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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES EXAMINE LE RAPPORT D'ISRAËL

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné aujourd'hui les quatrième et cinquième rapports périodiques présentés par Israël sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant le rapport, M. Aharon Leshno Yaar, Représentant permanent d'Israël auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé qu'Israël, seule démocratie du Moyen Orient, est confrontée à des menaces graves pour sa sécurité. En dépit des menaces qui le guettent, Israël a réalisé beaucoup de progrès, en particulier s'agissant de la situation des femmes. Une législation complète a été promulguée concernant l'intégration de la perspective sexospécifique, la répartition des fonctions familiales, le statut personnel ou encore l'égalité devant l'emploi et la lutte contre la violence domestique. Mme Shavit Matias, Directrice des affaires internationales au Ministère de la justice d'Israël, a pour sa part insisté sur l'importance que la société israélienne accorde à la promotion des droits de la femme depuis la fondation de l'État d'Israël. Elle a en outre souligné le rôle important joué par la Cour suprême et la magistrature dans la défense des droits fondamentaux des femmes, comme en témoigne l'inculpation et la condamnation de l'ancien Président de la République pour viol et agressions sexuelles. Mme Matias a aussi fait état de progrès de la forte progression du nombre des femmes juges, qui représentent désormais 51% des magistrats.

La délégation israélienne était également composée de représentants des Ministères des affaires étrangères, de la justice, de la santé, des affaires sociales et de l'éducation. Les services du Premier Ministre ainsi que les Forces de défense israéliennes étaient aussi représentés dans la délégation. Elle a répondu aux nombreuses questions du Comité relatives aux conditions d'application des dispositions de la Convention dans les territoires palestiniens occupés, à la lutte contre les violences commises contre les femmes – israéliennes comme palestiniennes –, à la création d'une institution nationale de droits de l'homme conforme aux Principes de Paris, ou encore à la place des tribunaux rabbiniques dans le dispositif matrimonial israélien.

En conclusion, la Présidente du Comité, Mme Silvia Pimentel, a félicité la délégation des initiatives prises par Israël en vue d'une l'application plus efficace des dispositions de la Convention. Le pourcentage des femmes dans l'administration publique et judiciaire en Israël est remarquable. Cependant, le Comité encourage les autorités à prendre des mesures exceptionnelles pour répondre à ses préoccupations. Le Comité note avec une certaine préoccupation en effet qu'il n'existe pas, en Israël, de loi générale interdisant la discrimination contre les femmes, notamment dans le domaine familial. Le Comité se déclare enfin préoccupé par le traitement des femmes appartenant à des minorités et la protection semble-t-il inexistante des femmes victimes de violence domestique.

Le Comité adoptera en séance privée ses observations finales sur les rapports de tous les pays examinés et les rendra publiques ultérieurement.


Demain matin, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport périodique du Kenya (CEDAW/C/KEN/7).

Présentation du rapport

M. AHARON LESHNO YAAR, Représentant permanent d'Israël auprès des Nations Unies à Genève, a présenté les quatrième et cinquième rapports périodiques de son pays en rappelant qu'Israël, seule démocratie du Moyen Orient, était confronté à des menaces graves pour sa sécurité, tandis que la situation humanitaire du soldat Gilad Shalit, enlevé le 25 juin 2006 par le Hamas, reste préoccupante. En dépit des menaces qui le guettent, Israël a réalisé d'importants progrès, en particulier s'agissant de la situation des femmes. L'État d'Israël est engagé à l'ancrage dans les textes juridiques de l'égalité des femmes, la Cour suprême et le Ministère de la justice ayant statué qu'une bonne représentation est une représentation égale. Les principales réussites dans le domaine des droits des femmes sont à trouver dans la législation nationale et dans les mécanismes adoptés dans un certain nombre de domaines. De même, une législation complète a été promulguée concernant l'intégration de la perspective sexospécifique, la répartition des fonctions familiales, le statut personnel ou encore l'égalité devant l'emploi et la lutte contre la violence domestique, parallèlement à l'adoption de mécanismes visant à éliminer les stéréotypes sexistes.

MME SHAVIT MATIAS, Directrice des affaires internationales au Ministère de la justice d'Israël, a pour sa part fait savoir que les rapports de son pays ont été préparés avec la contribution d'organisations non gouvernementales. La promotion de l'égalité entre les sexes et la promotion des droits des femmes ont toujours figuré en bonne place dans les programmes des gouvernements qui se sont succédé depuis la création de l'État en 1948, l'égalité étant un principe fondamental inscrit dans la Déclaration d'indépendance nationale. Outre la volonté des autorités, Israël peut compter sur l'action de très nombreuses organisations de défense des droits de la femme, ainsi que sur la réactivité des membres du Parlement et de la société civile. La ratification par Israël de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est un élément complémentaire et particulièrement important des initiatives adoptées par l'État d'Israël. Mme Matias a rappelé la complexité et la volatilité de la situation israélo-palestinienne, marquée par la violence et le terrorisme. Le territoire de Gaza, tombé aux mains du Hamas, a adopté des dispositions plus répressives envers les femmes. Par contre, en Cisjordanie, la construction des institutions palestiniennes sous l'égide de l'Autorité palestinienne semble prendre un chemin différent, celui de la modernisation, de la transparence et du respect des droits de la population. Les femmes et les filles, les mères palestiniennes et israéliennes ont toutes le droit de mener des existences paisibles et sûres. Les bombardements depuis Gaza sur des écoles et des jardins d'enfants en Israël menacent cette sécurité, les problèmes de sécurité, les points de contrôle et autres obstacles sur le territoire palestinien causent des souffrances des deux côtés, a déploré Mme Matias, estimant que ces problèmes doivent être résolus par la négociation.

Mme Matias a déclaré que si les femmes participent autant que les hommes dans la vie sociale et politique israélienne, des progrès restent à accomplir pour concrétiser pleinement le principe de l'égalité des droits entre les sexes. Les nombreuses initiatives juridiques, législatives et exécutives, depuis la fondation d'Israël, témoignent de l'importance que la société israélienne accorde à la promotion des droits de la femme. Dans le domaine législatif, les lois israéliennes récentes reflètent la volonté de faire respecter les droits fondamentaux de toutes les personnes vivant sur le territoire national. Ainsi, la loi de 2006 sur la protection du public contre les violences sexuelles vise la prévention de ces crimes, alors que la loi sur l'intégration des femmes dans la vie professionnelle de 2008 vise à encourager les employeurs à engager des femmes. Le Gouvernement a par ailleurs publié plusieurs décrets imposant, par exemple, la présence paritaire de femmes dans les commissions publiques et autres instances nationales, y compris celles chargées des négociations de paix. Au plan juridique, Mme Matias a évoqué le rôle important de la Cour suprême et de la magistrature dans la défense des droits fondamentaux des femmes, comme en témoigne l'inculpation et la condamnation de l'ancien Président de la République pour viol et agressions sexuelles. La Cour suprême, qui joue un rôle central dans la protection des droits de l'homme, est saisie chaque année de près de 2300 pétitions, dont une partie relève du respect des droits des femmes. Les autorités exécutives ont lancé, quant à elles, plusieurs plans nationaux destinés, entre autres, à faciliter l'intégration des mères de famille au marché du travail. Mme Matias a aussi fait état d'une forte progression du nombre des femmes juges, qui représentent désormais 51 % des magistrats; de même, la fonction publique est à 65 % féminine, 46 % des postes supérieurs étant occupés par des femmes.

Le quatrième rapport périodique d'Israël (CEDAW/C/ISR/4) fournit en particulier des informations sur les mécanismes de discrimination positive en faveur des femmes. Dans la fonction publique, l'adjonction de l'Article 15 A à la loi relative à la fonction publique a accru la représentation des femmes aux échelons supérieurs de la hiérarchie dans la fonction publique, même s'il y a encore place à des améliorations. Dans les entreprises d'État, en 2005, les femmes entrent pour 37 % dans les conseils d'administration. Depuis le dernier rapport, plus d'un tiers des nouveaux membres des conseils d'administration des entreprises d'État sont des femmes (203 femmes pour 558 nominations). Il y a actuellement 5 femmes (11,36 %) à la tête d'un conseil d'administration et 9 (11,84 %) sont PDG d'entreprises d'État. Dans d'autres domaines, la législation actuelle consacre un principe global qui est à la base du droit israélien, celui de la légitimité de la discrimination positive comme partie intégrante du principe d'égalité.

Depuis la présentation du dernier rapport, deux amendements à la loi relative à la prévention du harcèlement sexuel en ont élargi le champ d'application. Le premier étend son application aux membres du Service national et le second aux élèves de douzième, treizième et quatorzième années ainsi qu'aux élèves ou étudiants qui assistent à des cours d'éducation pour adultes. Il ressort des données que, depuis le dernier rapport, 188 enquêtes ont été ouvertes par la police pour plaintes de harcèlement sexuel; 141 affaires ont été classées pour manque de preuves et d'intérêt public ainsi que pour absence de tout méfait ou ignorance de l'identité du délinquant. En 2002 ont été promulguées, en vue d'assurer une pleine application de la loi, les dispositions réglementaires relatives aux droits des victimes d'infractions. Elles énumèrent les endroits où doivent être placées les brochures d'information – en hébreu, en arabe, en russe, en amharique, en anglais et en braille. La Police a désigné six agents régionaux chargés des contacts avec les victimes d'infractions dans chaque région; ils y supervisent l'application de la loi et des dispositions réglementaires et organisent des stages. La loi relative à la prévention du harcèlement agressif, promulguée en 2001, a pour but de protéger une personne de toute atteinte à sa tranquillité, à son intimité, à sa liberté ou à son corps de la part d'une autre personne qui cherche à lui nuire mentalement ou physiquement. Le tribunal peut prononcer une injonction de protection contre une personne qui agit ainsi ou imposer d'autres restrictions à sa liberté. Il ressort des statistiques actuelles que, depuis 2002, les tribunaux ont été saisis de 2946 demandes d'ordonnance de restriction de liberté en vertu de cette loi, nombre qui n'a cessé d'augmenter année après année.

Le cinquième rapport périodique d'Israël (CEDAW/C/ISR/5) indique en particulier qu'en août 2006, le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre deux plans pluriannuels supplémentaires visant à promouvoir la condition des femmes arabes. Il a adopté la Résolution no 412 pour le développement des secteurs druze et circassien et approuvé pour sa mise en œuvre des crédits (plus de 111 millions de dollars) pour la période 2006 2009, et la Résolution no 413 pour le développement de la population bédouine dans le Nord pour la période 2006 2009 (79 millions de dollars). Les ministères concernés, des représentants de la population arabe, dont les chefs des municipalités druzes, circassiennes et bédouines ont participé à l'élaboration des plans qui a exigé plusieurs mois. Les activités définies dans les Résolutions no 412 et 413 du Gouvernement visent notamment à encourager les femmes à acquérir une instruction et suivre une formation professionnelle en leur proposant des bourses d'études spéciales et des séminaires d'un jour abordant différentes questions liées à la promotion de la condition de la femme telles que la sensibilisation à cette dernière. D'autres activités portaient sur l'autonomisation des femmes et leur initiation aux affaires. En 2007, 75 bourses d'études ont été octroyées à des étudiantes arabes et en juillet 2008, le processus d'attribution des bourses commençait pour la seconde année consécutive.
Les investissements massifs dans l'éducation permettront d'accroître le nombre des personnes instruites qui iront dans les universités et feront des études supérieures, et auront ensuite un rôle de «locomotive» pour le reste de la société. En outre, la Résolution gouvernementale no 881, adoptée en septembre 2003, a initié un plan pluriannuel pour la période 2004-2008, qui inclut un programme spécial consacré à la promotion de la condition de la femme dans les localités bédouines du Néguev (au Sud d'Israël). Le programme, qui prévoit des formations dans les domaines tels que l'autorité parentale, les premiers secours et la prévention des accidents domestiques, est déjà mis en œuvre en coopération avec le Ministère des affaires sociales et des services sociaux. En outre, un programme prévoit des stages de formation consacrés à l'emploi des femmes bédouines, à la santé des femmes ou à leur autonomisation ainsi que des activités de prévention de la violence domestique. Le rapport fournit également des renseignements sur les mesures prises par les autorités israéliennes contre la violence domestique, indiquant à ce propose que, récemment, le tribunal de district de Tel Aviv a prononcé une condamnation à 16 ans d'emprisonnement assortie de deux ans avec sursis et ordonné le versement d'indemnités. De plus, les données récentes de la police laissent entrevoir une diminution importante du nombre de meurtres dits «au nom de l'honneur de la famille» ces dernières années au sein de la population arabe.

S'agissant de la lutte contre l'exploitation des femmes, les dernières années ont montré une forte diminution du nombre de femmes victimes de la traite, amenées en Israël à des fins de prostitution, indique le rapport. Ce déclin ressort clairement du nombre de victimes de la traite identifiées par les services de répression, ainsi que des rapports publiés par la sous commission de la Knesset sur la traite des femmes et les organisations non gouvernementales. Seules douze personnes, pour la plupart victimes de la traite à des fins de prostitution il y a plusieurs années, ont été transférées en 2008 par la police au refuge des victimes de la traite. En 2008, seuls quelques rares cas de traite à des fins de prostitution ont été soumis au Cabinet du Procureur de l'État, signe manifeste du succès des efforts intenses des services de répression et de la sévérité des peines prononcées par les tribunaux.

Examen du rapport

Questions des membres du Comité

Les experts du Comité ont observé que la juridiction d'Israël, et donc ses obligations au regard de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, entre autres instruments internationaux, s'applique aussi au territoire palestinien occupé, de même qu'à toutes les personnes, y compris les réfugiés et apatrides, se trouvant sur son territoire. Cette position est celle des organes conventionnels et des Nations Unies en général, a-t-il été rappelé. Des experts ont aussi relevé qu'Israël n'a pas adopté de législation complète interdisant explicitement la discrimination fondée sur le sexe; ils ont estimé qu'il n'est pas possible d'attendre, pour ce faire, l'adoption éventuelle d'une Constitution.

Des experts ont voulu savoir dans quelle mesure la Convention est utilisée et invoquée devant les tribunaux, et si les magistrats reçoivent une formation spécifique à l'application de cet instrument. Le fait qu'Israël maintient des réserves sur les articles 7 et 2 de la Convention a été relevé, une experte regrettant que le Gouvernement ne semble prendre aucune mesure en vue de la levée de ces réserves. Une experte a relevé qu'Israël, État avancé et riche, doit, vingt ans après la ratification d'un instrument international, être en mesure de l'appliquer sans réserve.

Une experte a observé que la réserve émise par Israël à l'article 16 de la Convention («Les États parties prennent toutes les mesures nécessaires pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans toutes les questions découlant du mariage et dans les rapports familiaux») est contraire à son objet et à son contenu: Israël envisage-t-il d'interdire formellement la discrimination dans sa législation?

Des précisions ont été demandées sur les mesures spéciales ou temporaires adoptées en faveur des femmes arabes vivant en Israël, dans les domaines de l'emploi, de l'éducation et des droits fonciers. Une experte a demandé des renseignements sur les conditions de détention en Israël de femmes palestiniennes qui ont combattu pour l'indépendance de la Palestine. Une autre a relevé que seuls des hommes siègent dans les tribunaux religieux, dont certains arrêts sont discriminatoires à l'égard des femmes, s'agissant notamment du mariage et du divorce. Une experte a demandé quelles étaient les voies de recours juridiques ouvertes aux femmes palestiniennes vivant en Israël, notamment celles dont les maisons ont été démolies. Une question a porté sur le niveau de participation féminine aux négociations de paix.

D'autres questions ont porté sur les attributions de la Commission chargée de recevoir les plaintes des femmes victimes de discrimination et sur les modalités de fonctionnement – y compris au plan budgétaire – des institutions spécialisées créées pour donner effet aux dispositions de la Convention en matière de plein développement et de progrès des femmes. De même, un expert a demandé quel organe national était chargé de la coordination de toutes les politiques issues de l'obligation d'appliquer la Convention, en particulier dans le cadre de l'administration décentralisée. Des experts ont demandé quelle coopération les autorités entretiennent avec les organisations de la société civile, et notamment avec les organisations de femmes.

Une experte a demandé si des discussions ont eu lieu avec les autorités palestiniennes au sujet des conditions d'application du droit humanitaire, indépendamment de la position officielle d'Israël au sujet de l'application de la Convention. L'experte a demandé si la création d'une institution nationale de droits de l'homme était à l'ordre du jour en Israël. Elle a aussi voulu savoir si les activités des tribunaux religieux font l'objet d'un débat au sein de la société israélienne.

Une experte s'est inquiétée des violences commises contre les femmes palestiniennes en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, en particulier des allégations de torture et de mauvais traitements sur des femmes palestiniennes détenues. D'autres questions se posent quant au harcèlement moral des filles et des femmes en déplacement pour leurs études ou leur travail aux points de contrôle israéliens. Une autre forme de violence, plus directe, est celle des colons, coupables d'abus verbaux et physiques envers notamment des femmes palestiniennes: quelles mesures de protection spécifiques sont-elles prises par les autorités?

Des expertes ont fait état de l'existence d'une traite d'êtres humains entre Israël et les territoires palestiniens occupés, un problème qui appelle sans doute la création d'un véritable réseau de lutte. Des mesures spéciales devraient en outre protéger les migrantes illégales qui traversent, dans des conditions de grande vulnérabilité, le désert du Néguev pour entrer en Israël; et qui, une fois entrée, risquent d'être victimes d'exploitation par des employeurs sans scrupule. Dans d'autres questions, les experts ont demandé à la délégation d'indiquer de quelle manière son gouvernement s'emploie à éliminer les préjugés et stéréotypes sexistes.

Une experte a voulu savoir pour quelle raison Israël n'applique pas de quota de représentation féminine au Parlement national. Une autre experte a observé que les femmes employées au Gouvernement occupent rarement des postes à responsabilité. Elle a demandé de quel mécanisme de plainte ces femmes disposent pour faire valoir leur droit à l'égalité de traitement avec les hommes. En outre, si toutes les femmes font leur service militaire, on constate cependant que leur présence est très minoritaire dans le corps des officiers. Une experte a salué la forte représentation des femmes dans la justice israélienne. La même experte a voulu savoir si la réserve portée par Israël à l'article 7b de la Convention, réserve justifiant le maintien de tribunaux religieux exclusivement masculins, constitue une dérogation admissible au principe d'égalité qui sous-tend le système juridique israélien.

Une experte a relevé que si les tribunaux rabbiniques ont compétence exclusive en matière de mariage et de divorce, d'autres aspects – garde des enfants par exemple – sont régis par des tribunaux mixtes, ce qui ne manque pas de susciter des problèmes d'interprétation. L'experte a voulu savoir dans quelle mesure le rôle des tribunaux religieux est appelé à être diminué. Le Gouvernement envisage-t-il de promulguer un régime civil de mariage? La même experte a demandé si les autorités ont pris des mesures pour élever l'âge légal du mariage à 18 ans. Une autre experte a demandé si l'annulation rétroactive de certains divorces par des tribunaux rabbiniques, signalée par certains rapports parvenus au Comité, est un fait et, le cas échéant, quelles conséquences cette pratique a eu en termes de respect du principe d'égalité entre les sexes. On s'explique mal, au demeurant, que la seule source de droit matrimonial, dans un État qui s'efforce par ailleurs d'appliquer la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, soit composée exclusivement d'hommes. Une troisième experte a souligné que le statut personnel et les conditions du mariage constituent l'ossature d'une société. Les discriminations à cet égard, qui sont particulièrement graves, notamment dans le domaine du divorce, au détriment des femmes, appellent la question de savoir comment Israël entend mettre un terme à des pratiques qui ne sont manifestement pas en phase avec la modernité.

Dans d'autres questions, des membres du Comité ont demandé des précisions sur les conditions de retrait du statut de résident permanent à Jérusalem-Est, ainsi que sur les informations indiquant que les femmes migrantes ayant un enfant sont contraintes de faire partir cet enfant du territoire, au risque de perdre leur propre statut, une situation qui serait manifestement contraire à la Convention. Une experte a déploré l'existence d'un véritable camp de concentration à Gaza et demandé, au nom des orphelins et des veuves de cette ville, la fin des souffrances du peuple palestinien anéanti.

Abordant les dispositions de la Convention relatives à l'éducation, une experte a relevé que 9,2 % des femmes arabes en Israël n'ont jamais été scolarisées, contre seulement 0,2 % des femmes juives. Elle a observé en outre qu'aucune statistique officielle à ce sujet n'est disponible s'agissant de la situation dans le territoire palestinien occupé. Or, des sources indiquent que la scolarisation des filles dans cette région est impossible du fait de l'absence d'écoles. Dans ces conditions, quelles mesures Israël entend-il prendre pour améliorer l'accès à l'école? Et avec quelle priorité le gouvernement veille-t-il à éradiquer le contenu discriminatoire des manuels scolaires officiels?

Un expert du Comité a relevé d'autre part l'existence de lacunes dans le domaine de l'égalité des salaires entre hommes et femmes. On constate, en outre, que les femmes sont surreprésentées dans le travail à temps partiel. De plus, si une femme au bénéfice d'une autorisation de travail temporaire tombe enceinte, ou simplement se marie, elle peut être tenue de retourner dans son pays, a rappelé un expert. La même exigence s'applique-t-elle aux hommes qui ont des enfants ou se marient?

D'autres questions ont porté sur la manière de garantir que les femmes palestiniennes enceintes ont bien accès aux soins nécessaires malgré les points de contrôle; sur les statistiques de santé et de violence relatives aux femmes en Israël et dans le territoire palestinien occupé; ou encore sur l'accès aux contraceptifs et leur taux utilisation; et sur la prévalence du VIH chez certaines catégories d'immigrants.

S'agissant de l'égalité dans le monde du travail, des experts ont posé des questions sur l'accès des femmes, palestiniennes et juives, aux microcrédits; et sur l'impact des politiques israéliennes d'imposition de visa sur les femmes rurales devant exploiter des champs situés près du mur de séparation ou de colonies.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que la Convention est appliquée à l'échelle de l'État d'Israël. Les instruments internationaux s'appliquent par le biais d'une loi nationale. Le statut du droit international est équivalent aux lois israéliennes. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes est appliquée par le biais de décisions de justice, de règlements et de lois. Les tribunaux sont tenus d'interpréter les textes juridiques nationaux au regard des dispositions de traités internationaux ratifiés par Israël. S'agissant des réserves émises par Israël s'agissant de certaines dispositions de la Convention, elles s'expliquent par l'autonomie des religions en ce qui concerne certaines pratiques. Israël n'a pas l'intention de ratifier le Protocole facultatif, a par ailleurs précisé la délégation.

L'application de la Convention aux territoires palestiniens fait l'objet de débats depuis plusieurs années. Ces débats s'inscrivent dans une discussion plus large sur droit de la guerre et les droits de l'homme. De l'avis des autorités israéliennes, les droits de l'homme et le droit de la guerre coexistent dans des sphères distinctes. La Convention, qui est liée à un territoire, ne peut s'appliquer à des zones situées en-dehors de ce territoire. De plus, la bande de Gaza étant contrôlée et régie par le Hamas, Israël ne saurait y exercer son autorité. La délégation a assuré qu'Israël est résolu à appliquer sans réserve le droit humanitaire, y compris dans les territoires occupés. Des comités conjoints ont été mis sur pied avec les Palestiniens pour traiter des plaintes à cet égard. Certes, des erreurs ont été commises, dont les autorités s'efforcent de corriger les causes.

Le Ministère de la justice organise des formations de sensibilisation destinées aux juristes et fonctionnaires en général, portant sur des sujets tels que: interdiction du harcèlement sexuel au travail, prise en charge des victimes de violences sexuelles, sensibilisation à la parité dans la sphère publique, obligations internationales d'Israël en matière de droits de l'homme, entre autres.

Le système juridique israélien est axé sur le principe d'égalité et sur l'interdiction de toute forme de discrimination, y compris fondée sur le sexe. La Cour suprême, par sa jurisprudence, joue un rôle déterminant dans la promotion de ce principe. La loi sur la parité prévoit la présence égale des femmes dans les commissions, groupes et comités émanant du Gouvernement, y compris ses équipes de négociation de la paix, a-t-il été précisé en réponse à une question des experts. La Knesset peut être saisie des manquements à ce principe. Le Gouvernement a mis sur pied des programmes de renforcement des compétences des femmes concernées. Il a été demandé que les commissions d'enquête du Gouvernement (par exemple la commission chargée d'enquêter sur «l'affaire de la flottille») contiennent désormais une proportion minimale de femmes.

L'aménagement du territoire en Cisjordanie dépend de l'administration militaire. La démolition de bâtiments construits illégalement est une opération légale, qui s'accompagne de garanties juridiques, en particulier pour ce qui est des recours devant les juridictions supérieures. Des exigences de sécurité, en particulier la protection contre les attaques suicides, motivent la destruction de certains biens immobiliers, une cible considérée comme légitime dans ce contexte précis. Les forces de sécurité israéliennes font toujours leur possible pour éviter que leurs mesures ne causent de dommages inutiles aux populations civiles qui ne sont pas responsables d'actes terroristes.

La délégation a indiqué que le service d'inspection des prisons (IPS) veille au respect des droits des personnes détenues pour des motifs de sécurité: hygiène, alimentation, soins médicaux (y compris accès à des spécialistes), contact avec les familles, accès à un conseil juridique, visites du Comité international de la Croix-Rouge. Toute plainte est immédiatement portée à la connaissance des autorités.

La délégation a assuré que les grandes organisations non gouvernementales israéliennes participent à la rédaction du rapport israélien présenté au Comité par le biais de consultations notamment. Le cinquième rapport périodique, par exemple, a bénéficié de l'apport de vingt-cinq organisations, dont plusieurs du réseau d'Amnesty International et des groupes locaux de femmes. Le rapport définitif a été soumis à de nombreux hauts responsables sont le Ministre de la justice.

Les tribunaux religieux n'ont de compétences que dans les domaines prévus par la loi, a-t-il été précisé. La législation nationale régit seule certains aspects importants tels que la grossesse. Les femmes ont toujours le droit de faire recours contre des décisions rendues par des tribunaux religieux. D'autre part, la délégation a fait état d'une forte augmentation du nombre des femmes membres de conseils municipaux, précisant que des formations à l'administration publique sont organisées à leur intention.

Il y a quinze ans, Israël ouvrait le premier foyer d'accueil pour femmes victimes de violence au Moyen Orient. En 2009, 907 demandes ont été déposées pour une place dans un des treize centres aujourd'hui opérationnels. Trois foyers accueillent en particulier des femmes arabes. Le Ministère des affaires sociales assure une aide financière à ces femmes qui souhaitent refaire leur vie. Des formations leur sont offertes, notamment d'hygiéniste dentaire ou encore d'esthéticienne. Toute femme dont on considère qu'elle est en situation de grand danger est accueillie dans un foyer. Les autorités ont créé des lignes téléphoniques qui ont reçu 235 000 appels en 2008, dont plus de 40 000 portaient sur des violences domestiques. En outre, neuf centres spécialisés prodiguent conseils et assistance aux femmes et filles victimes de violence sexuelle; deux centres accueillent plus particulièrement les femmes arabes. La délégation a par ailleurs indiqué que le viol conjugal est régi par le Code pénal, qui prévoit des peines jusqu'à seize ans de prison.
En mars 2008, un nouveau site Internet recense les actions et organisations actives en Israël autour de la condition de la femme. L'Autorité pour la promotion de la femme a réalisé un grand sondage pour mesurer la sensibilisation du public, israélien et arabe, au problème de la violence contre les femmes. Une majorité des personnes interrogées se disent conscientes du problème et de l'existence de moyens concrets d'y remédier.

La violence commise par des colons est surveillée par une équipe mixte composée de représentants de l'armée, de la police et des autorités civiles. De manière générale, les deux parties au conflit ne collaborent pas volontiers avec la police. Cette dernière assure le transport des plaignants palestiniens devant les tribunaux. En 2008, 109 enquêtes ont été ouvertes contre des colons pour actes de violence et plus de trente condamnations ont été prononcées.

Les forces armées ont créé un programme de formation pour les soldats servant aux points de contrôle. La formation vise le respect de la dignité et des droits fondamentaux des Palestiniens et des Palestiniennes. La police militaire engage des femmes-soldats aux points de passage, afin de faciliter le transit des femmes palestiniennes. Le nouveau Bureau du défenseur militaire des activités opérationnelles est chargé de traiter des délits commis par des soldats israéliens aux points de passage. Le Bureau est habilité à diligenter des enquêtes.

L'État d'Israël traite les requérants d'asile conformément aux traités internationaux pertinents ratifiés par Israël. Des inspecteurs sont chargés de contrôler les conditions de vie des requérants hébergés dans les centres de réception. Les requérants ont la possibilité de déposer plainte s'ils ont été victimes d'abus.

Répondant à d'autres questions du Comité, la délégation a fait savoir que plusieurs fonctionnaires sont spécifiquement chargés de traiter des questions liées à la communauté arabe (mais pas uniquement). Le budget consacré à cette activité s'élève à plus de 900 000 dollars en 2011, soit deux fois plus qu'en 2010. En 2009, les femmes arabes représentaient 6,97 % de l'augmentation des effectifs de la fonction publique. Le nombre des femmes arabes a augmenté, en 2009, de 29 % par rapport à 2007 (1595 femmes arabes fonctionnaires). Des fonds ont aussi été dégagés pour la promotion de la femme arabe au sein de sa communauté. Il a en outre été précisé qu'Israël dispose d'une législation avancée en matière de promotion des droits de la femme et pour garantir la parité entre les sexes. En 2005, le Gouvernement a adopté l'amendement n°4 concernant l'égalité de représentation des femmes dans les organes chargés d'élaborer les lois nationales.

Plusieurs mécanismes permettent d'assurer que les plaintes de personnes détenues (israéliennes et palestiniennes) sont dûment examinées. Le Gouvernement rejette les allégations de torture dans les prisons; la torture est interdite et réprimée par la loi. Aucune femme mineure n'est actuellement détenue en Israël. Les femmes bénéficient d'un droit visite de leur famille. Les services pénitentiaires emploient 95 % de femmes, a-t-on indiqué.

Enfin, les autorités n'ont pas été avisées de cas de traite d'êtres humains entre Israël et les territoires palestiniens occupés. Le cas échéant, elles prendraient toutes les mesures répressives appropriées, a assuré la délégation. Le Ministère des affaires étrangères est par ailleurs chargé de consulter les organisations internationales pour toutes les questions relatives aux dangers qui guettent les migrants, et les migrantes en particulier, s'agissant de la traite à des fins de prostitution ou de travail forcé.

Répondant à une nouvelle série de questions, la délégation a indiqué que la réserve à l'article 7 de la Convention est en discussion. Les compétences des tribunaux religieux font aussi l'objet d'évaluations. En l'état, ces tribunaux régissent les mariages de toutes les personnes (sauf des personnes sans religion). Si les deux parties contractantes le souhaitent, certains aspects du mariage (transmission du nom par exemple) ressortissent des tribunaux civils. D'une manière générale, la loi interdit d'imposer le divorce à un conjoint en l'absence d'une décision d'un tribunal civil. Le partage des biens entre ex-époux se fait conformément à la loi civile que les tribunaux rabbiniques doivent appliquer. Les couples mariés sous l'ancien régime matrimonial bénéficient de la même garantie. Dans certains cas précis, la jurisprudence peut obliger l'un des conjoints à renoncer à ses droits aux acquêts.

Les travailleurs étrangers qui arrivent en Israël munis d'un permis de travail temporaire n'ont pas le droit de demander un titre de séjour permanent et n'ont pas le droit de venir avec leur famille. Cependant, en cas grossesse ou de maladie, ces personnes sont couvertes par les assurances sociales et médicales. Une femme au bénéfice d'un contrat de travail temporaire ayant accouché, et pris le congé-maternité qui lui est dû, est tenue de retourner dans son pays et de refaire une demande de permis de travail.

Depuis quelques années, on constate une augmentation du personnel arabe au sein du Ministère de la justice, a fait savoir la délégation. On compte au total 28 % de fonctionnaires arabes au Ministère de la justice. Sur 381 juges, dix sont musulmans et cinq druzes. On compte en outre un juge chrétien parmi les juges du travail. Israël compte en tout 23 juges arabes.

La délégation a précisé que tous les enfants en Israël, y compris les enfants de résidents illégaux, sont astreints à la scolarité obligatoire et gratuite. Le Ministère de l'éducation a pour instruction de donner la préférence à une femme qui serait en dernière phase de sélection pour un poste. Il existe encore beaucoup à faire pour purger les livres scolaires des stéréotypes sexistes ou autres, une personne étant chargée de cette mission à plein temps. Cent trente manuels en hébreu, en arabe et en anglais ont été ainsi examinés au cours de l'année écoulée. La lutte contre les stéréotypes passe aussi par la formation et la sensibilisation des enseignants à tous les niveaux, de la maternelle à l'enseignement supérieur.

Le taux d'analphabétisme diminue avec l'âge des femmes, a observé la délégation, toutes les jeunes filles de moins de dix-huit ans étant aujourd'hui scolarisées. L'État a pris de nombreuses mesures propres à favoriser la scolarité. Les salles de classe sont désormais toutes équipées d'ordinateurs. Un programme de formation professionnelle a été créé au profit des filles de Jérusalem-Est, de même que des ateliers d'autonomisation des femmes. Les enfants arabes surdoués sont pris en charge dans des classes spéciales.

S'agissant des questions de santé, la délégation a indiqué que l'espérance de vie chez les femmes arabes est de 80 ans chez les femmes arabes et 83 ans environ chez les femmes juives, un écart que les autorités espèrent combler rapidement, a précisé la délégation. Répondant à d'autres questions, elle a précisé que le taux de fertilité des Bédouines, s'il a diminué, se situe néanmoins au double de la moyenne nationale. Les autorités ont pris des mesures positives en leur faveur, notamment en les encourageant à suivre des études de médecine. D'autre part, il est difficile d'amener les femmes bédouines à avoir recours aux excellents services médicaux à leur disposition. La délégation a précisé que le recours à l'avortement est garanti par la loi, en dépit des prises de position religieuses. D'une manière générale, Israël compte redoubler d'efforts pour garantir l'accès de tous aux services de santé.

La délégation a enfin indiqué que le site Web du Ministère des affaires étrangères contenait de très nombreuses statistiques qui intéresseront les membres du Comité.

Conclusion

MME SHAVIT MATIAS, Directrice des affaires internationales au Ministère de la justice d'Israël, a conclu la présentation des rapports de son pays en soulignant que si des points de divergence subsistent, les autorités israéliennes tireront profit des nombreuses observations et recommandations des membres du Comité.

MME SILVIA PIMENTEL, Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a félicité la délégation des initiatives de son pays en vue de l'application plus efficace des dispositions de la Convention, notamment la promulgation de la loi de 2007 sur les implications de la parité entre les sexes. Le pourcentage des femmes dans l'administration publique et judiciaire en Israël est remarquable. Cependant, le Comité encourage les autorités à prendre des mesures exceptionnelles pour répondre à ses préoccupations. Le Comité note avec une certaine préoccupation en effet qu'il n'existe pas, en Israël, de loi générale interdisant la discrimination contre les femmes, comme le préconise la Convention, notamment dans le domaine familial. Le Comité se déclare enfin préoccupé par le traitement des femmes appartenant à des minorités et la protection semble-t-il inexistante des femmes victimes de violence domestique, notamment.


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CEDAW11/004F