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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR LE SUIVI DE SES SESSIONS EXTRAORDINAIRES SUR LA CÔTE D'IVOIRE ET LA LIBYE

Compte rendu de séance
Il entame son débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention

Le Conseil des droits de l'homme s'est penché, cet après-midi, sur le suivi de ses deux dernières sessions extraordinaires, consacrées aux situations en Côte d'Ivoire et en Libye. Il a ensuite entamé son débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention.

S'agissant du suivi de la quatorzième session extraordinaire, consacrée en décembre dernier à la Côte d'Ivoire, la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, Mme Kyung-Wha Kang, a présenté le rapport de la Haut-Commissaire qui décrit une détérioration considérable de la situation des droits de l'homme depuis le second tour de l'élection présidentielle. Si la plupart des violations rapportées se sont produites dans les zones sous contrôle de Laurent Gbagbo et de ses alliés, il y a aussi eu des rapports de violations des droits de l'homme dans les zones contrôlées par les Forces Nouvelles supportant le Président Alassane Ouattara, a fait observer Mme Kang. Depuis la publication du rapport, la situation des droits de l'homme s'est encore dégradée, en particulier à Abidjan et dans l'ouest du pays, a-t-elle ajouté. Elle a souligné que ce rapport recommande une enquête approfondie, indépendante et impartiale sur les violations des droits de l'homme et les abus commis depuis les élections et demande par ailleurs à la communauté internationale de doter l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI) de la capacité de protéger les civils qui sont menacés d'un danger imminent.

Suite à cette présentation, le Ministre de la justice et des droits de l'homme de Côte d'Ivoire a rappelé que, le 10 mars, le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine avait renouvelé sa reconnaissance de la victoire électorale de Alassane Ouattara. Le Ministre a en outre souligné que le rapport de la Haut-Commissaire donnait une base juridique pour combattre l'impunité en Côte d'Ivoire.

Au cours du débat, de nombreuses délégations ont mis en avant le rôle joué par l'Union africaine et la CEDEAO et ont insisté sur la nécessité de trouver une solution politique et pacifique à la crise ivoirienne. Plusieurs délégations ont soutenu l'idée de la création d'une commission d'enquête internationale qui pourrait s'appuyer sur l'ONUCI. Les entraves posées par les partisans de Laurent Gbagbo au fonctionnement de l'Opération des Nations Unies ont été largement dénoncées.

Les délégations des pays suivants ont participé au débat: Hongrie (au nom de l'Union européenne), Espagne, France, États-Unis, Suisse, Royaume-Uni, Brésil, Japon, Fédération de Russie, Ghana, République de Corée, Chili, Nigéria, Namibie, Canada, Égypte, Turquie, Allemagne, Slovénie et Portugal. Les organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole: Amnesty International, Human Rights Watch, Association mondiale pour l'école instrument de paix, International Educational Development, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), Centre for Human Rights and Peace Advocacy et Cause Première.

S'agissant du suivi de la quinzième session extraordinaire du Conseil, consacrée le 25 février dernier à la situation en Jamahiriya arabe libyenne, Mme Kang a attiré l'attention sur la poursuite de la détérioration de la situation des droits de l'homme, notant que l'aviation du colonel Kadhafi pilonnait des zones habitées. Elle a rappelé l'engagement pris par la communauté internationale de prévenir tout risque de génocide, ajoutant que, lorsqu'un État ne protège pas sa population, la communauté internationale avait la responsabilité de la secourir. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme est disposé à appuyer avec tous les moyens matériels dont il dispose la Commission d'enquête sur la Libye, dont la composition a été annoncée la semaine dernière, a fait savoir Mme Kang.

La plupart des délégations qui se sont exprimées s'agissant de la situation en Libye se sont dites préoccupées par la poursuite des violences dans le pays et par la situation humanitaire qui prévaut, y compris pour les personnes réfugiées dans les pays voisins. Nombre d'intervenants se sont félicités de la rapidité avec laquelle la communauté internationale, qu'il s'agisse du Conseil des droits de l'homme, de l'Assemblée générale ou encore de la Ligue arabe, avait réagi. Ont notamment été saluées la suspension de la Libye du Conseil, la nomination des membres d'une commission d'enquête internationale et l'ouverture d'une enquête par le Procureur de la Cour pénale internationale. Certaines délégations ont soutenu l'idée d'instaurer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye, mais il a également été rappelé qu'une telle mesure devait impérativement être approuvée par le Conseil de sécurité.

Les délégations des pays suivants ont pris part à la discussion sur situation en Libye: Hongrie (au nom de l'Union européenne), Nigéria (au nom du Groupe africain), Royaume-Uni, France, Suisse, États-Unis, Norvège, Jordanie, Japon, Brésil, Maldives, Fédération de Russie, Namibie, Canada, Italie, Algérie, Turquie, Slovénie, Israël, Allemagne et Portugal.

Se sont également exprimés les représentants des organisations non gouvernementales suivantes: Human Rights Watch; Cairo Institute for Human Rights Studies; CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP); Reporters sans frontières - international; Mouvement indien «Tupaj Amaru»; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); et United Nations Watch.

Entamant son débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention, le Conseil a ensuite entendu les délégations de la Hongrie (au nom de l'Union européenne), de la e, de l'Espagne, du Royaume-Uni, de la France, des États-Unis, de la Norvège, du Japon, de la Slovaquie et de la Suisse, qui ont attiré l'attention sur la situation de préoccupante des droits de l'homme dans plusieurs régions du monde. Ces déclarations ont suscité l'exercice du droit de réponse par les pays suivants: Bélarus, Sri Lanka, République islamique d'Iran, Venezuela, Zimbabwe, Azerbaïdjan, Cuba et Chine.

Le Conseil des droits de l'homme doit conclure, demain matin, son débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention. Il sera par la suite saisi du rapport annuel de l'experte indépendante sur les questions relatives aux minorités.


Suivi de la session extraordinaire consacrée à la situation en Côte d'Ivoire

Présentation

MME KYUNG-WHA KANG, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a indiqué que le rapport de la Haut-Commissaire sur la Côte d'Ivoire concerne l'évolution de la situation dans le pays depuis le 31 janvier dernier, précisant qu'elle ferait le point sur la situation la plus récente sur le terrain, «où beaucoup craignent l'imminence d'une guerre civile», a-t-elle ajouté.

La Haut-Commissaire adjointe a souligné que le rapport décrit la nette détérioration de la situation des droits de l'homme dans le contexte de la crise qui a suivi les élections en Côte d'Ivoire. Le rapport se réfère à des cas d'exécutions extrajudiciaires, d'enlèvements, de disparitions forcées, de harcèlement et d'intimidation et à d'autres violations des droits de l'homme qui seraient imputables aux forces de sécurité et aux groupes armés alliés à M. Laurent Gbagbo à Abidjan et dans d'autres parties du pays. Si la plupart des violations rapportées se sont produites dans les zones sous contrôle de M. Gbagbo et de ses alliés, des informations font état de violations des droits de l'homme dans les zones contrôlées par les Forces Nouvelles fidèles au Président Alassane Ouattara, notamment des destructions de biens appartenant à certains dirigeants du camp de M. Gbagbo, des attaques contre ses représentants locaux et des arrestations et détentions de ressortissants étrangers. Le rapport documente également l'utilisation des médias pour inciter à la violence et à la haine et le recrutement et l'armement de jeunes ainsi que la réactivation et le réarmement de divers groupes de miliciens.

Entre le 16 décembre 2010 et le 8 mars 2011, plus de 385 exécutions extrajudiciaires ont été rapportés, dont la plupart seraient le fait de la Force de défense et de sécurité loyale à M. Gbagbo, a précisé la Haut-Commissaire adjointe; ont également été rapportées plus de 520 arrestations et détentions arbitraires, certaines impliquant des actes de torture. En outre, plus de 70 cas de disparitions ont été enregistrés par la Division des droits de l'homme de l'Opération des Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI). De plus, la violence a entraîné le déplacement interne de plus de 200 000 personnes et on estime à 80 000 le nombre de réfugiés qui auraient fui le pays, en premier lieu vers le Libéria.

La tension politique a été exacerbée par un conflit à motivation ethnique dans certaines parties du pays, a poursuivi la Haut-Commissaire adjointe. En outre, a-t-elle ajouté, l'impunité encourage la violence sexuelle; à ce jour, l'ONUCI a documenté au moins 28 cas de viols liés au soulèvement postélectoral, mais leur nombre pourrait être beaucoup plus élevé. Les acteurs humanitaires font face à d'énormes difficultés pour accéder aux zones comme celle d'Abobo, un quartier d'Abidjan, a souligné Mme Kang. Elle a souligné que le rapport de la Haut-Commissaire fait également état d'obstructions au mouvement et au travail de l'ONUCI et d'attaques contre le personnel des Nations Unies. La campagne contre l'ONUCI orchestrée par les partisans de M. Gbagbo a mis en grand péril le personnel des Nations Unies, a insisté la Haut-Commissaire adjointe.

Depuis la publication du rapport, la situation des droits de l'homme s'est gravement détériorée, en particulier à Abidjan et dans l'ouest du pays, a poursuivi Mme Kang. Elle a souligné que le rapport de la Haut-Commissaire demandait à M. Gbagbo et à ses partisans de mettre fin à toute violation de droits de l'homme et à cesser le recrutement, l'armement et l'utilisation de groupes de jeunes, de milices et de mercenaires; ce rapport leur demande également de coopérer pleinement avec les Nations Unies, l'Union africaine et les autres partenaires aux fins de la résolution pacifique de la crise. D'autre part, le rapport recommande une enquête approfondie, indépendante et impartiale sur les violations des droits de l'homme et les abus commis depuis les élections, de manière à ce que tous les responsables de ces violations aient à rendre des comptes. Enfin, la Haut-Commissaire adjointe a souligné que le rapport de la Haut-Commissaire demande à la communauté internationale de doter l'ONUCI de la capacité de protéger les civils qui sont menacés d'un danger imminent.

La Haut-Commissaire reste profondément préoccupée par l'escalade de la violence en Côte d'Ivoire, a insisté Mme Kang. «Eu égard aux risques de résurgence de la guerre civile, nous exhortons toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue de manière à éviter une escalade de la violence et les exhortons également à résoudre leurs différends de manière pacifique», a conclu la Haut-Commissaire adjointe.

Pays concerné

M. JEANNOT KOUADIO AHOUNSSOU, Ministre de la justice et des droits de l'homme de Côte d'Ivoire, a estimé que, depuis sa dernière intervention, le principal développement avait été la reconnaissance par le Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine de Alassane Ouattara comme vainqueur de l'élection présidentielle en Côte d'Ivoire. Il s'est félicité de l'engagement du Conseil des droits de l'homme, concrétisé par sa session extraordinaire du 23 décembre et l'adoption de sa résolution S-14/1, à l'origine du rapport de la Haut-Commissaire présenté ce jour, dont il s'est félicité et auquel il a dit souscrire. Il a réitéré le souhait du Président Ouattara et son Gouvernement d'accueillir une commission d'enquête sur les graves événements et violations des droits de l'homme survenus depuis le second tour de l'élection. Il a rappelé notamment que 11 femmes innocentes avaient été assassinées «par les miliciens et forces tribales de M. Laurent Gbagbo» entre le 2 et le 8 mars. Le bilan s'alourdit chaque jour, a déclaré le ministre, qui a fait état de plus de 1000 morts, de centaines de disparus, de 400 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays et de 75 000 réfugiés au Liberia voisin. La crise va avoir des conséquences incalculables sur toute la région, a affirmé le ministre, qui a appelé à agir vite. Il devient impératif que les coupables répondent devant les juridictions compétentes, tant nationales qu'internationales, a poursuivi le ministre, qui a accusé Laurent Gbagbo de faire barrage à l'ultime chance de médiation offerte par l'Union africaine et la CEDEAO. Le rapport de la Haut-Commissaire donne une base juridique pour combattre l'impunité en Côte d'Ivoire, a estimé le Ministre, qui a conclu en invitant le Conseil à adopter le rapport de la Haut-Commissaire, dont les conclusions pourront alimenter le dossier de la Cour pénale internationale.

Débat

M. ANDRÁS DÉKÁNY (Hongrie au nom de l'Union européenne) a fait part de la préoccupation des Vingt-Sept à la suite d'informations faisant état du recrutement de jeunes, ainsi que l'utilisation de personnes en vue de les utiliser comme boucliers humains. Il a rappelé que l'Union européenne avait décidé d'imposer des mesures restrictives ciblées dont des refus de visas et le gel d'avoirs. Le Gouvernement ivoirien doit mener les enquêtes nécessaires sur les violations des droits de l'homme et en traduire les responsables en justice.

MME OLIVIA WIDEN (Espagne), après avoir mentionné les situations des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée, au Myanmar, en République démocratique du Congo, au Bélarus et surtout en Iran, où elle a dénoncé la répression brutale qui a suivi les élections de juin 2009 et exprimé sa préoccupation pour la persécution des minorités religieuses, s'est dite préoccupée par la situation des droits de l'homme et la situation humanitaire en Côte d'Ivoire. Elle a dénoncé l'incitation à la haine, les violences contre les civils et le recrutement de mineurs dans ce pays. Les responsables de ces violations doivent être poursuivis et punis et l'Espagne soutient à cet égard l'appel de la Haut-Commissaire en faveur de la mise sur pied d'une commission internationale d'enquête sur la Côte d'Ivoire. Pour ce qui est de la Libye, la communauté internationale a assisté aux graves violations des droits de l'homme qui ont justifié la suspension temporaire de la Libye en tant que membre du Conseil, a rappelé la représentante espagnole. Les autorités libyennes doivent respecter les droits de l'homme de leurs citoyens et traduire en justice les responsables des violations perpétrées, a-t-elle souligné.

M. JEAN BAPTISTE MATTÉI (France) a rappelé que plus de deux mois s'étaient écoulés depuis la session extraordinaire du 23 décembre 2010 et l'adoption par le Conseil des droits de l'homme de sa résolution S/14-1. Depuis lors, la situation n'a cessé de se dégrader et atteint un seuil préoccupant qui montre que les partisans de Laurent Gbagbo ne reculent devant rien, y compris le recours à la terreur, au mépris de la volonté massivement exprimée par la population ivoirienne le 28 novembre dernier. Le représentant a fait état d'une détérioration alarmante de la situation des droits de l'homme et de la situation humanitaire et a estimé que le pays était au bord de la guerre civile. La France se félicite de la mobilisation croissante de la communauté internationale et salue le rôle essentiel de la CEDEAO et de l'Union africaine qui a, le 10 mars, confirmé de manière définitive la légitimité de l'élection d'Alassane Ouattara. Il est essentiel d'accorder aux agences humanitaires des Nations Unies et aux organisations non gouvernementales le libre accès aux populations. La France demande en outre la levée immédiate des entraves imposées à l'ONUCI, qui constitue une violation inadmissible des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle appelle une nouvelle fois au rétablissement des libertés et à la fin des exactions qui affectent plus particulièrement les femmes, victimes de viols et d'assassinats, et les enfants, que les milices tentent de recruter. La France souhaite la mise sur pied rapide d'une commission internationale sur les violations des droits de l'homme dans le pays, qui permettra de connaître l'étendue des crimes commis et de s'assurer qu'ils feront l'objet de poursuite, y compris devant la Cour pénale internationale.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a fait part de la satisfaction de son pays du fait que la délégation ivoirienne présente un projet de résolution sur la situation en Côte d'Ivoire. «Cette initiative mérite notre ferme soutien. Il est important que les membres du Conseil soutiennent fermement cet effort visant à envoyer un message sans équivoque à l'ancien président Gbagbo sur le fait qu'il doive respecter la volonté du peuple ivoirien, quitter immédiatement le pouvoir et reconnaître que le Président Ouattara est le chef d'État légitime de la Côte d'Ivoire». Les États-Unis estiment essentiel par ailleurs que les Ivoiriens mettent sur pied une commission d'enquête afin de traduire en justice les responsables des graves violations actuelles des droits de l'homme.

M. JÜRG LAUBER (Suisse) s'est dit profondément préoccupé par la dégradation de la situation en Côte d'Ivoire, notamment à Abidjan. Il a dit partager les craintes exprimées s'agissant du risque que cette escalade de la violence en Côte d'Ivoire puisse y faire resurgir la guerre civile. Il a attiré l'attention sur les déplacements internes de dizaines de milliers de personnes suite à ces violences ainsi que sur les nombreux actes de violence sexuelle qui ont été rapportés. La Suisse exhorte chacun à respecter les droits de l'homme et souhaite que des enquêtes soient menées sur les violations perpétrées. En outre, la Suisse exige la cessation immédiate des menaces contre les Casques bleus. Enfin, la Suisse est en faveur d'une solution pacifique et soutient les efforts en ce sens de l'Union africaine qui sont en cours.

M. CHRISTOPHER LOMAX (Royaume-Uni) s'est dit très préoccupé par la dégradation de la situation sécuritaire et des droits de l'homme depuis décembre et par l'augmentation du nombre des victimes. Il a rappelé qu'un nombre croissant d'Ivoiriens ont fui à l'intérieur du pays ou à l'étranger et a condamné le recours aux discours haineux des médias sous le contrôle de Laurent Gbagbo. Le Royaume-Uni reprend à son compte le rapport de la Haut-Commissaire et est convaincu que le Conseil des droits de l'homme doit rester saisi de la question.

M. CARLOS EDUARDO DA CUNHA OLIVEIRA (Brésil) s'est demandé si l'imposition de sanctions contribuait à améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays. Il a estimé que l'engagement accru de la communauté internationale pouvait jouer un rôle clé dans la recherche d'une solution à la crise. Il a rappelé que la semaine dernière les ministres des affaires étrangères de l'IBSA (Inde, Brésil, Afrique du Sud) avaient rédigé un communiqué soutenant le panel de haut niveau de l'Union africaine et appelant les parties à renoncer à la violence et à coopérer avec l'Union africaine dans la recherche d'une solution. Le Brésil appelle la communauté internationale au sens large à mettre les droits et le bien-être du peuple ivoirien avant toute considération politique ou économique. Trop de sang a déjà été versé, a-t-il conclu.

M. OSAMU SAKASHITA (Japon) a déclaré que le Japon est préoccupé par la situation déplorable des droits de l'homme qui prévaut en Côte d'Ivoire depuis les dernières élections et demande que cessent toutes les violations des droits de l'homme dans ce pays, a-t-il poursuivi. Le rapport de la Haut-Commissaire et d'autres informations font apparaître que ce sont les forces favorables à M. Gbagbo qui sont responsables des violations graves des droits de l'homme, notamment des actes de torture, des viols, des enlèvements et des exécutions extrajudiciaires perpétrés en Côte d'Ivoire, a relevé le représentant du Japon. Le refus de M. Gbagbo de renoncer à la présidence malgré l'annonce des résultats par la commission électorale et la reconnaissance de l'élection de M. Ouattara par la communauté internationale ne doit pas être toléré, a-t-il déclaré.

M. GRIGORY LUKIYANTSEV (Fédération de Russie) a déclaré que la situation postélectorale en Côte d'Ivoire était préoccupante. De toute évidente, c'est la Constitution d'un État souverain membre des Nations Unies qui a été violée, a-t-il déclaré, tout en ajoutant qu'il ne fallait pas fermer les eux sur les violations massives des droits de l'homme qui ont eu lieu dans le nord du pays lors des deux tours de scrutin. Pour le représentant russe, la situation actuelle relève de problèmes internes à la Côte d'Ivoire et le recours à la force n'est pas une solution car c'est la population civile qui en paierait les conséquences, avec les risques de guerre civile, de conflit religieux entre le Nord et le Sud et de violations massives des droits de l'homme qui surviennent dans ce genre de circonstances. La Fédération de Russie est disposée à continuer d'appuyer ses partenaires africains pour trouver une solution pacifique à cette crise, a conclu le représentant.

MME ELLEN S. NEE-WHANG (Ghana) a jugé particulièrement préoccupant le fait que la population ivoirienne n'ait plus la possibilité de subvenir à ses besoins. Elle a noté que, comme à l'accoutumée, les femmes et les enfants étaient le plus durement affectés. Compte tenu des graves violations des droits de l'homme commises par les deux parties, le Ghana appelle les responsables à cesser d'inciter les forces de sécurité à en commettre de nouvelles.

M. PARK YOUNG-KYU (République de Corée) a remercié les Nations Unies, la CEDEAO et l'Union africaine pour leurs efforts conjugués en vue de maintenir la paix en Côte d'Ivoire. Il s'est dit préoccupé par la détérioration de la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire depuis le second tour des élections présidentielles. Il y a risque de guerre civile en Côte d'Ivoire, une guerre civile qui serait le résultat de l'impasse politique actuelle, a poursuivi le représentant de la République de Corée. Dans ce contexte, il faut protéger la population civile contre les menaces imminentes qui pèsent sur elle. Le Gouvernement de la Côte d'Ivoire doit mener des enquêtes afin que soient traduits en justice les auteurs de violations de droits de l'homme et doit en outre s'efforcer de protéger la population civile.

M. JUAN PEDRO SEPÚLVEDA (Chili) s'est dit très préoccupé de la situation en Côte d'Ivoire. Il est essentiel d'appuyer les actions humanitaires et de veiller au respect des droits fondamentaux des personnes, notamment les plus vulnérables. Il faut aussi veiller à la sécurité du personnel des Nations Unies. Le Chili soutient les efforts de la CEDEAO et lance un appel à toutes les parties pour qu'elles évitent la violence et favorisent le dialogue politique dans le respect des règles constitutionnelles en vigueur. L'ONUCI doit continuer d'encourager le processus de paix dans le pays sur la base de son mandat. Le représentant en a aussi appelé à l'esprit de réconciliation nationale des Ivoiriens.

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria au nom du Groupe africain) a rappelé que depuis le début, le Groupe africain s'est dit préoccupé que les troubles politiques n'aboutissent à une détérioration supplémentaire de la situation humanitaire en Côte d'Ivoire. Il est malheureux qu'en dépit d'initiatives du Conseil de sécurité, de l'Union africaine et de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), la précarité de la situation en Côte d'Ivoire ne semble pas s'améliorer. Le Nigéria déplore l'obstruction aux actions des Nations Unies en Côte d'Ivoire. Le Groupe africain espère que M. Gbagbo est conscient de sa responsabilité de protéger les civils et les membres de la communauté internationale présents sur place. Plus la crise se prolongera, plus des innocents courront le risque de voir leurs droits violés. Il est à cet égard préoccupant que plus de 300 personnes aient été tuées depuis décembre du fait du refus de M. Gbagbo de quitter la présidence et de reconnaître la victoire électorale de M. Ouattara. Le Groupe africain est conscient du fait que la détérioration de la situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire est due à la situation politique; il faut donc une solution politique. Aussi, la communauté internationale doit-elle soutenir les efforts de l'Union africaine et de la CEDEAO.

Observateurs

M. SIMON MADJUMO MARUTA (Namibie) s'est déclaré vivement préoccupé par la détérioration de la situation en Côte d'Ivoire. La Namibie remercie à cet effet les efforts déployés par l'Union africaine en vue de trouver une solution pacifique à cette crise, notamment avec la mise en place du Panel de chefs d'États et la désignation d'un haut représentant. Nous ne saurons nous contenter du statut quo, a lancé le représentant namibien, qui a demandé à la communauté internationale d'aider la Côte d'Ivoire dans la crise actuelle.

MME ALISON LECLAIRE CHRISTIE (Canada) a salué le rôle de premier plan des États africains dans la gestion de la crise ivoirienne. Elle a estimé que le rapport de la Haut-Commissaire mettait en relief l'ampleur des violations des droits de l'homme et a dit observer avec inquiétude l'augmentation des violences contre la population civile, qu'elle a considérées comme le fruit d'une répression contre les populations considérées comme défavorables à Laurent Gbagbo. La représentante s'est dite très inquiète de l'augmentation de la violence des dernières semaines et des déplacements de populations qu'elle entraîne, ainsi que par l'assassinat de plusieurs femmes par les milices de Gbagbo. Il est temps que les violences cessent et que leurs auteurs répondent de leurs actes. Le Canada est favorable à la constitution d'une commission d'enquête internationale, a conclu la représentante.

M. OMAR SHALABY (Égypte) a souligné que son pays était convaincu que la seule réponse à la crise actuelle résidait dans le respect du résultat de l'élection présidentielle, à savoir l'élection de M. Alassane Ouattara. «Les régimes et les gouvernements doivent écouter la voix de leur peuple et comprendre qu'au bout du compte, aucun dirigeant ne peut défier ou subjuguer la volonté du peuple». Les parties en présence en Côte d'Ivoire doivent respecter les résolutions internationales et régionales, ainsi que les décisions y compris la résolution 1962 du Conseil de sécurité exigeant des parties de coopérer avec l'ONUCI.

MME ELA GÕRKEM-GÕKÇE (Turquie) s'est dite préoccupée par les récents événements en Côte d'Ivoire, notamment les combats entre les forces fidèles à Laurent Gbagbo et celles soutenant Alassane Ouattara. La Turquie souhaite une transition pacifique et appelle Laurent Gbagbo à remettre le pouvoir et l'administration à Alassane Ouattara. À cet égard, la Turquie soutient les initiatives de l'Union africaine. L'ouverture d'une ambassade turque à Abidjan, à l'heure où nombre de pays quittent la Côte d'Ivoire, est le signe de l'attachement de la Turquie à un pays ami, a conclu la représentante.

M. REINHARD SCHWEPPE (Allemagne) a déclaré que le Conseil des droits de l'homme avait devant lui une de ses tâches les plus urgentes. Il s'est félicité que l'Union africaine ait confirmé de nouveau la victoire d'Alassane Ouattara aux élections présidentielles. L'Allemagne demande à toutes les parties de respecter la demande de l'Union africaine de s'abstenir de tout recours à la violence. Le représentant s'est dit préoccupé de la situation humanitaire et de l'augmentation de la violence, ainsi que du recours aux médias pour inciter à la haine.

M. MATJAŽ KOVAČIČ (Slovénie) a fait part de la profonde préoccupation de son pays face aux graves violations des droits de l'homme commis en Côte d'Ivoire depuis le scrutin de novembre. La Slovénie appelle à ce que des enquêtes en profondeur soient menées au sujet de toutes les violations des droits de l'homme et à ce que les responsables soient traduits en justice.

M. RICARDO EDUARDO V.P. PRACANA (Portugal) a déclaré que son pays soutient tous les efforts menés en vue de résoudre la crise en Côte d'ivoire. À cet égard, il a notamment cosigné une résolution adoptée par consensus et condamnant les violations des droits de l'homme en Côte d'Ivoire. Le Portugal est atterré par les allégations de violation de droits de l'homme dont des disparitions forcées et des viols. Le pays condamne ces violences et reste préoccupé par la détérioration de la situation, a en outre déclaré son représentant. Le Portugal est particulièrement préoccupé par le recrutement d'enfants dans les forces armées.

Organisations non gouvernementales

M. PETER SPLINTER (Amnesty International) a déclaré que son organisation avait compilé des exactions commises tant par les forces fidèles à Laurent Gbagbo que dans le nord du pays par les Forces nouvelles, qui soutiennent Alassane Ouattara ajoutant que le respect du droit était inexistant dans les zones sous contrôle des Forces nouvelles. Il a estimé que l'ONUCI avait la responsabilité d'appliquer son mandat de défense des droits de l'homme, malgré les interférences des partisans de Laurent Gbagbo. Le Conseil des droits de l'homme doit soutenir l'ONUCI dans son évaluation impartiale de la situation des droits de l'homme et dans son mandat de protection. La communauté internationale, par le biais des Nations Unies mais aussi des organisations africaines, a consenti de nombreux efforts depuis huit ans. Si la guerre devait s'étendre, c'est toute la région qui en serait affectée et le coût pour les droits de l'homme dans la région serait énorme. Il est de la responsabilité de la communauté internationale de veiller à ce que ce scénario ne se matérialise pas, a conclu le représentant.

M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) a souligné l'intensification de la violence depuis environ un mois, la gravité des actes commis relevant de crimes contre l'humanité. Le représentant a estimé que le Conseil des droits de l'homme devait dénoncer sans tarder les violations commises par les deux parties et appeler à la formation d'une commission d'enquête afin d'éclaircir les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire commises durant la période postélectorale.

MME MARIE GISÉLE SOHO (Association mondiale pour l'école instrument de paix) a déclaré que les populations vivant en Côte d'Ivoire, déjà largement exposée aux violations de leurs droits civils et politiques, sont soumises à une angoisse perpétuelle quant à la réalisation minimale de leur besoins vitaux dont l'accès aux soins et à l'alimentation. Le secteur éducatif n'est pas en reste. On assiste à des suspensions régulières de cours et les élèves des zones à tensions se voient obligés de migrer vers d'autres localités. Plus de 800 000 élèves sont touchés par cette situation, a chiffré la représentante. Dans ce contexte, elle a plaidé pour la mise en place d'un commission d'enquête indépendante sur toutes les violations des droits de l'homme, pour la prise de mesures visant à garantir, à titre principal, la sécurité et les droits des populations civiles et pour la garantie du droit à l'éducation et à la sécurité des écoles qui doivent être tenues à l'écart des conflits.

MME KAREN PARKER (International Educational Development) a rappelé que les élections avaient permis aux ivoiriens de choisir Alassane Ouattara comme président, conformément à l'article 21 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. De la violation de cet article par Laurent Gbagbo découlent toutes les autres violations des droits de l'homme, a affirmé la représentante. La communauté internationale doit se ranger aux côtés du président élu Alassane Ouattara. On compte 80 000 réfugiés au Liberia et plus de 400 000 déplacés dans le pays, qui ont besoin d'assistance. La représentante a en outre accusé Laurent Gbagbo d'utiliser des mercenaires et d'avoir commis des assassinats, notamment de plusieurs femmes, les 3 et 8 mars derniers.

M. TRAORE DRISSA (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a appelé le Conseil à ne ménager aucun effort pour empêcher la Côte d'Ivoire de basculer dans la guerre. Après avoir dénoncé les discours incendiaires visant à attiser la haine, le représentant a noté que ceux-ci étaient le fait en majorité «mais pas uniquement» des partisans de Laurent Gbagbo. La FIDH appelle solennellement ce dernier à reconnaître le résultat de l'élection présidentielle. Elle rappelle que le cas échéant, la Cour pénale internationale pourrait avoir à connaître des violations actuelles.

M. SEKHON AWATAR SINGH (Centre for Human Rights and Peace Advocacy) a souhaité attirer l'attention du Conseil sur l'influence des extrémistes sur les gouvernements. Des personnes appartenant à des minorités extrémistes ont reconnu devant les tribunaux avoir mené des violences. Il faut mettre une fin à cette situation, a déclaré le représentant, dont l'intervention portait sur la situation en Inde.

M. BANDING GASSAMA (Cause Première) a jugé des plus inquiétantes la situation en Côte d'ivoire, qui nécessite une action de la communauté internationale, et notamment de l'Union africaine. Chaque jour qui passe est marqué par la mort de personnes innocentes, a déclaré le représentant, qui a demandé s'il faudra attendre le déclenchement d'une guerre civile risquant de tourner au génocide pour agir. Il a rappelé que la situation nuisait déjà à l'économie de la sous-région et risquait de saper sa sécurité, alors que le Libéria voisin commence seulement à reconstruire sa stabilité. Comment peut-on accorder du temps à un homme, Laurent Gbagbo, alors que celui-ci semble reproduire le style sinistre de la radio des milles Collines dans le Rwanda du génocide, a déclaré le représentant, qui a appelé la conscience internationale à se soulever.

Suivi de la session extraordinaire consacrée à la situation en Libye

Présentation

MME KYUNG-WHA KANG, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a attiré l'attention sur la poursuite de la détérioration de la situation des droits de l'homme en Libye, notant que l'aviation du colonel Kadhafi pilonnait des zones habitées. Le réseau Internet et les télécommunications ne sont plus disponibles que de manière épisodique, a-t-elle ajouté. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme est préoccupé par de nombreux témoignages faisant état d'exécutions sommaires, de viols et de disparitions, a poursuivi Mme Kang. Elle s'est inquiétée de la disponibilité des armes, dont certaines semblent être distribuées à des mineurs. Évoquant la situation des journalistes, elle a fait part de sa préoccupation après la mort d'Ali Hassan al-Jaber, de la chaîne de télévision Al-Jazeera, et la disparition d'un autre journaliste travaillant pour le quotidien The Guardian. Par ailleurs, plus de 200 000 personnes se sont enfuies dans les pays voisins et un grand nombre de personnes se pressent toujours aux frontières.

Mme Kang a rappelé l'engagement de la communauté internationale à prévenir tout risque de génocide. En effet, lorsqu'un État ne protège pas sa population, la communauté internationale a la responsabilité de la secourir, a-t-elle souligné. C'est le cas en l'espèce, les forces fidèles au colonel Kadhafi prenant couramment pour cible la population civile, a-t-elle constaté. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme est disposé à appuyer avec tous les moyens matériels dont il dispose la commission d'enquête sur la Libye dont la composition a été annoncée la semaine dernière, a-t-elle indiqué.

Débat

M. ANDRÁS DÉKÁNY (Hongrie au nom de l'Union européenne) a félicité le Haut-Commissariat aux droits de l'homme pour sa collecte d'informations précieuses et a salué la formation d'une commission d'enquête internationale sur la Libye dont il a précisé attendre avec intérêt la première visite dans la région. Il a ensuite rappelé que vendredi, lors d'un Conseil européen extraordinaire, les chefs d'État et de gouvernement des pays membres de l'Union européenne avaient condamné les violations des droits de l'homme en Libye. Il s'est félicité que la Libye ait été suspendue du Conseil des droits de l'homme et s'est réjoui de la décision qui a été prise de recourir à la Cour pénale internationale. Il a en outre jugé inacceptable le recours à la force armée contre les civils. Le représentant hongrois a exprimé le souhait que la Libye s'engage rapidement sur la voie de la démocratie. Il a souligné que l'évacuation des ressortissants de l'Union restait une priorité pour l'Union européenne. Il a enfin appelé toutes les parties concernées à permettre l'accès aux acteurs humanitaires, dont la sécurité doit être assurée.

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria au nom du Groupe africain) a condamné l'usage de la force en Libye. Tous les migrants doivent se voir accorder une protection, a-t-il ajouté. Il a insisté sur l'importance qu'il y a à respecter l'intégrité territoriale et la souveraineté de la Libye et s'est prononcé contre toute intervention militaire en Libye. Il a indiqué soutenir toutes les initiatives et propositions de l'Union africaine, de la Ligue arabe et de l'Union européenne en faveur de l'instauration d'un dialogue inclusif.

M. CHRISTOPHER LOMAX (Royaume-Uni) a indiqué que sa délégation était choquée par les violations systématiques et grossières des droits de l'homme perpétrées par le colonel Kadhafi et ses partisans, ainsi que par l'évolution actuelle de la crise humanitaire. La forte réponse apportée par le Conseil, lors de sa session spéciale consacrée à la Libye, ainsi que par l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité montre l'unité de la communauté internationale face aux violations actuelles des droits de l'homme dans ce pays. Le Royaume-Uni se félicite en outre de la réaction rapide du procureur de la Cour pénale internationale, qui a annoncé l'ouverture d'une enquête. Il se félicite également de la position prise par la Ligue arabe. Le Royaume-Uni demande au colonel Kadhafi de partir.

M. JEAN-BAPTISTE MATTÉI (France) a souligné que la situation en Libye demeurait extrêmement préoccupante. Le régime du colonel Kadhafi use de la force de manière inacceptable contre sa propre population, a-t-il précisé. La France est intervenue rapidement pour assurer l'évacuation humanitaire de plus de 4200 personnes à ce jour, grâce à un pont aérien et a fourni une aide humanitaire importante, notamment au profit de l'hôpital de Benghazi, a poursuivi le représentant français. La France a mobilisé 3,5 millions d'euros pour venir en aide aux populations, a-t-il indiqué, ajoutant que cette devait pouvoir parvenir à tous ceux qui en ont besoin, en particulier dans l'est du pays. Des décisions historiques ont été prises par la communauté internationale, au Conseil des droits de l'homme puis au Conseil de sécurité, a rappelé le représentant français, avant de saluer le rôle essentiel de la Ligue arabe et de l'Union africaine. La France appelle au plein respect de la résolution 1970 du Conseil de sécurité et salue la décision du Procureur de la Cour pénale internationale d'ouvrir une enquête. Elle se félicite en outre de la nomination des membres de la commission d'enquête créée par le Conseil des droits de l'homme. Enfin, la France rend hommage au courage de la population libyenne et se tient à ses côtés pour qu'elle puisse trouver le chemin de la démocratie et que les droits de l'homme soient enfin garantis en Libye, a conclu le représentant.

M. DANTE MARTINELLI (Suisse) a condamné avec une grande fermeté la poursuite des violences des autorités libyennes contre leur population et a appelé les autorités libyennes à cesser impérativement ces violences. Il s'est par ailleurs félicité des résolutions pertinentes adoptées par les organes des Nations Unies dont le Conseil des droits de l'homme et l'Assemblée générale. Il s'est également réjoui de la création d'une commission d'enquête chargé de faire la lumière sur l'ensemble des violations des droits humains perpétrées ces dernières semaines en Libye. De l'avis de la Suisse, les investigations de cette commission doivent porter en priorité sur les exécutions extrajudiciaires de manifestants par les forces de sécurité libyennes. L'attention doit être centrée, notamment, sur la répression brutale de tout mouvement d'opposition, sur les actes de torture, ainsi que sur la répression systématique de la liberté d'expression. La Suisse appelle tous les États à maintenir l'esprit de communauté qui les a unis ces dernières semaines autour de cette situation et à rester activement saisis de la situation.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a indiqué que son pays se tenait aux côtés du peuple libyen, «alors qu'il affronte les bombes et les balles». Les États-Unis exigent le départ de Kadhafi, sans plus attendre; c'est la seule solution pour mettre un terme à l'effusion de sang et pour mettre la Libye sur le chemin menant à un gouvernement démocratique. Les États-Unis continuent d'œuvrer avec leurs partenaires aux Nations Unies, à l'OTAN et au sein de l'Union africaine, de la Ligue arabe et du Conseil de coopération du Golfe, afin d'isoler et de sanctionner le colonel Kadhafi. «Avec nos partenaires, nous continuerons de le presser de mettre un terme à la violence contre son propre peuple et nous œuvrerons afin de tenir pour responsables ceux qui autorisent ces attaques affreuses», a déclaré le représentant. Les États-Unis estiment que la communauté internationale doit demeurer unie et persévérante et poursuivre son engagement afin de faire face à cette crise qui prend de l'ampleur.

MME BEATE STIRØ (Norvège) s'est dite très satisfaite de la rapide réaction des Nations Unies face à la situation en Libye, notamment au regard de la décision de l'Assemblée générale de suspendre la Libye du Conseil des droits de l'homme. La Norvège se félicite de la mise en place d'une commission internationale d'enquête sur les violences commises dans le cadre de la répression en Libye. Avec la saisine de la Cour pénale internationale, la communauté internationale envoie ainsi au régime du colonel Kadhafi un message clair indiquant que les exactions ne resteront pas impunies. La représentante norvégienne s'est dite très préoccupée par le refus d'accès humanitaire à la population. Elle a rappelé que la situation humanitaire était également critique dans les pays voisins, du fait du conflit en Libye.

M. MUTAZ FALEH HYASSAT (Jordanie) a souligné qu'en dépit des efforts de la communauté internationale, les violences se poursuivent sur le terrain en Libye. La situation est grave et nécessite plus que des condamnations, a-t-il déclaré. Dans ce contexte, il est primordial d'entendre la voix de la Ligue arabe, qui demande l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne, a-t-il ajouté. Le représentant jordanien s'est en outre félicité de la création d'une commission d'enquête indépendante pour faire la lumière sur les allégations de violation des droits de l'homme et du droit international humanitaire en Libye. La Jordanie espère que cette commission d'enquête et l'Envoyé spécial en Libye du Secrétaire général de l'ONU pourront collaborer avec les autorités libyennes aux fins de l'application de leurs mandats. Par ailleurs, la Jordanie réitère l'appel lancé à la Libye en vue de garantir la sécurité des personnes migrantes menacées par cette situation de violence.

M. OSAMU SAKASHITA (Japon) a réitéré son appel aux autorités libyennes pour qu'elles protègent les droits fondamentaux de leurs citoyens et des étrangers résidant dans le pays. Il a demandé aux autorités libyennes de coopérer pleinement avec la Cour pénale internationale. «Pour protéger les droits de l'homme, il faut entendre la voix du peuple», a-t-il conclu en émettant l'espoir que le pays retrouverait sa stabilité.

M. CARLOS EDUARDO DA CUNHA OLIVEIRA (Brésil) a estimé que la situation sur le terrain en Libye restait très préoccupante. Il a rappelé que son pays avait d'emblée apporté son soutien à la convocation d'une session extraordinaire du Conseil sur la Libye et s'était porté co-auteur de la résolution dont l'adoption à l'unanimité a montré la capacité d'action du Conseil. Le Brésil rappelle que l'imposition de mesures coercitives, telles que des zones d'exclusion aérienne, ne peut être que le fait du Conseil de sécurité des Nations Unies. Le Brésil demande en outre que soient respectés les droits de l'homme des migrants et des réfugiés et que chacun s'abstienne de refouler les ressortissants libyens. Le représentant brésilien a par ailleurs remercié les pays voisins de la Libye d'avoir ouvert leur frontière et a annoncé qu'une telle mesure avait permis d'évacuer tous les Brésiliens travaillant en Libye.

MME AISHATH LIUSHA ZAHIR (Maldives) a déploré que malgré les appels lancés par la communauté internationale, les autorités libyennes continuent les frappes sur sa population. Les Maldives condamnent sans ambages la guerre que mène le Gouvernement libyen contre des hommes et des femmes musulmans. Soyons clairs, les autorités n'ont pas respecté leurs obligations de protéger leur population de la violence, a lancé la représentante. Elle a aussi estimé que les crimes contre l'humanité actuellement commis ne seront rien comparé à la situation qui résulterait d la chute des villes rebelles. La représentante maldivienne a demandé aux grandes puissances d'abandonner leur futilité ou leur «attendre et voir». «Voulons-nous un autre Rwanda devant nos écrans de télévision», a interrogé la représentante? Elle a aussi plaidé pour l'ouverture de négociations avec le «Conseil national de transition» libyen.

M. GRIGORY LUKIYANTSEV (Fédération de Russie) a constaté que, de fait, une guerre civile était en cours en Libye. Une solution politique doit être recherchée, a-t-il ajouté, tandis que la Commission d'enquête du Conseil aura la tâche de faire la lumière sur les faits. La Russie, qui appuie pleinement le travail de cette commission, apporte aussi son soutien à l'action humanitaire sur le terrain. Elle ne croit pas cependant qu'une intervention étrangère soit la solution. Toute décision en ce sens doit être approuvée par le Conseil de sécurité après avoir été mûrement soupesée, a estimé le représentant russe. Les crises dans les pays arabes doivent se résoudre de manière pacifique, par la voie de conférences nationales réunissant toutes les sensibilités. Le représentant a cité en exemple les cas de l'Algérie et du Maroc.

Observateurs

M. SIMON MADJUMO MARUTA (Namibie) a déploré la situation des droits de l'homme en Libye. Le pays félicite le Comité international de la Croix-rouge et l'Organisation internationale des migrations pour l'assistance que ces organisations apportent aux populations qui tentent de fuir le pays. L'Union africaine a créé un comité de haut niveau pour évaluer la situation et engager les parties au dialogue, a rappelé le représentant namibien, qui a en outre demandé à la communauté internationale de respecter l'unité et l'intégrité territoriale de la Libye. La Namibie demande à la Libye d'adopter les réformes qui permettront de mettre fin aux causes de la situation actuelle.

MME ALISON LECLAIRE CHRISTIE (Canada) a dénoncé les violences qui se poursuivent en Libye. Elle a apporté le soutien de son pays aux citoyens et diplomates libyens qui se sont prononcés contre leurs autorités et les militaires qui refusent d'appliquer les ordres. Le Canada salue leur courage. Les gouvernements qui massacrent leur propre population ne sont pas les bienvenus ici, a lancé la représentante canadienne avant de souligner la volonté de son pays à aider la Libye à traverser cette transition.

MME LAURA MIRACHIAN (Italie) a indiqué que son pays était prêt à appuyer toutes les initiatives de la communauté internationale face à la situation en Libye, à commencer par celles de l'Union européenne et des Nations Unies. Il est très important que s'ouvre très rapidement un dialogue inclusif et national afin d'ouvrir des perspectives démocratiques pour ce pays. La représentante a rappelé l'intervention du chef de la diplomatie italienne, M. Franco Frattini, au début du mois devant le Conseil, en faveur d'une assistance économique en soutien à la transition en cours dans les pays arabes.

Le représentant de l'Algérie a fait part de ses profondes inquiétudes face à l'évolution de la situation en Libye, pays voisin et ami, et à la montée de la violence et à l'impossibilité du dialogue. La situation humanitaire ne cesse de se détériorer et le nombre des victimes augmente, alors que le flux des réfugiés se poursuit, a déclaré le représentant. L'Algérie a gardé ouvertes ses frontières pour accueillir les populations qui fuient le conflit, en attendant leur retour au pays, a-t-il poursuivi. L'Algérie a également évacué ses ressortissants et ceux d'autres pays, que ce soit par voie aérienne, maritime ou terrestre. Elle continue de fournir aide et soutien à la Tunisie voisine pour l'aider à subvenir aux besoins des réfugiés libyens, a ajouté le représentant, qui a appelé ses frères libyens à la retenue et à l'abandon de la logique de force. Celle-ci ne peut que rendre le pays vulnérable à une exploitation terroriste de la situation et à justifier une intervention militaire étrangère, a ajouté le représentant.

MME YAPRAK ALP (Turquie) a déclaré que les revendications du peuple libyen pour plus de liberté doivent être satisfaites sans délais. L'assistance humanitaire est également une nécessité afin de prévenir une rupture de l'offre sanitaire et alimentaire. Elle a en outre estimé qu'il faut préserver l'intégrité territoriale de le Libye et éviter une attaque militaire. Dans ce contexte, toute initiative visant à établir une zone de non survol doit se faire dans le cadre et avec l'assentiment des Nations Unies, de l'Union africaine et de la Ligue arabe. Mais il faut avoir à l'esprit que toute initiative de la communauté internationale a des conséquences sur la transformation en cours de la région. Les mesures qui peuvent être perçues comme une attaque étrangère doit être évitées. La voix et la volonté des peuples de la région doit prévaloir, a conclu la représentante turque.

M. MATJAŽ KOVAÈIÈ (Slovénie) a appelé le Président libyen, Mouammar Kadhafi, à démissionner et à mettre immédiatement un terme à toute action militaire contre sa population et à mettre fin à toutes les violations des droits de l'homme. Il a rappelé que le devoir principal de tout pays était de protéger ses citoyens. Si un pays omet de le faire ou s'il est responsable de graves violations des droits de l'homme et de crimes contre les civils, alors, en vertu du concept de «responsabilité de protéger», la communauté internationale assume sa responsabilité. Une grande part de cette responsabilité relève de la responsabilité pénale au niveau international, les crimes contre l'humanité affectant non seulement le peuple libyen mais étant «au cœur de notre conscience collective, ce qui implique qu'ils ne restent pas impunis, a ajouté le représentant de la Slovénie.

M. WALID ABU-HAYA (Israël) a déclaré que, pour la première fois depuis la création du Conseil des droits de l'homme, il avait parlé d'une voix unie et sans politisation. Israël soutient la suspension de la Libye du Conseil et la nomination des membres de la commission d'enquête internationale. Toutefois, Israël se demande si la communauté internationale en fait assez. Les forces du colonel Kadhafi avancent dans l'est du pays et on craint des massacres comme ceux qui ont déjà eu lieu. Faisant état d'un risque de génocide, le représentant a appelé le colonel Kadhafi à mettre fin aux massacres et à permettre une transition pacifique, tout en appuyant l'idée d'une zone d'interdiction aérienne. La communauté internationale doit agir avant qu'il ne soit trop tard, a conclu le représentant.

M. REINHARD SCHWEPPE (Allemagne) s'est félicité de la position unie du Conseil et de l'Assemblée générale concernant le cas de la Libye. Son pays espère que le message sera compris que tous ceux qui se livrent à des violations systématiques des droits de l'homme n'ont pas leur place dans ce Conseil. Le représentant allemand s'est aussi félicité de la mise en place d'une Commission d'enquête indépendante et de l'excellence du choix de ses membres. L'Allemagne exprime son soutien aux membres de la Commission ainsi qu'à l'Envoyé spécial du Secrétaire général. L'Allemagne se tient en outre prête, avec ses partenaires de l'Union européenne, à aider la transition démocratique en Libye.

M. RICARDO EDUARDO V.P. PRACANA (Portugal) a déclaré que les violations des droits de l'homme en Libye ne devaient pas rester impunies. Le recours à des moyens militaires de répression est inacceptable et on doit y mettre immédiatement un terme. Le Portugal réitère ses engagements à être à l'avant-garde des efforts internationaux à cet égard. Il a indiqué que son pays était particulièrement préoccupé par la crise humanitaire en Libye et à ses frontières, qui atteint des proportions alarmantes.

Organisations non gouvernementales

M. PHILIPPE DAM (Human Rights Watch) a salué la nomination des membres de la commission d'enquête sur les exactions commises en Libye et les a invités à commencer rapidement leur travail. Il a dénoncé les attaques subies par des migrants tentant de quitter le pays à l'est. Il a également dénoncé les nombreuses arrestations d'opposants et a souligné que des allégations de tortures ont été portées. Il a par ailleurs attiré l'attention sur les agressions contre les journalistes étrangers et a rappelé que les acteurs humanitaires n'avaient pu accéder à certains points de l'est du pays pour évaluer la situation.

M. ZIAD ABDEL TAWAB (Cairo Institute for Human Rights Studies) s'est dit encouragé par les réactions rapides de la communauté internationale face à la situation en Libye, notamment pour ce qui est de la décision de la Ligue arabe de coopérer avec le Conseil national de transition en Libye. Il a demandé au Conseil de sécurité de prendre ses responsabilités et d'instaurer une zone d'exclusion aérienne, comme le demande la Ligue arabe, afin de protéger les civils en Libye. Il a en outre invité les États à ne pas envisager de mesures unilatérales n'entrant pas dans le cadre du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies. Le droit international et les droits de l'homme ne peuvent être appliqués que par des mesures multilatérales, a-t-il insisté.

MME RENATE BLOEM (CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens) a exprimé ses condoléances à l'intention du Japon. Elle s'est ensuite félicitée de la tenue de la session extraordinaire que le Conseil a consacrée à la situation en Libye. Tout en se réjouissant de la réponse coordonnée et rapide de l'ensemble du système onusien, elle a demandé au Conseil d'appeler l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité à imposer immédiatement une interdiction de survol du territoire libyen, afin d'accroître la pression sur le colonel Kadhafi pour qu'il quitte le pouvoir; il faut donner un signe de soutien et d'espoir au peuple libyen, a-t-elle insisté.

M. GIANFRANCO FATTORINI (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP) s'est dit préoccupé par les exactions commises contre les ressortissants d'Afrique subsaharienne en Libye. Certains se trouvaient là pour des raisons de travail, alors d'autres étaient parqués là, en Libye, à la demande de l'Union européenne dans le cadre de l'externalisation de sa politique migratoire, a-t-il rappelé. Il a en outre fait part de son opposition à toute intervention étrangère en Libye, jugeant inutile pour appuyer cette position d'énumérer ici les violations de droits de l'homme commises par les forces internationales en Iraq ou en Afghanistan. Il a en outre invité la France et l'Union européenne à faire preuve de cohérence dans les messages envoyés aux peuples du monde. Il est en effet incompréhensible que dans un cas on envoie des armes pour que les peuples combattent et que, dans un autre, on envoie des armes pour les réprimer.

MME MARION DELEMONTEX (Reporters sans frontières - international) a dénoncé l'ensemble des attaques contre la presse dans le conflit libyen. Elle a plus particulièrement attiré l'attention sur l'assassinat d'un cameraman de la chaîne Al Jazeera. Bien que les coupables ne soient pas exactement identifiés, on constate que cet acte odieux s'inscrit dans le cadre de pressions croissantes exercées par les partisans du colonel Kadhafi contre la presse, a-t-elle souligné. Elle a également dénoncé la détention pendant une semaine d'un journaliste brésilien et a fait observer qu'un reporter du quotidien britannique The Gardian était toujours porté disparu.

M. LÁZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru») a déclaré que les dictatures ne sauraient durer éternellement, pas plus que l'histoire ne saurait s'arrêter devant la domination des oligopoles économiques. Il a condamné les politiques de domination de pays tels que la France ou les États-Unis. Il a constaté que le Conseil, «habituellement si passif», avait accordé un traitement spécial à la Libye, conformément à l'habituelle approche de deux poids deux mesures. Une armada comptant une quarantaine de navires de guerre se tient prête à envahir le territoire libyen sous couvert d'assistance humanitaire, a-t-il ajouté. En conclusion, le représentant a regretté les attaques personnelles ayant visé l'ancien Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, M. Jean Ziegler, ainsi que les dirigeants libyens.

MME JULIE GROMELLON (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a demandé qu'une zone d'exclusion aérienne soit instaurée en Libye, comme l'a demandé la Ligue arabe. Elle a en outre dénoncé le recrutement par les autorités libyennes de personnes d'origine subsaharienne pour combattre; certaines de ces personnes ont été recrutées de force et ont servi de boucliers humains. Elle a appelé à la libération des personnes recrutées de force et au versement de réparation du fait de leurs souffrances physiques et psychiques.

M. HILLEL NEUER (United Nations Watch) s'est dit choqué et atterré par la répression que mène le colonel Kadhafi contre sa propre population. Il a salué les mesures initiales prises par le Conseil de sécurité et la saisine de la Cour pénale internationale, mais a estimé qu'il fallait prendre des mesures concrètes. Saluant la suspension de la Libye du Conseil des droits de l'homme et la création d'une commission d'enquête sur les exactions commises dans le pays, il a rappelé que son organisation avait tenté de s'opposer à l'élection de la Libye au Conseil, l'an dernier.

Débat général sur les situations relatives aux droits de l'homme qui requièrent son attention

M. ANDRÁS DÉKÁNY (Hongrie au nom de l'Union européenne) a souligné qu'en Afrique du Nord, au Moyen Orient et au-delà, on se dresse pour défendre cette aspiration fondamentale de l'homme: pouvoir façonner sa propre vie et vivre en liberté dans la dignité. L'Union européenne appuie les aspirations du peuple tunisien pour une transition démocratique et a appelé toutes les parties à s'engager dans un dialogue inclusif et d'adopter un calendrier crédible de réformes. L'Union européenne soutient également le peuple égyptien dans sa démarche. M. Dékány a par ailleurs appelé les autorités syriennes à libérer M. Haytham el-Maleh ainsi que tous les prisonniers de conscience détenus dans ce pays. L'Union européenne reste très préoccupée par la détérioration de la situation des droits de l'homme en Iran, en particulier l'augmentation spectaculaire du nombre d'exécutions, au mépris des garanties internationales; elle appelle à la libération de tous les prisonniers politiques dans ce pays. Les pays de l'Union européenne se félicitent de l'issue heureuse du référendum au Sud-Soudan, mais demeurent préoccupés par la situation au Zimbabwe. En ce qui concerne la République démocratique du Congo, l'Union européenne estime nécessaire que le Haut Commissariat aux droits de l'homme continue d'y suivre la situation. L'Union européenne est préoccupée par la situation des droits de l'homme à Cuba, notamment s'agissant de la liberté d'expression et d'information et de la liberté de réunion.

M. JONAS RUDALEVIČIUS (Lituanie) a condamné les violences à l'encontre des défenseurs des droits de l'homme au Bélarus, s'agissant notamment des persécutions et emprisonnements d'opposants. Les allégations concernant des cas de torture sont également préoccupantes, a poursuivi le représentant, avant de s'inquiéter des restrictions imposées aux médias dans ce pays. Fort de ces préoccupations, il a demandé Bélarus de libérer les opposants emprisonnés, de stopper toute persécution envers les journalistes et autres défenseurs des droits de l'homme et de respecter les droits des détenus, y compris le droit de consulter un avocat. Il a appelé le Bélarus à coopérer pleinement avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme, le Conseil et ses procédures spéciales.

M. JUAN VILAR (Espagne) a dit soutenir le renouvellement des mandats des Rapporteur spéciaux sur la situation des droits de l'homme en République populaire démocratique de Corée et en Côte d'Ivoire. Il a dit suivre avec une grande préoccupation la situation des droits de l'homme en Iran, s'agissant notamment de la répression contre les opposants et les membres des minorités religieuses. L'Espagne estime qu'il serait opportun de créer un mandat de rapporteur spécial des droits de l'homme pour l'Iran. L'Espagne reste en outre préoccupée par la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo. Le représentant a remercié la Haut-Commissaire aux droits de l'homme pour son rapport sur la situation en Côte d'Ivoire et s'est dit très inquiet des allégations de violations des droits de l'homme dans ce pays; l'Espagne est favorable à la création d'une commission internationale d'enquête chargée de coopérer avec l'ONUCI. Tout en regrettant les pertes en vies humaines, l'Espagne estime que les événements survenus sur la rive sud de la Méditerranée sont encourageants. Le représentant espagnol s'est toutefois dit alarmé par la situation en Libye; la communauté internationale ne saurait tolérer de tels abus, a-t-il ajouté. Enfin, le représentant espagnol s'est dit préoccupé par les violations des droits de l'homme au Bélarus.

M. GRAHAM CLOUGH (Royaume-Uni) a déploré la détérioration de la situation des droits de l'homme en Iran. Il a noté que le Président Ahmadinejad s'était félicité du soulèvement du peuple égyptien tandis que, dans le même temps, ses propres forces de sécurité s'en prenaient à des manifestants pacifiques dans les rues iraniennes. Le représentant britannique a demandé la libération de MM. Moussavi et Karoubi. Le Royaume-Uni estime nécessaire la nomination d'un rapporteur spécial qui serait chargé de suivre la situation régnant en Iran. Par ailleurs, le représentant britannique a fait part de sa préoccupation s'agissant des situations qui prévalent à Bahreïn, au Yémen, au Zimbabwe et au Bélarus.

M. JEAN BAPTISTE MATTÉI (France) a déclaré soutenir les transformations en cours au Proche Orient et en Afrique du Nord. Celles-ci doivent permettre de satisfaire les aspirations profondes à la démocratie et au respect des droits des peuples de la région. Dans ce contexte, il a souhaité rendre hommage aux reformes historiques au Maroc et au processus de transition en Tunisie, et a exprimé son soutien aux évolutions en cours en Égypte. Il a appellé par ailleurs les autorités du Yémen à respecter le droit de manifester. Le représentant a déclaré que la France condamne avec la plus grande vigueur la répression en Libye. Ces attaques contre la population pourraient, par leur gravité et leur ampleur, constituer des crimes contre l'humanité et doivent cesser immédiatement. Les responsables de ces exactions doivent être traduits en justice, a insisté le représentant français. La communauté internationale doit redoubler d'effort pour afin de surmonter la crise humanitaire actuelle. Le représentant français a aussi dénoncé la poursuite de la répression en Iran. Aucun signe d'amélioration n'est perceptible. Nous assistons au contraire à une dégradation de la situation, comme l'atteste la hausse massive depuis le début d'année du nombre d'exécutions capitales qui atteignent des proportions insupportables. Dans ce contexte, il a estimé que la gravité de la situation justifie la création d'un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Iran. La France est également préoccupée par la situation en Côte d'Ivoire, où une politique de haine et de violence est actuellement menée par M. Gbagbo; elle appelle à la mise sur pied d'une commission d'enquête internationale sur les violations des droits de l'homme dans le pays et au respect du résultat des élections présidentielles de novembre dernier. Les viols massifs et le harcèlement des défenseurs des droits de l'homme en République démocratique du Congo ont également été condamnés par le représentant français, qui a aussi demandé la libération des défenseurs des droits de l'homme et des représentants de l'opposition au Bélarus.

MME EILEEN CHAMBERLAIN DONAHOE (États-Unis) a déclaré que son pays appelait tous les gouvernements à respecter les droits des individus à se rassembler pacifiquement et exprimer leur opinion. Elle a évoqué les graves situations des droits de l'homme régnant dans plusieurs pays: en Libye où des frappes aériennes du gouvernement contre les civils ont fait des centaines de morts; en Iran où la détention arbitraire, la torture, l'intimidation et la violence sont utilisées pour restreindre les droits universels de ses citoyens et qui devrait faire l'objet d'un mandat de rapporteur spécial; en République populaire démocratique de Corée, où on assiste à un contrôle de tous les aspects de la vie des citoyens, au déni des libertés d'expression, de réunion, d'association, de religion, de circulation et des droits des travailleurs; en Syrie où le gouvernement torture, détient arbitrairement et exécute illégalement ses citoyens, et réprime l'opposition politique et les libertés d'expression et d'association; en Côte d'Ivoire où on assiste à des disparitions forcées et des assassinats ciblés; en Érythrée, qui restreint gravement la liberté d'expression; au Myanmar, où plus de 2100 prisonniers politiques sont encore détenus; en Chine, où la liberté d'expression est entravée par les restrictions imposées sur Internet. La représentante américaine a aussi porté son attention sur les situations à Cuba, au Venezuela, au Bélarus et au Soudan. Elle a déclaré que dans ce dernier pays, les bombardements aériens de la population civile devaient cesser immédiatement; elle a aussi condamné les violations des libertés civiles dans le Nord du pays, mentionnant les arrestations de manifestants pacifiques lors de la Journée internationale des femmes.

MME BEATE STIRØ (Norvège) a exprimé sa préoccupation pour les violations des droits de l'homme en Côte d'Ivoire, notamment le nombre croissant de réfugiés avec les risques d'instabilité que cela comporte pour la région. Elle a par ailleurs appelé le Gouvernement du Swaziland à respecter ses engagements en matière de liberté d'expression, de réunion et d'assemblée. La Norvège condamne en outre les récentes violences contre les minorités religieuses au Pakistan. En Afghanistan, la situation de détérioration de la sécurité mine les perspectives de réconciliation de pays. La participation des femmes est en outre cruciale dans ce processus. La situation au Bélarus inquiète aussi la représentante norvégienne, ainsi que l'Iran où le nombre d'exécution extra judiciaire connaît un rebond. Dans ce contexte, elle a invité le Conseil à envisager la création d'un mandat de rapporteur spécial sur l'Iran.

M. OSAMU SAKASHITA (Japon) a émis l'espoir que les changements en cours au Moyen Orient permettraient de parvenir à des sociétés plus stables et prospères. Évoquant la situation en Iran, il s'est dit préoccupé par les graves violations perpétrées dans ce pays et appelé les autorités à faire preuve de retenue en tolérant les manifestations pacifiques. Le Japon encourage l'Iran à accepter les 123 recommandations qui lui ont été adressées par le Conseil des droits de l'homme dans le cadre de l'Examen périodique universel.

M. FEDOR ROSOCHA (Slovaquie) a condamné les exécutions et l'emprisonnement d'opposants au Bélarus et a demandé la libération immédiate de tous les détenus. S'agissant de la Libye, il a appelé à l'arrêt des violences, avant d'estimer que l'exemple de la Libye montre que tous les candidats au Conseil doivent faire l'objet d'un vote de l'Assemblée générale. Le représentant s'est en outre déclaré encouragé par la transition en Tunisie, tout en condamnant les récentes violences contre les minorités religieuses en Égypte. La situation des droits de l'homme en Iran est aussi un sujet de préoccupation pour son pays. Il déplore en outre le contrôle intensif exercé sur Internet en Chine. La Slovaquie demande au Gouvernement chinois la libération inconditionnelle du prix Nobel de la paix Liu Xiaobo et des autres prisonniers de conscience, a conclu le représentant slovaque.

M. DANTE MARTINELLI (Suisse) a évoqué les situations régnant en Libye, au Pakistan et au Bélarus, où «la situation demeure préoccupante». Il a noté que «dans le monde d'aujourd'hui, y compris en Europe, le droit à la liberté d'opinion continuait d'être violé. De plus, nombreux sont les États qui ne respectent pas l'obligation de garantir un espace de fonctionnement et d'expression aux associations ou remettent en question le droit de se réunir pacifiquement». La Suisse constate toutefois que les récents événements au Moyen Orient et en Afrique du Nord «nous rappellent que ni l'usage excessif de la force par les agents de l'ordre, ni les limites ou le contrôle indu de l'accès à Internet ne peuvent annihiler les aspirations de la population de participer aux processus politiques, économiques et sociaux».

Droit de réponse

MME LARISA BELSKAYA (Bélarus) a souligné que les interventions des délégations concernant son pays sont en contradiction avec la séance d'information organisée par son pays sur ces questions. Elle a estimé que lorsque les opposants mènent des actions dans la violence, les gouvernements n'ont pas le choix que de prendre les mesures qui s'imposent, conformément à la loi. Les déclarations concernant le Bélarus sont politisées et malheureusement, cela éloigne la possibilité de dialogue constructif.

MME KSHENUKA SENEWIRATNE (Sri Lanka), répondant à l'Union européenne, a indiqué qu'en ce qui concerne la reddition de compte, son pays avait mis en place une commission des droits de l'homme chargée de la question. Le mandat de cette commission inclut la compétence d'étudier tous les cas de violation des droits de l'homme et du droit international humanitaire. Sri Lanka estime qu'il n'est pas constructif de répéter cette thématique de la reddition de comptes et qu'il faut donner plus de temps aux organes nationaux pour répondre à ces questions.

M. SEYED MOHAMMAD REZA SAJJADI (République islamique d'Iran) a indiqué réagir aux déclarations des délégations des États-Unis et du Royaume-Uni. Les violations des droits de l'homme de la part de ces deux gouvernements ont augmenté de manière dramatique et il est ironique d'entendre le plus grand violateur des droits de l'homme se dire préoccupé par la situation régnant dans certaines régions du monde. Le représentant a cité Guantánamo, lieu sans doute le plus infâme des violations des droits de l'homme de l'histoire, ainsi que les frappes aériennes aveugles en Afghanistan, ainsi que la répression israélienne contre les Palestiniens.

M. FÉLIX PEÑA RAMOS (Venezuela) a constaté une fois encore que l'Empire diabolisait tous les gouvernements ne lui obéissant pas au doigt et à l'œil. «Le Gouvernement américain ment, il accueille des terroristes sur son territoire en toute impunité, tandis qu'il en emprisonne d'autres sans jugement». Au Venezuela, l'exercice des libertés et la participation citoyenne est pleine et entière. Le représentant a demandé au Gouvernement des États-Unis de cesser ses pratiques de harcèlement et d'inaugurer de nouvelles relations avec ses voisins latino-américains pour en faire de véritables partenaires sur un pied d'égalité.

M. ENOS MAFEMBA (Zimbabwe)a souligné qu'aucun État représenté dans cette salle n'avait un bilan parfait en matière de droits de l'homme. Le Zimbabwe fera tout en son pouvoir pour avoir un contrôle total de ses ressources et surmonter plus d'un siècle de domination coloniale et néocoloniale, avec ses violations des droits de l'homme et d'humiliations. Le Zimbabwe conteste le droit du Royaume-Uni et des États-Unis de pointer le Zimbabwe du doigt pour des violations des droits de l'homme étant donné leur lourde part dans les violations des droits de l'homme. Il a souligné que ceux qui enfreignent la loi doivent être prêts à en assumer les conséquences.

M. ISMAYIL ASADOV (Azerbaïdjan) a estimé que la délégation de la Norvège cherchait à induire en erreur la communauté internationale s'agissant du processus de démocratisation en cours en Azerbaïdjan. Les droits à la liberté d'expression et de réunion sont assurés par la Constitution, a rappelé le représentant, qui a invité la délégation norvégienne à éviter d'avoir recours à deux poids deux mesures à l'égard de certains pays.

M. LUIS AMOROS NUÑEZ (Cuba) a estimé que ni l'Union européenne ni les États-Unis n'avaient l'autorité morale pour montrer les autres du doigt. Il s'est interrogé sur la fermeture de la prison Guantánamo, lieu de graves violations des droits de l'homme par les États-Unis, et s'est demandé quand ce pays rendrait le territoire à son propriétaire légitime, Cuba. Le représentant cubain a aussi mentionné les prisons secrètes et les vols aériens secrets, et constaté qu'un silence complice régnait sur le rétablissement de tribunaux militaires dans un territoire occupé illégalement sur territoire cubain.

M. JIANG YINFENG (Chine) a souligné que la Chine avait toujours pensé que les pays devaient régler les différends en matière de droits de l'homme dans un esprit de coopération. Il a déploré que ce ne soit pas cet esprit qui ait inspiré les déclarations des États-Unis, de l'Union européenne et de la Slovaquie en particulier. La Chine rejette ces déclarations et suggère à ces pays d'examiner les problèmes régnant chez eux. Le représentant a ajouté à l'intention du représentant slovaque qu'il ignorait ce dont il parlait, Liu Xaobo ayant été condamné pour subversion. Aucun pays au monde n'accepte ce genre de choses, a-t-il rappelé, en particulier l'incitation à la violence.


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