Aller au contenu principal

CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT: FIN DE LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE POPULAIRE DÉMOCRATIQUE DE CORÉE

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a tenu ce matin une réunion plénière, la dernière de la présente session sous la présidence de la République populaire démocratique de Corée, qui a fait une déclaration. Des déclarations ont également été faites par la Suisse, le Pakistan au nom du Groupe des 21, le Portugal au nom des États observateurs, le Japon, l'Afrique du Sud, l'Égypte, l'Allemagne, l'Algérie, le Nigéria, la Pologne, la France, l'Inde, la Chine et Cuba.

Le Président sortant, M. So Se Pyong, a déclaré qu'il avait mené des consultations bilatérales avec presque toutes les délégations d'une manière ouverte, inclusive et transparente en mettant l'accent sur la façon de revitaliser la Conférence et sur les travaux que la Conférence pourrait mener utilement en l'absence d'un programme de travail consensuel. Le Président a toutefois constaté des divergences entre les positions des délégations sur les questions de fond, ainsi que pour l'adoption d'un programme de travail. Il a estimé que cela s'expliquait par un manque de volonté politique de la part des États membres et non par une inefficacité inhérente de la Conférence du désarmement. Il a ajouté qu'à son avis, la Conférence est en mesure de parvenir à des accords multilatéraux à condition que les États membres fassent pleinement preuve de volonté politique.

Alors qu'il quitte ses fonctions auprès de la Conférence du désarmement, l'ambassadeur suisse Jürg Lauber a invité toutes les délégations à ne pas relâcher leurs efforts visant à conduire à un nouveau départ pour améliorer la sécurité globale. Il s'est dit convaincu que la Conférence dispose d'une base excellente pour des succès futurs massifs et essentiels, ajoutant qu'il y a à Genève, en matière de désarmement, un «pool spécialisé qu'il faut absolument garder et utiliser».

Au cours des débats, plusieurs orateurs ont commenté la déclaration faite par le Pakistan au nom du Groupe des 21 pays non alignés membres de la Conférence. Le Groupe des 21 exprime notamment sa préoccupation à propos des doctrines de défense stratégique des États dotés d'armes nucléaires et d'un groupe d'États qui justifient le recours aux armes nucléaires ou à la menace d'y recourir. C'est pourquoi le Groupe réitère que l'élimination totale des armes nucléaires est la seule garantie absolue contre la menace ou l'utilisation de ces armes, et réaffirme la nécessité de parvenir de toute urgence à un accord rapide sur un instrument universel, inconditionnel et juridiquement contraignant permettant de garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace d'utilisation d'armes nucléaires.


La prochaine séance publique de la Conférence du désarmement se tiendra le mardi 23 août à 10 heures sous présidence cubaine. À cette occasion, le Vice-Ministre des affaires étrangères de Cuba, M. Abelardo Moreno Fernández fera une allocution.


Aperçu des déclarations

M. SO SE PYONG, Président de la Conférence du désarmement, a ouvert la réunion en accueillant la délégation des Messagers de la paix de Nagasaki, qui rendent chaque année une visite au Bureau des affaires de désarmement à Genève pour témoigner de l'histoire des habitants de Nagasaki et de la tragédie qui l'a frappé il ya 66 ans, ainsi que les difficultés physiques et mentales qui en ont résulté.

M. JÜRG LAUBER (Suisse) a souligné que le développement, la production, le commerce et l'emploi de toutes formes d'armes ont - en particulier lorsqu'ils sortent de leur dimension légitime - des répercussions significatives sur tous les aspects de la vie humaine: ils ont des effets négatifs sur le budget des États, sur le développement économique, sur les droits humains, sur la sécurité humaine, sur l'environnement. Le sentiment de sécurité, qu'elle soit individuelle ou nationale, lié à la possession d'armes, est souvent trompeur. Le droit des États de pouvoir assurer leur sécurité est à priori incontesté, mais on ne saurait fermer les yeux devant les répercussions humaines. Le monde a besoin et exige des progrès dans les domaines du désarmement et du contrôle des armes, a poursuivi M. Lauber, qui a dit partager la déception de nombre de délégations devant les progrès trop modestes ayant lieu dans de nombreux processus multilatéraux du désarmement, en particulier au sein de la Conférence du désarmement.

Alors qu'il quitte ses fonctions auprès de la Conférence du désarmement, M. Lauber a invité toutes les délégations à ne pas relâcher leurs efforts visant à conduire à un nouveau départ pour améliorer la sécurité globale. Il s'est dit convaincu que la Conférence dispose d'une base excellente pour des succès futurs massifs et essentiels, ajoutant qu'il y a à Genève une concentration inédite d'experts en matière de désarmement provenant des États, d'organisations internationales, d'instituts de recherche et d'universités et d'organisations non gouvernementales - «ce qui donne un pool spécialisé qu'il faut absolument garder et utiliser». Afin de pouvoir jouer à nouveau son rôle, la Conférence a besoin d'une modernisation qui conserve ses points forts et corrige ses faiblesses. Elle se doit de prendre en considération les implications régionales et globales des questions de désarmement et de contrôle des armes, mais également la notion de sécurité humaine qui est centrée sur la protection des individus et de la communauté, en tant que condition sine qua non pour une sécurité nationale, régionale et globale durable. En conclusion, il s'est dit plutôt optimiste quant à l'avenir de la Conférence, car aucun processus multilatéral ne peut obtenir de succès sans les compétences techniques, sans l'expérience diplomatique et sans les qualités personnelles des personnes directement impliquées; et toutes ces qualités sont réunies dans cette salle en quantités inhabituellement élevées.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan au nom du Groupe des 21) a déclaré que des progrès en matière de non-prolifération et de désarmement sont essentiels à la paix internationale et au renforcement de la sécurité. Le Groupe réaffirme que les efforts menés en faveur du désarmement nucléaire, ainsi que des approches régionales et mondiales et le renforcement des mesures de confiance doivent se compléter mutuellement et, si possible, être menés simultanément pour promouvoir la paix et la sécurité régionale et internationale. M. Akram a exprimé la préoccupation du Groupe des 21 à propos des doctrines de défense stratégique des États dotés d'armes nucléaires et d'un groupe d'États qui justifient le recours aux armes nucléaires ou à la menace d'y recourir. À cet égard, il est urgent d'exclure un rôle pour les armes nucléaires dans les doctrines et politiques de sécurité stratégique afin de réduire le risque que ces armes soient un jour utilisées et pour faciliter le processus et de leur élimination. Le Groupe des 21 réaffirme que l'élimination totale des armes nucléaires est la seule garantie absolue contre la menace ou l'utilisation d'armes nucléaires. En attendant l'achèvement de la réalisation de l'élimination de ces armes, le Groupe réaffirme la nécessité de parvenir de toute urgence à un accord rapide sur un instrument universel, inconditionnel et juridiquement contraignant permettant de garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace d'utilisation d'armes nucléaires. Le Groupe des 21 réaffirme la validité absolue de la diplomatie multilatérale dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération, et exprime sa détermination à promouvoir le multilatéralisme en tant que principe fondamental de toute négociation dans ces domaines.

MME GRAÇA ANDRESEN GUIMARÃES (Portugal au nom du Groupe informel d'États observateurs) a remercié le président pour la manière inclusive dont il s'était acquitté de ses tâches, en tenant compte du point de vue des États observateurs. Il est clair que la grande majorité des États membres de l'ONU estime qu'il est grand temps d'ouvrir un débat sur le thème de l'élargissement de la Conférence sur le désarmement, a ajouté l'observatrice, qui a souligné que la Conférence ne doit pas ignorer cet appel. Le groupe informel des États observateurs a proposé la nomination d'un rapporteur spécial chargé de se pencher sur la question de l'élargissement, en temps opportun et de manière organisée. Le groupe informel des États observateurs saisit cette occasion pour réitérer sa proposition, qui ne préjuge pas d'un résultat particulier. En conclusion, Mme Andresen Guimarães a souligné que les États observateurs et les États membres partagent la même ambition de faire sortir la Conférence de l'impasse afin de retrouver un chemin orienté vers l'avenir.

M. AKIO SUDA (Japon) s'est déclaré surpris par la déclaration du Pakistan faite au nom du Groupe des 21, qui a mentionné un vaste gamme de questions telles que les assurances de sécurité négatives et d'autres questions, mais a omis de mentionner la question d'un traité sur les matières fissiles. Pourquoi le Groupe des 21 omet-il totalement de mentionner l'une des questions les plus importantes du désarmement nucléaire, à savoir les matières fissiles?

M. AKRAM (Pakistan) a tenu à souligner que le Groupe des 21 fonctionne sur la base du consensus et que son intervention était une déclaration de consensus. Libre au Japon d'en tirer les conclusions qu'il souhaite.

M. MICHIEL JOHANNES COMBRINK (Afrique du Sud) a attiré l'attention de l'ambassadeur du Japon sur le passage de la déclaration du Groupe des 21 qui se réfère au travail de la Conférence du désarmement, y compris s'agissant des trois piliers de base de l'ordre du jour.

M. MOHAMED HATEM EL-ATAWY (Égypte), précisant qu'il ne parlait pas au nom du G21, a fait observer que le Groupe des 21 avait présenté l'idée d'engager des négociations sur une convention sur les armes nucléaires, qui porterait sur les matières fissiles.

M. HELLMUT HOFFMANN (Allemagne) a déclaré qu'il partageait le point de vue exprimé par le Japon et estimé qu'il eut été bon de trouver dans la déclaration du Groupe des 21 une phrase sur les matières fissiles. Comprenant bien qu'il s'agissait d'un document de consensus, il a demandé si chaque partie de cette déclaration s'appliquait à tous les membres du Groupe des 21.

M. HAMZA KHELIF (Algérie), revenant sur la déclaration du Japon, s'est associé aux déclarations faites par le Pakistan, l'Égypte et l'Afrique du Sud. Le traité d'interdiction des matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires est une question importante pour l'Algérie. Il a précisé qu'étant donné qu'il s'agissait d'un document de consensus, il se peut que des positions de certains membres du Groupe des 21 ne figurent pas dans le texte. Le représentant algérien a ajouté que, dans le cas où la négociation d'une convention globale sur l'élimination des armes nucléaires était acceptée, la question des matières fissiles serait certainement abordée à titre prioritaire.

M. SYNDOOPH PAEBI ENDONI (Nigéria) a déclaré que la question d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles était chère au Groupe des 21 et il a assuré l'ambassadeur du Japon qu'un tel traité faisait partie des préoccupations des pays du Groupe. Il a fait référence au texte s'agissant de l'objectif de l'élimination de toutes les armes nucléaires, y compris les questions relatives aux matières fissiles.

M. CEZARY LUSINSKI (Pologne), en tant que coordonnateur du Groupe d'Europe occidentale, a déclaré que des réunions de discussion franches et ouvertes ont été menées dans le but de produire des déclarations conjointes. Il s'est félicité à cet égard que les délégations s'engagent dans un débat de fond.

M. ÉRIC DANON (France) a constaté, s'agissant de la déclaration faite au nom du Groupe des 21, qu'alors même que la communauté internationale considère la négociation d'un traité «cut-off» (sur les matières fissiles) comme une priorité et comme le pas suivant, il suffit qu'un pays ou deux le refusent pour qu'un consensus ne l'exprime plus. S'agissant de l'intervention de l'Algérie, le représentant français a rappelé que le Plan d'action retenu à l'issue de la Conférence d'examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires permet de travailler selon une sorte de feuille de route pour les cinq ans à venir. En remettant sur le tapis la question de la convention globale ou de la convention universelle sur les garanties négatives de sécurité est intéressante «intellectuellement», mais il a estimé que l'on ne pouvait pas «remettre cela sur al table en pensant raisonnablement que cela va se faire dans les cinq ans qui viennent, alors même que nous avons 64 actions à mettre en œuvre au niveau du TNP qui ne comportent pas ces actions-là». La France estime donc que, à partir du moment où tout le monde est d'accord sur le fait que le désarmement nucléaire est quelque chose de progressif et que «toute la communauté internationale, à part un ou peut-être deux pays, veut démarrer avec le cut-off», c'est quand même là dessus qu'il faut travailler et non pas sur d'autres propositions qui, elles, ont une probabilité générale de réalisation beaucoup plus faible. Il faut donc ne pas perdre de vue l'objectif prioritaire que s'est fixé la communauté internationale de démarrer le plus vite possible cette négociation «sur le cut-off».

M. ALI RAO (Inde) a estimé que les membres de la Conférence du désarmement devraient se concentrer sur les questions qui les unissent et qui sont à même de les aider à faire avancer l'ordre du jour du désarmement.

M. SO SE PYONG (République populaire démocratique de Corée), Président de la Conférence du désarmement, qui termine cette semaine son mandat à la présidence, a déclaré qu'il avait mené des consultations bilatérales avec presque toutes les délégations d'une manière ouverte, inclusive et transparente, y compris pendant la période intersessions. L'accent de ses consultations et discussions avec les délégations a été mis sur la façon de revitaliser la Conférence et sur les travaux que la Conférence pourrait mener utilement en l'absence d'un programme de travail consensuel. Le Président a également tenu des réunions informelles avec le groupe informel des États observateurs pour échanger des points vues sur les préoccupations communes en matière d'élargissement de l'adhésion de la Conférence du désarmement.

Au cours des consultations et discussions qu'il a menées, le Président a constaté entre les délégations des positions témoignant de la persistance de divergences de vues sur les questions de fond. Il a aussi constaté qu'il y avait beaucoup de divergences entre les délégations et entre les groupes quant à leurs positions respectives s'agissant d'un éventuel programme de travail. Malgré les efforts déployés, les consultations n'ont pas permis d'aboutir à des résultats concrets. Le Président a estimé que cela s'expliquait par un manque de volonté politique de la part des États membres et non par une inefficacité inhérente de la Conférence. Il a estimé que la Conférence du désarmement, en tant que seul instance de négociations multilatérales sur le désarmement, est en mesure de parvenir à des accords multilatéraux à condition que les États membres fassent pleinement preuve de volonté politique et se donnent un mandat pour ce faire. Le Président a salué dans ce contexte la proposition de la Colombie de créer un groupe de travail au sein de la Conférence du désarmement, dont l'objectif principal serait d'examiner les mesures possibles pour renforcer les travaux de la Conférence.

S'agissant des travaux menés en dehors de la Conférence sur le désarmement, le représentant a estimé qu'il fallait se pencher sur les conséquences de cette évolution et se demander si elle est à même de contribuer à atteindre l'objectif de revitalisation des travaux de la Conférence du désarmement. la Conférence doit écouter les opinions des délégations, respecter et faire respecter les règles de procédure et accorder le même poids aux préoccupations légitimes de sécurité de chaque pays. Le Président a estimé qu'il n'y avait pas d'alternative à la Conférence du désarmement à ce stade, et est sincèrement convaincu que la diplomatie multilatérale est meilleur moyen de faire progresser le travail de la Conférence du désarmement. Le Président a salué l'ambassadeur Rodolfo Reyes Rodríguez, de Cuba, qui présidera la Conférence à partir de la semaine prochaine.

M. QUN WANG (Chine) a exprimé la satisfaction de sa délégation pour la façon dont M. So a mené les travaux de la Conférence et a espéré que toutes les parties continueraient à œuvrer à la réalisation de l'objectif d'entamer des négociations au sein de la Conférence du désarmement..

M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba) a félicité, au nom de l'ambassadeur Rodolfo Reyes Rodríguez qui n'a pu participer à la présente séance, l'ambassadeur de la République populaire démocratique de Corée pour la sage manière dont il a mené les travaux et la souplesse avec laquelle il a dirigé les réunions du P6 (les ambassadeurs assumant successivement la présidence de la Conférence en 2011), ainsi que pour la volonté qu'il a démontrée d'accepter des propositions permettant à la Conférence d'avancer dans ses travaux. Cuba, qui assure la présidence à partir de la semaine prochaine, poursuivra sur la même lancée que la République populaire démocratique de Corée.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

DC11/040F