Aller au contenu principal

CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT: LES DÉLÉGATIONS SE FÉLICITENT DE LA SIGNATURE DU NOUVEAU TRAITÉ START

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, de nombreuses délégations dont les interventions ont notamment porté sur la signature du nouvel accord de réduction des armes stratégiques par les États-Unis et la Russie et sur la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération.

Il a été rappelé qu'avec la signature du traité START par la Russie et les États-Unis, un plancher est atteint en matière de réduction des armes stratégiques : d'autres réductions ne pourront être décidées que moyennant la prise en compte des autres processus à l'œuvre dans le domaine de la sécurité internationale. Les nouvelles mesures en faveur du désarmement nucléaire devront être envisagées et appliquées dans le strict respect du principe d'égalité et d'indivisibilité de la sécurité, et compte tenu de tous les autres facteurs susceptibles d'affecter la stabilité stratégique. Il a été espéré que ce nouveau compromis se traduira rapidement en d'autres mesures concrètes et multilatérales facilitant l'élimination progressive des armes nucléaires, telle que la diminution du rôle des armes nucléaires dans les doctrines militaires des pays qui en possèdent et de leurs alliés, ou encore l'inclusion des armes tactiques au processus de désarmement. D'autres intervenants se sont dits préoccupés par les arguments avancés par certains États nucléaires semblant chercher à rationaliser la détention des armes nucléaires.

Les délégations ont appelé à une reprise des négociations en vue du désarmement nucléaire dans le cadre de la Conférence, espérant l'adoption rapide d'un programme de travail à cet égard. Certains pays ont appuyé la création, au sein de la Conférence du désarmement, d'un organe subsidiaire chargé du désarmement nucléaire dans le contexte d'un programme de travail équilibré et complet.

Il a été précisé que le traité de non-prolifération est la pierre angulaire du régime de non-prolifération et que sa ratification universelle devrait être l'une des grandes priorités de la Conférence du désarmement. Si certaines délégations ont qualifié de succès la tenue de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération en 2010, d'autres ont regretté que cette Conférence n'ait pas produit de résultats à la hauteur des attentes de la communauté internationale, notamment en refusant d'adopter le calendrier et le cadre juridique proposés par le Mouvement des non-alignés en vue de l'élimination totale des armes nucléaires.

Plusieurs intervenants ont préconisé l'adoption d'une convention contre les armes nucléaires qui interdirait complètement la production, la production et le transfert ou l'utilisation de telles armes. Des délégations ont insisté sur l'importance de convoquer une conférence sur la dénucléarisation et l'interdiction des autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. Enfin, les transferts d'armes nucléaires à des États non nucléaires ont fait l'objet de plusieurs mises en garde.

Les représentants des États suivants ont fait des déclarations : Pakistan, Hongrie (au nom de l'Union européenne), Mexique, Fédération de Russie, Malaisie, Irlande, Canada, Argentine, Algérie, Suisse, Australie, Royaume-Uni, Chili, Iran, Chine, Nouvelle-Zélande, Inde, Afrique du Sud, Indonésie, Égypte, Cuba, Autriche et Éthiopie.

La prochaine séance plénière publique de la Conférence du désarmement se tiendra jeudi 3 février à 10 heures.


Aperçu des déclarations

M. GRINIUS, Président de la Conférence du désarmement, a rappelé le calendrier indicatif des débats portant sur les «quatre sujets centraux» définis antérieurement. Il a appelé les intervenants à structurer leur déclaration sur le désarmement nucléaire. Il a émis le souhait que jeudi prochain soit abordé le projet de Traité d'interdiction de la production de matières fissiles. Toutefois, les États membres peuvent s'exprimer sur tout sujet à leur convenance, a-t-il indiqué.

M. ZAMIR AKRAM (Pakistan) a estimé que la Conférence du désarmement devait être au bénéfice de la communauté internationale mais aussi des intérêts nationaux. Les mesures de désarmement, comme l'a dit le représentant d'une grande puissance, a-t-il observé, doivent obéir à des critères d'équité, être vérifiables et elles doivent renforcer la sécurité nationale de chacun des États et de leurs alliés. Un traité non équitable saperait les intérêts nationaux du Pakistan, a-t-il souligné. L'impasse de la Conférence du désarmement dure depuis une douzaine d'années et il est étonnant que certains pays s'en offusquent aujourd'hui, faisant porter l'opprobre sur certains, alors qu'ils n'ont pas fait grand-chose eux-mêmes, tout en faisant l'éloge de leur propre vertu. Or, dans la pratique, leurs actes démentent leurs paroles en s'opposant aux résolutions traitant du désarmement. Le représentant a condamné la politique de «sélectivité et de deux poids deux mesures» de certains pays occidentaux. L'impasse à la Conférence du désarmement s'explique par ses faits : «Nous sommes tous également responsables», a ajouté le représentant du Pakistan. La solution pour sortir de l'impasse est que certains États renoncent à cette politique de deux poids deux mesures, a-t-il ajouté. Négocier en dehors de la Conférence du désarmement est hors sujet pour le Pakistan.

Abordant la question du désarmement nucléaire, le Représentant a évoqué les propositions du Secrétaire général, regrettant que les grands États dotés d'armes nucléaires ne les aient pas entendues. Pour le Pakistan, les négociations de désarmement multilatérales constituent le seul mécanisme pour traiter les menaces posées à la sécurité internationale et à la stabilité par de telles armes. Les mêmes États prétendent que l'environnement international est plus favorable aujourd'hui à aller de l'avant vers le désarmement nucléaire, tout en s'opposant à ce que la Conférence du désarmement s'engage dans cette voie : le Pakistan ne saurait s'expliquer une telle incohérence.

Dans le même temps, et à l'opposé de ce qu'elles affirment au sujet du désarmement nucléaire, certaines grandes puissances nucléaires continuent de mener des politiques basées sur un concept de dissuasion nucléaire et de destruction mutuelle assurée, un concept dépassé, hérité de la guerre froide, a ajouté le représentant. Et est apparue la notion encore plus dangereuse que l'usage de telles armes pourrait ne plus se limiter à leur rôle de dissuasion mais qu'elles pourraient éventuellement être utilisées, y compris contre des États ne disposant par de l'arme atomique, a-t-il souligné.

En conclusion, le Pakistan estime que les décisions de la première session extraordinaire sur le désarmement demeurent le seul cadre adopté par consensus gouvernant le système de désarmement multilatéral, aussi bien en termes d'objectifs que de principes. Le Pakistan est convaincu que la question du désarmement nucléaire est mûre pour des négociations au sein de la Conférence du désarmement.

M. DIMITRIS ILIOPOULOS (Hongrie, au nom de l'Union européenne) a affirmé que les Vingt-Sept contribuaient activement aux efforts mondiaux en faveur d'un monde plus sûr. Une priorité importante pour l'Union européenne est l'organisation en 2012 d'une conférence sur la dénucléarisation et l'interdiction des autres armes de destruction massive au Moyen-Orient. D'une manière générale, l'Union européenne a l'intention de poursuivre ses efforts en faveur de plus de transparence. Elle se félicite du processus de réduction des armes nucléaires stratégiques depuis la fin de la guerre froide, ainsi que les démarches significatives entreprises par deux États membres de l'Union européenne à cet égard. Elle souligne la nécessité d'une réduction globale des stocks mondiaux d'armes nucléaires conformément à l'article VI du Traité de non-prolifération (TNP), particulièrement de la part des États disposant d'un arsenal important.

Le Représentant a estimé que le traité d'interdiction des essais nucléaires était d'une importance cruciale pour le désarmement nucléaire et la non-prolifération, première priorité de l'Union européenne. Elle a bon espoir que l'engagement politique renouvelé de le ratifier, en particulier eu égard à l'Annexe 2 du Traité, par l'Indonésie et les États-Unis, donneraient un nouvel élan aux efforts en faveur d'une entrée en vigueur rapide de ce traité fondamental. L'Union européenne a aussi l'intention d'appeler à la concrétisation de son régime de vérification et de démantèlement de toutes les installations d'essais nucléaires, de manière transparente et ouverte à la communauté internationale.

MME MARIA ANTONIETA JAQUEZ HUACUJA (Mexique) a déclaré que, pour son pays, le recours aux armes nucléaires contrevenait à tous les principes du droit international humanitaire, violant la Charte de l'ONU, comme l'ont réitéré plusieurs résolutions de l'Assemblée générale. La représentante a souligné que la seule garantie absolue contre la menace de ces armes était leur élimination complète. Elle a estimé que le mandat de la conférence étant de négocier, il était «saugrenu, c'est le moins que l'on puisse dire», que pour le premier point de son ordre du jour sa tâche soit «de délibérer et non pas de négocier». Il y a urgence : il serait en effet logique que, à l'instar, de ce qui a été fait dans le cadre des programmes de combat contre la pauvreté, de développement, de santé, d'éducation ou d'environnement, s'impose un «sentiment d'urgence» avec des objectifs clairement établis pour parvenir à des négociations en matière de désarmement nucléaire et ainsi renforcer la crédibilité de l'instance de désarmement, a conclu la représentante mexicaine.

M. VALERY LOSHCHININ (Fédération de Russie) a déclaré que la priorité de son pays est de veiller au bon fonctionnement et au renforcement du TNP et d'œuvrer en vue de sa ratification universelle. La Russie est satisfaite des résultats de la Conférence d'examen du TNP en 2010, notamment de l'adoption d'une liste de mesures concrètes sous la forme d'un Plan d'action. M. Loshchinin a observé que l'intensification des efforts de non-prolifération est aussi déterminée par le risque que des armes de destruction massive ne tombent entre les mains de terroristes. À cet égard, il est impératif que la communauté internationale continue d'œuvrer vue de l'application universelle de la Convention internationale pour la suppression des actes de terrorisme nucléaire, tandis que des mesures supplémentaires doivent être prises pour renforcer les compétences de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). La Russie est également en faveur de l'entrée en vigueur dès que possible du Traité d'interdiction complète d'essais nucléaires.

La Russie entend en outre mettre un terme à la «réplication» des technologies sensibles liées à la production de matières nucléaires utilisables pour la fabrication d'armes, tout en garantissant la possibilité aux États qui le souhaitent d'exercer leur droit légitime à l'exploitation de l'énergie nucléaire. C'est la raison pour laquelle la Russie a lancé une initiative internationale en faveur des infrastructures nucléaires, qui prévoit l'ouverture de centres internationaux chargés de prodiguer des services en lien avec les combustibles nucléaires. C'est dans le cadre de cette initiative que la Russie a ouvert, l'an dernier sur son territoire, la première réserve d'uranium faiblement enrichi destinée à approvisionner les États membres de l'AIEA.

M. Loshchinin a rappelé qu'avec la signature du traité START par la Russie et les États-Unis, un plancher est atteint en matière de réduction des armes stratégiques : d'autres réductions ne pourront être décidées que moyennant la prise en compte des autres processus à l'œuvre dans le domaine de la sécurité internationale. Les nouvelles mesures en faveur du désarmement nucléaire devront être envisagées et appliquées dans le strict respect du principe d'égalité et d'indivisibilité de la sécurité, et compte tenu de tous les autres facteurs susceptibles d'affecter la stabilité stratégique.

Enfin, la Russie espère que les travaux de fond de la Conférence du désarmement reprendront au plus vite. La question de la prévention de la militarisation de l'espace doit, de l'avis de la Russie, être la priorité absolue de la Conférence. La Russie est aussi prête à entamer les négociations au sujet d'un Traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la production d'armes nucléaires, dans le cadre d'un programme de travail équilibré.

M. ISMAIL MOHAMAD BKRI (Malaisie) s'est félicité de la venue du Secrétaire général la semaine dernière devant la Conférence, la Malaisie appréciant particulièrement les paroles d'encouragement prononcées à cette occasion et les propositions d'action de suivi dans le sillage du sommet de haut niveau de septembre 2010. La Malaisie est encouragée par les développements positifs intervenus en matière de sécurité internationale lors de l'année écoulée. Ceux-ci montrent qu'il existe des engagements ambitieux et une volonté politique dans la poursuite de l'ordre du jour du désarmement. Il revient donc à la Conférence de profiter de cet élan et d'entamer des discussions substantielles au plus tôt. Car il est malheureux, a observé M. Bkri, que la Conférence du désarmement n'ai toujours pas été capable de parvenir à un consensus sur un programme de travail. La Malaisie appelle à une poursuite des efforts pour parvenir à un consensus à cet égard.

M. GERARD CORR (Irlande) a indiqué que son pays attachait la plus haute priorité à l'élimination complète et vérifiable de toutes les armes nucléaires. Il est grand temps que celles-ci rejoignent en effet les armes chimiques et bactériologiques parmi les armes mises hors la loi par la communauté internationale. En effet, la seule garantie absolue contre la prolifération et l'utilisation des armes nucléaires est leur élimination complète et vérifiable. Tant qu'un certain nombre d'États considéreront que la possession d'armes nucléaires est essentielle à leur sécurité, il pourra s'en trouver d'autres qui aspireront à en acquérir, a-t-il dit.

L'Irlande estime qu'un certain nombre de mesures peuvent être prises à court terme pour faciliter le désarmement nucléaire. Elle souhaite l'entrée en vigueur au plus tôt du Traité d'interdiction des essais nucléaires. Elle pense que la Conférence doit ajouter à la liste de ses réalisations un Traité interdisant la production de matières fissiles à fins militaires. Un traité à ce sujet s'impose depuis longtemps, a dit le représentant, concluant que la promotion du désarmement nucléaire devait être l'objectif premier de la Conférence ; cela peut être obtenu par un traité sur les matières fissiles ainsi que par des «assurances négatives de sécurité».

M. GEOFF GARTSHORE (Canada) a déclaré que, pour son pays, la meilleure manière d'atteindre l'objectif d'un monde sans armes nucléaires est de procéder par étapes, au moyen d'accords progressifs, comme le Traité d'interdiction complète d'essais nucléaires et éventuellement un Traité d'interdiction de la production de matières fissiles. Voici plusieurs années que la Conférence du désarmement traite des moyens d'atteindre l'objectif du désarmement nucléaire. Ses débats ont souvent porté sur des approches holistiques plutôt que progressives. On peut comprendre qu'un pays hésite à abandonner le premier son arsenal nucléaire, a ajouté le représentant, même s'il est de ceux qui adhèrent sincèrement à la cause du désarmement. C'est pourquoi le Canada estime qu'il faut créer les conditions nécessaires qui amèneront tous les États possédant des armes nucléaires à prendre des mesures en vue de leur élimination, tout en veillant à ce qu'aucun autre État ne s'en dote pour répondre à sa propre insécurité.

Le Canada estime que la Conférence du désarmement peut et doit servir de tribune pour la transparence, la confiance et le renforcement de la confiance en matière de désarmement. Ces derniers mois, certains États ont communiqué des informations supplémentaires sur leurs arsenaux nucléaires. Le Canada souhaiterait que d'autres puissances nucléaires en fassent autant et qu'elles donnent des renseignements sur leurs stocks de matières fissiles. Le Canada estime enfin que l'amorce de négociations en vue d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement est la mesure pratique la plus importante que la Conférence puisse actuellement prendre en faveur du désarmement.

MME MARIELA FOGANTE (Argentine) a déclaré que son pays a toujours plaidé en faveur de la reprise des négociations en vue du désarmement nucléaire dans le cadre de la Conférence, espérant l'adoption rapide d'un programme de travail à cet égard. L'Argentine estime également que le Traité de non-prolifération est la pierre angulaire du régime de non-prolifération : sa ratification universelle devrait être l'une des grandes priorités de la Conférence du désarmement. Malgré le fait que l'Argentine aurait souhaité constater des progrès en matière de désarmement nucléaire dans les documents finals de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération, elle considère que la Conférence a été un succès.

La représentante a applaudi la signature du nouveau traité START entre les États-Unis et la Russie, une initiative bien accueillie par les autres États, si l'on en juge par leurs réactions. Mme Fogante a espéré que ce nouveau compromis se traduira rapidement en d'autres mesures concrètes et multilatérales facilitant l'élimination progressive des armes nucléaires, telle que la diminution du rôle des armes nucléaires dans les doctrines militaires des pays qui en possèdent et de leurs alliés, ou encore l'inclusion des armes tactiques au processus de désarmement. Mme Fogante a enfin souligné l'importance des zones dénucléarisées.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a observé que les multiples doctrines et politiques nucléaires des pays détenteurs des armes nucléaires valorisent le rôle dissuasif de l'arme nucléaire pour assurer la sécurité des États. Or, si la dissuasion rend légitime la détention d'armes nucléaires, on ne voit pas pourquoi seules certaines puissance en auraient le monopole. La dissuasion deviendrait alors un argument pour la prolifération et non son contraire. De telles doctrines ne sont donc pas de nature à entraîner une dynamique de désarmement nucléaire. Elles s'inscrivent au contraire dans le prolongement de celles qui prévalaient durant la guerre froide. M. Jazaïry a également observé que certains États, en subordonnant le désarmement nucléaire à des conditions préalables, remettent en cause la sincérité de leur volonté de renoncer à ces armes. L'objectif de désarmement nucléaire s'estompe ainsi dans les brumes d'un horizon indéfini ou même infini.

Cela étant, l'Algérie a accueilli favorablement les quelques progrès obtenus jusqu'ici en matière de réduction des arsenaux nucléaires. Dans ce contexte, elle soutient, entre autres, la position du XVe Sommet du Mouvement des pays non-alignés en 2009, qui appelle à la mise en place d'un organe subsidiaire au sein de la Conférence du désarmement pour mener des négociations sur un programme échelonné en vue de l'élimination complète des armes nucléaires selon un calendrier déterminé, y compris une convention sur les armes nucléaires. L'Algérie suggère en outre de structurer les débats de la Conférence du désarmement autour de questions techniques et politiques contenues dans la version révisée du modèle de Convention relative aux armes nucléaires soumis par le Costa Rica et la Malaisie à l'Organisation des Nations Unies en janvier 2008. Les discussions porteraient ainsi sur les obligations générales, les mesures de transparence et de confiance, la vérification et le respect des engagements, l'application nationale et la relation entre la convention et d'autres instruments existants.

M. JÜRG LAUBER (Suisse) a souligné que le désarmement nucléaire avait fait l'expérience d'un renouveau ces dernières années, citant l'approbation par les Parlements américains et russes du nouveau traité START préparant le terrain pour sa ratification et son entrée en vigueur. La Suisse salue également les nombreux engagements et actions concrètes d'autres États pour réduire leur dépendance à l'arme nucléaire. Elle est heureuse que la Conférence d'examen du TNP ait réaffirmé la détermination sans équivoque des États nucléaires pour accomplir la totale élimination de leurs arsenaux respectifs.

Toutefois, de sérieuses menaces et défis perdurent, a ajouté le représentant, et les accomplissements dans le domaine du désarmement semblent «plutôt modestes par rapport à l'étendue générale du problème : les efforts sont aléatoires au lieu d'être systématiques et coordonnés». Notant que la logique de la dissuasion nucléaire avait survécu à la guerre froide, M. Lauber a estimé que «notre vision devait être élargie afin de permettre une politique de sécurité plus durable». La Suisse reste convaincue qu'il «faut rendre l'usage de l'arme nucléaire hors la loi et graduellement et systématiquement s'en débarrasser». Pour ce faire, il convient d'augmenter la cadence dans l'approche «étape par étape», tout en s'assurant que toutes les étapes réalisées le soient de manière irréversible. Il faut absolument «passer à la vitesse supérieure» : «La Suisse est convaincue que la Conférence du désarmement, ainsi que Genève en tant que centre du désarmement multilatéral, peuvent jouer un rôle vital dans ces efforts».

M. PETER WOOLCOTT (Australie) a déclaré que son pays est engagé en faveur d'un monde exempt d'armes nucléaires, un objectif qui doit être atteint par le biais de mesures équilibrées, progressives et qui se renforcent mutuellement. Avec le Japon, l'Australie parraine la Commission internationale sur la non-prolifération et du désarmement nucléaires dont le rapport est paru en décembre 2009. Sur la base des recommandations du rapport, les deux pays ont soumis un ensemble de mesures concrètes de désarmement et de non-prolifération à la Conférence d'examen du traité de non-prolifération en 2010.

L'Australie estime qu'il convient désormais de prendre des décisions s'agissant des recommandations formulées lors de la Conférence d'examen relativement au désarmement, à la non-prolifération et à l'utilisation pacifique. Elle se félicite à cet égard de la décision des États nucléaires de se rencontrer ultérieurement à Paris afin de débattre de leur rôle quant à l'application du Plan d'action de la Conférence d'examen. L'Australie et le Japon, de même que d'autres pays de la région, ont lancé une initiative axée sur la nécessité d'une mise en œuvre progressive de ce Plan d'action. L'Australie espère que cette initiative permettra la formulation de propositions innovantes et pratiques relatives notamment à la réduction du nombre des armes nucléaires, à l'adoption de mesures de transparence de la part des États nucléaires, à l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète d'essais nucléaires, au renforcement des mesures de sauvegarde ou encore de la négociation autour d'un Traité d'interdiction de la production de matières fissiles.

M. JOHN DUNCAN (Royaume-Uni) s'est félicité de la réussite de la Conférence d'examen du TNP en 2010, ainsi que de la signature du nouveau traité START par les États-Unis et la Russie. Ces deux événements ont donné un nouvel élan aux efforts de désarmement pour l'année qui vient. Le Royaume-Uni estime que par ailleurs que malgré son inertie, la Conférence du désarmement est la meilleure et la seule plateforme de négociations au sujet du désarmement multilatéral. La Communauté internationale exige cependant qu'elle fasse rapidement la preuve de sa pertinence. Le représentant a indiqué par ailleurs que son pays a procédé récemment à un examen de sa sécurité et de sa défense stratégique, réaffirmant à cette occasion son intention de conserver des moyens de dissuasion. Le même document contient aussi un certain nombre de nouvelles mesures de désarmement. Le Royaume-Uni a ainsi annoncé qu'à l'horizon 2020 il diminuera son stock global d'armes nucléaires à 180 unités au maximum, en même qu'il réduira le nombre des têtes nucléaires embarquées dans ses sous-marins. Ces mesures complètent les autres démarches du Royaume-Uni dans le domaine du désarmement, à savoir notamment l'organisation en 2009 d'une conférence des cinq Présidents de la Conférence au sujet des mesures de renforcement de la confiance en vue du désarmement nucléaire.

M. PEDRO OYARCE (Chili) a suggéré que ce genre de débat, dont il s'est félicité, soit ouvert aux experts, afin de surmonter le «sentiment de frustration collective» que ressentent les membres de la Conférence. Celle-ci n'est pas une fin en soi, le désarmement nucléaire et la non-prolifération étant les deux faces d'une même médaille, a-t-il observé. L'objectif est de parvenir à ces deux objectifs, ce qui implique d'en créer les conditions propices. Cela suppose aussi de surmonter la notion de dissuasion nucléaire, estime le Chili. Il faut notamment parvenir à l'arrêt effectif des essais nucléaires et trouver un processus efficace de non prolifération avec le strict respect des mécanismes de vérification. La paix, la sécurité régionale, internationale et au bout du compte de l'être humain, en dépendent, a souligné M. Oyarce. Le représentant a cité un certain nombre d'initiatives en ce sens, citant par exemple le fait qu'en 1996, le Groupe des 21 avait fait des propositions concrètes de dénucléarisation ; il a aussi cité les suggestions plus récentes du Secrétaire général. Il existe toute «une jurisprudence en la matière, un patrimoine riche» dans le processus de désarmement, a-t-il dit. Les traités multilatéraux représentent une protection pour des petits pays comme le Chili, a relevé le représentant chilien, appelant en conclusion à l'émergence d'un consensus sur un programme de travail.

M. SAYED MOHAMAD REZA SAJJADI (Iran) a notamment déclaré que la communauté internationale ne saurait attendre indéfiniment l'élimination totale des armes nucléaires. La Conférence du désarmement ne peut quant à elle rester passive devant cette préoccupation grave et légitime. Le représentant a regretté à cet égard que la Conférence d'examen du TNP en 2010 n'ait produit de résultats à la hauteur des attentes de la communauté internationale, notamment en n'adoptant pas le calendrier et le cadre juridique proposés par le Mouvement des non-alignés en vue de l'élimination totale des armes nucléaires. La Conférence du désarmement doit donc répondre aux préoccupations des États non nucléaires issues du déploiement de nouvelles armes par des États non nucléaires. Il convient à cet égard d'interdire le développement et la production de nouvelles armes, en particulier les bombes nucléaires miniaturisées. De plus, l'Iran est préoccupé de la prolifération verticale d'armes nucléaires, par le transfert et le déploiement d'armes nucléaires sur le territoire de pays non-nucléaires et les transferts d'armes nucléaires au régime sioniste qui n'est pas partie au TNP.

M. ZHIBO ZOU (Chine) a noté que d'importants progrès avaient été accomplis en 2010, citant en particulier le nouveau traité START entre la Russie et les États-Unis, la Chine saluant ce progrès. Tant que tous les États déploieront des efforts, nous pourrons avancer vers l'élimination des armes nucléaires, a-t-il poursuivi. La priorité des efforts doit aller à la mise en œuvre des décisions de la Conférence d'examen de 2010. Les États dotés des plus grands arsenaux doivent montrer l'exemple en les réduisant, a-t-il dit. Le désarmement nucléaire devrait suivre le principe de la préservation de l'équilibre stratégique mondial. Le rôle des armes nucléaires doit être revu par les pays qui en sont doté, ceux-ci devant d'abord s'engager à ne jamais les utiliser les premiers. Concrètement, les mécanismes du TNP doivent être respectés et appliqués complètement, estime la Chine.

Il faut aussi appuyer les efforts visant à débarrasser des régions du monde de toute arme nucléaire. La Chine considère sa capacité nucléaire comme uniquement défensive et elle s'est engagée à ne jamais l'utiliser la première, a-t-il rappelé. Elle compte continuer d'œuvrer au sein de la communauté internationale pour parvenir au désarmement nucléaire. En conclusion, le représentant a souhaité à tous une excellente «année du lapin».

MME DELL HIGGIE (Nouvelle-Zélande) a souligné que l'histoire considérerait de manière sans doute de manière guère bienveillante l'échec de cette institution pour entamer un travail substantiel sur des questions d'une importance aussi fondamentale à la sécurité internationale. Son pays est convaincu de l'apport que peut représenter un Traité sur les matières fissiles à la cause du désarmement nucléaire. Mme Higgie a estimé que la capacité éventuelle de la Conférence à créer un organe subsidiaire sur la question du désarmement nucléaire, comme en ont convenu les États parties au TNP l'an dernier à la Conférence d'examen, permettrait à ses membres de disposer d'une plateforme permettant d'approfondir le traitement de la question de manière plus pointue et à la hauteur de la signification de la cause du désarmement nucléaire. Il conviendrait aussi de s'engager en profondeur en faveur de mesures provisoires et pratiques permettant d'avancer vers l'objectif final.

M. HAMID ALI RAO (Inde) a déclaré que son pays, membre du Mouvement des non-alignés et du Groupe de 21 pays en développement (G-21), attache la plus haute priorité au désarmement nucléaire complet et vérifiable. Le désarmement doit intervenir au terme d'un processus méthodique, sous-tendu par un engagement universel et un cadre multilatéral négocié en vue d'un désarmement non-discriminatoire. L'Inde estime que l'élimination de ces armes passe par une délégitimation progressive des armes nucléaires. Les pays disposant des plus importants stocks d'armes nucléaires doivent assumer une part plus importante du processus de désarmement. À cet égard, l'Inde se félicite de la signature du nouvel accord START par les États-Unis et la Russie, deux États qui disposent de plus de 90 % des armements nucléaires. Tous les États dotés de l'arme nucléaire doivent nouer un dialogue en vue de l'instauration d'un climat de confiance en vue de la diminution de la place occupée par les armes nucléaires dans les relations internationales, a conclu le représentant.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a rappelé l'impasse à laquelle la conférence s'était à nouveau heurtée l'an dernier, évoquant le débat stérile ayant caractérisé ses travaux depuis de nombreuses années. L'Afrique du Sud apprécie les tentatives effectuées pendant l'intersession pour parvenir à une reprise substantielle et rapide des travaux cette année. Nombreux sont ceux qui s'interrogent sur la pertinence et la valeur réelle des efforts effectués en faveur du désarmement. L'absence de progrès depuis 14 ans pour aller à l'essentiel constitue une source de frustration, et ce pas uniquement pour la grande majorité des membres de la Conférence mais aussi pour la communauté internationale au sens large, a-t-il observé. Le désarmement nucléaire est prioritaire pour l'Afrique du Sud, a-t-il assuré, une priorité partagée par le Mouvement des non alignés, le G21 et la grande majorité des membres de la Conférence dans tous les groupes régionaux.

Son pays est préoccupé par les arguments avancés par certains États nucléaires, y compris dans cette enceinte, semblant chercher à rationaliser la poursuite de la détention de ces armes, quand ce n'est pas l'utilisation d'instruments «qui ne font pas dans le détail». Depuis qu'elle s'est jointe à la Conférence, l'Afrique du Sud s'est constamment opposée aux attitudes maximalistes, a encore affirmé M. Matjila, citant un certain nombre d'initiatives dont son pays est à l'origine au sein de la Conférence.

M. DIAN TRIANSSYAH DJANI (Indonésie) a rappelé l'engagement de son pays en faveur du désarmement nucléaire, qualifiant de malheureuse l'impasse dans laquelle se trouve la Conférence. Il a rappelé que dès 1946 une Résolution de l'Assemblée générale avait appelé à la dénucléarisation et ce en vain depuis plus de soixante ans. Après avoir évoqué des initiatives plus récentes, le représentant a demandé, au nom de son pays, que des actes concrets donnent de la substance aux intentions affichées. Il a ainsi rappelé qu'avait été envisagée dans la période récente la création d'un organe subsidiaire à la Conférence qui serait chargé précisément du désarmement nucléaire. L'Indonésie appelle de ces vœux des avancées en ce sens.

M. MOHAMED HATEM EL-ATAWY (Égypte) a déclaré que son pays appartient à la Coalition pour un nouveau programme d'action, dont l'ambition est l'élimination totale des armes nucléaires. La Coalition a joué un rôle important dans l'adoption des Treize étapes en 2000 et des Plans d'action en 2010. Elle appelle à la création, au sein de la Conférence du désarmement, d'un organe subsidiaire chargé du désarmement nucléaire dans le contexte d'un programme de travail équilibré et complet. Le représentant a rappelé que la Conférence d'examen en 2010 fait part de sa vive préoccupation concernant les conséquences catastrophiques du point de vue humanitaire qu'aurait l'utilisation d'armes nucléaires. C'est dans ce contexte que l'Inde envisage l'adoption d'une convention contre les armes nucléaires qui interdirait complètement la production, la production et le transfert ou l'utilisation de telles armes. L'adoption d'un tel instrument est particulièrement importante dans les régions soumises à de fortes tensions, comme l'est le proche orient. C'est pourquoi l'organisation s'impose d'une conférence en vue de la dénucléarisation de la région, a conclu le représentant.

M. JUAN ANTONIO QUINTANILLA ROMAN (Cuba) a rappelé que le chef de la Révolution cubaine, Fidel Castro, avait mis en garde contre le danger représenté par les armes nucléaires. Leur utilisation constituerait une violation du droit international en matière de prévention du génocide. Il y a un fossé entre la rhétorique et les intentions, a ajouté le Représentant, en mentionnant le constat fait par la Conférence d'examen. Si l'opposition tenace de certains États nucléaires a empêché tout progrès substantiel, il devrait être possible toutefois de s'appuyer sur les avancées modestes faites à la Conférence d'examen. Les ressources énormes consacrées au maintien des arsenaux nucléaires devraient plutôt être utilisées à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Cuba est fermement engagé en faveur du désarmement nucléaire, a-t-il conclu.

M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a constaté que la présente session débutait par un débat animé, se félicitant de l'avancée représentée par le nouveau traité START. En outre, la Conférence d'examen du TNP a été un succès, alors que pour la première fois on parle d'un monde débarrassé des armements nucléaires, ce dont l'Autriche se félicite. Toute nouvelle décision politique, y compris relevant de la modernisation des arsenaux, devrait tenir compte de cette volonté affichée. On ne peut cependant progresser en ce sens sans engagement des États nucléaires, ce qui suppose qu'ils avancent sérieusement dans des discussions sur des points aussi substantiels que la réduction des risques, a-t-il observé. «On sait ce que la Conférence devrait faire mais va-t-elle le faire ?», s'est interrogé le représentant, mettant en garde contre le risque que cette enceinte ne devienne caduque, comme le pensent déjà nombre d'observateurs. Faudra-t-il attendre un accident nucléaire ou l'apparition de nouvelles armes pour relancer les discussions ? Le monde change autour de nous, l'environnement sécuritaire a évolué lui aussi et il n'y a que deux options à long terme : s'adapter ou périr, a dit M. Marschik (citant Darwin). L'Autriche compte pour sa part apporter sa pierre à l'édifice : elle est à l'initiative de la création d'un Centre du désarmement et de la non-prolifération qui doit ouvrir prochainement à Vienne, a indiqué le représentant.

M. MINELIK ALEMU GETAHUN (Éthiopie), qui vient de prendre ses fonctions à Genève, a indiqué combien il se réjouissait de participer pour la première fois aux débats de la Conférence du désarmement.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

DC11/005F