. Le Haut-Commissariat a aussi poursuivi son engagement prioritaire sur les problèmes de migration en fournissant notamment un appui technique à l'Union européenne dans le cadre des activités de l'Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures (FRONTEX). Mme Kang a aussi mentionné le travail de sa représentation au sein de la Mission de l'ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).

Parmi les leçons tirées de cet action, le Haut-Commissariat constate que pour garantir le respect des droits de l'homme dans la durée, les partenaires nationaux, acteurs de la société civile compris, doivent être impliqués activement dans les projets de coopération technique depuis la phase préparatoire de concertation et de définition des actions envisagées à leur mise en œuvre. L'assistance technique exige, par ailleurs, une mobilisation constante de ressources humaines et financières, a rappelé la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme.

Mme Kang a également présenté le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur l'assistance technique et la coopération dans le domaine des droits de l'homme au Kirghizistan (A/HRC/20/12), qui passe en revue les principaux faits nouveaux intervenus dans le domaine des droits de l'homme et décrit les mesures d'assistance technique que le Haut-Commissariat a fournies au Gouvernement kirghize. Le rapport note en particulier de graves lacunes institutionnelles qui entravent l'administration de la justice et compromettent l'état de droit et souligne que les maigres progrès réalisés dans ce domaine ont des répercussions sur les efforts de réconciliation et l'instauration de la paix entre les communautés ethniques ainsi qu'entre la société civile et les autorités, et risquent ainsi de compromettre sérieusement la stabilité à long terme du pays. Le rapport décrit aussi les pratiques en vigueur en matière de détention arbitraire et de torture et relève la persistance de la discrimination fondée sur l'appartenance ethnique. Il souligne à cet égard les carences institutionnelles, le manque de capacité et parfois l'absence de volonté politique de prendre les mesures nécessaires. La Haut-Commissaire prend acte toutefois de l'esprit de coopération régnant entre le Gouvernement et le Haut-Commissariat et formule des recommandations visant à améliorer la promotion et la protection des droits de l'homme dans le pays. Mme Kang a enfin précisé que la Haut-Commissaire se rendrait à Bichkek dans les tous prochains jours.

Le rapport du Conseil d'administration du Fonds volontaire des Nations Unies pour la coopération technique dans le domaine des droits de l'homme (A/HRC/20/34 en anglais) a été présenté par sa nouvelle présidente, MME DEEPIKA NELUM UDAGAMA. Elle a rappelé que le Fonds reçoit des contributions de la part d'États et de personnes privées, dans le but de fournir un appui financier à la coopération technique internationale visant à construire ou renforcer des institutions et infrastructures ayant un impact de longue durée sur la mise en œuvre des normes internationales en matière de droits de l'homme. Le mandat du Conseil d'administration consiste à assister le Secrétaire général pour rationnaliser le travail, méthode et procédures du programme de coopération technique des Nations Unies. Depuis 2004, le conseil d'administration conseille en outre le Haut-Commissaire sur ses politiques et stratégies de renforcement de ses programmes de coopération techniques. Au lieu de financer de petits projets spécifiques, les fonds sont désormais injectés dans des acticités de terrain menées par le Haut-Commissariat, a poursuivi la présidente, ajoutant que cette définition plus large de la coopération technique a été présentée aux États membres dans un rapport publié en 2008. Par ailleurs en avril 2011, et pour la première fois de son histoire, le conseil d'administration s'est réuni hors de Genève, c'est-à-dire au Burundi et au Kenya, dans le but d'apprécier les réalisations, défis et contraintes du terrain. Mme Udagama a ensuite souligné que les besoins en matière de coopération technique et de financement avaient considérablement crus ces dernières années. Rien qu'en 2011, plus de 37 millions de dollars ont été investis, alors que les contributions se sont élevées à seulement 33,78 millions de dollars. De fait, la situation de 2012 est financièrement préoccupante, et sa Présidente lance un appel aux contributeurs du Fonds. La crise économique ne devrait pas altérer les investissements en matière de droits de l'homme, et les États devraient maintenir, à défaut d'accroître leurs contributions, a-elle plaidé.

Pays concerné

Le Kirghizistan a regretté que les critiques adressées au pays dans le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme occultent certains des progrès réalisés. Le Kirghizistan a ratifié sept des principaux instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme, tandis que sa nouvelle constitution a été adoptée par référendum. L'appareil législatif et pénal national a été réformé et les procédures judiciaires renforcées en vue d'une meilleure conformité avec les principes de la primauté du droit. Le Kirghizistan rappelle aussi qu'après le conflit interne qui a secoué le Kirghizistan, le Gouvernement a versé des indemnisations aux familles des victimes. Il a aussi pris des mesures pour susciter un climat de confiance dans la société. Le Kirghizistan a en outre accepté 154 recommandations issues de l'Examen périodique universel; leur mise en œuvre est intégrée les stratégies nationales, la protection des femmes et des enfants en particulier. Un projet de plan de mise en œuvre des recommandations portant sur l'élimination de la torture dans les lieux de détention est à l'étude. Le Kirghizistan observe que l'Examen périodique universel doit tenir compte des spécificités nationales et éliminer toute partialité de ses travaux

Débat général

Chypre a déclaré que l'Union européenne se félicite des activités du Haut-Commissariat en partenariat avec des acteurs régionaux et nationaux. Elle félicite les autorités de transition de la Somalie de leur coopération avec le Haut-Commissariat et la Tunisie de sa transition vers la démocratie. Au Kirghizistan, l'Union européenne reste préoccupée par des cas de détention arbitraire et la persistance de la discrimination basée sur des motifs ethniques. Elle est aussi préoccupée par la situation au Népal, dont la situation des droits de l'homme est actuellement dans une impasse, notamment du fait de l'impunité dont jouissent encore les auteurs de violations des droits de l'homme pendant le conflit civil. L'Union européenne pense par ailleurs que des actions collectives sont plus nécessaires que jamais et encourage les États à tirer parti de l'expertise du Haut-Commissariat.

Pour le Brésil, au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes, l'absence de développement n'excuse pas les violations des droits de l'homme; par contre, ces derniers évoluent difficilement dans un contexte socioéconomique dégradé. Le GRULAC lance donc un appel à la coopération dans le domaine du renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme. Il demande au Conseil de faire de la coopération une dimension centrale de son action. Les titulaires de mandats au titre des procédures spéciales et les organes conventionnels, de même que l'Examen périodique universel, jouent un rôle très important à cet égard.

La Chine s'est félicitée de l'action du Haut-Commissariat, exprimant l'espoir qu'il continuera de faire preuve d'équilibre dans son action. Elle est convaincue que la communauté internationale doit s'assurer du consentement des pays concernés pour leur apporter un appui, afin de mieux protéger et de promouvoir les droits de l'homme.

Les États-Unis ont souligné que la coopération technique constituait une des formes les plus tangibles du soutien apporté aux pays par le Haut-Commissariat. Les gouvernements ont la responsabilité de rechercher les possibilités d'assistance pour prévenir la souffrance humaine et demander une assistance de le faire avant qu'une situation ne se soit trop dégradée. Pour pouvoir fournir une assistance constructive à un État, le personnel du Haut-Commissariat doit pouvoir jouir d'une entière liberté de mouvement, rencontrer qui il souhaite et présenter librement ses rapports. Car seule la connaissance globale d'un pays, obtenue à la suite de la coopération pleine et entière de l'État concerné peut permettre de concrétiser une assistance technique et un renforcement fructueux des capacités. Ce n'est qu'ainsi que les véritables destinataires – à savoir les individus sur le terrain – en bénéficieront.

L'Indonésie a déclaré que dans le contexte actuel de défiance mutuelle et de ressentiment, il conviendrait d'accorder davantage de place à la recherche d'initiatives et de programmes convenus d'un commun accord. Il est peut-être temps à cet égard d'évaluer et de faire des comparaisons pour savoir quelles méthodes produisent les meilleures retombées sur les droits de l'homme. L'Indonésie est d'avis elle aussi qu'il est essentiel de lier à la coopération technique les organes conventionnels, les procédures spéciales, le Conseil des droits de l'homme et l'Examen périodique universel.

La Thaïlande a estimé que le renforcement des capacités locales est la meilleure manière d'améliorer la situation des droits de l'homme sur le terrain. Dans ce contexte, la Haut-Commissaire doit répondre aux demandes de coopération technique, avec la participation des gouvernements, et améliorer les synergies et rationnaliser les moyens. En outre, une gestion des activités axée sur les résultats et un suivi sont primordiaux en matière de planification.

La Suisse a estimé qu'il est crucial de renforcer les synergies entre les activités de coopération technique d'une part et les organes conventionnels, le Conseil des droits de l'homme, l'Examen périodique universel et les procédures spéciales d'autre part. Les activités de coopération technique sont un complément essentiel à la mise en œuvre et au suivi des recommandations en matière des droits de l'homme. Enfin, la Suisse appuie la mise en place d'un système de contrôle de la performance du Haut-Commissariat afin d'en faire une organisation basée sur le résultat, la transparence et la responsabilité. Ce système devrait permettre de documenter l'impact de la coopération technique et ainsi améliorer la prise de décision en la matière.

Observateurs

La Tunisie s'est appuyée sur les conseils et l'assistance du Haut-Commissariat pour garantir le processus entrepris par le nouveau gouvernement depuis la révolution. L'assistance technique dont bénéfice son pays de la part du Haut-Commissariat a aidé le pays en particulier dans le processus visant à mettre en conformité son cadre législatif avec les normes internationales dans le domaine des droits de l'homme. La Tunisie est reconnaissante au Haut-Commissariat pour sa volonté d'aider le pays depuis les premiers jours qui ont suivi la révolution et à tous les États qui financent les activités du Haut-Commissariat dans la région.

Le Maroc a pris note avec appréciation des informations détaillées sur les activités du Fonds volontaire pour la coopération technique en 2010 et 2011, et demandé des renseignements sur les modalités d'octroi de l'assistance. Le Maroc estime par ailleurs que la crise économique ne doit pas réduire les contributions au Fonds. C'est de là que découle l'engagement du Maroc sur le plan international pour la mobilisation des fonds pour l'assistance technique et la création de mécanismes pour son octroi. La dernière action du Maroc porte sur la création, en mars dernier, d'un fonds pour la participation des pays les moins avancés et des petits États insulaires aux travaux du Conseil.

L'Algérie a déclaré que l'assistance et le renforcement des capacités sont des éléments essentiels du mandat du Conseil. Ce faisant, il doit impliquer de manière proactive les pays concernés. Par ailleurs, les notions de consultation et d'accord des pays concernés par les activités en matière d'assistance technique sont non seulement la garantie mais encore le moteur de leur coopération pour l'amélioration de leurs performances. L'autre pendant de la coopération est celui de la solidarité internationale. Pour sa part, l'Algérie a décidé d'augmenter substantiellement sa contribution volontaire au budget du Haut-Commissariat aux droits de l'homme.

Le Soudan a déclaré avoir pris des mesures concrètes pour collaborer avec le Haut-Commissariat, comme par exemple l'organisation, en juin dernier, d'un forum sur l'assistance technique chargé d'identifier les besoins et de concevoir une feuille de route. Le Gouvernement a réitéré, à cette occasion, sa volonté de renforcer les compétences des fonctionnaires et de collaborer avec l'Expert indépendant sur la situation au Soudan. Le Soudan se félicite de l'assistance technique octroyée par le Programme des Nations Unies pour le développement et encourage les États à se joindre à ce type d'initiatives, plutôt que de critiquer les autres pays.

La République de Corée se félicite particulièrement du soutien apporté par le Haut-Commissariat à la justice transitionnelle dans des pays tels que le Togo, la Côte d'Ivoire, le Burundi, la Tunisie, la Libye et le Yémen. En Tunisie, elle est intéressée de voir le rôle que peut jouer la coopération internationale dans le renforcement de la démocratie. Il existe néanmoins des motifs de préoccupation, s'agissant de l'Érythrée notamment. La République de Corée appelle le Bahreïn à poursuivre sa collaboration avec le Haut-Commissariat et à prendre des initiatives plus concrètes dans la recherche de l'assistance internationale.

Le Royaume-Uni a insisté sur l'importance d'apporter une amélioration de la situation des droits de l'homme en Somalie dans le cadre des efforts visant à rétablir la stabilité et la sécurité. Il a également mentionné la situation à Bahreïn, appelant ce pays à adhérer strictement à ses obligations en matière de droit international. Il doit pleinement respecter, en particulier, la liberté d'expression, le Royaume-Uni regrettant le report de la visite à Manama du Rapporteur spécial sur la torture. Il a exhorté les autorités à veiller à ce que ceux qui ses sont rendus responsables de violations rendent des comptes. Le Royaume-Uni lance enfin un appel au Yémen afin qu'il achève sa transition politique.

Organisations non gouvernementales

La Fédération internationale des ligues de droits de l'homme (FIDH) a salué l'effort de justice mené en Côte d'Ivoire, mais souligne que de nombreux défis restent à relever. Elle estime en particulier que la Commission vérité et réconciliation devrait impliquer davantage la société civile. Son mandat, qui doit être clarifié au plus vite, ne peut lui permettre de se substituer à la justice pénale dont elle doit être un complément et non une alternative. La FIDH est aussi préoccupée par l'absence de poursuites pénales contre les membres des Forces républicaines de Côte d'Ivoire et leurs supplétifs qui opèrent en dehors de tout cadre légal.

UN Watch a déclaré que le système pénitentiaire haïtien n'est pas conforme aux normes internationales, au vu des conditions de détention et de vie des prisonniers. Par ailleurs, les autorités doivent tout mettre en œuvre pour juger l'ancien président Duvalier, soupçonné de crimes contre l'humanité. Au Kirghizstan, les autorités doivent garantir l'indépendance de la justice et lutter contre l'impunité.

Amnesty International a déploré le manque de suivi des recommandations de l'Examen périodique universel en Somalie, notamment en ce qui concerne les violences à l'égard des journalistes. Le Conseil devrait exhorter les autorités somaliennes de transition et les autorités du Puntland et du Somaliland à diligenter des enquêtes sur ces allégations. De même, la communauté internationale devrait appuyer la création d'une commission d'enquête internationale pour enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l'homme en Somalie.

Verein Südwind Entwicklungspolitik s'est déclaré préoccupé par le grand nombre de personnes en attente de jugement en Haïti, dont 90% sont des femmes. Deux ans après le séisme, et malgré les milliards injectés, plus d'un demi million de personnes vivent encore dans des tentes et 7000 ont succombé au cholera. Haïti a été un exemple de la mauvaise distribution de dons aux ONG qui ont un soutien international, au détriment des organisations locales. De même, seulement 2,3% des budgets alloués à la reconstruction l'ont été en faveur d'entreprises locales.

L'Association des citoyens du monde a chiffré à plus de 640 millions le nombre d'armes de petit calibre en circulation en Afrique, occasionnant plus d'un demi million de mort chaque année. Dans ce contexte, le commerce international d'armes devrait être règlementé. Soulignant le rôle des femmes pour promouvoir la paix, l'Association se demande si l'on ne pouvait pas, dans le cadre de l'assistance technique, former également les jeunes à la prévention de la violence.

Droit de réponse

Le Népal a répondu à la déclaration de l'Union européenne en faisant savoir que, suite à l'échec des travaux de la Constituante, de nouvelles élections auront bientôt lieu et une nouvelle Charte fondamentale sera rédigée. Le Gouvernement combat l'impunité par une application scrupuleuse des lois et règlements existants. Il entend aussi renforcer les compétences de l'institution nationale de droits de l'homme créée en 2012, conforme aux Principes de Paris et travaillant en partenariat avec les autorités. Le Népal s'est par ailleurs engagé à appliquer les recommandations qui lui ont été faites dans le cadre de l'Examen périodique universel.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC12/089F