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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN CÔTE D'IVOIRE, EN SYRIE ET DANS D'AUTRES PAYS

Compte rendu de séance
Il est notamment saisi du rapport de la Commission d'enquête sur les événements en Côte d'Ivoire suite à l'élection présidentielle et de rapports de la Haut-Commissaire

Le Conseil des droits de l'homme a entamé cet après-midi l'examen de situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention. Il a tenu un débat interactif autour du rapport de la Commission d'enquête chargée d'enquêter sur les faits et circonstances entourant les allégations de graves violations des droits de l'homme perpétrées en Côte d'Ivoire à la suite de l'élection présidentielle du 28 novembre 2010, avant d'être saisi de rapports de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire et en Syrie et de procéder à son débat général sur ces questions.

M. Vitit Muntarbhorn, Président de la Commission d'enquête sur la Côte d'Ivoire, a rappelé que la crise ivoirienne était non seulement due au refus du président sortant, M. Laurent Gbagbo, de quitter le pouvoir, mais aussi à l'impunité qui avait prévalu en Côte d'Ivoire jusqu'alors. Malgré une certaine amélioration au niveau sécuritaire dans le pays, les violations des droits de l'homme et les exactions persistent. Certains de ces crimes pourraient même constituer des crimes contre l'humanité. Le Président de la Commission d'enquête a mis l'accent sur la nécessité d'entamer un processus judiciaire afin de traduire en justice les responsables de ces actes. Il a aussi souligné la nécessité de parvenir à une réconciliation entre les communautés, et de placer cette question au nombre des priorités des autorités nationales. Il a recommandé l'établissement d'un mécanisme indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'ivoire qui effectuerait le suivi des initiatives nationales et internationales visant à traduire en justice les responsables. Les deux autres membres de la Commission d'enquête, Mme Reine Alapina-Gansou et M. Suliman Baldo, ont également pris la parole à la fin du débat.

La délégation de Côte d'Ivoire a rappelé que le Gouvernement de M. Ouattara avait appelé, au plus fort de la crise post-électorale, à la création de la Commission d'enquête et a assuré que son gouvernement faisait bon accueil à ses recommandations. Elle a précisé que le Gouvernement a aussi pris la mesure de la gravité des faits et agit pour donner une réponse proactive à la situation.

Au cours du débat interactif sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire, le Groupe africain, par la voix du Nigéria, s'est déclaré satisfait de l'annonce par le Président Ouattara sur la mise en place d'une commission de justice et de réconciliation et a abondé dans le sens des conclusions de la Commission d'enquête, notamment en faveur d'une assistance multiforme pour permettre un retour à la normale en Côte d'Ivoire. De nombreux pays ont insisté en particulier sur l'importance de mettre fin à l'impunité; d'autres encore ont mis l'accent sur la nécessité de faire cesser les violences et de favoriser la stabilité, la paix et la sécurité dans toutes les régions du pays. Des délégations ont indiqué par ailleurs que leurs pays étaient prêts à faire des offres de coopération ou de financements en matière d'assistance technique et pour épauler la Commission nationale de justice et de réconciliation.

Les délégations suivantes ont participé au débat interactif avec la Commission d'enquête sur la Côte d'Ivoire: Nigéria (au nom du Groupe africain), Maroc, Turquie, Thaïlande, Chine, France, Brésil, Union européenne, Japon, Allemagne, Norvège, Canada, Australie, Suède, Royaume-Uni, Slovénie, États-Unis, Fédération de Russie, Mexique, Suisse et Sénégal. Sont également intervenus les représentants des organisations non gouvernementales suivantes: Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), Amnesty International, Human Rights Watch, Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs, Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples (CIRAC) et Femmes Africa Solidarité.

Entamant ensuite son débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention, le Conseil a été saisi de deux rapports de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, l'un sur la Côte d'Ivoire, l'autre sur la République arabe syrienne, présentés par Mme Navi Pillay. S'agissant de la Côte d'Ivoire, la Haut-Commissaire recommande notamment au Gouvernement de prendre immédiatement des mesures pour combler les carences en matière de sécurité afin d'offrir une protection adéquate à la population civile, d'adopter une politique de tolérance zéro vis-à-vis des violations graves des droits de l'homme, y compris les violences sexuelles, et de traduire en justice tous les éléments des forces de sécurité qui sont impliqués dans ces violations. En ce qui concerne la situation en Syrie, Mme Pillay souligne qu'elle n'a pas réussi à obtenir de réponse du Gouvernement de ce pays en vue d'autoriser l'accès de membres du Haut-Commissariat à son territoire. Elle a souligné que la situation se détériore à l'intérieur du pays et que les informations qui lui ont été transmises révèlent que les citoyens syriens sont confrontés à une crise humanitaire d'une gravité sans précédent. Le peuple syrien, a-t-elle rappelé, ne fait que demander le changement et la démocratie, ce à quoi le gouvernement a répondu par une violence excessive.

Dans le cadre du débat général, plusieurs intervenants sont revenus sur la situation en Syrie, lançant des appels pressants au Gouvernement pour qu'il autorise l'accès de la mission d'enquête du Haut-Commissariat aux droits de l'homme, d'une part, et aux travailleurs humanitaires, de l'autre. Les délégations ont en outre abordé la situation des droits de l'homme dans de nombreux pays.

Réagissant à ces interventions, les délégations de Sri Lanka, du Venezuela, de Cuba, du Zimbabwe, de Bahreïn, de la Chine, de l'Azerbaïdjan, du Maroc, de l'Algérie, de l'Éthiopie, de la République populaire démocratique de Corée et du Japon ont exercé le droit de réponse.

Ont participé à ce débat général les délégations suivantes: Hongrie (au nom de l'Union européenne), Canada (au nom d'un groupe de 54 États), Pays-Bas (au nom d'un groupe de 73 États), France, Suisse, États-Unis, Espagne, Royaume-Uni, Chine, Japon, Norvège, Brésil, Belgique, Slovaquie, Cuba, Pakistan et Uruguay.

Sont également intervenues plusieurs délégations observatrices: Algérie, Allemagne, Australie, Autriche, Nouvelle-Zélande, Irlande, Canada, République islamique d'Iran, Suède, Danemark, République tchèque, Israël, Bélarus et Venezuela.

Onze organisations non gouvernementales ont aussi pris la parole: Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP (au nom également de International Educational Development; Bureau international de la paix et France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand); Women's Human Rights International Association (au nom également de France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand; International Educational Development; et le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples); Société pour les peuples menacés; au nom également de International Educational Development; et Nonviolent Radical Party; Transnational and Transparty; Communauté internationale bahá'íe; Human Rights Watch; Verein Südwind Entwicklungspolitik; Asian Legal Resource Centre (au nom également de Lawyers' Rights Watch Canada); Nonviolent Radical Party, Transnational and Transparty; Internationale démocrate de centre; Agence internationale pour le développement - Aide-Fédération et Centre for Human Rights and Peace Advocacy.


Lors de la séance de demain matin, qui commencera à 9 heures, le Conseil sera saisi du rapport des experts indépendants chargés de la situation des droits de l'homme respectivement au Burundi et en Haïti, avant de procéder à un dialogue interactif. Le Conseil devrait entamer dès demain après-midi l'examen de projets de résolution dont il est saisi pour la présente session, qui se termine vendredi.


Commission d'enquête internationale sur la Côte d'Ivoire

Présentation du rapport

M. VITIT MUNTARBHORN, Président de la Commission d'enquête internationale sur la Côte d'Ivoire, a rappelé que la crise ivoirienne était non seulement due au refus de Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir, mais aussi à l'impunité qui avait prévalu en Côte d'Ivoire jusqu'alors. Il a exposé les diverses activités de la Commission depuis sa création le 11 avril dernier: visites à Genève et en Côte d'Ivoire; rencontres avec les époux Gbagbo et des membres de l'ancien gouvernement; rencontres au Libéria avec des réfugiés ivoiriens et des représentants des Nations Unies. Au nom de la Commission, il a remercié les personnes qui ont apporté leurs témoignages à ces occasions, attirant l'attention sur les conditions extrêmes et la peur dans lesquelles elles vivent à présent. En effet, a-t-il souligné, malgré une certaine amélioration au niveau sécuritaire, les violations des droits de l'homme et les exactions continuent: tueries, viols, tortures, enfants soldats, exécutions sommaires… Certains de ces crimes pourraient même constituer des crimes contre l'humanité, à l'exemple des crimes basés sur l'appartenance politique ou ethnique, a indiqué M. Muntarbhorn. Le Président de la Commission d'enquête internationale a donc insisté sur la nécessité d'engager un processus judiciaire afin de traduire en justice les responsables de tels actes. L'insécurité, a-t-il poursuivi, est notamment alimentée par la présence de jeunes armés se réclamant des forces républicaines, qui doivent à présent être désarmés. Ceci nécessite, entre autres, la création d'une véritable police dûment formée, a-t-il souligné.

M. Muntarbhorn a évoqué l'autre défi que constituent l'aggravation de la crise humanitaire et la présence de milliers de personnes déplacées et autres personnes se cachant dans la brousse par peur de représailles. Il a également attiré l'attention sur la criminalité transfrontalière, en rapport avec le mercenariat, soulignant que la résolution de ce problème nécessite la collaboration de la Côte d'Ivoire avec ses voisins, en vue d'améliorer la stabilité de la sous-région. Il a par ailleurs mis l'accent sur la nécessité de parvenir à une réconciliation entre les communautés et de placer cette question au nombre des priorités des autorités ivoiriennes. Cependant, a-t-il rappelé, une réconciliation sans justice véritable ne saurait être pérenne, car l'impunité est aussi à l'origine de la crise du pays. Aussi, la Commission recommande-t-elle que les responsables des violations soient recherchés et traduits en justice. Il faut également analyser et se pencher sérieusement sur les causes profondes de la crise: chômage, discrimination… De son côté, le Haut Commissariat aux droits de l'homme se doit d'établir un mécanisme indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'ivoire, qui effectuerait un suivi des initiatives nationales et internationales visant à traduire en justice les responsables des violations de droits de l'homme. La Haut-Commissaire doit aussi peser de tout son poids pour accompagner ce processus que la communauté internationale est dans l'obligation de soutenir.

Le rapport de la Commission d'enquête internationale indépendante chargée d'enquêter sur les faits et circonstances entourant les allégations de graves violations des droits de l'homme perpétrées en Côte d'Ivoire à la suite de l'élection présidentielle du 28 novembre 2010, en vue d'identifier les responsables de ces actes et de les traduire en justice paraîtra sous la cote A/HRC/17/48, une version provisoire est disponible en anglais, ainsi qu'un résumé en français). La Commission conclut que durant la période considérée de nombreuses violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire ont été commises par différents acteurs dont certaines pourraient constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre. Ces violations ont été commises par les Forces de Défense et de Sécurité et leurs alliés (milices et mercenaires) puis, lors de leur contre-offensive et depuis leur prise de contrôle du pays, par les FRCI. Les nombreuses victimes, dans l'ouest, le sud-ouest et à Abidjan paient un lourd tribut. La Commission recommande au Conseil des droits de l'homme d'établir un mécanisme indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire. Les trois membres de la Commission d'enquête sont M. Vitit Muntabhorn, M. Suliman Baldo et Mme Reine Alapini Gansou.

Pays concerné

M. KOUADIO ADJOUMANI (Côte d'Ivoire) a pris note du rapport de la Commission d'enquête internationale sur la Côte d'Ivoire, créée conformément au souhait du Gouvernement ivoirien au plus fort de la crise. Il s'est félicité des recommandations de ladite Commission, rappelant qu'elles sont adressées non seulement au Gouvernement ivoirien mais aussi au Conseil des droits de l'homme, à la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et à la communauté internationale. Le représentant ivoirien a assuré que son Gouvernement fait bon accueil à ces recommandations dont la mise en œuvre, pour certaines, a été anticipée, comme le dénotent les engagements récents des autorités ivoiriennes, traduisant ainsi leur détermination à mettre fin à l'impunité et à garantir la promotion et la protection des droits fondamentaux de la personne humaine et des libertés publiques.

Le Gouvernement a en effet pris la mesure de la gravité des faits et a agi de manière volontariste pour apporter une réponse à la situation, a poursuivi le représentant ivoirien. Cette action a en particulier pris la forme de la création d'une Commission dialogue, vérité et réconciliation; d'une saisine de la Cour pénale internationale; du lancement de procédures judiciaires contre certains suspects; ou encore de la création d'un Ministère chargé spécialement des droits de l'homme et des libertés publiques. Le représentant s'est enfin fait l'écho des recommandations de la Commission d'enquête relatives à l'assistance technique, afin de permettre à son Gouvernement d'assurer la mise en œuvre effective et le bon suivi des recommandations qui lui ont été faites.

Débat interactif

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria au nom du Groupe africain) a fait part de l'encouragement des États du continent au Gouvernement de la Côte d'Ivoire, soulignant que malgré les désirs de vengeance s'exprimant ça et là, M. Ouattara a pris la décision de mettre en place une commission de justice et de réconciliation. Le Groupe africain est d'accord avec les conclusions de la commission d'enquête, notamment pour ce qui est d'apporter une assistance multiforme pour permettre un retour à la normale en Côte d'Ivoire.

M. OMAR RABI (Maroc) a tenu à féliciter la Côte d'Ivoire pour l'élection de M. Ouattara et le retour de la paix dans le pays. Le Maroc félicite la Côte d'Ivoire pour avoir accepté les recommandations émises par la Commission d'enquête et son engagement dans la lutte contre l'impunité ainsi que les enquêtes internes menées pour traduire en justice les responsables de violations. Le Maroc encourage la mise en place d'un mécanisme de justice transitionnelle pour mener ces enquêtes, ainsi que la création d'un mandat d'expert indépendant pour accompagner la Côte d'Ivoire dans cette nouvelle voie, notamment au niveau de l'assistance technique dans le domaine des droits de l'homme.

MME ELA GŐRKEM-GŐKÇE (Turquie) a salué les travaux de la commission d'enquête, indiquant que son pays suit de près la situation en Côte d'Ivoire. La Turquie, qui accueille favorablement les mesures prises à ce jour par M. Ouattara, estime que la paix et la prospérité de la Côte d'Ivoire dépendent de la capacité de ce pays à engager une véritable réconciliation et à traduire en justice tous les auteurs de violations des droits de l'homme.

M. SEK WANNAMETHEE (Thaïlande) a dit que sa délégation était alarmée par la poursuite des violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire, particulièrement envers les femmes et les enfants en Côte d'Ivoire. Par ailleurs, la crise humanitaire actuelle dans le pays est particulièrement préoccupante, surtout en ce qui concerne les personnes déplacées. La Thaïlande est favorable à la création d'un mandat d'expert indépendant proposé dans le projet de résolution soumis par le Groupe africain.

MME HOU PEI (Chine) a dit apprécier les efforts de la Côte d'Ivoire pour arrêter les violences et rétablir la paix sociale. La Chine espère que de nouveaux progrès seront accomplis en faveur de la réconciliation nationale, la reconstruction et le développement. La Chine s'est dite prête à coopérer avec la communauté internationale pour aider la Côte d'Ivoire dans ce processus.

M. JEAN-BAPTISE MATTÉI (France) a déclaré que son pays est déterminé à appuyer les efforts des autorités ivoiriennes en vue de rétablir l'état de droit en Côte d'Ivoire ainsi que de garantir le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans ce pays. La France juge indispensable que justice soit rendue et que toute la lumière soit faite sur les graves attaques commises contre des civils, dont certaines pourraient être assimilées à des crimes de guerre ou contre l'humanité. Il ne saurait y avoir de réconciliation durable sans justice, a rappelé le représentant français. Au-delà de l'action humanitaire d'urgence, à laquelle la France a contribué à titre national, il ne faut ménager aucun effort pour porter assistance aux centaines de milliers de personnes réfugiées et déplacées qui n'ont pu encore rentrer chez elles. Le représentant a demandé aux membres de la Commission d'enquête de dire quelle devraient être l'action de la Commission «Vérité, dialogue et réconciliation» et le contenu de la réforme des forces armées et de la justice ivoiriennes. La France apporte son plein soutien au projet de résolution déposé par le Groupe africain.

MME MARIA NAZARETH FARANI AZEVÊDO (Brésil) s'est félicitée de l'engagement de la Côte d'Ivoire pour la mise en œuvre des recommandations de la commission d'enquête. La situation est mûre pour des offres formelles de coopération en matière d'assistance technique afin de faire une véritable différence pour les victimes. Le Brésil est encouragé par l'engagement constant de l'Union africaine et de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest.

MME NICOLE RECKINGER (Union européenne) a réitéré sa condamnation des atrocités commises lors de la crise ivoirienne et a salué l'engagement du Président Ouattara à œuvrer en faveur de la réconciliation nationale dans son pays. La lutte contre l'impunité doit être une priorité, et les responsables doivent être traduits en justice, quel que soit leur camp. L'Union européenne se dit disponible pour soutenir les travaux de la commission «dialogue, vérité et réconciliation» chargée notamment d'apporter réparation aux victimes. L'Union européenne se félicite du projet de résolution porté par le Groupe africain et de la proposition de création d'un mandat d'expert indépendant. L'Union européenne a réitéré son désir de soutenir la reconstruction du pays et de travailler en liaison avec institutions des Nations Unies pour alléger les souffrances des déplacés et refugiés. L'Union européenne a conclu en demandant à la Commission d'enquête d'apporter plus de précisions sur la liste confidentielle de personnes présumées responsables d'exactions et mentionnée dans son rapport.

M. KENICHI SUGANUMA (Japon) a fait part de la satisfaction de son pays quant à l'accomplissement de la mission de la commission d'enquête. Le Japon se félicite que les cinq mois d'affrontement en Côte d'Ivoire se soient terminés par la prise de fonction du Président Ouattara. Le Japon, qui attend que ce Gouvernement œuvre pour la réconciliation, s'inquiète cependant de la persistance de violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire en Côte d'Ivoire. Le Japon espère donc que le Gouvernement de M. Ouattara veillera à la stabilisation de la situation en Côte d'Ivoire.

M. TIMO BAUER-SAVAGE (Allemagne) a salué l'investiture du Président élu Alassane Ouattara et estimé que la fin de la lutte pour le pouvoir et la formation du nouveau gouvernement reconnu par tous les ivoiriens augure d'un futur positif pour le pays. Il pourrait aussi signifier une résurgence de la Côte d'Ivoire en tant que pilier de la démocratie et la stabilité dans toute la région de l'Afrique de l'Ouest, a-t-il aussi auguré. Il a fortement encouragé la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, l'Union africaine et le nouveau Gouvernement à poursuivre leurs efforts pour aider la Côte d'Ivoire dans la voie de la paix, les droits de l'homme et la stabilité. Il s'est félicité du rapport très utile présenté par la commission d'enquête, qui appelle à mettre un terme à la violence et à la politique d'impunité en particulier. Il a assuré que le Gouvernement allemand était disposé à fournir une aide financière supplémentaire pour épauler les efforts du nouveau Gouvernement à améliorer les secteurs public et privé. Le représentant a conclu en recommandant au Gouvernement de la Côte d'Ivoire de rapidement prendre en considération les points proposés par la commission en ce qui concerne la réforme.

M. BAARD HJELOE (Norvège) a réitéré le soutien de son pays aux travaux de la Commission d'enquête internationale, et sa préoccupation face aux diverses exactions qui perdurent en Côte d'Ivoire. La Norvège est aussi très préoccupée par les conséquences du conflit sur les enfants. Tous les responsables de violations des droits de l'homme qui ont combattu aux côtés du Président Ouattara doivent être jugés, comme les autres, a-t-il exigé. Son pays appelle également la Côte d'Ivoire à se conformer aux recommandations de la Commission et de poursuivre tous les suspects par le biais d'enquêtes transparentes et impartiales. La Norvège invite également la Côte d'Ivoire à ratifier le statut de Rome de la Cour pénale internationale au plus vite. Devant la nécessité d'instaurer un dialogue national inclusif en Côte d'Ivoire, il est faut apporter un soutien à la commission «Dialogue, vérité et réconciliation». Appelant au renforcement de l'assistance humanitaire en faveur de la Côte d'Ivoire, la Norvège s'est également déclarée en faveur du projet de résolution présenté par le Groupe africain.

MME ANNE-TAMARA LORRE (Canada) a dit le soulagement de son pays de voir la situation politique en Côte d'Ivoire se stabiliser et la volonté de la population, clairement exprimée lors des élections présidentielles, finalement respectée. Toutefois, la représentante a observé que la situation des droits de la personne demeure précaire en Côte d'Ivoire. Elle a ajouté que le plus grand obstacle à la paix est la culture d'impunité, née de la succession de conflits violents et de la faillite du système judiciaire ivoirien depuis les années 1990. Le Canada salue les discours inclusifs du Président Ouattara, essentiels pour l'apaisement des tensions. Elle appelle le Président Ouattara à prendre les mesures nécessaires pour que les violences commises par ses Forces républicaines contre les populations perçues comme étant pro-Gbagbo cessent immédiatement.

M. PETER WOOLCOTT (Australie) a salué la participation active de l'Organisation des Nations Unies dans la réponse humanitaire et aux enquêtes sur les violations des droits de l'homme en Côte d'Ivoire. L'Australie note que certaines violations des droits de l'homme et du droit international commises durant le conflit pourraient constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre. L'Australie, profondément préoccupé par les 3000 décès issus du conflit, et dont la Commission estime qu'ils sont le résultat de violations des droits de l'homme, affirme avec force que les responsables de ces actes doivent être traduits en justice. Le Gouvernement australien estime que l'engagement de l'Union africaine et de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest aux côtés de la Côte d'Ivoire est vitale pour la stabilité régionale.

MME ANNIKA ÁBERG (Suède) a déclaré que les conclusions du rapport de la Commission d'enquête sont déterminantes et qu'elles doivent être suivies d'une enquête impartiale. La Suède reste cependant inquiète de la poursuite des combats en Côte d'Ivoire. Elle appelle le Gouvernement à faire le nécessaire pour lutter contre l'impunité. La Suède soutient la création d'un mandat d'expert indépendant sur la Côte d'Ivoire, pour que le Conseil soit constamment tenu au courant de la situation.

M. PETER GOODERHAM (Royaume-Uni) a estimé très important que les autorités de la Côte d'Ivoire s'attaquent au problème de l'impunité par le biais d'un mécanisme indépendant et transparent chargé de mener des enquêtes sur toutes les allégations de violations des droits de l'homme et de traduire leurs auteurs en justice. Le Royaume-Uni se félicite en outre des déclarations du Président Ouattara selon lequel les droits de l'homme feront partie du programme présidentiel. Il importe désormais que les structures démocratiques soient inscrites dans la loi, de manière à garantir leur effet concret. À cet égard, il serait utile qu'un expert indépendant appuie les efforts du Gouvernement ivoirien, a estimé le représentant britannique.

MME URŠKA ČAS SVETEK (Slovénie) a dénoncé l'utilisation des enfants et des jeunes dans le conflit, relevé dans le rapport. Elle a demandé aux membres de la Commission d'enquête quelles mesures pourraient être prises pour encourager une coexistence harmonieuse entre les jeunes générations de la Côte d'Ivoire. La représentante a particulièrement appuyé la recommandation de la Commission d'enquête visant à créer un mandat d'expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) s'est félicitée du message envoyé par la communauté internationale lors de la session extraordinaire convoquée en décembre 2010 au sujet de la situation en Côte d'Ivoire et la création de la Commission d'enquête internationale. Les États-Unis soutiennent pleinement la création d'un mécanisme de suivi de la situation et ainsi que celle d'un mandat d'expert indépendant. La communauté internationale doit garantir que les responsables des violations des droits de l'homme en Côte d'Ivoire seront traduits en justice, conformément aux recommandations de la commission. La représentante américaine a félicité le nouveau gouvernement pour sa détermination à lutter contre les exactions qui continuent et poursuivre les responsables, à quelque camp qu'ils appartiennent.

M. SERGEY KONDRATIEV (Fédération de Russie) s'est dit d'accord avec les conclusions des experts au sujet de la complexité des raisons de la crise en Côte d'Ivoire. La Fédération de Russie est très préoccupée par les crimes qui seraient encore commis pour des motifs religieux ou ethniques en Côte d'Ivoire. La Russie demande au Gouvernement ivoirien de s'acquitter pleinement de ses obligations de protection envers toutes les populations civiles et de poursuites des auteurs de violations des droits de l'homme. Le représentant a aussi demandé à la Mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire d'aider les autorités ivoiriennes dans le strict respect des termes de son mandat.

MME LILIANA PADILLA RODRÍGUEZ (Mexique) a salué l'engagement du Gouvernement de la Côte d'Ivoire en faveur du respect et de la protection des droits de l'homme dans le pays. Elle a apporté son soutien à toutes les recommandations de la Commission d'enquête, en particulier celles relatives à la lutte contre l'impunité et à l'attention à apporter aux victimes et aux personnes déplacées. Le Conseil a exprimé son intérêt pour que tous les droits de l'homme soient protégés et garantis pour tous les Ivoiriens, a-t-elle rappelé.

M. JÜRG LAUBER (Suisse) a évoqué toutes les exactions commises en Côte d'Ivoire et mentionnées dans le rapport de la Commission d'enquête internationale. Il s'est inquiété de la crise humanitaire et de la perpétuation des violations des droits de l'homme. La Suisse soutient la recommandation de la Commission appelant le Gouvernement ivoirien à ne pas intégrer les responsables des violations de droits de l'homme dans l'armée et à faire en sorte qu'ils soient traduits en justice. La Suisse recommande aussi une enquête sur les crimes les plus graves commis depuis le 28 novembre 2010 et appelle la Côte d'Ivoire à mettre en œuvre le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. La Suisse a souhaité en savoir davantage au sujet de la recommandation ayant trait à la publication du rapport de la Commission d'enquête internationale.

M. BABAKAR BA (Sénégal) s'est félicité des actes concrets déjà posés et de ceux annoncés par le Président Ouattara. Ces actes sont autant d'initiatives louables qui autorisent le Sénégal à croire en la volonté ferme des autorités ivoiriennes de remédier définitivement, et de la manière la plus appropriée, aux causes et aux conséquences du conflit. Le représentant sénégalais a toutefois estimé qu'au regard des défis majeurs auxquels elle est confrontée, il est évident que la Côte d'Ivoire ne peut les relever seule. Par conséquent, elle a nécessairement besoin de l'appui technique et financier de la communauté internationale, comme l'indiquent de nombreux rapports, y compris celui de la Commission d'enquête internationale, a-t-il souligné.

Organisations non gouvernementales

MME JULIE GROMELLON (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a exprimé son inquiétude face aux exactions et violations des droits de l'homme imputables à des hommes en armes et aux forces de sécurité - auteurs notamment d'exécutions sommaires et d'arrestations arbitraires dans les régions de Duékoué, Guiglo et Abidjan. La représentante s'est toutefois félicitée des engagements pris par le Gouvernement ivoirien en faveur de la lutte contre l'impunité et l'a appelé à rapidement les traduire en actes en ouvrant des procédures judiciaires contre les auteurs présumés et en permettant aux victimes de violations des droits de l'homme de saisir la justice pour que la vérité soit établie, que justice soit rendue et que les victimes puissent obtenir réparation. La représentante a plaidé en faveur de la mise en place, dans les plus brefs délais, d'un processus de vérité, de justice et de réconciliation, comme cela a été recommandé par la Commission d'enquête internationale.

M. JOSÉ LUIS DÍAZ (Amnesty International) a attiré l'attention sur l'urgence qu'il y a à assurer la protection des Ivoiriens en danger. Le Conseil doit jouer un rôle de surveillance et de renforcement de la protection des Ivoiriens, indépendamment de leur origine ethnique ou de leur affiliation politique, a-t-il souligné. Il a fait observer que l'insécurité règne toujours à Abidjan, où des personnes soupçonnées d'être des partisans de l'ancien Président sont victimes d'agressions sous l'œil indifférent, sinon complice, des forces de sécurité. D'autre part, la Côte d'Ivoire est confrontée au problème que pose l'existence de 500 000 personnes réfugiées et déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Le mandat de protection de la Mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire doit donc être renforcé, a estimé le représentant d'Amnesty International, qui a aussi appelé à la prolongation du mandat de la Commission d'enquête internationale jusqu'à la désignation d'un expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire.

MME JULIE DE RIVERO (Human Rights Watch) a rappelé qu'au moins 3000 personnes ont été tuées et de nombreuses femmes violées lors de cette crise en Côte d'Ivoire. Elle a insisté pour que toutes les victimes sans distinction puissent obtenir réparation, rappelant que les «pro-Gbagbo» autant que les «pro-Ouattara» ont tous été victimes d'attaques de la part du camp adverse. Il est important d'amener tous les responsables à répondre de leurs actes, a-t-elle souligné. Aussi, a-t-elle demandé au Conseil la raison pour laquelle il a jugé nécessaire de garder confidentielle la liste des auteurs présumés d'exactions. Elle a également rappelé qu'aucune procédure judiciaire crédible n'avait encore été engagée contre les membres des forces républicaines. Le Procureur de la Cour pénale international pourrait apporter une grande contribution en la matière, a-t-elle déclaré.

M. MAURICE KATALA (Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs - AIPD) a rappelé que depuis les élections présidentielles controversées de décembre 2010, la crise ivoirienne a été exacerbée par des atteintes massives aux droits de l'homme qui continuent de se produire à la suite de l'intervention des forces françaises de l'opération Licorne. Cette intervention est liée à la protection des ressources naturelles et à la position géostratégique de la Côte d'Ivoire en Afrique, a-t-il affirmé. La protection et la promotion de la démocratie en Afrique ne sont pas la préoccupation du Président Sarkozy, a-t-il ajouté, rappelant le discours qu'avait tenu à Dakar le Président français, selon lequel l'homme africain ne serait pas encore entièrement entré dans l'histoire. La crise ivoirienne, qui est loin d'être finie du seul fait de l'accession au pouvoir du Président Ouattara, commande une relecture critique de l'ordre cynique du monde.

M. MALUZA WASILUADIO MAVULA (Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples - CIRAC) a déclaré qu'au regard du profond mépris affiché par la France à l'égard des vies humaines en Côte d'Ivoire, il est juste d'affirmer que l'intervention militaire française de mars dernier dans ce pays n'avait rien à voir avec la défense des droits de l'homme et de la démocratie. Cette intervention avait pour but essentiel de sécuriser les intérêts économiques, financiers et commerciaux français et occidentaux dans cette région stratégique du continent africain, a-t-il affirmé. Le représentant a souligné que les évêques africains ne se trompent pas lorsqu'ils condamnent avec fermeté, comme ils l'ont fait dans leur déclaration du 7 juin 2011, «tous les impérialismes quelle que soit leur couleur». Il a enfin dénoncé les motivations colonialistes de toutes les opérations militaires françaises en Afrique subsaharienne depuis cinquante ans.

MME KHADIDJA KHADA (Femmes Africa Solidarité) a souligné qu'aujourd'hui, après l'investiture du Président Ouattara, il est de plus en plus question de réconciliation nationale; une Commission dialogue, vérité et réconciliation vient d'être créée, a-t-elle rappelé. Dans cette perspective, les femmes ivoiriennes réclament leur place dans ce processus car elles entendent y apporter leur contribution citoyenne avec neutralité et efficacité, a-t-elle indiqué.

Conclusions des membres de la commission d'enquête

M. MUNTARBHORN, Président de la Commission d'enquête internationale sur la Côte d'Ivoire répondant à un certain nombre de questions soulevées par les délégations, a souligné que l'enquête qu'a menée sa commission a permis de mettre en lumière l'importance qu'il y a à lutter contre l'impunité en Côte d'Ivoire, non seulement au niveau national mais aussi en collaboration avec la Cour pénale internationale. Le travail de la Commission dialogue, vérité et réconciliation doit se faire de concert avec un processus judiciaire apportant réparation aux victimes, a-t-il par ailleurs indiqué. La réforme de l'armée, quant à elle, se concentre sur la professionnalisation, la formation adéquate et l'éducation aux droits de l'homme de ses membres, ainsi que sur la mise à l'écart des éléments non contrôlés. Le rôle de la jeunesse est important pour l'établissement d'un dialogue interethnique, a par ailleurs souligné M. Muntarbhorn. À propos des listes confidentielles d'auteurs présumés d'exactions, il a rappelé que cette pratique de la confidentialité avait déjà cours en 2004 et visait à respecter la présomption d'innocence dans le cadre d'une démarche qui n'en vise pas moins à assurer une obligation redditionnelle.

Pour MME REINE ALAPINA-GANSOU, membre de la commission d'enquête, la Commission de vérité et de réconciliation devra d'une part être inclusive, et donc accueillir tant les vainqueurs du jour que les adversaires d'hier; et, d'autre part, s'appuyer les expériences et les bonnes pratiques tirées d'autres commissions aux fonctions similaires mises sur pied par d'autres pays.

M. SULIMAN BALDO, membre de la commission d'enquête, a observé que la chaîne de commandement de l'armée ivoirienne est impossible à identifier, du fait de l'existence de facto de deux armées. Il importe donc d'unifier le commandement militaire, de même que de clarifier l'appartenance des agents à la police ou à la gendarmerie. Il faut aussi que les personnes impliquées dans des violations de droits de l'homme soient identifiées et poursuivies. M. Baldo a enfin souligné que le Gouvernement doit accorder toute la priorité à son action en faveur de la jeunesse, passablement déboussolée et susceptible d'être instrumentalisée à des fins de déstabilisation.

M. MUNTARBHORN, en réponse à l'Union européenne, a déclaré que le mot «complémentarité» serait le mot juste. Il a indiqué que le fait de se rendre sur le terrain et de rencontrer les victimes était l'une des priorités de la Commission d'enquête. Il a remercié le Secrétariat des Nations Unies et son personnel pour leur excellent travail et l'appui offert à tous les membres de la Commission. Il a enfin assuré la population de la Côte d'Ivoire du plein soutien des membres de la Commission pour la protection de leurs droits et dans la poursuite du programme de stabilité et de réconciliation dans le pays.


Situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent l'attention du Conseil

Présentation de rapports sur la Côte d'Ivoire et la Syrie

MME NAVANETHEM PILLAY, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a présenté son rapport sur l'évolution de la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire. Elle a déclaré que le Haut Commissariat avait mis en place une ligne téléphonique d'urgence qui a reçu plus de 12 000 appels depuis sa création, en décembre 2010. De même, une mission a été réalisée en Côte d'Ivoire du 2 au 9 avril dernier, afin d'y évaluer la situation des droits de l'homme et de rappeler, entre autres, l'importance de traduire les coupables de violations des droits de l'homme en justice. Mme Pillay a souligné et rappelé que la situation s'était passablement dégradée à l'approche de l'arrestation de M. Gbagbo, à l'occasion de laquelle les exactions se sont alors multipliées: recours à la force aveugle, exécutions sommaires, tortures, pillages, violences sexistes et sexuelles, appels à la haine dans les médias, à la télévision notamment. Mme Pillay a aussi fait référence à sa mission conduite en avril dernier dans les régions du Moyen-Cavally et des Dix-Huit Montagnes. La mission a constaté que, du 1er décembre 2010 au 24 avril dernier, de graves violations du droit international et des droits humains ont été commis en particulier à Duékoué, entraînant au moins 1012 victimes et 46 cas de viols sur des femmes enceintes et des mineures, notamment. Mme Pillay a déploré que, malgré le calme relatif régnant dans la capitale, des affrontements mortels persistent entre les deux camps, ces abus ayant une dimension ethnique, selon certains rapports.

Il est donc nécessaire que la Côte d'Ivoire retrouve sa cohésion nationale et sociale: cette tâche s'avérera difficile, a mis en garde la Haute Commissaire. Mme Pillay a demandé que les coupables de violations des droits de l'homme soient traduits en justice, estimant que la «Commission dialogue, vérité et réconciliation» pourrait jouer un rôle important en la matière. Cependant, cette commission ne doit en aucun cas se substituer à la justice, a rappelé Mme Pillay. Les processus de justice transitoire doivent être globaux et prévoir des poursuites, des réparations pour les victimes et des réformes de la justice. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme est prêt à aider le Gouvernement ivoirien dans ce processus, a conclu Mme Pillay.

La Haut-Commissaire a également présenté son rapport sur la situation des droits de l'homme en Syrie. Indiquant que le Gouvernement de ce pays n'avait toujours pas répondu à sa demande de visite, Mme Pillay l'a instamment prié de coopérer avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Le peuple syrien, a-t-elle rappelé, ne fait que demander le changement et la démocratie, ce à quoi le Gouvernement a répondu par une violence excessive. Des milliers de personnes ont fui vers la Turquie, par crainte de représailles.

Il semble en outre que le Gouvernement se livre à une campagne de manipulation des médias étrangers, a regretté Mme Pillay. Elle a en effet jugé «inappropriée» l'invitation du Gouvernement syrien faite à certains journalistes à se rendre dans des lieux choisis d'avance pour y constater l'existence de supposées fosses communes de militaires tués par des groupes armés. La Haut-Commissaire a condamné l'usage d'armes lourdes contre des manifestants et des passants et la présence de chars de combat et d'hélicoptères dans les villes. Elle a aussi déploré le nombre croissant de victimes parmi les civils, soit plus de 1100, qui témoigne de l'absence de retenue du Gouvernement dans la répression. Déplorant en outre des déplacements massifs de population et des mauvais traitements infligés à des détenus, Mme Pillay a appelé le Gouvernement à cesser d'attaquer son propre peuple. Elle a rappelé qu'il s'agissait là de crimes graves, dont les responsables doivent rendre compte. Mme Pillay a conclu sa présentation en invitant les pays voisins de la Syrie à garder leurs frontières ouvertes et collaborer avec le Haut Commissariat.

Le rapport de la Haut-Commissaire sur la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire (A/HRC/17/49 en anglais seulement; un résumé en français est disponible) souligne que, bien que les attaques directes des forces de sécurité contre les civils aient perdu quelque peu de leur intensité depuis l'arrestation de l'ancien Président Gbagbo le 11 avril 2011, la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire demeure précaire, marquée par des violations répétées des droits de l'homme, dont des exécutions sommaires, le recours excessif à la force, des disparitions forcées, des viols, des actes de torture, des traitements cruels, inhumains et dégradants, des arrestations et des détentions arbitraires et des pillages. En outre, les secteurs de la santé, de l'agriculture et de l'éducation, et l'économie en général, ont beaucoup souffert de la crise postélectorale, entraînant la détérioration de la situation humanitaire. La situation dans la partie occidentale du pays, où certaines des pires violations des droits de l'homme et destructions ont été commises, a été particulièrement préoccupante. Les processus en cours, aux plans national et international, pour régler le problème de l'impunité, seront essentiels pour assurer la justice et la réconciliation en Côte d'Ivoire. La Commission pour le dialogue, la vérité et la réconciliation, dont le Président Ouattara a promis la création depuis sa campagne électorale, peut jouer un rôle non négligeable à cet égard.

Le Conseil est également saisi du rapport préliminaire sur la situation des droits de l'homme en République arable syrienne (A/HRC/17/51 à paraître). Le Conseil avait prié, à sa seizième session, le Haut-Commissariat de dépêcher d'urgence en République arabe syrienne une mission chargée d'enquêter sur les violations alléguées du droit international des droits de l'homme et d'établir les faits et circonstances de ces violations et des crimes perpétrés, afin que les personnes responsables ne restent pas impunies et répondent clairement de leurs actes. Le rapport indique que le matériel actuellement devant le Haut Commissaire est source de vives préoccupations et reflète une situation désastreuse des droits de l'homme dans la République arabe syrienne. Les allégations de violations des droits les plus fondamentaux sur une si grande échelle exigent une enquête approfondie et, en ce qui concerne les auteurs, une pleine reddition de comptes. La Haut-Commissaire renouvelle son appel au Gouvernement de la République arabe syrienne d'accorder l'accès à la Commission d'enquête pour lui permettre d'établir une évaluation plus approfondie de la situation des droits humains en Syrie dans son rapport de suivi de la prochaine session du Conseil.

Pays concerné

M. KOUADIO ADJOUMANI (Côte d'Ivoire) a indiqué que son pays se souviendrait toujours avec reconnaissance du précieux soutien de la communauté internationale, des pays frères et amis, ainsi que de l'engagement des institutions régionales et internationales pour faire triompher la démocratie et la légalité. Il s'agit d'une «victoire pour la démocratie et d'un triomphe pour les valeurs cardinales de justice et de liberté», a déclaré le représentant. La délégation ivoirienne exprime à nouveau l'engagement ferme du Président Ouattara à rompre définitivement avec l'impunité. En conclusion, le représentant a exprimé tous les remerciements du peuple et du Gouvernement ivoiriens.

Débat général

M. ANDRÁS DÉKÁNY (Hongrie au nom de l'Union européenne) a souligné des aspects particulièrement inacceptables de la situation des droits de l'homme en République arabe syrienne. Le représentant a déploré que le Gouvernement syrien ait refusé l'accès de son pays à une mission du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et à l'aide humanitaire, pour venir en aide aux civils. Il a aussi condamné l'arrestation par les autorités syriennes de journalistes et de défenseurs des droits de l'homme. Le représentant l a regretté par ailleurs que le Gouvernement du Bélarus refuse de coopérer avec le Conseil des droits de l'homme. La répression contre le personnel médical à Bahreïn est également un motif de préoccupation pour l'Union européenne. Son représentant a aussi dénoncé les attaques contre des manifestants et des civils au Yémen, appelant les autorités de ce pays à changer d'attitude et à s'ouvrir au dialogue avec les manifestants et les membres de l'opposition. Le représentant de l'Union européenne a encore souligné que la situation des droits de l'homme reste préoccupante en République islamique d'Iran et au Myanmar. Il s'est aussi inquiété de la situation des droits de l'homme dans le camp d'Ashraf, en Irak, et de l'utilisation de la force contre les habitants de ce camp. Le représentant a déploré des disparitions forcées en République populaire de Chine et souhaité que les arrestations arbitraires et les disparitions forcées cessent dans ce pays. Regrettant l'usage de la force pour résoudre le problème du monastère de Kirti, l'Union européenne demande aux autorités chinoises de permettre que des observateurs indépendants se rendent sur ce site.

MME ALISON LECLAIRE CHRISTIE (Canada au nom d'un groupe de 54 États) a constaté la constante détérioration de la situation des droits de l'homme en République arabe syrienne, rappelant que nombre d'instances internationales, dont le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, ont lancé des appels à la retenue. La représentante a relevé le caractère systématique et étendu des violences en Syrie, plus d'un millier de personnes ayant été tuées à ce jour, outre de nombreuses allégations de torture, d'assassinats et de détention arbitraire. La poursuite de la violence, le couvre-feu, le bouclage militaire sont particulièrement préoccupants, a dit la représentante, appelant le Gouvernement syrien à respecter la volonté de son peuple. Elle lui a aussi demandé d'autoriser la venue d'une mission de la Haut-Commissaire sur son territoire.

M. BOUDEWIJN J. VAN EENENNAAM (Pays-Bas, au nom d'un groupe de 73 États) a demandé au Gouvernement du Yémen de tout mettre en œuvre en vue d'une résolution pacifique à la crise actuelle. Les États au nom desquels s'exprime le représentant sont préoccupés par les allégations d'assassinats, tortures et disparitions forcées à l'encontre de femmes et d'enfants. Le représentant a appelé La communauté internationale, les Émirats arabes unis, l'Arabie saoudite et d'autres parties concernées à soutenir le Yémen dans ses efforts pour protéger les civils, les réfugiés et les personnes déplacées. Enfin, le représentant néerlandais a demandé au Gouvernement du Yémen d'inviter la Haut-Commissaire à se rendre sur place.

M. JEAN-BAPTISTE MATTÉI (France) a déclaré que la situation en Syrie est marquée par une répression de plus en plus brutale à l'encontre de la population civile. Le bilan de la répression serait désormais de plus de 1200 morts. D'innombrables cas de torture sont signalés. Les autorités syriennes doivent sans délai et sans conditions autoriser l'accès de leur territoire au Comité international de la Croix-Rouge, aux agences humanitaires et à la mission d'enquête du Haut Commissariat aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Syrie. Le représentant français a précisé que le Gouvernement syrien doit concrétiser l'amnistie générale annoncée le 31 mai dernier en libérant les milliers de prisonniers maintenus arbitrairement en détention. La situation en Syrie menace la stabilité de l'ensemble de la région, a estimé le représentant de la France.

M. Mattéi a aussi déclaré que la situation en Libye demeure extrêmement préoccupante et que les violations du droit international et des droits de l'homme commises par les forces relevant de M. Kadhafi sont d'une extrême gravité, comme cela a été unanimement souligné lors du dialogue interactif avec la Commission d'enquête internationale sur ce pays. Il a aussi condamné les violations des droits de l'homme au Yémen, appelant les autorités à emprunter la voie de la réconciliation dans un esprit d'unité nationale et de dialogue. Le représentant a appelé à une transition politique ordonnée, sur la base des propositions du Conseil de coopération du Golfe. Passant à la situation à Bahreïn, le délégué français a salué l'annonce faite par le roi Hamad d'un dialogue national qui doit s'engager à partir du 1er juillet. Le représentant français a encore rappelé que les manifestations de juin 2009 en République islamique d'Iran avaient été réprimées d'une manière brutale et que, deux années plus tard, des avocats, des journalistes, des artistes, des défenseurs des droits de l'homme sont toujours incarcérés et purgent des peines extrêmement lourdes. Le représentant a regretté que les Bahaïs servent de boucs-émissaires au régime. Il a appelé l'Iran à coopérer avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans ce pays. Concernant Sri Lanka, la France soutien le rapport du panel d'experts mandatés par le Secrétaire général des Nations Unies et a encouragé les autorités sri-lankaises à prendre en compte ses conclusions. Il a aussi dénoncé les pressions exercées sur les défenseurs des droits de l'homme en Chine et au Bélarus.

M. JÜRG LAUBER (Suisse) a salué la «réactivité du Conseil» aux situations survenues au cours des derniers mois et souligné l'importance d'en assurer un suivi approprié. La Suisse reste convaincue que la communauté internationale doit toutefois faire davantage. Son représentant a appelé le Gouvernement du Yémen à cesser les violences. Il a salué la prochaine visite de la Haut-Commissaire à Bahreïn, la Suisse condamnant avec fermeté la répression brutale exercée par le gouvernement de ce pays. En Ouganda, la Suisse demande que soient poursuivis et jugés les auteurs des violations des droits de l'homme. La Suisse est en outre préoccupée par la poursuite des graves violations des droits humains au Myanmar, ceux des minorités ethniques en particulier. Enfin, la Suisse appelle à la tenue d'une enquête au Bélarus sur les événements ayant suivi les dernières élections.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a fait part de l'inquiétude de son pays devant la répression violente de manifestations pacifiques dans plusieurs pays. La représentante a ainsi condamné le meurtre de la journaliste Mme Halel Sahabi, assassinée en Iran par les forces de sécurité lors des funérailles de son père. La représentante a dénoncé la détention de plus de 2000 prisonniers politiques en Birmanie, ainsi que la persistance des violations des droits de l'homme dans ce pays. En Chine, des artistes, des croyants, des blogueurs et leurs familles sont arrêtés en nombre toujours plus importants et réduits au silence, tandis que plus de vingt musulmans ouighours, ramenés de force dans le pays, sont toujours portés disparus. La représentante a rappelé que le «printemps arabe» avait fait naître des espoirs de liberté chez ces peuples, espoirs étouffés dans la violence dans plusieurs pays. Au Yémen, les États-Unis soupçonnent le Gouvernement de financer les auteurs de violences contre la population, plus de 8000 blessés étant recensés à ce jour. La représentante des États-Unis a également dénoncé des violations des droits de l'homme en Libye, à Cuba, à Sri Lanka et au Zimbabwe, et appelé tous les États à respecter les droits de leurs citoyens.

M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a dit sa préoccupation devant les graves exactions commises dans le cadre des multiples manifestations de civils au cours des dernières semaines. Le droit international interdit le recours disproportionné à la force pour réprimer des manifestations non violentes et pacifiques. Il a appelé à des enquêtes pour faire la lumière sur les violations commises dans plusieurs pays d'Afrique du Nord et du Proche-Orient. Il a également fait part de sa préoccupation quant à la poursuite des violations flagrantes des droits de l'homme en Côte d'Ivoire et a exhorté le nouveau Gouvernement à se pencher sur cette question. Il a condamné la violence, les détentions arbitraires, les tortures et harcèlements contre les journalistes et les défenseurs des droits de l'homme, particulièrement au Bélarus où il a noté une instrumentalisation de la justice. Il a salué le rôle efficace joué par la Haut-Commissaire des droits de l'homme dans les diverses situations mentionnées.

M. PETER GOODERHAM (Royaume-Uni) a fait part de la préoccupation de sa délégation face à la détérioration de la situation en Syrie, appelant le gouvernement de ce pays à respecter les normes internationales dans le traitement des détenus. Il lui a demandé de laisser la mission d'établissement des faits entrer sur son territoire. Par ailleurs le Royaume-Uni appelle le Yémen à mettre un terme à l'effusion de sang. Le représentant britannique a aussi constaté que l'Iran est le pays comptant le plus grand nombre de journalistes emprisonnés dans le monde. Sa délégation est préoccupée par les informations concernant de graves violations des droits de l'homme à Bahreïn. S'agissant de Sri Lanka, le Royaume-Uni réitère sa demande au gouvernement de ce pays d'enquêter sur les allégations d'exécutions extrajudiciaires. Il a enfin mentionné des situations fragiles en matière de droits de l'homme au Zimbabwe, en Érythrée et en «Birmanie».

M. JIANG YINGFENG (Chine) a appelé à éviter les divisions au sein du Conseil des droits de l'Homme, et à ne pas tomber dans la logique de «deux poids deux mesures». La Chine est préoccupée face à la situation en Afrique du Nord et souhaite insister sur trois points principaux: le principe de non-ingérence et de respect des choix faits par les pays; l'opposition à l'usage de la force et le recours aux négociations; le rôle constructif que doit avoir la communauté internationale pour le développement durable et la paix en Afrique du Nord et en Asie occidentale. La Chine est préoccupée par le fait que les États-Unis n'ont pas pris de mesures pour ratifier le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ni d'autres conventions essentielles pour les droits de l'homme, ni limité le recours à la force de leurs forces de sécurité. La Chine appelle les États-Unis à fermer la prison de Guantánamo et à mener des enquêtes sur les morts de civils innocents en Iraq et en Afghanistan. La Chine regrette également les violations des droits de l'homme dans certains pays d'Europe et déplore la situation de minorités comme les Roms, la montée de l'islamophobie et de l'antisémitisme ainsi que du sentiment antimigrants. La Chine appelle donc ces pays à régler leurs propres problèmes et à réfléchir à leurs causes profondes au lieu de donner des leçons aux autres.

M. KENICHI SUGANUMA (Japon) a appuyé les initiatives du Conseil des droits de l'homme et réaffirmé que tous les peuples ont le droit à aspirer à la jouissance de tous les droits de l'homme. Il a formé le vœu que le problème des violations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, comme le manque d'accès à la nourriture, le mauvais état des infrastructures pénitentiaires et les restrictions sévères à la liberté d'expression et d'opinion. Il a rappelé que le problème des enlèvements attendait encore une solution et qu'il était essentiel que le Gouvernement de la République populaire démocratique de Corée devrait la réexaminer, ne serait-ce que par égard pour les victimes japonaises et comme convenu en août 2008. En outre, le représentant japonais a appuyé les efforts de certains États de l'Afrique du Nord et du Proche Orient en vue d'une transition stable vers la démocratie et la réalisation de réformes internes. Dans ce contexte, il a condamné l'usage excessif de la force contre les citoyens en Libye et en Syrie. Le Japon considère la libération et l'amnistie des prisonniers de conscience au Myanmar en mai dernier comme un pas positif dans le processus de réconciliation nationale. Il appuie par ailleurs le processus national de réconciliation à Sri Lanka et jugé qu'il était nécessaire que le Gouvernement de ce pays dirige les efforts visant la lutte contre l'impunité pour les atrocités commises lors de la dernière phase de la guerre civile.

M. GEIR SJØBERG (Norvège) a exprimé la préoccupation de sa délégation face à la situation à Bahreïn, au Pakistan, en République démocratique du Congo, au Swaziland et au Bélarus. Dans ce dernier pays, les peines infligées à des manifestants et dirigeants de l'opposition constituent un nouveau pas dans la mauvaise direction. La Norvège appelle les autorités bélarussiennes à libérer tous les prisonniers politiques. Par ailleurs, elle félicite la Colombie pour la loi adoptée en faveur des victimes et pour la restitution de terres. Elle se félicite aussi de certaines initiatives positives de l'Azerbaïdjan après la libération du célèbre éditeur Eynulla Fatullayev; elle encourage les autorités à régler les cas en souffrance d'opposants ou de manifestants emprisonnés.

MME MARIA NAZARETH FARANI AZEVEDO (Brésil) a félicité le courage et la force du peuple arabe qui s'est battu pour la liberté d'expression et la croissance économique. Cette révolution apporte la preuve que les droits de l'homme sont universels et interdépendants. Cependant, le Brésil déplore que le Conseil n'ait pas appuyé les revendications d'autres populations se trouvant dans des situations similaires. Il plaide ainsi pour une diversification des outils de travail du Conseil et l'adoption de nouvelles méthodes pour que toutes les situations puissent y être abordées. Le représentant brésilien a regretté regrette en effet qu'une logique «deux poids deux mesures» sape la légitimité du Conseil, et réaffirmé l'engagement du Brésil à ses côtés pour ouvrir le dialogue.

M. FRANÇOIS ROUX (Belgique) a rappelé qu'en mars, le Ministre belge des affaires étrangères avait déclaré devant le Conseil que les soulèvements dans le monde arabe démontrent que les populations ne peuvent être privées indéfiniment de leurs droits civils et politiques, qu'elles exigent leur liberté et leur dignité et qu'elles demandent la réalisation effective de leurs droits de l'homme. Il a salué la décision de l'Égypte d'accueillir une mission du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et s'est félicité que cette mission ait eu l'occasion de rencontrer des représentants d'une trentaine d'organisations de la société civile. Il en ressort que la plupart des aspirations légitimes de la population doivent être traduites dans des réformes démocratiques concrètes et effectives. À cet égard, a-t-il dit, une mesure importante d'établissement de la confiance serait la levée de l'État d'urgence. Abordant la situation des droits de l'homme à Bahreïn, le délégué belge a déploré les violations des droits de l'homme, dont les actions répressives contre le personnel médical et l'usage de la peine de mort comme moyen de répression. Il a appelé Bahreïn à introduire un moratoire aux exécutions le plus rapidement possible. La situation ne s'améliore pas en Iran et la Belgique appelle les autorités à coopérer avec le Rapporteur spécial du Conseil. Le représentant a aussi observé que le Bélarus était le seul État européen à appliquer la peine de mort et a exhorté le gouvernement de ce pays à mettre fin aux violations des droits de l'homme, et comme signe d'engagement, à rétablir son moratoire sur la peine de mort. Le représentant belge a également demandé au Pakistan d'abroger sa loi sur le blasphème et à la Chine de lever les restrictions sur l'accès à l'Internet.

M. FEDOR ROSOCHA (Slovaquie) a également déploré le refus du Bélarus de collaborer avec la communauté internationale pour ce qui concerne le respect de ses engagements en matière de droits de l'homme. Par ailleurs, la Slovaquie est préoccupée par la poursuite de la répression de la dissidence en Iran et l'application fréquente de la peine capitale. Le refus de coopérer de la Syrie avec le Haut-Commissariat est déplorable, a par ailleurs estimé le représentant. Il a par ailleurs évoqué la situation préoccupante au Myanmar, à Bahreïn et à Sri Lanka.

M. JUAN ANTONIO QUINTANILLA (Cuba) a dénoncé l'«offensive» des pays occidentaux menée au sein du Conseil pour remettre en place la logique de stigmatisation et de discrédit qui avait déjà été fatale à la feu Commission. Ces mêmes puissances jouissent de l'impunité pour les bombardements d'innocents en Lybie, en Iraq et ailleurs, et restent silencieuses face aux humiliations faites aux détenus de Guantánamo. Le représentant cubain s'est ainsi insurgé contre la «brutalité et mépris de la dignité humaine» dont font preuve de nombreux pays du Nord, cherchant actuellement des prétextes à leurs sanctions unilatérales. Ainsi, Cuba a appelé les pays du Sud à «serrer les rangs» et refuser ces attaques. Le représentant cubain a conclu en saluant l'engagement de la Syrie à respecter les droits de son peuple et à gérer ses problèmes internes sans ingérence étrangère.

M. MUHAMMAD SAEED SARWAR (Pakistan) a réitéré l'engagement de son pays en faveur des droits de l'homme et informé le Conseil que son pays a ratifié, la semaine dernière, la Convention des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées. Il a déploré le meurtre de M. Shazat et présenté des condoléances à sa famille, en assurant que tout sera fait pour éclaircir cette affaire. Il a appuyé la liberté de la presse, qui constitue une des valeurs fondamentales de la démocratie.

M. RICARDO GONZÁLEZ (Uruguay) a évoqué les graves événements de Syrie en soulignant qu'ils entraînent actuellement l'exode d'une partie de la population. Il a rappelé que le Conseil avait condamné le recours à la force contre la population civile; à l'instar du Secrétaire général de l'ONU, il a aussi appelé les autorités syriennes à traduire en justice les responsables de la répression. Le représentant uruguayen a également demandé aux autorités syriennes d'ouvrir une enquête indépendante sur ces événements extrêmement graves, ainsi qu'un dialogue en vue d'un processus de réformes politiques.

Observateurs

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a attiré l'attention du Conseil sur la situation des droits de l'homme au Sahara occidental. Cette situation est un cas flagrant de violation du droit à l'autodétermination et ne devrait pas être justifiée par le concept d'«intégrité territoriale», a-t-il souligné, rappelant en outre la résolution 1979 adoptée en avril dernier par le Conseil de sécurité. Il a également demandé que le Conseil soit régulièrement tenu informé de la situation à cet égard et a fait observer que le rapport de 2006 de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme n'a «mystérieusement» jamais été publié. Il est urgent de rétablir la vérité, protéger les victimes et mettre fin aux «polémiques stériles dans ce Conseil», a conclu le représentant algérien.

M. REINHARD SCHWEPPE (Allemagne) a indiqué que son pays restait préoccupé par la situation des droits de l'homme dans de nombreux pays. Il a par ailleurs qualifié de positive la situation dans plusieurs pays arabes où la population civile a pris son destin en main pour revendiquer plus d'ouverture, de démocratie et de transparence. Cependant, a poursuivi le représentant allemand, le meurtre du défenseur des droits de l'homme Floribert Chebeya en République démocratique du Congo en 2010 est emblématique du fait que trop de défenseurs des droits de l'homme doivent craindre pour leur vie simplement parce qu'ils se prononcent en faveur de tels droits. Il a exprimé son inquiétude face au nombre élevé de meurtres de défenseurs des droits de l'homme en Colombie et dans d'autres pays d'Amérique latine; cela vaut également pour Sri Lanka, a-t-il ajouté, avant d'insister sur la nécessité de rendre des comptes dans de tels contextes. Le représentant allemand a ensuite dénoncé les situations de harcèlement, d'intimidation, de détentions arbitraires et de persécutions de membres d'organisations non gouvernementales durant le processus de réforme au Zimbabwe et a fait observer qu'en Éthiopie, la nouvelle législation applicable aux organisations de droits de l'homme a fait chuter le nombre d'organisations présentes au niveau local ainsi que leur capacité de surveillance des violations des droits de l'homme. Enfin, le représentant allemand a attiré l'attention sur le sort des femmes défenseurs des droits de l'homme, surtout en Iran, et a salué l'exemple courageux que constitue «la campagne du million de signatures» pour l'égalité entre les sexes en Iran.

M. PETER WOOLCOTT (Australie) a condamné les graves violations des droits de l'homme commises en Syrie, pays auquel il a demandé d'autoriser le Haut-Commissariat aux droits de l'homme à se rendre sur son territoire. S'agissant de la situation en Libye, il a indiqué que son pays soutenait l'enquête ouverte par la Cour pénale internationale. Le représentant australien a également évoqué les situations en Iran, au Myanmar, en République populaire démocratique de Corée et en République démocratique du Congo, ainsi qu'aux Fidji où – a-t-il déploré – la Constitution n'a toujours pas été rétablie.

M. CHRISTIAN STROHAL (Autriche) a salué le travail qu'a effectué le Conseil ces six derniers mois, s'agissant notamment de la Côte d'Ivoire et de la Libye. Il a par ailleurs appelé la Syrie à faciliter l'accès au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, étant donné la dégradation de la situation sur le terrain dans ce pays. Il s'est également dit préoccupé par diverses situations, s'agissant notamment des violations de droits de l'homme commises en Iran, à Sri Lanka et dans d'autres pays, particulièrement à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme et des journalistes, victimes de tortures et d'assassinats. Le représentant de l'Autriche s'est enfin dit très inquiet face à la détérioration de la situation au Bélarus depuis les élections de décembre dernier; une répression brutale contre les médias indépendants est menée en toute impunité dans ce pays, a-t-il déploré. En conclusion, il a appelé à s'inspirer des transitions entamées par l'Égypte et la Tunisie.

MME WENDY HINTON (Nouvelle-Zélande) a catégoriquement condamné la répression tant en Libye qu'en Syrie et a réitéré l'appui de son pays à la résolution 1973 du Conseil de sécurité. Elle a exhorté le colonel Kadhafi à cesser toutes les hostilités contre les civils, à garantir le plein accès aux travailleurs humanitaires et à protéger les droits des journalistes. Elle a par ailleurs dit partager l'inquiétude d'autres délégations quant à la difficulté d'accès au territoire syrien et a lancé un appel au Gouvernement de ce pays pour qu'il accepte la mission d'établissement des faits mise sur pied par le Conseil et la mission humanitaire des Nations Unies aux fins d'évaluer la situation sur le terrain. La représentante néo-zélandaise a d'autre part indiqué que le lieutenant-colonel Mara, ancien membre de l'actuel régime des Fidji, a quitté son pays et a appelé le régime fidjien à respecter les droits de l'homme de sa population, à cesser les actes de violence à l'encontre des opposants politiques, à lever le régime d'urgence publique et le contrôle des médias; les Fidji doivent en revenir à une démocratie constitutionnelle, a-t-elle insisté.

M. GERALD CORR (Irlande) a fait part de la profonde préoccupation de son pays face à la situation au Soudan, particulièrement dans la région d'Abyei, et a appelé les autorités des deux entités du pays à garantir la protection des droits de l'homme d'ici au 9 juillet. Il a par ailleurs demandé aux autorités soudanaises de permettre l'accès des agences internationales au Darfour. Après avoir fait part de ses préoccupations au sujet des situations en Somalie et au Bélarus, le représentant irlandais a déploré la poursuite de l'occupation militaire des territoires palestiniens. S'agissant du monde arabe, a-t-il poursuivi, l'Irlande est extrêmement préoccupée par la réponse répressive apportée par certains gouvernements aux demandes légitimes de leurs citoyens. Le représentant a cité les cas de la Syrie, de la Libye et de Bahreïn. Il a enfin fait part de la préoccupation de sa délégation face aux situations en Birmanie-Myanmar et à Sri Lanka.

MME ALISON LECLAIRE CHRISTIE (Canada) a déploré les violentes mesures de répression prises contre les citoyens syriens, enfants y compris, et s'est dite solidaire de ce peuple. Elle a appelé le Gouvernement syrien à faire en sorte que la transition vers la démocratie s'effectue de manière pacifique et que les responsables d'exactions soient traduits en justice. Elle s'est par ailleurs réjouie de l'élection de M. Ouattara en Côte d'Ivoire mais s'est dite inquiète de la persistance de la violence dans l'ouest du pays; aussi, a-t-elle tenu à réitérer le soutien de son pays à la Commission d'enquête internationale. Elle s'est finalement dite inquiète face à la situation au Bélarus, où journalistes, activistes et autres personnes sont actuellement condamnés pour avoir exercé leur liberté d'expression; elle a appelé ce pays à respecter ses obligations internationales en matière de droits de l'homme.

M. SEYED MOHAMMAD REZA SAJJADI (République islamique d'Iran) a fait état de la détérioration de la situation des droits de l'homme dans certains pays occidentaux; la qualifiant d'alarmante, il a estimé qu'elle exigeait toute l'attention de la communauté internationale. Il a illustré ses propos en dénonçant les graves crimes contre l'humanité soutenus par les États-Unis, évoquant plus particulièrement ceux commis dans les territoires arabes et palestiniens occupés; les centaines de morts à la suite d'attaques de drones en Afghanistan et au Pakistan; la mise sur pied de centres de détention secrets dans plusieurs régions du monde; ou encore l'humiliation et la torture des détenus et le recours à des méthodes d'interrogatoires inhumaines dans la prison de Guantanamo et d'autres centres de détention à l'étranger. En Europe, les minorités telles les Roms, les musulmans, les migrants et ou encore les requérants d'asile se heurtent à un degré sans précédent d'attitudes racistes et d'actes xénophobes, a poursuivi le représentant iranien, citant des exemples en Suède, en France, au Danemark, en Norvège et aux Pays-Bas.

MME ANNA UGGLA (Suède) a fait part de l'extrême préoccupation de sa délégation face aux graves violations des droits de l'homme en Syrie. Elle a indiqué soutenir les initiatives du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et appuyer la nomination d'un rapporteur sur ce pays. Elle a par ailleurs déploré les violations massives des droits de l'homme à Bahreïn, au Yémen et en Libye. Après avoir également évoqué les situations de la Côte d'Ivoire, de Sri Lanka, de Cuba et du Zimbabwe, la représentante suédoise a demandé à la Chine de s'abstenir de recourir à l'usage de la force au monastère tibétain de Kirti, demandant aux autorités de ce pays d'autoriser la venue d'observateurs.

M. STEFFEN SMIDT (Danemark) a condamné les violations des droits de l'homme commises par les forces syriennes et appelé le pays à respecter ses obligations internationales: respect de la liberté de réunion, levée des restrictions sur l'Internet et accueil du Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Le représentant a également condamné les attaques et assassinats de civils au Yémen, pays actuellement au bord de la «guerre civile». Son pays est aussi préoccupé par la situation au Bahreïn depuis mars dernier, où de nombreux rapport font état de tortures et de décès de personnes mises en détention. Le Danemark appelle également à l'adoption d'un moratoire sur la peine capitale par Bahreïn. Concernant Sri Lanka, le représentant a salué le rapport du panel d'experts du Secrétaire général, rapport qui montre la responsabilité des deux belligérants dans les violations des droits de l'homme. Le représentant s'est également dit préoccupé par la situation au Bélarus et a demandé la libération immédiate de tous les prisonniers politiques dans ce pays. Saluant le retour à la démocratie en Côte d'Ivoire, il s'est dit choqué par les violations commises pendant et après le conflit. Le représentant a appelé le nouveau Gouvernement à assurer le respect de tous les droits de l'homme.

M. PATRICK RUMLAR (République tchèque) a exhorté les autorités du Bélarus à mettre fin immédiatement et sans condition aux processus politiques en cours et à libérer tous les prisonniers politiques. Il a exprimé son inquiétude devant le procès pour diffamation intenté au journaliste M. Andrzej Poczobut, correspondant de la Gazeta Wyborcza polonaise, et la tentative des autorités bélarussiennes de fermer les seuls média indépendants enregistrés, Nasha Niva et Narodnaya Volja. Le représentant a appelé les autorités à coopérer avec l'Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe (OSCE) et de permettre le bon fonctionnement du point d'information du Conseil de l'Europe. Le représentant tchèque a en outre condamné les violations massives des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que du droit à la vie en Syrie, demandant au Gouvernement de ce pays de coopérer avec la mission d'enquête du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, conformément à la résolution 16/1 du Conseil.

M. WALID ABU-HAYA (Israël) a condamné «l'inconcevable répression exercée par le régime syrien contre des manifestants pacifiques dans tout le pays». Le représentant a appelé la communauté internationale à tout faire pour arrêter l'effusion de sang. Israël est aussi gravement préoccupé par la sombre situation des droits de l'homme en Libye. Suite aux travaux de la commission d'enquête, il ne fait aucun doute que des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité sont commis par les forces loyales à Kadhafi, a dit le représentant. Sa délégation soutient la prorogation du mandat de la Commission d'enquête concernant la Libye. Le représentant israélien a aussi dénoncé des violations des droits de l'homme en Iran.

M. MIKHAIL KHVOSTOV (Bélarus) a déploré «l'offensive de l'Union européenne contre le Bélarus» au Conseil des droits de l'homme. Il a dénoncé des pratiques politiques destinées, à ses yeux, à entraîner le Conseil sur le chemin de la politisation. Le représentant en a voulu pour preuve l'absence de réaction du Conseil en 2011, face à la répression brutale de manifestations à Stuttgart, Londres ou Madrid. Il a dénoncé les violations des droits des migrants dans de nombreux États européens. Il s'est interrogé, pour la regretter, sur l'inaction du Haut-Commissariat aux droits de l'homme face au refus des États-Unis d'accueillir un de ses représentants pour enquêter sur la prison de Guantánamo. Au final, le représentant bélarussien a appelé l'Union européenne à ne pas remettre en cause un dialogue constructif avec son pays et demandé au Conseil de rejeter la résolution de l'Union européenne sur le Bélarus.

Le représentant du Venezuela a déploré l'emploi de la force en Syrie et le nombre élevé de victimes des deux côtés du conflit. Remarquant que ce pays est situé dans une zone de tension géopolitique, le représentant s'est dit préoccupé que la situation qui y prévaut actuellement soit exploitée par des forces extérieures pour aggraver la confrontation et l'instabilité dans la région. Il a rappelé au Gouvernement syrien ses engagements, notamment en faveur de réformes démocratiques, et réaffirmé sa conviction que le peuple syrien pouvait résoudre ses problèmes sans ingérence extérieure.

Organisations non gouvernementales

M. GIANFRANCO FATTORINI (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP, au nom également de International Educational Development, Bureau international de la paix et France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand) a souligné que «le vent du 'printemps arabe' était porteur d'espoir, les peuples se libérant de la peur en manifestant publiquement leurs revendications légitimes». Mettant en cause l'attitude de plusieurs puissances mondiales «soudainement préoccupées par le sort des peuples», il a rappelé que la première dimension de la responsabilité de protéger consistait en la responsabilité de prévenir, laquelle comporte de nombreux éléments trop souvent sciemment négligés. Pour le MRAP, les campagnes menées actuellement ne servent que des intérêts particuliers: «Les libertés et droits fondamentaux ne seront jamais imposés par les armes».

MME ORETTA BANDETINI DI POGGIO (Women's Human Rights International Association, au nom également de France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand, International Educational Development, et le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP) a dénoncé l'exécution de centaines de personnes et d'autres maltraitances commises contre des femmes dans le camp d'Ashraf, en Iraq. Elle a rappelé que, lors de sa visite dans ce pays, le représentant des Nations Unies s'est vu refuser l'accès aux informations adéquates. La représentante a appelé les États-Unis à assumer leurs responsabilités si l'Iraq ne le fait pas, et la communauté internationale à se doter des moyens de suivre la situation.

M. TENZIN KAYTA (Société pour les peuples menacés, au nom également de International Educational Development, et Nonviolent Radical Party, Transnational and Transparty) a exhorté la Chine à pleinement respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales du peuple tibétain. Il a rappelé qu'alors qu'ils ne faisaient qu'exercer leur droit au rassemblement et à la liberté d'expression, de nombreux Tibétains ont péri durant les soulèvements de 2008 sur le Plateau tibétain. Le représentant a rappelé que le Comité contre la torture et le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires ont tous deux exhorté les autorités chinoises à mener des enquêtes aux fins de traduire en justice les auteurs des violences. Pourtant, la Chine n'a toujours pas fourni d'informations à ce sujet.

MME DIANE ALA'I (Communauté internationale bahá'íe) a mis en cause la République islamique d'Iran qui discrimine la communauté bahaïe, dont les membres sont par exemple interdits d'accès à l'université. Au cours d'une procédure en justice, un juge sympathique à la cause des bahaïs a admis que ses mains étaient liées par un texte officiel datant de 1991, interdisant toute éducation supérieure aux Bahaïs, a-t-elle rapporté.

MME JULIE DE RIVERO (Human Rights Watch) a déclaré que les forces de sécurité syriennes ont tué plus de 1200 manifestants, utilisant délibérément des armes mortelles. À ce jour, plusieurs centaines de personnes seraient enfermées, dont des enfants. Nombre de ces personnes ont été torturées. Human Rights Watch appelle le Conseil à suivre de près la situation en Syrie. La représentante s'est également préoccupée de la situation à Sri Lanka et des allégations de violations de droits de l'homme commises pendant le conflit. Le rapport présenté en avril dernier par le panel d'experts désignés par le Secrétaire général a mis en lumière les responsabilités partagées des deux parties en conflit, a souligné la représentante. Elle a regretté que le Gouvernement sri-lankais ait refusé la recommandation du panel en vue de la création d'un mécanisme indépendant chargé d'enquêter sur cette question. C'est pourquoi la représentante a appelé le Conseil à prendre des mesures concrètes pour que les deux parties en conflit répondent de leurs crimes.

M. HASSAN NAYEB HASHEM (Verein Südwind Entwicklungspolitik) a considéré que les événements tragiques en Iran ne devraient pas être occultés par ceux du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord. Le représentant a dénoncé la mort en Iran, il y a quelques jours, de Mme Haleh Sahabi durant les funérailles de son père, M. Ezatollah Sahabi. Peu après cet incident, deux prisonniers politiques de la prison d'Evin, M. Hoda Rezazadeh Saber et M. Amir Khosro Dalirsani, ont entamé une grève de la faim en guise de réponse à cet acte tragique et brutal. Le représentant a précisé que M. Hoda Saber est décédé peu après le début de son action. La raison de son décès, selon les autorités iraniennes, serait une crise cardiaque. Or, 64 prisonniers ont confirmé que M. Saber ne souffrait d'aucune maladie lorsqu'il a commencé sa grève de la faim.

MME CATHERINE MORRIS (Asian Legal Resource Centre, au nom également de Lawyers' Rights Watch Canada) a fait part de la grave préoccupation des deux organisations au sujet d'attaques perpétrées contre des journalistes au Bangladesh et au Pakistan, notant que des dizaines d'entre eux avaient été tués dans ce dernier pays. La représentante a aussi fait part de son inquiétude face aux représailles contre la presse visant à faire taire les journalistes bangladais enquêtant sur la torture et les exécutions extrajudiciaires.

MME JANA BRANDT (Nonviolent Radical Party, Transnational and Transparty) a rappelé que, le 9 juillet 2009, des Ouïgours avaient organisé une manifestation non violente qui fut réprimée dans le sang. Elle a regretté qu'à ce jour, aucune enquête n'ait été diligentée à ce sujet par les autorités chinoises. La représentante a appelé le Conseil à faire pression sur le Gouvernement chinois pour qu'il assume ses responsabilités. La représentante a dénoncé la discrimination généralisée dont sont victimes les Ouïgours en Chine. Elle s'est également dite préoccupée par la collaboration étroite des membres de l'Organisation de coopération de Shanghai, conduisant à des extraditions de personnes menacées dans leur pays. La représentante a dénoncé le Kazakhstan qui refuse l'asile et se livre à des extraditions forcées de personnes menacées en Chine notamment.

M. ELMAMI AHL AHMED BRAHIM (Internationale démocrate de centre) a dénoncé les conditions dans les «camps de concentration du Polisario» situé sur le territoire algérien. Le représentant a indiqué que les populations vivant dans ces camps ne pouvaient exercer leurs droits à l'emploi et à l'éducation, non plus que leur liberté d'opinion et de mouvement. Il a dénoncé le déplacement forcé de centaines d'enfants, condamnés à l'exil dans des conditions dramatiques, et le détournement massif de l'assistance humanitaire par les responsables du Polisario

M. MILOUD CHAOUCH (Agence internationale pour le développement - Aide-Fédération) a attiré l'attention du Conseil sur le calvaire de 45 000 familles marocaines expulsées d'Algérie en 1975. Il a rappelé les recommandations en leur faveur du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, lors de l'examen du rapport de l'Algérie en avril 2010. Le représentant a déploré que ces recommandations n'aient toujours pas été prises en considération par l'Algérie. Il a lancé un appel pour qu'elles ne restent pas lettres mortes.

M. SEKHON AWATAR SINGH (Centre for Human Rights and Peace Advocacy) a attiré l'attention du Conseil sur le sort des minorités non hindoues en Inde, considérées comme citoyens de seconde zone. Elles dépendent entièrement des décisions des Hindous au pouvoir et vivent sous leur joug, a affirmé le représentant. Depuis l'indépendance du pays, une élite poursuivrait une politique discriminatoire envers les minorités visant à les rendre dépendantes, et les priver du développement économique. Ces minorités vivent de plus dans la crainte permanente des violences commises par des extrémistes hindous. Le représentant a prié l'Inde d'accorder l'égalité des droits économiques, sociaux et culturels à tous, évoquant notamment la situation des populations pauvres musulmanes.

Droit de réponse

MME KSHENUKAN SENEWIRATNE (Sri Lanka) a déclaré que le processus de réconciliation impliquait vérité, justice et réparation, la «Commission de réconciliation et des enseignements tirés» œuvrant en ce sens. Malheureusement, Sri Lanka est confronté à des allégations sans fondement cherchant à empoisonner l'atmosphère et qui vont à l'encontre du défi délicat de la réconciliation, a-t-elle observé. Évoquant un document vidéo montrant apparemment des exactions, elle a rappelé que ce ne serait pas la première fois que l'on serait confronté à un document truqué. S'il devait s'avérer que ce document est authentique, ce que vérifiera la Commission, des sanctions seront prises sans faute.

M. FÉLIX PEÑA RAMOS (Venezuela) a regretté l'intervention de la délégation des États-Unis qui, comme à l'accoutumée, diffame et diabolise les gouvernements ne se soumettant pas à ses prétentions hégémoniques. Il a dénoncé les violations commises par les États-Unis qui accueillent par exemple sur son territoire un terroriste avéré tel que Luis Posada Carriles. En conclusion, le Venezuela engage le Gouvernement des États-Unis à mettre un terme à son harcèlement envers le Venezuela et les gouvernements progressistes du monde et qu'il honore son engagement en faveur de l'établissement d'une relation nouvelle avec l'Amérique latine.

M. JUAN ANTONIO QUINTANILLA (Cuba) a dénoncé les attaques des États-Unis toujours dirigées contre les pays du Sud. Il a appelé ce pays à libérer les cinq Cubains détenus illégalement sur son territoire, à lever le blocus imposé à Cuba, et à rendre compte des violations commises à Guantánamo et Abou Ghraib, notamment. Il a demandé la raison pour laquelle les États-Unis ne mentionnaient jamais les discriminations dont sont victimes leurs propres communautés autochtones. Il a aussi condamné la Suède et la République tchèque qui se permettent de pointer du doigt son pays, alors qu'eux-mêmes se sont rendus complices de la CIA dans l'affaire des «prisons secrètes» destinées à accueillir des personnes torturées par la CIA en Europe. Il a également dénoncé l'hypocrisie et la servilité de la Suède ainsi que les mauvais traitements des Roms en République tchèque.

M. JAMES MANZOU (Zimbabwe) a déclaré qu'une fois de plus, les États-Unis ont tenu à montrer certains pays du doigt. Or, ils ont eux-mêmes imposé des sanctions illégales au Zimbabwe qui ont causé de grandes souffrances à la population. Il a aussi rappelé l'héritage de la discrimination raciale et de la colonisation dans son pays. Il a accusé les États-Unis de ne s'intéresser, non pas aux droits des personnes mais seulement aux ressources du pays, ce à quoi le Zimbabwe s'oppose fermement. Il a finalement exigé que les États-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni soient tenus responsables de violations des droits de l'Homme et meurtres de civils commis en Iraq, en Afghanistan et en Libye.

MME BUDOOR AHMED (Bahreïn) a évoqué les actes regrettables et douloureux survenus à Bahreïn qui mettaient en danger la sécurité du pays en cherchant à le déstabiliser par des actes de sabotage. Une Commission d'enquête a été mise en place et celle-ci fera la lumière sur ces événements, a-t-elle expliqué, rappelant que son pays protégeait l'égalité des citoyens devant la loi. L'état d'urgence a été décrété par le Roi afin d'assurer la stabilité du pays. Celui-ci a ouvert par ailleurs la perspective d'un dialogue national, initiative qui a été louée par plusieurs pays amis.

M. YANG ZHILUN (Chine) a déploré les accusations sans fondements à l'égard de la Chine de la part de quelques organisations non gouvernementales occidentales. Les citoyens chinois peuvent s'exprimer, notamment par l'Internet, ce qui implique néanmoins de ne pas porter atteinte à la liberté d'autrui. Dans le monastère cité lors du débat, un certain nombre de moines ont provoqué des incidents et suscité le désordre, ce qui a contraint les autorités à rétablir l'ordre. Il n'existe aucun cas de disparition forcée, a affirmé le représentant chinois. La Chine invite les critiques à faire un examen de conscience et à ne pas se livrer à des accusations non fondées.

M. KIM YONG HO (République populaire démocratique de Corée) a constaté que certains pays tels que les États-Unis ne reconnaissaient pas leur propres abus et crimes commis dans des pays comme l'Iraq ou l'Afghanistan. Quant au Japon, s'il s'intéressait vraiment aux droits de l'homme, il devrait mettre un terme à la discrimination envers les étrangers. Le Japon doit aussi faire face à son propre passé plutôt que de revenir sans cesse sur des cas qui ont déjà été réglés.

Le représentant d'Azerbaïdjan a répondu aux déclarations de la Norvège en rappelant que le roi norvégien s'était rendu dans son pays et y avait salué le climat pacifique de l'Azerbaïdjan. Il a nié l'existence de prisonniers politiques et déclaré que toutes les organisations non gouvernementales mentionnées par la Norvège avaient finalement avoué avoir violé les dispositions nationales relatives aux organisation non gouvernementale.

M. OMAR HILALE (Maroc) a fustigé l'intervention du représentant algérien «passé maître dans l'art» de masquer les violations sur son propre territoire en pointant le Maroc du doigt. Or, tandis que le Maroc poursuit sereinement ses réformes, l'Algérie continue à se livrer à des violations généralisées des droits de l'Homme. Le représentant a ainsi cité diverses mesures nationales prises par le Maroc en la matière, alors même que les manifestations pacifiques seraient encore interdites en Algérie. Il a également souligné que ce pays refuse toujours l'accès des rapporteurs spéciaux à son territoire, et que les rares qui avaient pu s'y rendre avaient unanimement dénoncé la situation grave des droits de l'homme. Le représentant marocain a finalement souligné que toutes les organisations non gouvernementales avaient libre accès à son territoire et que la diversité culturelle y était protégée, alors que l'Algérie continue de nier ce droit à sa minorité kabyle.

M. GRIMA KASSAYE AYEHU (Éthiopie) a démenti que la législation de son pays limite les droits des organisations de la société civile. La législation locale, tout au contraire, donne des droits aux organisations non gouvernementales sans restreindre en aucune manière leurs activités.

M. OSAMU SAKASHITA (Japon) a répondu à la délégation de la République populaire démocratique de Corée en indiquant qu'il n'existait aucune discrimination d'aucune sorte dans son pays, envers quiconque, Coréens inclus. S'agissant des cas d'enlèvements de citoyens japonais, ceux-ci ne sont pas entièrement réglés, contrairement aux affirmations de la délégation.

M. BOUALEM CHEBIHI (Algérie) a déploré que la délégation marocaine se soit crue autorisée à dénoncer de prétendues violations des droits de l'homme dans son pays, tout en faisant silence sur l'occupation illégale d'un territoire non autonome par le Maroc. L'Algérie ne renoncera pas au droit à l'autodétermination des peuples, à commencer par celui du Sahara occidental. L'Algérie accueille par ailleurs sans difficulté les représentants des Nations Unies sur son territoire, ce qui n'est pas le cas au Sahara occidental occupé par le Maroc.

M. KIM YONG HO (République populaire démocratique de Corée) a réitéré que les cas des disparus avaient été résolus, cinq d'entre eux étant rentrés au Japon. L'attitude du Japon est motivée simplement par l'hostilité envers son pays. Le représentant coréen a rappelé les millions de morts causés par le militarisme japonais en Asie. Il a appelé le Japon à mettre un terme à son attitude envers son pays.

M. OSAMU SAKASHITA (Japon) a souligné qu'il existait d'autres victimes d'enlèvements, cinq seulement étant rentrées au pays. En 2008, les deux pays voisins étaient parvenus à un accord en vue de la conduite d'une enquête sans délais, a rappelé le représentant japonais. Quant au passé, le Japon a exprimé ses regrets et remords pour les maux qu'il a causé dans la période antérieure à 1945. Son représentant appelle la «Corée du Nord» à ne pas éviter ses responsabilités en matière de droits de l'homme.


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HRC11/090F