Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME ADOPTE DES TEXTES SUR LA PEINE DE MORT, SUR LE DROIT À L'EAU ET SUR LA MORTALITÉ ET LA MORBIDITÉ MATERNELLES
Le Conseil des droits de l'homme a adopté cet après-midi, sans vote, deux résolutions relatives, l'une au droit fondamental à l'eau potable et à l'assainissement et l'autre à la mortalité et à la morbidité maternelles évitables, ainsi qu'une décision sur la peine de mort. Il a en outre tenu son débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme.
Par l'un des textes adoptés, le Conseil reconnaît qu'une approche fondée sur les droits de l'homme en vue d'éliminer la mortalité et la morbidité maternelles évitables est une démarche qui repose entre autres sur les principes suivants: responsabilisation, participation, transparence, autonomisation, viabilité, non-discrimination et coopération internationale. Il charge le Haut-Commissariat d'organiser, avec d'autres organes compétents du système des Nations Unies, un atelier d'experts sur le thème et de rédiger un guide technique sur la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire la mortalité et la morbidité maternelles évitables.
Le Conseil salue par ailleurs le travail effectué par la Rapporteuse spéciale sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement, notamment la présentation de l'inventaire des bonnes pratiques relatives à l'exercice de ce droit. Il l'invite à continuer à rendre compte de ses travaux tous les ans. Le Conseil demande aux États d'analyser régulièrement le degré de réalisation de ce droit selon les critères de disponibilité, de qualité, d'acceptabilité, d'accessibilité et de coût, et d'élaborer des plans et des stratégies complets.
Le Conseil prie par ailleurs le Secrétaire général de continuer à lui soumettre un supplément annuel à son rapport quinquennal sur la peine capitale en accordant une attention particulière à l'application de la peine de mort à des personnes âgées de moins de 18 ans au moment de l'infraction, à des femmes enceintes et à des personnes atteintes d'une déficience mentale ou intellectuelle.
Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre de l'examen de ces textes: Belgique, Allemagne, Espagne, Équateur, États-Unis, Nouvelle-Zélande, Colombie, Burkina Faso, Bénin, Maurice et Sénégal.
Concluant en début de séance l'examen des questions relatives à l'assistance technique et au renforcement des capacités, le Conseil a été saisi d'un rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Cambodge et d'un rapport du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l'homme Côte d'ivoire. Le Secrétaire général souligne les efforts consentis par le Gouvernement du Cambodge, tout en se déclarant préoccupé par l'érosion de la liberté d'expression et par certaines dispositions de la loi relatives aux associations et organisations non gouvernementales. En Côte d'Ivoire, la situation reste précaire notamment à cause de la violence perpétrée par les forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI) dont des exécutions extrajudiciaires et sommaires, des actes de torture ou des violences sexuelles. Le pays est exhorté à poursuivre ses efforts pour stabiliser le pays et protéger les couches vulnérables de la population, notamment à Abidjan et dans l'Ouest, à entreprendre une réforme complète du secteur de la sécurité et à lutter contre l'impunité. Le Cambodge et la Côte d'Ivoire sont intervenus suite à la présentation de ces rapports par la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme.
Les délégations des États membres suivants ont participé au débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités: Pologne (au nom de l'Union européenne), Sénégal (au nom du Groupe africain), États-Unis, Thaïlande (au nom d'un groupe de pays), Norvège, Suisse, Maldives et Uruguay. Deux pays observateurs, l'Algérie et le Royaume-Uni, sont également intervenus, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes: Association of World Citizens, Amnesty International et Femmes Africa Solidarité.
Le Conseil a par ailleurs décidé de reporter à sa session de mars prochain l'adoption du document final relatif à l'Examen périodique universel s'agissant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Le Conseil poursuivra demain, à partir de dix heures, l'examen de projets de résolutions et de décisions dont il est saisi dans le cadre de la présente session, qui se termine vendredi.
Adoption de résolutions
Résumés des textes adoptés
Par une décision relative au rapport du Secrétaire général sur la question de la peine de mort (A/HRC/18/L.28), le Conseil prie le Secrétaire général de continuer à lui soumettre, après consultation des gouvernements, des institutions spécialisées et des organisations intergouvernementales et non gouvernementales, un supplément annuel à son rapport quinquennal sur la peine capitale et l'application des garanties pour la protection des droits des personnes condamnées à la peine de mort, en accordant une attention particulière à l'application de la peine de mort à des personnes âgées de moins de 18 ans au moment de l'infraction, à des femmes enceintes et à des personnes atteintes d'une déficience mentale ou intellectuelle.
Aux termes d'une résolution sur le droit fondamental à l'eau potable et à l'assainissement (A/HRC/18/L.1), le Conseil salue le travail effectué par la Rapporteuse spéciale sur le droit à l'eau potable et à l'assainissement. Il se félicite de la présentation de l'inventaire des bonnes pratiques relatives à l'exercice du droit à l'eau potable et à l'assainissement, dans lequel la Rapporteuse spéciale insiste particulièrement sur les solutions pratiques en rapport avec la réalisation du droit fondamental à l'eau potable et à l'assainissement. Il invite la Rapporteuse spéciale à continuer à lui rendre compte et à rendre compte à l'Assemblée générale de ses travaux tous les ans.
Le Conseil demande notamment aux États de suivre en permanence la réalisation du droit à l'eau potable et à l'assainissement et d'analyser régulièrement le degré de réalisation de ce droit selon les critères de disponibilité, de qualité, d'acceptabilité, d'accessibilité et de coût; d'élaborer des plans et des stratégies complets, en précisant notamment les responsabilités de tous les acteurs du secteur de l'eau et de l'assainissement, pour parvenir progressivement à la pleine réalisation du droit à l'eau potable et à l'assainissement pour tous; de veiller à la transparence d'un bout à l'autre du suivi et de l'évaluation de la mise en œuvre des plans d'action, projets et programmes dans les secteurs de l'eau et de l'assainissement et de garantir, notamment dans le processus de planification, la participation, effective et constructive, en toute liberté et sans discrimination, de toutes les personnes et communautés concernées, en particulier les personnes défavorisées, marginalisées et vulnérables; de fixer des objectifs en matière d'accès devant être atteints à bref délai pour assurer une couverture universelle, en recherchant en priorité à offrir des services de base pour chacun avant d'améliorer les niveaux de service pour ceux qui en bénéficient déjà; d'assurer le financement en allouant le maximum de ressources disponibles de manière à appliquer toutes les mesures nécessaires pour garantir la viabilité des services d'approvisionnement en eau et d'assainissement et faire en sorte que les services soient d'un coût abordable pour chacun. Le Conseil invite les États à continuer à promouvoir à tous les niveaux, notamment au plus haut niveau, la pleine réalisation du droit fondamental à l'eau potable et à l'assainissement dans les initiatives nationales, régionales et internationales à venir, notamment au Forum mondial sur l'assainissement et l'hygiène organisé par le Conseil de concertation pour l'approvisionnement en eau et l'assainissement, en octobre 2011 à Mumbai (Inde), et au sixième Forum mondial de l'eau, qui se tiendra en mars 2012 à Marseille (France).
Par une résolution sur la mortalité et la morbidité maternelles évitables et droits de l'homme (A/HRC/18/L.8 amendé), le Conseil reconnaît qu'une approche fondée sur les droits de l'homme en vue d'éliminer la mortalité et la morbidité maternelles évitables est une démarche qui repose entre autres sur les principes suivants: responsabilisation, participation, transparence, autonomisation, viabilité, non-discrimination et coopération internationale. Il prend note de la contribution que le résumé analytique des bonnes pratiques et des pratiques efficaces concernant l'adoption d'une approche de la lutte contre la mortalité et la morbidité maternelles évitables fondée sur les droits de l'homme établi par le Haut-Commissariat et de l'étude thématique sur la mortalité et la morbidité maternelles évitables et les droits de l'homme faite par le Haut-Commissariat peuvent apporter à une approche fondée sur les droits de l'homme pour réduire la mortalité et la morbidité maternelles évitables.
Le Conseil charge le Haut-Commissariat d'organiser un atelier d'experts ouvert à la participation des gouvernements, des organismes régionaux, des organes compétents des Nations Unies et des organisations de la société civile, et chargé d'élaborer un guide technique concis concernant l'application d'une approche fondée sur les droits de l'homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire la mortalité et la morbidité maternelles évitables. Le Conseil encourage les États et les autres parties prenantes, y compris les institutions nationales des droits de l'homme et les organisations non gouvernementales, à prendre des mesures à tous les niveaux pour s'attaquer aux causes premières, qui sont interdépendantes de la mortalité et de la morbidité maternelles, telles que pauvreté, malnutrition, pratiques nocives, inaccessibilité des soins et défaut de services de santé, manque d'information et d'éducation et inégalité des sexes, en accordant une attention particulière à l'élimination de toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles.
Déclarations dans le cadre de l'examen des textes adoptés
Présentant le projet de résolution relatif au rapport du Secrétaire général sur la question de la peine de mort, M. FRANÇOIS ROUX (Belgique) a indiqué que ce texte prie le Secrétaire général de continuer à présenter un rapport annuel au Conseil sur la question de la peine de mort. Il a exprimé l'espoir que le projet de résolution soit adopté par consensus.
Présentant le texte sur le droit fondamental à l'eau potable et à l'assainissement, M. REINHARD SCHWEPPE (Allemagne) a souligné que les plans d'action nationaux en matière d'approvisionnement en eau potable et d'assainissement axés sur une approche des droits de l'homme peuvent venir à bout des défis existants en ce domaine. Par ailleurs, il faut allouer des ressources, mesurer les progrès et remédier aux problèmes en cas de nécessité. La délégation allemande reconnaît également que l'échange de bonnes pratiques et les ressources adéquates en termes de construction et d'entretien sont aussi primordiaux que la coopération. Le représentant a enfin indiqué que cette résolution est le fruit de plusieurs consultations informelles et appelé à son adoption sans vote.
M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a réaffirmé sa satisfaction quant aux progrès réalisés en matière d'accès à l'eau potable ces dernières années. Se félicitant du travail effectué par la Rapporteuse spéciale sur l'accès à l'assainissement et à l'eau potable, il a rappelé que le droit à l'eau potable et à l'assainissement était désormais reconnu, mais qu'il fallait maintenant s'atteler à sa mise en œuvre. Le projet de résolution présenté va dans ce sens. En conclusion, le représentant espagnol a appelé les États à mettre en place des programmes visant à réaliser le droit à l'eau potable et à l'assainissement.
M. ALFONSO MORALES (Équateur) a tenu à souligner le caractère transversal de la résolution et a fait valoir que son pays a intégré le droit à l'eau potable et à l'assainissement dans sa Constitution.
MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a déclaré que le monde pourrait être confronté à une pénurie d'eau potable d'ici à 2030 et les États-Unis s'associent au consensus tout en rappelant les déclarations faites par le pays sur ces questions tant devant l'Assemblée générale qu'au Conseil des droits de l'homme.
Présentant le projet de résolution sur la mortalité et la morbidité maternelles évitables et les droits de l'homme, MME WENDY HINTON (Nouvelle-Zélande) a affirmé qu'il s'agissait d'un défi majeur en matière de protection des droits de l'homme. L'adoption d'une approche fondée sur les droits de l'homme dans la définition des politiques de santé publique permettrait de réduire la mortalité et la morbidité maternelle, a souligné la représentante, qui a présenté un amendement.
MME ALICIA VICTORIA ARANGO OLMOS (Colombie) a souligné que les pays coauteurs entendaient montrer qu'il convenait d'adopter une perspective des droits de l'homme dans ce domaine. Les femmes victimes souffrent de discrimination et pâtissent d'un manque d'éducation qui ne les conduit pas à revendiquer la prise en compte prioritaire de leur droit absolu à la santé. La prévention de la mortalité maternelle est une obligation morale pour le Conseil, a insisté la délégation colombienne.
MME SABINE BAKYONO KANZIE (Burkina Faso) a mis l'accent sur la nécessité d'une approche globale du problème. Il serait tout aussi pertinent de se servir d'une approche reposant sur les droits de l'homme sur cette question incluant les principes du droit à la vie et de la garantie des droits de la femme et de l'enfant, qui sont les premiers concernés, a-t-elle conclu.
M. PATRICE HOUNYEAZE (Bénin) a déclaré que toutes les mesures de la communauté internationale visant à réduire le taux de mortalité et de morbidité maternelle restaient bien insuffisantes. De nouvelles initiatives conduiront au renforcement de la protection des droits de la femme, car de nombreuses femmes aujourd'hui voulant donner la vie perdent la leur. Cette situation continue de nous interpeler, a-t-il ajouté, avant de lancer un appel à la communauté internationale afin qu'elle renforce les idoines de protection du droit à la santé de la femme.
M. SUBHAS GYSDHUR (Maurice) a appuyé le projet de résolution soumis, qui permettra de renforcer la lutte contre le fléau de la morbidité et de la mortalité maternelles selon une approche fondée sur les droits de l'homme. Ce texte bénéficie d'un large soutien et Maurice appelle à son adoption par consensus.
M. MOHAMED LAMINE THIAW (Sénégal) a appuyé l'initiative de convoquer un atelier chargé d'élaborer un guide technique visant à réduire la mortalité et la morbidité maternelles évitables. Il a joint sa voix à celle des auteurs de la résolution pour qu'elle soit adoptée sans vote.
Assistance technique et renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme
Présentation de rapports
M KYUNG-WHA KANG Haut-Commissaire adjoint aux droits de l'homme, présentant le rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Cambodge, a déclaré que le rapport souligne les actions de développement du Haut-Commissariat aux droits de l'homme avec le gouvernement et la société civile au Cambodge. Le Haut-Commissariat continue d'étendre son soutien à divers domaines comme la réforme des prisons, la protection des droits fondamentaux, le développement d'une société civile, la protection du droit au logement, la reforme judicaire ou la promotion de la légalité des chambres extraordinaires. De plus, l'interaction du Cambodge avec les mécanismes des droits de l'homme est positive et les rapports relatifs aux organes de traités sont presque mis à jour. Par ailleurs, la ratification des divers instruments internationaux se poursuit alors que certains entrent déjà en vigueur, dont le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Dans le même temps, le Secrétaire général est préoccupé par l'érosion de la liberté d'expression et certaines dispositions de l aloi relatives aux associations et organisations non gouvernementales inquiètent le Secrétaire général.
Abordant le rapport sur la situation des droits de l'homme an Côte d'Ivoire, Mme Kang a indiqué qu'il fournit une mise à jour de la situation depuis le dernier rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Malgré un retour à la normale, la situation reste précaire, notamment à cause de la violence perpétrée par les forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI). Celles-ci se rendent coupables d'exécutions extrajudiciaires et sommaires, de torture, de traitements inhumains et dégradants, de violences sexuelles ou d'arrestations arbitraires, a encore déclaré Mme Kang, a accusé la Haut-Commissaire adjointe. Par ailleurs certains officiers usurpent des prérogatives législatives et judiciaires qui doivent être assumées par les autorités civiles. Dans l'Ouest du pays, la présence continue de mercenaires et les tensions communautaires continuent d'être un problème pour la sécurité, a ajouté Mme Kang, qui a cité des incidents ayant faits 15 morts civiles et un membre FRCI dans un village de l'Ouest. Par ailleurs la situation des déplacés de l'intérieur est aussi un sujet de préoccupation et mérite une attention urgente, car de nombreux camps de réfugiés restent vulnérables et sont victimes d'attaques de mercenaires et des forces républicaines, toujours dans l'ouest du pays.
Le rapport se penche aussi sur la situation des anciens dignitaires du pays, dont Laurent et Simone Gbagbo. Il est important qu'ils soient bien traités et que leurs droits soient préservés en conformité avec le minimum des exigences internationales, a souligné la Haut-Commissaire adjointe, avant de se féliciter de l'acceptation par le Gouvernement de délivrer des visas aux avocats français de l'ancien président ivoirien. Dans le même ordre d'idée, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme salue l'établissement d'une commission dialogue, vérité et réconciliation qui doit toutefois ouvrir de larges consultations au sujet des questions sensibles. En conclusion, le Haut-Commissariat aux droits de l'homme recommande au Gouvernement ivoirien de restaurer la sécurité dans l'Ouest tout en respectant les droits de l'homme. Il engage le Gouvernement à poursuivre ses efforts pour stabiliser le pays et protéger les couches vulnérables de la population, notamment à Abidjan et dans l'Ouest, à entreprendre une réforme complète du secteur de la sécurité et à lutter contre l'impunité.
Le Conseil est saisi du le rapport du Secrétaire général sur le rôle joué et le travail accompli par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour aider le Gouvernement et le peuple cambodgiens à promouvoir et protéger les droits de l'homme (A/HRC/18/47, à paraître en français).
Le rapport du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire ((A/HRC/18/52, un extrait est disponible qui présente les conclusions et recommandations du Haut-Commissariat) constate que la fragilité de la situation sécuritaire, couplée au ressentiment au sein de plusieurs communautés, particulièrement à Abidjan et dans l'Ouest, continuent d'alimenter les tensions communautaires et de provoquer des accès de violence ayant des conséquences négatives en matière de droits humains. Les civils, particulièrement les femmes et les enfants, apparaissent comme les toutes premières victimes de ces violations. L'impunité des membres des Forces républicaines de Côte d'Ivoire (FRCI) qui ont commis des violations des droits de l'homme est particulièrement préoccupante. Le système de justice n'est pas entièrement opérationnel et le processus de justice de transition en est encore à ses premiers balbutiements. Or le besoin de renforcer la capacité des institutions nationales des droits de l'homme, en particulier celles du secteur de la sécurité, demeure crucial. Les éléments des FRCI devront être formés aux normes internationales des droits de l'homme et au droit international humanitaire si l'on veut juguler l'actuelle vague d'atteintes systématiques aux droits de l'homme et à l'intégrité physique, à la liberté et à la sécurité des personnes. Le Gouvernement est invité instamment à prendre rapidement des mesures pour faire face au haut degré d'impunité dont jouissent les FRCI.
Pays concernés par les rapports présentés
M. KE SOVANN (Cambodge) a déclaré prendre bonne note du rapport du Haut-Commissariat qui souligne un certain nombre de mesures concrètes engagées pour améliorer le fonctionnement des institutions, avec l'assistance du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. S'agissant de l'Examen périodique universel, son suivi est essentiel, estime la délégation cambodgienne, particulièrement dans la perspective du futur examen de son pays. En dépit des efforts déployés par les autorités concernés, le Cambodge reconnaît ses lacunes dues à des capacités limitées. Il est néanmoins déterminé à remplir ses engagements. Il souhaite que la coopération établie avec le Haut-Commissariat se poursuive, en vertu des termes existants dans le protocole d'accord entre les parties.
M. MAMADOU GNENEMA COULIBALY, Ministre des droits de l'homme et libertés civiles de la Côte d'Ivoire, a déclaré que le rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme concernant la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire appelle à quelques commentaires. En premier lieu, le Gouvernement ivoirien s'engage à mettre définitivement un terme à toutes les dérives et violations décrites dans ce rapport. Après une décennie de négation des droits de l'homme, la crise postélectorale a provoqué la mort de plus de 3000 personnes et des milliers de déplacés et de réfugiés. Dans ce contexte, le Gouvernement ivoirien s'engage à mettre un terme à l'impunité qui avait été érigée en système de gouvernement par le régime de l'ex-chef de l'État. C'est dans ce contexte qu'a été créé le Ministère des droits de l'homme et des libertés publiques. Ce dernier a mené une campagne de sensibilisation dans l'ensemble du pays pour mettre les droits de l'homme sur le devant de la scène. En parallèle, des poursuites judiciaires sont entreprises au plan national contre les personnes identifiées comme étant à l'origine des graves violations des droits de l'homme survenues dans le pays pendant la crise postélectorale. En outre, la Côte d'Ivoire a adhéré en décembre 2010 au statut de la Cour pénale internationale. Finalement, une Commission nationale d'enquête sur les violations des droits de l'homme commises au cours de la crise postélectorale a été mise en place, et ses résultats permettront d'élargir les poursuites. Le Gouvernement ivoirien a aussi mis en place une Commission dialogue, vérité et réconciliation afin de promouvoir les valeurs de pardon et de tolérance dans l'optique de permettre au peuple ivoirien de surmonter les fractures consécutives à la crise postélectorale.
En conclusion, le Ministre ivoirien a réaffirmé que la consolidation d'un état de droit fondé sur les droits de l'homme, les libertés publiques, la justice et la paix sociale était l'objectif principal et la préoccupation majeure du Gouvernement de Côte d'Ivoire.
Débat général sur l'assistance technique et le renforcement des capacités
M. REMIGIUSZ A. HENCZEL (Pologne au nom de l'Union européenne) a estimé que le Conseil pourrait jouer un plus grand rôle dans le domaine de l'assistance technique et du renforcement des capacités pour épauler des changements significatifs sur le terrain. Le débat sur les moyens de parvenir à cet objectif doit se poursuivre dans l'enceinte appropriée. L'Union européenne attend avec intérêt l'ouverture au plus tôt d'un bureau régional du Haut-Commissariat en Égypte tout en se félicitant de celle qui a eu lieu à Tunis. Par ailleurs, le représentant a expliqué que les Vingt-Sept avait entrepris de négocier avec Bahreïn afin que la situation de ce pays soit débattue à la prochaine session du Conseil dans le cadre d'un éventuel dialogue interactif.
M. MOUHAMADOU LAMINE THIAW (Sénégal au nom du Groupe africain) a pris note avec intérêt des évolutions positives des droits de l'homme en Côte d'Ivoire. Pour autant des défis qui subsistent doivent être relevées en même temps pour que le pays recouvre la paix et la stabilité, a encore déclaré le représentant, avant de souligner les engagements pris par Alassane Ouattara devant la 66e session de l'Assemblée générale à New-York. Il est rassurant de voir les initiatives qui sont actuellement prises par la Côte d'Ivoire envers les partenaires de la communauté internationale, dont la Cour pénale internationale pour traduire en actes ces engagements. En conclusion, le représentant a appelé la communauté internationale à soutenir le pays en termes d'assistance technique.
M. JOHN C. MARIZ (États-Unis) a félicité la Côte d'Ivoire pour sa coopération avec le Haut-Commissariat, se disant convaincu que le nouveau pouvoir accomplit des efforts sincères pour améliorer la situation dans des circonstances pleines de défi. Sa délégation se félicite de la volonté affichée par le Président Ouattara d'en finir avec l'impunité. Toutefois, des informations préoccupantes font état d'exactions commises en toute impunité par les Forces républicaines de Côte d'Ivoire. Les États-Unis soutiennent avec force l'action importante menée par le Haut-Commissariat en matière d'assistance technique et de renforcement des capacités. Il s'agit d'un outil efficace pour répondre aux abus en matière de droits de l'homme dans le monde.
M. SEK WANNAMETHEE (Thaïlande au nom d'un groupe de pays - Brésil, Honduras, Indonésie, Maurice, Maroc, Norvège, Singapour, Thaïlande et Turquie) a déclaré que le Conseil avait prouvé qu'il était capable de réagir efficacement aux situations des droits de l'homme qui requièrent une action urgente. La promotion de l'assistance technique doit fournir l'occasion de partager les expériences positives en la matière, a-t-il estimé. Par ce processus de coopération, les pays qui ont besoin d'assistance ont ainsi la possibilité de la solliciter, et ceux en mesure de l'offrir, de répondre à cette requête. En plus de la coopération entre États, le Haut Commissariat aux droits de l'homme, en collaboration avec les agences du système de l'ONU, a également un rôle dans la fourniture de l'assistance technique dans le monde. Une coordination s'avère donc essentielle entre le Conseil et le Haut Commissariat pour s'assurer que les délibérations du Conseil soient traduites en actions concrètes, a-t-il conclu.
MME HARRIET E. BERG (Norvège) a déploré que les violences, y compris les violences sexuelles, se poursuivent six mois après la fin des hostilités en Côte d'Ivoire. Cette situation est d'autant plus préoccupante que de telles violences sont commises, avec une impunité flagrante, par les forces de l'armée républicaine, a-t-elle ajouté, en invitant le Gouvernement de ce pays à prendre des mesures. Par ailleurs sa délégation déplore que seuls des partisans du camp de l'ancien président Laurent Gbagbo ont été arrêtés, mais aucun parmi ceux du Président Alassane Ouattara ou de Guillaume Soro. Il est important que la justice soit la même pour tous, a-t-elle conclu.
M. ALEXANDRE FASEL (Suisse) a consacré sa déclaration à la violence sexuelle en République démocratique du Congo, en rappelant qu'il incombait au pays concerné de veiller au respect des droits fondamentaux des femmes. Il incombe également aux Nations Unies et aux pays tiers de contribuer au respect des droits de l'homme dans ce pays, principalement à travers la Mission des Nations Unies. Le Haut-Commissariat, le Conseil des droits de l'homme et ses procédures spéciales ont également un rôle important à jouer, selon la Suisse. La résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, stipule clairement que les membres de l'ONU ont une obligation ferme de veiller aux besoins spécifiques des femmes s'agissant de la protection, a rappelé le représentant suisse.
MME IRUTHISHAM ADAM (Maldives) a évoqué la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire, exhortant la communauté internationale à continuer de soutenir ce pays. La représentante s'est félicitée de la mise sur pied, par les autorités, de différentes institutions pour faire face au processus de transition en cours, ainsi que de l'adhésion de la Côte d'Ivoire à la Cour pénale internationale.
M. FEDERICO PERAZZA (Uruguay) a déclaré que la promotion et la protection des droits de l'homme devrait reposer sur la coopération entre États et avec les mécanismes des droits de l'homme. C'est un processus à double volet, a-t-il précisé.
Observateurs
M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a fait part de l'attachement de son pays au renforcement de la communauté internationale et de l'assistance technique en matière de droits de l'homme car elles procèdent d'un esprit de dialogue solidaire que l'Algérie préfère aux confrontations souvent stériles. Par ailleurs, la délégation algérienne relève avec inquiétude «l'érosion de souveraineté» résultant de la formule imposée par certains pays occidentaux dans un projet de résolution qui sera soumis demain au Conseil. Ce projet ne laisse plus d'initiative au Gouvernement concerné et fait fi de ses priorités car il charge le Haut-Commissariat de coordonner avec les seuls États Membres, qui sont des bailleurs de fond, le moyen d'assister le pays concerné et les organisations non gouvernementales présentes dans le pays. L'Algérie, pour sa part, est coauteur du projet de résolution sur la promotion de l'assistance technique et le renforcement des capacités qui réaffirme le principe du consentement de l'État concerné, a souligné le représentant.
M. IAN DUDDY (Royaume-Uni) a remercié le Haut Commissariat aux droits de l'homme pour les rapports qu'il avait publiés sur la Côte d'Ivoire et le Cambodge. Il a appelé tous les pays à utiliser les mécanismes à leur disposition pour recevoir l'assistance technique dont ils ont besoin.
Organisations non gouvernementales
MME GENEVIÈVE JOURDAN (Association of World Citizens) a déclaré qu'il est urgent de traiter les inégalités du monde nées notamment de l'oppression, de la corruption et des ventes d'armes opérées par les pays développés vers les pays pauvres. Par ailleurs, son organisation se demande s'il est possible que les pays du Nord accueillent et assurent la formation des enfants victimes des conflits et des mines anti-personnel.
MME PATRIZIA SCANNELLA (Amnesty International) a exhorté à ne pas négliger la situation en République démocratique du Congo tant que perdurent des violations graves des droits de l'homme. La justice congolaise demeure en effet largement incapable de remplir son rôle, a-telle fait observer, en jugeant qu'il fallait développer, d'urgence, une stratégie judiciaire à long terme afin de mettre un terme à l'impunité. Amnesty International estime qu'un mandat d'assistance technique du Conseil pourrait y contribuer.
MME BINETA DIOP (Femmes Africa Solidarité) a déploré que les somaliennes soient privées de l'accès à l'éducation, à la santé et à la justice. En effet, selon les estimations du Haut Commissariat pour les réfugiés, 80% des personnes déplacées sont des femmes et des enfants exposés à la famine et aux violations de leurs droits. La représentante a aussi plaidé en faveur de la pleine participation des femmes au processus de paix et à la reconstruction de la paix.
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HRC11/1034F