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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DEMANDE L'ENVOI D'URGENCE D'UNE MISSION D'ÉTABLISSEMENT DES FAITS EN SYRIE

Compte rendu de séance
Il clôt sa session extraordinaire par l'adoption d'une résolution condamnant fermement le recours par les autorités syriennes à la violence

Le Conseil des droits de l'homme a adopté cet après-midi, par 26 votes pour, neuf contre et sept abstentions, une résolution demandant au Haut-Commissariat aux droits de l'homme de dépêcher de toute urgence une mission en Syrie chargée d'enquêter sur toutes les allégations de violations du droit international des droits de l'homme. Le Conseil conclut ainsi sa seizième session extraordinaire consacrée à «la situation des droits de l'homme en République arabe syrienne».

Dans le texte adopté aujourd'hui et présenté par les États-Unis, le Conseil condamne fermement le recours par les autorités syriennes à des violences ayant entraîné la mort de manifestants pacifiques. Il appelle le Gouvernement syrien à mettre un terme sans délai à toutes les violations des droits de l'homme, à protéger sa population, à respecter pleinement tous les droits et libertés fondamentaux, à relâcher immédiatement tous les prisonniers de conscience et les personnes détenues de manière arbitraire, et à cesser immédiatement toute intimidation, persécution et arrestations arbitraires. Il exhorte par ailleurs les autorités syriennes à élargir la participation politique en vue d'assurer le respect des libertés civiles et d'améliorer la justice sociale.

Ce texte a fait l'objet d'un vote demandé par le Pakistan. S'exprimant à titre de pays concerné, la délégation syrienne avait déclaré que le texte proposé était déséquilibré et porteur d'un mauvais message adressé à la communauté internationale. Il avait appelé tous les États membres, en particulier ceux soucieux du dialogue constructif, à voter contre le projet.

Achevant son débat général avant l'adoption de la résolution, le Conseil a entendu des déclarations des délégations observatrices suivantes: Pays-Bas, Irlande, Sri Lanka, Égypte, Australie, Honduras, Allemagne, Italie, Inde, Nicaragua, Pérou, Liban , Bolivie, Danemark, Indonésie, Venezuela, Nouvelle-Zélande, Canada, Panama, Bélarus, Vietnam, Iran, Turquie, Paraguay, République populaire démocratique de Corée, Soudan, Afrique du Sud, Portugal, Israël, Autriche, Botswana, Suède, Iraq et Algérie. Un représentant du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a aussi fait une déclaration.

Sont également intervenues les organisations non gouvernementales suivantes: Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH, au nom également de Cairo Institute for Human Rights Studies; Human Rights Watch; CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens; Commission internationale de juristes; Amman Center for Human Rights Studies; Agence des cités unies pour la coopération Nord-Sud; Human Rights Information and Training Center; Arab Organization for Human Rights; Reporters sans frontières - international; Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme; Centre indépendant de recherches et d'initiatives pour le Dialogue – CIRID; United Nations Watch; Amnesty International; Maarij Foundation for Peace and Development et Espace Afrique International.

De nombreux intervenants ont déploré le recours aux tirs à balles réelles à l'encontre des manifestants pacifiques. Les représentants d'organisations non gouvernementales ont fourni des informations sur la situation sur le terrain, en particulier d'agissant du nombre de personnes tuées et blessées, et ont attiré l'attention sur les manifestations en cours aujourd'hui même.

Ouverte ce matin, cette seizième session extraordinaire était convoquée par les États-Unis avec le soutien de quinze États membres du Conseil, ainsi que 21 pays observateurs. Le Conseil a adopté ad referendum son rapport concernant cette session extraordinaire.
Le Conseil des droits de l'homme tiendra sa prochaine session ordinaire du 30 mai au 17 juin 2011.


Adoption d'une résolution

Aux termes de sa résolution sur la situation actuelle des droits de l'homme en République arabe syrienne dans le contexte des événements récents (A/HRC/S-16/L.1, à paraître en français), le Conseil des droits de l'homme condamne fermement le recours par les autorités syriennes à des violences ayant entraîné la mort de manifestants pacifiques. De même, il condamne fermement les entraves à la fourniture de soins médicaux. Le Conseil appelle le Gouvernement syrien à mettre un terme sans délai à toutes les violations des droits de l'homme, à protéger sa population, à respecter pleinement tous les droits et libertés fondamentaux, notamment la liberté d'expression et de réunion. En outre, le Conseil demande au Gouvernement syrien de relâcher immédiatement tous les prisonniers de conscience et les personnes détenues de manière arbitraire, y compris celles détenues avant les événements récents; de même que de cesser immédiatement toute intimidation, persécution et arrestations arbitraires d'avocats, défenseurs des droits de l'homme et journalistes, notamment. Il exhorte par ailleurs les autorités syriennes à élargir la participation politique en vue d'assurer le respect des libertés civiles et d'améliorer la justice sociale.

Dans ce texte, le Conseil appelle les autorités syriennes à s'abstenir de toutes représailles contre des personnes ayant participé à des manifestations pacifiques, ainsi qu'à permettre la fourniture d'une aide d'urgence aux personnes dans le besoin. Le Conseil insiste sur l'importance de l'organisation par les autorités syriennes d'une enquête crédible et impartiale, conforme aux normes internationales, et de la traduction en justice des responsables d'agressions contre des manifestants pacifiques, y compris quand ces responsables appartiennent aux forces de sécurité gouvernementales.

Enfin, le Conseil demande au Haut-Commissariat aux droits de l'homme de dépêcher de toute urgence une mission en Syrie chargée d'enquêter sur toutes les allégations de violations du droit international des droits de l'homme et d'établir les faits et les circonstances de ces violations et des crimes perpétrés, afin d'éviter toute impunité et de veiller à ce que toutes les responsabilités à cet égard soient assumées. La mission devra en outre présenter un rapport préliminaire ainsi qu'une mise à jour verbale sur la situation des droits de l'homme en Syrie à la prochaine session du Conseil.

Ont voté pour (26): Argentine, Belgique, Brésil, Burkina Faso, Chili, Espagne, États-Unis, France, Ghana, Guatemala, Hongrie, Japon, Kirghizistan, Maldives, Maurice, Mexique, Norvège, Pologne, République de Corée, République de Moldova, Royaume-Uni, Sénégal, Slovaquie, Suisse, Uruguay et Zambie.

Ont voté contre (9): Bangladesh, Chine, Cuba, Équateur, Fédération de Russie, Gabon, Malaisie, Mauritanie et Pakistan.

Abstentions (7): Arabie saoudite, Cameroun, Djibouti, Nigéria, Thaïlande, Ouganda et Ukraine.

Absents (4): Angola, Bahreïn, Jordanie et Qatar.


Déclarations concernant le texte examiné

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a présenté le projet de résolution sur «La situation actuelle des droits de l'homme en République arabe syrienne dans le contexte des récents événements». Elle a remercié les délégations qui ont collaboré à ce texte de manière constructive en gardant à l'esprit l'importance d'adopter une attitude responsable. Elle a espéré que la résolution sera adoptée par consensus, montrant par là que le Conseil des droits de l'homme est apte à réagir aux situations préoccupantes de droits de l'homme.

M. FAYSAL KHABBAS HAMOUI (Syrie), s'exprimant à titre de pays concerné, a déclaré que le texte proposé est déséquilibré et est porteur d'un mauvais message adressé à la communauté internationale. Il conforte en particulier les mouvements extrémistes qui préconisent la violence contre les civils pour parvenir à leurs fins. La Syrie a œuvré avec toutes les délégations pour aboutir à un projet acceptable par tous, qui soit fondé et objectif. Malheureusement, cette ouverture s'est heurtée à l'obstination de la délégation des États-Unis, a déploré le représentant syrien. Ce dernier a appelé tous les États membres, en particulier ceux soucieux du dialogue constructif, à voter contre le projet.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan) a estimé que les sessions extraordinaires du Conseil des droits de l'homme doivent être utilisées dans des cas rares qui exigent clairement une réaction du Conseil. Il a fait observer que beaucoup parmi les États qui se sont prononcés en faveur de la tenue de cette session ont adopté, par le passé, des positions sur certaines évolutions en matière de droits de l'homme qui font aujourd'hui douter de leurs réelles motivations. Pour le représentant pakistanais, il est essentiel que les sessions extraordinaires débouchent sur un résultat équilibré et impartial. La situation en Syrie n'est pas unique; elle existe dans d'autres pays; stigmatiser et montrer la Syrie du doigt n'est par conséquent pas justifié. Montrer du doigt est une approche contreproductive, a insisté le délégué. Selon lui, le Conseil doit mener ses travaux sur la base de sa résolution fondatrice qui, a-t-il rappelé, insiste sur l'importance du dialogue et de l'engagement. Il aurait été utile que le résultat de cette session soit un dialogue entamé avec les autorités du pays. Or, vu la méthode, il est difficile pour tout État souverain d'accepter ce type d'intervention dans les affaires intérieures du pays. Pour toutes ces raisons, le Pakistan souhaite que la résolution soit soumise au vote.

M. ALBERTO J. DUMONT (Argentine) a déclaré que son pays a lancé un appel aux autorités de tous les pays afin qu'elles respectent les revendications pacifiques des populations. L'Argentine rejette à cet égard toutes les réponses militaires à ce type de revendications.

M. XIA JINGGE (Chine) a expliqué que son pays a depuis toujours préconisé la résolution des problèmes par le dialogue. Le Conseil des droits de l'homme doit adopter une position objective et non sélective. La Chine ne peut accepter qu'un État soit humilié; elle s'oppose à l'application de doubles standards. Selon la délégation chinoise, si elle était adoptée aujourd'hui, cette résolution compliquerait la situation des droits de l'homme en Syrie et rendrait plus tendue la situation dans le pays. Elle pourrait en outre créer un dangereux précédent. Le représentant chinois a regretté que les efforts de négociations déployés par son pays à l'égard de ce texte n'aient pas abouti. Pour toutes ces raisons, la Chine se prononce contre ce texte.

M. RODOLFO REYES RODRÍGUEZ (Cuba) a déclaré que son pays appuie tout particulièrement la liberté d'information authentique, celle par exemple dont se revendique le site Internet Wikileaks. Cuba craint que le Conseil des droits de l'homme ne se transforme progressivement en un instrument à la solde des intérêts militaires des États-Unis et des anciennes puissances coloniales européennes en perte de vitesse. Le représentant a regretté que l'utilisation de la force par l'OTAN en Libye entraîne nombre de pertes civiles. Tout l'argent du monde est malheureusement disponible pour financer les aventures militaires, a regretté le représentant, condamnant la perpétuation de lieux de détention barbares tels que Guantánamo.

M. VLADIMIR ZHEGLOV (Fédération de Russie) a expliqué s'être à plusieurs reprises exprimé sur cette initiative qui, selon lui, se base sur des affrontements et est contraire aux droits de l'homme. Elle viole les principes d'universalité, de non-sélectivité et d'objectivité; elle est contraire à une coopération et un dialogue véritable. En outre, la délégation russe regrette que l'auteur de la résolution n'ait pas été disposé à accepter les amendements proposés par le pays concerné et d'autres délégations. Le Fédération de Russie est préoccupée par la situation en Syrie, mais la position de principe du pays est de ne pas accepter de résolutions montrant du doigt un pays particulier.

MME GULNARA ISKAKOVA (Kirghizstan) a observé que tant le Gouvernement syrien que le peuple syrien traversent des difficultés à l'heure actuelle. La représentante a assuré les autorités syriennes de son respect et exprimé ses condoléances aux familles des victimes de la violence actuelle. La représentante a fait part de l'expérience récente de son pays, confronté à des violences de même nature: le Kirghizstan a coopéré avec la communauté internationale à la réalisation d'enquêtes indépendantes sur les événements tragiques qu'il a connus en avril 2010, en vue d'éliminer tout risque de répétition. En l'espèce, le Kirghizstan estime que le projet de résolution sur la Syrie est compatible avec la nécessaire coopération avec les autorités de ce pays. Le Kirghizstan recommande donc son adoption.

Intervenant après le vote, Mme MARIA NAZARETH FARANI AZEVÊDO (Brésil) a regretté que le Conseil n'ait pu parvenir à une décision consensuelle sur le projet de résolution. La représentante a souligné que ce cas diffère des autres cas similaires dont a été saisi le Conseil par le passé. Le Brésil a voté en faveur du projet compte tenu de sa préoccupation devant la situation des populations civiles en Syrie. Il estime que la mission envisagée par le texte devra être impartiale et objective; le Conseil devra pour sa part examiner toutes les situations de droits de l'homme pour ce qu'elles sont, de manière impartiale, a souligné la représentante brésilienne.

M. ANDRÁS DÉKÁNY (Hongrie) au nom de l'Union européenne, s'est dit satisfait de l'adoption de la résolution à une grande majorité. Le représentant a regretté que certains amendements aient été déposés tardivement, et ne correspondent pas entièrement aux principes acceptés: il aurait fallu que le texte de la résolution mentionne explicitement l'exigence du respect des plus hautes normes de droits de l'homme par les membres du Conseil.


Fin du débat: déclarations d'observateurs

M. BOUDEWIJN J. VAN EENENNAAM (Pays-Bas) a déclaré que son pays était alarmé par la force exercée par les autorités syriennes contre des manifestants exerçant le droit à la liberté d'assemblée et d'expression. Le représentant a dénoncé la poursuite de la répression violente, la persécution et les arrestations arbitraires commises à l'encontre de civils, dont témoignent nombre de rapports d'avocats, de défenseurs des droits de l'homme, de journalistes et de manifestants pacifiques. Ces événements démontrent que les autorités syriennes font fi des appels de la communauté internationale à mettre un terme immédiat à la violence et qu'elles n'entendent absolument pas écouter les aspirations légitimes du peuple syrien, non plus qu'appliquer les réformes de grande ampleur qui s'imposent pourtant. Le représentant néerlandais a appelé les autorités syriennes à cesser immédiatement tout acte de violence et à respecter ses engagements internationaux en matière de respect des droits et libertés fondamentaux. Il a observé que la Syrie ne respecte pas les normes les plus élevées de droits de l'homme, comme sa candidature au Conseil des droits de l'homme devrait l'y inciter.

M. GERARD CORR (Irlande) a réaffirmé le droit des Syriens à la vie, à la liberté d'association, d'opinion et d'assemblée. Il s'est inquiété de l'usage disproportionné de la force à l'encontre des personnes exerçant pacifiquement ces droits en Syrie. Des centaines de manifestants pacifiques ont été tués ces dernières semaines, a-t-il déploré. Les autorités ont littéralement fermé des villes, restreint l'accès à Internet et muselé les médias, et arrêté des centaines de militants et de personnalités de l'opposition. Pour le représentant irlandais, cette session extraordinaire est un message supplémentaire à la Syrie pour qu'elle change radicalement de voie. Les actions à prendre sont claires, a-t-il poursuivi. Il faut immédiatement cesser les violences à l'encontre des citoyens syriens et adopter une retenue qui a, semble-t-il, fait défaut jusqu'ici. Il faut en outre permettre aux citoyens de se rassembler et de protester; il faut libérer sans délai les détenus politiques et militants; enfin, il faut entamer un véritable dialogue avec les manifestants. Les événements de ces derniers mois au Moyen Orient en en Afrique du Nord ont montré que le dialogue est le seul moyen d'avancer, a insisté le représentant irlandais, pour qui répondre à la contestation par la violence et l'intimidation est contreproductif.

M. U.L.M. JAUHAR (Sri Lanka) a déclaré que la convocation d'une session extraordinaire devrait se faire en concertation avec les pays concernés, conformément au principe de dialogue et de coopération qui régissent les travaux du Conseil. De même, les travaux du Conseil doivent être marqués par l'impartialité et le respect des principes énoncés dans la résolution qui a donné naissance à l'institution. Sri Lanka estime que le projet de résolution présenté par l'Organisation de la Conférence islamique mérite toute l'attention des membres du Conseil.

M. MAHMOUD AFIFI (Égypte) a indiqué avoir suivi avec beaucoup d'attention les événements récents qui se sont produits en Syrie. Il a estimé que le dialogue entre toutes les parties constitue la meilleure solution face à la situation actuelle. Il a rappelé que tous les peuples ont le droit de manifester de manière pacifique pour faire part de leurs aspirations, comme ce fut le cas cette année en Égypte. Il s'est dit persuadé que le peuple syrien saura faire face aux difficultés qu'il affronte aujourd'hui. Enfin, il a souhaité que le Conseil des droits de l'homme soit en mesure d'assumer ses responsabilités de manière crédible et équilibrée.


M. PETER WOOLCOTT (Australie) a déploré les morts et les blessés qu'ont entraîné les violences commises par les forces de sécurité syriennes, qui ont notamment fait usage d'armes lourdes contre les manifestants pacifiques. L'Australie estime que ces violences sont autant de violations des libertés fondamentales et que la population syrienne doit pouvoir faire valoir ses revendications légitimes. En aucune circonstance la Syrie ne saurait être élue au Conseil des droits de l'homme, a estimé le représentant australien, qui a demandé le retrait de la candidature de ce pays.

M. ROBERTO FLORES BERMÚDEZ (Honduras) a estimé que la situation des droits de l'homme en Syrie a pris un caractère urgent. Il a déploré l'escalade récente dans l'utilisation des armes à feu pour réduire les manifestants au silence. Selon lui, ces faits, ainsi que les détentions, assassinats et restrictions à la liberté de la presse, méritent l'attention immédiate du Conseil. Le Conseil doit agir de manière cohérente en conformité avec son mandat et ses décisions précédentes. Il ne doit pas être sélectif ni opportuniste, certes, mais il doit aussi pouvoir accorder son attention aux situations urgentes de droits de l'homme. Le Conseil doit également agir contre les responsables des abus et doit s'atteler à protéger les victimes.

M. KONRAD SCHARINGER (Allemagne) s'est déclaré consterné par les attaques brutales commises contre les manifestants pacifiques en Syrie et par les nombreux décès qui en ont résulté. La Syrie ne respecte manifestement pas les normes de protection des populations civiles régissant la candidature au Conseil des droits de l'homme. Pour le représentant allemand, il est frappant que les autorités syriennes soient aveugles aux conséquences des mouvements qui ont agité d'autres pays du monde arabe. Le Conseil doit montrer qu'il est capable de réagir à des événements aussi dramatiques.

MME LAURA MIRACHIAN (Italie) a condamné la répression violente à laquelle se livrent les forces de sécurité syriennes à l'encontre des manifestants pacifiques, une répression qui, a-t-elle rappelé, a causé des centaines de victimes. Elle a exhorté les autorités à cesser l'usage disproportionné et aveugle de la force, à libérer les personnes arrêtées en lien avec les manifestations pacifiques, et à coopérer avec les procédures spéciales et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme. Enfin, les responsables des violences et des violations des droits de l'homme doivent être identifiés et traduits en justice. Dans ces circonstances, l'Italie estime qu'il serait plus sage que la Syrie reporte sa candidature au Conseil.

M. GOPINATHAN ACHAMKULANGARE (Inde) a déclaré que l'escalade de la violence en Syrie risque d'avoir des conséquences en termes de stabilité de la région et du pays concerné. Le représentant a appelé les autorités syriennes à faire preuve de modération et de tenir compte des revendications légitimes de la population. L'Inde prend note des mesures de réforme annoncées par les autorités, notamment la levée de l'état d'urgence. Elle espère que des mesures seront aussi prises pour donner suite aux aspirations de la société civile. La communauté internationale doit pour sa part s'abstenir de jeter de l'huile sur le feu et agir de manière équilibrée et prudente, plutôt que de réagir sous l'emprise d'un sentiment d'urgence.

M. NESTOR CRUZ TORUÑO (Nicaragua) s'est dit préoccupé par la tendance croissance au sein de ce Conseil de tenir des débats politiques, à l'instigation de certaines puissances qui n'abandonnent pas leurs velléités d'occupation et d'appropriation des ressources d'autres pays. Selon lui, la convocation de cette session extraordinaire est la démonstration de la politique de deux poids, deux mesures que certaines puissances prétendent imposer. Le Nicaragua réaffirme les principes d'indépendance, de souveraineté et d'autodétermination des nations. Sa délégation plaide pour une solution pacifique, juste et permanente qui garantisse la paix et qui soit trouvée dans le dialogue et la réconciliation nationale. Le représentant nicaraguayen a rappelé que le Gouvernement et le peuple syrien ont démontré à maintes reprises dans cette enceinte qu'ils respectaient les normes internationales, notamment en matière de droits de l'homme.

M. FERNANDO ROJAS SAMANEZ (Pérou) a déclaré que son pays condamne la répression violente qui s'est abattue en Syrie contre des manifestants pacifiques. Le Pérou s'associe aux appels à la fin de la violence dans le pays. Il appuie la demande du Secrétaire général des Nations Unies pour la création d'une commission d'enquête sur les circonstances des nombreux décès de civils. Le représentant a estimé que la mise en œuvre rapide des réformes annoncées par les autorités devrait contribuer à apaiser la situation en Syrie.

MME NAJLA RIACHI ASSAKER (Liban) a estimé que le rôle du Conseil des droits de l'homme se concrétise dans l'établissement d'un dialogue qui aide les pays à surmonter les défis auxquels ils sont confrontés en matière de droits de l'homme. Elle a fait observer que la tenue de cette session extraordinaire, ainsi que le projet de résolution soumis aujourd'hui, ne répondent pas au rôle qui a été confié à ce Conseil, soit un dialogue objectif et ouvert, hors de toute politisation. Elle a rappelé que les manifestations en Syrie ont été pacifiques et que le Gouvernement y a répondu en prenant des mesures comme la levée de l'état d'urgence. Malheureusement, certains éléments ont détourné la manifestation de ses buts premiers et des déprédations ont été commises. Le Liban reconnaît la nécessité de répondre aux demandes des peuples et appuie les mesures prises à cette fin par le Gouvernement syrien.

MME ANGÉLICA NAVARRO LLANOS (Bolivie) a déclaré que son pays était préoccupé par la sélectivité dont le Conseil des droits de l'homme fait preuve dans son approche des situations des droits de l'homme. La représentante a indiqué que les gouvernements doivent avoir conscience du fait que l'ennemi véritable n'est pas le peuple, mais bien l'ordre impérialiste. La représentante a appelé les autorités syriennes à trouver des réponses aux attentes légitimes de la population. Quant à la communauté internationale, elle doit respecter les principes d'indépendance et de souveraineté des États, a conclu la représentante.

M. STEFFEN SMIDT (Danemark) s'est dit gravement préoccupé par la situation des droits de l'homme en Syrie. Il s'est félicité dans ce contexte de la tenue de cette session extraordinaire. L'approche choisie par les autorités syriennes, à savoir l'usage excessif de la force contre les manifestants et le déploiement de l'armée contre la population est inacceptable, a-t-il souligné. Le Danemark encourage les autorités syriennes à initier un dialogue national et à mettre en œuvre sans délai leurs promesses de réformes politiques. La délégation danoise soutient le projet de résolution, estimant important que la communauté internationale fasse pression sur le Président et le Gouvernement. Également importante est la référence à la responsabilité des États membres d'élire les candidats les mieux qualifiés pour remplir le mandat de promotion et protection des droits de l'homme du Conseil.

M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a rappelé que le dialogue, le respect mutuel et la coopération sincère devraient guider l'action de la communauté internationale confrontée à des violations des droits de l'homme. Il faut notamment éviter de stigmatiser tel ou tel État, une démarche contraire à l'esprit des Nations Unies. L'Indonésie souligne d'autre part l'obligation des gouvernements d'écouter leurs citoyens et, en l'espèce, l'obligation du Gouvernement syrien d'engager un dialogue avec la population. Les peuples ont le droit de faire valoir leur droit d'exprimer librement leurs opinions, a ajouté le représentant indonésien, qui a encouragé le Gouvernement syrien à poursuivre ses efforts en faveur de la promotion et de la protection des droits de l'homme.

M. FELIX PEÑA RAMOS (Venezuela) a déploré les pertes en vies humaines et exprimé ses condoléances aux familles des victimes syriennes. Il a rappelé que le Conseil s'était réuni, il y a deux mois, pour examiner la situation des droits de l'homme en Libye. Or, depuis, ce pays connaît un grave conflit armé. Le Venezuela sera toujours du côté de la paix dans le monde, a expliqué le représentant, plaidant pour une solution pacifique et politique en Syrie. Il a craint que ce conflit ne s'approfondisse et que se poursuive l'infiltration de terroristes et de mercenaires, entraînant une guerre civile. D'une manière générale, il a regretté que des mécanismes d'ingérence se créent au sein de ce Conseil, au nom des droits de l'homme et du droit international humanitaire.

MME WENDY HINTON (Nouvelle-Zélande) a appelé à la création d'une commission d'enquête indépendante et impartiale en vue de traduire en justice les responsables des violations que l'on déplore aujourd'hui en Syrie. La Nouvelle-Zélande appelle les autorités de ce pays à respecter leurs obligations internationales en matière de droits de l'homme et à mettre fin immédiatement à toute violence. La représentante a relevé que le peuple syrien, comme d'autres dans la région, exige le respect de ses droits fondamentaux: le Gouvernement syrien doit respecter cette demande.

M. MARIUS GRINIUS (Canada) a condamné le recours à la force par les forces de sécurité syriennes à l'encontre de manifestants pacifiques. Il a appelé le Gouvernement à cesser immédiatement de recourir à la force à l'encontre des manifestants et à protéger les droits de l'homme de sa population, y compris la liberté d'expression et d'association. Le Canada soutient fermement le peuple syrien qui demande courageusement et pacifiquement des réformes démocratiques et le respect des droits de l'homme. Enfin, le Canada est fermement opposé à la candidature de la Syrie en tant que membre du Conseil et encourage les autres délégations à s'y opposer également.

MME GRISSELLE RODRIGUEZ (Panama) a déclaré que son pays est préoccupé par la violence exercée contre les populations civiles dans de nombreux pays, en particulier en Syrie. Le Panama, qui préconise les principes de justice et de non-violence, appuie le principe de la création d'une commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les violences en Syrie. Il appelle en outre le Gouvernement de la Syrie à coopérer avec les mécanismes internationaux de droits de l'homme.

M. MIKHAIL KHVOSTOV (Bélarus) s'est dit peu convaincu qu'il existe des circonstances objectives légitimant la tenue d'une session extraordinaire sur la situation qui a cours en Syrie. Selon lui, le Gouvernement de ce pays saura gérer la situation. Le Conseil des droits de l'homme ne doit pas encourager une politique de «deux poids, deux mesures», a-t-il rappelé. Dans ce contexte, il a exprimé sa solidarité avec la position de l'Organisation de la Conférence islamique et estimé que cette session extraordinaire ne vient pas favoriser une normalisation de la situation dans le pays. Il a estimé que l'analyse des circonstances objectives dans lesquels des citoyens ont trouvé la mort doit être faite par les autorités.

M. VU DUNG (Viet Nam) a appelé au calme, à la vigilance et à la retenue pour trouver une solution pacifique à la situation difficile qui prévaut en Syrie. Le Viet Nam appelle la communauté internationale à respecter la souveraineté de la Syrie, le développement et l'autodétermination de son peuple et à s'abstenir de toute action susceptible de compliquer ou d'aggraver la situation dans le pays. Le représentant a par ailleurs encouragé la Syrie à poursuivre les réformes déjà engagées pour une amélioration des conditions de vie et une meilleure protection des libertés fondamentales et des droits de l'homme.

M. SEYED MOHAMMAD REZA SAJJADI (Iran) a estimé que la tenue de cette session extraordinaire met en lumière le fait regrettable que le mécanisme des droits de l'homme des Nations Unies fait l'objet d'abus et de manipulations. Il a rappelé qu'une majorité écrasante des membres s'est opposée à la prolifération des mandats par pays, ainsi que des sessions extraordinaires politisées. Or, on assiste à des tentatives de la part de certains pays de créer des précédents afin de justifier leurs politiques d'ingérence dans les affaires intérieures d'autres États, sous couvert de prétextes humanitaires. Il a rappelé l'importance de respecter les principes de non-ingérence et de respect de la souveraineté. Le représentant iranien a en outre estimé que la communauté internationale devrait reconnaître et saluer la décision des autorités syriennes d'établir une commission d'enquête indépendante sur les violations des droits de l'homme commises ces dernières semaines.

M. OÐUZ DEMÝRALP (Turquie) a fait part de la préoccupation de son pays devant la dégradation de la situation en Syrie. Il a souligné que la stabilité en Syrie revêt une importance particulière pour la Turquie, qui a incité le Gouvernement syrien à prêter une oreille attentive aux revendications de la population. Le représentant turc a aussi observé que la violence ne saurait être le mode d'expression de la société civile. La Turquie appelle donc les autorités syriennes à poursuivre sans attendre sur la voie des réformes, et espère que la politique suivie désormais sera conforme à l'esprit et à la lettre de ces réformes. De même, la Turquie appelle la société civile syrienne à faire preuve de sang-froid et de bon sens pour éviter une nouvelle dégradation de la situation.

M. RAUL MARTINEZ (Paraguay) a estimé que tous les États ont le devoir de suivre de près les événements qui ont cours en Syrie. En débattant de cette question, le Conseil doit néanmoins respecter fidèlement les principes d'impartialité, d'objectivité et de non-sélectivité et privilégier un réel dialogue. Le représentant du Paraguay a lancé un appel urgent pour l'établissement d'un dialogue entre les parties concernées, afin de parvenir à des solutions sensées et adéquates débouchant sur la réalisation des droits de l'homme de tous les citoyens syriens.

M. SO SE PYONG (République populaire démocratique de Corée) s'est félicité des mesures prises par le Gouvernement syrien à ce jour, notamment la levée de l'état d'urgence, mesures qu'il faut encourager. Le représentant a indiqué aussi que son pays rejette la sélectivité et la partialité qui ont présidé à la convocation de la présente session extraordinaire, par les mêmes pays responsables de conflits en Afghanistan et dans le territoire palestinien occupé, notamment.

M. HAMZA OMER HASSAN AHMED (Soudan) a indiqué que sa délégation n'était pas d'accord avec la tenue de cette session extraordinaire alors que des tentatives sont déjà déployées pour calmer la situation sur le terrain, notamment par la Ligue arabe. Selon lui, il faut encourager les autorités syriennes à choisir cette voie, plutôt que les condamner. Il faut permettre à la Syrie de trouver des solutions internes. La délégation soudanaise est d'avis que le projet de résolution présenté aujourd'hui est politisé et sélectif. D'une manière générale, elle déplore que les résolutions de ce Conseil soient utilisées à des fins différentes que celles prévues à l'origine. Elle rejette également toute tentative d'entraver l'exercice de la souveraineté de la Syrie, notamment s'agissant de sa décision de présenter sa candidature au Conseil.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a déclaré que son pays encourage les autorités syriennes à appliquer sans tarder les réformes nécessaires en vue de la démocratisation du pays, conformément aux aspirations de sa population. Le représentant a ajouté que la Syrie joue un rôle central dans la résolution du conflit au Moyen Orient. Sa stabilité conditionne celle de ses voisins. L'Afrique du Sud appelle les autorités de ce pays à lancer un processus ouvert et transparent avec le peuple syrien, de manière à garantir ses libertés et droits politiques fondamentaux. Le représentant sud-africain a par ailleurs mis en garde le Conseil des droits de l'homme contre la sélectivité dans ses travaux, comme en témoigne la convocation d'une session extraordinaire sur la Syrie alors même que des événements similaires se déroulent, en ce moment même, dans d'autres pays.

M. RICARDO EDUARDO PRACANA (Portugal) s'est félicité de la tenue de cette session extraordinaire, se disant convaincu que le Conseil ne peut rester passif face aux très graves événements qui se déroulent en Syrie. Il a demandé à la Syrie de mettre un terme à la violente répression des manifestants pacifiques. Le Gouvernement a l'obligation de respecter les droits de l'homme des citoyens syriens, a-t-il rappelé. Il a pris note de la décision du Gouvernement syrien de lever l'état d'urgence et d'introduire certaines réformes, et a souhaité qu'il s'engage dans un dialogue avec son peuple. Pour le représentant portugais, il est important que la Syrie se rende compte des implications des récents événements qui ont secoué la région: les aspirations de la population ne peuvent pas être contrées par la violence, mais doivent être reçues dans le dialogue et le respect des droits de l'homme.

M. AHARON LESHNO-YAAR (Israël) a jugé «déplorable et détestable» la violence exercée par le Gouvernement syrien contre son propre peuple. Israël s'associe aux condamnations de la communauté internationale des violences scandaleuses en Syrie, et il appelle le Gouvernement syrien à y mettre un terme. Le représentant a conclu sa déclaration en rappelant les propos de l'ambassadeur du Pakistan au nom de l'OCI lors de la session extraordinaire consacrée par le Conseil à la situation en Libye: «la communauté internationale doit entendre la voix des peuples musulmans, et non seulement celle de leurs dirigeants».

M. GEROLD VOLLMER (Autriche) s'est dit préoccupé par les informations faisant étant de l'utilisation disproportionnée de la force contre la population civile syrienne, qu'il a jugée inacceptable. Le Gouvernement syrien doit mettre un terme à cette violence et respecter pleinement les droits de tous ses citoyens. Tout en saluant les réformes annoncées par le Gouvernement, il a constaté une certaine incohérence dans l'action du Gouvernement syrien. Le représentant autrichien a également plaidé pour la mise sur pied d'enquêtes indépendantes et a appelé la Syrie à coopérer pleinement avec la Haut-Commissaire aux droits de l'homme. Enfin, il a demandé à toutes les délégations de s'acquitter de leurs responsabilités en matière de droits de l'homme en adoptant par consensus la résolution soumise aujourd'hui devant le Conseil.

M. MOTHUSI BRUCE RABASHA PALAI (Botswana) s'est félicité de l'organisation d'une session extraordinaire consacrée à la situation en Syrie, compte tenu de la gravité des événements dans ce pays, notamment des nombreux tués. Le représentant a demandé à la communauté internationale d'intensifier ses efforts pour protéger le peuple syrien et au Gouvernement de la Syrie de nouer un dialogue sincère avec la population.

M. JAN KNUTSSON (Suède) a condamné fermement la violence aveugle et les assassinats de personnes qui souhaitaient s'exprimer librement et pacifiquement en Syrie. De nombreuses informations crédibles font état de centaines de morts, a déploré le représentant suédois. Il s'est également inquiété d'informations alléguant des cas de torture à l'encontre de manifestants, de défenseurs des droits de l'homme et de journalistes. Toutes ces violations doivent faire l'objet d'investigations indépendantes et immédiates et leurs auteurs tenus pour responsables, a-t-il affirmé. La Suède est par ailleurs préoccupée par les limitations à la liberté d'expression et des médias, ainsi que par la violence à l'encontre des journalistes et des bloggers. Rappelant que la Syrie a présenté sa candidature pour devenir membre du Conseil, le représentant a estimé que la crédibilité de cet organe serait entamée si cet État devait être élu membre.

M. ABBAS KADHOM OBAID ABBAS (Iraq) a déploré les événements en Syrie qui ont entraîné les décès de nombreux innocents. L'Iraq appelle au respect des libertés fondamentales, y compris le droit de réunion. Le représentant iraquien, rappelant l'obligation des États d'assurer la sécurité publique, a regretté les débordements qui sont le fait de plusieurs intervenants. Il a dit sa conviction que le Conseil, dans sa sagesse, saura faire la part entre la nécessaire protection des libertés et la responsabilité des pouvoirs publics en matière de maintien de l'ordre public.

M. BOUALEM CHEBIHI (Algérie) a souhaité excuser l'absence de l'Ambassadeur Jazaïry lors de cette réunion, précisant qu'il aurait souhaité être présent aujourd'hui, mais n'a pu pour des raisons de santé. Le représentant a espéré que la Syrie, pays frère, connaîtra à nouveau la stabilité et la paix.

M. ERIK NYMAN (Fonds des Nations Unies pour l'enfance) a déclaré que la détention pendant vingt jours, et les mauvais traitements infligés à 15 écoliers pour des motifs futiles ont entraîné des heurts violents dans la ville de Deraa. Le représentant de l'UNICEF s'est dit préoccupé par le grand nombre d'enfants victimes des violences en Syrie à l'heure actuelle, ainsi que par les conditions de vie très difficiles auxquelles sont confrontées les jeunes et les femmes, notamment en termes d'accès aux services scolaires et sanitaires. Le représentant a demandé aux autorités syriennes de respecter ses obligations de protection des enfants, notamment en s'abstenant de procéder à leur détention et en relâchant les enfants actuellement détenus.

Organisations non gouvernementales

M. RADWAN ZIADEH (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH, au nom également de Cairo Institute for Human Rights Studies) a indiqué que deux personnes ont été tuées en Syrie aujourd'hui, dont une enfant de six ans. À cet instant, les Syriens manifestent pacifiquement face aux armes. Il a souligné que ces manifestants ont les yeux tournés vers le Conseil et espèrent que la communauté internationale les aidera dans leur lutte légitime et pacifique. La communauté internationale doit prendre ses responsabilités pour les victimes syriennes mortes en demandant qu'on leur rende leur liberté, a insisté le représentant.

MME JULIE DE RIVERO (Human Rights Watch) a fait état d'un bilan de près de 450 personnes tuées en Syrie ces dernières semaines, dont au moins 72 depuis l'annonce de réformes par les autorités de ce pays. Les promesses du Gouvernement de réaliser des enquêtes à ce sujet sont sujettes à caution, du fait de l'absence de système judiciaire fiable. La représentante a par ailleurs rendu compte d'informations au sujet d'actes de torture et de mauvais traitement commis contre des personnes détenues. La représentante a aussi demandé au Conseil des droits de l'homme de se pencher sur la situation des droits de l'homme dans d'autres pays de la région, notamment au Bahreïn.

MME RENATE BLOEM (CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens) a fait remarquer que les événements qui se sont produits récemment dans la région arabe et les révolutions pacifiques à Bahreïn, au Yémen et en Syrie, reflètent l'apogée de la résistance des peuples et leur lutte contre la corruption. CIVICUS se félicite de la tenue de cette session extraordinaire et exhorte les membres du Conseil à assumer sans délai leur responsabilité de protéger. Il faut soutenir les peuples de cette région dans leur appel pour un nouveau modèle de gouvernance. La représentante s'est par ailleurs dite d'avis que la Syrie devrait reporter sa candidature au Conseil. Enfin, elle a demandé au Conseil d'envoyer de toute urgence une mission internationale d'établissement des faits en Syrie, ainsi que de créer un mandat de procédure spéciale relatif à la situation des droits de l'homme dans ce pays.

M. ALEX CONTE (Commission internationale de juristes) a fait état des tortures et mauvais traitements infligés à des manifestants pacifiques en Syrie. Le représentant a aussi regretté que la communauté internationale n'ait pas su prendre les mesures susceptibles de mettre un terme aux assassinats en Syrie et de protéger la population d'autres violations graves de ses droits fondamentaux. Le représentant a notamment appelé les autorités syriennes à coopérer pleinement avec l'enquête des Nations Unies et à s'abstenir de toute mesure d'intimidation contre les personnes appelées à collaborer avec elle; à respecter leurs obligations au regard du droit international; et à lever les restrictions sur les moyens de télécommunication.

M. NAEL GEORGES, (Amman Center for Human Rights Studies) a souligné que des manifestations pacifiques se déroulent à l'instant même où le Conseil se réunit et ce, sous des tirs à balles réelles. Les forces de sécurité syriennes ont réprimé ces manifestations dès le début, et attaqué des innocents désarmés qui revendiquaient leurs droits légitimes, a-t-il indiqué. Selon lui, la répression a atteint son paroxysme lorsque les forces ont tiré à balles réelles contre les manifestants. Ces faits montrent que le régime syrien a commis des actions qui peuvent être assimilées à des crimes contre l'humanité, a-t-il estimé. Il a souligné qu'il est de la responsabilité du Conseil des droits de l'homme de condamner ce qu'il se passe en Syrie et de demander la libération des prisonniers politiques.

M. KHOURI ELIAS (Agence des cités unies pour la coopération Nord-Sud) a observé que le Gouvernement syrien a réagi de manière positive et rapide aux revendications de la population syrienne. Parallèlement, une campagne de désinformation visant à justifier une intervention militaire occidentale en Syrie rappelle les événements tragiques de l'invasion de l'Iraq ou les opérations de l'OTAN en Libye. Les médias occidentaux, soutenus par des satellites arabes, ont accusé le Gouvernement syrien de tirer sur sa population, sans mentionner l'existence d'éléments criminels infiltrés parmi les manifestants, a regretté le représentant.

M. AL-ASBAHI EZZADIN (Human Rights Information and Training Center) a affirmé que la Syrie connaît actuellement une situation dramatique où des manifestants pacifiques sont délibérément tués. Les organisations non gouvernementales se trouvent dans une situation très difficile; une personne meurt à chaque instant; les cas de torture augmentent. Il a salué l'attitude de la Haut-Commissaire et son suivi méthodique de la situation. Il a espéré que le Conseil des droits de l'homme adoptera une position forte à l'égard de la Syrie. Il a demandé la cessation de toutes les violations des droits de l'homme. Il a également souhaité l'envoi en Syrie d'une mission d'établissement des faits.

M. MESKOUR HICHAM (Arab Organization for Human Rights) a déclaré que les institutions sécuritaires syriennes ainsi que les milices du pouvoir détiennent au moins 1700 citoyens, dont certains ont subi et subissent encore des tortures. Les violations des droits de l'homme prennent désormais un caractère systématique, a déploré le représentant. Celui-ci a demandé la création d'une commission d'enquête pour faire la lumière sur ces événements. Le représentant a estimé que l'histoire ne pardonnera pas les témoins trop lâches pour mettre un terme aux violations des droits du peuple syrien.

MME HÉLÈNE SACKSTEIN (Reporters sans frontières - international) a expliqué que le Gouvernement syrien multiplie ses efforts pour tenir la presse à l'écart des événements et l'empêcher de témoigner de la répression mais qu'en dépit de l'extrême difficulté, Reporters sans frontières arrive à obtenir des nouvelles. Il apparaît que toutes les activités d'Al Jazeera en Syrie ont été gelées. En outre, le journaliste et écrivain Fayez Sara a été mis en examen pour «atteinte au prestige de l'État», «diffusion d'informations mensongères dans le but d'affaiblir le moral de la nation» et est accusé «d'influencer les luttes confessionnelles et raciales et de perturber la pureté de la nation». La représentante a fait valoir que l'on ne tire pas sur les messagers; cela n'a jamais résolu de problème. Elle a estimé essentiel et urgent d'assurer que les professionnels de l'information puissent exercer leurs fonctions d'informer.

M. BIRO DIAWARA (Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme) a déclaré que son organisation soutient et encourage la tenue de cette session extraordinaire, qui constitue un mécanisme d'alerte et de diplomatie préventive en matière de violations des droits de l'homme. Le RADDHO s'étonne du déploiement d'artillerie lourde par les autorités syriennes pour réprimer la manifestation pacifique des citoyens à Deraa après l'annonce des réformes politiques. Une enquête crédible doit être établie pour faire la lumière sur les tueries, les meurtres et la torture, afin d'en traduire les auteurs en justice. Le représentant a aussi demandé la mise en liberté immédiate et sans condition de tous les défenseurs des droits de l'homme, des journalistes, des opposants et des avocats.

M. ALFRED GONDO (Centre indépendant de recherches et d'initiatives pour le Dialogue - CIRID) a attiré l'attention sur les milliers de migrants qui quittent la Syrie au péril de leur vie pour rechercher une oasis politique de paix dans certains pays occidentaux. Il a souligné que nombre d'entre eux sont quotidiennement victimes des politiques migratoires devenues de plus en plus restrictives, en même temps que certains gouvernements se dérobent devant le devoir de protection. Selon lui, ce qui se passe aujourd'hui en Syrie comme dans bon nombre d'autres pays traduit un déficit de dialogue dans la gouvernance mondiale actuelle. Le représentant estime que le Conseil doit prendre ses responsabilités et mettre sur pied une mission spéciale de haut niveau pour une enquête crédible et transparente dans ces pays.

M. LEON SALTIEL (United Nations Watch) s'est félicité de la convocation de la session extraordinaire, estimant que l'heure est maintenant venue de se pencher sur les droits de l'homme des victimes de la répression en Syrie, plutôt que sur les états d'âme de ses auteurs. Le représentant a demandé au Conseil de sécurité des Nations Unies d'assumer sans délai sa responsabilité en matière de protection de la population civile. Il a en outre demandé que la Cour pénale internationale se prépare à arrêter et à poursuivre le Président syrien pour crimes de guerre et contre l'humanité. Le représentant a enfin estimé que le Conseil doit condamner la candidature cynique de la Syrie à devenir membre de cette institution.

M. PETER SPLINTER (Amnesty International) a dénoncé la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie. Il a fait état de cas de torture systématique, de mauvais traitements des détenus, d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions forcées, et ce, en toute impunité. Amnesty International a recensé les noms de 450 personnes qui auraient été tuées par les forces du Gouvernement syrien depuis le début des manifestations. Les ONG syriennes ont fait état de la détention de 1700 personnes. De nombreux détenus sont emprisonnés dans des lieux secrets. Enfin, les autorités syriennes ont restreint la liberté d'expression et d'information, rendant difficile toute enquête indépendante. Il semble que le Comité d'investigations mis sur pied au mois de mars ne sera pas conforme aux normes internationales; il est donc impératif que le Conseil mette sur pied un mécanisme d'enquêtes indépendantes.

M. LOAI DEEB (Maarij Foundation for Peace and Development) s'est fait l'écho de la vive préoccupation de nombreuses organisations de la société civile devant la situation très grave en Syrie, notamment dans la ville de Deraa. Le représentant a regretté que le Gouvernement ait choisi de répondre aux revendications de la population par la force, la torture et les arrestations arbitraires. Il a demandé qu'une enquête soit menée contre les responsables des violences commises contre les populations civiles, afin que ces personnes soient traduites en justice.

MME AWA N’DIAYE (Espace Afrique International) a affirmé que la société civile africaine ne peut pas rester indifférente et muette devant l'horreur qui secoue l'Afrique depuis le début de 2011. Elle a rappelé qu'il est un droit fondamental et inaliénable qui est la liberté d'expression et le droit à manifester pacifiquement. Il faut éviter que les peuples soient pris en otages dans la défense d'intérêts qui leur échappent; il faut veiller à la protection des populations innocentes et vulnérables; il ne faut pas sacrifier des innocents pour privilégier une partie de la population au détriment d'une autre. La représentante a appelé à la création d'une ligue internationale des sociétés civiles incluant le Nord et le Sud pour la paix et la transition vers la démocratie partout dans le monde.


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HRC11/059F